Chapitre 5 : Il faut payer le prix fort quand on traite avec des imbéciles
Point de vue du Duc Rosais
Dans une salle privée du palais royal...
« N'importe quoi ! Moi, le prince héritier, je dois me marier dans la famille d'un baron !? Tu te rends compte à quel point ça semble stupide !? »
« ... »
Devant moi, un fou criait et gesticulait.
Il s'appelait naturellement Sullivan Lamperouge, c’était l'ancien prince héritier du royaume.
« Malheureusement, Sa Majesté le roi en a décidé ainsi. Nous devons demander à Votre Altesse d'accepter. »
J'avais choisi mes mots avec soin. Gérer les conséquences des événements était déjà assez épuisant : j'en avais déjà assez de traiter avec des imbéciles bavards.
Mais d’abord, pourquoi dois-je faire cela... ?
J'avais ainsi maudit sans qu’il puisse m’entendre.
Normalement, c'était le devoir de Sa Majesté de prononcer des édits royaux et d'annoncer de telles décisions. Mais cette fois, moi, le chancelier, avait été envoyé pour agir à la place de Sa Majesté.
Il va sans dire que Sa Majesté le roi détestait l'idée d'annoncer une telle chose à son fils bien-aimé, aussi la tâche pénible avait-elle été placée sur mes épaules...
Non seulement il n'a pas assumé sa responsabilité de roi, mais aussi celle de père...
Combien de fois la famille royale m'avait-elle déçu le mois dernier ?
Je n'étais pas un homme aux ambitions extrêmes, mais les événements récents firent apparaître le mot "rébellion" dans mon esprit.
« Il doit y avoir une erreur ! Je vais parler avec mon père !! »
Sullivan avait grossièrement enroulé l'édit royal en boule et l'avait jeté par terre.
« ... »
J'avais senti mes muscles faciaux se tendre.
Un édit royal n’était pas seulement signé par le roi en personne, mais portait également le sceau royal du royaume de Lamperouge. Traiter un édit royal de cette manière était un acte barbare, de même niveau qu’une trahison.
Même si cet homme avait encore le rang de prince héritier, si un tel acte se produisait en public, son exécution serait inévitable.
Je pourrais tout aussi bien m'en servir pour le faire exécuter... mais si je le faisais, Sa Majesté mourrait de chagrin.
J'avais gardé mon calme en répétant les faits.
« Malheureusement, cela a déjà été décidé. Pourriez-vous confirmer le contenu de ce document une fois de plus ? Vous pouvez voir que le sceau royal a été apposé. »
« Uuh... »
Sullivan réalisa finalement ce qu'il avait fait et ramassa l'édit royal à ses pieds, une expression maladroite sur son visage. Il étala le parchemin de haute qualité, en étira soigneusement les plis et le lut à nouveau.
« Oui, il y a le sceau royal... mais je ne peux pas le croire, je ne peux pas croire que mon père m'abandonne... je pensais que je serais rétrogradé jusqu'à ce que les choses se tassent... mais me marier dans la famille d'un baron... ? Qu'est-ce que j'ai fait pour mériter ça ? »
« Avez-vous bien dit : qu'est-ce que j'ai fait... ? »
Se pourrait-il que cet homme n'ait pas encore saisi l'étendue de ses actes ?
Le maréchal Maxwell était le gardien des provinces de l'Est. Il possédait la plus grande force militaire du royaume.
La maison de Rosais était le chef des nobles du centre et le pivot du monde politique du royaume.
Cet homme avait fait de ces deux grandes familles nobles ses ennemis et avait créé une fissure infranchissable entre elles et la famille royale, mais il agissait toujours comme s'il était la victime.
Je devrais peut-être me considérer comme chanceux vu que les fiançailles ont été rompues. Au moins, ma précieuse fille n'a plus à épouser ce bouffon.
Tout en soupirant de soulagement, j'avais recommencé à expliquer, aussi patiemment que possible.
« Seigneur Sullivan, même si je pense que vous le savez, dans ce royaume, il y a quatre maisons maréchales, les « Quatre Maisons », qui possèdent de vastes pouvoirs. La famille royale et les familles ducales ont un rang officiel plus élevé et une plus grande autorité politique, mais comme ces maisons sont chargées de défendre les frontières, leur pouvoir militaire est quelque chose que même Sa Majesté le roi ne peut ignorer. »
« Hmm, hmm... »
« Vous avez enlevé la fiancée de l'héritier d'un de ces maréchaux et les avez mis en colère. Sans une punition appropriée, un fossé s'ouvrirait entre la famille royale et les maréchaux. Veuillez comprendre que Sa Majesté le roi a pris cette décision avec le cœur lourd. »
« N-non... je ne peux pas... »
Sullivan était devenu pâle et s’était mis à trembler. Apparemment, il avait finalement compris la gravité de ses actes.
« Je... je suis juste tombé amoureux de Selena, et... est-ce que j'avais tort ? Est-ce mal de poursuivre le véritable amour... ? »
Sullivan s'effondra faiblement sur le sol, marmonnant de telles paroles avec un regard sans vie.
« Le véritable amour, monsieur ? C’est si beau. »
Mes lèvres s’étaient tordues, et j'avais lentement secoué la tête.
« C'est vraiment malheureux, Seigneur Sullivan, mais beau et juste sont deux choses différentes. Si vous souhaitiez vraiment simplement maintenir votre amour avec Selena Nommes, vous auriez dû faire les préparatifs nécessaires. Au moins, si vous vous étiez d'abord excusé auprès de Maxwell, puis aviez parlé correctement avec Marianne, votre punition n'aurait pas été aussi sévère. »
« N-nonnn... n... aaaahhhhhhhh !! »
Sullivan, les paumes de ses mains sur le sol, criait de désespoir.
Comme c'est pitoyable...
Si Sullivan n'avait pas fait cette erreur, il serait devenu mon beau-fils.
Si je l'avais surveillé de plus près, j'aurais pu l'empêcher de tomber si bas, non ?
Je suppose que je lui apporterai mon soutien pour ne pas offenser davantage Maxwell. C'est ma responsabilité.
C'était ce que je pensais lorsque, comme dernier geste de bonne conscience, je m’étais mis à genoux et j'avais tendu la main à Sullivan.
Cependant - .
« ... Je sais. »
« Quoi ? »
« Je sais, je sais ! Je dois juste réparer l'erreur !! J'ai juste besoin de faire comme si rien ne s'était passé !! »
« Seigneur Sullivan ? »
Submergé par l'élan soudain de Sullivan alors qu'il se relevait, j'avais fait deux pas en arrière. Je ne pouvais pas dire pourquoi, mais j'avais un sentiment terrible.
« Chancelier ! »
« Oui, monsieur... ? »
« J’annule la rupture des fiançailles avec votre fille ! »
« Haah !? »
Mon corps s’était plié en arrière et mes yeux s’étaient ouverts en grand.
Est-ce que cet homme avait vraiment dit ça... ?
« Si je me fiançais à nouveau avec Marianne, je n'aurais pas à me marier avec la famille du Baron Nommes ! Et puisque j'ai une famille de duc comme soutien, je peux aussi redevenir le prince héritier ! Je pourrais donc utiliser les finances des Rosais pour payer une compensation à Maxwell ! Selena... eh bien, je peux la prendre comme concubine, et tout est réglé ! »
Jusqu'où cet homme s'abaissera... ?
Je pouvais dire qu’il n’y avait plus aucune forme d’émotion sur mon visage.
À quel point peut-on être égoïste ? Forcer les gens qui l'entourent à se déplacer pour lui, sans tenir compte de leur propre situation...
« Bien, bien, c'est décidé ! Va appeler Marianne ! Dis-lui que je vais laisser nos fiançailles se terminer et... »
« Silence. »
« Gwah !? »
Avant que je ne m'en rende compte, ma main droite avait saisi le cou de Sullivan.
Il ne s'attendait sûrement pas à ce que quelque chose comme ça arrive : il n'y avait rien d'autre que du choc et de la surprise dans ses yeux.
« Chan... cel... lier... ? »
« Avez-vous sérieusement pensé que la vie de ma chère fille, que l'avenir de la noble maison de Rosais, pouvait être décidé par vous sur un coup de tête ? Qui pensez-vous être ? »
« Je... suis... le prince... hérit... »
« L'ancien prince héritier, plutôt ? »
Le visage de Sullivan avait perdu de sa couleur, il était devenu violet. Je l’avais donc finalement libéré.
Il s’était à nouveau effondré sur le sol, toussant plusieurs fois.
« Soyez heureux que nous soyons dans le palais royal... si nous nous étions rencontrés dehors, je vous aurais étranglé. »
« Kaah... haah... haah... ne pense pas... que tu t'en sortiras... comme ça... »
« Oh ? »
Il n'avait donc apparemment toujours pas débité toutes ses bêtises.
J'avais levé un pied et écrasé mon talon sur la main droite de Sullivan.
« Gheh !? »
« Je ne m'en sortirai pas comme ça ? Que ferez-vous alors ? Vous, le fils adoptif d'un baron, sans la moindre once de pouvoir ou d'autorité ? Que pouvez-vous faire au chef de la maison Rosais ? Dites-le. »
« Mon père y veillera... !! »
« Ce même père a dit qu'il ne vous rencontrera pas. Il ne veut probablement même pas voir le visage de son idiot de fils. »
« Tu ments !!! Père ne m'abandonnerait jamais... ! »
« Alors, allez le confirmer par vous-même. Bien que, dans l’état actuel des choses, vous n’avez même pas le droit de demander une audience. »
J'avais tourné le dos à Sullivan.
Je n'avais plus rien à dire à cet homme. Comme on dit, il n'y avait pas de remède à la stupidité.
La dernière phrase est très juste 😈