Chapitre 11 : Soeurs
Partie 3
Alors que nous étions en train de discuter, un messager arriva en trombe pour nous informer que Hakuya et Jeanne étaient arrivés. Nous nous étions tous précipités dans la cour du château de Valois.
Jeanne était justement en train de sortir de la gondole quand nous étions arrivés.
« Jeanne ! »
« Hein !? Ma sœur ! »
Maria s’était précipitée et plongea dans les bras de sa sœur.
Jeanne avait d’abord eu l’air surprise, mais elle versa rapidement d’énormes larmes en la serrant dans ses bras, heureuse de voir que sa sœur était saine et sauve.
En voyant les sœurs Euphoria réunies, j’avais senti une chaleur dans ma poitrine. Je dois protéger ces deux-là. Cela brûlait suffisamment pour que je me le jure à moi-même.
◇ ◇ ◇
« Franchement, ma sœur ! As-tu la moindre idée des problèmes que tu as causés à tout le monde !? »
« Oui… »
Une fois réunies, Maria et Jeanne demandèrent aux autres de leur laisser un peu de temps seul, et elles se retirèrent dans la chambre de Maria. Maria était maintenant obligée de s’agenouiller sur le lit pendant que Jeanne lui faisait la morale.
Maria se rétrécissait comme une petite fille, bien qu’elle soit une femme d’une vingtaine d’années.
« Quand je t’ai vu sauter… ça m’a presque déchirée ! Les soldats de la forteresse de Jamona criaient tous aussi ! Tu as toujours été comme ça ! Tu n’as pas assez d’estime pour toi-même ! C’est tout simplement insupportable pour tous ceux qui te regardent ! »
« Oui… Je suis désolée. »
« Oui… Tu… as intérêt à l’être…, » dit Jeanne, sa voix s’élevant sous l’effet de la colère. Mais peu à peu, elle s’étouffa tandis que ses yeux se remplissaient de larmes. « Grande sœur… »
« Jeanne… »
« Je suis… Je suis tellement… tellement contente… que tu ailles… bien… Wahhhhh ! » Jeanne serra Maria contre elle en pleurant. Maria enroula ses bras autour de Jeanne et lui caressa doucement le dos.
« Jeanne. Tu me donnes un peu de mal à respirer. »
« Ohhh… Supporte-le juste un peu… » dit Jeanne en reniflant.
« Heehee ! D’accord. »
Maria continua d’enlacer doucement Jeanne pendant qu’elle pleurait.
Quelque temps plus tard, une fois que Jeanne s’est calmée, Maria cessa de s’agenouiller et fit asseoir Jeanne à côté d’elle. Les deux sœurs s’étaient assises côte à côte sur le lit. Maria tapotait la tête de Jeanne lorsqu’elle évoqua un sujet dont elles devaient parler.
« Hé, Jeanne. Il y a quelque chose que je voulais te demander. »
Jeanne renifla avant de demander : « Qu’est-ce que c’est… ? »
« C’est quelque chose que je ne peux pas bien faire moi-même, alors je voulais te le demander », dit Maria avec un doux sourire.
« Es-tu sûre de cela, ma sœur ? » demanda Jeanne, hésitante, en se plaçant derrière Maria, qui était assise sur une chaise.
Maria, elle, était complètement détendue.
« Oui. Coupe ! » dit-elle d’un ton enjoué. Jeanne s’était alors préparée à ce qu’elle allait devoir faire.
« D’accord… alors je vais commencer à couper ! »
Avec ces mots pour se motiver à agir, Jeanne serra les ciseaux qu’elle tenait.
Coupe ! Les ciseaux claquèrent, et une mèche des magnifiques cheveux dorés de Maria tomba et s’éparpilla sur le sol.
« Ahhh ! » s’écria Jeanne, surprise, en faisant un bond en arrière.
Jeanne avait affronté sans crainte Nata Chima, un homme qui était comme l’incarnation de la violence. Pourtant, maintenant, elle réagissait comme une paysanne qui aurait soudainement rencontré une grenouille.
Maria gloussa en pensant à l’étrangeté de la situation. « Hee hee, pourquoi cries-tu ? »
« Mais ! Tes cheveux ! »
« Ne fais pas tout un plat d’une petite coupe de cheveux », déclara Maria en jouant avec sa frange. « Depuis que j’ai entendu l’histoire de Liscia qui s’est coupé les cheveux pour montrer sa détermination, j’ai envie de faire la même chose. J’ai l’impression que cela m’aidera à prendre un nouveau départ. »
Jeanne cligna des yeux à plusieurs reprises.
« Fais-tu ça à la légère !? Mais tu te laisses pousser les cheveux depuis toujours, n’est-ce pas ? »
« Je l’ai fait parce que je pensais que cela aiderait à donner l’impression d’une impératrice digne, mais… c’est lourd, tu sais ? Et difficile à entretenir. Je commence à avoir l’impression que c’est l’incarnation de mon titre d’impératrice. »
« Ne dis pas des choses aussi critiquables si facilement. »
« C’est pour cela que je voulais prendre le risque de les couper. Mais je ne suis pas sûre de pouvoir les couper aussi proprement que Liscia, c’est pourquoi je voulais que tu m’aides. »
« C’est juste… Cela se passerait probablement très mal si tu essayais de le faire toi-même. »
Maria était plutôt maladroite quand il s’agissait de faire autre chose que d’être charismatique ou de s’occuper de son travail administratif. Il était facile d’imaginer que même si elle se contentait d’égaliser sa frange toute seule, elle la couperait bizarrement et viendrait de toute façon pleurer auprès de Jeanne pour lui demander de l’aide.
Lorsque Jeanne imaginait sa sœur en train de faire une telle gaffe, les sentiments forts qu’elle avait éprouvés en coupant les cheveux de sa sœur se refroidirent rapidement.
Maria fit signe à sa sœur.
« Viens, Jeanne. Le travail n’est pas encore terminé. Si tu me laisses comme ça, j’aurai l’air bizarre, avec une partie de mes cheveux en moins. Je serais trop gênée de laisser Souma et les autres me voir comme ça. »
« D’accord, d’accord… » Jeanne soupira et se remit à couper les cheveux de Maria.
Coup de ciseaux, coup de ciseaux. Chaque fois que les ciseaux s’enfonçaient dans les cheveux de Maria, des mèches d’or s’éparpillaient sur le sol.
« N’est-ce pas dommage de faire ça ? Tu as de si jolis cheveux. »
« Une fois que tu auras fini de les couper, pourquoi ne pas les rassembler et créer une sorte de commerce ? On pourrait vendre des perruques faites avec les cheveux de la Sainte de l’Empire, ou peut-être de la ficelle. »
« Il y a certains maniaques qui apprécieraient… »
« Je te parie que Krahe paierait cher, tu ne crois pas ? »
« Rien de ce que cela me fait imaginer n’est agréable, alors s’il te plaît, arrête… »
Coup de ciseaux, coup de ciseaux.
« Et si je l’offrais à Sire Souma ? Comme premier cadeau de sa nouvelle femme. »
« Son premier cadeau de ta part, ce sont tes cheveux ? C’est beaucoup trop lourd ! »
« Je ne pense pas qu’il y en ait assez pour que ça gêne ? »
« Je parle du poids émotionnel ! »
« Quoiiiii… » Maria avait l’air mécontente. « J’ai pensé que c’était une bonne idée. Son uniforme noir a beaucoup de broderies dorées, alors je ne pense pas qu’il remarquerait si j’y tissais quelques uns de mes cheveux. »
« Tu allais le faire sans le lui dire !? D’accord, peut-être qu’il ne le remarquerait pas, mais c’est quand même lourd ! Lui faire porter tes cheveux sur lui en permanence ? C’est le genre de chose que l’on fait pour quelqu’un qui est décédé ! Pour se souvenir de lui ! »
« Oh, mais ne serait-ce pas bien qu’il se souvienne toujours de moi ? »
« Non… Ton manque d’expérience romantique t’a donné des idées étranges. »
Coup de ciseaux, coup de ciseaux.
« Oh, et tu l’as déjà dit avec désinvolture, mais… »
« Oui ? »
« Sa nouvelle femme ? Vas-tu épouser Sire Souma ? »
« Oui… c’est ce que l’on espère. Il faudra quand même qu’on en parle. »
« Euh… félicitations. C’est normal de dire ça, non ? »
« Hee hee, merci, Jeanne. Mais… »
« Hm ? »
« Toi aussi, tu as un partenaire avec qui tu veux partager le reste de ta vie, n’est-ce pas ? »
« Hein !? Ah, c’est vrai… »
« C’est Sire Hakuya ? »
« Oui. Il va venir ici… hum… dans ce pays pour m’épouser. »
« Oh, mon Dieu ! »
« Argh… Tu me mets dans l’embarras… »
Coup de ciseaux, coup de ciseaux.
« Désolée, Jeanne… Je sais que je vais te faire porter un lourd fardeau à partir de maintenant. »
« Non, ne t’inquiète pas pour ça. Tu as porté un fardeau encore plus lourd pendant tout ce temps, alors je me débrouillerai. Je ne serai pas seule, après tout. »
« Hee hee, parce que tu auras Sire Hakuya avec toi ? »
« Ne remets pas ça sur le tapis ! »
« Avec un peu de chance, Trill pourra aussi trouver quelqu’un de bien. »
« Ah… Elle se comporte actuellement comme la belle-sœur fouineuse de Sire Ludwin et de Madame Genia… Si Sire Ludwin voulait bien l’épouser… Non, ce ne serait pas juste pour lui, elle lui donnerait des ulcères en raison du stress. »
« Hee hee, la princesse foreuse serait à la hauteur de sa réputation en lui faisant un trou en plein dans l’estomac, n’est-ce pas ? »
« Ce n’est pas une blague drôle si tu es Sire Ludwin… Quoi qu’il en soit. »
Coup de ciseaux…
« Nous avons terminé, ma sœur », dit Jeanne en tendant un miroir à Maria.
En se regardant dans le miroir, le propre visage de Maria se reflétait dans ses cheveux courts et soignés. Elle avait perdu la dignité que lui conféraient ses longs cheveux, mais en échange, le visage de Maria en tant que femme individuelle ressortait d’autant plus.
Maria pencha la tête, inspectant tout autour d’elle, puis hocha la tête. « Oui, je pense que les cheveux courts me vont bien aussi. »
« Tu vas le dire toi-même… ? » Jeanne soupire d’exaspération.
Voyant l’expression de sa sœur, Maria sourit et dit : « Merci, Jeanne. Je me suis enfin débarrassée de ce poids sur mes épaules. »
Maria montra ses nouveaux cheveux à Souma et aux autres plus tard. Leurs yeux s’étaient écarquillés de surprise au début, mais une fois qu’ils s’étaient repris, elle reçut tout un tas de compliments.
En entendant tous ces commentaires positifs, Maria fit un signe de paix triomphant à Jeanne.
« On a réussi, Jeanne ! »
merci pour le chapitre