Genjitsushugisha no Oukokukaizouki – Tome 3 – Chapitre 5

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Chapitre 5 : Le Retrait

— 22e jour du 10e mois de l’année 1546 du Calendrier Continental

Il était midi, le jour après avoir forgé une alliance secrète avec l’Empire du Gran Chaos.

Une fois de plus, Jeanne et moi avions rencontré Julius dans la salle d’audience.

Alors que nous étions tous dans la même position que la veille, Hakuya, qui se tenait devant moi, légèrement sur le côté, s’avança vers Julius et lui présenta un morceau de papier détaillant la décision prise lors des discussions d’hier.

« L’Armée Royale quittera Van et retournera chez elle au Royaume d’Elfrieden, » déclara Hakuya.

L’expression hautaine de Julius avait montré qu’il voyait cela comme la conclusion naturelle, mais quand il avait entendu ce qui était venu ensuite, son visage avait changé de couleur.

« À titre de condition, la Principauté d’Amidonia est condamnée à payer des indemnités de guerre au Royaume d’Elfrieden, » déclara Hakuya. « Ceci doit être séparé de toute rançon négociée pour le retour des prisonniers de guerre. »

« Ce n’est pas possible ! » Julius se fâcha sur Jeanne. « Madame Jeanne ! Qu’est-ce que cela veut dire ? »

« La signification de ceci... ? » Jeanne haussa les épaules. « C’est la conclusion logique. Comme demandé, je crois bien que j’ai correctement négocié la restitution de votre terre, n’est-ce pas ? »

Julius semblait ne pas pouvoir accepter le résultat. « Est-ce une sorte de blague !? Des indemnités de guerre ? Cela donne l’impression que nous sommes une nation vaincue ! »

« Compte tenu de votre situation actuelle, il est difficile de dire le contraire, » déclara Jeanne. « Car après tout, vous avez perdu votre capitale. »

« Non ! Nous n’avons pas encore perdu ! » cria Julius. « Ils ont seulement pris une seule ville ! »

« ... Alors vous êtes libre de faire ce que vous voulez, » déclara Jeanne. « L’Empire va se laver les mains de cette affaire. Selon ce que vous voulez, vous pouvez faire la paix ou faire la guerre. »

Julius se mit à gémir, à court de mots.

Voyant sa réaction, Jeanne soupira. « Quant à cette cité... J’ai de gros doutes sur le fait que vous pouvez faire une croix sur votre capitale alors que c’est qu’une seule ville perdue, mais je crois que vous vous êtes tourné vers nous pour obtenir de l’aide parce que vous n’étiez pas en mesure de reprendre la ville vous-même, oui ? Dans ce cas, vous avez perdu la guerre. L’Empire, sous le couvert de la Déclaration de l’Humanité, a fourni un moyen pour vous de rétablir les changements à vos frontières. Nous ne pouvons désormais plus intervenir. »

« Mais, les indemnités de guerre... » se plaignit Julius.

« Sire Julius, » Jeanne lui lança un regard froid, qui semblait le repousser. « Cette affaire a profondément attristé ma sœur, Maria. Vous avez envahi un État souverain en profitant d’une faille dans la Déclaration de l’Humanité, Déclaration qui a été faite afin d’unir toute l’humanité face à la menace posée par le Domaine du Seigneur-Démon. En tant que chef de ce pacte, nous ne pouvons pas le laisser faire sans contestation. »

« C’était... notre ancien souverain, Gaius, » bredouilla Julius.

« Même si c’était le cas, » déclara Jeanne. « Vous portez toujours la responsabilité de ne pas l’avoir arrêté. Quoi qu’il en soit, afin de m’assurer qu’aucun autre signataire de la Déclaration de l’Humanité ne s’engage dans de telles actions imprudentes, je crois que de graves conséquences sont nécessaires, je vais donc devoir faire un exemple pour eux. »

Wôw... Elle dit tout poliment, mais fondamentalement ce qu’elle dit est, « Je vais faire un exemple de vous pour garder les autres signataires en ligne », hein ? pensai-je.

Julius se tenait là, tremblant avec ses mains dont le poing était serré, son visage était un masque tordu de rage et d’angoisse. « ... Et si je refuse ? »

« Je vous l’ai déjà dit ça, » déclara Jeanne. « Vous êtes libre de faire ce que vous voulez. L’Empire s’en lavera les mains et la Principauté d’Amidonia sera expulsée de la Déclaration de l’Humanité. »

Julius haleta sous le choc. « Attendez ! Si vous faites cela, notre pays... »

« Tout à fait, » déclara Jeanne. « “S’ils ne sont pas signataires de la Déclaration, ce n’est pas une violation si nous les attaquions.”. C’est à dire, votre... pardonnez-moi, mais l’interprétation de votre père pourra ainsi être appliquée à Amidonia. »

La Principauté d’Amidonia était entourée de quatre nations sur ses quatre côtés. À l’ouest se trouvait l’état mercenaire de Zem, qui professait une neutralité éternelle malgré l’envoi de mercenaires. Au sud se trouvait la République de Turgis, un état non-signataire ayant une politique nationale d’expansionnisme vers le nord. Au nord se trouvait l’État Pontifical Orthodoxe de Lunaria, qui avait un ensemble unique de valeurs qui différaient de ses voisins. Et enfin, à l’est se trouvant le Royaume d’Elfrieden.

En mettant de côté ce que nous pourrions faire nous-mêmes, s’ils perdaient maintenant la protection de la Déclaration de l’Humanité, il était tout à fait possible que les trois autres les engloutissent.

Leur ancien dirigeant, Gaius, avait maintenu son pays en se joignant à l’Empire, en concluant un contrat avec Zem pour leurs mercenaires, en intimidant le Royaume d’Elfrieden qui avait son précédent dirigeant timide, Albert, et en affichant sa puissance militaire dans les pays du nord. Il avait les capacités pour mener une politique étrangère équilibrée. Pouvait-on dire que Julius avait le même talent ?

Même s’il avait le talent, le jeune Julius avait-il le genre d’autorité dont il aurait besoin pour faire les démarches nécessaires ?

L’héritage de l’autorité était meilleur quand elle était faite progressivement, tandis que le précédent dirigeant vivait encore. Cependant, Gaius n’était plus. Julius devait maintenant faire face au difficile problème de la gestion externe de la menace des puissances étrangères, tout en gardant le contrôle interne de ses propres vassaux. Si, au cours de ce processus très important, son pays était retiré de la Déclaration de l’Humanité, il perdrait la capacité de compter sur l’autorité de l’Empire, alors il se retrouverait rapidement dans une situation d’échec et mat.

Julius avait parfaitement compris cela, alors il avait baissé la tête face à Jeanne, son visage plein d’amertume. « ... J’accepterai votre plan. »

« C’est une sage décision, Sire Julius, » dit Jeanne.

Julius avait l’air mortifié, mais je ne pouvais pas me permettre de faire preuve de pitié ici, alors je n’avais rien fait.

Une fois cette question réglée, nous avions négocié le montant précis.

Nous avions demandé deux années de budget national d’Amidonia, divisé en paiements annuels sur une période de dix ans, avec la stipulation qu’il devait être payé en monnaie impériale. En d’autres termes, ils payeraient 20 % de leur budget national chaque année pendant dix ans.

Bien sûr, Julius objecta face à ça. Cependant, Jeanne l’avait convaincu (contraint ?), lui faisant finalement accepter la demande. Il s’agissait de priver Amidonia, qui avait dépensé la moitié de son budget annuel en frais militaires, de son financement militaire. Tant qu’ils réduisaient les dépenses militaires, je ne pensais pas qu’il leur serait impossible de le payer, mais Amidonia allait-elle le faire ?

« Madame Jeanne, » dis-je. « S’il y a des retards de paiement... »

« Effectivement, » déclara Jeanne. « L’Empire soutiendra le Royaume d’Elfrieden pour l’annexion de Van. »

« Arg..., » Julius avait l’air frustré, mais il ne pouvait rien dire.

Après avoir confirmé cela, j’avais fait une proposition. « Cependant, Madame Jeanne, je pouvais parfaitement les voir retarder le paiement pendant qu’ils renforcent les défenses autour de Van. Même avec le consentement de l’Empire, il serait ainsi difficile de reprendre la ville. En tant que tel, je voudrais quelque chose de valeur équivalente en garantie. »

« Garantie ? » demanda Jeanne.

« Un objet que nous conserverons jusqu’à ce que les indemnités de guerre soient entièrement payées, » dis-je. « Si les réparations ne sont pas payées, nous acquerrons la propriété de cet objet. Bien sûr, si les indemnités sont correctement payées, l’objet leur sera restitué. »

« Je comprends... Alors, qu’est-ce que vous voulez ? » demanda Jeanne.

« Un Joyau de Diffusion de la Voix, » répondis-je.

« Quoi... ! Notre pays n’en a qu’un ! » rugit Julius.

Avec le niveau actuel de la technologie, ils ne pouvaient pas en créer un autre. S’il était évalué comme un actif, il était probablement égal à une année du budget national d’Amidonia.

Mais même ainsi, j’avais alors dit. « De toute façon, vous ne l’utilisez pas du tout. Où est le mal à nous laisser l’avoir ? »

« Ne soyez pas absurde ! Ne voulez-vous pas inciter mon peuple à la révolte !? » cria Julius.

« Il s’agit d’une simple question de changer la fréquence, » dis-je. « C’est tout ce qu’il faudrait pour vous empêcher de recevoir des émissions faites par Elfrieden. »

« Arg... Eh bien, oui..., » Julius avait semblé angoissé, mais il l’avait accepté étonnamment facilement.

Ils avaient utilisé ce dispositif pratique pour rien de plus qu’une déclaration d’intention au début de chaque année, donc Julius le militariste n’avait probablement pas réalisé sa vraie valeur. Il se pouvait donc qu’il ne l’eût reconnu que pour sa valeur matérielle. Alors que je pensais à ça...

« Sire. Puis-je vous dire un mot ? » demanda Hakuya, puis il vint chuchoter quelque chose à l’oreille. Alors que j’entendais ce qu’il avait à me dire, j’avais froncé les sourcils.

« C’est... surtout pour satisfaire vos propres intérêts, n’est-ce pas ? » demandai-je.

« Que dites-vous ? » demanda Hakuya. « La connaissance est de la sagesse cristallisée. »

« ... Eh bien, c’est bon, » dis-je. « Sire Julius. »

« ... Quoi ? » demanda Julius.

« En tant que pièce additionnelle, nous aimerions prendre les livres se trouvant dans les archives de ce château, » annonçai-je.

Il s’agissait de ce que Hakuya avait proposé. Nous prendrions la garde des livres d’Amidonia ramassant la poussière dans les archives d’Amidonia.

Dans ce monde, le papier était encore précieux et les livres n’étaient pas distribués à grande échelle. Il était tout à fait possible qu’Amidonia ait des livres dans ses archives qu’Elfrieden n’a pas. De plus, dans le cas des livres, il serait possible de les copier pendant que nous les avions en notre possession.

Julius renifla avec mépris. « Très bien. Mais ne touchez à rien d’autre. Je ne vous permettrais pas de prendre nos armes ou armures. »

« Saviez-vous que nous en avons déjà vendu une grande quantité pour amasser des fonds afin de construire le réseau de transport se trouvant ici ? » dis-je. « Nous avons dépensé cet argent dans cette ville, donc même si vous le demandez, nous ne pouvons pas nous y plier. »

« Arg ! Alors, ne les touchez plus ! » s’écria Julius.

« ... Très bien, » dis-je.

Les armes étaient-elles vraiment plus importantes que les livres ? C’était la bonne décision, étant donné qu’il était entouré de pays, il ne pouvait pas baisser sa garde, mais il ne semblait pas comprendre à quel point il était effrayant que les écrits recueillis de son peuple, la cristallisation de leur sagesse, fuient hors de son pays.

Après que j’eus regardé Jeanne, je vis qu’elle devait penser la même chose que moi, parce qu’elle affichait un sourire ironique.

Maintenant, avec la question des indemnités réglée, nous avions décidé de régler d’autres questions.

« J’exige que les soldats de mon pays qui ont été faits prisonniers par le Royaume d’Elfrieden me soit restitué, » demanda Julius.

« Très bien, » dis-je. « Cependant, vous devrez payer une rançon pour ceux qui appartiennent à la noblesse ou à l’aristocratie. »

« ... Compris, » répondit Julius.

« En outre, nous avons enquêté et réalisé une liste de criminels de guerre qui ont attaqué des villages et se sont livrés au pillage lors de votre invasion effectuée contre notre pays, » dis-je. « Tous les prisonniers qui figurent sur ces listes seront jugés en vertu des lois de notre pays, et nous ne pouvons donc pas vous les restituer. »

La mesure extrême imaginée avec Hakuya, l’utilisation des monstres fictifs de type pierrots de flammes afin d’inciter les habitants à évacuer, avait réussi à faire aller hors du chemin des forces Amidoniennes la plupart des résidents de la région. Cependant, cela ne signifiait pas qu’il n’y avait eu absolument aucune victime.

Les armées de la principauté semblaient avoir envoyé des éclaireurs dans toutes les directions, et ceux qui avaient eu la malchance de les rencontrer avaient été tués. Je veillerais à ce qu’ils payent pour le sang innocent de mon peuple qu’ils avaient répandu.

« Nous demanderons également que ceux dont les noms figurent sur la liste et qui restent dans votre pays nous soient remis, » dis-je. « Et seulement une fois que tout cela sera terminé que nous pourrons commencer à vous rendre les prisonniers. »

« ... Bien, » répondit Julius sous peu, acceptant la liste des criminels de guerre de Hakuya. « À ce propos, Roroa est-elle parmi les prisonniers qui nous seront redonnés ? »

Roroa ? Qui ? pensai-je.

« Je ne connais personne de ce prénom, » dis-je. « Qui est-ce ? »

« Roroa Amidonia. Mon indigne sœur cadette. Elle aurait dû être à Van quand les combats ont commencé, » déclara Julius.

« Votre sœur cadette ? » demandai-je. « Lorsque les portes de Van ont été ouvertes, nous avons permis à tous ceux qui souhaitaient partir de le faire. Je pense que Margarita était la seule ayant un certain rang qui soit resté. Je n’ai reçu aucun rapport que nous ayons capturé un membre de la famille princière. »

« ... C’est bien, dans ce cas, » déclara Julius, coupant court à ce sujet comme s’il n’était plus intéressé par lui.

Sa sœur n’avait-elle pas disparu ? Il semblait terriblement blasé à propos de ce fait. N’était-il pas inquiet ?

« Si vous voulez, je pourrais demander à mes hommes de chercher quelqu’un qui l’aurait repérée, » proposai-je.

« Cela ne sera pas nécessaire, » répondit-il.

« Pas nécessaire ? » répétai-je.

Hakuya me murmura ça à l’oreille. « Il est très probablement préoccupé par une crise induite par la succession. Mes investigations indiquent que la Princesse Roroa est l’une des rares personnes dans la maison royale Amidonienne qui ait le soutien des fonctionnaires civils. Ayant accordé un traitement préférentiel à l’armée, Julius n’est pas populaire auprès des fonctionnaires civils. Il doit craindre qu’ils soutiennent Mme Roroa face à lui. »

« Même si Gaius est parti, elle est l’une de ses rares personnes restantes de sa famille, » murmurai-je en retour.

« Il s’agit d’un phénomène courant dans les familles royales, » murmura Hakuya.

« Je comprends cela, mais quand même... Je ne veux pas l’accepter, » murmurai-je.

Les guerres de succession n’avaient pas été rares dans l’histoire de la Terre. Même dans le Royaume d’Elfrieden, lorsque la mère de Liscia, Elisha était montée sur le trône, le conflit entre ses proches avait failli entraîner l’extinction de la lignée royale.

Si je me souviens bien, Machiavel lui-même avait appelé à la purge de ses opposants politiques. Toutefois..., en tant que quelqu’un qui avait connu la solitude après avoir perdu toute sa famille, je ne pouvais pas m’empêcher de penser qu’il devrait chérir sa petite sœur. Ça aurait pu être naïf de ma part, mais c’était quelque chose que je ne pouvais pas abandonner.

« Oh, c’est vrai, » dis-je. « Je voudrais parler du cas de Margarita. Nous aimerions qu’elle reste dans le royaume. Étant donné qu’elle a coopéré avec nous afin de maintenir l’ordre dans Van, je soupçonne que vous auriez du mal à décider ce qui devrait être fait avec elle. »

« Parlez-vous de la Générale Margarita Wonder ? » Julius semblait y réfléchir pendant un instant. « Si vous libérez cinq des nobles que vous détenez en échange, je peux accepter cela, » finit-il par dire.

Il devait avoir calculé sa valeur en tant que prisonnier, et il avait jugé que, comparée à un général, dont il ne savait pas quoi faire, une réduction de la rançon pour les vassaux qui lui étaient réellement fidèles serait plus bénéfique. Demander l’échange de cinq personnes en échange d’une seule personne était une décision avisée.

« Très bien, » dis-je. « Je vais accepter vos conditions. »

« ... C’était une bonne générale, oui, mais est-elle assez bonne pour que vous la désiriez si fortement ? » demanda Julius, empli de doute.

J’avais souri avec ironie. Julius, seulement capable de juger la valeur des gens par leur potentiel en tant qu’actifs de guerre, ne comprendrait pas la véritable valeur de Margarita. En tant que chanteuse, en tant qu’hôtesse, Margarita était devenue indispensable quand il s’agissait de produire des programmes pour le Joyau de Diffusion de la Voix.

Eh bien, je n’avais aucune obligation de lui expliquer cela, alors je m’étais tu.

Avec des choses en grande partie en ordre maintenant, j’avais déclaré la fin des pourparlers.

Elfrieden recevrait des indemnités de guerre en échange du retrait de Van. Amidonia reprendrait le contrôle de Van en échange du paiement d’indemnités. L’Empire avait démontré son influence en agissant comme médiateur dans ce différend.

... Pour l’instant, il s’agissait de résultats dont je pourrais être satisfait.

On pourrait dire qu’Amidonia était sortie avec une perte, l’Empire n’avait rien perdu, et Elfrieden était sorti avec des gains appropriés.

Une fois les pourparlers terminés, Julius tourna les talons, comme pour dire qu’il n’avait plus rien à dire aux personnes comme moi, mais je l’avais appelé afin de l’arrêter.

« Sire Julius ! » dis-je.

« ... Quoi !? » s’exclama Julius, ne se donnant même pas la peine de se retourner.

« Un penseur politique de mon propre monde, Machiavel, a dit quelque chose comme ça, » dis-je. « Ceux qui acquièrent une principauté avec difficulté la garderont facilement. Ceux qui acquièrent une principauté sans difficulté auront du mal à la garder. »

« Hein !? Qu’est-ce que ça veut dire ? » Julius se tourna pour me faire face, avant de me jeter un regard noir.

Je l’avais regardé droit dans les yeux puis je lui avais dit. « Je vous ai vaincu, vous et vos hommes, afin de prendre Van. J’ai expulsé la grande majorité de la noblesse et l’aristocratie, purgeant presque tous ceux qui auraient pu devenir un adversaire politique. Voilà pourquoi, si j’avais continué à diriger Van, il n’y aurait probablement pas eu de problèmes majeurs. Toutefois... pouvez-vous en dire la même chose ? Même si vous revenez dans cette ville, pouvez-vous la gouverner sans problèmes ? »

« Qu’est-ce que vous racontez ? » demanda Julius. « C’est mon pays. »

« Cependant, jusqu’à maintenant, il faisait partie d’Elfrieden, » répondis-je. « Dans l’histoire, il y a ceux qui sont devenus princes avec le soutien de parents ou de pays puissants. Vous l’avez retrouvé en utilisant l’autorité de l’Empire, c’est-à-dire les bras des autres. Ce serait ce que le penseur politique Machiavel entendait par “une principauté acquise sans difficulté”. »

Cependant, pour ceux qui volent au sommet sous le pouvoir de ces bailleurs de fonds, perdre leur soutien, c’était perdre instantanément leur fortune.

Un exemple de cela serait la façon dont l’homme Machiavel avait brandi son prince idéal, César Borgia d’Italie, qui était tombé à la mort de son soutien. Cet homme était à la fois son père et le pape, Alexandre VI.

Ou comment, au temps de la Guerre Chu-Han, quand Xiang Yu avait lutté contre Liu Bang, le fermier qui avait été présent aux côtés de Xiang Yu en tant que héros, et qui avait commencé avec d’humbles origines jusqu’à être nommé roi de Chu, avait finalement été tué quand il avait été jugé inutile.

Ayant emprunté l’autorité de l’Empire pour récupérer sa propre capitale, Julius serait sûrement méprisé par ses officiers et les habitants d’Amidonia. Et Gaius VIII, craint pour sa puissance militaire, n’était plus là.

Est-ce que Julius, qui était intelligent, mais qui manquait d’intensité, pourrait finalement garder ses officiers sous contrôle ? Serait-il capable de mieux servir les habitants de Van que moi et de gagner leur confiance ?

« Celui qui acquiert une principauté sans difficulté doit travailler dur afin de le garder, » dis-je. « Avant de commencer à parler de rancunes, je vous suggère de travailler dur sur des politiques qui profiteront à votre peuple. »

« Cela ne vous concerne pas, » tout en repoussant mes paroles de soutien, Julius était parti.

Jeanne haussa les épaules et elle leva les yeux vers le plafond.

J’avais ensuite marché vers Jeanne et lui avais serré la main. « Ces discussions auront été très fructueuses. Donnez mes salutations à votre sœur. »

« Vous avez tout à fait raison, » déclara Jeanne. « Vous prenez soin de vous, et vous aussi, Sire Hakuya. Nous devrions parfois nous plaindre de nos maîtres respectifs avec un verre à la main. »

« Cela sonne très bien à mes oreilles, » répondit Hakuya. « Je vais vous attendre avec un tonnelet. ».

Qu’est-ce que ça voulait dire ? Auraient-ils assez de choses à se plaindre qu’ils auraient besoin d’un tonnelet entier ? Après que j’eus regardé dans sa direction, Hakuya avait ouvertement détourné ses yeux.

Voyant cela, Jeanne avait fait un rire jovial. « J’espère que nous nous retrouverons du même côté lorsque nous nous rencontrerons. S’il vous plaît, veuillez parfois parler également directement avec ma sœur. »

« C’est tout à fait vrai, » dis-je. « J’attendrai avec impatience le jour où je pourrai parler directement avec Madame Maria. »

Nous avions alors échangé une poignée de main ferme.

***

Une fois que le retrait avait été décidé, le reste s’était rapidement déroulé.

Parce qu’il avait été décidé que nous restituerions Van, rester plus longtemps ferait que gaspiller nos fonds de guerres. L’Armée Royale avait retiré nos troupes de Van avec autant de démonstrations qu’elles avaient mises quand nous étions entrés pour la première fois à travers les portes. Le petit nombre de soldats amidoniens stationnés près de Van était largement surpassé en nombre, et l’Armée Impériale était toujours dans les environs, surveillant de près les deux côtés, de sorte que nous n’avions pas besoin de nous inquiéter d’être poursuivis.

J’étais au milieu de la procession, la même que lorsque nous étions arrivés, chevauchant un cheval qu’Aisha tenait par les rênes, avec Liscia sur un autre cheval à côté de moi. Quand nous étions entrés dans le château, les yeux des habitants qui regardaient l’Armée Royale étaient remplis de peur. Cependant, les choses avaient un peu changé maintenant.

Nous n’avions pas publié d’annonce officielle, mais les habitants qui bordaient la rue portaient des expressions remplies d’incertitudes. Quand elle avait vu ces regards, Liscia avait eu sur son visage un regard empli de doute.

« Pourquoi pensez-vous que toutes ces personnes font de tels airs ? » demanda-t-elle. « Je comprendrais s’ils étaient soulagés, parce qu’ils seraient heureux d’être libérés, ou heureux de nous voir enfin partir. ».

« C’est probablement... qu’ils sont inquiets, » dis-je. « Inquiet de revenir sous la domination d’Amidonia. »

« Inquiet ? Vis-à-vis du fait que la situation revienne à la manière dont elle était avant ? » demanda Liscia.

« C’est exactement la raison, » dis-je. « Ils sont inquiets, “nos vies vont-elles revenir à ce qu’elles étaient avant ?” voilà ce qu’ils se demandent, » je regardais droit devant moi alors que je parlais. « Les habitants de Van étaient opprimés par la Maison Princière d’Amidonia. Cela ne les dérangeait probablement pas quand c’était simplement une chose normale pour eux. Mais après avoir été sous notre occupation, ils ont appris que ce n’était pas ainsi que les choses devaient être. Contrairement à la Maison Princière, je leur ai donné la liberté d’exprimer leurs sentiments et leurs idées. C’est pourquoi, avec notre départ, ils craignent que le retour de Julius et de ses partisans signifie que tout cela serait à nouveau supprimé. »

Parce que, eh bien... cela serait probablement le cas. Une fois que Julius entrera dans Van, il allait naturellement s’atteler à écraser cette atmosphère détendue.

Liscia avait regardé avec pitié les personnes qui bordaient les rues. « Maintenant qu’ils ont connu le goût de la liberté, ils ne peuvent pas retourner à leurs vieilles vies. N’est-ce pas comme une dépendance ? »

« Je pense que c’est une façon appropriée de le dire, mais... ne pourriez-vous pas trouver quelque chose d’un peu plus gentil comme manière de le décrire ? » demandai-je.

« N’est-ce pas un fait avéré ? » demanda-t-elle. « Mais n’est-ce pas leur pays ? Est-ce que leurs manières de penser peuvent être changées aussi facilement ? »

J’avais alors répondu. « Dans mon vieux monde, il existe un proverbe : “Un gouvernement oppressif est plus féroce qu’un tigre”. Dans ce cas, je dirais que “la Tyrannie est plus répugnante qu’un envahisseur”. Les personnes ne bougent pas selon des codes moraux ou l’éthique. Si leur propre pays leur est bénéfique, ils le défendront contre les menaces étrangères, mais si un autre pays leur est plus avantageux, ils travailleront activement pour leur ouvrir les portes du château. »

Après que j’eus dit ça, Liscia soupira. « Quand je marche à vos côtés, je ne vois que comment les gens agissent dans les moments difficiles. »

« En avez-vous marre de ça ? » demandai-je.

« Surtout pas, continuez ainsi !! » Liscia et Aisha avaient toutes deux crié cela en même temps.

Pour une raison ou pour une autre, Aisha s’était également jointe à cette discussion.

« Aisha, pourquoi l’avez-vous également dit ? » m’écriai-je.

« Si Votre Majesté marche à mes côtés, aucune route n’est difficile ! » déclara Aisha, fièrement.

N’auriez-vous pas l’air d’être trop loyale ? Si elle continuait ainsi, elle allait se faire un surnom « Le Toutou du Roi ».

Tout en regardant Aisha, Liscia se mit à rire. « Je ressens la même chose. Si je suis avec vous, Souma, j’ai l’impression de pouvoir accepter n’importe quelle réalité. »

« ... Je vois, » dis-je. « Eh bien, revenons chez nous. »

Retournez dans notre pays, où tout le monde nous attend, pensai-je.

***

... Une semaine plus tard.

Lorsque Jeanne retourna dans l’Empire Gran Chaos et atteignit le château de la Capitale Impériale, elle fut immédiatement appelée par sa sœur, l’Impératrice Maria, sans même avoir le temps de reprendre son souffle. Bien qu'étant un peu exaspérée, elle traîna ses pieds jusqu’au bureau des affaires gouvernementales de Maria, où elle trouva sa sœur debout au milieu de la pièce, l’attendant.

Habituellement, à ce moment-là, il y avait encore des bureaucrates qui s’affairaient, mais aujourd’hui, Maria avait dû faire évacuer la pièce parce qu’elle était seule. Avec un doux sourire clairement visible sur son visage, l’élégance avec laquelle elle se tenait là, affichait un soupçon de sa prestance en tant qu’impératrice.

Jeanne posa une main sur sa poitrine, saluant Maria. « Ma sœur. Je viens à l’instant de rentrer de la capitale princière, Van. »

« C’est bon de te revoir, Jeanne, » déclara l’Impératrice. « Comment ça s’est passé là-bas ? »

« Il y a eu quelques problèmes, mais cela s’est passé plus ou moins comme nous l’avions espéré, » déclara Jeanne. « Van et le territoire environnant ont été restitués par le Royaume d’Elfrieden à la Principauté d’Amidonia. »

« Excellent, » déclara Maria. « Tu as fait du bon travail. ... Mais maintenant..., » Maria frappa dans ses mains et sourit. « C’est fini pour le mode travail. Jeanne, bienvenue à la maison ! »

Maria avait sauté vers l’avant depuis son trône et elle se précipita afin d’étreindre Jeanne.

« Ma sœur !? » L’étreinte soudaine rendit Jeanne en pleine panique « Qu’est-ce que c’est, tout d’un coup ? Tu sais, il s’agit là d’une conduite qui ne convient pas à une Impératrice. »

« Eh bien, j’étais seule, et je ne pouvais pas te voir depuis si longtemps, » se plaignit Maria. « Tout le monde en dehors de la famille me donne le traitement de Votre Majesté Impériale, et notre autre sœur est enfermée dans son laboratoire, toujours fidèle à elle-même ! »

« Ne me dis pas ça ! Tu n’es plus une enfant ! » déclara Jeanne.

Alors même qu’elle protestait, Jeanne tapota le dos de Maria. Elle était consciente de la solitude et du lourd fardeau que sa sœur devait supporter en tant qu’Impératrice, alors elle ne voulait pas la repousser.

Quand Maria lâcha prise, elle alla s’asseoir sur le magnifique lit installé dans le côté du bureau. Puis elle tapota une zone à côté d’elle, encourageant Jeanne à venir s’asseoir également.

« Alors ! Alors ! Quel genre de monsieur est Sire Souma ? » demanda Maria avec impatience.

Quand elle vit sa sœur avec ses yeux brillants, comme un enfant harcelant ses parents pour une histoire au coucher, Jeanne avait senti un mal de tête qui commençait à arriver. Cependant, il semblait improbable qu’elle soit libérée jusqu’à ce qu’elle en parle, alors Jeanne abandonna et décida de lui dire ce qui s’était passé pendant les pourparlers.

« D’accord, » céda Jeanne. « Tout d’abord, laisse-moi te dire ce qui s’est passé quand je suis allé en tant qu’éclaireur dans Van... »

Jeanne avait alors expliqué le cours des événements depuis le moment où elle avait rencontré Souma au coin d’une rue à Van jusqu’à leur accord pour former un pacte secret. Alors Jeanne racontait l’histoire, l’expression de Maria avait rapidement changé. Elle avait paru soulagée quand elle avait appris que Souma n’était pas fâché d’avoir été convoqué de force ici et qu’il comprenait parfaitement leurs intentions.

Quand elle avait entendu Souma dire. « Les Monstres et les Démons peuvent avoir la même relation que ce que ce continent appelle l’humanité et les animaux, », elle afficha une expression de surprise et d’incertitude.

Quand elle avait entendu dire que quelque chose appelé un sandwich-spaghetti à la viande avait été mangé pendant la conférence et qu’il était délicieux...

« Jeanne, ce n’est pas juste ! » cria Maria, gonflant ses joues avec colère.

Cela faisait longtemps que Jeanne n’avait pas vu sa sœur si animée en l’écoutant. Elle était probablement excitée.

La plus grande explosion d’émotion était venue quand Jeanne avait parlé du pacte secret, la proposition de Souma que l’Empire défendrait l’ouest, alors que le royaume défendrait l’est. Quand Maria avait entendu ça, elle s’était jetée sur le lit en se tenant le ventre alors qu’elle riait.

Jeanne fut surprise par la réaction de sa sœur. « Ma sœur ! Je ne pense pas que ce soit vraiment une raison de rire, n’est-ce pas ? »

« Hehehe... D-Désolée ! C’est tellement drôle, » Maria avait dit ça en essuyant les larmes qui s’étaient formées dans les coins de ses yeux en raison d’avoir trop ri.

« Drôle ? » demanda Jeanne incrédule.

« Ce que je veux dire par là... penses-y un peu plus, » déclara Maria. « Il n’y a pas si longtemps, nous devions faire preuve d’une considération particulière envers ce pays parce qu’il était tellement affaibli, mais à un moment donné, il s’est transformé en un allié digne de confiance qui peut gérer la partie orientale du continent pour nous. J’ai l’impression d’avoir été trompé par l’illusion d’une fée. »

« Eh bien... ! C’est vrai, les événements bougent à un rythme incroyablement rapide, » déclara Jeanne.

« Exacte ! C’est exactement ça, Jeanne, » le sourire de Maria avait soudainement disparu, son visage était devenu extrêmement sérieux. « He Jeanne. Te rappelles-tu de comment un héros est défini dans le royaume ? »

« C’était dans les rapports, alors oui, » répondit Jeanne. « Si je me souviens bien... c’était : “Celui qui conduira à un changement d’époque”, n’est-ce pas ? »

« Tout à fait, » déclara Maria. « Pas “Celui qui vaincra le Seigneur-Démon” ou “Celui qui conquerra le monde”, mais “Celui qui conduira à un changement d’époque”. Souma a été invoqué en tant que héros, mais tout ce qu’il fait est du travail administratif, et donc certaines personnes doutent qu’il soit véritablement un héros. »

« C’est vrai, il n’agit pas comme ce que l’on attend d’un héros, » déclara Jeanne. « Car après tout, il ne semblait pas si fort. »

Maria hocha la tête. « Tu as raison. Je pense qu’il est loin de ce que nous envisageons en tant que héros. Mais que se passe-t-il si nous évitons de nous laisser prendre par cette image et de l’évaluer plutôt comme “celui qui conduit à un changement d’époque” ? Mais avec la vitesse à laquelle les choses ont bougé dernièrement, ne sens-tu pas cela comme s’il y avait un “changement d’époque” en cours depuis qu’il est là ? »

Au moment où Jeanne avait entendu ça, elle avait dégluti.

Maria se leva et se dirigea vers le rebord de la fenêtre. « Il ressemble à une personne plus intéressante que je m’y attendais. Oh, j’espère que je pourrais bientôt lui parler en personne. »

Puis, tout en regardant vers le ciel de l’est, Maria avait souri avec douceur.

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7 commentaires :

  1. Merci pour le chapitre.

  2. Merci pour le chapitre

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  4. Merci pour le chapitre

  5. Barthélémy Lelièvre

    Merci pour le chapitre

  6. Merci pour le chapitre

  7. amateur_d_aeroplanes

    Merci. Pour ce rapport, Jeanne a t’elle dit a sa soeur qu’elle a tenté de la mariée ? 🙂

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