Chapitre 8 : Une rencontre semblable à celle d’un conte de fée
Table des matières
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Chapitre 8 : Une rencontre semblable à celle d’un conte de fée
Partie 1
Point de vue de Selena Nommes
Aujourd’hui, c’est le jour de mon mariage.
J’étais assise seule dans la salle d’attente de la mariée.
Il n’y avait personne d’autre dans la pièce. Les femmes de chambre étaient parties dès qu’elles avaient fini de m’aider à enfiler la robe.
La robe que je portais était la même que celle que ma mère avait portée pour son mariage.
Depuis mon enfance, j’avais toujours rêvé de porter la robe de ma mère pour mon propre mariage.
Plusieurs années plus tard, mon rêve s’était enfin réalisé.
Mon cœur, cependant, était embourbé dans une profonde et sombre tristesse.
« Pourquoi les choses ont-elles tourné comme ça… ? »
J’étais censée être heureuse.
Être fêté par tout le monde, ne faire qu’un avec la personne que j’aimais, avoir une fin heureuse comme dans les contes de fées.
Cependant, la réalité était différente.
Plus de la moitié des lettres d’invitation que j’avais envoyées à mes amies et connaissances avaient été retournées à l’expéditeur, le sceau n’ayant même pas été rompu.
Même les servantes qui avaient préparé la cérémonie avaient l’air de rester de marbre et ne me souhaitaient pas bonne chance.
« Où me suis-je trompée… ? »
La réponse à cette question était claire, mais mon cœur refusait de l’accepter.
Qu’est-ce que j’avais fait de mal ? Où m’étais-je écartée du droit chemin ?
Je m’étais souvenue de ma vie jusqu’à présent.
Depuis que j’étais toute petite, j’avais toujours voulu devenir une princesse.
Une princesse comme celles des livres d’images que ma défunte mère me lisait.
Ma mère était handicapée par une maladie avant même de me donner naissance. Et aussi loin que je me souvienne, elle était confinée dans son lit.
Père avait désespérément cherché un remède pour elle, assez désespérément pour emprunter de l’argent au Seigneur Maxwell, mais il n’avait finalement rien trouvé.
J’aimais ma mère et je me glissais souvent dans son lit, la suppliant de me lire des histoires. En y pensant maintenant, cela aurait pu aggraver son état… mais ma mère écoutait toujours mes demandes, même quand elle se sentait plus mal que d’habitude.
« Ne t’inquiète pas, Selena, un jour un prince viendra pour toi… »
Ma mère me disait cela chaque fois qu’elle finissait de lire un livre d’images, en me tapotant la tête.
Les mots « ne t’inquiète pas »… étaient ceux que ma mère disait sûrement pour se convaincre.
Ma mère pensait probablement qu’elle ne vivrait pas assez longtemps pour me voir grandir, alors elle disait cela pour dissiper ses inquiétudes sur mon avenir.
Quelque temps après la mort de ma mère, un homme prétendant être mon frère aîné était venu à la maison. Père avait engendré un enfant avec une autre femme.
« Tu es Selena, n’est-ce pas ? Enchanté de te rencontrer. »
« … Je ne te connais pas !! »
« Eh ? Ah, attends ! »
J’avais toujours évité mon frère.
Je ne pouvais pas croire que mon père ait trompé ma mère, et je ne pouvais pas le pardonner. Je ne pouvais pas accepter l’existence de mon frère.
Et cela même si la décision venait de la position de mon père en tant que chef de famille, car ma mère malade ne pouvait pas donner naissance à un héritier mâle.
Même si ma mère était au courant de l’infidélité de mon père et avait donné sa permission.
Je ne pourrais jamais leur pardonner.
Ni mon père ni mon frère.
Puis c’était arrivé — mon père m’avait trouvé un fiancé.
« Félicitation Selena : j’ai le parfait fiancé pour toi. »
J’avais treize ans quand je m’étais fiancée.
Mon fiancé était l’héritier de la maison du Maréchal Maxwell – Le Seigneur Dyngir.
« Je suis Dyngir Maxwell. Ravi de vous rencontrer. »
Le seigneur Dyngir s’était présenté d’une manière amicale.
Au début, j’avais prévu d’agir de manière irrespectueuse envers mon fiancé, afin de faire honte à mon père.
Mais dès que je vis le visage du seigneur Dyngir, ces pensées avaient complètement disparu de ma tête.
« Ah… !! »
« Qu’est-ce qui ne va pas ? »
La première chose que j’avais ressentie en voyant le visage du seigneur Dyngir était la peur.
Au premier regard, le Seigneur Dyngir avait l’air d’un jeune homme amical et calme. Mais je ne pouvais pas m’empêcher de penser que quelque chose d’insondable, quelque chose de terriblement bestial, se cachait en lui.
Oui, quelque chose comme ce dragon qui kidnappait la princesse dans les contes de fées…
Quel est le nom de ce terrible dragon… ? Tout noir, aussi grand qu’une montagne… de plus, ce dragon a un nom qui vous donne des frissons rien qu’en le disant…
Je ne savais pas pourquoi je me sentais comme ça, mais c’était peut-être à cause du sang de ma mère. Ma mère était une prêtresse dans le sanctuaire de la capitale royale jusqu’à ce qu’elle épouse mon père.
« Le Seigneur Dyngir a pris la tête du commandant ennemi lors de la dernière bataille contre l’empire ! »
Père parlait des exploits militaires du Seigneur Dyngir, pour expliquer quelle personne incroyable il était.
Qui se mettrait à aimer une personne en entendant de quelle façon celui-ci a tué d’autres personnes ? m’étais-je demandé.
Mes jours de désespoir avaient commencé à ce moment-là.
Le Seigneur Dyngir était apparemment conscient que le simple fait de le regarder m’effrayait, aussi essayait-il de gagner mes faveurs en m’envoyant des fleurs et d’autres cadeaux dès qu’il en avait l’occasion.
Pour moi, cependant, il me semblait que ce dragon maléfique ne faisait que prononcer des mots doux afin de mieux faire approcher sa proie.
Mon père et même mon frère avaient essayé de m’aider à me rapprocher du seigneur Dyngir, mais leurs actions avaient toujours eu l’effet inverse : après tout, je les détestais tous les deux.
La relation entre le Seigneur Dyngir et moi ne s’était jamais améliorée. Finalement, le jour était venu où nous étions allés à la capitale royale afin de nous inscrire à l’académie royale.
Ce jour était tout simplement inoubliable.
Le jour de mon anniversaire, j’avais visité le jardin de fleurs de l’arrière-cour de l’académie.
L’académie avait un jardin de fleurs dans la cour intérieure et dans la cour arrière, mais la plupart des étudiants visitaient le jardin de fleurs de la cour intérieure, car il était plus grand et proche des bâtiments de l’académie.
Peu de gens visitaient le jardin arrière, il était donc parfait pour réfléchir seul.
« Ouf… qu’est-ce que je dois faire avec ça… ? »
Je m’étais assise sur un banc, avec dans les mains un cadeau d’anniversaire que j’avais reçu de mon fiancé. C’était un bracelet en argent orné de gemmes d’émeraude, de la même couleur que mes yeux.
« … C’est tellement joli. Pourquoi m’envoie-t-il systématiquement de si belles choses… ? »
Les cadeaux du Seigneur Dyngir étaient toujours exquis.
Si seulement il envoyait quelque chose de complètement inapproprié, je pourrais simplement les rejeter… mais ses cadeaux correspondaient toujours si parfaitement à mes goûts que j’avais fini par les accepter chaque fois.
Comment le Seigneur Dyngir connaissait-il si bien mes goûts… ? J’étais terrifiée rien que d’y penser.
« … Une année de plus… »
L’année suivante, le seigneur Dyngir et moi serions diplômés de l’académie. Je deviendrais alors l’épouse du seigneur Dyngir.
J’avais une peur bleue de ce jour.
Je ne voulais pas être avec lui, même pour une seconde… Comment pourrais-je passer ma vie à ses côtés ?
« Uuh.… »
Les larmes avaient commencé à couler naturellement, traînant sur mes joues et dégoulinant sur le bracelet.
« Ah… !! »
« .… Eh ? »
J’avais entendu la voix surprise de quelqu’un et j’avais levé la tête, découvrant un homme qui se tenait là.
Des cheveux brillants comme de l’or, une peau blanche nacrée. Des yeux aussi bleus que le ciel. C’était un jeune homme noble, comme ces princes de conte de fées.
C’était le prince héritier du royaume, Sullivan Lamperouge.
« Je m’excuse si je vous ai dérangé. C’est que je ne pensais pas que quelqu’un d’autre que moi visitait ce jardin. »
« N-Non, c’est moi qui devrais plutôt m’excuser… ! »
Je m’étais levée précipitamment du banc, mais avant que je puisse le faire, le mouchoir de Sullivan caressait doucement mes joues.
« Ah… »
« Je vous en prie, asseyez-vous. C’est le devoir d’un gentleman d’essuyer les larmes d’une femme. »
« C-c’est… »
J’avais timidement baissé les yeux, mais le Seigneur Sullivan avait souri doucement et continuait à essuyer mes larmes.
Avant de m’en rendre compte, j’avais déjà arrêté de pleurer. Mon cœur battait la chamade à la place.
Qui aurait pu penser qu’une noble de basse classe comme moi aurait un jour la chance de parler avec le prince ?
« Quand je vous ai vu, j’ai pensé qu’une fée des fleurs était venue dans ce jardin. »
« Eeh.… !? »
J’avais fini par crier en réponse aux paroles du Seigneur Sullivan.
Je m’étais empressée de m’excuser pour mes mauvaises manières, mais le sourire chaleureux du Seigneur Sullivan me fit tout oublier.
« Je suis pareil que vous, en fait. Quand des choses cruelles m’arrivent et que j’ai envie de pleurer, je viens toujours dans cet endroit. »
« Des choses cruelles… ? »
Je ne pouvais pas croire qu’un prince aussi parfait avait des problèmes.
« Vous voyez, en fait… »
Lord Sullivan avait alors commencé à parler. Étonnamment, ses inquiétudes étaient très similaires aux miennes.
Le Seigneur Sullivan souffrait également à cause de la personne avec laquelle il était fiancé.
La fiancée du Seigneur Sullivan, Dame Marianne, était une jeune femme dont on pouvait dire qu’elle était sans défaut. Cependant, elle était très fière et méprisait les autres élèves, car elle allait être la future reine.
« Elle ne souhaite pas devenir ma femme : tout ce qu’elle veut, c’est être intronisée reine, pour régner sur ce pays. Elle ne fait que m’utiliser à cette fin, il n’y a pas d’amour entre nous. »
« Non… c’est horrible ! Seigneur Sullivan, vous êtes une personne si douce, si merveilleuse, et pourtant… pourquoi êtes-vous forcé d’épouser une telle personne !? »
« Vous êtes la seule personne qui m’ait jamais dit quelque chose comme ça… Marianne est… oui, comme une de ces méchantes sorcières des contes de fées. »
Ces mots firent que je me sentais encore plus proche de lui.
C’était un parfait prince de conte de fées, qui avait les mêmes problèmes que moi.
Pour une raison inconnue, cela m’avait rendue vraiment heureuse.
Quand j’avais révélé mes propres problèmes, le Seigneur Sullivan m’avait gentiment consolée.
« Je vois, nous sommes pareils, non. »
« Oui… »
C’était ainsi que j’avais rencontré le Seigneur Sullivan.
À partir de ce jour, notre relation avait progressé à un rythme rapide.
Mon prince est enfin venu pour moi…
Ce prince allait sûrement tuer le méchant dragon et me sauver, c’était du moins ce que je croyais.
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Partie 2
Je croyais qu’il était impossible que le prince perde contre le dragon, même si je n’avais aucune preuve.
Le Seigneur Sullivan et moi avions continué à nous rencontrer secrètement dans le jardin de fleurs arrière, approfondissant notre relation.
Quand nous étions ensemble, je pouvais me sentir en paix. Un sentiment de pure félicité, que je n’avais pas ressenti depuis la mort de ma mère, emplissait mon cœur.
Notre amour interdit, caché à nos fiancés, brûlait de plus en plus fort à mesure que nous nous voyions, et avait fini par dépasser le point de non-retour.
Le Seigneur Sullivan m’avait invité dans une de ses résidences. J’y étais allée, en évitant d’être vue par quiconque, et nous n’avions fait qu’un.
« Selena, je veux que tu m’épouses. »
Sur le lit, enlacée par Sullivan, des larmes coulaient de mes yeux.
Ses bras, aussi chauds que le soleil, remplissaient mon corps de réconfort. Ses mots doux dégelèrent mon cœur gelé.
Le Seigneur Sullivan caressa ma tête alors que je pleurais de façon incontrôlable. Entourée de sa chaleur, j’avais répondu.
« … Volontiers, mon prince. »
Finalement, le jour fatidique arriva.
Mon noble prince se mit en route pour tuer le méchant dragon.
« Dyngir Maxwell !! Je déclare par la présente que vos fiançailles avec Selena sont rompues !! »
Le Seigneur Sullivan l’avait annoncé au Seigneur Dyngir.
Le Seigneur Dyngir expliqua que rompre un engagement était quelque chose d’injuste, mais le Seigneur Sullivan l’avait affronté sans crainte. Il était comme un brave héros armé de son épée sacrée.
Ses paroles énergiques chassèrent toute peur de mon cœur. Je n’aurais jamais cru voir le jour où je pourrais exprimer mes vrais sentiments à mon terrifiant fiancé.
« … L’annulation des fiançailles est acceptée, pour l’instant. Nous contacterons officiellement la maison royale dans un avenir proche. »
Lorsque j’avais entendu les mots du Seigneur Dyngir, des larmes de joies commencèrent à couler sur mes joues.
J’étais enfin libérée de l’emprise de ce monstre d’homme, j’étais enfin libre.
« Selena ! »
« Seigneur Sullivan… Je suis si heureuse… ! »
On s’était embrassés, sans se soucier des gens qui regardaient. Le jardin était bondé, tout le monde nous regardait. Mais cela avait peu d’importance pour moi.
« Je t’apporterai le bonheur, Selena. Je ne te laisserai jamais partir… jamais. »
« Seigneur Sullivan… Seigneur Sullivan… Je t’aime, Seigneur Sullivan… !! »
Tout cela ressemblait à un rêve, comme la fin de notre conte de fées.
Le méchant dragon était tombé devant le courageux prince et la princesse avait été sauvée.
Les deux individus ne feraient plus qu’un et vivraient heureux pour toujours.
Le temps de félicité, que je pensais durer éternellement, s’était plutôt terminé immédiatement.
« … Et alors ? C’est tout ce que vous avez à dire ? Seigneur Sullivan ? »
« Ah… non… je… »
Nous étions ravis de l’acceptation rapide et inattendue des fiançailles rompues par le Seigneur Dyngir, mais cela n’avait pas duré longtemps : des mots aussi glaçants que de l’eau froide tombèrent sur nous.
Ils provenaient de la fiancée du Seigneur Sullivan, Dame Marianne Rosais. Devant elle, le Seigneur Sullivan, qui était un vaillant prince de conte de fées il y a quelques instants à peine, vacilla terriblement.
Dame Marianne, entourée de gens — probablement ses serviteurs — regardait un Seigneur Sullivan effrayé depuis son siège, comme si elle s’ennuyait complètement.
Le Seigneur Sullivan m’avait parlé de l’horrible personnalité de Dame Marianne, mais je ne m’attendais pas à ce qu’elle soit une personne aussi dure.
Le Seigneur Sullivan avait accusé Dame Marianne de me maltraiter, soulignant les rumeurs selon lesquelles elle avait des liens secrets avec l’empire et plus encore.
Je n’avais jamais entendu de telles rumeurs, et je n’avais jamais été maltraitée par elle. C’était après toute la première fois que je rencontrais Dame Marianne.
J’étais surprise et j’avais regardé le Seigneur Sullivan, mais il ne m’avait pas accordé un regard.
« Je crains que tout ceci ne soit tout simplement ridicule. Ai-je établi des liens secrets avec l’Empire ? Avez-vous des preuves ? »
Il n’y avait aucune preuve, bien sûr : les excuses du Seigneur Sullivan étaient toutes faites sur le champ. Il était clair qu’il n’y avait aucune vérité en elles.
Dame Marianne soupira d’impuissance, puis se mit à prêcher indéfiniment sur la façon dont la conduite du Seigneur Sullivan était indigne de son titre de prince héritier.
Et alors que le Seigneur Sullivan était complètement dévasté, Dame Marianne prononça ses derniers mots.
« Vous souhaitez annuler les fiançailles ? C’est bien. Que notre relation prenne fin ici et maintenant. »
L’expression du Seigneur Sullivan s’était éclaircie. Les mots qui suivirent, cependant, le figèrent à nouveau.
« Je vais dûment informer mon père, le chancelier, de l’infidélité du Seigneur Sullivan et de vos fausses accusations à mon égard. Soyez assuré que je n’épargnerai aucun détail. Préparez-vous à recevoir une punition appropriée pour vos actions. J’espère que vous ne croyez pas que vous serez roi sans le soutien de la maison Rosais, hein ? »
« Ah… et bien… c’est que… »
Le Seigneur Sullivan était visiblement secoué et ne pouvait pas parler clairement.
Mon prince bien-aimé était troublé et acculé, j’avais alors surmonté ma peur et j’avais réussi à parler.
« Dame Marianne ! Le Seigneur Sullivan est le prince héritier !! Vos paroles dépassent votre rang !! »
« Savez-vous à qui vous parlez ? Ceux de rang inférieur ne devraient pas parler à ceux de rang supérieur, comme le veut la règle tacite de la haute société. Honte à vous, misérable fille de baron ! »
Fouettée par les mots durs de Dame Marianne, j’avais tremblé de colère.
C’est vraiment une sorcière maléfique… comme l’a dit le Seigneur Sullivan…
« Je… je suis l’amoureuse du Seigneur Sullivan… »
« Ah, vous êtes la maîtresse. C’est dégoûtant. »
« Dégoûtant… ? Non, c’est… »
« Je n’ai strictement rien à faire de ce que vous ferez après la rupture de mes fiançailles avec Son Altesse. Jusqu’à ce que les procédures appropriées soient prises, cependant, nous sommes engagés. Je ne pas envie de souiller mes oreilles en écoutant les mots d’une femme qui convoiterait un homme fiancé. Ne dites plus un mot, s’il vous plaît. »
« Comment pouvez-vous dire quelque chose de si cruel… ? Qu’est-ce que je vous ai fait… ? »
« Que m’avez-vous fait ? Eh bien, je suppose que vous devriez me dire où vous êtes allé dans la soirée d’il y a deux jours. Vous avez laissé une demande pour passer la nuit à l’extérieur du dortoir, n’est-ce pas ? »
« Ah… »
Les mots de Dame Marianne m’avaient aussi laissée de glace. C’était le jour où le Seigneur Sullivan et moi ne faisions plus qu’un pour la première fois.
« M’avez-vous peut-être prise pour une idiote ignorante ? L’héritier du Maréchal Maxwell n’était apparemment pas au courant de votre relation, mais c’est uniquement parce qu’il n’a manifesté que le moins d’intérêt possible pour vos affaires. Pensiez-vous vraiment que vos tentatives puériles de dissimuler votre rendez-vous galant tromperaient les yeux de la maison Rosais ? »
« Ah, je… c’est… mais… »
« J’avais prévu de tout passer sous silence s’il s’agissait d’une broutille, mais maintenant que les choses ont tourné ainsi, je n’aurai aucune pitié. J’ai suffisamment de preuves de votre infidélité, que je vais soumettre à l’attention de Sa Majesté le roi. Combien de temps Sa Majesté vous protégera-t-elle avant de devoir vous abandonner ? Ce sera quelque chose que j’aimerais voir. »
Le Seigneur Sullivan et moi étions tous deux trop choqués pour bouger.
Notre relation était exposée depuis je ne sais quand. Nous avions été découverts, mais laissés seuls.
« Si vous voulez bien m’excuser, alors… oh, et… au revoir, mon ancien fiancé. »
« A-a-attends… !! »
« Oh non, je ne ferai pas ça. Je n’ai plus le devoir d’obéir à vos paroles. »
Le Seigneur Sullivan tenta néanmoins de s’accrocher à Dame Marianne, mais ses serviteurs l’en empêchèrent.
Dame Marianne s’en alla donc, ses manières gracieuses ne quittant pas sa personne un seul instant.
Sa silhouette noble et fière me fit penser un instant qu’elle était l’image parfaite d’une reine.
Inquiète, j’avais pris la main du Seigneur Sullivan.
La main qui caressait ma tête si doucement lorsque nous étions au lit ensemble tremblait maintenant très légèrement.
« Seigneur Sullivan… »
« Tout va bien, ne t’inquiète pas. Selena… Je te protégerai quoi qu’il arrive. Père ne m’abandonnera jamais… alors, ne t’inquiète pas… »
« … »
Le visage du Seigneur Sullivan était étiré, ses yeux étaient grands ouverts et injectés de sang. Il parlait comme s’il voulait se convaincre lui-même plus que moi.
Le noble prince qui avait bravement affronté le Seigneur Dyngir avait complètement disparu, me montrant un visage rempli d’inquiétude, de peur et de traces de regret.
Ce n’était plus un prince de conte de fées, mais la figure très réaliste d’un homme poussé au désespoir.
Mon cœur, quant à lui, était rempli d’inquiétude pour un avenir que je ne pouvais plus prédire.
Ce qui nous attendait ensuite ne fut qu’une suite incessante de chute.
Avant que nous ne puissions faire quoi que ce soit, le Seigneur Sullivan fut rayé du registre royal et forcé de se marier à la maison des Nommes.
Père et frère avaient condamné le Seigneur Sullivan et moi : à cause de nous, le maréchal Maxwell voyait désormais les Nommes d’un mauvais œil.
Après s’être marié dans ma famille, le Seigneur Sullivan était tout d’abord confiant qu’il retournerait bientôt dans la famille royale et envoyait de nombreuses lettres à Sa Majesté le roi et à ses amis parmi les puissants nobles de la capitale royale.
Cependant, le Seigneur Sullivan s’était progressivement irrité du fait qu’aucune réponse ne lui parvenait et avait fini par me crier dessus.
Le gentil prince n’était nulle part. Non, peut-être que c’était la vraie nature du Seigneur Sullivan.
Si seulement tu n’existais pas
J’avais fait semblant de ne pas remarquer les lueurs de tels sentiments dans les yeux du Seigneur Sullivan et j’avais continué à vivre en interagissant le moins possible avec mon père et mon frère.
Puis ce jour était finalement arrivé — j’allais devenir l’épouse du Seigneur Sullivan.
J’étais la fiancée d’un homme qui avait tout perdu, une mariée qui n’avait pas été bénie par sa famille, ses amis, ou qui que ce soit.
« Dame Selena, les préparatifs de la cérémonie sont terminés. Par ici, s’il vous plaît. »
« … Oui, je viens. »
Je répondis à la servante venue m’appeler et me levai de ma chaise.
La magnifique robe laissée par ma mère bien-aimée. La robe blanche et pure que je rêvais de porter semblait maintenant souillée par des taches invisibles et indescriptibles.
La pauvre, elle n’aspirait qu’au grand amour, mais la cruelle réalité de la politique à mis fin à son rêve.
Quand à son à son « prince charmant « , elle à vite découvert son vrai visage.
Merci pour le chapitre et bon courage pour la suite !
Je me demande si on en entendra encore parler de cette jeune et naïve femme.
C’est triste mais tout de même mérité par ses actions.