Joou Heika no Isekai Senryaku – Tome 3 – Bonus

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Bonus : Réflexions d’insectes

Tout ce que la reine de l’Arachnée, Grevillea, avait vécu était transmis à l’ensemble de l’Essaim. Ainsi, la majorité d’entre eux ressentirent pour la première fois toute une palette d’émotions. Lorsqu’elle avait décidé de se venger, l’essaim avait été animé par cette colère. Lorsque le garçon elfe était mort, l’essaim avait été inondé d’une rage telle qu’il n’en avait jamais connu. Mais les essaims individuels avaient-ils eu des sentiments qui leur étaient propres ?

L’Essaim réfléchissait.

Si ce que la reine ressentait pouvait être appelé émotion, alors ils n’avaient rien qui lui correspondait. Il n’y avait rien en eux qui les poussaient intrinsèquement à aller de l’avant, si ce n’était leur instinct de conquête. Malgré cette impulsion, ils n’avaient jamais réfléchi à la raison pour laquelle ils l’avaient eue. Elle était simplement là. Une pulsion sans raison ni cause.

Mais chaque fois qu’ils étaient étranglés par les marées émotionnelles de leur reine, l’essaim sentait que le pilier de leur désir de conquête était ébranlé. Tout était encore comme avant lorsqu’ils avaient conquis le royaume de Maluk. En revanche, après leur entrée dans le duché de Schtraut, quelque chose avait mal tourné.

La reine n’avait pas simplement cherché à dominer ce pays, elle avait tenté de négocier. Ils ne s’étaient pas infiltrés pour le conquérir, mais pour une alliance. Elle avait presque réussi, elle aussi, mais tout avait ensuite été détruit.

Après cela, le cœur de leur reine était rempli d’un sentiment étouffant de futilité — et, à côté de cela, une rage profonde et un désir de massacrer ceux qui avaient tué ses alliés potentiels. L’essaim ressentit ensuite une émotion qui les assaillait rarement : la pitié.

L’Essaim réfléchissait.

Comment et pourquoi leur reine avait-elle été gratifiée d’une telle abondance d’émotions ? Si elle était un Essaim, elle n’aurait pas besoin d’émotion et écraserait simplement les autres par impulsion… Mais elle n’en était pas un. Auraient-ils été préférables qu’elle ne portait pas tous ces sentiments en elle ?

Non, cela n’aurait pas été le cas. La présence d’émotions leur permettait de découvrir de nouvelles choses. D’apprendre la colère, la tristesse, la joie. Et c’était grâce à ces émotions qu’ils n’étaient plus seulement un Essaim.

L’Essaim accepta les émotions de la reine, et ils souhaitaient en adopter d’autres à l’avenir. Ce faisant, ils allaient mûrir. Ce n’était plus de simples monstres, ils allaient évoluer vers une nouvelle forme de vie. Oui, ils deviendront des créatures capables de comprendre le cœur humain. Et s’ils pouvaient apprendre à lire le cœur des autres, peut-être seraient-ils d’autant plus proches de la victoire.

C’était ce que les essaims pensèrent au début.

Bien qu’ils puissent comprendre les émotions, ils ne pouvaient pas facilement saisir les raisons qui se cachaient derrière elles, à moins qu’elles ne soient assez simples. Par exemple, lorsque la reine voulait faire l’expérience du passe-temps humain qu’était la baignade dans l’océan, l’essaim ne pouvait pas vraiment comprendre ses motivations.

L’entrée dans la mer était-elle agréable ? Pourquoi la reine se sentait-elle coupable de ne pas avoir invité tout le monde ? Il aurait été insensé de faire sortir les essaims des lignes de front pour les concentrer à l’arrière en temps de guerre.

L’essaim ne pouvait pas comprendre le concept de plaisir. Même si leur désir de conquête devait se réaliser, ils ne le percevaient pas en termes de plaisir ou de jouissance. Ils ne connaissaient rien qui puisse être qualifié comme tels. Ils n’avaient aucun désir de se nourrir, de dormir ou de copuler, et n’avaient donc pas besoin d’être divertis.

L’Essaim réfléchissait.

Qu’est-ce qui était « amusant » ? On pensait que Sérignan, qui se distinguait parmi eux par son nom et sa personnalité, connaissait la réponse. Comme la reine, elle était capable de prendre des repas, et surtout, elle prenait plaisir à être aux côtés de la reine.

Comme Sérignan, les autres Essaims considéraient la reine avec respect et affection, mais ils ne ressentaient pas de plaisir en sa compagnie. Après tout, il suffisait que l’un d’eux soit près d’elle pour que l’expérience soit partagée par le collectif. De plus, la présence de la reine était tout à fait naturelle. Lorsque le moment sera venu pour elle de les quitter, ce sera leur fin.

Que ressentirait alors l’Essaim ? Ils ne comprenaient pas le chagrin de la séparation. Lorsque Lysa perdit Linnet et devint membre de l’essaim, ses expériences se répandirent dans la conscience collective. Mais les autres Essaims ne pouvaient pas comprendre ses émotions. Ils ne pouvaient pas comprendre le sens de la séparation éternelle d’un être cher.

Premièrement, leur compréhension de la mort n’était que trop limitée. Tous étaient un et un était tous, et donc pour eux, la vraie mort n’existait pas. Si l’un d’entre eux tombait, il était remplacé par un autre. La volonté individuelle de chaque Essaim était maintenue dans le collectif même après que son corps ait cessé de fonctionner. Et peu importe le nombre de morts, leur concept de mort ne se concrétisait pas avant que le tout dernier Essaim ne périsse.

De par sa nature même, l’Essaim ne pouvait pas comprendre la mort ou les émotions qui accompagnaient un adieu éternel. Mais peu à peu, ils commençaient à la comprendre à travers les émotions de la reine. La reine avait enduré de nombreuses séparations, et chaque fois que cela se produisait, elle réprimait la haine, l’intention meurtrière et la tristesse qui tourbillonnaient dans son cœur. À son tour, l’Essaim réagissait à ces sentiments. Ils massacraient selon la tempête maléfique de son cœur. Mais comment étaient-ils censés répondre à sa tristesse ?

L’Essaim réfléchissait.

Qu’est-ce que la tristesse ? Quel genre de sentiment était la tristesse ? L’Essaim ne le savait pas. Il leur était difficile de comprendre le chagrin de la reine.

Mais ils apprenaient, petit à petit, comment les gens géraient la tristesse. Ceux qui souffraient partageaient leur chagrin, en allégeant le fardeau des uns et des autres. La reine avait partagé la douleur de Lysa autant qu’elle le pouvait, et l’Essaim reconnut qu’en faisant cela, les nuages du chagrin de Lysa s’étaient quelque peu dissipés.

Lorsque la reine se sentait triste, allaient-ils partager sa douleur ? Seraient-ils capables de lever une partie du fardeau de sa douleur ?

Non, car l’Essaim ne ressentait aucune douleur.

L’Essaim réfléchissait.

Si le temps où l’Essaim comprendrait vraiment les émotions humaines arrivait, la reine les considérerait-elle comme des êtres vraiment spéciaux ? S’ils étaient enfin capables de comprendre ce qu’elle ressentait, seraient-ils enfin devenus les vassaux de Sa Majesté ?

« Tous saluent la reine. »

L’Essaim continuera à y réfléchir jusqu’à ce que la mort survienne.

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2 commentaires :

  1. merci pour le chapitre

  2. Merci pour le chapitre

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