Joou Heika no Isekai Senryaku – Tome 2 – Chapitre 5

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Chapitre 5 : Ceux qui vont de l’avant

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Chapitre 5 : Ceux qui vont de l’avant

Partie 1

« L’opération a été un succès », avais-je dit avec un sourire.

J’étais de retour à la base de l’Arachnée. Je n’aurais pas pu être plus reconnaissante au Duc Sharon pour m’avoir aidée à faire entrer en douce Elizabeta au Conseil international. En quelques phrases seulement, Elizabeta jeta le Conseil dans la discorde la plus totale. Elle fit en sorte que Nyrnal quitte le Conseil et permit au Duché d’adopter une position vague concernant le passage d’autres pays sur son territoire. Ce fut une parfaite victoire diplomatique pour l’Arachnée.

« Cela s’est-il passé sans problème, Votre Majesté ? », demanda Sérignan, après avoir pris connaissance de mes instructions à Elizabeta par la conscience collective.

« Oui. C’est sûr. Ils sont complètement divisés. Diviser pour mieux conquérir est une stratégie de base, nous ne voulons pas que l’ennemi s’unisse et nous attaque ensemble. Avec nos ennemis séparés, nous pouvons les écraser un par un pendant qu’ils se disputent. »

Diviser et conquérir, c’était la tactique la plus élémentaire. Nous étions effectivement confrontés à toutes les autres nations du continent, mais en nous assurant qu’elles ne coopèrent pas, nous pouvions les éliminer une par une.

Le fait qu’une sorte d’alliance ait été formée était dommage, mais sans l’Empire, tout ce que cela signifiait, c’était que l’armée du Royaume Papale était devenue un peu plus grande. Nous pouvions gérer les petits pays à côté tout en combattant la force principale de Frantz.

Mais je me demandais si nous pouvions réellement vaincre le Royaume Papal de Frantz. Malheureusement, notre ennemi était déjà au courant de l’existence de l’Essaim. Certains des aventuriers de la guilde s’étaient glissés à travers les défenses de l’Essaim, avaient infiltré notre territoire, puis avaient fait un rapport sur les caractéristiques de l’Essaim. Un blitz ne fonctionnerait pas cette fois-ci.

« Eh bien, nous allons leur montrer. Je ne sais pas quelles cartes Frantz a dans sa manche, et nous n’avons aucun moyen de le découvrir… Mais quoi qu’il arrive, nous forcerons nos ennemis à se soumettre. »

J’étais préparée à une guerre contre le Royaume Papal de Frantz. Il se préparait déjà à frapper et déclarerait probablement la guerre, que nous voulions ou non riposter. Prier ne ferait pas disparaître la guerre qui arrivait. La seule façon d’y parvenir était d’écraser les agresseurs et de gagner.

« Pour l’instant, nous devons organiser l’armée que nous allons stationner à Schtraut. Les Essaims Éventreurs ne suffiront pas pour cela. Ils peuvent servir de noyau de l’armée, mais nous aurons besoin d’unités de siège pour percer les fortifications. »

J’avais fait signe à des essaims de travailleurs tout près et je m’étais approchée d’un de nos fours de fertilisation massive. Fidèle à son nom, il était gigantesque. C’était cinq fois plus grand qu’un four à fertilisation ordinaire. Il allait sans dire que les unités qu’il produisait étaient énormes. Jusqu’à présent, je produisais des unités qui entraient dans la catégorie des « petits », comme les essaims d’Éventreurs et Fouilleurs, mais j’étais maintenant sur le point de créer des unités beaucoup plus grandes.

Dans le jeu, la faction barbare de la Flamme utilisait d’énormes unités comme les Géants des forêts et les Trolls. La faction draconienne Grégoire dominait l’opposition avec des bêtes mythiques comme les Léviathans et les Béhémoths. La pieuse faction Marianne faisait naître des Anges et des Chérubins. C’était toutes de grandes et puissantes unités dont les coûts de production étaient très élevés.

Une ruée avec des Éventreurs n’était viable qu’au début du jeu. S’appuyer trop longtemps sur les Essaims Éventreurs pouvait entraîner une défaite inattendue. L’ennemi pouvait facilement les anéantir avec du matériel lourd et une puissance de feu intense. Afin d’éviter cela, j’avais décidé de produire de nouvelles unités pour gagner les batailles à venir.

« Très bien, commençons. »

Mais je ne m’attendais pas à ce qu’elles arrivent à temps pour une guerre dans Schtraut. Les batailles autour du Duché seraient rapidement décidées. Qu’importe celui qui allait attaquer, le Royaume Papal où l’Empire, la bataille pour Schtraut ne durerait pas longtemps. Le duché lui-même était large, mais pas très long, de sorte que les deux nations ennemies l’auraient réprimé en quelques jours.

Même si l’Arachnée se joignait à eux d’un côté, la nation attaquante serait capable de conquérir rapidement la capitale du duché si les choses jouaient en sa faveur. Et si cela se produisait, il ne s’agirait plus d’une bataille pour le duché, mais d’un conflit à trois sur ce qui avait été autrefois la terre de Schtraut. En résumé, bien que cela puisse devenir une longue guerre, la domination réelle de Schtraut prendrait fin trop rapidement.

Ainsi, même si je devais produire des unités lentes et lourdes ayant une attaque et une défense élevées, elles ne seraient pas prêtes à temps.

« Je suppose que c’est très bien », me dis-je à voix haute en regardant le four à fertilisation massive trembler.

« Les unités lourdes ont toujours une grande valeur. Je suis sûre que nous pouvons utiliser ce cuirassé terrestre lors de la prochaine bataille. »

 

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« Le Duc Sharon n’autorise pas le passage de l’alliance ? »

La question trouva un écho dans le domaine de la famille Lorraine.

« Oui, apparemment. Même si l’homme de Nyrnal est sorti du Conseil international, l’ambassadeur du duché s’est vanté que ce pays est capable de se défendre et a refusé d’approuver le passage. Comme c’est ennuyeux. », déclara Leopold, l’actuel chef de la Maison Lorraine.

C’était bien sûr le même homme qui s’était disputé avec Grevillea pendant la soirée.

« Mais ce pays peut-il vraiment retenir une armée de monstres ? Ne serait-il pas mieux pour nous de donner à l’alliance la permission de passer et de leur demander d’écraser les monstres pour nous ? » demanda Roland, le frère cadet de Léopold.

« Le duc espère sans doute faire la cour à ces monstres. Embrasser les autres est sa spécialité, après tout. Il s’agenouillerait probablement et poserait ses lèvres sur les pieds des monstres si cela pouvait préserver sa position. »

La relation de Léopold avec César était particulièrement amère. Ils avaient été des adversaires politiques lors de la dernière élection et, pour couronner le tout, leurs familles avaient une longue querelle découlant d’un engagement rompu il y a cinquante ans. La honte infligée à la Maison Lorraine était devenue une rancune persistante qui influençait leur relation jusqu’à aujourd’hui. Ce genre de comportement était typique de la noblesse de Schtraut.

« C’est un problème majeur, et si nous ne le traitons pas correctement, le duché de Schtraut sera rayé de la carte », marmonna Leopold en se versant un verre de cognac.

« Les monstres nous détruiront, et s’ils ne le font pas, alors Nyrnal profitera de notre faiblesse pour nous écraser sous les semelles de leurs bottes. De toute façon, ce sera notre fin. »

« Mais nous ne pouvons pas faire grand-chose, hein ? »

« Que dis-tu, mon cher Roland ? Nous sommes l’une des familles les plus importantes de Schtraut. Nous avons une grande richesse et une grande autorité, avec celles-ci à notre disposition, nous pouvons renverser la politique insensée du duc. En fait, nous pourrions même persuader les autres nobles de se rallier à nous et de le mettre en accusation. C’est une idée parfaite. C’est précisément comme ça que nous pouvons faire tomber la tête de Sharon. »

« Mise en accusation ? Tu es sérieux ? »

Roland regarda Léopold comme s’il doutait de la santé mentale de son frère.

« Il faudrait que les deux tiers des nobles votent pour, et je doute fortement que nous puissions obtenir l’accord d’un si grand nombre d’entre eux. Certains d’entre eux ont voté pour le duc Sharon plutôt que pour toi. »

« Oh, allez, on peut juste les soudoyer. Certains nobles ont vu leurs coffres se vider depuis la chute du royaume de Maluk. Si nous leur offrons une aide financière et de nouvelles perspectives commerciales, je suis sûr qu’ils se raviseront. », se moqua Leopold tout en avalant une gorgée.

« Quel genre de perspectives commerciales ? »

« Employer des immigrants. Vois-tu, les rapports de la guilde des aventuriers disent que Maluk a été complètement dévoré par les monstres et est maintenant inhabité. Je pense qu’envoyer des gens de Schtraut et d’autres pays pour reconstruire cette terre abondante est une bonne idée, n’est-ce pas ? Pour ma part, je pense que c’est une excellente opportunité. »

Leopold proposait d’envoyer des gens pour aider à reconstruire les territoires désormais inhabités du Royaume de Maluk. Le Duché et le Royaume Papal abritaient tous deux de nombreuses personnes qui avaient été acculées à la faillite et qui avaient un sombre avenir devant elles. Son plan était d’envoyer ces personnes vivrent à Maluk afin de récupérer ses riches terres et ressources. Ils reprendraient les travaux d’excavation des mines, laboureraient les fermes et élèveraient du bétail. Les nobles de Schtraut étant tous des commerçants, une sélection de ces commerçants accompagnerait les immigrants à Maluk, puis profiterait de leur travail en leur vendant des fournitures essentielles et en faisant du troc pour leurs produits.

Roland pensait poser des questions sur les survivants de Maluk, mais il avala sa question. Le royaume de Maluk était en fait en ruines et ses anciens citoyens n’avaient aucun droit réel. Elizabeta, par exemple, avait parlé en tant que représentante des survivants au Conseil international, mais ses paroles avaient été complètement ignorées. Et si cette stratégie commerciale était attrayante, elle reposait sur le sacrifice de personnes innocentes.

« Cela… pourrait fonctionner, oui. Erm, as-tu déjà commencé à travailler sur la mise en accusation ? »

« Oui, quelques personnes ont commencé à agir dessus — en coulisses, bien sûr. Si le Duc Sharon découvrait que nous allons le mettre en accusation, il prendrait immédiatement des mesures. Cet homme est attentif quand il s’agit de sa propre sécurité. »

Même si c’était la première fois que Roland entendait parler de ce plan, Leopold faisait déjà des mouvements dans l’ombre. Il avait demandé à quelques nobles au bord de la faillite — mais qui conservaient encore leur droit de vote — d’approuver le plan de destitution.

« De plus, tout le monde sait que si l’armée alliée passe, c’est une occasion de faire de l’argent. Vendre les fournitures des soldats produirait d’excellents profits », déclara Leopold, en riant de bon cœur.

« Je comprends, mais n’est-il pas possible que le Duc Sharon refuse le passage de l’armée alliée pour une bonne raison ? Tu devrais garder cela à l’esprit. Nous pourrions faire une erreur majeure ici. »

« Sharon n’est qu’un lâche », cracha Léopold, en versant plus de cognac dans son verre.

Aucun des deux ne pouvait imaginer que le duc s’était en fait allié aux monstres qui avaient détruit Maluk — l’Arachnée — pour assurer la sécurité du pays.

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Partie 2

À l’intérieur de la résidence du duc dans la capitale Doris, le Premier ministre, le cardinal Charon Colbert, jeta un coup d’œil furieux à son supérieur.

« Êtes-vous sérieux, Seigneur ? », demanda-t-il.

« Assez sérieux. Nous nous allions avec l’Arachnée », répondit le duc.

« Savez-vous que cette soi-disant Arachnée est l’ennemie actuelle du monde entier ? Schtraut est une nation qui dépend du commerce, s’allier avec un méchant universel signifie que nos routes commerciales seront coupées. »

« Pourtant, nous n’avons pas d’autre choix que de jeter notre sort sur l’Arachnée. Je préfère renoncer au délicieux vin de Frantz si cela signifie que mon pays ne subira pas le même sort que Maluk. »

En détruisant le royaume de Maluk, l’Arachnée s’était fait passer pour un odieux scélérat. En choisissant de s’allier à cette faction de monstres, Schtraut se déclarait également ennemi, ce qui allait amener les autres nations à condamner le duché et à cesser tout commerce avec lui.

« Le Duché seul n’arrêtera pas l’Arachnée, et si nous négligeons la participation de Nyrnal à cette guerre, notre pays pourrait perdre son indépendance. C’est notre seul moyen d’éviter cela, Charon. »

L’armée de Frantz était à peu près égale à celle de Maluk, elle ne représentait donc pas une grande menace pour l’Arachnée. Une alliance soutenue par le Royaume Papal ne serait pas suffisante, c’était un fait.

Mais si Schtraut permettait à Nyrnal, qui aspirait à prendre le nord, d’occuper son territoire, il serait presque certain qu’on lui volerait ses terres au milieu de la guerre, voire qu’on les annexerait.

Ainsi, César estimait que la seule façon pour son pays de s’en sortir indemne était de s’allier à l’Arachnée et de faire de son plus grand ennemi son plus puissant allié. C’était le seul moyen dont il disposait pour protéger l’indépendance de Schtraut. Tout autre choix l’obligerait à choisir entre protéger son pays contre l’Arachnée ou lutter pour maintenir sa souveraineté. Cependant, il ne pouvait pas s’empêcher de se demander s’il existait une autre solution magique qui lui permettrait de faire les deux.

« Et vous pensez que l’Arachnée est plus fiable que Nyrnal ? », demanda Charon, interrompant ses pensées.

« J’ai parlé directement à une femme qui se dit la reine de l’Arachnée. Elle a l’air jeune, mais son esprit est vif. Au cours de notre conversation, elle exprima son désir de ne pas nous attaquer, mais qu’elle pourrait y être contrainte si nous laissons Frantz et l’alliance traverser notre territoire ! Comme moi, elle ne souhaite pas voir le duché devenir un champ de bataille. »

César avait rencontré Grevillea le soir du dîner et de nouveau le jour suivant. Il avait confiance en son jugement sur les gens, et il estimait que Grevillea était une jeune femme digne de confiance.

Le fait que les monstres n’avaient pas encore afflué à Schtraut en était en quelque sorte la preuve. On pouvait supposer que les monstres n’étaient pas limités par un manque d’endurance. Après tout, ils étaient 200 000 à se morfondre à Maluk.

« Compris, Seigneur. Si telle est votre volonté, je ne peux que la respecter. Mais… faites attention. La Maison Lorraine s’opposera sans doute à cette décision. Ils pourraient bien chercher à vous mettre en accusation. »

« Les Lorraine… Ah, quelle épine dans le pied ! Ils doivent toujours garder rancune pour cet engagement raté, même cinquante ans plus tard. Et c’est maintenant qu’ils vont frapper, alors que le duché est menacé de l’extérieur et de l’intérieur. »

Charon anticipait déjà les plans de la Maison Lorraine. Léopold de la Maison Lorraine s’était jadis présenté contre César pour le poste de duc, et leurs familles avaient déjà une longue querelle. Le frère cadet, Roland, était plus rationnel et plus ouvert d’esprit, mais Léopold lui-même était bien trop impulsif pour être raisonné, c’était un homme qui pensait que le monde tournait autour de lui.

« Unir les nobles tout en s’occupant de l’intrigue de Lorraine. Notre pays doit être unifié si nous voulons surmonter cette crise », ordonna César.

« Oui, monseigneur. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir. »

Cela dit, César se mit à travailler sur la seule chose qu’il pouvait faire : former une alliance avec l’Arachnée.

 

☆☆☆

Le congrès national du duché de Schtraut était rempli de bruit et de tumulte.

« Pour résumer, nous avons fait nos préparatifs pour nous allier à l’Arachnée. Ils nous ont informés qu’ils nous accorderaient une aide militaire et travailleraient à nos côtés pour réaménager ce qui était autrefois le royaume de Maluk », déclara César à propos de la discorde dans la salle.

« Une alliance avec l’Arachnée ? »

« Nous nous allions avec les monstres qui ont détruit Maluk !? »

« N’est-ce pas de la trahison !? »

Certains des membres du Congrès étaient visiblement confus. Tout ce qu’ils savaient, c’était que l’Arachnée était la faction de monstres qui avait détruit Maluk et était devenue l’ennemi de tout le continent. L’idée de se ranger du côté des créatures universellement détestées par les autres nations était si choquante qu’ils ne pouvaient pas s’y résoudre.

« L’Arachnée est prête à nous défendre contre l’Empire de Nyrnal. De plus, son chef m’a informé qu’elle n’a aucun désir de s’approprier nos terres. Elle a même accepté de déployer une armée pour nous aider, et elle nous cède le commandement de cette armée. Comment est-il possible de ne pas croire quelqu’un qui est prêt à nous accorder autant ? Ce sont clairement des alliés dignes de confiance. »

« Pouvez-vous vraiment être sûr qu’ils ne sont pas après notre terre ? » demanda un des membres du Congrès.

« C’est un troupeau de monstres. Ils sont peut-être amicaux envers nous maintenant, mais ils ont quand même détruit le royaume de Maluk. »

« S’ils l’avaient été, ils n’auraient pas évoqué le sujet de travailler à nos côtés pour redévelopper Maluk. Ils sont venus nous voir, nous demandant de les aider à développer leur territoire. Cette offre est une grande chance pour le duché. », répondit César.

Grevillea avait proposé de coopérer avec le duché de Schtraut pour reconstruire les terres en ruine et inhabitées de Maluk. Elle avait reconnu que les terres agricoles et les mines d’or seraient détruites sans l’aide de Schtraut. C’était l’un des arguments de négociation de l’Arachnée.

« Mais si nous nous allions avec eux, nous serons considérés comme des traîtres par le reste du monde ! », s’était écrié un autre membre du Congrès en se levant.

« Même si nous le faisons, nous aurons gagné un puissant allié avec les vastes terres de Maluk sous leur contrôle. Cela nous donnerait toutes les réserves dont nous avons besoin pour survivre. Et si nous nous allions avec l’Arachnée, d’autres pays pourraient aussi nous rejoindre. », répondit César.

« Notre pays n’est pas le seul à être menacé par les méthodes militantes de Nyrnal. Je suis bien conscient de la façon dont nous serons vus par les autres, mais je peux vous assurer que cela ne durera pas longtemps. Une fois que tout le monde aura reconnu l’existence de l’Arachnée, nous ne serons plus des antagonistes. Et cet avenir est proche et à portée de main. »

César avait réfléchi à ces mots encore et encore. L’Arachnée était un groupe de bêtes grotesques et puissantes, s’unir à eux serait complexe. Convaincre les membres du Congrès et maintenir les relations diplomatiques étaient des tâches tout aussi difficiles.

« Commençons donc notre vote sur la question », déclara le président du congrès.

Au début du vote, les membres du Congrès s’étaient assis avec des expressions endurcies. Ils savaient très bien que ce vote déciderait de l’avenir du duché de Schtraut, et ils considérèrent donc leur vote avec sérieux.

Certains votèrent contre l’alliance avec défi, tandis que d’autres avaient rapidement voté pour.

« Je suis pour », déclara Basil de Buffon.

En apprenant que la fille qu’il avait invitée à la fête était en fait la reine de l’Arachnée, il s’était senti plutôt positif à l’égard de l’alliance. Il ne voyait pas la fille comme un monstre, mais comme un être humain raisonnable. De son point de vue, le fait que Grevillea ait un cœur humain signifiait qu’on pouvait négocier avec elle.

« Permettez-moi de déclarer les résultats. »

Au bout de trente minutes, le vote s’était terminé et le décompte commença.

« Deux cents ont voté pour, tandis que cent un a voté contre. La mesure en question est maintenant approuvée. »

Un désaccord s’empara de la salle.

« Attendez juste une minute ! Ce vote n’est pas valable ! » s’écria un homme au-dessus des autres.

C’était bien sûr Léopold de Lorraine. Il se leva de sa chaise pour attirer l’attention de tous.

« Quel est le problème, Seigneur Lorraine ? », demanda le président.

« Il a été découvert que lors de la dernière élection, la faction du duc Sharon a commis un acte criminel. J’ai mes preuves juste ici. Le duc Sharon a soudoyé des membres du Congrès pour qu’ils votent en sa faveur. De plus, il a engagé des prostituées pour leur tenir compagnie lors d’une soirée ! Il a également été confirmé que des narcotiques illégaux étaient distribués ! », déclara Leopold.

Des murmures confus commencèrent à se répandre.

« Êtes-vous sûr que votre preuve est concrète ? »

« Oui, en fait, j’ai moi-même confirmé l’authenticité. Une partie de mes hommes a recueilli des témoignages de prostituées. »

Léopold montra une pile de documents.

La corruption n’était bien sûr pas rare. Leopold lui-même avait « donné » des fonds à d’autres membres du congrès pendant l’élection afin de garantir leurs votes. Cependant, César avait été élu principalement parce que Léopold avait été trop occupé à se rapprocher du Royaume Papal de Frantz.

« Ce sont des mensonges ! Je n’ai jamais engagé de prostituées ! », s’écria le duc.

Même si l’histoire de la corruption était en partie vraie, les accusations selon lesquelles il avait engagé des prostituées pour divertir des invités et faisait le commerce de stupéfiants illégaux étaient entièrement fabriquées de toutes pièces. Leopold lui-même avait persuadé les prostituées de faire de faux témoignages en échange de quelques « cadeaux » de sa part.

« Non, tout est vrai. En tant que tel, je propose que nous demandions la destitution du duc Sharon ! »

Dès que le mot « destituer » quitta les lèvres de Léopold, la pièce s’était à nouveau mise à bourdonner.

« C’est absurde ! Notre pays tout entier est menacé de toutes parts ! Nous ne pouvons pas nous permettre d’être réélus maintenant, espèce d’idiot assoiffé de pouvoir ! », s’écria Basil

« Je ne suis pas un moins que rien ! Je propose la destitution ! », cria Léopold en lui tapant sur le pied.

La mise en accusation nécessiterait une semaine de délibération, suivie d’un tour de scrutin. Léopold voulait profiter de la période de délibération pour dépeindre César comme un traître tout en achetant les autres nobles. Il en profiterait également pour évoquer le plan d’affaires de l’immigration.

Sa proposition attirerait l’attention des nobles et des banquiers, car elle leur donnerait l’occasion de profiter des abondantes ressources de Maluk sans devenir les ennemis des autres pays.

Cette proposition n’avait pas tenu compte des 200 000 essaims qui infestaient ces terres.

 

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Une semaine plus tard, le jour du vote arriva.

« Nous allons maintenant procéder à un vote concernant la destitution du duc César de Sharon », avait annoncé le président du congrès, et le reste des participants prirent place.

Leopold était confiant dans sa victoire. Il avait passé les sept derniers jours à soudoyer d’autres nobles afin d’acheter leur loyauté. Pendant ce temps, le duc était fatigué et avait le visage cendré après toutes les attaques répétées contre son caractère.

« Les résultats du vote sont de deux cent quatre en faveur, soixante-treize contre. La décision est prise : le duc César de Sharon est démis de ses fonctions. »

« Alors, allons-nous tenir une autre élection ? », demanda un homme.

« Avec le Royaume Papal qui nous met la pression pour les laisser passer… ? » avertit un autre homme.

« Jusqu’à ce que l’élection ait lieu, je serai le duc de Schtraut », déclara Leopold.

« Sur quelle base légale, exactement ? »

« Légale… ? Il suffira certainement de présenter quelqu’un d’autre apte pour ce poste. En outre, je dois vous rappeler que je n’ai perdu l’élection précédente au poste de duc que par une infime marge. Je ne doute pas que je puisse recueillir suffisamment de soutien. »

En d’autres termes, Leopold n’avait absolument aucune base juridique pour sa proposition. Selon la loi, si un duc devait être mis en accusation, une élection devait avoir lieu immédiatement. Mais il faudrait au moins vingt-quatre jours pour organiser une toute nouvelle élection.

À l’ouest de Schtraut se trouvait l’armée de monstres qui avait détruit Maluk. À l’est se trouvait le royaume de Frantz, qui faisait pression sur le duché pour obtenir la permission de passer. Pour ajouter au chaos, l’Empire de Nyrnal menaçait d’envahir par le sud. Le duché avait besoin d’un représentant le plus rapidement possible.

« Je suis le seul à pouvoir diriger ce pays dans sa situation actuelle », déclara Leopold.

« C’est absurde ! Nous ne serions pas dans cet état de chaos sans vos preuves fabriquées de toutes pièces et vos cris de mise en accusation ! Si quelqu’un a jeté ce pays dans une situation désespérée, c’est vous ! » cria Basil en réponse.

Il continua à maudire Léopold, le traitant de chien du Royaume Papal, de traître au pays et d’escroc dans l’ombre. Mais malgré ses plaintes, les membres du Congrès avaient approuvé la nomination de Léopold comme chef intérimaire du duché.

Enfin, Léopold était devenu duc de Schtraut, comme il l’avait souhaité depuis que César lui avait arraché le duché.

« L’idée même d’une alliance avec l’Arachnée est un affront au Dieu de la Lumière, et je refuse de la soutenir ! Nous ne survivrons qu’en nous accrochant à notre foi ! Saluez tous le duché de Schtraut ! »

Mais seules quelques personnes avaient répondu à son exclamation avec enthousiasme. Alors que de nombreux nobles avaient reçu un soutien financier de Léopold, ils n’étaient pas sûrs qu’il était vraiment capable de surmonter la crise qui se profilait à l’horizon.

Pourtant, Leopold avait déjà acquis le pouvoir et l’autorité qu’il souhaitait — ce fait était irréfutable. Son premier ordre du jour en tant que dirigeant était de permettre au royaume de Frantz de traverser les territoires du duché.

Son deuxième était de purger l’opposition.

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