***Chapitre 1 : Même pas le courage de tenir bon
Partie 1
La capitale impériale, Yunmelngen.
Un avion de transport fit son atterrissage en rugissant au milieu de la base. Il glissa sur plus de mille mètres, des étincelles jaillissant violemment sous ses roues, jusqu’à ce qu’il s’arrête.
Clic, clic…
Lorsque les marches de l’avion se furent abaissées, une sorcière aux cheveux bleus en sortit, les mains menottées.
« … »
Le vent balaya la piste, ébouriffant ses cheveux d’un bleu lapis-lazuli éblouissant. Elle ne prit pas la peine de remettre en place ses mèches rebelles et continua à descendre les marches vers l’homme qui se trouvait en contrebas.
« Bonjour, princesse Mizerhyby. Ça fait quelques heures, mais j’espère que vous vous souvenez encore de moi. »
« … »
Mizerhyby Hydra Nebulis IIX lui lança un regard noir.
L’homme était mince et avait une barbe naissante, bien visible. Il s’agissait de Sire Karossos Newton, le chef du laboratoire d’Omen, la seule institution officiellement autorisée à étudier le pouvoir astral dans l’Empire, et le Saint Disciple du dixième siège. Il leva la main comme s’il s’agissait d’un vieil ami.
« Hum. On dirait que nos rôles sont inversés maintenant… Oh, excusez-moi. Je ne voulais pas être sarcastique. Je dis juste ce qu’il y a. Et tant qu’on parle de la réalité de la situation… »
Newton jeta un regard ostensible derrière elle.
Un groupe de soldats impériaux transportait sur des civières un homme et une femme qui avaient été partiellement transformés. L’un d’eux était Talisman, le chef de la maison Hydra. L’autre était la sorcière Vichyssoise.
Tous deux avaient été transformés en monstres grotesques par le pouvoir de la Calamité.
« Son Excellence m’a ordonné de superviser leur traitement. Quel revirement dramatique, n’est-ce pas ? »
Cette simple phrase fit apparaître une ombre sur le visage de la princesse Mizerhyby.
« Vous voulez que je vous lèche les bottes ? » demanda-t-elle.
« Hein ? »
« Ou préférez-vous que je pleure et que je m’excuse pour la violence que j’ai infligée en envahissant votre laboratoire ? Ou… ? »
« C’est ridicule ! » Newton écarta les bras de façon théâtrale. Sa blouse blanche s’ouvrit : « Le pouvoir des sangs purs est à la hauteur des légendes ! J’ai même pu voir de mes propres yeux comment le pouvoir de la Calamité transformait les gens ! Je frissonne en pensant à la chance que j’ai eue d’assister à un tel spectacle ! »
Avant de répondre, Mizerhyby regarda les civières pendant un moment. « Je sais que ces deux-là peuvent être utiles à l’Empire; ils détiennent des informations cruciales sur la calamité. Laissez-les vivre. »
« Ça ne faisait aucun doute. » Le Saint Disciple, vêtu de blanc, haussa légèrement les épaules. « Talisman et Vichyssoise sont des spécimens de la Calamité. Je les garderai en vie à tout prix. »
« Je vous en supplie. »
« J’ai aussi quelque chose à vous demander. » La voix venait de derrière elle.
Alors que deux nouvelles sorcières apparaissaient de chaque côté de Mizerhyby, Newton ne cacha pas son amusement.
« Eh bien, eh bien. La princesse Aliceliese et la princesse Kissing. C’est vraiment magnifique de voir trois princesses de la Souveraineté côte à côte. Au fait, Vos Altesses… » Il regarda Alice et Kissing tour à tour. « N’aviez-vous pas toutes deux proposé de soumettre ceux de l’Hydra lorsqu’ils ont infiltré l’Empire ? Pourtant, vous êtes ici pour nous demander de les traiter avec gentillesse. Avez-vous changé d’avis ? Ou bien étiez-vous peut-être motivées par le désir de sauver des membres de la famille royale ? »
« Le cours de la bataille a changé, » répondit immédiatement Kissing.
Elle parlait de manière mécanique, presque comme si elle récitait une liste de chiffres. « Le duo que vous transportez, en particulier Lord Talisman, sera un levier essentiel pour faire en sorte que Mizerhyby fasse ce que nous voulons. N’est-ce pas, Aliceliese ? »
« Eh bien, oui », répondit Alice à contrecœur depuis l’autre côté de Mizerhyby. « Je déteste l’admettre, mais après avoir vu Lord Talisman, j’ai réalisé que nous aurions besoin de son pouvoir pour combattre la Calamité. »
« Hum, vous voulez dire qu’on ferait mieux d’utiliser ses pouvoirs dans la bataille contre la Calamité plutôt que de le laisser pourrir dans une cellule de prison ? »
Newton se caressa la barbe. Les gens qui lui étaient proches auraient reconnu dans ce geste un signe qu’il était de bonne humeur. « Très bien. C’est une raison plus que suffisante pour que je m’occupe de ces deux-là. »
Il se tourna ensuite vers son ancien collègue, l’ex-saint disciple Iska. « Eh bien, vas-y, emmène la princesse Mizerhyby, Iska. »
Newton se retourna : « Ne vous inquiétez pas, princesse Mizerhyby. Je vous promets de soigner vos compatriotes avec les meilleurs soins médicaux que l’Empire a à offrir. À condition que vous vous comportiez bien, bien sûr. »
Puis il partit, accompagné de l’unité impériale qui transportait les civières.
Mizerhyby les regarda partir en silence, tout comme Alice et Kissing à ses côtés.
« Allons-y », déclara Iska. Il leur fit un petit signe de tête.
Ils s’enfoncèrent alors plus loin dans la capitale, au-delà de la base centrale où ils se trouvaient.
« Le Seigneur nous attend. »
+++
Les appartements du Seigneur.
Le plus vieux bâtiment de la capitale impériale était composé de quatre structures de cinq étages.
Iska entra dans les appartements du Seigneur au niveau le plus bas.
« Je t’attendais, Iska ! Et Nene ! » La capitaine Mismis se tourna vers eux, le visage tuméfié.
Elle avait retiré son uniforme impérial et ne portait plus qu’un débardeur qui dévoilait son bras gauche bandé, semblant douloureux.
« Vous n’allez pas le croire ! Pendant votre absence, nous avons été confrontés à la plus grande menace jamais vue dans les quartiers du Seigneur ! J’ai protégé les lieux en utilisant mon corps comme bouclier et… »
« Ce n’est qu’une blessure superficielle. Elle n’a rien », marmonna Jhin derrière Mismis. « Comme je vous l’ai déjà dit, l’ancienne capitaine Shanorotte a tenté une invasion en solo. On a détruit des soldats mécaniques aux premier et deuxième étages, ainsi que quelques caméras de sécurité. Oh, et je crois que la patronne a été légèrement écorchée. »
« — “Tu crois ?!” » La capitaine Mismis pointa d’abord son bras gauche, puis son visage. « Regarde mon épaule ! J’ai été touchée ! »
« Tu n’as qu’une écorchure. Frotte un peu de salive dessus et ça guérira tout de suite. »
« Regardez mon visage ! Noro m’a frappée tellement de fois ! »
« Et tu l’as frappée en retour plein de fois. Tu l’as même déséquilibrée avec un coup de tête. »
« Jhin, de quel côté es-tu ?! »
« Bref, voilà ce qui s’est passé ici », répondit Jhin d’un ton léger, puis il plissa les yeux.
D’autres personnes avaient suivi Iska et Nene à l’intérieur. Les premiers étaient Alice et Kissing. Mais celle qui attira vraiment son attention se trouvait entre les deux membres de la famille royale : une princesse aux cheveux bleus.
« J’ai entendu le rapport. On dirait que vous avez fait du bon travail. »
Mizerhyby de l’ Hydra. Ils l’avaient déjà croisée une fois. Pas étonnant donc que Jhin lui jette un regard méprisant et que Mismis déglutisse.
« … » En revanche, Mizerhyby resta silencieuse.
Elle fixait l’autre bout de la pièce où étaient disposés des dizaines de tatamis.
« Bon retour à tous. »
Une créature argentée appuya son coude contre la chaise sans pieds sur laquelle elle était assise, puis se pencha en arrière.
Le Seigneur Yunmelngen.
« Normalement, j’aurais dit que j’étais fatigué d’attendre, mais il y a un nouveau visage parmi vous cette fois-ci, donc je suis bien réveillé grâce à cette nouveauté. — Princesse Mizerhyby de l’Hydra, avez-vous l’intention de devenir le poison de l’Empire ou notre salut ? »
Mizerhyby resta silencieuse, puis elle leva la tête.
Elle repoussa sa frange avec ses mains liées et fixa le monstre argenté d’un regard si intense qu’il aurait pu le transpercer.
« Êtes-vous le Seigneur ? »
« Hmm ? »
Le Seigneur ouvrit un œil en entendant Mizerhyby murmurer.
« Vous ne semblez pas surpris par mon apparence. »
« Oui, malheureusement, je ne le suis pas. » Mizerhyby le fixait. « J’ai vu suffisamment de personnes transformées par le pouvoir de la Calamité pour toute une vie. »
« Ha-ha. Je suis sûr que vous êtes contente que votre chef de famille n’ait pas fini comme moi. »
« Vous regardiez ? »
« Nous sommes dans l’Empire. Il ne se passe rien dans ces limites dont je ne sois au courant. — Bon, alors… »
Le seigneur Yunmelngen bougea, levant un genou et le serrant contre sa poitrine.
« J’ai deux ou trois questions. Les Hydras sont les rebelles des maisons royales de la Souveraineté de Nebulis. Votre intérêt pour le pouvoir de la calamité correspondait à celui des Huit Grands Apôtres, et vous avez attendu des décennies pour avoir l’occasion de frapper. Vous vouliez faire de toute la Souveraineté votre propriété. Ai-je raison ? »
« Je pense que oui. » La voix de Mizerhyby resta calme tandis qu’elle écoutait les paroles du seigneur.
Les Hydras et les Huit Grands Apôtres avaient tiré les ficelles depuis le début.
Mizerhyby savait qu’elle était à la merci du seigneur Yunmelngen et que sa vie dépendait de sa réponse.
« Ou vous seriez juste, si vous parliez de la génération précédente », ajouta-t-il.
« Oh ? » Les yeux de la créature se plissèrent brusquement. « Vous prétendez que l’actuel chef de famille, le seigneur Talisman, n’avait pas ces plans ? »
« Il avait d’autres objectifs. »
« Dites-moi, lesquels ? »
« C’était par curiosité. Mon oncle n’a jamais été motivé par la conquête. »
Lorsqu’il avait été transformé en sorcier, le chef de l’Hydra, Lord Talisman, avait déclaré ceci à Alice et Kissing : « Une nouvelle ère de connaissances va bientôt commencer ! »
« Du moins, c’est comme ça que je voyais les choses… » Mizerhyby se mordit la lèvre. « Mon oncle ne savait pas trop quoi faire en tant que chef de famille. C’est un chercheur dans l’âme. »
« Mais il a quand même fait des expériences sur des gens, non ? »
« Il a hérité de ces expériences de ses prédécesseurs. Mais mon oncle ne s’est jamais intéressé au pouvoir. Je lui ai posé la question directement une fois. Je lui ai demandé ce qu’il comptait faire de cette calamité. »
Après quelques instants.
« Voici ce que Talisman avait répondu : “Je veux juste faire des recherches là-dessus. Je veux tout savoir sur la chose la plus puissante de la planète.” »
Il avait une soif insatiable de connaissances.
Au fond, c’était vraiment lui, et c’est ce qui le distinguait des Huit Grands Apôtres.
Les Apôtres voulaient utiliser la calamité.
Talisman voulait simplement tout savoir à son sujet.
« C’est ainsi que je sais que son but était d’étudier la calamité. Même s’il voulait aussi l’utiliser. À vous de décider ce que cela signifie. »
« Et vous, alors ? »
Tenant toujours son genou, l’homme bête plissa les yeux. Il avait le regard d’un animal, d’un prédateur qui évalue sa proie et aiguise ses griffes.
« Qu’est-ce que vous comptez faire ? Je veux savoir ce que vous pensez de la calamité en ce moment. »
« … »
La princesse d’Hydra resta silencieuse.
Lord Yunmelngen l’observa de la tête aux pieds, guettant la moindre émotion sur son visage.
« Pour être honnête, jusqu’à maintenant, c’était Elletear que je détestais vraiment, pas la calamité. »
« Jusqu’à maintenant, c’est ça ? »
« Je suppose que oui. »
Lorsque le seigneur prit la parole, comme pour la tester, Mizerhyby poussa un soupir.
« Je n’ai jamais voulu voir mon oncle dans un tel état. Si c’était là le pouvoir de la Calamité, alors je souhaite qu’elle disparaisse à jamais de cette planète. »
« Hum… Ça marche, alors. »
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