Le Dilemme d’un Archidémon – Tome 12 – Chapitre 4

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Chapitre 4 : Un goûter entre démons et anges, c’est l’image même de l’enfer

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Chapitre 4 : Un goûter entre démons et anges, c’est l’image même de l’enfer

Partie 1

« Hmph. Ce n’est pas du tout amusant. Dans le court laps de temps depuis que je l’ai vue pour la dernière fois, une autre peste s’est attachée à ma précieuse poupée. »

Alors qu’elle se préparait à écraser un énorme parasite, un petit s’était joint à la mêlée. Qu’est-ce que cette poupée essayait de faire avec autant de nuisibles autour d’elle ?

Bifrons flottait au-dessus de Kianoides, bien au-delà du rayon de détection de la barrière de Zagan. Il était à environ six mille mètres dans l’air. Il n’y avait presque pas d’oxygène à cette hauteur. De violents coups de vent soufflaient, assez fort pour disperser le corps particulaire de Bifrons en un instant s’il n’était pas un sorcier. Avec Zagan qui le surveillait, Bifrons ne pouvait même pas s’approcher de Kianoides sans prendre une telle mesure.

« Hee hee hee. Ce n’est pas amusant d’avoir des nuisibles autour d’elle, mais la situation est devenue plutôt intéressante. Je suppose qu’il y avait une raison pour que ce vieux schnock de Marchosias installe sa base ici, hein ? Enfin, ce n’est pas vraiment important maintenant. »

Plusieurs acteurs s’étaient réunis à Kianoides. Évidemment, Nephteros était parmi eux, mais il y avait aussi les gens de l’Église et Zagan. En dehors de la ville, il y avait la fille d’Azazel, que Bifrons avait autrefois jetée, et qui servait actuellement Zagan. De plus, il y avait une équipe de deux personnes qui semblaient être les pions de Shere Khan. Il y avait même le rat de laboratoire que Bifrons avait laissé s’échapper juste pour harceler Shere Khan. C’était l’assemblée parfaite pour commencer un thé de folie.

« Venez maintenant ! Commençons le goûter ! Dansons notre danse brisée ! »

Cependant, au moment même où Bifrons avait fait cette déclaration…

« Va faire ça tout seul, » dit une voix.

C’était une voix calme — presque un chuchotement — et pourtant elle avait l’acuité d’un coup de vent déchirant. Au moment où Bifrons essaya de se retourner, l’illusion d’un millier de lames coupant son corps se gravait dans son esprit. Bifrons ne l’avait pas ressentie depuis longtemps, mais il sut immédiatement qu’il s’agissait de la peur — la peur causée par une soif de sang si absurde qu’elle se trouvait dans une dimension entièrement différente de celle des Archidémons comme Zagan ou Shere Khan.

« Ah… Je vois. Maintenant que j’y pense, tu as également séjourné dans cette ville. »

Une fille flottait devant lui avec une arme appelée Chasseur de Séraphins dans sa main. Bifrons était censé être invisible à l’œil nu, s’étant transformé en une masse de cristaux flottants, mais la bouche du canon de l’arme était néanmoins pointée directement sur lui. C’était la plus grande vampire du monde, Alshiera. Bifrons ne pensait pas qu’elle viendrait sur la scène toute seule, mais peut-être avait-elle pensé à cet endroit particulier dans les coulisses.

Argh, ça pourrait être sans espoir. Je ne peux pas la battre.

Si Bifrons avait de la force à revendre comme Andrealphus, il pourrait se débrouiller. S’il avait la ruse de Shere Khan, l’écart de force ne serait qu’un léger désavantage. Cependant, il n’avait rien de tout cela. Alshiera était si puissante qu’Andrealphus semblait mignon. Elle était si impitoyable que Shere Khan avait l’air compatissant. Même un Archidémon serait anéanti au moindre écart de langage.

Elle est si effrayante que j’en ai des frissons !

Jouer avec elle aurait probablement été le frisson ultime. Le simple fait de l’imaginer rendait Bifrons moite. Ce pourrait être le dernier match de sa vie… et le plaisir de gagner un match ingagnable semblait bien plus grand que n’importe quelle sorcellerie. Bifrons ressentait une envie irrésistible de se battre, mais ce n’était pas le moment. Ainsi, il maintenait sa retenue avec le peu de sens qu’il lui restait.

« Vas-tu te promener dans cet espace sans air ? » demanda Bifrons. « Si c’est le cas, veux-tu bien discuter avec moi ? »

« Je suis un peu pressée. Si tu veux jouer, reviens dans une semaine ou deux. »

Chaque mot qu’elle prononçait contenait des traces de mana déchirant l’âme. Face à cette force, quelqu’un du niveau d’un candidat Archidémon aurait vu son esprit détruit en quelques minutes. Malgré cela, Bifrons avait osé essayer de pousser les choses pour le plaisir.

« Et si je disais que je ne veux pas ? » avait-il répliqué.

Alshiera n’avait pas répondu. Au lieu de cela, elle avait simplement retourné un sourire rafraîchissant. Il y avait même un air d’affection en elle, comme si elle était sur le point d’apprendre à un enfant comment faire des bonbons. Existe-t-il quelqu’un qui sourit ainsi alors qu’il est sur le point de tuer quelqu’un ? Bifrons était conscient qu’il était le pire des sorciers, mais elle avait l’impression de leur dire qu’il était encore bien trop mou.

Ahh ! Je ne peux pas en avoir assez de ça ! Je ne peux même pas m’asseoir à la même table de négociation qu’elle !

Le corps de Bifrons avait pris une forme humaine. Ensuite, le sorcier qui ne pouvait être identifié comme un garçon ou une fille avait fait une révérence à Alshiera.

« Héhé. Veux-tu bien pardonner mon manque de courtoisie ? Je n’ose pas me faire une ennemie de toi. »

« Si tu n’essaies pas de mentir un peu mieux, ça ne passe même pas pour une mauvaise blague. »

« Héhé. Quelle sévérité ! Mais c’est vrai que je ne veux pas faire de toi un ennemi. Je n’ai pas beaucoup de temps non plus, vois-tu. »

Bifrons avait commencé par bousculer légèrement les choses. Après tout, ce jeu ne pouvait même pas être établi tant qu’ils n’avaient pas changé la situation d’un tueur et de sa victime. Alshiera avait gardé son sourire, son expression n’avait pas changé alors qu’elle commençait à parler.

« Maintenant que j’y pense, je n’ai pas encore entendu ta réponse. Vas-tu attendre une semaine ou pas ? »

Bifrons n’avait pas l’impression de parler avec un humain. Même Zagan aurait prêté l’oreille s’il s’était dévoilé et avait montré une certaine sincérité. Mais cela n’avait aucun sens face à cette fille, qui dominait tout simplement cet endroit. Bifrons n’avait aucun moyen de la faire bouger. Il n’y avait même pas la possibilité d’envisager cette option.

Alshiera garda son sourire, exposant Bifrons à sa soif de sang. S’il n’avait pas pris la forme d’un humain, son corps particulaire aurait déjà commencé à se désagréger par ses extrémités. C’était probablement la dernière chance pour Bifrons de reculer, mais il avait quand même osé s’avancer.

« Ne penses-tu pas que nous pouvons coopérer ? » avait-il demandé.

Le marteau du chasseur de séraphins s’était armé avec un clic. Bifrons comprit d’instinct la situation. Il avait franchi la ligne et ne pouvait plus reculer. Peu importe la sorcellerie qu’il utiliserait, il n’y avait aucun moyen d’échapper à la visée de cette fille terrifiante. Elle avait déjà le doigt sur la gâchette, il ne restait plus qu’à l’actionner.

Elle ne laisserait plus Bifrons s’échapper. C’était comme s’il avait un couteau pressé contre sa peau, à la fois dans son corps et dans son esprit. Bifrons connaissait une sorcellerie assez similaire à celle-ci — le Regard Enchevêtré, par exemple. Le simple fait de croiser le regard d’un sorcier qui le lançait pouvait détruire l’esprit d’une personne. La soif de sang pur d’Alshiera avait un effet similaire. Même si une sueur froide coulait sur ses joues, Bifrons avait osé parler.

« Changer de réceptacle en tant qu’homoncule. Ma poupée n’a pas souhaité cela, n’est-ce pas ? »

Si ces mots ne suffisaient pas à attirer l’attention d’Alshiera, la partie serait terminée. Bifrons serait effacé de la face du monde. Et pourtant, malgré sa tentative désespérée, Alshiera avait appuyé sur la gâchette sans hésitation.

J’ai merdé !

On aurait dit que le marteau tombait lentement vers le percuteur. Néanmoins, Bifrons avait crié dans une dernière lutte de désespoir.

« Je peux prolonger sa vie ! »

Le silence avait suivi. De manière inattendue, aucune balle ne vint voler vers lui. Levant timidement les yeux vers l’arme, Bifrons vit qu’Alshiera avait arrêté le marteau avec son pouce juste avant qu’il ne frappe. La sueur coulait sur le visage de Bifrons comme une cascade. Cependant, il y avait aussi une petite lueur d’espoir.

« Écoutons ce que tu as à dire, » chuchota Alshiera, fermant un œil comme pour y réfléchir attentivement. Elle garda son arme levée alors qu’elle attendait qu’il parle.

Bifrons avait essayé de calmer les battements terrifiés de son cœur et était entré dans le vif du sujet avec empressement.

« Même après avoir changé de réceptacle, un homoncule reste un homoncule. Même si cela prolonge sa vie, la même chose continuera à se produire toutes les quelques années. Au final, elle ne sera rien de plus qu’un outil jetable — . » Bifrons avait continué franchement, révélant chaque carte de sa main et présentant tous ses objectifs et les moyens de les atteindre. Naturellement, tout cela avait provoqué la colère d’Alshiera. Alors même qu’il parlait, Bifrons avait entrevu sa propre mort à plusieurs reprises. Néanmoins, il avait été autorisé à parler jusqu’à la fin.

Après l’avoir écouté, Alshiera était devenue mortellement silencieuse, gardant son sourire tout le temps. Bifrons parlait depuis une dizaine de minutes. Pendant ce temps, Alshiera n’avait pas baissé le chasseur de séraphins une seule fois. Et par-dessus tout, elle avait maintenu sa soif de sang tout le temps. C’était comme être exposé au Regard Étouffant sans arrêt. C’était suffisant pour même épuiser un Archidémon au point qu’il ne puisse plus bouger un seul muscle.

Ce n’était pas parce que Bifrons était faible. L’Archidémon Furcas avait lui aussi été exposé à ce niveau de soif de sang pendant plusieurs jours, et cela avait fait voler son esprit en éclats, lui faisant oublier qui il était. C’était une forme de torture qui pouvait même pulvériser un Archidémon ayant vécu des siècles. En tant que tel, Bifrons avait été laissé avec une respiration sifflante.

« J’ai dit que je t’écouterais, » dit Alshiera d’un ton agacé. « Mais je n’ai jamais dit que je suivrais tes plans. »

Je suppose que je suis fait…

Bifrons n’avait même pas l’énergie nécessaire pour résister à ce stade, encore moins pour s’échapper. Peut-être pourrait-il simuler sa mort en sacrifiant la moitié de son corps ? Non, de tels tours de passe-passe ne fonctionneraient pas sur cet ennemi. Bifrons n’avait pas réussi à gagner cette partie. La peur qu’il espérait ne s’était même pas manifestée en lui. Son esprit avait été rasé au point qu’il ne pouvait même pas ressentir cette émotion fondamentale.

C’était un pari amusant, mais je voulais quand même gagner…

Bifrons s’était résolu à la mort, mais pour une raison inconnue, Alshiera n’avait pas tiré. Au contraire, elle avait en fait abaissé le Chasseur de Séraphins.

« Tee hee hee. Je n’aime pas du tout ton idée, mais tu peux faire ce que tu veux, » avait-elle dit.

Bifrons avait été complètement choqué par cette réponse inattendue.

« Hmm… ? Tu n’aimes pas ça, mais tu me laisses faire ? »

« Plus la tragédie est grande, plus l’amour brûle passionnément. »

Cette déclaration avait fait éclater de rire Bifrons, oubliant même son propre épuisement.

« Ha ha ha. Tu as vraiment des goûts similaires aux miens, n’est-ce pas ? »

« Arrête avec tes blagues. Je crois simplement en eux. Ils vont sûrement surmonter ça. »

En tout cas, il semblait que Bifrons avait gagné cette partie. Il n’avait pas pu se réjouir de la victoire, cependant. Il ne ressentait que de l’épuisement et du soulagement. Et comme la tension dans l’air avait disparu, la fille avait décidé de murmurer un avertissement.

« Comme c’est malheureux. Si tu avais essayé de dire quelque chose d’aussi peu sincère que “Je veux la sauver”, j’aurais pu appuyer sur la gâchette à ta place. »

En d’autres termes, un seul mensonge aurait conduit à la mort de Bifrons. Le vampire sourit doucement, faisant tournoyer le Chasseur de Séraphins dans sa main, puis le rangea sous sa jupe. Au même moment, son corps se dispersa en d’innombrables chauves-souris. Quand il ne pouvait plus la voir, Bifrons s’était effondré dans l’air vide.

***

Partie 2

« Haaah… C’était terrifiant. Je préfère ne pas l’affronter pendant encore cent ans. »

Même Bifrons ne comprenait pas les véritables intentions d’Alshiera. Finalement, elle ne l’utilisait peut-être que comme tremplin. Néanmoins, il pouvait passer à la partie suivante maintenant. Bifrons allait prouver qu’il pouvait gagner le prochain tour. Même si cela devait être un cauchemar pour Nephteros, il n’y avait plus personne pour l’arrêter.

Le corps de Dexia avait été secoué par un bruit dans son environnement, ce qui l’avait réveillée.

« Argh… »

Un plafond solide et inconnu se trouvait au-dessus de sa tête… et quelque chose comme un rideau drapé sur une fenêtre sur le côté. Après un court moment, elle avait compris qu’elle était à l’intérieur d’un luxueux carrosse. Cependant, au moment où le visage endormi de la fille chat noir était apparu, le corps de Dexia s’était vraiment raidi.

Il y avait une tendre sensation derrière la tête de Dexia. Il semblait qu’elle reposait sur les genoux de la fille. Maintenant qu’elle le savait, sa perplexité ne faisait que croître. Il semblerait que la secousse du chariot ait également réveillé la jeune fille. Elle se frotta lentement les yeux, regardant Dexia avec des pupilles rouges.

« Hmm… Hm… ? Oh, tu es réveillée ? » demande-t-elle.

« Umm, pourquoi… ? » marmonna Dexia, à peine capable de laisser sortir sa voix. Elle était rauque et sa gorge lui faisait terriblement mal.

« Tu n’as pas besoin de te forcer à parler, » dit la fille. « Tu as frôlé la mort pendant toute une journée. »

Maintenant qu’elle l’avait mentionné, Dexia avait remarqué que son corps était aussi lourd que du plomb. Il lui était difficile de lever le bras. Elle ne pouvait même pas se retourner dans son sommeil. Le fait de se reposer sur les genoux de cette fille avait été, contre toute attente, plutôt utile à cet égard.

« C’est notre calèche, » expliqua la jeune fille. « Nous sommes actuellement en route pour Kianoides. Pour l’instant, tu es sous notre protection en tant que prisonnière. Tu es en sécurité pour le moment. »

Voyant que la jeune fille parlait au pluriel, Dexia jeta un coup d’œil dans le carrosse… et ce faisant, elle repéra un jeune homme assis en face d’elles qui ressemblait à un sorcier. Celui-ci était apparemment éveillé depuis le début. Il dirigeait un regard acéré vers Dexia. Il y avait une grande épée grise appuyée contre le mur à côté de lui.

« Son manieur est mort, » dit la fille en remarquant le regard de Dexia. « Nous ne pouvions malheureusement pas la laisser là, alors nous l’avons récupérée. »

« Personnellement, je pense qu’il aurait été préférable de la laisser derrière nous, » dit le sorcier avec un soupir.

« N’est-ce pas toi qui as dit que les subordonnés de Shere Khan le récupéreraient probablement ? »

« C’est vrai, mais si nous gérons mal la situation, tu ne pourras peut-être pas revenir à l’Église. »

« Si ça arrive, alors qu’il en soit ainsi. De toute façon, j’ai tué un Archange. Il n’y a pas d’excuses pour ça. »

Dexia n’arrivait pas à chasser une certaine question de son esprit.

Pourquoi m’a-t-elle sauvée ?

La fille était même allée jusqu’à menacer sa propre position dans l’Église. Quand elle se trouvait à Kianoides, elle avait battu Dexia à plate couture et avait même frappé Aristella. Et pour commencer, les jumelles avaient été celles qui avaient volé la lumière de ses yeux, ce qui signifie qu’elle aurait dû les détester, alors pourquoi sauver Dexia ? Ayant perçu ce qui se passait dans son esprit, la jeune fille donna une pichenette sur le front de Dexia.

« Eh bien, je suis encore un peu en colère, » dit-elle. « Notre jour de congé s’est volatilisé à cause de toi. »

Malgré ce qu’elle disait, il y avait une certaine gentillesse dans son ton, comme si elle parlait à un enfant difficile.

« Mais la personne que je respecte le plus m’a dit un jour que tout méchant devrait avoir au moins une chance de se racheter. C’est tout ce qu’il y a à dire. Oh, c’est vrai, j’ai oublié de te dire quelque chose. »

Dexia avait commencé à imaginer le genre d’abus que cette fille pourrait lui infliger. Elle tremblait de peur lorsque la fille tendit une main, puis elle effleura doucement la tête de Dexia.

« Tu as tenu bon. La façon dont tu t’es battue jusqu’au bout était inspirante. »

Une larme avait coulé le long de la joue de Dexia. Elle ne pensait pas avoir envie de pleurer, mais ses larmes ne voulaient pas s’arrêter.

« Hic… S’il vous plaît… sauvez-la. S’il vous plaît… sauvez Aristella. Sauvez ma sœur. Je ne pourrais pas le faire toute seule. »

La jeune fille avait échangé un regard avec le sorcier, puis avait hoché la tête.

« Repose-toi pour l’instant, » dit-elle en effleurant toujours la tête de Dexia. « Je suis sûre que les choses vont bientôt être très occupées. »

Cette fille aurait dû lui en vouloir, et pourtant, elle avait sauvé Dexia sans la moindre plainte et se montrait si gentille. La pensée « Voilà à quoi ressemble une grande sœur » lui était venue à l’esprit.

J’aurais dû être comme ça avec Aristella… Non, ce n’est pas encore trop tard. Elle est toujours en vie.

Ainsi, Dexia avait juré de la sauver. Elle ne voulait pas que quelqu’un voit son visage pathétique en ce moment, alors elle avait drapé son bras sur sa tête. Elle portait un habit de l’Église, peut-être prêté par cette fille.

Dexia ferma les yeux afin de retrouver son énergie. La somnolence qu’elle avait à peine réussi à repousser la submergea immédiatement. Il ne lui fallut pas longtemps pour perdre conscience, mais au moment où elle s’endormit, elle eut l’impression d’entendre une voix.

« Kurosuke… Es-tu vraiment du genre à garder rancune ? »

« Je ne suis pas comme ça, mais je me disais que c’était peut-être comme un baptême pour les gens qui viennent dans cette ville. »

Dexia ne comprendra le sens de ces mots que lorsque le carrosse atteindra Kianoides, où ils débarqueront devant un magasin de vêtements nommé Pulycla.

« Yahoooooo ! Ça fait longtemps que je n’ai pas eu quelqu’un de nouveau qui mérite d’être taquiné ! »

« Chef ! Elle a l’air blessée, alors vas-y doucement avec elle ! Hein ? Eeep ! Nooon ! Pourquoi Kuu aussi !? »

La dernière chose que Dexia avait vue, c’était un battement d’ailes vertes et une fille vulpine qui criait. La véritable terreur de la ville ne nécessitait aucun pouvoir spécial.

« Hé, Zagan ! Comment vas-tu ? »

Zagan s’arrêta au milieu du quartier commerçant de Kianoides avec une grimace. Il était là pour prendre des nouvelles de Nephteros quand il avait soudainement rencontré un visage familier.

« Que fais-tu ici, Stella ? »

« Rien de sérieux. Je veux dire, on n’a pas vraiment eu l’occasion de parler quand tu es venu à Raziel, non ? »

Stella était officiellement devenue un Archange après la disparition de Michael. Peut-être parce qu’elle n’était pas ici pour affaires, cependant, elle ne portait pas l’Armure Sacrée. Elle portait un uniforme semblable à celui de Chastille et avait l’épée sacrée Zachariel suspendue à sa taille, mais cela ne lui allait pas du tout. Lisette était à côté d’elle, et pour une raison inconnue, Ginias l’était aussi.

Pourquoi cette bande d’enquiquineurs doit-elle passer alors que je suis si occupé ?

Prendre des nouvelles de Nephteros était son premier objectif, puis il devait aller voir Shax et Kuroka avant d’aller chercher un cadeau pour Néphy. Ce dernier point l’inquiétait particulièrement, car il n’avait toujours pas trouvé de bonne idée de cadeau.

« Désolée, Archidémon. Est-ce qu’on vous dérange ? » demanda Lisette en le voyant si abattu.

Contrairement à la première fois qu’il l’avait rencontrée, elle portait une chemise et une jupe en soie finement confectionnées. Elle portait également une fine veste de type blazer. Personne ne douterait d’elle si elle se présentait comme la fille d’une famille aisée. Elle ne ressemblait pas du tout à l’un de ses frères et sœurs de ruelle.

« Tu n’as pas besoin de t’en inquiéter, » dit Zagan en ébouriffant les cheveux de la petite fille en la voyant anxieuse. « C’est elle qu’il faut blâmer pour avoir débarqué comme ça. »

« Quoiiiii ? Est-ce comme ça que tu parles à ta grande sœur ? »

« Ferme-la. Je suis occupé là. Rentre chez toi. »

« Quel culot ! » reprit Ginias. « Stella n’est-elle pas votre sœur aînée ? Comment pouvez-vous la traiter de la sorte ? La famille, et les femmes en particulier, sont censées être traitées avec respect ! »

Celui-ci portait son Armure Sacrée comme il l’avait fait lorsque Zagan l’avait rencontré pour la première fois. Peut-être que cela n’avait rien à voir avec le fait d’être en service. Ses cheveux châtains semblaient un peu plus longs qu’auparavant, et ses yeux verts brillaient d’une lumière extrêmement sérieuse, ne montrant aucune trace d’un quelconque échec passé.

Zagan hocha la tête en entendant ce qu’il venait d’entendre.

Un type avec cette personnalité l’a appelée par son prénom ?

La dernière fois qu’il avait rencontré ce garçon, Ginias avait toujours fait référence aux autres Chevaliers Angéliques en les appelant Lord ou Lady suivi de leur nom de famille. À en juger par le fait qu’il ne se référait pas à Stella comme Lady Diekmeyer, il s’entendait probablement bien avec elle.

« Hein ? Tu es attaché à Stella maintenant ? » demanda Zagan d’un air dubitatif.

« Qu-Quoi !? Je ne suis pas attaché ! Je la respecte simplement ! »

« C’est ce qu’on appelle être attaché… »

C’était tout ce que Zagan avait besoin d’entendre.

Oh, c’est vrai, maintenant que j’y pense, Stella est du genre à réconforter tous les gosses déprimés qu’elle voit, hein ?

Il était facile d’imaginer que ce garçon était une autre de ses victimes. En même temps, il savait maintenant que c’était grâce à Stella que Ginias avait réussi à se remettre après avoir été horriblement piégé par Zagan et presque battu à mort.

Zagan se pinça les sourcils pendant un moment, et après avoir réfléchi, il décida de traiter Ginias de la même manière qu’il avait traité Lisette. Et donc, il ébouriffa ses cheveux.

« Qu’est-ce que vous croyez faire !? » protesta Ginias.

« Je me disais juste qu’elle devait être gênante… »

« Je n’ai pas été un problème ! » s’écria Stella.

« Ne l’as-tu pas battu à plate couture ? » Lisette avait ajouté froidement.

Apparemment, quelque chose s’était réellement passé. Ginias rougit, un mélange compliqué d’émotions sur son visage. Honnêtement, il semblait que les deux petits ne s’entendaient pas vraiment. Quoi qu’il en soit, comme ils se trouvaient tous les quatre au milieu de la route, ils avaient décidé de se déplacer sur le côté. Après avoir pris position à l’entrée d’une ruelle, Stella avait pris la parole avec une expression étrangement sérieuse.

« Alors, euh, qu’est-ce qui t’occupe tant ? »

« Haaah… » Zagan laissa échapper un soupir, puis répondit en se couvrant le visage. « J’ai trouvé la date de l’anniversaire de Néphy, mais je n’arrive pas à trouver un bon cadeau ! »

Le groupe de Stella s’était figé sur place, les yeux écarquillés devant cet aveu choquant. De façon inattendue, celle qui l’avait tout de suite compris était Lisette.

« Je comprends… Ça doit être dur, » avait-elle dit.

« Hm ? Me comprends-tu ? »

« Oui. Je veux dire, on n’a jamais fêté mon anniversaire… »

Ginias s’était soudainement penché en arrière comme s’il avait reçu un coup de poing venant d’une direction inattendue.

***

Partie 3

« Je crois que le mien a été célébré une fois, non… ? » ajouta Stella. « J’ai récupéré le livre d’images que mon frère a volé. »

« Oh, c’est de là que ça vient… ? »

Quand ils étaient orphelins, Stella avait toujours eu un livre d’images avec elle. Elle l’avait même utilisé pour apprendre à Zagan à lire et à écrire. Cependant, Zagan avait tué son grand frère, alors il se sentait un peu gêné de parler de ça.

« Ça veut dire que tu sais quand est ton anniversaire ? » lui demanda Zagan.

Elle avait reçu un cadeau de son vrai frère. Si elle connaissait la bonne façon de célébrer les anniversaires, alors son aide était plus que bienvenue. Pour une raison inconnue, les oreilles de Ginias s’étaient dressées à ce sujet, mais Stella avait froncé les sourcils.

« Uhhh… ? C’était quand déjà ? Cela fait tellement longtemps que je ne me souviens pas vraiment. »

Zagan n’avait jamais vu l’anniversaire de Stella être célébré dans les ruelles. De plus, après l’incident de Decarabia, une partie de sa mémoire avait disparu. Il n’y avait pas grand-chose à faire, alors il s’attendait à ce que ça se passe comme ça.

« Je suppose que tous les gens de la rue sont comme ça, » dit Zagan avec un sourire en coin.

« Ouaip… »

« Comment peut-on même célébrer un anniversaire… ? » murmura Zagan. Il avait réfléchi à cette question un nombre incalculable de fois au cours des derniers jours.

« C’est vraiment un problème difficile…, » dirent Stella et Lisette en hochant sérieusement la tête.

« W-Waaah ! »

Malgré le sérieux de la conversation, Ginias tomba soudain à genoux et fondit en larmes.

« Qu’est-ce qui ne va pas chez toi ? Ne dis rien. »

« Vos vies ont été si dures… ! Je suis si impuissant…, » déclara Ginias, en serrant la main de Zagan. « Je ne suis pas sûr de pouvoir vous aider, mais permettez-moi de vous être utile. Au moins, mon père a fêté mon anniversaire avec moi. »

« Vraiment ? »

Zagan n’aurait jamais imaginé recevoir de l’aide de ce groupe. Tous les trois se pressaient autour de Ginias. Stella en particulier était pratiquement collée à ses côtés, faisant rougir les oreilles du petit garçon pur.

« Alors ? Que fais-tu pour un anniversaire ? » lui demanda-t-elle.

« U-Umm, dans mon cas, j’ai donné des stylos et des montres et autres comme cadeaux. Au moins, jusqu’à il y a deux ans. »

« Jusqu’à il y a deux ans ? Pourquoi ? » demanda Lisette avec curiosité.

« Il y a deux ans, mon père est mort au combat. L’année dernière, je n’avais personne avec qui fêter ça…, » répondit Ginias avec un sourire gêné.

Il y avait eu une bataille majeure il y a un peu plus d’un an. De nombreux chevaliers angéliques et sorciers y avaient trouvé la mort, ainsi que le sage dragon Orobas. C’est également à ce moment-là que l’Archidémon Marchosias avait subi ses blessures mortelles. Il semble que le père de Ginias ait été parmi les défunts. Se sentant un peu mal d’avoir abordé ce sujet, Zagan posa une nouvelle fois sa main sur la tête de Ginias. Stella, et même Lisette, posèrent leurs mains sur ses épaules pour l’aider.

« Hmm, d’accord. Désolé pour cette période à Raziel, » dit Zagan.

« Ne le soyez pas. En fin de compte, je vous suis plutôt redevable. »

Les mauvais sentiments du passé avaient disparu depuis longtemps.

Hmm… Une montre, hein ? Zagan se mit à réfléchir. Ce n’était pas une mauvaise idée. Il n’avait envisagé que les vêtements et autres objets similaires jusqu’à présent, mais des objets plus pratiques comme des stylos ou des montres pourraient également faire l’affaire.

« Ummm, même si c’est un peu présomptueux de ma part de dire ça, est-ce que vous voulez aller chercher quelque chose avec nous maintenant ? » demanda Ginias avec humilité.

« Ah… J’aimerais bien, mais je dois aller rencontrer mes subordonnés. »

Zagan avait fait un signe à Stella. Il avait déjà reçu un rapport indiquant que Shax avait arrêté Dexia. Était-il vraiment possible qu’elle rencontre Lisette ? Mais Stella ne comprenait rien de tout cela et se contentait de le regarder avec confusion. Zagan s’était donc accroupi devant Lisette pour suivre son regard.

« Quelqu’un qui pourrait être de ta famille est avec les gars que je vais rencontrer. Cependant, c’est juste une possibilité. Il est très probable qu’elle ne te connaisse pas du tout. Que veux-tu faire ? »

« Je ne sais pas vraiment… »

« Rien de bon ne peut venir en déterrant son passé. Si c’est ce que tu crois, alors tue le temps avec Stella dans le coin. Mais si tu veux en savoir plus, tu peux venir avec moi. »

Le regard de Lisette erra dans la perplexité créée par cette question soudaine, mais elle retourna tout de même un hochement de tête ferme.

« Je veux… essayer de la rencontrer. Je ne sais pas ce que ça va donner, mais je veux en savoir plus. »

« J’ai compris. Alors, viens avec moi. »

Lisette avait hoché la tête avec raideur lorsque Ginias s’était approché d’elle.

« Que veux-tu ? » demanda-t-elle.

« Stella et moi sommes tes alliés. Peu importe qui tu es ou ce qui arrive, ça ne changera pas. »

« H-Hmph ! »

Il était difficile de dire s’ils s’entendaient ou non, mais au moins, il y avait moins de tension dans l’expression de Lisette après avoir entendu cela. Les quatre individus se mirent à marcher quand soudain, Zagan se tourna vers Stella.

« Ah oui. Stella, j’ai entendu dire que tu avais fini par devenir un archange. Comment ça se passe ? »

« Hmm ? Eh bien, mon professeur a disparu après avoir laissé son épée sacrée derrière lui, donc tout s’est passé très vite. Je suis un amateur complet avec une épée, donc je me demande si c’est vraiment bien. »

Cet Archidémon avait apparemment appris à Stella à utiliser la sorcellerie, mais pas l’épée. Se faire dire qu’elle était libre de choisir dans cet état allait certainement la perturber. Et pourtant, Ginias était intervenu comme s’il avait entendu quelque chose d’impensable.

« Stella. Ce n’est pas de la modestie. Vous vous méprenez sur la réalité. »

« Quoi ? Tu veux dire qu’elle sait très bien utiliser une épée ? » demanda Zagan.

« Bien sûr. Nous, les chevaliers angéliques, sommes classés en fonction de nos compétences avec une lame. En seulement un mois après son intronisation en tant qu’archange, Stella a atteint la deuxième place du classement. C’est le même rang qu’occupait le Seigneur Diekmeyer. Pour autant que je sache, aucun chevalier angélique actif ne peut lui tenir tête. »

En disant aucun Chevalier Angélique actif, il excluait probablement Raphaël. Zagan ne l’avait jamais vu manier l’épée, il n’avait donc aucun moyen de mesurer ses capacités.

Je suppose que c’est logique, vu qu’elle a les pouvoirs d’un sorcier et d’un chevalier angélique.

Andrealphus/Michael avait aussi été appelé le plus fort pour cette raison.

Voyant que Zagan l’avait compris, Ginias avait poursuivi fièrement : « Même Dame Lilqvist, qui est vantée comme une femme au talent terrifiant, n’est classée que numéro quatre, donc ce n’est pas normal, quel que soit le standard. »

En entendant cela, Zagan avait lancé un regard surpris à Stella.

« Si tu t’en prenais à Chastille avec une épée, comment ça se passerait ? »

« Hmm ? Juste une épée ? Je pense que ce serait un match équitable. »

Je comprends pourquoi les chevaliers angéliques lui en veulent de se qualifier d’amatrice…

Stella était apparemment à la hauteur de Chastille, même sans l’utilisation de ses compétences en sorcellerie et en arts martiaux.

« En mettant ça de côté, tu as cette fille Kuroka chez toi, non ? » poursuivit Stella avec un frisson. « Même si je me donnais à fond, je doute de pouvoir la battre. »

Par tout, elle entendait l’utilisation de l’épée sacrée, de ses arts martiaux et de sa sorcellerie. C’était apparemment la raison de la mauvaise auto-évaluation de Stella.

« Elle est plutôt chez Chastille… Attends, elle est vraiment si forte que ça ? »

« Mhm. Je veux dire, non seulement ses yeux sont guéris maintenant, mais tu lui as même fait une Armure Sacrée, non ? Dans ce cas, elle pourrait être un peu hors de ma portée. »

« Quelqu’un qui surpasse de loin Stella ? Qui est-elle ? » demanda Ginias, choqué.

Maintenant que Zagan y pense, il réalisa que Ginias n’avait jamais rencontré Kuroka. Il n’arrivait pas à trouver les mots justes pour l’expliquer.

Serait-ce un problème de dire qu’elle est la fille de Raphaël ?

Lors de l’incident de Raziel, il avait été clairement établi que Raphaël avait tué un cardinal. Les Archanges semblaient comprendre les circonstances, mais il ne pouvait toujours pas être considéré comme innocent par l’Église dans son ensemble. Si Zagan déclarait que Kuroka était la fille de Raphaël, cela pourrait apporter des problèmes inutiles à sa porte. Et honnêtement, elle avait déjà assez de malheurs à gérer à cause de son caractère.

« C’est un chevalier de Liucaon, » dit Zagan, décidant que c’était la réponse la plus sûre. « Un de ceux qu’on appelle des samouraïs. Elle travaille actuellement pour Chastille en tant que membre de l’Église. »

« Liucaon… » Ginias murmura avec un léger tremblement. « Je vois. C’est précisément parce qu’ils possèdent une telle puissance qu’ils peuvent se poser en égaux de tout le continent. »

« Si tu es intéressé, nous sommes en route pour la rencontrer. »

Ginias sursauta sur place et frissonna violemment. En vérité, si Liucaon était toujours indépendant, c’était surtout grâce aux trois Trésors Saints et à la protection que Marchosias leur assurait.

Incidemment, l’Archange en chef Ginias occupait la première place dans ce classement, tandis que Valjakka était apparemment troisième. Mis à part Ginias, qui pouvait utiliser la Confession, Zagan n’avait aucune idée que le traître possédait autant de compétences.

L’achever aurait pu être une mauvaise idée…

Il avait déjà reçu le rapport de Shax sur la mort de Valjakka. L’idiot avait ignoré l’avertissement de Zagan, donc c’était essentiellement du suicide.

Le groupe avait continué à marcher et à parler tout en se dirigeant vers sa destination.

« Nooon ! C’est fini ! Que quelqu’un me sauve ! »

En arrivant, ils avaient été accueillis par les cris d’une fille au cœur complètement brisé.

« Ah… Peut-être que j’aurais dû arriver plus tôt, » dit Zagan avec un énorme soupir.

***

Partie 4

À peu près au même moment, Nephteros s’était retrouvée sur la place devant l’Église, regardant le ciel d’un air hébété.

Je m’aime… hein ?

Elle ne pensait pas avoir complètement abandonné l’autoassistance. Elle voulait faire l’effort de vivre correctement. Est-ce que c’était peut-être différent de s’aimer soi-même ? Elle n’arrivait pas à trouver de réponse en y réfléchissant, mais elle se souvenait encore de sa conversation avec Alshiera l’autre jour.

Je passe mon temps comme d’habitude… C’est aussi une option, non ?

C’était l’une des options qu’Alshiera lui avait présentées. Et honnêtement, cela semblait plus productif que de perdre son temps à réfléchir.

Nephteros passa par l’entrée latérale de la cathédrale et se dirigea vers le bureau de Chastille. L’archange avait passé toute la journée d’hier hors du mode de travail. La question était de savoir si elle avait réussi à récupérer. Si elle ne l’avait pas fait, la paperasse allait commencer à s’accumuler.

« Chastille ? J’entre, » dit Nephteros en frappant à la porte.

« Oh. S’il te plaît, » répondit Chastille en toute confiance.

Nephteros entra dans le bureau et vit la montagne de travail sur le bureau qui attendait Chastille. Nephteros avait déjà fait le tri dans une certaine mesure, mais elle n’avait pas non plus réussi à mettre de l’ordre dans ses sentiments, alors il était difficile de dire si elle avait fait du bon travail.

À en juger par le léger rougissement qui se lisait encore sur le visage de Chastille, il serait plus approprié de dire qu’elle avait été ramenée à la réalité par le travail qui l’attendait plutôt que de dire qu’elle avait récupéré. Après avoir réfléchi un peu plus, Nephteros se rendit compte que Barbatos était introuvable. Cela dit, il était probablement caché dans l’ombre. Elle pouvait même voir l’ombre de Chastille onduler de façon anormale.

On dirait que ça ne sert à rien de demander des conseils ici.

Après avoir entendu Zagan parler de sa durée de vie, la première personne que Nephteros avait pensé à consulter était Chastille. Mais comme elle n’était pas sorcière, elle n’avait aucun moyen de savoir comment sauver un homoncule et elle finirait sûrement par s’en inquiéter encore plus que Nephteros elle-même. Lorsque cette pensée lui était venue à l’esprit, Nephteros avait décidé de ne pas le lui demander.

Pourtant, voir que les choses sont les mêmes que d’habitude est en fait assez relaxant.

Elle avait l’impression que c’était normal qu’elle soit là, qu’elle passe son temps comme toujours, et c’était un énorme soulagement. C’est pourquoi Nephteros avait forcé un sourire comme elle le faisait toujours.

« Bon sang. Fais ton travail correctement aujourd’hui, d’accord ? » dit-elle.

« Argh… Désolée. »

Nephteros avait ensuite réparti la montagne de documents entre ce qui nécessitait la signature de Chastille, ce qu’elle devait confirmer et ce qui ne nécessitait ni l’un ni l’autre. Lorsqu’il ne s’agissait que de confirmation, Nephteros lisait le contenu à haute voix. Nephteros s’occupait seule des documents qui ne nécessitaient pas l’attention de Chastille.

« Ah oui, Nephteros, » dit Chastille en levant la tête des documents. « J’ai raté l’occasion de te demander hier. S’est-il passé quelque chose ? »

Nephteros avait tressailli en raison de l’attaque-surprise soudaine.

« Que veux-tu dire… ? »

« Oh, ne t’occupe pas de moi si ce n’est rien. Je pensais juste que tu avais quelque chose en tête ces derniers jours. Si je peux t’être d’une quelconque aide, n’hésite pas à m’en parler. »

Cette fille était vraiment très vive dans ces moments-là, malgré son comportement habituel. Nephteros savait qu’en essayant d’ignorer la situation, Chastille s’inquiéterait davantage. Et au bout du compte, elle le découvrirait de toute façon, alors après avoir hésité un peu, Nephteros secoua la tête.

« Je m’inquiète de quelque chose… mais c’est un peu difficile à exprimer en ce moment… »

« Je… Je vois… Hmm… Je suppose que ça arrive de temps en temps. »

Nephteros ne pouvait pas dire ce qui lui passait par la tête alors que le rougissement de Chastille s’accentuait. Pourtant, c’était comme d’habitude. Si Nephteros devait passer ses derniers moments avec ceux qu’elle aime, alors cet endroit lui semblait être le bon. Après avoir pensé à cela, elle s’était soudainement rendu compte qu’il manquait quelque chose. Elle regarda autour d’elle et trouva rapidement la réponse.

« Oh, comme c’est étrange. Richard est-il en retard ? »

Richard était le chevalier que Chastille avait désigné comme garde de Nephteros. Il était pratiquement toujours avec elle, c’était donc étrange de ne pas le voir au bureau.

« Richard a demandé une pause aujourd’hui, » dit Chastille avec une expression sinistre et un mouvement de tête.

C’est étrange. D’habitude, il me dit au moins quelque chose…

Nephteros avait senti que quelque chose n’allait pas, mais cela s’était rapidement transformé en culpabilité à cause des mots suivants de Chastille.

« Il semble qu’il soit aussi troublé par quelque chose… »

« Hein ? »

Nephteros était si préoccupée par elle-même qu’elle ne l’avait même pas remarqué.

Maintenant que j’y pense, Richard n’est pas revenu après son entraînement à l’épée hier.

Il venait habituellement au bureau le matin, donc c’était étrange. Nephteros était gênée de ne s’en rendre compte que maintenant. Lorsqu’elle s’était effondrée, il l’avait également sauvée sans rien dire et était resté à ses côtés tout le temps. Tout bien considéré, son comportement était bien trop cruel.

« Chastille, sais-tu où se trouve Richard ? » demanda Nephteros en reposant le fouillis de documents sur la table.

« Umm, désolée. Je n’ai pas… Oh, attends. Barbatos, tu devrais le savoir, non ? » demanda Chastille en regardant ses pieds. L’ombre qui s’y trouvait se tortilla en réponse.

« Huuuh ? Pourquoi dois-je… ? »

« S’il te plaît, Barbatos. Cela concerne mon subordonné. Je suis aussi inquiète. »

« Tch… Bien, je suppose que je peux aider. »

Après un court moment, l’ombre était revenue avec une réponse, disant : « Il est dans la forêt à l’extérieur de la ville pour une raison inconnue. »

« La forêt ? »

Nephteros demanda plus de détails et apprit qu’il se trouvait à l’endroit où Chastille l’avait sauvée lors de l’incident où la chimère de Bifrons l’avait attaquée.

Maintenant que j’y pense, n’est-ce pas aussi le moment où j’ai rencontré Richard pour la première fois ?

C’est à cet endroit qu’il avait perdu plusieurs de ses camarades, donc quelque chose d’important avait dû se produire pour qu’il prenne une pause tout d’un coup pour visiter un tel endroit.

Si quelque chose le perturbe, j’aimerais l’aider.

Elle avait une grande dette envers Richard. De plus, elle n’avait toujours aucune idée de ce qu’elle voulait faire concernant son propre problème, c’est peut-être pour cela qu’elle voulait essayer d’aider ses amis. Oui, c’est justement parce qu’il lui restait si peu de temps qu’elle porta son attention sur son environnement.

« Hum, Chastille… »

« Tu n’as pas besoin de t’inquiéter pour moi. Kuroka sera de retour dans l’après-midi. Vas-y. »

« Merci… Toi aussi, hirsute. »

« Qui diable appelles-tu hirsute ? »

Sur ce, Nephteros s’était mise à courir vers la forêt.

« Hic… Pourquoi… ? Pourquoi moi… ? »

Après être entré dans la boutique où il devait rencontrer ses subordonnés, Zagan avait trouvé une fille accroupie dans un coin. Elle avait été minutieusement utilisée comme poupée d’habillage. Il y avait des sous-vêtements faits entièrement de ficelle — ou peut-être était-ce une sorte de maillot de bain — une sorte de costume avec des oreilles de lapin et une queue, ce vêtement fait uniquement de ceintures qu’on avait fait porter à Néphy auparavant, une sorte de costume d’animal, et beaucoup d’autres articles de ce genre éparpillés un peu partout.

Il semblerait que la récréation soit terminée pour l’instant, aussi la fille portait-elle une tenue correcte. À côté d’elle, Kuroka était pâle comme si elle venait d’être témoin de quelque chose de pitoyable, tout en se tenant devant Shax et en lui couvrant les deux yeux. Il y avait des vêtements éparpillés partout que les hommes ne pouvaient pas voir, donc c’était logique. Le visage satisfait de la vendeuse aviaire Manuela contrastait totalement avec la scène désastreuse.

Lisette était restée bouche bée devant ce spectacle affreux, puis elle haussa soudainement le ton en voyant le visage de la jeune fille accroupie.

« Hein… ? Elle me ressemble… ? »

Réagissant à sa voix, la jeune fille avait relevé la tête et ouvert les yeux.

« Aristella ! Es-tu saine et sauve ? » dit-elle en se levant comme si elle n’arrivait pas à y croire. Elle s’approcha de Lisette et la prit dans ses bras, les larmes aux yeux. « Merci mon Dieu… J’ai cru que je ne pourrais pas te sauver ! »

Elle allait même jusqu’à frotter sa joue contre celle de Lisette, mais cette dernière ne pouvait que la regarder avec perplexité.

« E-Euh, désolée. Vous vous trompez probablement… Je m’appelle Lisette… »

La jeune fille l’avait sans doute remarqué en la serrant dans ses bras. Elle lâcha Lisette dans un étourdissement et fixa son visage.

« Tu es… quelqu’un d’autre ? »

« Désolée. »

La jeune fille semblait sur le point de s’effondrer à genoux en arrivant à cette compréhension, et Lisette l’avait rattrapée dans la panique.

« Allez-vous bien… ? »

« Oui… Désolée. Tu ressembles à ma petite sœur. »

En les observant toutes les deux, Ginias avait la main sur la grande épée dans son dos, mais Zagan lui fit signe de la retirer et secoua la tête. Ginias avait alors baissé sa main.

« D’accord, et si tu essayais aussi des vêtements ? » dit Manuela en s’approchant des deux filles pour les réconforter.

« Retiens-toi, » l’avertit Zagan.

Il pensait que les gens qui ne savaient pas lire l’humeur étaient parfois nécessaires, mais ce n’était pas le cas ici. Honnêtement, il avait envie de chercher quelque chose ici qui pourrait servir de cadeau à Néphy, mais il décida de revenir plus tard.

Le groupe de Zagan était devenu des habitués de la boutique, et on lui avait donc facilement prêté le bureau situé à l’arrière. C’était une pièce raisonnablement spacieuse. Il y avait deux canapés face à face avec une petite table entre eux. Des boucliers et d’autres ornements de ce genre décoraient les murs comme dans un vrai magasin d’équipement, ainsi qu’une sorte de certificat.

« Je m’appelle Dexia. Je suis… j’étais… La subordonnée de Shere Khan, » dit la jeune fille après avoir réussi à se calmer.

Zagan, Shax, Kuroka, Dexia, Lisette, Stella, et Ginias étaient dans la pièce. C’était un peu étroit avec tout le monde présent, mais la pièce était suffisante pour leurs besoins. Zagan et Stella s’étaient assis sur un canapé, tandis que Dexia et Lisette s’étaient assises sur celui qui leur faisait face. Malheureusement, Zagan avait dû demander à Shax, Kuroka et Ginias de se tenir debout. Comme il s’agissait techniquement d’un interrogatoire, l’ordre des sièges était obligatoire.

Après avoir écouté sa présentation simple, Zagan s’était tourné vers Kuroka et Shax.

« Est-ce qu’ils vous ont suivi ? » avait-il demandé.

« Oui, nous avons été correctement suivis jusqu’ici, » répondit Kuroka.

Il y avait bien sûr une raison pour que tous deux reviennent en calèche au lieu d’utiliser le transfert malgré la garde d’un personnage clé comme Dexia.

Je ne peux pas écarter la possibilité d’extraire des informations des chiens de Shere Khan.

Kuroka et Shax avaient naturellement informé Zagan des deux hommes qu’ils avaient affrontés et qui semblaient être des subordonnés de Shere Khan. Leurs objectifs et leurs capacités étaient un mystère, il y avait donc un risque que le carrosse soit attaqué, mais c’était une opportunité bien trop précieuse pour la négliger.

C’est pourquoi il les avait fait revenir de manière à ce qu’il soit facile pour quiconque de les poursuivre. Une fois qu’ils avaient atteint Kianoides, ils étaient dans la barrière de Zagan. Quiconque pensait pouvoir s’échapper de la paume d’un Archidémon pouvait essayer. Zagan avait cherché dans la barrière toute personne qui pourrait correspondre au profil et avait eu deux résultats positifs. Il semblerait qu’ils observaient cette boutique de loin. Il n’avait pas l’intention d’impliquer la boutique de Manuela, aussi était-il déjà prêt à lancer une attaque préventive s’il semblait qu’ils allaient tenter quelque chose.

***

Partie 5

« Alors ? Tu étais autrefois la subordonnée de Shere Khan, celle qui traînait dans cette ville il y a un mois, n’est-ce pas ? » demanda Zagan à Dexia.

« Oui…, » répondit Dexia, en hochant la tête avec raideur.

C’était la première fois que Zagan affrontait Azazel.

« J’ai une tonne de questions à te poser, mais laisse-moi d’abord vérifier une chose, » dit Zagan, attendant qu’elle se prépare. Après un court instant, Dexia lui fit timidement un signe de tête. « Es-tu consciente de ce que tu es exactement ? »

Lisette et Ginias étaient les seuls à avoir l’air de ne pas savoir ce que ça voulait dire.

« Je suis un familier créé par Shere Khan, » répondit Dexia en mettant sa main sur sa poitrine. « Ma sœur Aristella est pareille. Il nous appelle les Nephilim. Nous avons été créés dans le but de lui servir de bras et de jambes après qu’il ait perdu l’usage de son corps… Ou, c’était notre but… »

Les yeux de Lisette s’ouvrirent face à cette révélation, mais Zagan décida de laisser cela pour plus tard.

Nephilim… ?

C’était étrangement similaire au nom complet de Néphy, Néphélia. L’expression de Zagan devint sinistre. Il ne pensait pas que Shere Khan visait directement Néphy, mais y avait-il encore une sorte de relation entre eux ? Il valait mieux se méfier de cette possibilité. De toute façon, contrairement à Néphy, Dexia avait une bonne idée de ce qu’elle était exactement. Même si, au final, elle était à peu près dans la même situation après avoir été abandonnée.

« Tu as dit que Shere Khan vous a fait. Sais-tu quelque chose sur elle ? » demanda Zagan, en pointant ses yeux vers Lisette.

Dexia secoua la tête. « Je ne… Je n’ai jamais entendu parler d’avoir des prédécesseurs. S’il y avait eu un déserteur avant nous, je ne pense pas que j’aurais pu m’échapper comme ça… »

Shere Khan était un Archidémon. Il serait ridicule pour lui de n’avoir aucune contre-mesure en place si l’un de ses animaux domestiques avait déjà échappé à sa laisse. Dans ce cas, Lisette était différente des jumelles. Quoi qu’il en soit, elle avait été attaquée pendant l’Alshiere Imera. C’était encore un mystère, mais au moins, Dexia n’en avait pas été informée.

Je suppose qu’il est possible que Lisette ait été utilisée comme modèle pour les créer ?

C’était à peu près la seule conjecture que Zagan pouvait faire sur la base des informations qu’il avait.

« Lisette. Depuis combien de temps vis-tu dans les ruelles ? » demanda Zagan.

« Umm, je ne me souviens pas vraiment. Je suppose… il y a environ cinq ans ? »

Zagan avait retenu une grimace.

La réponse est toujours il y a cinq ans…

Elle avait certainement été impliquée avec Shere Khan d’une manière ou d’une autre.

« Question suivante. Quel est ton objectif maintenant ? » demanda Zagan à Dexia.

« Je veux… sauver Aristella. »

C’était la fille que Zagan avait échoué à sauver une fois. À l’époque, il avait à peine réussi à la maintenir en vie, mais la majorité de son corps avait été emporté par le Chasseur de Séraphins d’Alshiera.

« Est-elle en vie ? » demanda Zagan.

« Je pense que oui… »

« Je vois. Alors, question suivante. Si Shere Khan te disait : “Je vais sauver ta sœur, alors reviens”, que ferais-tu ? »

Dexia s’était raidie. C’était une question cruelle, mais nécessaire. Sa réponse déciderait de la façon dont Zagan la traiterait. Elle serra les poings sur ses genoux et trembla, ses doigts devenant blancs à cause de sa poigne. Lisette se pencha vers elle et lui tendit la main, serrant doucement les mains de Dexia. Les yeux de Dexia s’écarquillèrent d’étonnement, puis elle rassembla sa détermination et donna sa réponse à Zagan.

« Aristella… a pleuré. Elle a dit… qu’elle ne voulait pas mourir. Elle a dit qu’elle détestait l’idée d’être jetée. Malgré cela, Shere Khan l’a utilisé comme un outil. Donc… je ne peux pas le lui pardonner. »

Elle avait regardé Zagan droit dans les yeux sans aucune hésitation. C’était comme si elle n’avait plus de raison de vivre.

« Je vois. Très bien. Je vais te placer sous ma protection. Je te donnerai un coup de main pour sauver ta sœur. »

« V-Vraiment… ? »

« Tu vas recracher tout ce que tu sais, bien sûr. C’est ma condition. »

« Merci… beaucoup…, » dit Dexia en s’inclinant.

« C’est génial, non ? » dit Lisette avec un sourire.

« M-Mm. »

En les observant toutes les deux, Stella avait touché les côtes de Zagan.

« Ha ha, c’est vraiment génial, » dit-elle en hochant la tête, puis elle baissa la voix pour que seul Zagan puisse l’entendre. « Zagan, tu avais prévu de la tuer en fonction de sa réponse, n’est-ce pas ? »

« Hmph. Bien sûr que oui. Je ne suis pas du genre à protéger un idiot frivole qui ne dit quelque chose que pour sauver les apparences dans une telle situation. »

Zagan n’était pas un philanthrope. Il lui avait simplement donné une chance parce que Shax et Kuroka l’avaient recueillie. Sans cela, il n’avait pas besoin de sauver le familier de Shere Khan. En fait, il y avait une tonne d’informations qu’il pouvait obtenir par la dissection et l’expérimentation. Maintenant qu’il savait où se trouvait l’Archidémon, ces informations l’emportaient clairement sur la vie de Dexia.

Eh bien, j’ai cependant fini par la sauver à la place.

Il avait encore une affaire gênante à gérer maintenant, mais une fois cette décision prise, Zagan ne l’abandonnerait pas.

« Patron, Bifrons est apparemment celui qui a laissé s’échapper cette petite miss, » dit Shax depuis sa position près du mur. « Qu’est-ce que tu en penses ? »

Le petit Archidémon était un génie pour harceler les autres. S’il était impliqué, alors il n’y avait aucun moyen de savoir si Dexia était une sorte de piège, mais Zagan secoua quand même la tête.

« Tu n’as pas besoin de t’inquiéter pour Bifrons, » dit-il. « À en juger par la personnalité de ce type, Dexia n’est pas si intéressante que ça. Il n’y a probablement pas de sens profond à tout cela, à part harceler un peu Shere Khan. Tout au plus, Bifrons espère probablement que quelque chose d’intéressant en ressortira. »

Que ce soit contre Zagan ou Shere Khan, si Bifrons avait sérieusement l’intention de harceler, il créerait une situation avec beaucoup moins de choix disponibles. Par exemple, jeter Dexia en ville de telle manière que Zagan soit obligé de la sauver. Zagan avait décidé de la sauver principalement sur un coup de tête. La probabilité qu’il le fasse était bien trop faible pour que cela fasse partie de la machination de Bifrons.

Maintenant qu’elle a réussi à aller aussi loin, il est possible que nous ayons attiré l’attention de Bifrons.

Franchement, Zagan trouvait plutôt improbable que Bifrons fasse naître un quelconque complot à ce stade.

« Si tu le dis, patron. Je vais faire ce que tu dis, » dit Shax en haussant les épaules avant de sortir une épée. « Alors, qu’en est-il de ceci ? »

« Une épée sacrée ? De qui s’agit-il… ? » demanda Ginias d’une voix tremblante.

« Un type appelé Valjakka. Il y a eu quelques problèmes…, » commença Shax.

« Il a apparemment été tué par un subordonné de Shere Khan. Il était fort probable qu’elle soit volée si elle restait là-bas, alors je leur ai ordonné de la récupérer. »

Zagan avait rejeté toute la responsabilité sur Shere Khan sans hésiter. Kuroka était décontenancée, mais Shax voyait immédiatement où cela menait et il avait feint une expression de chagrin.

« Désolé, » avait-il dit. « Nous aurions pu le sauver si nous étions arrivés un peu plus vite, mais nous n’avons pas réussi. C’est pourquoi nous avons pensé à au moins reprendre son épée. Utilisez-la en sa mémoire. »

« Je vous suis redevable… Vous avez mes remerciements, » dit Ginias en prenant l’épée sacrée avec une expression de douleur, même si ces mots venaient d’un sorcier.

Ce type est vraiment doué pour tout, sauf pour traiter avec Kuroka…

L’instinct de Zagan avait vu juste quand il s’agissait de le recommander comme prochain Archidémon. Zagan n’avait pas vraiment envie de le faire, mais Shax était déjà suffisamment capable pour en être un.

« Ginias, est-ce que cela va ? » demanda Zagan, affichant un regard comme s’il respectait un chevalier angélique disparu.

« Bien sûr que non… Pourtant, penser qu’un homme aussi doué puisse perdre au combat… »

Valjakka avait apparemment été populaire parmi ses collègues. Il y avait une véritable lamentation dans la voix de Ginias.

Eh bien, je suppose que je garderai secret le fait qu’il était l’espion de Shere Khan.

Zagan n’avait pas une once de sympathie pour l’homme, mais il n’était pas nécessaire de remuer le couteau dans la plaie des vivants. C’était un peu comme la pitié d’un samouraï — c’est ce que l’on disait en Liucaon. Kuroka semblait trouver cela quelque peu discutable, mais les choses s’étaient arrangées proprement comme ça.

Il y a maintenant un siège vacant parmi les Archanges. Comment cela va-t-il affecter les choses étant donné le timing… ?

Malgré sa nature pourrie, Valjakka avait apparemment été assez compétent. Zagan ne pouvait pas dire quel genre d’ombre cela jetterait sur l’Église. Et juste au moment où il commençait à y penser…

Hm ? Où va Nephteros, bon sang ?

La barrière qui couvrait la ville avait détecté sa belle-sœur qui se dirigeait vers la forêt.

Après avoir couru dans la forêt pendant un certain temps, Nephteros avait réussi à trouver Richard. Soulagée de voir qu’il était en sécurité, elle l’avait appelé.

« Richard. »

« Dame Nephteros… ? »

Il s’était retourné. Comme il était en pause, il ne portait pas son Armure Sacrée. C’était la première fois que Nephteros le voyait habillé de façon décontractée, sans même porter l’uniforme de cérémonie de l’Église. À en juger par le simple bouquet de fleurs qu’il tenait à la main, il était ici pour rendre hommage aux morts. Voyant Nephteros essoufflée, Richard s’était précipité vers elle avec étonnement.

« Que s’est-il passé ? » avait-il demandé.

« Quoi ? Je veux dire, vous… »

Il… quoi ? Il avait seulement fait une pause. En le regardant à nouveau, Richard était le même que d’habitude. Nephteros ne pouvait pas dire s’il était préoccupé par quelque chose.

Mais je suppose qu’il ne sait pas non plus pourquoi je m’inquiète.

Il n’y avait pas de temps à perdre. Nephteros n’avait pas vraiment mis de l’ordre dans ses idées, mais elle était allée droit au but.

« J’ai entendu dire que tu étais préoccupé par quelque chose… Tu as fini par faire une pause sans rien dire, et tu n’es pas revenu après l’entraînement hier. Cela m’a dérangée. »

« Oh, euh, je suis vraiment désolé, » dit Richard, ses joues devenant rouges.

« Il n’y a aucune raison de s’excuser, n’est-ce pas ? »

Richard s’était gratté la tête, puis il jeta un coup d’œil dans la forêt.

« Je viens ici chaque fois que je suis troublé, » avait-il dit.

« C’est l’endroit où nous avons combattu la chimère de Bifrons une fois, non ? »

Après avoir découvert ses origines, Nephteros avait fui son maître Bifrons et avait fini par utiliser toutes ses forces à cet endroit précis, ne laissant d’autre choix que d’attendre sa mort. À l’époque, les Chevaliers angéliques avaient été les seuls à la sauver.

« Ah oui, c’est toi qui m’as proposé de l’eau en premier, n’est-ce pas ? »

« C’est arrivé, n’est-ce pas… ? »

« Honnêtement, je n’aurais jamais imaginé que les Chevaliers angéliques me sauveraient. C’était un choc. »

***

Partie 6

Son environnement l’avait presque fait oublier, mais les chevaliers angéliques et les sorciers étaient censés être des ennemis mortels. Les chevaliers utiliseraient n’importe quelle opportunité pour tuer un sorcier. C’était censé être le cas, mais Richard n’avait rien dit de tel et lui avait offert de l’eau. Cependant, cela avait été suivi par des souvenirs douloureux…

« À l’époque, si tu… Non, si vous tous ne m’aviez pas sauvée, je ne serais pas là aujourd’hui. »

Plusieurs personnes étaient mortes juste pour la sauver. Parmi les survivants, il y en avait un qui était au-delà de tout espoir de guérison. Ils étaient tous si jeunes et étaient censés avoir un avenir brillant devant eux.

« C’est pourquoi, hum… Merci. Maintenant que j’y pense, je n’ai jamais dit ça. »

Il n’y avait pas à se plaindre si quelqu’un la traitait de sans-cœur pour ça.

« Merci, » répondit Richard avec un hochement de tête. « Je suis sûr que les hommes qui ont perdu la vie seraient ravis de t’entendre dire cela, Dame Nephteros. »

« Est-ce que tu… les connaissais bien ? »

« Oui… L’un était mon ami d’enfance. L’autre, j’en étais proche depuis l’époque où j’étais apprenti. Après nos patrouilles, nous faisions souvent du cheval avec tout le monde dans le peloton. »

Ils avaient été des camarades bien plus irremplaçables pour Richard que Nephteros ne l’avait imaginé. Cette pensée avait envoyé une douleur lancinante dans son cœur.

« Déso —. »

« S’il te plaît, » dit Richard, la coupant avant qu’elle ne puisse s’excuser. « Je t’en prie, ne t’excuse pas. Ils ont accompli leur devoir de manière splendide. Tu ne devrais pas t’excuser auprès d’eux, mais les honorer. Alors s’il te plaît, honore leur mémoire. »

Nephteros ne pouvait rien dire sur un tel état d’esprit.

« Mais… C’est quand même triste que des gens meurent…, » dit-elle.

Je me demande si Néphélia ressent la même chose ?

Zagan était profondément troublé lorsqu’il avait parlé à Nephteros de sa durée de vie. Elle était censée n’être rien de plus qu’un outil qui pouvait être remplacé, mais il s’était tourmenté à cette idée comme il l’aurait fait pour Néphy ou Foll. Elle savait qu’il l’avait vraiment acceptée comme faisant partie de sa famille.

Tous les autres étaient sûrement comme ça. Chastille, Kuroka, Foll, Orias, Raphaël, et même cette étrange mamie. Peut-être même ce sorcier hirsute… ou pas. En tout cas, il y avait beaucoup de gens qui auraient de la peine si Nephteros venait à mourir.

Est-ce vraiment bien pour moi de laisser les choses se terminer comme ça ? Il y a un moyen de…

Dès qu’elle avait envisagé l’alternative, une violente envie de vomir l’avait assaillie. Des chimères fabriquées en collant des corps ensemble de manière absurde, toutes avec le même visage que Nephteros. Ceux-là avaient été des Nephteros malchanceuses. Elle avait été celle qui avait eu un peu de chance. Ils avaient tué les amis de Richard. Elle ne voulait pas mourir, mais utiliser ces corps était une impossibilité. Elle ne serait pas capable de le supporter. Nephteros tituba, et Richard soutint rapidement ses épaules, paniqué.

« Lady Nephteros !? »

« Je… Je vais bien. Je me souviens juste de quelque chose de désagréable… »

Elle était venue ici par souci pour Richard, alors pourquoi le faisait-elle s’inquiéter pour elle à la place ? Pourtant, il n’y avait aucune chance que son teint pâle redevienne normal tout de suite. Richard n’avait pas vraiment l’air perturbé par cette situation. Au contraire, son visage était empreint de désespoir. Quelque chose s’était-il produit ? Un étourdissement ou deux était en fait assez courant pour elle. L’expression de Richard semblait quelque peu excessive.

« Je vais vraiment bien, » dit-elle en tendant la main et en touchant sa joue. « Plus important, est-ce que quelque chose t’est arrivé ? Quelque chose qui t’a fait venir jusqu’ici ? »

Elle avait sa propre crise à gérer, donc elle ne savait pas pourquoi elle disait ça.

Peut-être que je veux que les autres se souviennent de moi comme d’une bonne personne avant de mourir… ?

Elle ne pouvait pas nier que des pensées aussi superficielles lui venaient à l’esprit. Pourtant, Nephteros sentait qu’elle ne pouvait pas ignorer cet homme quand il était si troublé par quelque chose. Son plaidoyer ne faisait que donner à Richard l’impression qu’il allait fondre en larmes.

« J’aimerais t’aider si je — Hyah !? » Elle commençait à dire, quand il l’avait soudainement pris dans ses bas. « Qu-Qu’est-ce que tu… ? Est-ce que tu pleures ? »

« Je suis tellement, tellement désolé. Je n’ai… aucun moyen de te sauver, » répondit Richard d’une voix tremblante et étouffée. C’était suffisant pour que Nephteros comprenne.

 

 

« As-tu… entendu parler de ma situation ? »

« Oui… »

C’est pourquoi il était ici tout seul. Il avait agonisé et s’était inquiété de ne pas pouvoir la sauver.

« Je vois…, » déclara Nephteros, puis lui rendit son étreinte sans vraiment savoir pourquoi elle le faisait. « Désolée. Même si vous m’avez tous sauvée… »

« Ne t’excuse pas. »

« Hm… Mais je suis un peu heureuse. Je veux parler du fait que quelqu’un va pleurer pour moi, même si ce n’est que par sympathie. »

Richard avait lâché Nephteros, puis il avait saisi ses épaules si fort que ça lui avait fait mal.

« Ce n’est pas de la sympathie ! » rugit-il. « C’est parce que je t’aime ! »

Nephteros ne pouvait pas comprendre que ces mots lui étaient adressés.

Hein ? Qu’est-ce qu’il vient de dire… ?

L’amour. C’était ce qu’elle cherchait depuis qu’elle avait appris la relation de Zagan et Néphy. Et maintenant, il était présenté juste devant elle.

« Qu-Quoi... ? » dit-elle. « Il n’y a rien en moi qui mérite d’être aimé… »

« N’as-tu pas pleuré pour nous aussi ? »

Ces mots avaient fait battre son cœur de façon surprenante. Pendant l’attaque des chimères, Nephteros n’avait pu que pleurer en voyant les chevaliers angéliques mourir devant elle. Elle avait pleuré devant la douleur insondable des autres qui mouraient pour un individu comme elle.

Je vois maintenant, quelqu’un qui ne s’aime pas lui-même n’est pas capable de réaliser quelque chose d’aussi simple…

Le conseil d’Alshiera était correct. Nephteros devait s’aimer correctement. En faisant cela, elle aurait compris depuis longtemps qu’il lui faisait face avec amour, et non avec une simple gentillesse. C’est pourquoi Nephteros ne pouvait rien faire d’autre que de lui offrir un sourire troublé.

« Désolée… Je vais mourir dans deux ou trois mois, alors… »

« Si c’est le cas, je resterai à tes côtés jusqu’à la fin. Je ne te laisserai pas seule. »

« Pourquoi… ? Cela ne va-t-il pas te faire souffrir ? » demanda-t-elle, incapable de croire ce qu’elle entendait.

« N’est-ce pas ce que cela signifie pour les gens de s’aimer ? » répondit Richard, trouvant sa réponse quelque peu curieuse.

Une larme coula sur la joue de Nephteros alors qu’elle s’accrochait fermement à la poitrine de Richard.

« Je ne veux pas mourir… Je veux apprendre davantage… Je veux faire plus… Il y a tellement de choses à faire… »

« Je le sais. »

« Mais je ne peux pas supporter l’idée de prolonger ma vie comme ça… »

Richard n’avait pas ri ou ne s’était pas mis en colère à cause de son obstination disgracieuse. Au lieu de cela, il avait simplement retourné son étreinte doucement.

« Cherchons un moyen, » avait-il dit. « Je suis sûr qu’il doit y en avoir un. »

Elle avait levé les yeux vers son visage, effrayée à l’idée de savoir si elle pouvait le croire. Elle n’avait aucune idée de comment répondre à sa confession.

Mais si je peux survivre…

Si sa vie pouvait être prolongée, peut-être pourrait-elle répondre le moment venu. Après tout, il avait dit qu’il resterait à ses côtés pour toujours, malgré sa maladresse. Avec lui, peut-être pourrait-elle vraiment apprendre ce qu’est l’amour. En un sens, cette émotion était peut-être trop fugace et vague pour être appelée un premier amour. Néanmoins, Nephteros se retrouva finalement devant la porte avec toutes les réponses à ses questions.

« Tu sais, Richard… »

Et juste à ce moment-là…

« Comme c’est méprisable de porter la main sur la poupée d’un autre sans sa permission. »

Une fleur rouge s’était épanouie devant elle avec un bruit sourd. Un liquide chaud avait coulé sur le visage de Nephteros. Richard se figea complètement, n’ayant aucune idée de ce qui venait de se passer. Elle baissa timidement le regard, apercevant une main trempée de rouge percer hors de sa poitrine. C’était une petite main, une main qui ressemblait beaucoup à celle de son ancien maître. Et dans sa main se trouvait un cœur qui battait encore.

Elle ne lui avait même pas encore donné de réponse, mais l’homme qui lui avait avoué son amour avait eu le cœur brisé sous ses yeux.

Encore une fois… C’est parce que tu as essayé de sauver quelqu’un comme moi, qu’une fois de plus…

Ainsi, le désespoir avait déchiré Nephteros de l’intérieur.

« Bifrons ! Espèce de salaud ! »

La première chose que Zagan vit en rattrapant Nephteros fut Richard se faisant arracher le cœur. L’Archidémon, qui ne pouvait être identifié comme un garçon ou une fille, se transforma de particules en forme humaine, puis éclata de rire.

« Ha ha ha ha ha ! Je suis si heureux de te voir faire une telle grimace ! »

Richard s’était effondré sur ses genoux. Nephteros le rattrapa, encore complètement perdue quant à ce qui se passait. Bifrons savoura chaque dernière seconde de ce moment, puis se tourna vers Zagan.

« Anneau du Ciel, Ombre Sévère. »

Zagan avait été le premier à bouger. Il absorba l’inépuisable réserve de mana de son environnement et la convertit en vitesse. Bifrons était toujours accroché au dos de Richard, et Zagan se mit à sa portée en un seul pas. Il profita de cet élan pour enfoncer son poing, mais le sorcier ennemi se transforma en particules pour éviter un coup direct. C’était cependant encore dans les limites des attentes de Zagan.

« Gak ! Hak ! »

Même si Bifrons parvenait à esquiver son poing, il ne pourrait pas résister au mana qui l’accompagne. Retrouvant sa forme humaine, Bifrons s’effondra et tomba au sol.

« Shax ! »

« C’est parti ! »

Richard ne pouvait pas être soigné tant que Bifrons n’était pas éloigné de lui. Le talentueux subordonné de Zagan l’avait compris, et il s’était immédiatement précipité vers Richard dès que l’occasion s’était présentée. Zagan le surveilla et fonça sur l’Archidémon une fois de plus.

« AAAAAaaaaAAAAAaaaaaaAAAH ! »

Il s’était retourné pour entendre le cri soudain d’un autre monde. Des ténèbres noires se déversaient de Nephteros. Il avait reconnu ce phénomène.

Pas question ! Azazel !?

C’était la calamité qui s’était autrefois emparée d’Aristella et qui s’était également infiltrée dans le corps de Nephteros. Elle était censée être scellée par Alshiera, mais elle était là, débordant de Nephteros. La lumière de la raison avait depuis longtemps disparu de ses yeux, et les ténèbres se déversaient comme pour avaler Richard tout entier. Le désespoir de Nephteros avait-il été le déclencheur ? En tout cas, il était dangereux de s’approcher d’elle maintenant.

« Shax ! Va-t’en ! » cria Zagan.

Shax n’était cependant pas le genre d’homme à s’échapper seul et à abandonner un patient. Il était fait pour. Au moment où cette pensée traversa l’esprit de Zagan, une lame déchira horizontalement l’obscurité, enveloppant Shax.

« Kurosuke ! »

« Monsieur Shax ! Maintenant ! »

Kuroka était la fille qui comprenait Shax encore mieux que Zagan. Elle avait prédit qu’il n’essaierait pas de s’enfuir et avait déjà dégainé ses épées courtes. Ses lames terrifiantes découpèrent les ténèbres sans toucher Nephteros, révélant le corps de Richard une fois de plus. À cet instant, Shax le saisit et bondit en arrière.

Immédiatement après, les ténèbres avaient à nouveau enveloppé l’endroit que Kuroka avait ouvert. Même un moment d’hésitation aurait été trop lent. Kuroka et Shax avaient réussi à échapper aux ténèbres grâce à leur esprit de décision. Cependant, ce dilemme avait également détourné l’attention de Zagan pendant un seul instant.

« Hee hee hee ! Tu en as apporté un intéressant ! Je vais le prendre en souvenir ! » s’exclama Bifrons et s’élança en avant, se dirigeant droit vers Lisette.

Quoi ? Pourquoi elle ? Qu’est-ce qu’il peut bien vouloir d’elle ?

« Argh ! »

Lisette avait crié alors que des cristaux s’enroulaient autour de son corps. Cette image avait fait remonter les cicatrices émotionnelles d’une certaine fille.

« Nooon ! »

Dexia avait sauté dans l’action plus vite que quiconque. Voyant le danger auquel était confrontée la fille qui partageait le visage de sa sœur, le corps de Dexia avait bougé avant que son esprit ne puisse traiter la situation.

« Pas question ! »

***

Partie 7

Bifrons s’était figé, choqué et ravi de se voir arracher sa beauté par quelqu’un qu’il avait autrefois jugé sans valeur, et Zagan n’était pas du genre à laisser passer un tel moment de trouble.

« L’éclair violet du phosphore du ciel ! »

Ce poing fait de Phosphore du Ciel avait autrefois piétiné un essaim de démons. Zagan laissa une traînée violette derrière lui et dirigea son poing vers Bifrons. Leurs corps se croisèrent l’espace d’un instant. Le poing de Zagan s’abattit, tandis que le corps de Bifrons se tordit. Au moment où ils s’étaient croisés, quelque chose était tombé sur le sol avec un ploc. C’était un avant-bras mince et coupé.

« AAAAAARGH ! »

La foudre violette de Zagan avait fauché le bras droit de Bifrons.

J’ai échoué. C’était bien trop superficiel.

Le Phosphore du Ciel avait immédiatement brûlé le bras de Bifrons, mais n’avait pas atteint son corps. Le petit Archidémon avait sectionné son propre bras avant qu’il ne le fasse. En regardant vers le bas, le bras était également intact à partir du poignet, où se trouvait l’Emblème de l’Archidémon.

Quand même, maintenant ce bras droit ne peut pas être régénéré.

« Hee hee. Devoir payer un bras pour ça, c’est plutôt cher, » dit Bifrons, la main coupée flottant dans l’air avant de se fixer dans son autre main.

« Crois-tu que je vais en rester là ? »

« Oui. Tu le feras. Tu n’as plus le temps. Tu as un combat qui t’attend, après tout. »

Au moment où Zagan s’apprêtait à donner le coup de grâce, ignorant toutes ces bêtises, il avait entendu un cri derrière lui.

« Sœur ! »

C’était Lisette. Il s’était retourné pour voir Stella étranglée par les ténèbres. À en juger par la façon dont Lisette et Dexia étaient sur le sol derrière elle, Stella avait bondi pour les protéger.

« Hak… Espèce de petit… »

Alors même que son visage se tordait d’agonie, Stella avait saisi le bras de l’ombre et le tordit de toutes ses forces au niveau de l’articulation du pouce. Il y avait assez de force pour arracher une tête humaine, arrachant l’ombre d’elle et l’envoyant voler.

À ce moment-là, Bifrons s’était déjà transformé en particules et avait disparu. Zagan avait pris son bras, tandis que Bifrons avait grandement blessé Richard et Nephteros, deux personnes qu’il ne pouvait pas laisser en vie. Il avait été complètement vaincu, mais la véritable bataille ne faisait que commencer.

« Hé… qu’est-ce qui se passe, bon sang ? » murmura Shax, choqué.

Avant que quiconque ne s’en rende compte, les ténèbres qui avaient recouvert le corps de Nephteros avaient disparu. Elle flottait dans l’air avec ses yeux fermés. Il ne semblait pas y avoir de problème avec son corps. Cependant, des ailes de lumière sortaient de son dos. Elles étaient divines, mais sinistres, et il y en avait huit au total.

 

 

Qu’est-ce que c’est que ces ailes ?

Zagan pouvait voir leur vraie nature à travers ses yeux d’argent. Chacune était une cristallisation de mana qui équivalait à un Emblème de l’Archidémon, et il y en avait huit. C’était comme être en possession de huit Emblèmes à la fois, mais Zagan ne croyait pas que les choses étaient aussi simples que cela. La puissance qui régnait ici lui faisait vraiment comprendre que le Seigneur-Démon de la boue que Bifrons avait invoqué une fois auparavant n’était en fait que des pensées résiduelles. Il devait se concentrer rien que pour respirer en sa présence. Qu’est-ce que cet énorme pouvoir pouvait bien être ?

« Nephteros » avait ouvert les yeux. Ses pupilles étaient dorées comme la lune, et à l’intérieur d’elles se trouvait une obscurité semblable aux fosses de l’enfer. Un simple battement d’ailes fit gémir Zagan, Stella et Shax. C’était tout ce qu’il fallait pour faire disparaître toute la sorcellerie qu’ils avaient préparée. C’était particulièrement mauvais que la sorcellerie de Shax ait été effacée, vu comment il avait traité Richard.

« Hélas… quels enfants stupides ! Mais j’aurai quand même pitié de vous, » dit Nephteros, puis elle se mit à chanter. « [À toi, j’accorde la bienveillance.] »

Des cailloux de cristal étaient sortis de ses huit ailes.

Selini Chavliodous !?

C’était le mysticisme céleste que Nephteros privilégiait au combat, mais sa puissance était maintenant d’un tout autre niveau.

« Forme de dragon de l’écaille du ciel ! »

Zagan avait tissé son plus grand bouclier sans hésiter. Ses ailes géantes couvraient tous les non-combattants comme Lisette, mais Zagan restait bouche bée sous le choc. Selini Chavliodous avait transpercé l’armure en forme de dragon. Même le mysticisme céleste d’Orias avait été complètement bloqué par la Forme du Dragon, mais ici, il avait été criblé de trous en un instant. Même avec son armure percée, il mangeait toujours l’aura du mysticisme céleste et grandissait, mais il se brisait plus vite qu’il ne grandissait. Il était sûr de se briser en quelques secondes. Pourtant, il avait réussi à gagner du temps.

« Fermez votre bouche ou vous vous mordrez la langue ! »

Zagan avait foncé sur Lisette et Dexia au milieu de la pluie de cristaux. Dexia était censée être une sorcière relativement talentueuse, mais dans son état actuel, elle était comme n’importe quel autre noncombattant désarmé. Il devait la protéger.

Quant à Shax, qui ne pouvait pas beaucoup bouger avec Richard dans ses bras, Kuroka le protégeait en coupant les cristaux arrivants. La Forme du Dragon ralentissait au moins les projectiles qui la traversaient, mais même en faisant abstraction de cela, cette fille montrait vraiment pourquoi Stella ne voulait pas la combattre. Les deux lames du Ciel Sans Lune avaient brisé d’innombrables cristaux. Stella et Ginias avaient également dégainé leurs épées sacrées pour se concentrer sur la défense.

Je ne peux pas m’approcher de Shax !

Ce seul battement d’ailes avait effacé toute sorcellerie. L’état actuel de Richard était trop important pour Shax tout seul. Cependant, à cause de la pluie constante de cristaux, Zagan ne pouvait pas s’approcher d’eux tout en portant les deux filles.

« Confession angélique Raziel ! » cria Ginias, en se mettant en action.

L’archange en chef tenait son épée sacrée en l’air tandis qu’une armure de chevalier prenait forme dans l’air.

« Allez-y ! Vous pouvez le sauver, non ? » déclara le garçon, bien qu’il ait été trompé, tourmenté et déshonoré par Zagan dans le passé.

« Je t’en dois une. Ne meurs pas, » dit Zagan au garçon qu’il avait autrefois épargné simplement parce que cela aurait été un problème de le tuer.

La Confession verte s’élança à travers la pluie de cristal vers « Nephteros ». Zagan en profita pour courir vers Shax. La poitrine de Richard avait toujours un trou béant. Shax avait arrêté l’hémorragie et utilisait le mana pour manipuler le flux sanguin de Richard à la place du cœur manquant. C’était le meilleur traitement provisoire que l’on pouvait espérer, mais cela ne le guérirait pas.

« Qu’est-ce que tu fais ? Ne peux-tu pas le soigner ? » demanda Zagan en faisant descendre Dexia et Lisette sur le sol.

« Ne sois pas déraisonnable, patron. Tu ne peux pas régénérer un organe perdu en si peu de temps. Le corps de ce type ne tiendra pas assez longtemps pour qu’on puisse refaire son cœur. »

Un homme du calibre de Shax pouvait facilement soigner les dommages causés aux organes internes. Cependant, Bifrons avait proprement arraché le cœur de Richard en entier. Remplacer l’organe manquant n’était pas seulement un traitement, c’était un acte de création.

« Bien. Je vais faire quelque chose à ce sujet, » dit Zagan. « Kuroka, je te laisse mon dos. »

« O-Oui ! » Kuroka répondit d’un ton excité, contrastant avec le désespoir dans l’air.

Zagan commença à tisser la sorcellerie qu’il avait l’intention d’utiliser pour Nephteros. Elle était encore incomplète, alors il ne savait même pas si elle fonctionnerait. De plus, faire ce genre de travail dans cette boue était plus que stupide. Néanmoins, il avait pris sa décision en tant que roi.

Il puisa du mana dans le sceau de l’Archidémon et le matérialisa, formant chaque cellule et chaque vaisseau sanguin un par un. Le cerveau d’une personne normale serait susceptible de se rompre sous le stress des calculs qu’il effectuait. C’était la plus délicate des sorcelleries.

Derrière lui, Ginias avait fait un libre usage de sa Confession pour défier « Nephteros », mais ce n’était pas vraiment un combat. L’utilisation de la Confession par l’Archange en chef n’était en rien maladroite, mais bloquer la pluie de cristal était le mieux qu’il pouvait faire. Il n’avait pas été capable de tenter une seule attaque pendant tout ce temps. Il était toujours en train d’endurer l’assaut quand soudain, les cristaux avaient cessé d’arriver.

« C-C’est ma chance ! » cria Ginias.

Il prépara une nouvelle fois sa Confession et s’apprêtait à charger lorsqu’une lance de lumière prit forme dans la main de « Nephteros ».

« Esquive, Ginias ! » cria Stella.

« Hein ? »

À l’instant où la lance avait quitté sa main, un trou géant avait pris forme au milieu du torse de la Confession. Le temps que quelqu’un réalise qu’il avait été causé par la lance, une bande de lumière les avait dépassés et atteignait l’horizon. Un moment plus tard, une colonne de flamme avait éclaté au loin. Si elle avait été tirée vers Kianoides, la ville entière aurait été déchirée.

« A-Argh… »

Ginias avait tout juste réussi à réagir grâce à l’avertissement de Stella. Il avait réussi à échapper à la lance, mais sa Confession avait été facilement vaincue. Il avait vomi du sang et était tombé sur le sol. Son Armure Sacrée s’était effondrée en morceaux, et il n’avait même pas pu se remettre sur ses pieds. La plus petite des écorchures avait suffi pour le réduire à cet état.

Suite à cela, « Nephteros » avait fermé les yeux et ses lèvres avaient frémi.

« [Tu es celui qui brille comme les étoiles. Celui qui embrasse l’équilibre, et arbitre sur le bien et le mal.] »

Le mysticisme céleste… et Asteri Ekrixis en plus !?

Le visage de Zagan s’était raidi. Ce sort avait autrefois éradiqué le Seigneur-Démon de la Boue. S’il était lancé par Nephteros dans son état actuel, Kianoides était susceptible d’être oblitéré malgré la distance qui le séparait de leur champ de bataille. Mais ce n’était pas la raison pour laquelle Zagan s’était figé. Nephteros avait déjà tenté de lancer ce sort et n’avait pas pu en supporter la puissance, s’effondrant finalement à cause de cela.

Si elle continue à utiliser le mysticisme céleste comme ça, son corps ne tiendra pas le coup !

Une énorme lumière se déversa sur la zone en réaction à la prière céleste. Cependant, Zagan ne pouvait pas bouger pour le moment. S’il arrêtait son travail, Richard était condamné.

Zagan avait tendu la main, tout en continuant le traitement de Richard. Il n’allait pas abandonner Richard. Il protégerait ses subordonnés. Il ne laisserait pas la ville être détruite. C’était la méthode de gouvernement à laquelle Zagan croyait. Et juste au moment où il commençait à tisser l’Écaille du Ciel, Stella repoussa son bras vers le bas.

« Zagan. Essaie au moins de te fier à ta grande sœur dans des moments comme celui-ci, » dit-elle en souriant, son profil ressemblant beaucoup à celui qu’elle avait lorsqu’elle faisait des bêtises dans le passé.

« Qu’est-ce que tu… ? »

« D’accord ! Faisons un essai, Zachariel ! Confession ! »

Stella avait saisi la lame de son épée sacrée, laissant son sang couler sur sa longueur. Un chevalier noir de jais portant une lance et un bouclier prit forme derrière elle. Il s’agissait de la Confession Angélique que l’Archidémon Andrealphus avait autrefois exposée. Il y avait des précédents à ce sujet chez Ginias et Michael, donc sa maîtrise rapide n’était pas une surprise totale. Stella avait déjà atteint le stade de la Confession.

« Vas-y ! »

Stella tenait son épée sacrée en l’air, et la Confession noire chargea « Nephteros ». Cependant, contrairement à Andrealphus, Stella était sur son dos.

« Toi aussi, tu fais de ton mieux, grand frère ! » cria Stella, en portant la main à son œil artificiel argenté. « Vague Tourbillonnante Antipode ! »

La sorcellerie qu’elle déclencha ressemblait beaucoup à la Vague Tourbillonnante que son frère Decarabia avait utilisée autrefois. Elle créait un énorme tourbillon de mana, écrasant tout ce qui se trouvait à sa portée. Cependant, ce que Stella utilisait ici incluait également l’aura de l’épée sacrée dans le tourbillon de mana.

C’était une tornade de mana et d’aura, un pouvoir que seule Stella pouvait utiliser en tant que détentrice d’une épée sacrée et de l’Œil du roi d’argent. Même Zagan n’aurait pas été capable de le traverser. Le vortex tourbillonnait avec la lance de la Confession en son centre, avalant même la lumière du mysticisme céleste. Face à cette attaque ultime, « Nephteros » continua sa prière et leva sa main droite.

« [Quoi qu’il en soit, l’équilibre est rompu. L’ordre est perdu, et la terre est teintée de sang. Ainsi, cela mérite un châtiment. Par le marteau qui pardonne tous les péchés.] »

La lumière de son mysticisme céleste se rassembla sous la forme d’une lance. Une simple éraflure avait rendu un homme du calibre de Ginias incapable de se tenir debout, alors combien de destruction pouvait-elle causer lorsqu’elle était accompagnée de mysticisme céleste ?

« Argh ! Encore une fois ! S’il te plaît, endure, Raziel ! Confession ! »

La Confession verte prit à nouveau forme comme pour protéger Stella. Son armure était fissurée et elle semble vouloir s’effondrer à tout moment, mais elle défiait « Nephteros » aux côtés de la Confession noire.

***

Partie 8

La lance de lumière était entrée en collision avec les deux Confessions, les écrasant toutes deux très facilement.

« Stella ! »

Chevauchant l’arrière de la Confession noire, Stella n’avait aucun moyen d’échapper à l’impact. Son corps avait volé, laissant une traînée de sang, avant que quelqu’un ne la rattrape doucement.

« Mon Dieu… Ce Shere Khan a vraiment une personnalité de merde. Il nous a envoyés ici parce qu’il savait que ça allait arriver. »

C’était un garçon aux cheveux et aux yeux écarlates.

« Vous deux…, » Kuroka avait marmonné avec étonnement.

« Yo, on se retrouve. »

Le garçon lança un regard troublé à Kuroka, puis déposa Stella sur le sol. Elle était inconsciente et en lambeaux, mais respirait encore. Après avoir confirmé cela, Zagan laissa échapper le moindre soupir de soulagement.

Je n’arrive pas à suivre plus que ça…

Le traitement de Richard n’était toujours pas terminé, donc ni Zagan ni Shax ne pouvaient quitter son chevet. Ils ne seraient pas en mesure de sauver d’autres personnes souffrant de blessures graves.

« Je ne sais pas qui vous êtes, mais il semble que votre ennemi soit lié à nous par le destin, » dit un épéiste aux yeux bridés en s’approchant du garçon aux cheveux écarlates. « Nous allons vous apporter notre aide. »

L’épéiste était sur le point de se retourner, mais ses yeux s’étaient écarquillés sous le choc.

« Ce n’est pas possible… Es-tu Zagan ? » avait-il demandé.

Zagan ne comprenait pas le sens de ses paroles. Comment un héros d’il y a mille ans pouvait-il connaître son nom en voyant son visage ?

« Qui diable es-tu ? » demanda Zagan, en faisant une grimace dubitative.

L’épéiste hocha la tête, le visage résolu à l’inévitable.

« Sire Asura. J’ai trouvé mon endroit pour mourir. Il semble que je retournerai au pays des morts avant vous. »

« Je ne comprends pas vraiment, mais on va massacrer ce putain de séraphin, hein ? Je vais vous tenir compagnie. »

C’est ce qu’avait déclaré le garçon en jetant un regard à « Nephteros ».

Est-ce que ça veut dire qu’Azazel est vraiment un séraphin ?

L’épéiste avait une épée brisée à la main. La lame avait glissé hors de la poignée. Au moment où elle avait heurté le sol, de la lumière avait jailli de la poignée sans lame. Elle avait alors pris la forme d’une épée de lumière. C’était plus proche de l’aura d’une épée sacrée que de toute forme de sorcellerie. Le garçon avait également un gantelet de lumière autour de sa main droite.

« Vous m’écoutez ? La théorie principale pour combattre un séraphin est de détruire ses ailes hex. Tant qu’ils les ont, aucun humain ne peut les égaler. »

« Cela dit, comme nous ne sommes que deux, je suppose que se débarrasser d’une aile serait considéré comme le plus satisfaisant. »

Peut-être ces mots étaient-ils destinés à Zagan. Ils semblaient tous les deux assez forts, mais il ne pensait pas qu’ils pourraient arrêter « Nephteros ». Si c’est le cas, peut-être essayaient-ils de laisser derrière eux leurs connaissances. Faisant fi de leur détermination, « Nephteros » poursuivit sa prière jusqu’au dernier vers.

« [Les lumières des cieux sont toutes des étoiles. Tout ce qui brille de loin en loin s’effondre dans une conflagration. Sans compassion, sans chagrin, il juge simplement et apporte la destruction. C’est la prière du châtiment] — Asteri Ekrixis ! »

Et c’est ainsi que la lumière de la destruction s’était abattue sur eux… ou du moins elle était censée le faire. Après plusieurs coups violents, des sphères noires éclatèrent autour de « Nephteros » et tout disparut. Le cliquetis de plusieurs petits cylindres métalliques tombant sur le sol suivit un moment plus tard.

Une vampire en robe noire se tenait là, les mains serrant des Chasseurs de Séraphins noirs et blancs. À en juger par les cartouches vides à ses pieds, elle avait tiré six fois. Ses balles avaient réussi à effacer Asteri Ekrixis.

« Alshiera, » dit Zagan.

« Désolée, je suis en retard. »

Si celui qui était à l’intérieur de Nephteros en ce moment était Azazel, ce serait une rencontre fortuite entre Alshiera et son ennemi juré.

« Hélas, je vois que tu te mets une fois de plus en travers de mon chemin. Quelle vilaine enfant ! Quelle charmante enfant ! Mais c’est fini. Je ne te pardonnerai plus, » dit Nephteros en rétrécissant son regard.

« Tee hee hee. Dis ça après avoir réussi à me battre une fois, » dit Alshiera, provoquant son ennemi.

« Es-tu... Ashy ? » murmura le garçon appelé Asura, incrédule.

« Nous en parlerons plus tard. Voulez-vous me prêter main forte ? »

« Laisse-nous faire ! »

« Comme tu le veux. »

En entendant leurs réponses, Alshiera avait souri avec nostalgie.

« C’est notre première chasse au séraphin en mille ans. »

Tous les trois s’étaient mis en action simultanément. Une pluie de cristal se déversa à nouveau des huit ailes de « Nephteros ».

« Trop lent. »

Des sphères noires éclatèrent devant les huit ailes.

Elle les supprime au moment où le pouvoir se manifeste !

Zagan savait que cette fille pouvait dégainer les Chasseurs de Séraphins plus vite que n’importe quelle sorcellerie. C’était l’aboutissement d’un art construit sur un millier d’années de dévouement. « Nephteros » n’eut pas le temps de tirer un seul cristal qu’Asura et l’épéiste bondirent sur ses deux flancs.

« Et c’est… x

« Un chacun ! »

Le mana avait jailli du coude du gantelet du garçon, accélérant son poing avec une force massive. Son bras entier était devenu une flèche détachée, perçant l’une des ailes de la droite. De l’autre côté, le bretteur avait brandi son épée de lumière et avait coupé l’une des ailes de gauche. Les mouvements du garçon étaient bruyants, tandis que ceux de l’épéiste étaient calmes. Leur attaque en tandem avait réussi à détruire deux ailes.

« Tch ! »

« Nephteros » fit claquer sa langue et tomba en arrière. Saisissant cette opportunité, Alshiera laissa tomber les chargeurs vides de ses chasseurs de séraphins. Zagan se demandait comment elle allait faire avec ses deux mains occupées quand des chaînes noires sortirent de ses manches, tirant de nouveaux chargeurs de sa jupe. Les chaînes avaient ensuite rechargé ses armes.

Cela signifiait qu’elle allait enchaîner avec ses tirs rapides qui défiaient de loin la compréhension humaine. Son ennemi l’avait également compris. « Nephteros » flottait dans le ciel, décrivant un arc de cercle pour contourner Alshiera, mais les yeux de la vampire la suivaient parfaitement.

« Kee hee hee. Un fauve gâté comme toujours ! Tu devrais apprendre à garder tes distances ! » cria « Nephteros » avec mépris.

« Grâce à cela, tu ne t’es pas sentie seule ces mille dernières années, n’est-ce pas ? » répondit Alshiera, une pointe d’affection dans la voix.

« [Celui qui dirige le voyage vers la mort. Celui qui souffle sur les roseaux, et transmet la sagesse à l’homme.] »

« Nephteros » avait commencé à chanter les versets d’Algea Pathi. Il avait moins de force destructrice que l’Asteri Ekrixis, mais comme il s’agissait d’un bruit informe, il ne pouvait pas être bloqué. La barrière sonore avait masqué la silhouette de « Nephteros », et Alshiera avait tiré sans hésitation. Cependant, ses deux tirs étaient légèrement hors cible.

« Où penses-tu que tu visais ? »

Les deux balles étaient entrées en collision juste devant les yeux de « Nephteros ». Incapables de résister à la force de l’impact, les balles avaient émis un rugissement assourdissant et avaient éclaté. Même Algea Pathi n’avait pas pu résister au son, et des fissures s’étaient formées sur sa surface. Ce n’était pas assez pour percer complètement, mais c’était une ouverture suffisante pour les deux héros chasseurs de séraphins.

« Numéro deux ! » crient les deux hommes en brisant chacun une aile.

C’est ce qu’il voulait dire par viser les Ailes Hex ?

Zagan était stupéfait. Il pouvait voir que la puissance de « Nephteros » diminuait drastiquement avec chaque aile perdue. Avec seulement quatre ailes en moins, sa puissance était bien inférieure à la moitié de ce qu’elle était à l’origine. Néanmoins, sa puissance totale était encore énorme.

Est-ce ainsi qu’ils se sont battus il y a mille ans ?

Alshiera se rapprocha comme si elle était pressée de mettre fin au combat. Les tirs rapides d’Alshiera n’auraient aucun mal à briser les quatre ailes restantes maintenant que « Nephteros » était si gravement affaiblie. Enfin, c’était censé être le cas…

« S’il vous plaît. Sauvez-moi. Alshiera… » Nephteros déclara ça avec la voix actuelle de l’elfe.

Alshiera détourna son objectif par réflexe, pointant ses canons vers le ciel vide. Profitant de cette ouverture décisive, « Nephteros » enfonça son genou dans la taille d’Alshiera… juste à l’endroit de sa vieille blessure — celle qui sapait constamment sa durée de vie immortelle.

« G-Gah… ! » Alshiera avait gémit de douleur.

« N’approche pas si imprudemment, Ashy ! »

Asura avait attrapé Alshiera alors qu’elle était soufflée en arrière. Mais à ce moment-là, « Nephteros » s’était échappée du champ de tir effectif des chasseurs de séraphins. Alshiera tomba à genoux, ses armes toujours prêtes à l’emploi.

« Hee hee hee... Kee hee hee… Ha ha ha ha ! » Nephteros ricana. « Tu es devenue plutôt molle. Mon vieux fauve ne serait jamais tombé dans le panneau. »

Avec cela, Nephteros s’était envolée dans le ciel.

« Attends ! » Alshiera cria.

« Comme c’est mignon. Comme c’est adorable. Ma chère Ashy. Même en ayant perdu ton pouvoir, tu es une enfant si forte. Même avec ce corps, je suis désavantagé, » dit Nephteros avant d’afficher un sourire cauchemardesque. « Poursuis-moi comme tu veux. Jusqu’à ce que je détruise ce monde. Aaah ha ha ha ha ha ! »

Laissant ces derniers mots derrière lui, « Nephteros » disparu, emportant le corps de la précieuse belle-sœur de Zagan. Tant de choses lui avaient été volées ici, mais tout ce qu’il pouvait faire était de grincer des dents si fort qu’il avait l’impression qu’elles allaient se briser.

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