Kimi to Boku no Saigo no Senjo – Secret File 1 – Dossier 02

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Dossier 02 : Notre dernière croisade ou l’inévitable affrontement au camp d’entraînement ?

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Dossier 02 : Notre dernière croisade ou l’inévitable affrontement au camp d’entraînement ?

Partie 1

Printemps.

Le froid glacial de l’hiver avait pris fin, annonçant la saison des fleurs en pleine floraison. Les fleurs de cerisier volaient, les oiseaux chantaient. Et pendant cette joyeuse période de l’année…

« NOOoooo ! »

La capitale impériale Yunmelngen.

Dans la troisième base de l’Empire, la plus grande nation militarisée du monde, la capitaine Mismis gémissait.

« Je ne veux pas y aller ! Je ne veux pas faire le camp d’entraînement ! »

Elle était allongée sur le sol de la salle de conférence, agitant ses bras et opposant la plus grande résistance possible en criant sans cesse : « Non, non ! »

La commandante n’avait pas montré la moindre once de gêne ou de souci pour son intégrité alors qu’elle piquait une crise de colère comme un enfant qui refusait d’aller à l’école.

« Capitaine Mismis, calme-toi, s’il te plaît. »

« … Iska ? »

« N’aie pas peur. Allez, lève-toi s’il te plaît. » L’épéiste impérial, Iska, s’adressa à elle d’un ton apaisant et tendit la main à sa supérieure. « S’il te plaît, regarde par la fenêtre. Il y a un ciel d’un bleu éclatant aujourd’hui. Regarde, il y a même des oiseaux là-bas, près de la base. C’est une si belle période de l’année. »

« Oui, c’est vrai. »

« Le printemps est à nos portes. Commandante, qu’est-ce qui te vient à l’esprit pendant cette saison ? »

« … Regarder des fleurs ? »

« Pour les forces impériales, le printemps est synonyme de camp d’entraînement. »

« Noooooon !!! »

Cela n’avait servi à rien.

Il avait essayé de faire passer le camp d’entraînement pour une autre période de la saison, mais il semblerait que Mismis répugnait à ce mot.

« Tu n’as pas besoin d’être aussi dramatique. Nous ne faisons même pas d’entraînement comme pour ceux qui vont dans les sous-marins ou les avions. C’est juste les bases, comme faire des tours de piste et travailler la force. »

« Ce sont les choses pour lesquelles je suis la plus mauvaise. Tu devrais le savoir, Iska… »

La capitaine Mismis avait l’air déconfite.

Malgré son comportement, elle était en fait une adulte à part entière âgée de vingt-deux ans, mais avec son visage de chérubin, combiné à sa petite taille, elle pouvait passer pour une gamine ayant récemment terminé l’école primaire.

« Commandante, si je me souviens bien, tu as tout juste réussi à atteindre la taille requise pour les forces impériales, n’est-ce pas ? »

« C’est exact. Je suis passée en portant des chaussettes très épaisses qui ont ajouté deux centimètres. »

« C’est vraiment contraire au règlement ! »

« À l’époque, j’étais convaincue que j’allais encore un peu grandir. Mais ce n’est pas la question qui nous occupe, Iska ! » Toujours vautrée sur le sol, Mismis se désigna du doigt. « Tous les membres des forces armées sont énormes et musclés. Mais l’entraînement impérial laisse même ces durs à cuire dans la poussière. Et tu veux qu’une petite dame comme moi y aille !? »

« Je compatis à ta douleur… »

Le camp d’entraînement — généralement connu sous le nom de « formation de base au combat » ou FBC — faisait chaque année trembler de peur de nombreux membres des forces impériales.

« Cela doit être une promenade de santé pour toi, Iska, » dit Mismis.

« Non, non. C’était l’enfer quand je me suis engagé pour la première fois. »

Même Iska, qui avait eu pour professeur le plus grand épéiste de l’Empire, avait failli abandonner pendant le BTC, lorsqu’il avait rejoint les forces pour la première fois. On l’avait jeté dans une piscine avec les mains attachées, et on l’avait forcé à se calfeutrer pendant deux minutes dans une pièce remplie de gaz lacrymogène sans masque à gaz, et il s’était effondré parce qu’il n’avait pas pu respirer. C’est dire à quel point leur entraînement était déraisonnable.

« Mais heureusement, le camp d’entraînement de la division spéciale III ne dure qu’une semaine. »

« Je ne veux toujours pas partir ! » hurla encore la capitaine Mismis.

« Laisse-la tranquille, Iska. Elle est juste en train de faire ses pitreries habituelles. » Jhin, le tireur d’élite aux cheveux argentés, allongé sur une chaise pliante dans un coin de la pièce, se tourna vers eux. « C’est la même chose qu’une cigale qui commence à bourdonner dès que l’été arrive. À chaque fois que le camp d’entraînement de printemps arrive, la patronne commence toujours à gémir. C’est juste un peu plus fort que ses trucs habituels. »

« Oh, Jhin, n’est-ce pas une chose terrible à laquelle la comparer ? Comment peux-tu en gros l’appeler une cigale ? » demanda Néné.

Elle était assise à côté de Jhin, ses cheveux roux coiffés en queue de cheval.

C’était toute l’équipe. Mismis était responsable d’Iska, de Jhin et de Néné, qui constituaient tous l’unité 907.

« Regarde ça, Jhin ! » Néné pointa du doigt la capitaine Mismis, qui était toujours allongée sur le sol. « Une cigale bourdonne pour son avenir. Ce n’est pas du tout la même chose que la capitaine Mismis, puisqu’elle pleure pour ne pas s’entraîner. La mettre dans le même sac que les cigales ne leur rend pas service ! »

« Tu es si méchante, Néné ! » Mismis ne pouvait pas laisser passer ça, bien sûr, et se leva d’un bond. « Eh bien, si tu vas jusqu’à dire ça de ta supérieure, ça me met dans une position délicate. Alors, Iska, c’est quand le camp d’entraînement ? »

« C’est vrai, nous venons en fait d’être informés de cela. » Iska sortit un avis de sa poche et le tendit à sa commandante. « Ça commence demain. »

« C’est une blague ! »

« Ils l’annoncent sans prévenir chaque année, après tout. »

« Mais c’est quand même ridicule… Aïe, j’avais aussi des projets pendant mon temps libre cette semaine. »

Mismis se tourna pour regarder le plafond.

À ce moment-là, la porte de la salle de conférence s’ouvrit avec un grand bruit.

« Baisse d’un ton ! Nous pouvons entendre tes gémissements dans la pièce d’à côté ! … Attends, c’est toi, capitaine Mismis ? »

Une commandante aux lunettes et aux cheveux noirs était entrée directement dans la pièce. Bien qu’elle ait un air sérieux, elle frisa ses lèvres en un sourire mesquin dès qu’elle vit Mismis.

« Comment vas-tu, Mismis ? Tu as l’air toujours aussi déplorable aujourd’hui. »

« Oh, c’est toi, P. Comment vas-tu ? »

« Qui appelles-tu P !? »

La commandante Pilie Commonsense avait vingt et un ans, un an de moins que Mismis, et elle n’avait été promue que récemment. Elle venait d’une famille aisée de l’Empire et semblait aussi correcte qu’une fille aisée devrait l’être. Cependant, elle avait un défaut majeur. Elle était arrogante.

« J’ai entendu dire que tu te débrouillais à peine à chaque camp d’entraînement, Mismis. » La commandante Pilie remonta ses lunettes. Elle fit alors parcourir son regard sur toute la longueur du corps de Mismis, prenant la petite commandante depuis le sommet de sa tête jusqu’à la pointe de ses orteils.

« Bonté divine ! Tu donnes toujours des propositions ternes lors des réunions régulières et tu réussis à peine les tests dans n’importe quelle matière à chaque fois. Et surtout, tu as l’air d’un petit enfant. Tu es une honte pour les commandants. »

« Hm. Tu penses que c’est le cas ? »

Le commandant Pilie avait été impitoyable dans son agression verbale, mais Mismis n’avait pas du tout réagi.

« Mais, P, » dit-elle.

« Qu’est-ce qu’il y a ? »

« N’as-tu pas été emmenée sur une civière tout comme moi pendant le camp d’entraînement de l’année dernière ? »

« Grk !? »

« Et tu vois, regardes nos tailles. Nous avons à peu près la même taille. »

En effet. Mismis n’atteignait que la poitrine d’Iska, et la commandante Pilie était à peu près aussi petite. Il y avait si peu de différence entre leurs tailles qu’il était presque inutile de les comparer.

« Dis-moi, Iska, » lui chuchota Néné à l’oreille en comparant les deux filles. « C’est vrai que la commandante Pilie accorde beaucoup d’attention au capitaine Mismis. »

« Oui, je suppose que c’est parce qu’elles sont trop semblables, alors elle voit notre commandante comme une rivale. »

En ce qui concerne les capacités, la commandante Pilie n’avait rien d’extraordinaire. Elle était en dessous de la moyenne en termes d’athlétisme et terriblement douée pour le tir ou l’utilisation de machines — Mismis était plus ou moins la même dans ces domaines.

La différence décisive était l’élitisme de Pilie et son désir de gravir l’échelle sociale qui en découle.

« Apparemment, elle fait régulièrement des demandes de promotion au siège de l’Empire. Elle est connue pour demander à être mise en lice pour des postes de direction dès qu’une ouverture se présente », murmura Jhin. « Elle n’est pas en position de se moquer de la patronne. Elle a beau se démener, elle n’arrivera jamais au QG avec ces notes médiocres. »

« Qu-qui appelez-vous médiocre !? » Le commandant Pilie s’était retourné à la remarque de Jhin. « C’est sûr, je ne suis pas si compétente que ça. C’est vrai. Mais mes notes sont à peine inférieures à la moyenne. Et Mismis est bien en dessous de la moyenne. Ça fait une sacrée différence ! »

« Pourtant, ça sonne vraiment pareil… »

« C’est différent ! » répondit-elle vivement à la remarque d’Iska. « Haah… Je n’arrive pas à y croire. Je n’ai aucune idée de la raison pour laquelle une Sainte Disciple comme Risya s’associerait à une commandante ratée comme toi. »

« Eh bien, nous avons été diplômées la même année, alors nous sommes amies. »

« C’est exactement ce que je trouve incroyable ! » La commandante Pilie pointa Mismis du doigt. « Les Saints Disciples sont les membres les plus honorables des forces et sont sélectionnés par Leur Excellence. Bien sûr, je me demande comment quelqu’un comme toi peut se lier d’amitié avec elle. »

« Tu es si dramatique, P. »

« Le suis-je ? Tu pourrais facilement utiliser ton amitié avec un Saint Disciple pour obtenir une recommandation au siège. »

Puis Pilie leva les yeux au plafond et murmura : « Je suis vraiment très jalouse », avant de poursuivre. « Aucune autre femme n’a réussi à gravir les échelons de la carrière comme ça. Recevoir un enseignement par elle, le soldat d’élite idéal, c’est mon rêve !... Oh, Risya, deviens ma patronne, s’il te plaît. Et recommande-moi aussi pour le quartier général ! »

Juste à ce moment-là… la porte de la salle de conférence s’ouvrit à nouveau.

« Heeey, Mismis, comment vas-tu ? »

« Risya !? »

Pilie se leva d’un bond.

Risya In Empire — la grande commandante aux traits intelligents et raffinés — aurait pu faire honte même à un mannequin. Bien qu’elle soit aussi jeune que Mismis, cette femme talentueuse avait été promue à une vitesse sans précédent jusqu’à ce qu’elle soit sélectionnée comme Saint Disciple, le poste le plus élevé de l’armée impériale.

***

Partie 2

« Mismis, Isk, Jhin-Jhin et Néné. Ouaip, on dirait qu’on a les quatre membres de l’unité 907 ici… hein ? » Après avoir regardé l’unité d’Iska, Risya déplaça son regard sur la cinquième personne présente dans la pièce — l’autre commandant. « Oh, c’est toi, P ? »

« C’est un honneur d’être en présence d’un mentor, Risya, madame ! Vous avez dû venir ici pour me voir ! »

« Non, pas du tout. » Elle ne tourna pas autour du pot. « En fait, je ne crois pas me souvenir d’être devenue ton mentor, P. »

« Quoi !? Mais ne voyez-vous pas à quel point je vous idolâtre ? Je suis supérieure à Mismis en tant que commandante dans tous les domaines ! »

« Tu ne réussis pas très bien à cacher tes arrière-pensées. » Risya fixa froidement la commandante Pilie et poussa un lourd soupir. « En plus, je sais que tu ne fais que me flatter pour obtenir une recommandation au quartier général. »

« Grk !? »

« Maintenant, comparons ton comportement à celui de Mismis ici ! »

Mismis écarquilla les yeux lorsque Risya l’attrapa par-derrière.

« Elle est peut-être l’exemple type d’un commandant incompétent, mais elle a la peau dure et elle est vraiment tranquille. Elle est maladroite et fait la grasse matinée, mais cela la rend encore plus difficile à gérer ! »

« Risya, ce n’est pas du tout un éloge ! »

« Mais c’est le cas. J’essaie de dire que tu es aussi mignonne qu’un chaton. »

« Mais tu me taquines toujours… »

« Uniquement parce que tes réactions sont tellement adorables. »

Mismis fit la moue et Risya tapota la tête de la commandante. La sainte disciple avait effectivement l’air aussi satisfaite qu’un propriétaire qui s’occupe de son animal de compagnie.

 

 

« Oh, il y a encore une chose importante que je devais te dire. Regarde ça, P. »

« Regarder quoi ? »

« Ça, juste là. » Risya pointa du doigt la poitrine de Mismis qui, ironiquement, était assez mature comparée à son visage de bébé. « N’est-elle pas incroyable ? Ses seins sont si gros que je ne peux même pas les couvrir avec mes mains ! Son taux de croissance est sans égal dans ce domaine. »

« Qu’est-ce qu’il y a de mal à avoir la poitrine plate !? » La commandante Pilie était devenue toute rouge.

La poitrine de la commandante Pilie était très modeste, ce dont elle était consciente.

« Hum… alors, Mme Risya ? Il y a quelque chose que nous nous demandons », dit Iska.

« Hm ? Qu’est-ce que c’est, Isk ? »

Iska avait autrefois été un Saint Disciple comme Risya jusqu’à il y a un an, lorsqu’il avait été rétrogradé pour des raisons particulières, et ils se connaissaient donc déjà l’un et l’autre.

« Vous êtes très occupée, n’est-ce pas, Mme Risya ? Alors, pourquoi nous chercher dans notre salle de conférence ? »

« Eh bien, c’est pour être sûr que Mismis ne s’enfuit pas quand elle entendra parler du camp d’entraînement. Il faut que je la tienne bien en main. »

En fait, elle tenait Mismis en ce moment même. On dirait qu’elle ne se contentait pas de chouchouter la commandante, mais qu’elle la retenait aussi.

« Alors, nous avons sécurisé Mismis. »

« … Argh. Je pensais que c’était suspect que tu sois passée… »

« Ah-ha-ha ! Bien fait pour toi, Mismis ! », s’était exclamée la commandante Pilie lorsque Mismis baissa la tête. « Et les caméras sur place filmeront exactement à quoi tu ressembles pendant que tu te démènes au camp d’entraînement ! »

« C’est valable pour toi aussi, P. » Ce seul commentaire de Risya suffit pour que Pilie se fige.

« Quoi ? »

« Vingt unités vont au camp d’entraînement à la fois. Pourquoi crois-tu que nous t’avons fait attendre dans la salle de conférence voisine ? »

« Vous ne pouvez pas dire que… »

« Ton unité va aussi au camp d’entraînement demain. »

« Noooooooo ! »

« Eh bien, faites un bon voyage en enfer. »

Risya entraîna Mismis et Pilie. Pendant ce temps, Iska partagea un regard avec Jhin et Néné en voyant les trois les abandonner dans la salle de conférence.

+++

Camp d’entraînement.

Les forces impériales étant en guerre permanente contre le Paradis des sorcières — également connu sous le nom de Souveraineté de Nebulis — le camp d’entraînement les formait à la variété de situations exigeantes qui pouvaient se présenter au cours de la bataille.

« Nos ennemis ne sont pas humains. Ce sont des monstres appelés sorcières. »

Territoire impérial, camp de la côte est.

Vingt unités d’élite avaient été rassemblées.

Devant une centaine de soldats impériaux, le commandant superviseur qui faisait office d’instructeur s’écria : « Ils partagent le sang de la grande sorcière Nebulis, qui a jadis réduit la capitale en cendres. Vous allez suivre un entraînement qui sera indispensable dans notre lutte contre les sorciers. »

« … Ahh. Je me souviens du cauchemar de l’année dernière. » La capitaine Mismis s’était affaissée, dépitée.

Ils avaient quitté la capitale la veille au soir et voyagé pendant quatorze heures, bercés par un véhicule de transport pendant tout le trajet. L’unité n’avait ni dormi ni mangé pendant tout ce temps, mais ce n’était qu’un autre aspect de l’entraînement.

« Je veux déjà rentrer à la maison… »

« Oh, Mismis, as-tu déjà abandonné ? » À côté d’elle se trouvait la commandante aux cheveux noirs, Pilie. « Je me suis déjà préparée au pire. Si tu te considères vraiment comme un commandant, tu devrais être plus préparé à donner l’exemple à ton équipe. »

« J’entends ta voix trembler, P. »

« Je tremble d’excitation ! »

« Les nouvelles recrues suivent normalement un camp d’entraînement pendant dix semaines. »

L’instructeur ne les quittait pas des yeux. C’était un homme d’âge moyen qui ressemblait à l’image même d’un soldat militaire, avec une vieille cicatrice d’apparence douloureuse en travers du visage.

« Mais vous êtes tous des professionnels qui ont survécu au champ de bataille à de nombreuses reprises. Je ne crains pas que l’un d’entre vous échoue à ce stade, et je n’ai pas l’intention de présélectionner l’un d’entre vous. »

« Oh ? » Mismis et Pilie avaient toutes deux penché la tête.

« Dis, P, ça ne te semble pas parfait pour nous ? »

« B-Bien sûr que oui. Nous sommes déjà des vétérans. »

« Oui, vous devriez fêter ça. » Les yeux de l’instructeur brillaient. « Pour m’assurer qu’aucun d’entre vous ne s’ennuie, j’ai préparé un programme d’entraînement très spécial. J’espère que vous profiterez tous pleinement des sept prochains jours. »

« Nooooooooon ! »

« C’est complètement inutile ! »

Les cris des deux commandantes résonnèrent dans tout le camp.

++

« … Et alors ? À ton avis, qu’est-ce que l’instructeur a prévu de nous faire faire dans ce grand espace ? »

Ils se trouvaient dans une clairière sablonneuse. Jhin, qui portait son uniforme de combat, s’étirait pour s’assouplir.

« Il a dit qu’il fallait d’abord s’échauffer. »

« Personnellement, je pense que nous allons courir », déclara Néné. « Regarde, il y a même des lignes blanches comme pour un marathon. »

Alors que Néné s’étirait à son tour, elle leva les yeux vers Iska.

« Iska ? Qu’est-ce que tu crois que nous faisons ici ? »

« Je n’en ai aucune idée. Cependant, je pense que ce serait trop facile si nous ne faisions que courir… »

Iska avait fini de s’échauffer plus tôt que les autres.

Tous les autres soldats, plus d’une centaine, étaient rassemblés sur le terrain et faisaient leurs propres exercices. La tension qu’Iska voyait sur leurs visages n’était probablement que le fruit de son imagination.

« Ouf… il faut rester calme. Il faut que tu arrives à passer une semaine comme ça… »

« Capitaine Mismis, il est là. »

L’instructeur était apparu dans la clairière, juste à l’endroit indiqué par Iska.

Il tenait un mégaphone.

« Désolé de vous avoir fait attendre. Eh bien, mettez-vous par groupes de deux. Associez le plus grand et le plus petit de votre unité, puis laissez ceux qui restent s’associer entre eux. »

« Des groupes de deux, hein. Nous sommes un groupe de quatre, alors on dirait qu’on va se séparer en deux paires. » La capitaine Mismis se tourna vers eux.

L’ordre du plus grand au plus petit au sein de l’unité 907 était le suivant :

Le tireur d’élite, Jhin.

Leur avant-garde (l’épéiste) Iska.

Leur responsable des communications, Néné.

Et la capitaine Mismis.

Puisqu’ils associaient les plus grands et les plus petits entre eux…

« Argh… c’est le pire. Dois-je être dans un groupe avec la patronne ? Il n’y a aucune chance que ça se termine bien. »

« On dirait que je suis avec toi, Iska. Dieu merci ! »

Tandis que Jhin soupira, Néné s’accrocha joyeusement à Iska. Pendant ce temps, derrière eux, la capitaine Mismis criait : « Qu’est-ce que ça veut dire !? »

« Mismis », cria également la commandante Pilie en faisant une apparition vaillante sur les lieux. « Hee-hee. C’est une excellente occasion. »

« Qu’est-ce qu’il y a, P ? »

« J’ai une proposition à te faire. Essayer de réussir ce camp d’entraînement va être une lutte, n’est-ce pas ? Et si nous rendions cela plus intéressant — quelque chose comme un jeu ? » La commandante aux cheveux noirs remonta ses lunettes. « Nous sommes probablement en train de former des groupes pour faire des relais. Et si nos paires s’affrontaient ? »

« … Quoi ? » Mismis se renfrogna ouvertement.

Après tout, en matière d’athlétisme, Mismis était la moins douée des forces impériales. Même si Pilie était elle-même en dessous de la moyenne, Mismis serait toujours désavantagée dans une compétition.

« Je suis nulle en course à pied. »

« C’est pour cela que nous sommes en binôme. Toi et le membre de ton unité devez travailler ensemble pour surmonter vos épreuves. C’est ce qui fait la beauté d’une équipe. »

« Alors, Jhin ? » La capitaine Mismis fit signe à Jhin avec ses yeux. « Tu as entendu ce que P a dit. Penses-tu que nous pouvons réellement obtenir une victoire ? »

« Laisse-la faire ce qu’elle veut. Mais je pense que nous avons exactement une chance sur deux de gagner. L’enjeu n’est pas mauvais. »

« Oh, beau travail, Jhin… alors, comment as-tu trouvé ça ? »

« Si j’étais seul, j’aurais cent pour cent de chances de victoire. Tu en aurais zéro pour cent. La moyenne de ces deux taux est de cinquante. »

« Vraiment, Jhin !? » s’exclama Mismis.

« Ah-ha-ha ! Tu es si naïve, Mismis ! Crois-tu que tu as cinquante pour cent de chances de gagner ? » La commandante Pilie gonfla sa poitrine et rit bruyamment. « Tu devrais tenir ta langue jusqu’à ce que tu voies mon partenaire. Viens, Bruno ! »

« Hé ! »

Ses pas firent trembler le sol dans un bruit sourd.

Un véritable géant se tenait derrière la commandante aux cheveux noirs, mesurant un mètre quatre-vingt-dix. La nouvelle recrue musclée qui était apparue pesait probablement plus de quatre cents livres.

« Comment peut-il être l’un des membres de ton unité ? P, tu n’avais personne comme lui avant ! »

« C’est une nouvelle recrue. »

À côté de lui, Pilie avait l’air d’une véritable enfant.

« Je l’ai repéré afin d’être sûre d’entrer dans le quartier général. »

« C’est tellement injuste ! »

« Une partie du rôle de commandant consiste à recruter des talents supérieurs. Et si je suis avec Bruno, alors ce match est dans la poche ! »

Le soldat était aussi grand qu’un géant. Rien qu’en le regardant, on avait l’impression qu’il s’agissait d’une montagne.

« Maintenant, instructeur, dis-nous ce que nous faisons ! »

« Eh bien, tout le monde, en guise d’échauffement, nous allons faire un marathon à deux. Il y aura cinq kilomètres, et vous porterez un certain poids. »

L’annonce résonna dans tout le terrain.

***

Partie 3

La commandante Pilie acquiesça comme si elle s’y attendait. « C’est exactement ce que j’espérais. Avec toi dans les parages, Bruno, je suis sûre que nous pourrons transporter un peu plus de bagages, facilement — ! »

« Vous porterez votre partenaire. »

« Hein ? »

« Le plus petit porte le plus grand. Et vous courrez tout au long de la forêt. »

Le silence s’abattit sur toute la clairière. Le bon sens aurait voulu que la personne la plus grande porte la plus petite. Alors pourquoi faisaient-ils le contraire ?

« Oh, en d’autres termes, suis-je censée te porter et courir ? Est-ce bien ça ? » demanda Néné à Iska. Elle frappa son poing contre son autre paume.

« Penses-tu que tu es prête pour ça, Néné ? »

« Bien sûr ! Allez, monte sur mon dos… Hee-hee. Je peux sentir à quel point tu es chaud. »

« … Pourquoi as-tu rendu tout cela si effrayant !? »

Néné semblait heureuse.

Le problème, c’est le couple formé par Jhin et la capitaine Mismis. Sans grande surprise, les jambes de Mismis se mirent à trembler dès que Jhin se plaça sur son dos.

« Capitaine Mismis, vas-tu bien ? »

« Suis-je censée courir comme ça !? Ce n’est pas possible que je puisse faire ça pendant cinq kilomètres. Je n’ai même pas réussi à faire une centaine de mètres ! »

« Si vous faites tomber votre partenaire avant d’avoir terminé, vous recommencez tout de suite. »

« Quel genre de règle est-ce là !? »

Les soldats avaient crié. Ce serait sans doute difficile, même pour les hommes les plus costauds d’entre eux. Il se trouve que c’est la commandante à côté de Mismis qui poussa le cri le plus fort de tous.

« C’est absurde ! »

La commandante Pilie était une femme de petite taille, et son partenaire était un homme gigantesque, si bien que même le fait de le soulever serait un défi.

« Urgh !? B-Bruno, tu pourrais faire un peu de régime ! »

« Bien sûr, je vais me pencher sur la question. »

« Guh ! J-Juste regarde ! Guuuuh ! »

Le visage de Pilie était devenu rouge lorsqu’elle souleva Bruno. Comme il se doit pour une commandante, elle avait la force de soulever ce géant de plusieurs centaines de kilos.

Mismis la regarda avec admiration.

« Tu es incroyable, P ! »

« O-bien sûr que si… guh… courir en portant ce membre d’unité si petit que tu as là ne serait pas un véritable entraînement pour moi… ! »

« Alors c’est une course. »

« Quoi ? »

« Comme tu l’as dit, P. Je porterai Jhin et ferai de mon mieux, moi aussi. »

« Oh… eh bien… à ce propos. »

Les jambes de la commandante Pilie tremblaient rien qu’à cause du poids de son subordonné, mais malheureusement pour elle, Mismis ne l’avait pas remarqué.

« Euh, euh, Mismis ? En fait, je voudrais annuler le — ! »

« Vous pouvez commencer. »

« Allons-y, Jhin ! »

« Non, atttttenddezzzz ! »

Tous les soldats impériaux présents dans la clairière se mirent à courir en même temps. Mismis portait Jhin sur son dos. Néné portait Iska. Plusieurs dizaines de binômes s’élancèrent vers la forêt qui se trouvait devant eux.

Et un seul groupe avait été laissé pour compte.

« Tu es trop lourd ! Comment est-ce que c’est censé être un échauffement ? Je ne peux même pas courir ! »

« Commandante, ne devrions-nous pas rejoindre tous les autres ? »

« Tu es trop lourd pour que je puisse te porter ! »

Alors que la poussière s’élevait dans la clairière, le mugissement de lamentation de la commandante Pilie résonna tout autour.

+++

Leur objectif se trouvait dans les bois.

« Ouffff, haah… haah… marathon de trois miles, mes fesses… ! »

La commandant Pilie s’appuyait contre un arbre, la sueur recouvrant tout son corps. Naturellement, elle était à la dernière place.

« Ce maudit instructeur. Je n’arrive pas à croire qu’il ait changé l’objectif juste avant qu’on arrive à la ligne d’arrivée. Nous avons dû courir un demi-mile de plus — on peut aller trop loin quand on joue avec les émotions des gens, tu sais. »

« Hee-hee. C’est la première fois que je gagne contre toi dans une compétition, P ! » À côté d’elle, Mismis était de bonne humeur.

« Ce n’est pas vraiment une victoire quand tu es avant-dernier », plaisanta Jhin.

« Oh, Jhin, ne dis pas ça. Tout ce que tu avais à faire, c’était de rester sur mon dos », dit Mismis, qui semblait pourtant déborder d’énergie. Comme Pilie avait mis beaucoup de temps à terminer, tout le monde avait fait une longue pause, y compris Mismis et Néné.

« … Ce… ce n’était pas censé se passer comme ça. »

« Ça va, P ? »

« Épargne-moi la pitié ! Les conditions de la course étaient tout simplement injustes, c’est tout. Tu ne peux pas vraiment croire que tu as gagné simplement à cause de ça. » La commandante Pilie grinça des dents. « Le prochain exercice sera la vraie compétition. Le camp d’entraînement ne fait que commencer ! »

« Bon travail, vous tous ! »

L’annonce de l’instructeur résonna dans les bois. Sa voix calme était aux antipodes du ton enflammé de Pilie.

« Il y a encore six miles à parcourir avant d’arriver au camp. Vous traverserez directement la forêtmais soyez prévenu — les bêtes sauvages font souvent leur apparition dans le coin. »

« Il s’agit donc d’un scénario qui suppose que nous pourrions vivre une guérilla dans une jungle. Excellent. »

Pilie avait un fusil à la main. À côté d’elle, Mismis tenait une arme de poing.

« Les bêtes… que devons-nous faire, P ? Et si nous tombons sur un lion ? »

« Il n’y a pas de lions dans la jungle, Mismis. Tu devrais plutôt te préoccuper des ours sauvages. »

Les vingt unités s’enfoncèrent dans les bois. Mismis et Pilie, en tant que commandantes, ouvrirent la voie à travers la végétation tandis qu’Iska, Néné et Jhin les gardaient par-derrière.

« Dis, Iska, vu à quel point le camp d’entraînement est diabolique, ils ont probablement installé des pièges par ici. Nous devrions prévenir la capitaine Mismis de faire attention. »

« Oui, nous devrions probablement le faire au cas où. »

Ils coururent jusqu’à arriver à côté de Mismis.

« Comment ça se passe, commandante ? Le reste d’entre nous a gardé l’œil ouvert, mais si tu repères quelque chose de suspect, fais-le-nous savoir. »

« Je n’ai rien vu… mais qu’en pensez-vous ? »

Mismis s’était arrêtée dans son élan.

La commandante Pilie, qui se tenait également à côté d’elle, échangeait des regards inquiets avec ses subordonnés.

« P, qu’en penses-tu ? »

« Ne me demande pas mon avis. Ce n’est pas comme si nous pouvions marcher dans ce marais boueux sans fond. »

Oui. Un marais noir et trouble s’étendait devant eux, leur barrant la route.

« Je ne suis pas sûr de dire qu’il est sans fond, mais il a l’air assez profond. »

La commandante Pilie essaya d’enfoncer un bâton dans l’eau pour en vérifier la profondeur, mais elle n’arriva pas à atteindre le fond.

« Ça doit me monter jusqu’à l’estomac… ou peut-être même plus profondément. Nous devrions probablement le contourner », dit Pilie assez fort pour que l’unité derrière elle l’entende, « Tout le monde, nous devons faire marche arrière sur une dizaine de mètres. Dirigeons-nous plus à droite de la piste des animaux de tout à l’heure ! »

« Capitaine Mismis, Capitaine Pilie, vous avez mal compris la mission. »

« … Comment ça ? »

À ce moment-là, ils entendirent une voix sévère s’adresser à eux. L’instructeur avait envoyé une transmission simultanée à travers tous les communicateurs qu’ils avaient apportés.

« J’ai dit de continuer à avancer tout droit. »

« … Ce qui veut dire ? »

« Utilisez votre tête. Vous avancez à travers une jungle. Les forces des sorcières se rapprochent des deux côtés et derrière vous. Pensez-vous pouvoir vous permettre de perdre du temps à battre en retraite alors que vous êtes encerclé ? »

« Vous ne pouvez pas vouloir dire… » La commandante Pilie était à bout de nerfs.

« Vous foncez vers l’avant dans le marais. »

« Je le savais ! »

Pilie regarda le brouillard noir. En y regardant de plus près, de minuscules insectes flottaient dans l’eau. Si des larves de moustiques vivaient dans l’eau, il y avait fort à parier que des moustiques adultes s’y trouvaient aussi, ainsi que des tonnes d’autres micro-organismes.

Si l’un d’entre eux avait des plaies ouvertes, il finirait par avoir des parasites.

« Je vais entrer en premier. Capitaine Mismis, tu entres après moi. »

« Iska, es-tu sûr que ça va aller !? »

Il s’était avancé et avait immédiatement posé le pied dans le marais.

Dwoosh…

La pointe de sa chaussure s’était enfoncée dans l’eau. Une fois qu’il eut la poitrine dans l’eau, il atteignit enfin la partie la plus basse du marais.

« Vas-tu bien ? »

« Heureusement, mes pieds peuvent atteindre le fond. Mais je pense qu’il atteindrait ton cou. »

L’odeur et la vase imprégnaient ses vêtements. C’était tout à fait révoltant. Elle avait traversé toutes les couches de ses vêtements, de son uniforme de combat jusqu’à ses sous-vêtements.

« Capitaine Mismis, tu y entres doucement. »

« Oui… oui. Ah ! C’est le pire. Ça m’a éclaboussé la bouche… ! » Mismis se renfrogna.

Jhin et Néné les suivirent. Les unités qui les observaient derrière eux s’étaient renforcées en s’engageant elles aussi dans le marais.

Il y avait pourtant parmi eux une seule commandante qui n’avait pas bougé. Elle se contentait de fixer le marais en fronçant les sourcils.

« P, dépêche-toi d’y aller. »

« Je — Je sais… ! »

La commandante Pilie était pâle lorsqu’elle tendit la jambe. Elle poussa un petit glapissement au moment où son pied rencontra l’eau.

« Argh ! De toutes les choses que nous devions faire, pourquoi fallait-il que ce soit mon pire cauchemar… ? »

Enfoncée jusqu’aux épaules dans le marais, elle commença à marcher, le visage tendu.

La commandante Pilie se dirigea vers le côté de Mismis.

« P, tu n’as pas l’air en forme. »

« Ceux qui sont d’accord avec ça doivent être à côté de la plaque. Argh… l’eau du marais m’arrive sur le visage, et je vois ces bestioles duveteuses s’agiter sous mes yeux. Et la substance est même à l’intérieur de mes vêtements. »

Elle continua à s’enfoncer dans le marais en hésitant.

S’ils avaient été dans l’eau claire d’un océan ou d’une rivière, ils auraient pu voir le fond, mais en l’état, ils n’avaient aucune idée de ce qui se cachait en dessous.

Néné et Iska avaient murmuré l’un à l’autre.

« Iska, penses-tu qu’il pourrait y avoir des alligators qui se cachent ici ? »

« Ils vivent dans l’eau douce, alors peut-être. Nous devrions surveiller la surface. Vérifie qu’il n’y a pas de bulles suspectes. »

« Des alligators !? » En surprenant leur conversation, la commandante Pilie tressaillit. « Argh, jusqu’où va ce marécage ? Pour quelqu’un élevé avec ma lignée, c’est l’entraînement le moins adapté auquel je puisse penser… ! »

« P, fais attention devant toi. »

« Quoi ? »

« Un serpent nage devant toi, alors fais attention. »

« … »

Les pupilles de Pilie se contractèrent. L’eau lui arrivait aux épaules, elle était donc au niveau des yeux du serpent. Elle le regarda dans les yeux,

« Ahhhhhhh !? » Le cri le plus fort qu’ils aient jamais entendu résonna dans les bois.

« S’il te plaît, aide-moi, Mismis ! »

« Il s’est déjà éloigné en glissant. »

« Quoi ? »

Pilie s’accrocha au bras de Mismis et cligna des yeux, les yeux écarquillés.

« On dirait que ton cri l’a fait fuir. »

« Ce n’était pas un cri tout à l’heure. Euh, euh… Je prévenais mes subordonnés du danger, c’est ce que je faisais ! En fait, Mismis, comment vas-tu en ce moment !? »

« Qu’est-ce que tu veux dire ? »

« Je — je veux dire, c’est un marais malodorant et insalubre. Le serpent était juste devant tes yeux. »

« Vraiment ? »

« C’était le cas ! »

« J’aurais peur que cela soit un venimeux, mais les animaux ne me dérangent pas. »

***

Partie 4

Mismis continuait à avancer dans le marais. À la tête du grand groupe, elle semblait vaillante et rassurante, même aux yeux d’Iska et des autres subordonnés.

« … Mais c’est un marécage. N’es-tu pas dégoûtée ? »

« Quand j’étais enfant, je jouais tout le temps dans la boue. Cet entraînement ne sera peut-être pas si mal, en fait. »

« Qu-Quoi !? » Pilie était restée sans voix pendant un moment. « Es-tu en train de dire que tu aimes ça ? »

« Je n’aime pas ça, mais c’est mieux que de courir ou de nager ou tout ce qui demande d’être plus actif, tu ne crois pas ? »

« Penses-tu que c’est facile ? » La commandante Pilie écarquilla les yeux sous le choc.

Ce n’est que maintenant qu’elle réalisa comment Mismis était devenue un commandant impérial. Elle était bien en dessous de la moyenne en ce qui concerne les capacités physiques, surtout pour quelqu’un des forces impériales. Cependant, ce que cet exercice exigeait, ce n’était pas un corps d’acier, mais un cœur d’acier. Une peau épaisse, en d’autres termes.

Même le plus courageux des soldats peut avoir une dépression mentale. Mais quelqu’un qui peut aller de l’avant dans des conditions difficiles, dans la boue et le fumier, possède la force de volonté nécessaire pour supporter l’agonie de la guerre. C’est ce qu’avait Mismis.

« C’est vrai… Je ne peux pas imaginer que Mismis soit rebutée par des nuées d’insectes ou un peu de boue… »

Mismis s’enfonça dans le marais. Il y avait un grand groupe d’hommes bien plus grands qu’elle, mais ils semblaient pourtant la suivre naturellement.

Allons là où elle se dirige.

Le commandant Pilie avait frémi devant la situation.

« N-non, je ne peux pas accepter ça… Je ne peux pas me permettre d’être vaincue par un autre commandant, même au camp d’entraînement ! »

Mismis ne s’était même pas souciée de l’eau du marais qui l’éclaboussait. Alors qu’elle se faufilait dans l’eau pour les guider, les autres suivaient derrière… jusqu’à ce que quelqu’un la dépasse.

« Heh-heh. Qu’en penses-tu maintenant, Mismis ? Regarde, j’ai pris la tête en un clin d’œil ! »

« Fais attention, commandante Pilie », Iska l’appela alors qu’elle s’avançait de plus en plus loin. « Il faut que je te dise quelque chose. »

« Oh, n’es-tu pas l’un des hommes de Mismis ? Qu’est-ce qu’il y a ? » Pilie afficha un sourire victorieux. « As-tu compris ce qui fait la différence entre moi et Mismis ? C’est sans pitié, mais les forces impériales, c’est un monde où l’on mange du chien. Seuls les meilleurs peuvent travailler au quartier général. Et c’est moi qui — ! »

« Tu as une sangsue sur le dos. »

« Excuse-moi ? »

Une sangsue — une sorte de limace qui vit dans les marais et suce le sang humain. Et l’une d’entre elles était collée sur son dos.

« P... ! » Voyant cela, Mismis lui lança un regard compatissant. « As-tu pris les devants parce que tu savais qu’il y avait des sangsues dans ce marais ? Tu me protégeais, n’est-ce pas ! »

« Attends une seconde !? »

La commandante se tortilla de panique, mais la sangsue ne se détacha pas.

« Enlève-le ! Tu t’appelles Iska, c’est ça ? Enlève-moi cette chose immédiatement ! »

« Compris. Il n’y a pas lieu de paniquer. »

« Je déteste les sangsuuuuuues ! »

Elle pleura en faisant sa pitoyable confession.

+++

Il faisait nuit dans la jungle.

Vingt tentes avaient été installées dans le camp impérial.

Snap, snap, snap…

Ils avaient allumé un feu de camp pour éloigner les bêtes et s’étaient aspergés d’insectifuge avant de se coucher.

Ils portaient encore les mêmes vêtements que lorsqu’ils avaient traversé le marais.

« Ahh. Mes vêtements ne sont encore qu’à moitié secs. C’est tellement dégoûtant. Et il y a encore de la boue dans ma queue de cheval… »

Après avoir terminé les rations, que l’on pouvait difficilement qualifier d’appétissantes, Néné baissa les épaules, déçue.

L’extinction des feux était prévue à 20 heures.

À cette heure de la nuit, le quartier des affaires de la capitale impériale aurait été en pleine effervescence, mais ils se trouvaient dans une jungle loin du centre-ville. Une fois que huit heures sonnèrent, toute la zone fut enveloppée dans l’obscurité.

« Iska, on se réveille à trois heures du matin, c’est ça ? »

« C’est ce qu’on nous a dit. C’est un peu tôt, mais c’est la norme pour un camp d’entraînement. Quant à savoir si nous pouvons vraiment dormir, c’est une autre histoire », répondit Iska, dont les vêtements étaient également couverts de boue.

Même s’ils s’entraînaient en pensant qu’il s’agissait d’une longue bataille, la sensation désagréable des vêtements contre leur peau les affectait toujours. Leur grande expérience militaire ne pouvait rien y changer.

« Ahh. Je n’arrive pas à croire que nous sommes couverts de boue dès le premier jour. Je suis tellement déçue », dit Néné.

Elle se renfrogna en regardant ses vêtements.

« J’étais tellement excitée à l’idée de séjourner à nouveau dans une tente avec Iska après si longtemps. Mais vu à quel point nous sommes boueux, il n’y a sans doute pas beaucoup de chances qu’il se passe quelque chose d’excitant avec toi pendant la nuit. »

« Qu’est-ce que tu attendais au juste !? »

Il détourna son regard des yeux de chiot un peu suspicieux de Néné.

« Jhin, dis quelque chose, s’il te plaît. »

« Ne lui prête pas attention. Elle ne fait que débiter des bêtises », répondit Jhin sans ambages et s’allongea à l’arrière de la tente. « Ça fait un moment qu’on n’a pas campé, et vous donnez tous l’impression que c’est une sortie scolaire. Hé, Néné, laisse la surveillance à l’escouade et dormons tous un peu. »

« Quoi… ? Mais… »

Néné avait l’air malheureuse.

« Je n’ai pas encore sommeil. Et mes vêtements sont dégueulasses puisqu’ils sont encore à moitié mouillés. »

« Ferme les yeux et tiens-toi prête. Nous avons encore un long chemin à parcourir… » Jhin s’arrêta en plein milieu de la phrase.

« Exactement ! » Soudain, une silhouette apparut à l’entrée de la tente de leur unité. « Bonjour, Mismis. J’ai eu une défaite inattendue et embarrassante aujourd’hui, mais c’est maintenant que le vrai camp d’entraînement commence ! »

La commandante Pilie était passée dans son uniforme de combat couvert de boue. L’entraînement de l’après-midi avait manifestement fait des ravages. Son visage était encore pâle.

« Nous réglerons cela demain !... Attends, Mismis ? »

« Elle est déjà endormie. »

Iska pointa du doigt le centre de la tente. La capitaine Mismis était déjà recroquevillée dans son sac de couchage, profondément endormi. Elle ne montrait aucun signe de réveil, bien que Pilie ait crié son nom à tue-tête.

« Elle ne se réveillera pas avant le matin. En fait, elle dormira probablement jusqu’à l’après-midi si nous ne la réveillons pas. »

« Quelle impudeur peut-elle avoir !? »

Pilie avait également repéré les récipients de rations dans lesquels Mismis avait mangé. Les rations étaient censées rester comestibles le plus longtemps possible, c’est pourquoi elles avaient un goût épouvantable. Même les soldats en pleine forme physique n’avaient pas réussi à trouver en eux la force de les finir.

Mismis, en revanche, avait tout mangé. Son estomac était loin d’être ordinaire.

« … J’ai dû abandonner à mi-parcours. »

« La commandante a semblé apprécier la nourriture. Elle ne chipote pas sur le goût des choses. »

« Quel genre de palais a-t-elle !? »

Pilie recula sans réfléchir.

« Eh bien… Je suppose que je devrais réévaluer l’impression que j’ai eue de toi, Mismis. »

Elle avait terminé les rations qui brisaient même les hommes les plus robustes, et les dures conditions de sommeil ne l’effrayaient pas.

Pilie s’était une fois de plus rendu compte que Mismis avait vraiment une volonté de fer. Ses capacités physiques étaient évidemment insuffisantes, mais elle possédait une compétence militaire utile qui méritait d’être mentionnée, même si elle n’était pas mesurable par les moyens habituels.

« Je t’ai sous-estimée… C’est donc pour cela que Risya s’est intéressée à toi. On dirait que tu as quelques talents. »

« Non, je pense que Mme Risya aime simplement l’apparence de la capitaine Mismis. »

« Non, je sais que j’ai raison sur ce point ! » Pilie serra le poing et cria. « Je comprends maintenant. Mismis était ma véritable rivale depuis le début. C’est mon chemin pour devenir un membre d’élite des forces et trouver un moyen d’entrer dans le quartier général — en battant ma plus grande rivale ! »

« Tu crois ? »

« J’en doute », dit Néné.

« Tu la surestimes. La patronne n’est pas si spéciale que ça. »

Malgré leurs remarques, la commandante Pilie avait déjà pris sa décision et ne voulait tout simplement pas écouter — elle était trop absorbée par elle-même pour s’en rendre compte.

« Mais je ne perdrai pas contre elle. Tu ferais mieux de te préparer, Mismis ! Donnons tout ce que nous avons demain ! », puis elle se retourna, semblant satisfaite d’elle-même. « Bonne nuit, Mismis. Je te verrai demain matin ! »

« Elle n’a rien entendu de tout cela parce qu’elle dort, et pourtant… »

Pilie s’était éloignée d’un pas vif.

Alors que la commandante continuait de roupiller, Iska, Jhin et Néné échangèrent des regards.

« Il semble que ce soit une énorme aubaine pour la capitaine Mismis que sa réputation s’améliore rien qu’en dormant… »

« Je suis un peu jalouse. »

« Laisse-la tranquille. Nous devons nous aussi nous coucher bientôt. »

***

Partie 5

Le matin arriva.

« Bonjour à toutes et à tous. »

L’instructeur hocha la tête en signe de satisfaction après avoir inspecté la ligne de cent soldats.

« Si vous aviez été de nouvelles recrues, certains d’entre vous auraient échoué hier soir. Je n’en attends pas moins d’un groupe qui a une longue histoire de service. Je suis heureux de voir que vous êtes bien reposés. »

« Hmph… Il a l’air si peu sincère. C’est éhonté, n’est-ce pas, Iska ? » Néné se frotta les yeux endoloris. « S’il voulait vraiment nous laisser passer une bonne nuit de sommeil, il nous aurait laissés prendre une douche. Et j’aurais aimé qu’il nous laisse nous retirer ces vêtements boueux. »

« C’est juste une de ces choses qu’on dit pendant l’entraînement. »

« Je sais, mais quand même… » Néné croisa les bras, toujours mécontente.

En revanche, Mismis, qui avait très bien dormi, était en pleine forme.

« Hein ? P, tu as des cernes sous les yeux. »

« Grk !? »

« N’as-tu pas bien dormi hier ? Est-ce que tu vas bien ? »

« … Je ne comprends pas comment on peut être insensible au point de dormir pendant cette soirée. Mais ton inquiétude n’a pas lieu d’être ! » Pilie fixa Mismis de ses yeux fatigués et injectés de sang, et elle fit grincer ses dents. « Ce camp d’entraînement ne suffit pas à me faire peur. Pourquoi, hier encore, je m’ennuyais tellement que je baillais ! »

« … Oh ? »

« Quoi ? Moniteur !? »

Il était apparu sous les yeux de Pilie. Le militaire chevronné plissa les yeux de plaisir en entendant ses propos audacieux.

« C’est ça l’idée, commandante Pilie. Alors, l’entraînement que j’avais soigneusement planifié est une partie de plaisir pour vous, c’est ça ? Cela fait un moment que je n’ai pas entendu une femme telle que vous dire quelque chose avec autant de nerfs. »

« Ah-wah… n-non, ce n’est pas ce que je voulais dire. J’étais juste en train d’énerver Mismis… »

« Pour moi, cela ressemblait plus à une déclaration d’amour passionnée. Ne vous inquiétez pas. J’ai préparé une série d’exercices très stimulants pour les six jours restants. »

« Noooooon ! »

Le deuxième jour du camp d’entraînement, les gémissements de la commandante Pilie avaient résonné une fois de plus à je ne sais quelle heure ce jour-là.

« Très bien, tout le monde, mettez ces menottes à vos poignets et à vos jambes. »

Tout le monde avait été immobilisé avant d’être attaché à l’arrière d’une grosse voiture et traîné sur une route de gravier. Cet exercice était censé les préparer à un scénario dans lequel ils seraient capturés par des sorcières.

« Aie aie aie aie ! Allez, arrête ! Cela devrait suffire. S’il te plaît, arrête la voiture ! J’ai été brûlée par les frottements ! »

Alors que le véhicule la traînait de l’autre côté du terrain, la commandante Pilie disparaissait dans un nuage de poussière.

Finalement, même ses cris s’étaient éteints.

« Wôw… ! »

En regardant cette scène horrible, Mismis fronça le visage, et même les soldats masculins costauds qui se tenaient derrière elle eurent un mouvement de recul.

« I-Iska, cela ne semble-t-il pas encore plus exigeant physiquement que l’entraînement d’hier ? »

« Les hommes sont traînés sur deux cents mètres, tandis que les femmes sont traînées sur cent mètres. »

« On dirait quand même que P est traîné sur quatre cents mètres, non ? »

« Je suppose que c’est la façon dont l’instructeur montre son affection pour elle… »

Ils ne seraient pas forcément épargnés par une expérience similaire. La tradition au camp d’entraînement voulait que chaque jour qui passait devienne plus brutal.

« Il ne reste plus que six jours à passer, commandante. »

« … Bien. »

« Allons à ton barbecue préféré une fois que tout cela sera terminé. »

« … D’accord. »

La capitaine Mismis, elle, était déjà devenue pâle comme un fantôme.

+++

Enfin, le septième jour du camp d’entraînement était arrivé.

C’était la dernière matinée qu’ils passeraient là-bas. Les soldats, qui avaient terminé leur formation, étaient actuellement rassemblés au plus profond de la jungle, sous une falaise abrupte.

Ou plutôt, ce n’étaient pas tant des soldats que des cadavres gisant sur le sol.

« Je n’en peux plus… Je ne peux pas manger une bouchée de plus de ces rations dégueulasses », dit Néné. « Je veux retourner à la capitale et prendre un repas décent dès que possible… »

« Allez, décolle du sol, Néné. Iska, comment se passe la situation là-bas ? »

« La commandante s’est effondrée et ne bouge plus. »

Jhin aida Néné à se lever. Au-delà d’eux, Iska essayait de parler à Mismis, qui était allongée face contre terre.

« Allez, commandante. »

« J’ai atteint ma limite… »

« Ne dis pas cela. Écoute, nous devons nous aligner maintenant. Et l’hélicoptère devrait aussi bientôt venir nous chercher. »

Les soldats allaient être ramenés à la capitale à l’aide d’un hélicoptère après la fin de l’entraînement. Il ne leur restait plus qu’à attendre.

« Bravo à tous pour avoir réussi à passer le camp d’entraînement d’une semaine. »

La voix de l’instructeur retentit. Il s’adressait à eux par l’intermédiaire de haut-parleurs, il n’était donc visible nulle part.

« L’hélicoptère arrivera bientôt. L’une des personnes les plus haut placées sera à bord de l’hélicoptère, et je suis sûr qu’elle vous exprimera sa gratitude pour avoir suivi un entraînement aussi rigoureux. »

« C’est enfin fini ! » La commandante Pilie, qui était pâle et brûlée, s’était levée en tremblant. « Maintenant, il ne nous reste plus qu’à rentrer chez nous en hélicoptère… ah, un repas chaud et un lit… puis je prendrai un bain et je serai débarrassée de cette boue. »

« Cependant… »

« Cependant… ? »

« J’ai une annonce malheureuse à vous faire à tous. Le lieu d’atterrissage de l’hélicoptère a été modifié. Il n’arrive plus au pied de la falaise. »

« … Pouvez-vous répéter ? »

Les sourires de Pilie et de Mismis se figèrent.

« Il arrivera en haut de la falaise en face de vous. »

« En haut de la falaise !? »

Pilie pâlit en regardant vers le haut.

C’était escarpé et cela mesurait vingt mètres de haut. Et bien sûr, il n’y avait pas la moindre corde ou échelle pour les aider à grimper.

« Ce n’est pas possible… »

« Utilisez vos mains nues pour escalader la falaise. C’est votre dernier exercice pour le camp d’entraînement. »

« Vous vous moquez de moi ! Nous sommes déjà à bout ! »

« L’hélicoptère ne restera ici qu’une heure. Tous ceux qui n’arriveront pas à temps seront laissés sur place. »

Au pied de la falaise, les gémissements des soldats déchirèrent l’espace. Leur dernière épreuve commençait.

++

« C’est terrible ! Personne n’a parlé d’un exercice final ! » se lamenta la capitaine Mismis en tâtonnant désespérément la paroi rocheuse rugueuse. « Alors si on n’escalade pas cette falaise, on va rester coincés ici !? »

« Hé, patronne, tu n’as pas intérêt à glisser ! »

« Je — Je sais ! » Mismis fit nerveusement un signe de tête à Jhin, qui se trouvait juste en dessous d’elle.

Il avait plu la nuit dernière, si bien que la paroi rocheuse était glissante. Ils n’étaient pas simplement à leur limite physique. S’ils ne mettaient pas à rude épreuve leurs nerfs déjà complètement usés, ils perdraient leur prise et tomberaient.

« Si tu tombes ne serait-ce qu’une fois, nous devrons remonter et nous n’arriverons pas à temps. »

« Oui… oui. Iska, Néné, comment ça va ! » demanda Mismis.

« Je pense que je me débrouillerai. Comment vas-tu, Iska ? »

« Je vais bien. Capitaine Mismis, cette zone de la falaise a beaucoup de crevasses, alors il sera plus facile de grimper. »

Iska escaladait le rocher au-dessus d’eux. Mismis était derrière lui, puis Néné, puis Jhin. Cependant…

L’instructeur avait ajouté une stipulation selon laquelle toute l’unité devait être attachée ensemble par une corde. Si une personne glisse, tout le monde tombe. Quelle règle malveillante !

« Attends une seconde, Iska. Je suis nulle pour ça… »

« Capitaine Mismis, lève ensuite ton pied droit. Et tends la main vers cette crevasse là-bas. »

« Je ne suis pas sûre de pouvoir l’atteindre… »

Grimper n’était pas une tâche facile pour Mismis qui était si petite. L’unité de la commandante Pilie les suivait de près.

« C’est notre dernière épreuve de force, Mismis. Allez, tout le monde. Nous y sommes presque. Nous devons passer devant l’unité 907 pendant que Mismis se débat… arrivons vite en haut de la falaise ! »

Alors que Pilie s’impatientait, ses doigts glissèrent.

« Oh… »

« Attention, P ! »

Elle commença à tomber, avant que quelqu’un ne la rattrape juste à temps — pas un de ses subordonnés, mais Mismis elle-même.

« Est-ce que ça va ? »

« T-tu… » Pilie fixa Mismis comme si elle n’arrivait pas à y croire. « P-Pourquoi m’as-tu attrapée… ? Toute ton unité serait tombée si tu étais tombée en essayant de m’aider ! »

Ils étaient tous épuisés par les sept jours de camp d’entraînement, et Mismis devait aussi avoir atteint sa limite. Alors pourquoi ?

« Quoi ? Eh bien, tu es mon amie. »

« … Hein !? »

Amie.

Ce mot avait laissé Pilie sans voix. Elle avait pensé que Mismis se contenterait d’expliquer qu’ils étaient des membres des forces impériales ou un truc dans le genre.

« Tu veux dire que nous sommes amies… ? »

« N’est-ce pas ? »

« Tu es tellement… »

« Quoi ? » La capitaine Mismis lui jeta un regard innocent. Pilie avait été sûre de détester l’autre femme, mais les yeux de Mismis étaient si éblouissants en cet instant qu’elle n’avait pas supporté de regarder sa collègue commandante.

« … Pfft ! »

« P ? »

« Je vais donc l’admettre. Capitaine Mismis Klass, tu m’as surpassée. »

Elle avait resserré sa prise sur la main qui tenait la sienne. Pour la première fois de sa vie, et avec un sourire serin, Pilie avait reconnu sa propre défaite.

« Je reconnais que tu as gagné — juste aujourd’hui. »

+++

La formation finale.

La centaine de soldats avait utilisé ses dernières forces pour escalader la falaise jusqu’à l’hélicoptère qui les attendait au sommet. Les instructeurs et les hauts responsables de l’Empire les y attendaient. Un invité spécial était venu les accueillir chaleureusement après qu’ils aient enduré les brutalités du camp d’entraînement.

« Yoo-hoo, tout le monde. Comment allez-vous tous ? »

« Huh ? Risya !? » Les yeux de Mismis s’écarquillèrent.

Risya, la sainte disciple, était apparue en sortant de l’hélicoptère. « Mm-hmm. On dirait que vous êtes tous plus mal en point. Mais vous avez fait du bon travail. »

« Risya !? » cria Pilie.

À ce moment-là, elle avait escaladé la falaise et s’était approchée de Risya à toute vitesse.

« Vous êtes venue ! Jetez un coup d’œil, s’il vous plaît ! J’ai fait un si beau travail ! »

Des larmes avaient commencé à se former dans ses yeux. Elle avait tendu les bras pour se faire prendre dans les bras.

« S’il vous plaît ! S’il vous plaît, envoyez-moi au quartier général cette fois-ci ! »

« Ah, tu as vraiment travaillé dur. »

« Ma chère mentore ! »

Risya avait ouvert les bras pour l’accueillir, alors Pilie avait couru vers l’avant…

« Bon travail, Mismis ! »

« … Hein ? »

… pour passer à côté de Risya. La Sainte Disciple avait ignoré ce qui aurait dû être son étreinte émouvante avec Pilie pour s’accrocher à Mismis.

« Euh. Quoi ? » La commandante Pilie les observa, choquée, depuis la ligne de touche.

« Tu t’es bien débrouillée, Mismis ? Mm-hmm, tu es si mignonne quand tu es fatiguée. »

« Allez, Risya. Je suis trop épuisée pour cela en ce moment. »

« Et alors ? Tu es tellement mignonne aussi quand tu es mécontente. »

Risya commença à ébouriffer les cheveux de Mismis.

Elle n’avait jamais agi de la sorte avec quelqu’un d’autre, et pourtant elle était là, à s’occuper de Mismis avec amour.

« C’est une méthode importante pour créer des liens. Puisque nous sommes toutes les deux membres des forces impériales, » dit Risya.

« Personnellement, je pense que tu te moques de moi. »

« Ah-ha-ha. Est-ce que c’était si évident que ça ? »

Pilie regarda toute la scène se dérouler.

« … »

La commandante aux cheveux noirs serra ses mains en poings alors qu’elle commençait à trembler.

« Écoutez bien, Risya… et aussi Mismis. »

Cependant, personne n’écoutait.

Risya était trop occupée avec Mismis, qui faisait de son mieux pour repousser l’officier supérieur.

« S’il te plaît, arrête, Risya ! »

« Hm. Oh, laisse-moi faire. »

« … »

Et…

« Je — je ne me sens pas du tout humiliée, je vous le fais savoir ! » Pilie se mit à crier à tue-tête. « Mismis ! Tu es mon ennemie jurée ! Ne l’oublie pas ! »

Puis elle s’était enfuie à toute vitesse.

À partir de ce moment, la rivalité entre la commandante Pilie et Mismis s’intensifia, mais cette histoire est pour une autre fois.

+++

Pendant ce temps, dans un pays très, très éloigné de l’Empire…

Au paradis des sorcières, au palais de la souveraineté de Nebulis…

« Lady Alice, j’ai un rapport à te faire. »

« Oh, qu’est-ce qu’il y a, Rin ? »

Lorsque sa chère accompagnatrice s’adressa à elle, la jeune fille se retourna.

Aliceliese Lou Nebulis IX.

C’était une princesse aux brillantes mèches dorées et au visage charmant.

Elle et l’épéiste impériale Iska s’étaient reconnues comme rivaux, mais ils étaient les seuls à partager ce secret.

« Alors, quel est le rapport ? »

« Il s’agit de la base de la côte est située sur le territoire des impériaux. Nous avons reçu des renseignements selon lesquels un camp y a été installé. »

« Penses-tu que c’est pour un exercice militaire ? »

« Oui. Il semblerait que plusieurs de leurs principales unités y participent. Je crois qu’il serait judicieux que le corps astral se penche sur ce qu’ils font. »

« Alors je laisserai cette décision à ceux qui sont sur place. »

Elle soupira.

Pour une raison ou une autre, Alice s’était sentie déçue après avoir entendu le rapport. En fait, elle était vraiment déçue. Elle n’espérait pas obtenir des informations sur le camp impérial.

« Ce n’est pas ça », dit-elle. « Je n’ai pas besoin de connaître les formations. Ce que je veux savoir, c’est où Iska est envoyé. Je veux savoir sur quel champ de bataille il sera. »

« Lady Alice… encore ça ? »

Les épaules de la préposée s’étaient affaissées en voyant le comportement de sa dame.

Alice était tout le temps comme ça ces derniers temps. Elle ne pensait qu’au moment où elle pourrait combattre son ennemi, l’épéiste impérial Iska. Tout le reste n’était plus qu’une question de temps.

« On ne sait jamais. L’épéiste est peut-être au camp d’entraînement. »

« Ce serait une trop grande coïncidence. » Alice avait répondu à la plaisanterie de sa préposée en regardant par la fenêtre…

Vers la nation ennemie…

Vers les territoires impériaux.

« Je veux enfin régler les choses entre nous deux. Mais où peut bien être Iska ? »

***

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