Le Dilemme d’un Archidémon – Tome 8 – Chapitre 2

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Chapitre 2 : Ceux qui se perdent semblent toujours se retrouver dans une ruelle

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Chapitre 2 : Ceux qui se perdent semblent toujours se retrouver dans une ruelle

Partie 1

« Pourquoi !? Pourquoi fais-tu ça, patron ? »

Celui qui gémissait d’une voix comme s’il vomissait du sang était un jeune sorcier. Les flammes enveloppaient tout son entourage, l’odeur étouffant du sang et une brume de sang persistaient partout. C’était le lieu d’un massacre. Il y avait un petit village ici. Ils ne possédaient aucune force, vivaient en paix, et pourtant, c’était aussi le foyer d’un groupe spécial de thérianthropes. Et maintenant, c’était la vue d’une atrocité, couverte de cadavres.

L’homme cria, déconcerté par la scène infernale du feu et des morts.

« Ne l’as-tu pas toi-même  dit !? Tu as créé un monde heureux ! Un monde où personne ne meurt de façon déraisonnable ! C’est pour ça que je t’ai suivi ! »

Mais il n’y avait pas eu de réponse à ses cris. C’était sûrement l’homme le plus stupide ici. Les sorciers étaient l’apogée des méchants qui ne pouvaient pas vivre une vie digne. Ceux qui croyaient aux paroles mielleuses de ces méchants étaient des fous.

Mais quand même, je voulais y croire.

L’homme lui-même n’avait pas fait exception, il avait vécu sa vie en rampant sur le sol comme un sorcier. Il volait les autres comme si c’était parfaitement naturel. Il battait même les gens au point où ils perdaient conscience pour une seule tranche de pain. Et bien sûr, on lui avait fait la même chose. Il était le déchet de la société, et son patron lui avait appris la sorcellerie pour « sauver des personnes ».

Même en tant que déchet humain, on lui avait montré un rêve dans lequel il pourrait peut-être recommencer sa vie. Et le résultat de tout cela était l’enfer sous ses yeux. Le patron en qui il croyait ne lui avait pas donné de réponse, et avant qu’il ne s’en rende compte, ses cris étaient passés de la violence verbale à la plaidoirie.

« Quelqu’un ! Il y a quelqu’un ? Quelqu’un !? Que quelqu’un me réponde ! »

Celui qui avait donné naissance à cet enfer n’était autre que cet homme lui-même. Même lui savait que ses cris étaient complètement à sa convenance.

Même ainsi, même un seul suffit. Que quelqu’un me réponde !

Si quelqu’un était vivant, même lui ne savait pas ce qu’il voulait faire, ce qu’il voulait qu’on lui dise, ou ce qu’il attendait d’eux…

« Uuh… ah… »

Il se balada comme un cadavre quand il entendit soudain un gémissement. Il regarda autour de lui, paniqué, et trouva une femme seule appuyée contre un mur effondré.

« Hé ! Es-tu en… »

Après s’être effondré au sol, l’homme s’était tenu le visage.

Ce n’est pas bon. Elle… ne peut pas être sauvée…

Il y avait une flaque rouge foncé aux pieds de la femme. En regardant de près, son épaule avait été arrachée et la blessure s’étendait jusqu’à sa poitrine. Il pouvait dire que ça allait jusqu’au cœur. C’était une blessure beaucoup trop ingérable pour la pitoyable sorcellerie de cet homme. Néanmoins, la femme respirait encore.

« S’il vous plaît… sauvez… cette enfant… »

La femme tenait une petite fille dans son bras. La fille était enveloppée dans une couverture mouillée pour la protéger des flammes. Elle avait perdu connaissance, mais elle était clairement encore en vie.

« Je m’en occupe. C’est bon, vous n’avez pas besoin de… » il s’avança en se traînant. Au moment où il s’était précipité vers elle, la femme avait cessé de respirer, ce qui lui avait fait dire « … Putain de merde. »

Pourquoi a-t-il appris la sorcellerie ? Il baissa les yeux vers la fille inconsciente.

Juste celle-ci. Peu importe ce que… J’ai besoin de sauver juste celle-ci… Si je ne…

C’était peut-être la seule et unique forme d’expiation permise à cet homme. Et au moment où l’homme était sur le point de prendre la fille dans ses bras…

« Hey, toi. Explique-moi ce qui s’est exactement passé ici. »

Une voix l’appela de derrière. C’était une voix froide qui contenait aussi une rage brûlante. En l’entendant, l’homme avait eu l’impression que son cœur avait été soudainement saisi. Il trembla violemment, mais se retourna quand même. Et celui qui se tenait là était…

L’homme s’était soudainement réveillé. Il n’y avait pas de feu, pas de sang, tout ce qu’il pouvait voir, c’était le plafond en bois au-dessus de lui. Quand les gens sur le sol au-dessus de lui marchaient, des morceaux de débris tombaient. Il tourna la tête sur le côté, et sur la table sale à côté de lui, il vit un cendrier avec une montagne de mégots de cigarettes et deux bouteilles d’alcool tombées. Même si c’était temporaire, c’était sa maison ici dans cette ville, et le canapé bon marché dans lequel il dormait était son lit.

« … Merde. Encore une fois, ce rêve… »

Cinq années s’étaient écoulées depuis ce jour infernal. Et même cinq ans plus tard, cet homme vivait dans la misère.

J’ai un peu trop bu hier…

Aujourd’hui, c’était l’un de ces rares jours de congé. Et apparemment, il avait choisi de se lâcher en buvant beaucoup d’alcool. L’homme s’était poussé vers le haut, et avait été soudainement agressé par un mal de tête sévère et des nausées, le faisant finalement prendre conscience de sa gueule de bois. Il avait enduré la douleur, avait utilisé la sorcellerie pour stimuler son foie et avait attendu que tout l’alcool sorte de son organisme. Et maintenant qu’il avait enfin réussi à se relever, il avait vu des lettres vertes brillantes sur sa table.

« … Vraiment ? »

C’était un message magique envoyé par la sorcellerie, et il informait l’homme que son jour de congé était un rêve vide. Il n’avait pas l’impression que son mal de tête ou ses nausées disparaîtraient de sitôt, mais l’homme prit sa robe avec des mouvements instables et disparut dans le paysage urbain d’une clarté aveuglante.

« Vous m’entendez, les mômes ? Vos adversaires sont fondamentalement plus grands que vous. C’est pourquoi vous devriez y réfléchir avant d’agir. Votre adversaire pensera la même chose. »

Environ une demi-heure s’était écoulée depuis que Zagan avait quitté le château. Il était maintenant dans l’allée où Kuroka Adelhide s’effectuerait plus tard, transmettant la vérité indifféremment, sans une once de compassion dans sa voix. Et autour de lui, il y avait une foule d’enfants à l’air sale. Ils étaient tous des abandonnés, les enfants sans abri de Kianoides.

Il était dans une ruelle du quartier commerçant de Kianoides. Il y avait des ordures éparpillées ici et là avec une odeur piquante qui persistait dans l’air, mais c’était leur lieu de rassemblement. C’était aussi l’ancien repaire de Zagan.

Zagan s’accroupissait pour ramener son regard vers les leurs, et les enfants hochèrent la tête, complètement absorbés par ce qu’il disait. L’un d’eux avait alors levé la main.

« Hé, Archidémon. Alors qu’est-ce qu’on fait ? »

« Être un homme et mourir… c’est ce que j’aimerais dire, mais je ne suis pas venu ici pour parler à des types aussi bien élevés. Il y a des tonnes de façons d’appâter avidement la vie, » répondit Zagan.

Les enfants abandonnés élevèrent tous leur voix dans l’admiration et se penchèrent vers lui.

« Allez-vous nous apprendre la sorcellerie !? »

« Ne soyez pas prétentieux. Comment suis-je censé vous apprendre la sorcellerie alors que vous ne savez même pas lire ? » demanda Zagan.

« Awww… »

On ne pouvait même pas commencer à apprendre la sorcellerie avant d’être au moins capable de lire un grimoire. Mettant de côté les enfants déprimés, Zagan avait alors saisi le bras de l’une des filles qui se trouvaient à proximité.

« Que ferais-tu si on t’attrapait comme ça ? » demanda Zagan.

« Pleurer, » répondit la fille.

« … Il n’y a pas tant de gens que ça qui vous laisserons partir si vous pleurez. Je vous demande comment vous vous protégez, » demanda Zagan.

« Je le frappe ! » « Le mordre ! » « Lui lancer de la terre ! » « Lui cracher dessus ! » « Lui lancer une pierre ! »

Les enfants criaient tout ce qui leur venait à l’esprit, ce à quoi Zagan secoua la tête avec étonnement.

« Ce ne sont que des palliatifs. Aucune de ses solutions ne vous permettra de vous protéger, » dit-il en se tournant vers la fille qu’il tenait encore dans ses bras et en continuant, « Toi, essaie de te tourner le bras vers toi-même et de le replier. Tu n’as pas besoin d’y mettre de la force. Essaie comme si tu essayais de diriger ton pouce vers le bas, » déclara Zagan.

« Hein… ? Comme ça ? Ah ! Je suis sortie ! » s’exclama la fille.

Son bras avait glissé doucement entre les griffes de Zagan. Un groupe d’enfants avait regardé avec surprise, mais l’un d’entre eux était sceptique.

« Ce n’est pas possible. Il a lâché prise, c’est ça ? »

« Si tu le penses, essaie de l’attraper toi-même, » déclara Zagan.

« Je ne vais certainement pas lâcher prise… Uwah ! Tu t’es libérée ! Pourquoi ? Est-ce de la sorcellerie ? » demanda le jeune.

Voyant tous les enfants s’exciter, Zagan secoua la tête.

« Comme si j’allais enseigner quelque chose de si dangereux à une bande de gosses. C’est ce qu’on appelle les arts martiaux. C’est quelque chose que tout le monde peut faire une fois qu’il s’y est habitué. » Cela dit, Zagan avait fait en sorte que les enfants saisissent à nouveau leurs bras. « Cependant, cela vous permet juste de vous échapper d’une prise, mais cela ne vous protège pas. Tiens, prends son bras en réponse et contre-attaque. Alors que tu l’as secoué, maintenant tu attrapes son bras… Ouais, comme ça. Attrape-les au poignet, par contre. Comme ça… »

Zagan avait corrigé la position de la main de l’enfant, la faisant saisir le poignet de l’autre enfant comme s’il s’agissait d’un couvre-main.

« Souviens-toi bien de ça. Pendant que tu l’attrapes, essaie de faire le tour de leur côté tout en marchant vers ton adversaire… Espèce d’imbécile. Pourquoi essaies-tu de rouler ? Je te dis de faire le tour. »

Tandis que l’enfant se tenait sur place comme une ballerine, l’autre enfant tomba doucement par terre.

« Hein… ? Quoi !? »

« OK, pas mal, hein ? C’est une bonne chose, » Zagan avait honnêtement loué l’enfant, ce qui avait fait que l’enfant avait timidement souri en réponse.

« On peut aussi vaincre les adultes avec ça ? »

« Voyons voir… Tu peux au moins les faire tomber avec ça, » répondit Zagan.

Et en entendant cela, les enfants avaient l’air tout simplement déçus.

« Awwwwww ! Cela ne suffit-il pas de les finir ? » « Alors, c’est inutile. » « Ils vont nous frapper tout de suite. Je veux les finir. » « Ouais ! Ouais ! Je veux les tuer ! »

Voyant les enfants commencer à dire des choses assez dangereuses, Zagan avait légèrement frappé l’un d’eux sur la tête.

« Imbéciles. Avez-vous l’intention de tuer quelqu’un pour une seule tranche de pain chaque fois ? Si vous continuez à faire quelque chose comme ça, vous vous ferez immédiatement tuer par ces maudits adultes et ce sera tout. N’oubliez pas ça. Ils sont bien plus forts que vous. Si vous voulez aller aussi loin, alors au moins devenez assez fort pour vous protéger et protégez ceux qui vous entourent avant de le faire, » déclara Zagan.

« Donc c’est bien de le faire… »

Les enfants avaient été quelque peu déconcertés par cette situation.

« C’est pour ça que vous ne pouvez pas utiliser l’art martial que je vous ai appris, » déclara Zagan.

« Whaaaaa ? Alors, à quoi bon l’apprendre ? »

Zagan avait tapoté le front de l’enfant qui l’avait tout de suite coupé avant de continuer.

« Vous êtes tous des gamins impuissants. C’est un inconvénient, mais aussi un avantage. Précisément parce que vous êtes des gosses impuissants, vos crimes seront résolus juste en étant un peu battus. Profitez pleinement du fait que vous êtes des gosses tant que vous le pouvez, » déclara Zagan.

Zagan s’arrêta un moment, puis regarda tous les enfants dans les yeux avant de continuer.

« Cependant, utiliser les arts martiaux, c’est abandonner le fait que vous êtes des gosses. Même si vous en avez l’air, les adultes vous tueraient si vous vous promenez avec une lame, non ? C’est la même chose. »

« … Alors, pourquoi nous apprendre cela ? »

C’était une question évidente, à laquelle Zagan acquiesça d’un regard sincère.

« C’est pour que vous ayez le choix de ne pas mourir tranquillement quand vous ou l’un de vos amis êtes en grand danger, » répondit Zagan.

Tant qu’ils vivaient ici, c’était un moment qui allait sûrement venir.

Surtout s’ils ont des relations avec des sorciers.

C’est précisément la raison pour laquelle, bien que ce soit son ancien repaire où il avait rencontré Marc, Zagan n’avait jamais essayé de s’approcher d’ici avant. Venir ici était son tout dernier recours alors qu’il n’avait vraiment plus d’indices, et c’était exactement la situation difficile dans laquelle il se trouvait.

Zagan avait encore une fois jeté un coup d’œil aux enfants devant lui.

« Quand ce moment viendra, utilisez ces arts martiaux sans hésitation. Jetez le fait que vous êtes des gosses. Si c’est le cas, vous pouvez au moins gagner du temps pour que vous et les autres puissiez vous enfuir. C’est le pouvoir qui vous est donné, » déclara Zagan.

Il n’était pas sûr que ce qu’il disait les ait convaincus. Il y avait ceux qui le regardaient d’un air rebelle, et ceux qui semblaient déconcertés, mais tous les enfants étaient silencieux et l’écoutaient attentivement.

Il remarqua alors qu’il y avait une fille seule qui regardait de l’extérieur de la meute des enfants. Zagan avait déplacé son regard vers elle. Les abandonnés venaient de toutes les races, mais cette fille semblait être une humaine. Elle avait les cheveux blond pâle et les yeux bleu foncé. Si elle portait de beaux vêtements, elle aurait l’air d’une vraie jeune femme, mais malheureusement, elle était couverte de terre et on ne pouvait pas vraiment la distinguer des garçons.

« Qu’est-ce qu’il y a ? Tu as l’air d’avoir quelque chose à dire, » déclara Zagan.

« … Pourquoi un sorcier est-il gentil ? Quelqu’un nous a dit… qu’un adulte qui essaie d’être gentil avec nous ment, » déclara la fille.

Elle avait exprimé sans ambages son hostilité, bien qu’elle l’ait fait avec peur et timidité. Et avec ce ton prudent pointé vers lui, Zagan hocha la tête avec admiration.

« C’est vrai. Vous devriez remercier celui qui vous a donné cette connaissance. Naturellement, je ne vais pas vous apprendre ça gratuitement, » déclara Zagan.

Un regard de peur s’était répandu sur les visages des enfants.

C’est bon pour eux d’avoir peur des sorciers.

Si l’on essayait de vivre dans les ruelles et que l’on faisait perdre leur sentiment de méfiance, seule la mort les attendait. Zagan avait sorti un morceau de papier de sa poche et avait tenté sa chance.

« Avez-vous vu le type sur cette photo ? Celui avec des lunettes au milieu. C’est lui il y a dix ans, donc il devrait être adulte maintenant…, » déclara Zagan.

C’était l’image de trois enfants sales, une reproduction de ce qu’il avait remis à Raphaël le matin. Il n’y avait que trois personnes dans le monde qui pouvaient actuellement utiliser cette sorcellerie, y compris Zagan. Les enfants s’étaient penchés en avant avec curiosité, ayant oublié leur peur d’il y a quelques instants, et avaient inspecté le Mémorandum mystérieusement détaillé. Cependant, aucune des personnes présentes n’avait reconnu le garçon à lunettes.

« Je ne sais pas. » « Je ne l’ai jamais vu. » « Je sais, ce sont des lunettes. » « C’est la première fois que je vois des lunettes. » « Puis-je vendre cette photo ? »

Les enfants disaient tout ce qui leur venait à l’esprit, ce à quoi Zagan les interrogeait davantage sur un ton rassurant.

« Alors, avez-vous déjà vu un type suspect qui était gentil avec vous comme moi ? » demanda Zagan.

« Jamais. » « Hm » « L’Archidémon est le premier. »

Zagan espérait que Marc leur avait enseigné les arts comme il l’avait fait pour Zagan à l’époque, mais cela ne semblait pas être le cas.

« Je vois… Peu importe. Je reviendrai vous enseigner les arts martiaux, alors dites-moi si vous voyez ce type ou si vous vous souvenez de quelque chose à son sujet, » déclara Zagan.

Dix ans s’étaient déjà écoulés depuis la prise de cette photo. La probabilité que ces enfants aient su quoi que ce soit à son sujet était assez faible. Zagan le savait, mais c’était son dernier indice. Tout cela l’avait amené à vouloir juste soupirer. Il n’avait pas pu cacher la déception dans sa voix, et voyant cela, la petite fille de l’extérieur de la meute avait incliné la tête sur le côté. Elle avait ensuite parlé du Mémorandum.

« Hé, est-ce que celui qui est dessiné ici, est-ce toi, Archidémon ? » demanda la fille.

À côté de Marc, il y avait un jeune Zagan qui faisait une grimace désagréable.

« Ouais. C’est moi, ça. Quand j’avais huit ans, » répondit Zagan.

« Tu es plus petit que moi. » « L’Archidémon était aussi un morveux ! »

La jeune fille pencha alors curieusement la tête de l’autre côté.

« Pourquoi es-tu devenu sorcier ? » demanda la fille.

C’était une question naturelle à se poser, mais Zagan avait pointé sa représentation sur le Mémorandum d’une manière fastidieuse.

« J’étais sur le point d’être tué par un sorcier juste après ça, et je le suis devenu après l’avoir tué avant qu’il ne puisse me tuer, » répondit Zagan.

Tous les enfants s’étaient tus devant sa réponse. En d’autres termes, Zagan était l’un de ceux qui avaient mis de côté le fait d’être un morveux parce qu’il était sur le point d’être tué par un adulte. C’était quelque chose que les enfants d’ici pourraient aussi affronter un jour.

Tandis que Zagan se levait, la jeune fille l’appelait timidement. « La prochaine fois, pourrais-tu aussi m’apprendre ces arts martiaux… s’il te plaît ? »

« … La prochaine fois. »

Zagan avait tapoté la fille sur la tête, quand soudain l’un des autres enfants avait élevé la voix, se souvenant soudainement de quelque chose.

« Oh ! »

« Tu te souviens de quelque chose sur ce type ? » demanda Zagan.

Zagan s’était penché sur les déchets et avait interrogé l’enfant, mais l’enfant avait secoué la tête.

« Nuh-uh. Pas ça, non. Est-ce parce que c’est Alshiere Imera que vous nous avez parlé des arts aujourd’hui ? »

Zagan plissa ses sourcils face au mot inconnu.

« C’est quoi cette histoire d’Alshiere… ? » demanda Zagan.

Il ressemblait vaguement au nom d’un certain vampire, ce qui donnait l’impression d’être un mauvais présage. Et tous les enfants avaient échangé leurs regards, y compris la fille de l’extérieur de la meute.

« Archidémon, ne sais-tu pas pour Alshiere Imera ? »

« C’est la première fois que j’en entends parler. On dirait quelque chose en rapport avec l’Église. Qu’est-ce que c’est ? » demanda Zagan.

Zagan interrogea avec curiosité les enfants, qui semblaient soudain tristes… ou plutôt, comme s’ils avaient pitié de lui. Et puis, sans prévenir, ils avaient serré Zagan dans leurs bras.

« Qu’est-ce qui vous prend ? » demanda Zagan.

« Pauvre Archidémon. » « Reviens quand tu veux. » « Je te considère comme un ami, Archidémon ! » « Tu n’es pas seul, Archidémon ! »

« G-Gah ! Laissez-moi partir ! Je suis occupé ! »

Et avec une telle sympathie incompréhensible, Zagan s’était échappé de la ruelle dans la panique.

***

Partie 2

« … Franchement, qu’est-ce qui se passe aujourd’hui ? »

Zagan avait l’impression que des choses étranges se passaient toute la journée. Ce fut le cas avec les enfants abandonnés qui lui manifestèrent soudain une sympathie incompréhensible, mais il y avait aussi le fait que Néphy quitta le château sans lui dire une seule chose, et le fait que Raphaël se comportait bizarrement. En y réfléchissant attentivement, il avait l’impression que Foll était un peu agitée elle aussi.

Il se passait quelque chose, mais il n’en savait rien. C’est ce qu’il avait ressenti. Cela l’inquiétait un peu, mais Zagan secoua la tête.

Il y a trop de problèmes non résolus en même temps, mon esprit est peut-être embrouillé par tout cela.

Le plus gros problème avait été son enquête d’un mois sur Marc, qui n’avait montré absolument aucun progrès. Alshiera l’avait laissé avec les lunettes de Marc comme indice. La sorcellerie pour retrouver la trace du mana du propriétaire alors qu’ils les portaient depuis longtemps n’était pas si compliquée. Cela aurait dû être simple de suivre la piste, mais la piste du mana n’avait mené nulle part.

Il n’avait pas seulement disparu dans des circonstances naturelles. Quelque chose avait effacé toute piste si profondément qu’elle n’avait rien donné. C’était comme s’il était la cible du châtiment d’un Archidémon, comme s’il n’existait pas depuis le tout début.

C’est tout à fait possible, mais Stella et moi avons appris à survivre grâce à lui.

Alors, qu’est-ce que ça voulait dire ? Zagan sortit de l’allée alors qu’il était en pleine réflexion et trouva un visage familier qui l’attendait.

« D’après votre visage, vous n’avez rien trouvé non plus, Sire Zagan. »

C’était un sorcier au visage de lion. Il avait une crinière noire et des yeux dorés. Il était assez grand pour que même Zagan doive le regarder en levant la tête, et on pouvait voir de ses muscles qu’il possédait assez de force pour pulvériser la pierre avec ses poings sans même avoir à compter sur la sorcellerie. Et pourtant, il appartenait à une race de thérianthropes que l’on pouvait placer juste à côté des elfes et des cait siths quand il s’agissait de la rareté de leurs populations.

C’était l’un des subordonnés de confiance de Zagan, son bras droit, Kimaris. C’était vers cet homme que Zagan s’était tourné lorsqu’il avait atteint ses limites en enquêtant seul sur cette affaire. Cependant, contrairement à son apparence féroce, l’expression de Kimaris était assez instable.

« Toutes mes excuses. Je n’ai pas pu retracer l’odeur de ces lunettes jusqu’à son propriétaire, » déclara Kimaris.

Kimaris avait tendu les lunettes de Marc. Pour autant que Zagan le sache, il n’y avait personne au monde qui puisse tracer un parfum mieux que Kimaris. Le sens de l’odorat du cait sith Kuroka était amplifié par sa perte de vue, mais elle ne serait sûrement pas capable de se comparer à ce sorcier.

« Toi aussi, hein… ? Désolé de t’avoir fait suivre cette corvée, » déclara Zagan.

« N’y pensez plus. Je suis pleinement conscient que si vous dites que c’est nécessaire pour vous, Sire Zagan, alors c’est certainement quelque chose qui est nécessaire pour nous aussi, » déclara Kimaris.

« Hmph, tu n’auras rien pour m’avoir flatté, » déclara Zagan.

Kimaris s’était concentré sur l’allée d’où Zagan était sorti.

« Mais ne serait-ce pas mieux d’enseigner aux enfants comment parler avec les autres ? Si c’était quelqu’un d’autre que vous, ça aurait été très sérieux, » déclara Kimaris.

Ils n’avaient pas fait preuve d’un seul soupçon de respect, même lorsqu’ils parlaient à un Archidémon. Zagan pouvait comprendre ce que Kimaris disait, mais tout ce qu’il pouvait faire était de hausser les épaules de toute façon.

« N’est-ce pas risible pour un sorcier de prêcher l’étiquette ? De plus, ces gens survivent intelligemment en accumulant les ordures. Ils seront au moins capables d’acquérir la sagesse tout seuls, » déclara Zagan.

La réponse de Zagan fut étonnante, mais Kimaris trouva cela très agréable et hocha la tête.

« Je pense vraiment que c’est une chance qu’ils vous aient parlé, Sire Zagan, » déclara Kimaris.

« Ceux qui ont de la chance ne seraient pas des sans-abri dans la rue, » déclara Zagan.

Cela dit, ce n’était pas si difficile pour Zagan d’avoir quelqu’un autour de lui qui dirait cela.

Quoi qu’il en soit, ni l’un ni l’autre n’avaient pu trouver d’indices sur Marc, et Kimaris avait acquiescé d’un signe de tête lourd.

« Revenons sur le sujet. Nous n’avons pas pu trouver une seule trace en suivant la piste du mana et en utilisant ton nez. La seule conclusion à laquelle je puisse penser, c’est que quelqu’un au niveau d’un Archidémon effaçant toute trace qui le mènerait à lui, » déclara Zagan.

« J’ai la même pensée. En d’autres termes, cela a été mis en place pour que l’homme n’existe même pas, » déclara Kimaris.

Cela signifiait aussi qu’il y avait une très faible probabilité que Marc soit encore en vie, et qu’il serait infiniment difficile de chercher celui qu’il avait rencontré.

« … Stella a peut-être une idée sur Marc, mais…, » commença Zagan.

Il était peu probable qu’il la reverrait un jour. Et se souvenant du visage de sa vieille amie, Zagan poussa un soupir sans même s’en rendre compte.

« Sire Zagan, est-ce le nom de celle qui était votre bonne amie… !? » demanda Kimaris.

« Ouais. Elle est protégée par Andrealphus en ce moment. C’est mieux pour nous deux si on ne se revoit plus, » déclara Zagan.

C’était Zagan qui avait tué sa famille, et il était tout à fait possible que si elle pouvait se rétablir, elle puisse vivre une vie de citoyenne normale sans aucun lien avec la sorcellerie ou autre chose.

« Poursuivons nos recherches. Il n’y a aucun doute que vous l’avez rencontré ici il y a dix ans, Sire Zagan. Je suis sûr qu’il y a un indice qui traîne, » déclara Kimaris d’un ton encourageant.

« … Mon Dieu, qu’est-ce que c’est que ça ? Je fais en sorte que les autres me prennent en considération, hein ? Eh bien, tu as raison. Continuons à chercher patiemment, » déclara Zagan.

Ce n’était pas comme si Zagan avait abandonné, mais son sourire était si vide que c’était clairement une bravade. Il s’était soudain rappelé quelque chose sur le comportement des enfants tout à l’heure.

« Oh oui, Kimaris. Sais-tu ce qu’est cette chose appelée Alshiere quelque chose ? » demanda Zagan.

Zagan avait fui la réaction incompréhensible des enfants plus tôt, mais il se demandait toujours ce qui se passait exactement. Si c’était quelque chose qui s’était produit alors qu’il poursuivait Marc, alors il sentait qu’il devait au moins comprendre ce que c’était.

Les épaules de Kimaris tremblèrent d’une secousse.

« Je ne sais pas si c’est la même chose que ce à quoi je pense, mais je connais quelque chose avec un nom similaire, » déclara Kimaris.

« … Alors qu’est-ce que c’est ? » demanda Zagan.

Zagan interrogea le lion d’un ton aigu, face à quoi, Kimaris secoua la tête.

« Si vous parlez d’Alshiere Imera, alors je pense que… c’est une cérémonie exaltant un saint de l’Église…, » déclara Kimaris.

« Une cérémonie pour exalter un saint ? Est-ce ce qui se passe aujourd’hui ? » demanda Zagan.

« Qui sait ? Je n’ai jamais entendu la date exacte, mais c’est peut-être le cas, » répondit Kimaris.

Kimaris avait l’air calme quand il avait répondu, mais Zagan n’avait pas négligé le fait que son regard vagabondait un peu.

« Hmm… Tu me caches quelque chose… ou plutôt, il y a quelque chose que tu as du mal à dire ? » dit Zagan en croisant les bras.

« … Sire Zagan, êtes-vous capable de lire dans les pensées ? » demanda Kimaris.

« Je te le demande parce que je ne peux pas… mais, peu importe. Si tu ne me réponds pas, c’est qu’il y a une bonne raison, » déclara Zagan.

« Toutes mes excuses. Mais, ce que je vous ai dit jusqu’ici, c’est la vérité, » déclara Kimaris.

Zagan hocha la tête pour comprendre.

Si Alshiere est une sorte de nom, alors peut-être que la phrase complète signifierait la journée d’Alshiere ?

Le dieu de l’Église n’avait pas de nom. Si le nom signifiait quelqu’un, ce serait le saint. Cependant, ceux que l’on appelle les saints étaient plutôt étranges. Au début, c’était des gens qui avaient fait une sorte de miracle après leur mort. Apparemment, ce n’était pas suffisant d’être un héros qui avait accompli quelque chose d’incroyable en échange de sa vie. Et même lorsqu’ils utilisaient le mot miracle ici, cela couvrait un très large éventail.

C’était comme si un Archange décédé devenait son épée sacrée et se battait comme l’épée elle-même. Ou une femme qui possédait le pouvoir de guérir enchâssant son bras dans une statue afin que tous ceux qui la touchaient même après sa mort soient guéris par elle. Ou celui qui avait laissé derrière lui une source sacrée qui pourrait exorciser les morts-vivants. Il y avait des cas encore plus banals comme celui d’une fille qui sema des graines dans un désert, ou celui d’une fille qui créa une forêt qui ne pousserait que plusieurs centaines d’années plus tard.

Pour être honnête, Zagan soupçonnait que plusieurs d’entre eux étaient en fait des sorciers. Le plus célèbre des miracles, cependant, fut celui qui ressuscita après la mort. C’était très hypocrite de la part de l’Église d’exalter le fait alors qu’ils condamnaient les morts-vivants comme une existence maléfique, mais ce n’était pas une existence incomplète comme des zombies ou des squelettes ou même des vampires qui avaient besoin de sang. Apparemment, c’était une résurrection en tant qu’humain.

Je veux dire, le simple fait qu’ils soient morts et revenus les rend inhumains.

C’est pourquoi Zagan riait avec mépris de l’existence des saints avant, mais dernièrement ses pensées à ce sujet avaient un peu changé.

Il est possible que les histoires des séraphins aient été transposées sur les histoires des saints.

Il n’aurait pas dû être si simple pour Marchosias d’effacer complètement l’histoire de quelque chose qui existait auparavant. Il était possible que des indices sur leur existence lui aient échappé et soient restés dans l’Église. Cela dit, ils étaient encore une existence que Marchosias avait complètement effacée du monde. Cela n’aurait pas dû être quelque chose d’aussi facilement accessible en plein air que même les enfants d’âge préscolaire dans les allées le sachent.

Zagan secoua alors la tête pour changer son train de pensée.

« Eh bien, il est probablement plus rapide d’obtenir des informations sur les affaires de l’Église en demandant aux gens de l’Église, » déclara Zagan.

Chastille… avait apparemment des affaires avec Néphy, mais Zagan pouvait aussi recourir à Kuroka ou Richard, ou même à sa belle-sœur Nephteros qui était là-bas. Mais après avoir murmuré cela, Kimaris avait l’air visiblement agité.

« Sire Zagan ! Si possible, pourriez-vous prétendre que vous n’avez jamais entendu parler d’Alshiere Imera ? » demanda Kimaris.

« Hein ? Est-ce que c’est quelque chose qui me dérange ? N’est-ce pas une cérémonie à l’Église ? » demanda Zagan.

« C’est… si vous le souhaitez, alors je vous répondrai certainement. Mais, juste aujourd’hui… juste pour un jour, j’aimerais que vous détourniez les yeux de ça. »

Zagan ne connaissait pas Kimaris depuis si longtemps, mais c’était la première fois qu’il voyait le lion devenir si désespéré et plaider pour quelque chose.

Si ce type va si loin…

Si c’était quelque chose qui représentait un danger pour Zagan ou quiconque autour de lui, alors cet homme n’agirait certainement pas de cette façon. Et comme on n’y pouvait rien, Zagan acquiesça de la tête.

« J’ai compris. Je n’irai pas plus loin. Est-ce que c’est bien ? » demanda Zagan.

« … Je vous remercie beaucoup, » déclara Kimaris.

Kimaris s’inclina profondément, et Zagan posa sa main sur l’épaule du lion et secoua la tête.

« Arrête ça. J’étais insensible. Il y a des sujets sur lesquels les gens ne veulent pas que les autres leur posent des questions, » déclara Zagan.

Pour Zagan, ces choses étaient peut-être liées à Marc et Stella. Kimaris avait finalement montré une expression soulagée.

« Hm ! Belle Alshiere Imera ! Je peux sentir un pouvoir d’amour aigu partout aujourd’hui ! Toi ! Fille ! Je vais te donner une pomme ! Aujourd’hui est un bon jour ! »

La voix d’une vieille dame retentit dans l’air, et l’expression de Kimaris devint si sombre qu’il eut l’impression que tout le dur labeur qu’il venait d’accomplir était piétiné sous ses pieds.

« Aah... Hm Ça suffit pour aujourd’hui, Kimaris. Tu es occupé, n’est-ce pas ? » demanda Zagan.

« Excusez-moi ! Je dois aller chercher Mlle Gremory ! » déclara Kimaris.

Kimaris avait disparu comme le vent, à la hauteur de son nom de Lame Noire.

J’ai un mauvais pressentiment…

Zagan avait promis qu’il n’irait pas plus loin, mais il avait l’impression que quelque chose d’inquiétant allait se produire. Et avec son bras droit entièrement occupé avec cette vieille femme, Zagan n’avait pas pu se rendre compte qu’une ombre toute seule s’était glissée dans l’allée où il parlait aux enfants.

***

Partie 3

« L’Archidémon est un type bien, hein ? » « Mais j’ai pitié de lui. » « Hmm. » « Partageons notre nourriture avec lui la prochaine fois. » « Idiots. L’Archidémon est un homme important, non ? Il a au moins de la nourriture, tu sais ? » « Ça aurait été bien de l’inclure dans Alshiere Imera. » « Hmm… »

Les enfants dans la ruelle bavardaient en étant de bonne humeur. Et juste un peu plus loin d’eux, une fille, Lisette, les observait simplement. C’est la fille qui avait été la première à se méfier de Zagan. Lisette brossa ses cheveux blond sale et enfouit son visage dans ses genoux.

L’Archidémon était-il ainsi parce qu’il était l’un des nôtres ?

C’était un adulte, mais il n’en avait frappé aucun. Il avait aussi fait des pieds et des mains pour leur enseigner ce qu’il appelait les arts martiaux en échange de quelques questions. Il se peut même que les questions qu’il se posait ne soient qu’une simple excuse, et son intention initiale était d’enseigner aux enfants un moyen de se défendre. C’est du moins ce que pensaient les enfants qui étaient entrés en contact avec lui. Même Lisette avait le sentiment qu’elle voulait le croire.

Mais je ne sais pas si je peux.

Les seuls qui lui avaient donné une place, c’était ces enfants ici, mais Lisette était encore une nouvelle venue et n’avait pas encore pris le sens de la distance qui les séparait.

Je me demande ce que cette personne dirait ici… ?

Elle ne connaissait pas leur nom et ne se souvenait même pas de leur visage. Mais, cette personne était le seul et unique pilier émotionnel du soutien de Lisette. Et alors qu’elle s’asseyait toute seule, la tête basse, l’un des enfants lui fit signe de passer.

« Lisette, viens par ici. C’est plus chaud si on est tous réunis, tu sais ? »

Les enfants qui riaient avaient les épaules serrées l’une contre l’autre, et cela avait l’air chaud.

« … Hmm ! »

Et juste au moment où elle avait rejoint le groupe…

« Hmm, Hm, Hm, Hmm ♪. Je suis un pirate, un pirate égoïste ♪. Aujourd’hui, je vais tuer et voler dans l’ouest ♪. Demain, je serai volé et tué dans l’est ♪. Je suis dans une masse de vols et de meurtres ♪. Qui vais-je voler aujourd’hui ♪ ? Qui va me voler demain ♪ ? »

Une chanson troublante avait soudain retenti dans la ruelle. Elle venait du chemin que Zagan avait pris à gauche, et une seule ombre s’approchait d’eux. La silhouette sombre portait une robe à capuchon et faisait des pas légers comme ceux d’un renard en pleine chasse tout en fredonnant une chanson troublante. Il avait un collier couvert de pierres précieuses accroché à son cou. Il était facile à voir que c’était un sorcier.

Son chant désaccordé était étrange, ce qui rendait l’étrangeté de ce sorcier remarquablement. Il était impossible de sentir dans cette chanson la gentillesse qu’ils avaient reçue de l’Archidémon Zagan auquel ils parlaient tout à l’heure.

« Ce type a l’air dangereux ! »

« Courez ! »

Les enfants s’étaient dispersés dans toutes les directions. Cependant, pour une raison ou une autre, Lisette avait l’impression de reconnaître ce visage sous la capuche, et elle ne pouvait pas courir. Peu de temps après, la silhouette à capuchon s’était arrêtée en plein milieu de l’allée et avait senti l’air piquant comme s’il était agréable.

« Hmm, cet air pourri est tellement nostalgique. »

Lisette pouvait voir un sourire tordu sous la capuche.

« Et il n’est… pas là, hein ? Eh bien, ça fait quelques années depuis, donc on ne peut rien y faire. Je voulais aussi avoir un autre match avec lui… Dommage… »

Le sorcier ne semblait pas déçu du tout, et ses marmonnements semblaient inversement être de la bonne humeur. Le sorcier s’était alors soudain retourné sur place.

« Au fait… as-tu des affaires à voir avec moi ? » demanda le sorcier.

« Eek… »

Lisette se trouvant dans le champ de vision du sorcier.

« Hm ? As-tu un problème d’audition ? Ce n’est pas une bonne attitude à avoir, personne ne t’a appris ça ? Hé, as-tu maudit ton propre malheur de n’avoir jamais appris ça ? » demanda le sorcier.

« Vous avez tort… Je… »

Les genoux de Lisette tremblèrent d’un cliquetis, et elle se retrouva sur ses fesses. C’est certainement ce que signifiait l’expression « perdre la force de ses genoux ». Elle savait qu’elle devait s’enfuir, mais elle ne pouvait pas mettre de force dans ses jambes. Le sorcier au sourire tordu avait ensuite donné un coup de pied par terre vers Lisette.

« Eek ! »

Lisette se couvrit la tête et ferma les yeux. Elle allait sûrement mourir ici. Et contrairement à cette peur dans son cœur, quelque chose de chaud s’enroulait autour du corps de Lisette. Au même moment, le bruit d’un objet écrasé avait retenti dans l’air et quelque chose dégoulinait d’en haut sur elle.

« Hé, je te parle là. Qu’essaies-tu de faire à ma petite sœur ? »

Lisette tourna timidement la tête, et vit la forme grotesque regardant « quelque chose » derrière elle. Il portait aussi une robe comme le sorcier, mais il avait quatre bras recouverts de fourrure qui sortaient de la robe. Elle ne pouvait pas voir son visage parce que le poing du sorcier était planté juste là, mais au moins, elle n’avait jamais vu cette race auparavant.

« Un Brahma… ? Qu’est-ce que tu fous là ? » Le sorcier murmura d’un ton empli de surprise.

« OOOOOOOOOOOOOH ! »

Même avec le visage creusé par le poing du sorcier, ces quatre bras avaient foncé vers lui… non, vers Lisette.

« Bon sang… ne te mord pas la langue, d’accord ? »

Sur ce, le sorcier avait saisi Lisette d’un bras et sauta en arrière. Les quatre bras les poursuivirent de près, et en les regardant maintenant, elle pouvait voir qu’ils étaient plus longs que le sorcier d’environ deux têtes. Si Lisette se tenait debout à côté d’eux, ils auraient vraiment deux fois sa taille. Le coup de poing précédent du sorcier semblait complètement inefficace, et les quatre bras descendirent vers eux dans un barrage.

« Quel mauvais goût ! Tu vas faire en sorte que les filles te détestent comme ça, tu sais ? »

Le sorcier murmura en soupirant, et posa Lisette par terre. Le sorcier avait alors donné un coup de pied qui avait tracé un arc de cercle en l’air. Et au moment où on avait eu l’impression que cette jambe allait entrer en contact avec l’un de ces bras…

« Guh ? »

Les quatre corps armés s’envolent en l’air avec un bruit sourd.

S’agit-il des mêmes arts martiaux que l’Archidémon nous enseignait… ?

Il ne s’agissait pas seulement d’attraper quelqu’un et de le jeter à terre, mais d’un coup de pied à fond. Même en tant qu’une enfant ignorante, elle voyait que le niveau d’habileté et de technique se situait dans une tout autre dimension.

Elle ne comprenait même pas ce qui s’était réellement passé, mais les quatre bras étaient dans le sol. Et l’art du sorcier ne s’arrêta pas là. Les bras tournoyèrent avant de se frapper l’un sur l’autre. Une onde de choc sourde s’était propagée dans l’air à partir de cette frappe. Cependant, la frappe n’avait réussi qu’à se connecter avec le sol après ça.

« … Hmm ? »

Le ton railleur du sorcier s’était évanoui. Les quatre bras posèrent leurs mains sur le sol. Il les utilisa pour se propulser en arrière. Il était maintenant en position, toutes les mains sur le sol, et les deux individus se regardaient fixement l’un et l’autre. Cependant, ils ne s’étaient pas affrontés.

« Grrrrrr. »

Avant même que le sorcier n’ait pu agir, la créature à quatre bras avait sauté en arrière sur une grande distance et avait disparu.

« … On dirait qu’il s’est enfui. »

Le sorcier se tourna finalement vers Lisette.

« Vas-tu bien ? Tu peux te lever ? »

Lisette venait juste de remarquer qu’elle était tombée par terre. Elle avait saisi la main que le sorcier lui tendait et se releva d’une manière ou d’une autre.

« M’avez-vous… sauvée ? »

« On dirait que oui, » répondit l’autre.

« Pourquoi… ? Je ne peux rien… vous donner en retour, » déclara Lisette.

Les adultes n’avaient jamais fait preuve de gentillesse sans rien attendre en retour. Ceux qui l’avaient fait étaient tous des menteurs.

Protégez-vous.

C’était la seule et unique vérité dans le cœur de Lisette. Après qu’elle eut timidement esquissé sa question, le sorcier se mit à rire et se frotta la tête.

« Je viens aussi de cette région. Dans un sens, tu es l’une de mes petites sœurs. Les frères et sœurs des rues ont-ils besoin d’une raison pour se sauver mutuellement ? » demanda le sorcier.

C’était une sorte de devise des habitants de la ville. Les enfants qui vivaient dans la rue et ne faisaient pas confiance aux adultes s’appelaient frères et sœurs de la rue.

Le sorcier enleva alors sa capuche.

« Bon sang de bonsoir. Je suis venu ici pour voir le visage de Zagan, mais je ne peux pas ignorer un frère en crise, non ? » déclara l’homme.

En voyant leur visage, Lisette avait dégluti.

Cette personne… est celle dessinée sur le tableau de l’Archidémon…

Ses vêtements et la couleur de ses yeux étaient différents, mais son profil était certainement similaire. Ses traits étaient exactement ce que l’on pourrait imaginer si dix ans s’étaient écoulés. Mais un de ses yeux était de la même couleur que celui de Zagan, argent.

Et ainsi, le sorcier à l’œil d’argent murmura. « Bref, c’est la première fois que je vois un Brahma. J’ai entendu dire qu’ils ont disparu il y a longtemps. »

L’un d’eux errait en ce moment. C’était à l’origine quelque chose d’impossible, mais aujourd’hui… avec Alshiere Imera, on pouvait dire que c’était inévitable.

***

Partie 4

« Kuroka, ça ne te dérange pas de faire tes courses toute seule ? Kuu devrait-elle venir avec nous ? Kuu doit aller travailler aujourd’hui de toute façon, alors Kuu peut aller jusqu’à mi-chemin, tu vois ? »

Kuu, la colocataire de Kuroka, lui avait crié d’une voix inquiète alors qu’elles étaient toutes les deux assises dans leur chambre à l’église.

« Je vais juste lire les Écritures à l’orphelinat et au bureau public. Tu as des préparatifs pour Alshiere Imera en plus de ton travail, n’est-ce pas, Kuu ? »

« C’est… vrai. »

Kuu avait soufflé sur ses joues dans l’insatisfaction et s’était effondrée sur son lit.

« Tu travailles trop, même si c’est Alshiere Imera, Kuroka. Pourquoi Mlle Nephteros et Mlle Chastille font-elles une pause aujourd’hui ? »

Chastille et Nephteros n’étaient pas à l’église aujourd’hui.

« Lady Chastille travaille trop, alors les Trois Chevaliers l’ont forcée à faire une pause. Mlle Nephteros ne travaille pas pour l’église, » déclara Kuroka.

« Hein ? Elle ne le fait pas ? Je pensais que c’était un gros bonnet comme un prêtre ou un évêque, » déclara Kuu.

Kuu s’était rassise avec une expression surprise, et Kuroka répondit avec un sourire.

« La raison pour laquelle elle prête son aide à l’église est uniquement liée à sa propre bonté. C’est pourquoi tu ne devrais pas être déraisonnable avec elle. N’est-il pas normal de vouloir passer du temps avec sa famille au moins ce jour-là ? » demanda Kuroka.

« Famille… Quel genre de personnes est la famille de Mlle Nephteros ? » demanda Kuu.

« Je ne sais pas moi-même grand-chose, mais elle a apparemment une sœur aînée. Nephteros est sortie la voir aujourd’hui, » déclara Kuroka.

« Hmmmm… une grande sœur, hein ? Est-elle incroyable ? » demanda Kuu.

Kuroka avait mis sa main sur sa poitrine et avait hoché la tête.

 

 

« Elle est merveilleuse, » déclara Kuroka.

« Kuroka, l’as-tu déjà rencontrée ? » demanda Kuu.

« Oui. Quand je suis allée au Liucaon, juste un instant…, » répondit Kuroka.

C’est celle que Monsieur aime.

Elle avait été surprise quand elle l’avait découvert, mais en même temps, elle en était pleinement convaincue. Kuroka tendit la main devant elle. Un monde sans lumière était un peu différent d’un monde complètement noir. Plutôt que de ressembler à une nuit sans lune, c’était plutôt comme un brouillard où on ne pouvait même pas voir ses mains. Ce n’était pas du noir ou du blanc, c’était simplement un monde sans couleur.

Même dans un tel monde, Kuroka avait su créer des souvenirs. Elle était capable d’imaginer les contours de ce qu’elle touchait. Elle pouvait bien comprendre ce qui se trouvait à ses pieds en frappant sa canne contre le sol. C’est ainsi qu’elle avait pu créer en elle une vision du monde extérieur.

Elle pensait qu’elle y était habituée, mais la sensation de pouvoir voir n’avait pas disparu si facilement. De temps en temps, elle était agressée par une angoisse inéluctable.

Est-ce que ma main avait vraiment cinq doigts ? Est-ce simplement de la croyance que j’ai deux bras et deux jambes, et en vérité, il manque des morceaux de mon corps ? Ou peut-être, est-ce que mon visage a une horrible cicatrice dessus, et tout le monde ne veut rien dire à ce sujet ?

Kuroka avait perdu la vue quand elle n’avait pas pu éviter la sorcellerie d’un sorcier, après tout.

Peut-être… c’est pour ça que je n’ai pas pu répondre…

La sœur de Nephteros, Néphy, lui avait dit ce qui suit.

« Je pourrai peut-être guérir vos yeux. »

C’était une haute elfe qui manipulait des miracles dont la nature différait de celle de la sorcellerie. Il y avait une possibilité que ses pouvoirs soient capables de restituer la lumière aux yeux de Kuroka. C’est ce que Néphy lui avait dit. Ce n’était pas une opportunité qu’elle pouvait obtenir, peu importe combien elle le souhaitait. Elle aurait dû s’en occuper immédiatement, même si elle avait dû plaquer son visage contre le sol et mendier.

Et pourtant, je me suis figée, et je ne pouvais pas parler.

Elle avait peur. Et Néphy ne la méprisa pas et ne la gronda pas. Elle avait juste dit qu’elle attendrait. Elle avait dit que c’était bien d’attendre que Kuroka ait bien compris ses sentiments.

Il n’y a aucune chance que je puisse rivaliser.

Tout un mois s’était écoulé depuis, et Kuroka était toujours incapable de faire un pas en avant. Elle ne s’était même pas présenté à la même échelle que Néphy. C’est pourquoi Kuroka la vénérait.

Mis à part cela, Kuroka secoua la tête et se leva.

« Maintenant, il est temps pour moi de me mettre au travail. Kuu, s’il te plaît, fait attention dehors. C’est bien que la ville soit animée aujourd’hui, mais ce sera d’autant plus dangereux, » déclara Kuroka.

« Okaaaaaaay. Prends soin de toi aussi, Kuroka. Ah, attends une seconde, » déclara Kuu.

Au moment où Kuroka allait chercher sa canne, Kuu l’appela pour qu’elle s’arrête.

« Est-ce que quelque chose de… Hein ? Kuu ? » s’exclama Kuroka.

Avant de savoir ce qui se passait, Kuu avait enlacé Kuroka.

« Eheheheh, mmmmmmm. Ce n’est pas grave. Kuu sera avec toi pour toujours, Kuroka, » déclara Kuu.

Ces mots avaient mis le cœur de Kuroka à l’aise dans une mesure mystérieuse. Apparemment, Kuu avait remarqué l’anxiété de Kuroka, et c’était sa réponse.

« … Je te remercie. Allons manger du gâteau à mon retour, » déclara Kuroka.

« Hm ! Kuu fera quelque chose de délicieux ! » déclara Kuu.

Après avoir été réconfortée par sa gentille colocataire, Kuroka avait quitté la chambre.

« Ah ! Kuroka ! Devant ! » cria Kuu.

« Hu — Hrk ! »

Un bruit sourd sortit de la tête de Kuroka.

« Ah, désolé. Est-ce que ça va ? »

Le propriétaire de cette voix était le Chevalier Angélique Richard. Apparemment, il transportait un gros morceau de bois et Kuroka s’y était cognée. Il y avait beaucoup de monde à l’église aujourd’hui, car c’était Alshiere Imera.

« C’est un peu ce qui m’inquiète ici…, » déclara Kuu.

La gentille colocataire de Kuroka s’était accroupie et lui frotta la tête.

Et une heure plus tard, dans le quartier commerçant de Kianoides.

Finalement, j’ai dû me faire aider par toutes sortes de gens.

Même si elle avait un corps qui avait besoin de l’aide des autres, elle avait fini par obtenir plus d’aide que nécessaire.

« J’ai même inquiété Lilith et Selphy…, » murmura Kuroka par inadvertance.

Ses deux amies d’enfance, surtout Lilith, étaient inquiètes et elles étaient venues la voir même après son retour à Kianoides. Elle aussi travaillait maintenant sous la direction de Zagan, de sorte qu’elle se présentait à peu près une fois tous les deux jours.

Kuroka concentra son esprit, se disant qu’elle devait se ressaisir, en se rappelant le contenu des Écritures. C’était l’une des rares choses en lesquelles elle pouvait être utile aux autres sans avoir à balancer une épée. Si elle n’y mettait pas tous ses efforts, qu’est-ce qu’elle pouvait faire ?

Et au moment où elle se ressaisissait, une odeur familière lui arriva au nez.

Toute la fourrure de son corps, du bout de ses oreilles jusqu’à l’extrémité de sa queue, se hérissèrent. Elle ne pouvait pas l’oublier. Cette odeur était précisément la raison pour laquelle Kuroka s’était mise sur le chemin de la vengeance.

Cette odeur… c’est le gars qui a attaqué mon village… !

C’était l’odeur de son ennemi juré qui avait détruit son peuple. Kuroka avait rejoint le côté obscur de l’Église, Azazel, et avait tué beaucoup de sorciers dans le seul but de tuer celui-ci.

Calme-toi. Ce n’est pas à tous les coups le cas…

Elle ne savait pas si c’était exactement la même personne, ou une personne qui leur ressemblait. De plus, quand elle faisait partie d’Azazel, elle ne pouvait pas trouver le sorcier, peu importe combien elle cherchait. C’était beaucoup trop pratique de se retrouver soudainement devant elle comme ça. Kuroka avait essayé de s’en persuader, mais son cœur battant lui avait rappelé des souvenirs de cette tragédie.

Ma vengeance… est déjà terminée…

Elle serra sa canne contre elle. Kuroka s’était jadis déchaînée en raison de sa haine, et Zagan n’avait rien dit et il accepta tout cela. Il n’avait pas besoin de le faire, mais il laissa Kuroka déclencher toute sa rage sur lui. C’est pourquoi la vengeance de Kuroka était déjà terminée.

Mais je veux y mettre fin. Même si ce n’est pas le cas, je veux savoir qui il est exactement.

Kuroka avait réfléchi à l’heure. Elle avait déjà quitté l’Église en pensant qu’elle risquait de se perdre. Elle avait pas mal de temps avant de se mettre au travail. Elle n’avait hésité que quelques secondes avant de suivre cette odeur.

Le quartier commerçant animé portait l’odeur venant des corps de la foule, de la saleté sur le sol et de l’humidité du canal. Et l’odeur spécifique qu’elle poursuivait suivait un chemin étroit qui s’éloignait du quartier commerçant.

L’odeur putride venait d’une direction qui semblait mener à une ruelle. C’était un lieu de rassemblement pour les mendiants, les abandonnés et les voleurs. Même si Kuroka avait sa canne-épée, ce n’était pas un endroit où une fille aveugle pouvait entrer.

Mais, l’odeur va par là.

Kuroka était entrée dans la ruelle, et bizarrement, il ne sentait personne. Normalement, les abandonnés était là, et s’ils ne l’étaient pas, il y avait un ou deux mendiants dans les parages. Mais maintenant, elle ne sentait plus une seule respiration.

Kuroka ne le savait pas. C’est là que Zagan avait été entouré des abandonnés alors qu’il leur enseignait les arts martiaux. Et aussi où Lisette avait été sauvée par le sorcier à l’œil d’argent. Néanmoins, elle savait qu’il se passait quelque chose d’étrange. Elle marcha prudemment et sentit que quelqu’un se tenait en plein milieu de l’allée.

C’est vraiment le même parfum que cette fois-là.

En même temps qu’elle en était sûre, elle s’était rendu compte qu’un autre parfum s’y était mêlé. C’était un peu nostalgique. Mais elle ne se souvenait plus qui c’était exactement. Kuroka avait saisi à nouveau sa canne, comme pour s’encourager.

« Qui êtes-vous ? »

Et c’était ce qu’elle avait réussi à arracher de sa bouche. Il y avait probablement autre chose qu’elle aurait dû demander, elle était consciente de ce qu’elle voulait savoir le plus.

Et… pourquoi avez-vous ciblé mon peuple ?

Quel genre de raison cette personne, qui était probablement un sorcier, avait-elle pour les attaquer ? C’était peut-être une raison complètement inutile et dénuée de sens. Ou peut-être qu’il avait une sorte de rancune profonde. Il était également tout à fait possible que leur véritable cible fût le Ciel sans Lune se trouvant en ce moment entre les mains de Kuroka.

Kuroka voulait savoir, quel que soit le scénario. Qui avait attaqué son peuple ? Et après avoir posé cette question, la personne dans la ruelle s’était lentement tournée vers elle, avait lentement ouvert la bouche et…

« Vous… êtes… Ku… ro… ka ? »

Une question tout à fait imprévisible. Et une voix encore plus imprévisible. Elle lui était familière.

« Qu … oi …? C’est… » L’impossible s’était produit. « Cette voix… est-ce… Maman… ? »

C’était la voix qu’elle voulait entendre une fois de plus, mais qu’elle aurait dû être incapable d’entendre à nouveau. La voix de sa mère.

Pourquoi ? Pourquoi maman est-elle là ?

Est-ce que cela signifie que sa mère avait trahi son peuple le jour de l’attaque ? Et alors que le doute lui était venu à l’esprit, Kuroka avait immédiatement nié cette possibilité.

Maman est morte en me protégeant !

On lui avait coupé le dos, mais elle avait quand même tenu Kuroka dans ses bras et elle s’était enfuie. Kuroka n’oubliera jamais cette chaleur. La raison pour laquelle Kuroka avait pu survivre était que sa mère avait réussi à courir jusqu’à l’église.

Alors… est-ce une illusion faite de sorcellerie ?

Était-elle déjà tombée dans le piège de son ennemi ? Kuroka avait été secouée jusqu’au tréfonds de son cœur alors qu’elle étendait sa main. Elle aurait dû s’enfuir. Même si elle ne l’avait pas fait, elle était capable de l’éviter. Et pourtant, Kuroka n’avait même pas été capable de laisser sortir sa voix dans toute sa panique.

Et puis, un doigt avait touché la joue de Kuroka.

« Non ! »

Kuroka avait essayé par réflexe d’écraser cette main. Cependant, elle n’avait pas été en mesure d’y mettre de la force étant donné son état actuel. Sa précieuse canne lui avait glissé d’entre les mains et s’était envolée ailleurs. Cependant, Kuroka n’avait aucune marge de manœuvre pour s’en inquiéter.

« Oh ! Hooooooooaaaaawawt... ? »

Le cœur de Kuroka avait bondi comme une balle rebondissante, et incapable de le supporter, elle s’était effondrée sur le sol et avait perdu toute énergie dans son corps.

Mon corps est… chaud ?

Elle ne pouvait plus respirer.

Elle ne pouvait pas mettre de force dans ses bras et ses jambes.

Sa conscience s’était dissipée.

Ne sachant pas exactement ce qui arrivait à son corps, Kuroka s’était effondrée au sol.

***

Partie 5

« Ah! C’est Shax ! Je me suis égratigné le genou ! Soigne-moi! » « Donne-moi des bonbons! » « Donne-moi de l’argent! » « Viens vivre avec nous! »

« Gah ! Est-ce que c’est possible, bande de morveux bruyants, de me lâcher ? Allez-vous-en ! J’ai du travail aujourd’hui ! En fait, ne venez pas parler comme ça à un sorcier, bon sang ! Je vais vous manger ! »

Après s’être promené dans le quartier commerçant, Shax avait été envahi par un essaim d’enfants qui étaient sortis de nulle part. Contrairement à sa stature imposante, il était un sorcier au visage un peu insouciant. Il avait quelque chose comme la mi-vingtaine avec des cheveux courts brun-rougeâtre et de la barbe sur le menton. Il avait regardé les enfants avec ses yeux de verre, mais il n’y avait pas de vigueur en lui et il les avait fait rire à la place. Cela faisait plusieurs mois qu’il était venu dans cette ville, mais pour une raison quelconque, ces enfants sales s’étaient attachés à lui.

Merde… C’est pour ça que je déteste sortir pendant la journée !

Ne faisant pas exception à la grande majorité des sorciers, Shax avait l’habitude de s’enfermer dans son sombre laboratoire. La seule raison pour laquelle il se promenait dans le quartier commerçant en plein jour était que quelqu’un l’avait appelé.

Après avoir réussi à chasser les enfants, il était entré dans une taverne. Il avait jeté un coup d’œil, mais n’avait pas vu celui qu’il devait rencontrer ici.

Shax prit place à l’une des tables, et l’une des serveuses vint prendre sa commande. Elle avait des oreilles pointues et des cheveux argentés qui descendaient jusqu’à la taille. Ses yeux forts et volontaires étaient comme des lunes d’or, et sa peau était sombre. C’était une elfe noire rare, mais aussi une célébrité ici à Kianoides.

Hein ? Pourquoi est-elle dans ce genre d’endroit ?

Shax s’était caché le visage avec le menu dans les mains. Ce n’était pas comme s’il serait troublé si elle voyait son visage, mais les sorciers étaient des personnages fondamentalement louches. Il n’avait encore rien fait pour trouver des fautes, mais ce comportement était essentiellement un réflexe conditionné.

Avec le menu sur le visage, il n’avait pas remarqué que le visage de l’elfe s’était complètement raidi face à sa réaction. Elle ne l’avait fait qu’un instant, puis elle avait sorti un petit bloc-notes.

« Bienvenue. Il n’y aura que vous deux ? » demanda l’elfe.

« Hein ? Je suis seul ici… gah, pourquoi tu me suis jusqu’ici ?? »

Avant qu’il ne s’en rende compte, l’un des enfants sans abri d’avant était là à côté de lui, accroché à sa robe.

« J’ai faim… »

L’enfant le regarda d’un regard suppliant, amenant l’elfe noir à regarder Shax avec suspicion.

« Quoi ? N’est-ce pas un client ? » demanda l’elfe noire.

« Missy, je prendrai une bière. Il aura du pain et du lait, » répliqua Shax en soupirant.

« Très bien, » L’elfe noir griffonna sur son mémo et s’en alla sans même un sourire.

C’était Nephteros, non ? Celle de l’Église ?

Il ne comprenait pas du tout ce qui se passait. Elle ne semblait pas le reconnaître, ou peut-être qu’elle ne s’intéressait pas du tout à lui. Après avoir remis la commande à la cuisine, elle était partie prendre les commandes des autres clients. Un peu plus tard, elle avait apporté leur pain et leurs boissons. Shax donna à l’enfant le pain et le lait et le chassa de la taverne.

« Merci Shax. »

« Ouais, ouais, va-t’en. » Shax cria sur l’enfant, qui avait souri et s’était enfui. « … Bon sang, pourquoi ça m’arrive à moi... »

Il poussa un soupir et retourna à son siège, où il trouva un visage familier.

« Yo. Tu es en retard. »

« Chef… c’est mon verre… »

« Pas besoin d’être aussi radin. »

Le sorcier au visage tout à fait malsain, Barbatos, s’en était pris à la bière de Shax qu’il n’avait même pas encore touchée.

« Aaah... Hé, mademoiselle, encore une bière, » déclara Shax.

« Compris. »

L’elfe noire n’avait montré aucun signe de courtoisie, mais elle n’avait pas poussé plus loin. Cependant, il se peut qu’elle n’ait pas voulu s’impliquer davantage. Après qu’elle eut placé une autre bière à leur table, Shax s’était assis en face de Barbatos et l’interrogea avec langueur.

« Alors ? Qu’est-ce que tu veux ? » demanda Shax.

« Un bonus pour toi, » déclara Barbatos.

Barbatos était allé droit au but et avait laissé tomber un livre volumineux sur la table. Habituellement, un bonus impliquait un sac d’argent, et il n’y avait rien de tout cela en vue, mais après avoir vu le titre du livre, Shax avait émis un sifflement.

« Ouf, un grimoire en prime, hein ? Cet Archidémon est vraiment somptueux, hein ? »

Les sorciers avaient certainement besoin d’argent, mais les grimoires ne pouvaient pas nécessairement être obtenus simplement en ayant une grande somme d’argent. En plus de cela, c’était un grimoire écrit par la confidente d’Archidémon Zagan, l’Énchanteresse Gremory. À en juger par le titre, le contenu du livre différait quelque peu de son domaine de spécialité, mais un tel grimoire irait quand même pour plus de mille pièces d’or à une vente aux enchères parmi les sorciers. Selon l’occasion, il était tout à fait possible qu’il puisse même aller pour cinq fois ce prix.

Shax ne soupçonnait même pas pourquoi il recevait un bonus, ni pourquoi un sorcier comme Barbatos le lui remettait personnellement. Et en regardant Shax fêter ça tout seul, Barbatos avait glissé un seul morceau de papier sur la table devant lui.

« Qu’est-ce que c’est que ça… ? » demanda Shax.

Après avoir ramassé le papier, le visage de Shax s’était complètement figé. C’était adressé à Shax, mais l’expéditeur n’était pas son soi-disant patron.

« Hé, Barbatos. Qu’est-ce qui se passe ici ? » demanda Shax.

« Hah? Comme si je le savais. On m’a dit de te remettre ça, c’est tout… Sérieusement, j’en ai marre qu’on me traite comme un homme à tout faire, » déclara Barbatos.

Shax avait été laissé pour compte.

J’ai un mauvais pressentiment à ce sujet…

Il n’avait pas beaucoup d’intuition en tant que sorcier, mais obtenir un ordre de quelqu’un qu’il n’avait pas l’habitude d’obtenir des ordres ne pouvait mener à rien de bon. Dans le pire des cas, il finirait par trahir son patron. C’était quelque chose que Shax lui-même avait déjà fait. Et dans la plupart des cas, une fois qu’il aurait vu le contenu, il ne pourrait pas reculer. Tandis que Shax continuait à regarder fixement la lettre sans l’ouvrir, Barbatos lâcha un murmure comme s’il se souvenait de quelque chose.

« … Bref, qu’est-ce que cette elfe fout à travailler ici ? » demanda Barbatos.

« Et maintenant, tu me demandes ça ? Comme si j’étais au courant, » déclara Shax.

« Hah? Je croyais qu’elle devait sortir avec cette pleurnicharde aujourd’hui, » déclara Barbatos.

« Hein… ? Pleurnicharde ? » demanda Shax.

C’était fatigant d’avoir une conversation avec cet homme. Shax avait mal à la tête et s’était pincé le front. Et pourtant, Barbatos répondit d’un ton étonnamment docile.

« La pleurnicharde et l’elfe n’ont rien dit avant de venir ici. Alors… elles sont restées silencieuses et se sont faufilées ici ? C’est un peu mauvais n’est-ce pas… ? » demanda Barbatos.

« Qu’est-ce que c’est ? On t’a dit de surveiller cette fille ou quoi ? » demanda Shax.

Les elfes étaient extrêmement rares et très précieux pour les sorciers. Un Archidémon voudrait sûrement gérer la présence d’une telle race dans son domaine.

Après avoir été interrogé par Shax, Barbatos avait commencé à enfoncer son petit doigt dans son oreille comme s’il trouvait tout cela gênant.

« Ce n’est pas comme ça, mais c’est peut-être mauvais pour elle de jouer là où ce trou du cul de Zagan et cette pleurnicharde ne peuvent pas la voir… pour l’instant, » déclara Barbatos.

« Pour l’instant ? S’est-il passé quelque chose ? » demanda Shax.

Shax était un peu intéressé, mais en ce moment, son problème était la lettre devant ses yeux. Et juste au moment où il se demandait s’il devait vraiment l’ouvrir ou non…

« Tu ne le sais pas ? Il y a un idiot qui a commencé une chasse aux espèces rares, » déclara Barbatos.

Entendant l’expression « chasse aux espèces rares », Shax avait renversé sa boisson par inadvertance.

« Gah !? Qu’est-ce que tu fous !? » s’écria Barbatos.

« O-Oh… désolé. »

Shax dessina un simple cercle magique en l’air avec son doigt, ramenant la tasse renversée à l’endroit où elle se trouvait avec tout son contenu renversé qui s’était répandu sur la table, le sol et Barbatos. Ce n’était pas si compliqué en termes de sorcellerie, mais il avait fallu beaucoup de talent pour l’assembler si rapidement sur place. En d’autres termes, Shax était un sorcier qui possédait beaucoup d’habileté qui ne le mettrait pas loin derrière Barbatos.

Barbatos pointa un regard aiguisé sur Shax. Son attitude désinvolte avait complètement disparu. Son regard était comme celui d’un chien de chasse qui venait de trouver sa proie.

« Sais-tu quelque chose sur ces chasses ? » demanda Barbatos.

Barbatos était un ancien candidat Archidémon. Il était dans une position où sans Zagan, il aurait probablement lui-même pris le siège de l’Archidémon. Ce n’était pas une situation que Shax pouvait juste essayer d’effacer.

« Non, c’est la première fois que j’en entends parler de celle-ci, » déclara Shax.

« Par celle-là, tu veux dire que tu sais quelque chose d’autre ? » demanda Barbatos.

Shax hocha la tête avec une expression aigre sur son visage.

« Il y a eu un type qui a causé un incident similaire il y a quelque temps. Il s’est mis à chasser et à tuer des espèces rares sans rien laisser se mettre en travers de son chemin. Selon les rumeurs, il aurait tué et anéanti une centaine d’espèces, » expliqua Shax.

Les yeux de Barbatos s’étaient ouverts en grand.

« Oh, je me souviens maintenant. C’était il y a cinq ans ? Quelque chose comme ça s’est produit si je me souviens bien. Ce n’est apparu que dans les journaux ici à Kianoides, mais c’était une histoire assez importante pour que l’Église mette en place une force d’asservissement… En fin de compte, ce type s’est fait avoir, enfin, je crois ? » déclara Barbatos.

« Ouais. Cette ville était sous la protection de l’Archidémon Marchosias, donc ce n’était pas quelque chose à faire. Et donc ce type a fini par faire un pas de trop dans le domaine de Marchosias, » déclara Shax.

« … Et Marchosias s’est occupé de lui ? » demanda Barbatos.

« C’est vrai que Marchosias s’est occupé de lui. Mais je ne sais pas s’il est mort, » déclara Shax.

En d’autres termes, on ne savait pas où il se trouvait.

Barbatos avait alors mis sa main sur son menton alors qu’il réfléchissait.

« Donc ça veut dire… qu’il redevient fou maintenant que Marchosias est mort ? » demanda Barbatos.

« Non, je pense que la probabilité est assez faible, » déclara Shax.

« Pourquoi ? » demanda Barbatos.

« Penses-tu que la punition d’un Archidémon se terminerait par une simple réprimande ? Il a probablement connu un destin où il était mieux de mourir. Même s’il est vivant, il est probablement irrécupérable. Si ce n’est pas le cas…, » déclara Shax.

Shax était incapable de parler du reste.

Sinon… il n’y a aucune chance que je sois en vie.

C’était parce que Shax était très impliqué dans cet incident. Si le coupable était encore en vie, il commencerait sûrement par tuer Shax en premier. Le fait que cela ne s’était pas produit pourrait même être considéré comme une preuve que le coupable était mort.

Shax n’était pas sûr de la façon dont Barbatos interprétait son silence, mais Barbatos acquiesça de la tête.

« On dit que même les autres Archidémons ont tremblé de peur en essayant de ne pas offenser Marchosias. Il n’y a aucune chance que sa punition soit à ce point ridicule, » déclara Barbatos.

« C’est comme ça que ça se passe, » déclara Shax.

Shax ne mentait pas, mais il ne disait pas la vérité.

Celui qui l’a tué n’était pas un sorcier.

Il ne se souvenait pas de son nom. Il était possible qu’il se soit présenté devant Shax, mais le fardeau des péchés de Shax était beaucoup trop lourd pour lui.

Un pouvoir étrange… ou était-ce une arme ? En tout cas, c’était quelqu’un qui avait un pouvoir étrange…

Dans tous les cas, c’était une puissance qui différait de la sorcellerie, des épées sacrées et même de ce que la haute elfe aux côtés de l’Archidémon Zagan pouvait faire. Shax croyait qu’ils agissaient sous le commandement de Marchosias, mais on se demandait pourquoi quelqu’un qui n’était pas un sorcier recevait des ordres de l’Archidémon précédent. Un Archidémon s’appuyant sur un pouvoir autre que la sorcellerie était comme s’il niait sa vie en entier.

En tout cas, Shax avait vu le coupable se faire renverser par ce pouvoir. Cependant, celui qui avait été renversé à ce moment-là semblait savoir de quoi il s’agissait. S’il s’était souvenu correctement…

« Chasseur de séraphin…, » murmura Shax.

Barbatos plissa ses sourcils face au nom que Shax marmonnait de façon irréfléchie.

« Qu’est-ce que c’est ? » demanda Barbatos.

***

Partie 6

« Hein ? Oh, rien du tout. C’est quelque chose que j’ai entendu pendant l’incident. Aucune idée de ce que ça veut dire. Celui qui l’a dit est probablement mort aussi, » déclara Shax.

Shax ne savait pas à quoi Chasseur de Séraphin faisait référence. Cependant, il avait au moins senti que c’était quelque chose de sinistre.

« Sais-tu quelque chose, chef ? » demanda Shax.

« … Je n’en ai aucune idée. Pour l’instant, au moins, » déclara Barbatos.

La réponse de Barbatos semblait impliquer quelque chose, mais il n’avait indiqué aucun signe de fournir lui-même des détails supplémentaires.

Eh bien, ça n’a rien à voir avec moi.

Cependant, Barbatos n’était pas si stupide qu’il laisserait Shax essayer d’esquiver certains détails.

« Alors, tu ne veux pas trop dire le nom de ce type ? » demanda Barbatos.

« Erk. »

Le corps de Shax avait été visiblement secoué.

Merde. Il a vu à travers moi.

Contrairement à Archidémon Zagan, cet homme n’était pas pointilleux sur les moyens qu’il prenait pour atteindre ses objectifs. C’était un vrai sorcier. Il avait plusieurs façons d’éviter un sujet lorsqu’il parlait à quelqu’un qui le surpassait au pouvoir. Il avait essayé de trouver une excuse pendant quelques secondes, mais il avait quand même abandonné. Il avait ensuite prononcé le nom du coupable sur un ton lourd.

« … Shere Khan. »

Même Barbatos avait été surpris et s’était raidi.

« … Sérieusement ? » demanda Barbatos.

« Ouais. »

« Hein, eh bien… comment puis-je le dire… ? Désolé, » déclara Barbatos.

Et maintenant, c’était au tour de Shax d’être décontenancé.

« T’es-tu adouci ? » demanda Shax.

« Hein ? Qu’est-ce qui te fait penser ça ? » demanda Barbatos.

Barbatos n’avait pas conscience de ce fait et regarda Shax d’un air perplexe. Dans le passé, cet homme ne s’excusait jamais, peu importe ce qu’il disait. Bien que le fait qu’il n’ait pas poussé plus loin était quelque chose dont Shax devait être reconnaissant.

C’est déjà fini de toute façon…

Shax avait bu son verre d’un seul coup comme pour effacer de tels souvenirs douloureux. En le regardant faire, Barbatos marmonna indifféremment.

« … Tu sais que ça s’est répandu partout, hein ? »

« PFFFFFFT !? »

Shax avait renversé cette boisson une fois de plus, et tout était revenu à la normale alors qu’il était au bord des larmes. Alors qu’il l’avait fait, Barbatos s’était levé avec assez de vigueur pour donner l’impression que la table allait basculer.

« Hé, lâche-moi un peu, je ne veux pas nettoyer le sol plus que ça, » déclara Shax.

Shax se plaignait, mais Barbatos ne l’entendait pas du tout.

« Hein ? Pourquoi… est-elle ici… !? » s’écria Barbatos.

« Uhhhh, Chef ? » demanda Shax.

« J’ai quelque chose à faire. On en a fini ici, » déclara Barbatos.

Barbatos n’attendit pas sa réponse et disparut dans son ombre.

« Que se passe-t-il avec lui… ? Alors, dois-je payer l’addition ? » demanda Shax.

Tout cela malgré le fait que la seule chose que Shax avait à boire était la bière qu’il avait renversée sur le sol. Après avoir payé la note à contrecœur, Shax s’était rendu dans le quartier commerçant.

Alors… Je suppose que je ne peux pas laisser cette chose scellée, hein… ?

Il avait finalement fait une pause, mais il n’était pas d’humeur non plus à s’enfermer dans son laboratoire maintenant qu’il avait entendu quelque chose de désagréable. Le mécontentement d’un proche associé au patron était aussi la pire chose à faire après le mécontentement du patron lui-même.

« Franchement… C’est dur d’être un sous-fifre. »

Bien qu’ayant un cadre assez large, Shax était maintenant courbé alors qu’il marchait dans les rues, quand soudain, il avait eu l’impression d’entendre le bruit d’une bagarre dans une ruelle voisine.

Chasse aux espèces rares.

Ces informations désagréables se chevauchaient avec les visages des abandonnés.

Il n’y a pas d’espèces rares ou quoi que ce soit parmi ces mômes, n’est-ce pas… ?

Cependant, ces enfants étaient si sales qu’il était parfois difficile de dire de quelle race ils étaient au départ. Il ne serait pas si étrange pour certaines espèces rares d’être présentes parmi eux.

« … Putain de merde. Je suis un faible ici. Peux-tu me lâcher un peu avec toute cette violence ? »

Shax s’était dirigé vers l’allée, s’était caché contre un mur et avait jeté un coup d’œil à l’intérieur. La bagarre semblait avoir pris fin, car il n’avait pu voir personne en bas.

Ou pas, il y a quelqu’un ?

En y regardant de plus près, il pouvait apercevoir quelque chose qui bougeait sur le sol. Il semblait que quelqu’un s’était effondré après avoir peut-être été blessé.

Tch… J’aurais vraiment dû faire semblant de ne rien entendre.

Maintenant qu’il l’avait vu, il ne pouvait pas l’ignorer.

« Hé, il y a quelqu’un ? »

Shax avait essayé d’élever la voix. Même s’il y avait quelqu’un de gênant, il pouvait détourner son regard et partir. Il avait attendu quelques secondes, mais il n’avait senti aucun mouvement dans l’allée autre que celui qui se tortillait au sol.

Je ne suis qu’un vulgaire sorcier qui n’a pas de traits marquants ici. Tu n’auras rien de bon à me tourmenter, tu sais ?

Il chuchota un avertissement dans son propre esprit et s’approcha soigneusement de la figure effondrée. Heureusement, il n’y avait personne de dangereux qui attendait d’attaquer. Et après être arrivé à la figure au sol, il s’était retrouvé avec une découverte complètement décevante.

Qu’est-ce que c’est que ça ?

Il semblait qu’il n’y avait que quelques vêtements en forme de personne sur le sol. Ce qui se tortillait, c’était un chat noir. Shax ne pouvait que rire de s’être ridiculisé en agissant ainsi.

« Je me demandais quel genre de vacarme il se passait ici, mais c’est juste toi, hein, chaton ? Tu t’es battu ou quoi ? »

Shax perdait vraiment la main s’il avait peur d’une bagarre entre chats errants. Il était vraiment beaucoup trop timide si c’était le cas. Il prit le chat dans ses bras et le regarda dans ses yeux rouges. Il était à peu près assez grand pour tenir dans une main, donc c’était quand même un chaton. Peut-être parce qu’il avait peur, son nez se tortillait en reniflant. Il avait vraiment fait ressortir le désir de le protéger par ce comportement.

Aujourd’hui n’a été qu’une série de conneries, alors c’est plutôt apaisant.

Les chats noirs étaient aussi un symbole de chance dans la ville natale de Shax. Bien qu’il semble qu’il y ait d’autres régions du monde qui les considèrent aussi comme des malheurs. Il aimait suffisamment les chats pour envisager d’écrire un jour un livre spéculant sur l’écart entre ces superstitions. Après avoir regardé de plus près le chat, il s’était soudain rendu compte que ses yeux n’étaient concentrés nulle part.

« Hé, tu es aveugle ? Ce n’est pas une blessure récente, hein ? »

En tant que sorcier, Shax avait au moins une connaissance de la sorcellerie curative. S’il s’agissait d’une blessure causée par la bagarre qui s’était produite il y a quelques instants, il serait alors en mesure de la guérir. Mais cette blessure semblait assez ancienne. Cela dit, il ne s’agissait pas non plus d’une malformation congénitale.

Alors, est-ce un chat de compagnie ? Mais il n’a pas de collier.

Sa fourrure était également si jolie qu’elle ne ressemblait pas non plus à un chat errant. Shax pencha avec curiosité la tête sur le côté, puis remarqua qu’un morceau de tissu était coincé dans les pattes du chat.

« Qu’est-ce que c’est ? »

Le temps qu’il s’en aperçoive, le tissu voltigeait jusqu’au sol. C’était indubitablement des sous-vêtements féminins.

Pourquoi diable y a-t-il des sous-vêtements dans les parages… ?

C’était beaucoup trop propre pour être quelque chose qui traînait à l’extérieur pendant un certain temps. Shax regarda autour de lui pour voir s’il était possible que quelqu’un accrochait du linge dans la zone, mais aucune des maisons ici ne semblait équipée pour cela. Il pensait qu’un sorcier idiot avait échoué à essayer une sorte de sorcellerie de transformation, mais les vêtements qui traînaient autour ne correspondaient pas.

Et peut-être parce que la perplexité de Shax lui avait été transmise, le chat avait soudain commencé à se débattre dans ses bras.

« Ne me griffe pas, ça fait mal. Je ne vais pas te manger. »

C’était difficile, mais c’était quand même un chaton, et Shax était toujours un sorcier. Tout cela lui donnait un air très ludique et, inversement, charmant pour lui.

Eh bien… Il mourra probablement si je le laisse ici, je vais m’en occuper un peu.

Shax était un sorcier, mais il était toujours humain. Ce n’était pas comme s’il était incapable de ressentir la solitude. Ce ne serait pas si mal d’avoir au moins un chaton comme colocataire. De plus, même s’il essayait de guérir ses yeux, il ne pouvait rien faire pour le chaton avec la sorcellerie qu’il avait sous la main.

Attendes, il faut d’abord un nom.

Après y avoir réfléchi un peu, Shax sourit largement au chat.

« D’accord ! Tu es Blacky ! Sois reconnaissant que c’est moi qui t’ai trouvé, Blacky ! Noir pour un chat noir. Hahahaha ! Tu l’aimes bien ? »

Le chat l’avait mordu avec emphase au lieu de répondre. Sa réponse était si vigoureuse qu’elle lui avait même fait verser une larme à l’œil.

« Oooh, je suis content que ça te plaise… ! J’ai compris, sérieusement, arrête de mordre, il y a du sang qui coule ! »

Et peut-être l’ayant compris, le chat se raidit comme s’il sombrait dans le désespoir, et cessa de le mordre. Alors, Shax était rentré chez lui avec un saut dans sa démarche comme si sa dépression précédente avait complètement disparu.

 

 

« … Oh mon Dieu. Maintenant, c’est devenu assez gênant. »

Une voix avait retenti dans l’allée après le départ de Shax avec le chat noir. Ensuite, un nuage de chauves-souris battants des ailes s’était rassemblé. Ce n’était pas seulement un ou deux, ou même dix, mais des centaines de chauves-souris, créant un nuage noir. Un bras mince se tendit hors du nuage de chauves-souris, suivi d’une robe noire à volants. Une fille avait émergé avec les cheveux blonds attachés et ses jolies chaussures avaient tapé le sol. Ses yeux s’étaient ouverts, révélant ses pupilles dorées, et elle avait de longs crocs qui passaient à travers ses lèvres. Après avoir sorti sa poupée en peluche à l’air effrayant, couverte de points de suture, le nuage de chauves-souris s’était dissipé. C’était la vampire, Alshiera.

« Donc cette fille est une quatre oreilles. L’atavisme est certainement possible, mais de penser que l’on pourrait le voir avec ce choix du moment… ou peut-être, c’est précisément à cause de ça ? »

La distinction entre les tabaxis et les cait siths était assez ambiguë, mais il y a longtemps il y avait une différence claire entre eux. Kuroka était la seule quatre oreilles de toute la famille Adelhide. De plus, c’est elle que le Ciel sans Lune reconnaissait comme sa maîtresse. Il y avait une raison suffisante de croire qu’elle possédait la capacité perdue de son peuple. La famille Adelhide s’était sûrement préparée pour ce temps à venir.

« Mais, les Adelhides ne sont plus. »

Ils avaient péri, laissant Kuroka toute seule. Alshiera se sentait assez redevable envers eux. C’était peut-être pour ça que Lilith avait pesé sur son esprit plus que nécessaire. Elle voulait être consciente de ce fait.

Alshiera se dirigea vers un coin de l’allée et ramassa une longue tige dans les ordures qui s’y trouvaient. Il semblait que Shax ne l’avait pas remarqué parce qu’il était enterré dans les déchets. C’est la canne-épée que Kuroka avait lâchée, le Ciel sans Lune. Après avoir brossé la saleté et l’avoir nettoyée, elle l’avait serrée contre sa poitrine comme une mère qui embrassait un enfant.

« Comme c’est gênant, Azazel. Est-ce que ça veut dire que je me suis impliquée, je me le demande ? »

Elle était censée être la seule présente ici, mais elle parlait comme si elle parlait à un ami cher. Aucune réponse ne lui revint, mais le vampire acquiesça d’un signe de tête.

« Oui… tu as raison. Cette fille est aussi l’un de mes jolis faons, celle qui suit le grand roi aux yeux d’argent. Je ne peux pas la laisser comme ça, » marmonna Alshiera, puis ouvrit le dos de sa poupée en peluche et bloqua la canne de l’épée à l’intérieur. Il était tout à fait clair qu’il ne pouvait pas tenir, mais la canne-épée avait simplement été aspirée dans le dos de la poupée et avait disparu.

Elle se tourna alors avec force vers le quartier commerçant. C’était soudain devenu beaucoup plus vivant qu’avant. C’était comme si un festival se déroulait.

« Non… Maintenant que j’y pense, c’est un carnaval. »

C’était une fête de l’Église qui se tenait une fois par an. Et dans un virage inhabituel, le sourire d’Alshiera s’effondra, et elle poussa un soupir irrité.

« Alshiere Imera… quel mauvais goût dans les noms ! C’est sûrement la faute de mon cher frère. Aaah, comme c’est vexant ! »

Elle avait soudain jeté sa poupée en peluche par terre et avait commencé à la piétiner. En regardant de près, la poupée semblait porter un gilet d’homme, et pouvait peut-être être vue comme un homme. Après l’avoir piétinée pendant un certain temps, Alshiera s’était satisfaite de ça et avait ramassé la poupée en peluche. Elle avait brossé la terre et l’avait encore une fois étreinte précieusement. Elle avait alors laissé échapper un rire étrange.

« Heeheeheehee, c’est pratiquement un carrefour. Les gens qui se sont déjà rencontrés passeront à nouveau. Comme si tous les destins qui ont commencé il y a cinq ans se croiseraient ici. »

Alshiera avait pris l’ourlet de sa jupe et avait fait un salut.

« De temps en temps, une rencontre va changer une personne. Parfois, cela élargit leur vision des choses, parfois ils auront quelqu’un à protéger, parfois cela leur rappellera le destin, parfois même renversera leur sens des valeurs. Ceux qui se sont rencontrés ici ont eu de tels destins. »

Alshiera chantait vers le ciel et soulevait doucement l’ourlet de sa jupe avec une révérence avant de regarder l’entrée de l’allée.

« Comment allez-vous changer, je me le demande ? »

Un seul personnage se tenait à l’entrée de l’allée, un sorcier au visage de lion.

***

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