J’ai été réincarné en une Académie de Magie ! – Tome 6 – Chapitre 112

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Chapitre 112 : Shanteya et Keltaru

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Chapitre 112 : Shanteya et Keltaru

Partie 1

[Point de vue de Shanteya]

Je ne pensais pas qu’Illsy suggérerait de se séparer de cette façon. Cela n’avait aucun sens pour moi parce que nous aurions tout aussi bien pu nous rendre à Nasat et acheter les marchandises que Tamara cherchait, puis aller à Argos pour libérer Keltaru, Soleya et Neya. Nous aurions aussi pu continuer jusqu’à Ilia et les libérer là-bas…

Cette séparation n’avait aucun sens, même du point de vue du gain de temps. Nous n’étions pas pressés et ce n’était pas comme si quelqu’un ou quelque chose nous pourchassait. Si Illsy en avait envie, au port Ilia, il pouvait tourner à gauche et se diriger vers le Port Dravis. C’était la même chose pour nous.

Non, la raison pour laquelle nous nous étions séparés comme ça devait être Keltaru et moi…

Bien que je l’aie remarquée, je n’avais jamais pensé à demander si nous étions vraiment de la famille. J’avais depuis longtemps perdu tout espoir de revoir mes parents. En plus, qu’est-ce que j’allais leur dire ?

Avant de rencontrer Illsy, j’avais été formée comme assassin et utilisée par des hommes de toutes formes et de toutes tailles. Je n’étais pas une pute parce qu’ils ne me payaient pas. C’était la règle à l’intérieur de la Guilde de la Rage fantomatique : les femmes devaient permettre à n’importe quel homme de les utiliser. Cela faisait partie de notre formation… Après tout, la plupart des femmes allaient tuer leur cible au lit.

Lorsqu’il s’était agi d’être enlacé par ces hommes ou par mes cibles, aucun d’entre eux ne pouvait me faire prendre plaisir à l’acte que nous avions fait. Tout le monde se comportait comme un animal sauvage. La plupart d’entre eux avaient fini trop vite et étaient terriblement peu qualifiés.

Ayuseya, Nanya, Tamara et Zoreya avaient eu la chance de ne jamais avoir la chance de voir comment d’autres hommes faisaient l’amour à une femme. C’est quelque chose que je leur avais aussi dit et que je leur avais décrit en n’omettant pas les détails douloureux à quel point mes anciens partenaires n’étaient pas compétents, peu importe s’il s’agissait d’assassins ou de nobles qui tombaient follement amoureux de moi juste pour être tués le jour suivant.

Illsy… Illsy n’était pas comme eux. Quand il m’avait prise dans ses bras, je me sentais comme une fleur caressée par la brise de l’été. Quand il m’avait embrassée, il m’avait laissée savourer le goût et la sensation de simplement fondre dans ses bras. Quand il me regardait dans les yeux, je voyais mon reflet en eux, pas celui d’une autre femme, pas un désir de simple luxure, ou un sentiment de domination, je voyais l’amour et le désir ardent de me chérir. Quand il me murmurait à l’oreille, je l’avais senti toucher mon cœur et mon âme.

Chaque moment passé avec lui avait été passionnant, chaud, émotionnel et enrichissant. Il ne s’agissait pas de lui apporter du plaisir, mais de se faire plaisir.

Dans ses bras, je me sentais précieuse, aimée et appréciée… Je sentais comme je croyais que chaque femme devait se sentir dans les bras de son amant, et mon opinion était aussi partagée avec mes sœurs-épouses.

C’est pourquoi, si je rencontrais mes parents maintenant, je leur dirais simplement que j’avais été sauvée par Illsy et je ne ferais que partager avec eux mes aventures avec lui et ma nouvelle famille plutôt que de me souvenir du passé de la Poupée cassée.

« Maîtresse Ayuseya, je ne comprends tout simplement pas… Quel est le niveau de force de cet homme, Illsyore ? Est-il vrai que c’est votre mari ? Je m’excuse, mais… Je ne comprends tout simplement pas. » Keltaru secoua la tête en disant ces mots.

Le garçon doit être très confus. On ne lui a pas déjà dit qu’il était notre mari ? pensais-je qu’en gardant les yeux sur la route.

Conduire le MCV n’était pas si dur. J’avais juste besoin de faire attention aux trous et aux bosses sur la route. Celle qui était à côté de moi était bien sûr Ayuseya, et les trois autres étaient assis à l’arrière.

En la regardant, la draconienne m’avait regardée en réponse, et nous avions toutes les deux cligné des yeux, surprises.

Ayuseya avait gloussé et avait répondu. « Oui. C’est le seul homme que j’aime et que je chéris. Le seul mari pour qui je n’hésiterais pas à faire tomber même la totalité de Paramanium et Teslov, » elle se retourna et lui montra un doux sourire, mais ses derniers mots étaient froids comme de la glace.

Il y avait de la confiance dans ses yeux, mais ce n’était pas celui d’une femme folle amoureuse, mais d’une Super Suprême qui était consciente de ses propres limites et de la pleine puissance de son ennemi.

« Trahiriez-vous Teslov pour lui ? » demanda Keltaru en déglutissant.

« Il ne s’agit pas de trahison parce que je n’ai jamais été vu par ce Royaume comme autre chose qu’un outil jetable dans le but de faire des bébés. Sans Illsyore, je serais morte il y a longtemps et je n’aurais jamais su ce qu’est le bonheur. Teslov m’a offert la chance d’être un sacrifice pour une famille qui ne m’a jamais aimée, et Illsy m’a offerte la liberté, le bonheur, le pouvoir et une famille qui m’aime, » dit-elle en souriant et me toucha doucement la main.

J’avais répondu avec un doux sourire.

Keltaru ne savait pas trop quoi dire, mais c’est Neya qui avait demandé. « Comment pouvez-vous être sûre qu’il ne vous a pas piégé ? »

Ayuseya la regarda et lui répondit. « Pourquoi le ferait-il ? »

« Vous êtes princesse, n’est-ce pas ? Cela lui apporterait beaucoup de richesses et de terres… et d’influence… et de puissance militaire ? » elle avait essayé de trouver une raison valable, mais cette femme n’était pas une idiote, elle avait compris la position fragile dans laquelle se trouvait Ayuseya.

« Il n’y a rien que Teslov ne puisse lui donner qu’il n’ait déjà. D’ailleurs, j’ai vécu avec cet homme depuis la dernière fois que nous nous sommes vus à l’Académie Fellyore. Je peux vous dire avec certitude qu’il ne s’est jamais intéressé à moi pour mon statut ou ma richesse, seulement pour moi en tant que femme, » lui dit-elle d’un ton calme.

En effet, dire que le Seigneur du Donjon divin Illsyore qui pouvait « manger » des îles entières avait besoin de quelques caisses d’or était un peu ridicule, mais cela m’avait donné une idée.

« Vous connaissez Savannah ? » leur avais-je demandé.

« Oui, bien sûr, » répondit Keltaru.

« C’est une femme humaine très intelligente, et j’ai vu à quel point elle chérit l’enseignement aux autres, » Neya hocha la tête.

« Et bien qu’elle soit née à Paramanium, elle ne fait pas de distinction entre les espèces, » dit Soleya.

« C’était une esclave qu’Illsy a achetée à Kantor, » leur avais-je dit.

« C’était une esclave !? » Keltaru était le plus surpris.

« Mais pas seulement une esclave ordinaire. Son collier a été enchanté différemment du vôtre, et elle a même été marquée d’un tatouage qui l’a rendue incapable d’utiliser ses connaissances ou son pouvoir. C’était une esclave plus adaptée aux bordels qu’en tant qu’institutrice, » expliqua Ayuseya.

« Mais je n’ai pas vu de collier ou de tatouage sur elle ? » avait souligné Soleya.

« C’est parce que mon mari les a enlevés avant qu’on arrive à Polis. Si elle veut quitter notre groupe, elle est libre de le faire à tout moment. Savez-vous combien elle a été achetée ? » demanda-t-elle.

« Non… Euh… probablement quelques milliers de pièces d’or, » répondit Keltaru.

« Au moins 20 000. » dit Neya.

« Je dirais 15 000 ? » dit Soleya.

« Elle a été vendue aux enchères à Illsy au prix de trois millions de pièces d’or, » avais-je dit.

« … »

Ils n’avaient pas dit un mot, mais on pouvait lire le choc sur leur visage. Contrairement à mon stupide mari qui ne voyait pas la différence entre une pièce d’or et 10 000, ils ne le savaient que trop bien. Leurs propres prix en tant qu’esclaves n’avaient même pas atteint ce niveau, et le fait qu’ils aient eux aussi passé entre les mains de nombreux maîtres avant d’être achetés par Ayuseya leur avait laissé un sens profond de l’argent.

Entendre qu’Illsy avait dépensé trois millions de pièces d’or pour un seul esclave et l’avait ensuite libérée avait suffi à briser leur bon sens et même la croyance qu’il était un mauvais individu.

« Trois millions… une telle somme d’argent pourrait lui acheter une ville et il… il l’a juste utilisée pour une étrangère ? » dit Neya qui ne comprenait pas comment quelqu’un pouvait faire une chose pareille.

« C’est pourquoi j’ai dit que Teslov ne peut rien donner à Illsy qu’il ait déjà. S’ils lui donnent de l’argent, il en a assez pour acheter un royaume. S’ils lui donnent des terres, il fera simplement sa propre île. S’ils le protègent, il est beaucoup plus puissant que toutes les forces des trois continents réunis, mais nous nous joindrions aussi à lui dans les combats, ce qui finirait par un massacre total pour nos ennemis, » dit Ayuseya en riant à la fin de ses mots.

« N’est-ce pas un peu exagéré ? Et qu’est-ce qui s’est passé avec la prof Nanya ? Pourquoi ressemblait-elle à ça ? » demanda Soleya en posant les mains sur sa tête, essayant de comprendre tout cela.

Je suppose qu’il ne s’agit pas de comprendre comment cela est possible, mais plutôt de l’accepter comme une possibilité. Quand ils vivaient parmi les gens qui leur disaient que les Suprêmes étaient le sommet absolu, il leur est presque impossible d’accepter que quelque chose puisse être encore plus puissant. Ces trois-là ont tout simplement du mal à accepter la réalité de l’Illsy… C’est tout ce qu’il y a à faire…, avais-je réfléchi et j’avais poussé un petit soupir en gardant un œil sur eux et un autre sur la route.

Étant donné mon état de grossesse actuel, j’aurais pu demander à Ayuseya de conduire le MCV, mais je voulais aussi le conduire. Le bébé n’était pas en danger tant que je ne restais pas trop longtemps au volant ou que je ne roulais pas à grande vitesse sur un terrain très accidenté. Dans une heure ou deux, j’allais changer avec Ayuseya.

« C’est la vraie forme de Nanya. Celle que vous avez vue à l’Académie de Magie de Fellyore n’était rien de plus qu’une forme scellée, » leur avais-je expliqué.

Mais n’en avons-nous pas déjà parlé ? me demandais-je.

« Alors qu’est-ce qu’elle est exactement ? » demanda Soleya.

« Un demi-donjon et un demi-démon, » avais-je répondu.

« A q-qu-qu-quoi… Un quoi !? » Soleya cligna rapidement des yeux et baissa sa tête.

« Fufufufu ! C’est naturel d’être un peu choqué quand on entend ça, » déclara Ayuseya.

« Alors… Alors quand vous avez dit qu’Illsyore était un Seigneur du Donjon, vous disiez la vérité ? Je veux dire, je l’ai vu faire des choses étranges, alors je peux croire qu’il en est un, mais… comment ? » demanda Keltaru.

« Eh bien, il a simplement transformé son corps de cristal, qui était à l’Académie Fellyore, en celui que vous avez vu vous-mêmes. Il a ce genre de pouvoir. De plus, il n’est pas seulement un simple Seigneur du Donjon, c’est un Seigneur du Donjon Divin qui a été nommé par le Dieu de Guerre Melkuth lui-même, » j’avais l’impression qu’elle appréciait le fait qu’elle n’arrêtait pas de briser leur bon sens en morceaux.

« … »

Ils ne s’étaient pas évanouis comme les autres quand ils l’avaient découvert, mais tous les trois n’avaient pas dit un mot de plus. Ils avaient gardé le silence tout en essayant de comprendre ce que nous venions de leur révéler. Pour nous, il s’agissait d’informations sans importance. On ne révélait pas un secret ou une sorte d’information cachée. Une fois qu’Illsy aurait fait son académie, ce genre de chose deviendrait de notoriété publique là-bas.

Puis, une heure plus tard, j’avais arrêté la voiture et laissé Ayuseya conduire. Elle avait dû tirer son siège vers l’arrière pour s’adapter, mais elle avait réussi à le faire à la fin. Au lieu de m’asseoir à l’avant, j’étais allée à l’arrière et m’étais assise dans le fauteuil en face de Keltaru.

Il y avait quelque chose dont je voulais lui parler et si je ne le faisais pas maintenant, je craignais de ne plus jamais avoir l’occasion de le faire.

Environ quinze minutes après qu’Ayuseya ait pris le volant, j’avais décidé d’aller de l’avant et de demander.

« Keltaru. Ton nom de famille est Dowesyl, n’est-ce pas ? » lui avais-je demandé.

« Hein ? Oui, » il hocha la tête et me regarda avec une expression perplexe sur son visage.

« Peux-tu m’en parler ? » lui demandai-je.

« Je peux, mais pourquoi est-ce important pour vous ? » il inclina la tête vers la gauche, confus.

« Connais-tu mon nom complet ? » lui avais-je demandé.

« Non, » il secoua la tête.

J’avais pris une grande respiration et en le regardant dans les yeux, puis j’avais dit. « Shanteya Dowesyl Deus. Mais avant d’épouser Illsyore, je n’étais connue que sous le nom de Shanteya Dowesyl. »

« Quoi ? » Il avait fait de grands yeux quand il m’avait entendue.

« Le peu que je me rappelle de ma famille date de mes dix ans. Je sais que c’était une famille de vicomte dans le royaume de Mondravia sur Sorone, et que mon père s’appelait Nofram et ma mère était…, » avant que je puisse dire, Keltaru avait parlé.

« Elle'machere… Ils sont l’actuel vicomte et vicomtesse, mais j’ai entendu dire que leur fille, ma tante, a été tuée quand elle avait dix ans, » dit-il, surpris.

« C’est comme ça qu’on t’a raconté l’histoire ? » avais-je demandé et j’avais regardé par terre.

Les questions politiques étaient toutes compliquées, mais il était certainement vrai que les assassins auraient pu faire croire que j’avais été tuée par eux afin d’éviter que ma famille n’envoie des équipes de sauvetage à mes trousses.

« Mes parents sont Lorelay Dowesyl, qui est la petite sœur de Shanteya, et Zevrad Dowesyl, qui vient d’une longue lignée de Marquis. Ils sont les héritiers actuels de la famille Dowesyl, » explique-t-il.

« Quand je t’avais rencontré pour la première fois, j’ai soupçonné que tu étais mon petit frère, mais je vois que… ma mère a réussi à donner naissance à ma petite sœur. Lorelay… c’est le nom de la fleur que j’adorais faire des bouquets de fleurs et les offrir à ma mère pour son anniversaire, » avais-je dit avec un doux sourire en me souvenant de ces moments innocents.

« Mère a dit que son nom a été donné parce que sa sœur maintenant décédée aimait ces fleurs… Grand-mère en a même planté un jardin entier en sa mémoire, mais… si vous êtes vraiment ma tante… si c’est vrai alors…, » avait dit Keltaru alors qu’il était submergé d’émotions et qu’il s’efforçait de ne pas le laisser paraître.

« Alors ? » avais-je demandé avec un petit sourire.

« Où étiez-vous passée toutes ces années ? Pourquoi n’avez-vous pas contacté votre famille... Pourquoi ? » demanda-t-il en serrant les poings et en me regardant fixement.

En poussant un soupir, j’avais fermé les yeux, puis j’avais secoué la tête.

« Je n’ai pas pu, » lui avais-je dit.

***

Partie 2

J’avais ouvert les yeux pour le regarder.

« Qu’est-ce que vous voulez dire par là ? » demanda-t-il en plissant son front.

Bien sûr, tu ne comprends pas… « Quand j’avais dix ans, j’ai été kidnappée et violée par un assassin de la guilde de la Rage fantomatique. Il a jeté une malédiction sur mon corps pour que si jamais j’osais revenir ou contacter ma famille, ils soient tués par la malédiction. J’ai ensuite été entraînée par eux et envoyer tuer pour eux sur les continents d’Allasn et de Thorya jusqu’à mon arrivée à l’Académie Fellyore, et Illsy m’a sauvée de ce destin. Il m’a fallu beaucoup plus de temps pour guérir mon cœur et mon esprit, mais il était là et j’avais mes amies et ma nouvelle famille pour m’aider, » avais-je dit et j’avais regardé Ayuseya, qui conduisait tout en gardant les yeux sur la route.

Keltaru n’avait rien dit, il m’avait juste regardée avec son front plissé et son poing fermé. Peut-être qu’il essayait de comprendre ce que j’avais vécu, mais je doutais fort qu’il puisse même en imaginer la moitié.

« Alors savez-vous ce qui s’est passé… après votre enlèvement ? » demanda-t-il.

« Non, » j’avais secoué la tête. « Je n’ai vraiment pas non plus pu… À l’époque, ils m’empêchaient de parler. J’avais une horrible blessure au cou. Ils m’ont aussi enlevée ma capacité de concevoir, mais Illsy a réparé tout ça, » je leur avais montré un petit sourire.

« Je vois… Eh bien, après votre mort présumée, d’après ce que ma mère m’a dit… grand-mère et grand-père sont tombés dans une grave dépression. Pendant ce temps, une famille de baron des environs a profité de leur état de faiblesse pour voler une partie de nos terres et répandre de mauvaises rumeurs sur notre famille. La famille de mon père a aidé mon grand-père avec ce problème et a réussi à prouver aux gens que les rumeurs étaient fausses. La terre volée, cependant, n’a pas été récupérée, » expliqua-t-il.

« Et le Roi ? » lui avais-je demandé.

Keltaru secoua la tête. « Ils firent appel, mais le Roi le révoqua en déclarant qu’il était de leur responsabilité de protéger leurs terres et de s’assurer qu’ils ne seraient envahis par personne. En guise de punition, le roi a donné encore plus de nos terres à la famille du baron, affirmant que si nous avions été en état de guerre, nous aurions perdu plus qu’un simple morceau de terre. »

« C’est un peu trop dur. Est-il possible que le roi ait été manipulé dans les coulisses ? » demanda Ayuseya sans quitter la route des yeux.

« Peut-être, mais même s’ils avaient eu un moyen de prouver qu’il en était ainsi et même s’ils l’avaient fait, que pourraient-ils faire ? Les paroles du Roi sont absolues, » dit Keltaru.

« Que s’est-il passé ensuite ? » lui avais-je demandé.

« Ils sont retournés au domaine Dowesyl et ont géré les terres qu’ils possédaient encore. Peu de temps après, ma mère est née. Puis, à l’âge de six ans, un assassin a attaqué le domaine et a failli tuer ma grand-mère. L’agresseur a été tué par mon grand-père, mais ma grand-mère était dans un état grave. On m’a dit qu’elle ne s’était pas réveillée pendant plusieurs jours et qu’elle avait dû rester au lit pendant quelques années pour se rétablir. Le pire, c’est qu’elle a perdu sa capacité de concevoir, » dit Keltaru.

« Ont-ils découvert qui était l’assassin ? » lui avais-je demandé.

« Non…, » il secoua la tête.

« Pas de marques sur lui, rien ? » lui avais-je demandé.

« Il avait beaucoup de cicatrices, et je me souviens que mon père m’a dit qu’il avait une longue coupure au bras gauche…, » déclara-t-il.

« De l’épaule au coude ? » lui avais-je demandé.

« Oui. Comment l’avez-vous su ? » me demanda-t-il, surpris.

« Cet homme était l’un des assassins de la Rage fantomatique. Je crois que son but n’était pas de tuer maman, mais de l’empoisonner et de lui voler sa capacité à concevoir. C’est l’un des services offerts par ce groupe à ses clients. Quant à savoir comment je le connaissais, c’est lui qui m’a dit comment utiliser la dague, » lui avais-je expliqué.

« Vous n’avez jamais su qui il a attaqué ? » demanda Keltaru.

« Non. Les missions sont gardées secrètes. C’est une règle de fer pour eux, mais le contrat original devrait toujours être dans le bureau du Maître de la Guilde. Il y garde même ceux d’il y a plus de 1000 ans, » lui avais-je expliqué.

« On devrait peut-être lui rendre visite ? » suggéra Ayuseya.

« Non… Ce serait idiot de faire ça. En plus, je ne veux rien avoir à faire avec leur groupe. Si j’y retourne un jour, ce sera pour les anéantir tous, » avais-je déclaré avec sang-froid.

Après un long moment de silence et de réflexion, Keltaru dit avec un doux sourire sur les lèvres. « Alors, je suppose que ça fait vraiment de vous ma tante ? »

Il commençait enfin à l’accepter.

« Oui, » avais-je hoché la tête. « Quand le moment sera venu, je rendrai de nouveau visite à mes parents et j’amènerai peut-être leur petit-enfant pour les rencontrer, » avais-je dit en frottant doucement mon ventre gonflé.

« Ce serait merveilleux… Je leur dirai à mon retour, » il m’avait montré un sourire chaleureux.

« Cela signifie aussi que la famille Dowesyl n’est plus en danger, » dit Soleya.

« Qu’est-ce que tu veux dire ? » avais-je demandé en plissant mon front.

« Savez-vous pourquoi Keltaru a été envoyé à Teslov ? » demanda-t-elle.

« Ayuseya m’a dit que c’était lié à un vieux traité avant que Teslov ne devienne un état vassal de Paramanium. D’après ce que j’ai compris, tous les cinq ans, le plus jeune enfant d’une famille noble du royaume de Mondravia est envoyé comme serviteur de la famille royale de Pleyades à Teslov. Dans le passé, ils y voyaient un otage au cas où Mondravia tenterait de se rebeller, mais récemment, on y voit une occasion d’acquérir les compétences nécessaires pour soutenir la royauté et ceux qui reviennent sont habituellement embauchés par la famille royale là-bas, » avais-je dit ce que j’avais compris de cette affaire.

En d’autres termes, plutôt qu’une prise d’otages, il s’agissait plutôt d’aller étudier à l’étranger.

« Oui, c’est exact. À Mondravia, ils choisissent selon un système de rotation. Cette année-là, c’était le tour de la famille Dowesyl, et comme j’étais le seul enfant de la famille, c’est moi qui ai été envoyé pour servir de majordome à Maîtresse Ayuseya, » expliqua Keltaru.

« Il a travaillé très dur et si les choses s’étaient déroulées normalement, il aurait été renvoyé au Royaume de Mondravia il y a trois ans, » déclara Ayuseya, mais elle n’avait montré aucun signe de culpabilité ou de remords pour ce qui s’était passé à la fin.

Normalement, on aurait voulu la pointer du doigt et prétendre que si elle ne s’était jamais enfuie de Dankyun, le destin de ses serviteurs aurait tourné comme ça. Tous ceux qui avaient fait cela n’étaient que des idiots ignorants qui ne pouvaient pas comprendre quelle grande femme était l’Ayuseya actuelle.

« Je comprends… Qu’est-il arrivé à notre famille dans la situation actuelle ? » lui avais-je demandé.

« Le traité n’est qu’une formalité. Le Conseil des Anciens n’a pas voulu s’en servir pour se battre avec Mondravia, alors ce qui s’est passé, c’est qu’ils ont continué les choses comme si de rien n’était. En ce qui concerne Keltaru, ils ont probablement envoyé un rapport affirmant qu’il était mort ou avait été tué pour trahison et ont demandé que le prochain enfant soit envoyé comme d’habitude. Je crois qu’ils l’ont probablement déclaré disparu plutôt que mort. Si c’est ce dernier cas, il y a une chance que la famille Dowesyl demande le corps, donc ils ne le feraient pas, mais on ne sait jamais avec ces vieux individus, » expliqua Ayuseya.

« Cela signifie-t-il que notre famille est en danger de devenir des nobles déchus ? » lui avais-je demandé.

« Oui, » Ayuseya répondit d’un signe de tête calme. « À moins que Keltaru n’ait un frère ou une sœur plus jeune dont il n’est même pas conscient, » avait-elle souligné.

« C’est possible. Je suis loin de chez moi depuis longtemps, » il acquiesça d’un signe de tête.

« Dans ce cas, il serait préférable de ne pas perdre trop de temps sur ce continent, » avais-je fait remarquer.

« Non, je veux essayer de vivre comme un aventurier et augmenter mon rang. Si je ne peux même pas le faire pendant environ un an, alors même si je reviens, ils ne m’accepteront pas. Non, c’est moi qui aurai honte de mon inutilité…, » dit Keltaru en soupirant.

C’est un homme après tout. Il a sa propre fierté, et il veut avoir quelque chose à montrer à son retour… Devenir esclave ne peut pas être considéré comme une réussite…, avais-je pensé.

« Mais tu leur apporteras au moins de bonnes nouvelles. Tu leur diras que tu as rencontré ta tante qu’ils croyaient morte, et tu leur diras aussi que j’attends un enfant cette année, » lui avais-je dit.

Keltaru m’avait regardée dans les yeux et avait hoché la tête.

Je ne savais pas comment ma famille allait réagir, mais au moins je savais que j’allais les rencontrer dans le futur.

Pendant qu’Ayuseya nous conduisait vers Argos, j’avais continué à parler avec Keltaru. Je lui avais demandé de me raconter sa vie à Mondravia, ainsi que celle de mes parents et de ma petite sœur. Je ne savais pas s’ils voulaient me connaître, mais au cas où, j’avais écrit quelques lettres pour eux, que j’espérais que Keltaru remettrait.

Peut-être que dans quelques années, quand mes enfants seraient assez grands pour ne plus avoir besoin de moi tout le temps, je leur rendrais visite. Bien sûr, il y avait aussi la question de savoir si l’Académie de Magie d’Illsy serait également terminée. Je n’étais pas encore pressée.

***

[Point de vue de Tamara]

« Nous sommes enfin là, nya ~ ! » avais-je dit en sautant dans le lit.

J’espérais que c’était confortable comme chez Illsy, mais j’avais failli me casser une griffe dans la litière de paille dure.

« Bah ! Ce n’est pas sympa ! » m’étais-je plainte et j’avais levé les griffes, voulant le déchiqueter en morceaux.

« Attends une seconde ! Je ne paierai pas pour ce lit ! » Nanya avait bondi et m’avait attrapé la main.

« Mais c’est dur… nya…, » me plaignais-je en m’aplatissant les oreilles et en la regardant avec un visage triste.

Les mortels tombent toujours dans le piège du chaton triste.

« Ne t’inquiète pas, j’ai des lits dans mon esprit intérieur. On va échanger les lits durs contre ceux-là, » me dit-elle en souriant.

« Je t’aime ! » Je lui avais sauté dans les bras et lui avais fait un bisou sur les lèvres.

Nanya était sous son déguisement humain en ce moment, mais ça n’avait pas vraiment marché sur moi. Si je le voulais, je pourrais encore voir sa vraie forme. La démone était beaucoup plus mignonne et belle que cette fausse femme blonde aux yeux bleus qu’elle affichait. C’était son déguisement, alors ça ne me dérangeait pas.

Ce soir-là, j’étais allée dans la cuisine de l’auberge et je m’étais jointe au vieil Argos pour préparer le repas pour les clients. Je m’étais amusée, et il avait l’air bizarre quand il riait. La grosse moustache sur son visage m’avait fait me demander à quelques reprises si c’était juste une belette endormie ou peut-être un furet ?

Le lendemain, Nanya et moi avions visité le marché. J’avais tout acheté TOUT ce que j’avais pu trouver. Nous avions littéralement vidé les stalles. Nous avions assez d’argent et rien ne pourrissait dans l’esprit intérieur de Nanya.

Ensuite, nous étions allées chez les marchands d’esclaves. Ces sales types voulaient m’acheter, mais j’avais craché et j’avais montré mes griffes. S’ils s’en approchaient, je les transformerais en viande hachée !

Nanya leur avait acheté huit nouveaux esclaves. Quatre d’entre eux étaient des enfants d’esclaves qui n’avaient jamais su ce que c’était que d’êtres libres. Les quatre autres étaient tous des adultes de plus de 20 ans, d’anciens aventuriers qui avaient fini par se vendre en esclavage à cause de leurs dettes accumulées. Je pense que deux d’entre eux avaient été frappés d’amour par Nanya.

Une fois nos affaires terminées, nous étions partis de Nasat. Je n’étais pas du genre à regarder l’architecture ou à m’intéresser à l’histoire locale. Tout ce que je voulais, c’était retourner du côté d’Illsy et manger du poisson !

Pendant que Nanya payait les frais à la porte pour nous deux et les esclaves, j’avais remarqué quelque chose à mes pieds. C’était un petit livre blanc.

Ce genre de chose n’est pas censé exister dans ce monde…, avais-je pensé en remarquant la qualité assez élevée du papier.

Quand je l’avais ouvert, j’avais lu le message suivant. « Vilain chaton. Tu n’es pas censée être là. »

Le message brillait d’une énergie divine et m’avait fait frissonner dans toute la colonne vertébrale.

Tu n’es pas en position de me dire quoi faire…, avais-je pensé en froissant le papier dans ma main et en l’effaçant de l’existence.

« Tamara ! Allons-y ! » cria Nanya.

« J’arrive, nya ~ ! » avais-je dit en souriant tout en courant après elle.

***

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