Chapitre 4 : Les Chevaliers et les Faits d’Armes (2)
Partie 1
« Comme prévu, ils sont venus..., » murmura une jeune femme.
Rikka Akigase était arrivée au sommet du donjon protecteur de la nation et avait regardé le paysage de Suruga.
Le fort tutélaire de Suruga était situé à l’altitude la plus élevée de la région. En son centre, le donjon protecteur de la nation s’élevait à quarante mètres, offrant une vue imprenable.
Rikka avait vu de ses propres yeux, les Croisés envahissant la Baie de Suruga se situant au sud de cette position.
Environ, une centaine de Croisés volaient vers la terre en une sphère dense, et ils étaient sur le point d’atteindre le ciel se situant au-dessus de la côte. Le fort tutélaire était placé sur un terrain montagneux faisant face à la baie. L’ennemi arriverait bientôt ici.
« J’ai deviné qu’ils viendraient aujourd’hui ou demain. Comme prévu..., » murmura-t-elle.
Rikka haussa les épaules. Les Croisés survolaient la mer à une vitesse d’environ cinquante ou soixante kilomètres à l’heure.
C’était d’un vol à basse vitesse, car en principe, ils étaient capables d’aller plus vite. La raison de cette décision était également très simple. Ce type de vol à basse vitesse exigeait une consommation négligeable de liquide ectoplasmique, ce qui leur permettait d’économiser de l’énergie pour pouvoir l’utiliser pour la bataille.
« Défendre le fort tutélaire serait une option, mais malheureusement, Sakuya est en mauvais état. Il va falloir effectuer des arrangements. »
Rikka était seule sur le toit, face aux vents hurlants, tandis que les forces militaires conventionnelles se tenaient à la périphérie du fort tutélaire. Les officiers noétiques à l’intérieur du donjon protecteur de la nation écoutaient les chuchotements de Rikka Akigase à travers les ondes noétiques tout en confirmant la présente situation.
C’était précisément le devoir d’un chevalier d’assumer les attentes de ses camarades d’armes et de répondre à leurs sentiments — .
Vêtue d’un uniforme militaire, Rikka avait dégainé l’épée se trouvant à sa taille et avait libéré ses propres ondes noétiques.
« Sur mon Appellation d’Onikiri Yasutsuna, mes Légionnaires ! »
Les puissantes ondes noétiques de Rikka rayonnaient dans l’air au-dessus du donjon protecteur de la nation.
La noèse s’était rapidement manifestée sous la forme de Kamuys, amenant dans le ciel une armée bleue, forte de quatre-vingt-dix individus.
« Excellent. »
Rikka avait rengainé son épée personnelle.
Il s’agissait d’une célèbre et précieuse épée issue de la lignée des Genji. Son nom avait été hérité par Rikka Akigase en tant qu’Appellation.
L’acte de dégainer cette épée japonaise était précisément la manifestation d’une Appellation. Avec une courbure claire, la lame élancée de cette épée rare et renommée présentait une ligne de tranchant légèrement ondulée. Contrairement au Zuihou détenu par la majorité des Chevaliers japonais, Onikiri Yasutsuna était restée physiquement aux côtés de l’utilisateur, même lorsque les Légionnaires n’étaient pas convoqués. Ce fait était aussi la preuve d’une Appellation de haut niveau.
« Venez, portez-moi ! »
Rikka avait appelé les quatre-vingt-dix Kamuys présents au-dessus d’elle.
L’un d’entre eux était descendu, plaçant son épaule au niveau du toit du donjon protecteur de la nation. Avec un saut agile, Rikka passa sans hésitation par-dessus la balustrade du toit, atterrissant sur l’épaule droite du Légionnaire qui était en vol stationnaire.
« Nous établirons une formation terrestre. Allez-y. »
Transportant son commandant, le Kamuy bleu s’était envolé vers le sud en direction de la Bay de Suruga.
Les quatre-vingt-neuf Kamuys restants l’avaient suivi.
Le commandant en chef dirigeait la lutte contre l’ennemi sur les lignes de front. Rikka ne pouvait s’empêcher de sourire avec ironie. Ce style de combat lui remémorait les archives militaires datant de l’époque des Genpei, mais c’était aussi la façon dont les guerres modernes étaient menées.
En transmettant des ondes noétiques, les Chevaliers allaient diriger leurs armées de Légionnaires afin de combattre l’ennemi.
En fait, il était possible de contrôler les Légionnaires sous son commandement depuis très loin, par exemple, hors de portée visuelle.
Cependant, ce faisant, on se rendrait vulnérable à une perturbation noétique. Certaines formes de perturbation noétique étaient spécialisées pour contrer les ondes noétiques plutôt que les signaux électromagnétiques. Sous interférence, on courrait le risque de perdre le commandement de ses Légionnaires.
« Comme prévu, la brise de mer est froide. »
Il était actuellement 15 h 18 avec une forte brise soufflant de la mer vers l’intérieur des terres...
Rikka était debout sur un Légionnaire volant à soixante kilomètres à l’heure à une altitude de deux cents mètres. Néanmoins, Rikka était restée au chaud grâce à la résilience de son propre corps.
La vitalité et les capacités physiques d’un chevalier étaient beaucoup plus élevées que celles des personnes ordinaires.
En prenant de grands volumes de fluide ectoplasmique dans leur corps et leur esprit, ils avaient ainsi été renforcés par des pouvoirs mystiques.
« Formation carrée. Hâtez-vous ! »
Son armée avait atterri sur le rivage de la Baie de Suruga.
Le long de la côte, des zones militaires avaient été créées à partir de terres récupérées où se trouvaient diverses installations de l’armée provinciale.
L’endroit choisi pour l’atterrissage était une plaine dégagée. Dès l’instant où ils avaient atterri, à l’exception de celui qui portait Rikka, les quatre-vingt-neuf Kamuys restants avaient sprinté à pleine vitesse. Leurs mouvements étaient rapides et agiles, comme le suggèrent leurs silhouettes gracieuses.
Bien sûr, il s’agissait d’un groupe de géants de huit mètres de haut qui couraient.
À chaque pas qu’ils faisaient, la Baie de Suruga tremblait et grondait. Quoi qu’il en soit, les quatre-vingt-neuf Kamuys avaient couru à un bon rythme.
Malgré leur taille gigantesque et leur poids proportionnel, leurs mouvements n’étaient pas réduits.
Tout comme les oiseaux ailés étaient rapides et agiles même lorsqu’ils se déplaçaient au sol, les mouvements des Kamuys étaient très dynamiques avec beaucoup d’accélération.
C’était une caractéristique commune aux Légionnaires bleus du Japon Impérial.
Agilité, diligence infatigable, courage — Les quatre-vingt-dix Kamuys s’étaient rapidement placés dans une formation presque carrée de dix rangées par neuf colonnes.
Occupant le centre de la formation carré se trouvait le Kamuy portant le commandant, Rikka.
L’armée de Kamuys avait alors levé leurs fusils à baïonnette à l’unisson.
L’embout des canons visait les Croisés britanniques qui arrivaient et survolaient la Baie de Suruga.
☆☆☆
« Les légionnaires japonais sont appelés des Kamuys, n’est-ce pas ? Il y en a quatre-vingt-dix — la prise en charge de la châtelaine de Suruga s’avère être à notre niveau... Pauvre fille. »
Le nombre de croisés britanniques envahissants au-dessus de la Baie de Suruga s’élevait à 98.
Leur commandant, Steven marmonnait à lui-même alors qu’il chevauchait une wyverne blanche, volant au sein de l’armée aéroportée.
« Il aurait eu la chance d’être honoré en tant que Chevalier de Sa Majesté s’il était né comme nous sous le règne de Sa Majesté. »
Dans l’Empire Britannique, seuls les guerriers ayant une Force de Chevalier exceptionnelle pouvaient prétendre au titre de « Chevalier de Sa Majesté ».
La Force de Chevalier de Steven était de 98 alors que celle de son frère d’armes Sire Lampard était de 90. Aujourd’hui, ils étaient sortis de Fuji après avoir établi un pacte tutélaire, une situation complètement différente de celle d’hier.
Cela faisait un certain temps qu’ils n’avaient pas commandé le nombre total de Légionnaires soutenus par leur Force de Chevalier.
Steven avait fait claquer ses doigts afin d’appeler une petite bête utilisée pour les communications.
Contrairement au renard roux du Japon, les forces armées britanniques utilisaient des esprits, dont l’apparence était de celle de jeunes filles de la taille d’une paume avec des ailes de papillon sur le dos. L’esprit voltigeait délicieusement devant Steven.
« Informez en mon nom Sire Lampard, je chargerai en tant qu’avant-garde selon le plan. En cas d’échec, je laisse le reste entre ces mains. »
L’esprit hocha la tête et disparut.
Les bêtes de rétention chargées de relayer les messages étaient capables de se téléporter dans un rayon de quatre ou cinq kilomètres. Les bêtes de rétention n’étaient pas aussi pratiques que les téléphones, mais elles étaient capables de remplacer les communications sans fil. Cependant, les petits animaux de rétention couraient le risque de mourir d’un épuisement excessif si elles étaient forcées d’invoquer cette capacité en une succession d’une dizaine de fois, d’où la nécessité d’accorder une attention particulière à leur utilisation.
« Mes troupes, le prince, Sire Chevalier Noir, nous a confié la glorieuse mission de l’avant-garde. J’attends avec impatience de voir votre courage au combat ! » Steven avait rallié les Croisés sous son commandement.
Pendant ce temps, l’armée de Sire Lampard rôdait plus loin en arrière, en tant qu’unité de réserve.
Ils n’étaient qu’à quatre kilomètres de la côte où les samouraïs de Suruga étaient en formation.
Les quatre-vingt-dix-huit Croisés volaient en formation sphérique.
En avançant dans les airs, il plaça ses Légionnaires dans une sphère serrée afin de créer une formation dépourvue d’angles morts.
Il s’agissait de l’une des bases de la tactique des Légionnaires.
En tant que commandant, le Chevalier resterait au centre de la formation — la position la plus sûre — pour être en mesure de donner les ordres les plus appropriés aux troupes à tout moment.
« Soldats de Sa Majesté... Écrasez l’ennemi. »
Dès que Steven en avait donné l’ordre, les Croisés formant le front de la « sphère » avaient visé puis tiré en continu sur la côte à quatre kilomètres de distance.
Les fusils avaient projeté des faisceaux de chaleur capables de trancher à travers le béton renforcé.
Quatre-vingt-dix-huit fusils à baïonnette tiraient des rayons clignotants au même rythme que des mitrailleuses.
Si ce barrage de tirs avait été dirigé vers le centre-ville de Tokyo, les bâtiments regroupés auraient été perforés et découpés en tranches comme du plastique. En quelques minutes, une métropole serait devenue un terrain vague et tragique.
Cependant, l’armée de Suruga dans sa formation carrée à quatre kilomètres de distance était restée indemne.
« Comme on s’y attendait, le fait d’avoir des nombres égaux qui se tirent dessus ne fonctionnera pas si facilement. »
Steven avait souri avec ironie. Les Chevaliers étaient capables de sentir tout ce que les Légionnaires sous leur contrôle voyaient et entendaient. Ces mystérieux soldats géants ailés possédaient également cinq sens exceptionnels qui surpassaient de loin ceux des humains.
À son commandement, les Croisés avaient observé la scène à quatre kilomètres de distance.
Des particules incandescentes — les particules des barrières protectrices — étaient en suspension dans l’air autour des Kamuys japonais.
« Plus la formation est dense, plus la puissance défensive des Légionnaires est grande... Comme les attaques de mon côté ne fonctionnent pas, il devrait en être de même pour mon adversaire, » à peine Steven avait-il dit ça que le côté ennemi avait contre-attaqué.
En restant dans leur formation carrée, les Légionnaires japonais avaient pressé sur la détente. Naturellement, leurs cibles étaient les Croisés dans les airs au-dessus de la Baie de Suruga, en d’autres termes, l’armée de Steven.
Des rayons clignotants étaient continuellement tirés alors que les tirs antiaériens de l’équipe japonaise attaquaient sans pitié les forces de Steven.
Cependant, les Légionnaires britanniques étaient aussi pratiquement indemnes. Autour des quatre-vingt-dix-huit Croisés, des particules de barrières de protection brillaient également.
La lumière des barrières de protection avait eu pour effet de réduire la puissance des tirs ennemis.
Les particules des Légionnaires de la même armée se superposeraient, augmentant ainsi leur densité, et produisant une plus grande force défensive. En d’autres termes, placer un plus grand nombre de Légionnaires, les uns à coter des autres, augmenterait considérablement la force défensive globale d’une armée.
Par conséquent, les formations carrées et sphériques avec leur haute densité étaient couramment utilisées dans les batailles entre les Légionnaires.
« L’échange continu de tirs entre l’air et la terre défavorisera mon camp. Mes hommes, atterrissons et adoptons des tactiques barbares. »
Les Légionnaires étaient des guerriers ailés et étaient capables de se tenir debout sur le sol avec leurs propres pieds comme les humains. La consommation de liquide ectoplasmique était plus importante lors de déplacement dans les airs.
L’armée dirigée par Steven vola alors vers le rivage.
Ils avaient progressivement baissé leur altitude de vol, se préparant à une longue bataille au sol.
En utilisant la même formation que l’ennemi, Steven avait placé ses Légionnaires en une rangée de dix par dix, les gardant aussi denses que possible, et cela même pendant le changement de formation. Pendant qu’ils débarquaient, les tirs antiaériens de l’ennemi n’avaient pas cessé un seul instant. Ainsi, plusieurs malheureux Croisés situés sur les bords où les particules de la barrière étaient plus faibles avaient été abattus.
Au total, quatre Croisés avaient été tués au cours de la première phase du combat, percés au niveau de leurs points vitaux tels que la tête ou la poitrine, s’écrasant ainsi dans la Baie de Suruga.
Les quatre-vingt-quatorze autres étaient restés totalement indemnes.
« Maintenant, nous sommes égaux... Non, mon côté a l’avantage. Écrasons-les avec la force brute. »
Les Croisés avaient enfin débarqué avec succès sur la plage.
Tout en maintenant leur formation carrée, ils marchaient à la même vitesse.
Leurs cibles étaient les Légionnaires Kamuys de Suruga, en formation à un kilomètre devant eux.
Dès qu’ils auraient pénétré dans la zone de corps à corps, les barrières de protection des deux côtés se neutraliseraient l’une et l’autre et perdraient de leur efficacité. Ce qui resterait à faire était de tuer les ennemis en utilisant les baïonnettes sur leurs fusils, en suivant la manière d’agir des anciens champs de bataille afin de poignarder et décapiter les ennemis.
Sur sa wyverne, Steven avait lentement tourné en rond dans les airs au-dessus de ses Croisés.
En regardant l’armée ennemie d’une vue de dessus, il fut stupéfait.
« Les descendants des samouraïs croient-ils encore aux bénédictions du vent divin et ont-ils l’intention d’attaquer jusqu’au bout ? »
Les Légionnaires japonais avaient changé de formation.
En d’autres termes, les Kamuys avaient abandonné la sécurité de la formation carrée à haute densité en faveur d’une formation en une rangée de quatre-vingt-dix avec leurs fusils à baïonnette relevés à nouveau.
« Cependant... Ne vous attendez pas à ce que le vent divin favorable souffle chaque fois, » déclara Steven avec audace.
Confirmée visuellement par les Croisés, une femme chevalière avait été aperçue debout sur l’épaule droite d’un Kamuy au centre des rangs japonais.
Le fait de capturer le Chevalier contrôlant des Légionnaires équivaudrait à gagner la bataille.
Merci pour le travail.