Strike the Blood – Tome 2

Table des matières

***

Prologue

Partie 1

Le 21 septembre. Une nuit de croissant de lune...

C’était au beau milieu de la nuit que la section d’assaut des gardes de l’île avait fait une descente dans un vieil entrepôt dans le quartier du port. Ils avaient été informés qu’une organisation criminelle vendait des armes de contrebande sur le marché noir.

Faisant exploser la porte de l’entrepôt avec des explosifs, les membres de l’escouade avaient foncé droit dedans.

Les piliers de fer étaient rouillés et les caisses de bois étaient empilées les unes sur les autres. Les hommes de l’entrepôt, sous le faible éclairage des lampes à mercure, s’étaient levés d’un seul coup. Ils semblaient jouer aux cartes, mais une grenade à détonation avait explosé à leurs pieds. Les hommes, dépouillés de leur vision, avaient ensuite été fauchés par des tirs de mitrailleuses.

La section d’assaut avait utilisé des balles à électrons consacrés. Il s’agissait d’une munition spéciale contre les hommes-bêtes qui supprimait les capacités régénératrices de la chair démoniaque. Puis, détruisant le mur arrière de l’entrepôt, la deuxième escouade de la section d’assaut avait fait irruption, alors que des tireurs d’élite cachés dans les bâtiments environnants tiraient sur des suspects qui tentaient de s’échapper par les fenêtres.

Le combat s’était terminé en moins de deux minutes. Confrontés à deux escouades de gardes de l’île entièrement équipées, qui avaient eu l’effet de surprise, les suspects avaient été complètement dépassés. Alors que le nuage de gaz lacrymogène dans l’entrepôt se dissipait, les hommes étaient sur le sol en tas.

Ils étaient sept. Tous étaient des démons — des démons sans bracelet d’identité, qui étaient entrés illégalement sur l’île.

Les balles les avaient traversés et ces individus baignaient maintenant dans leur sang alors qu’ils s’étaient effondrés sur le sol.

Ce niveau de dégâts n’était pas suffisant pour tuer les hommes bêtes extrêmement résistants, mais c’était suffisant pour empêcher leur transformation en bête et les mettre hors du combat.

L’un des chefs d’escouade avait ordonné à ses hommes de mettre tous les hommes-bêtes en état d’arrestation.

Mais au même moment, il se souvint soudain de ce qu’on leur avait dit lors du briefing. Il y avait huit suspects cachés dans l’entrepôt. Il devait bien y en avoir un de plus quelque part.

... Pas bon !

Tandis que le chef d’escouade replaça instantanément son fusil en position d’attaque, le corps de l’un des hommes bêtes tombés au sol avait été projeté avec une grande force. En dessous, un démon en grande partie indemne avait émergé. Il s’agissait d’un homme bête à la fourrure noire et au visage de léopard, avec une carrure énorme et souple. Il avait apparemment utilisé son propre camarade comme bouclier pour se protéger et dissimuler sa présence.

Dans l’une des mains entièrement bestialisées du démon se trouvait un petit appareil qui ressemblait à une télécommande.

Le chef d’escouade avait repris son souffle lorsqu’il s’était rendu compte que ce dispositif d’une simplicité effrayante était l’interrupteur de détonation d’une bombe placée à l’intérieur de l’entrepôt.

« Repliez-vous ! » cria le chef d’escouade. Mais sa voix avait disparu au milieu du rugissement qui éclata.

L’onde de choc avait pulvérisé les caisses en bois empilées haut, et un tourbillon d’air brûlant avait incinéré l’intérieur de l’entrepôt en un instant. Les flammes teintaient le ciel nocturne en rouge — .

***

Partie 2

« Merde, merde, merde, merde, merde, merde... Vous l’avez fait maintenant, ordures humaines ! »

La voix rauque de l’homme à tête de léopard lança un torrent d’insultes alors qu’il courait à travers la ville au milieu de la nuit.

Les blessures par balle qu’il avait subies l’affectaient en lui causant une très grande douleur. La douleur dans ses yeux et son nez était sans doute les effets des gaz lacrymogènes. L’attaque par une arme à énergie rituelle infusée avait également bloqué la capacité de régénération de l’homme-animal, ce qui avait considérablement prolongé son agonie.

Cependant, ce n’était pas tout ce qui l’avait mis dans une rage folle.

Bien que ce soit une bonne chose qu’il se soit échappé de l’entrepôt en le faisant s’exploser, il avait perdu ses camarades, et la vente des armes était un fiasco. Ce n’était pas un revers suffisant pour entraver le plan, mais c’était quand même un échec. À ce rythme, il perdrait de l’influence au sein de l’organisation. Il pourrait même perdre la confiance du lieutenant-colonel.

« Je ne leur pardonnerai jamais... Ils vont payer pour ça, » déclara-t-il.

L’homme avait pivoté vers l’entrepôt derrière lui, toujours enveloppé par les flammes, en lançant un regard fixe rempli de haine. Puis il tourna les yeux vers l’horizon nocturne de la ville, éclairé par la lune.

Il était dans la zone métropolitaine de Tokyo, et plus exactement, dans la Ville d’Itogami — une île artificielle géante flottant sur l’océan Pacifique, établie en vertu du Traité de la Sainte Terre comme un idéal de coexistence entre les humains et les démons, un abominable « Sanctuaire du Démon ».

L’homme à tête de léopard était originaire de l’« Empire du Seigneur de Guerre » en Europe. Il n’en voulait pas particulièrement aux humains de la Ville d’Itogami.

Néanmoins, il avait des raisons de détruire cette ville. En détruisant un sanctuaire de démons, le Front de l’Empereur de la Peste Noire dont il faisait partie diffuserait au monde entier un message vigoureux, qui allumerait sûrement les flammes de la rébellion contre le roi usurpateur qui retenait les démons loin de leur place légitime.

Le plan était déjà en marche. Le destin de cette ville ne pouvait plus être modifié, quel que soit ce que feraient ces voyous de la garde de l’île.

Cela pouvait faire des effets mineurs dans leur emploi du temps, mais le fait d’attirer leur attention sur lui était une bonne chose. En servant de leurre et en jetant la garde de l’île dans le chaos, les chances de succès du plan ne feraient que croître. Cela aussi faisait peut-être partie du plan du lieutenant-colonel.

Quoi qu’il en soit, il aurait l’occasion de venger ses camarades tués par la Garde de l’île bien assez tôt. Même déclencher une seule bombe dans le quartier commerçant rendrait la situation hors de leur contrôle.

Il ne se souciait pas du nombre d’habitants de la ville qui pourraient être pris dans l’explosion. Cette interruption n’avait fait que modifier légèrement l’ordre dans lequel ils allaient mourir. Oui, cette ville était de toute façon destinée à périr.

Tout en conservant sa forme bestiale, il sauta sur le sommet d’un immeuble de cinq étages en un seul bond. Même chez les hommes-bêtes dits de type L, l’espèce panthère-garou se vantait d’une vitesse et d’une agilité particulièrement grandes. Il n’y avait sûrement personne pour le suivre alors qu’il courait dans une zone urbaine la nuit.

Pour l’instant, il valait mieux trouver un endroit où se cacher et attendre que ses blessures guérissent...

Mais avant ça, le pouce de l’homme s’était déplacé vers la détente du détonateur à distance.

Il avait posé deux bombes avant leur attaque. Il avait déjà utilisé la première dans l’entrepôt, mais l’autre qu’il avait installé dans un couloir sous le quartier du port.

Les renforts de la garde de l’île, appelés pour aider les blessés, auraient dû passer juste à ce moment-là. Utilisez la première attaque pour attirer les camarades de l’ennemi, puis utiliser le second pour les exterminer était une tactique ancestrale sur le champ de bataille.

« Subissez ma vengeance pour mes frères... ! »

L’homme avait saisi avec force la télécommande dans sa main.

Bien que son pouce aurait dû toucher l’interrupteur, il n’avait ressenti aucune sensation.

Avec un profond malaise, l’homme regarda sa propre main droite. Il avait dégluti alors qu’il était en état de choc.

La télécommande qu’il aurait dû tenir dans sa main avait disparu sans laisser de trace.

À la place, il y avait une chaîne enroulée autour de son bras. La chaîne d’argent, s’étirant dans les airs, lui liait le poignet comme une menotte.

« Putain... C’est quoi !? »

L’homme à la tête de léopard avait mis de la force dans son bras pour arracher la chaîne. Cependant, même la force du bras d’un homme bête ne pouvait pas retirer la chaîne d’argent présente autour de lui. Au contraire, la traction de la chaîne maintenait l’homme coincé là.

À l’instant d’après, il entendit derrière lui une voix articulée qui semblait se moquer de lui. « ... Bien qu’incomplet, cela a été forgé par les dieux. Tu n’as pas le pouvoir de le casser. »

« Quoi !? » Avec un faible grognement, l’homme se tourna vers la voix inattendue.

Il s’agissait d’une femme de petite taille qui ressemblait à une enfant. Elle portait une robe ridiculement extravagante, et elle tenait un parasol malgré le fait qu’il soit au milieu de la nuit. Ses traits enfantins lui donnaient l’apparence d’une jolie poupée. Sans autre raison qu’elle avait l’air si mal à sa place, l’homme avait été empli par la peur.

« Franchement, qui utiliserait un détonateur à distance non crypté plutôt qu’une radio analogique à notre époque ? Comme c’est radin de ta part. Tu as de la chance d’être resté si longtemps sans te faire sauter. »

La femme murmura cela en le ridiculisant clairement alors que la paume de sa main contenait un petit appareil qui ressemblait beaucoup à une télécommande.

Le visage de l’homme avait tremblé en voyant la vue. L’appareil avec lequel la femme au parasol jouait était la télécommande du détonateur qui aurait dû être dans sa main. Il ne savait pas quel tour la femme avait utilisé pour s’approcher assez près pour lui arracher la télécommande sans que lui, un homme-bête, le sente.

« Un mage d’attaque anti-démon, hein ? Comment m’as-tu rattrapé ? »

Les yeux ambrés de l’homme à tête de léopard se rétrécirent et fixèrent la femme. Les lèvres de la femme étouffèrent un rire.

« Pensais-tu vraiment que tu pourrais te débarrasser de moi ? C’est très vaniteux pour un chat errant comme toi. »

« ... Ne t’emporte pas, petite fille ! »

L’homme à la tête léopard haussa la voix à la vue du sourire moqueur de la femme. Il avait sorti un couteau de la ceinture présente autour de sa taille et l’avait planté dans son bras droit. En se coupant le poignet avec la chaîne qui le liait, son corps serait à nouveau libre de bouger. La femme qui maniait le parasol déclara « Mon Dieu ! » avec une admiration apparente.

« Hmph, pour un chat errant, je dois admirer tes tripes. Un des hommes de Kristof Gardos, je présume ? Avec le Front de l’Empereur de la Peste Noire sur ses dernières jambes, vous avez certainement traversé la mer pour venir ici, avec beaucoup d’ennuis. »

« ... Je vais te tuer ! » L’homme hurla alors que du sang frais se répandait depuis son bras droit.

Même pour les hommes-bêtes, qui possédaient une grande capacité de guérison, régénérer un bras complètement coupé n’était pas chose facile. Cependant, même à ce prix-là, il avait besoin de vaincre cette femme d’origine inconnue, ici et maintenant. Pour le succès de leur plan, quelqu’un qui connaissait le nom de Kristof Gardos — le lieutenant-colonel — ne pouvait pas être laissé en vie.

En arrachant son propre poignet de son bras, l’homme avait utilisé la vitesse monstrueuse caractéristique des hommes-bêtes pour charger la femme porteuse de parasol.

Il n’avait plus besoin de compter sur le couteau. La force brute d’un homme bête était grande, même parmi les démons, plus que suffisante pour déchirer une femme humaine impuissante à mains nues.

Cependant, cette femme parasol d’origine inconnue avait fait un sourire gracieux.

« Futile. Du moins, pour toi... »

Les griffes s’étendant du bout des doigts de l’homme touchèrent son épaule mince... du moins le pensait-il. À cet instant, la forme de la femme s’était transformée en une belle ondulation, comme la surface de l’eau, ne laissant que peu d’air derrière elle.

« Putain... !? » Alors que l’expression d’un choc l’envahissait, l’homme à la tête de léopard regarda vers l’arrière.

La femme, qui tenait encore élégamment son parasol, s’était éloignée d’une dizaine de mètres sur le toit de l’immeuble voisin.

Il n’y avait eu aucun son, aucune sensation, et pas un seul cheveu sur sa tête n’avait bougé. C’était arrivé instantanément.

Il avait l’impression de regarder un mirage dans le désert, mais l’existence de la femme n’était certainement pas une illusion.

Son cœur battait. Elle respirait. Son corps était chaud. Elle avait une odeur. Tous ses sens d’homme-bête, des centaines de fois plus sensibles que ceux d’une personne normale, lui avaient dit que la femme existait vraiment. Elle était, sans aucun doute, un être humain normal en possession d’une forme physique.

« Je te l’ai dit, tu ne peux pas me tuer..., » avec un sourire taquin, la femme au parasol claqua des doigts.

Une grande ondulation s’était répandue dans tout l’air qui entourait l’homme. Quand il s’était rendu compte que ce qui ressemblait à une ondulation était en vérité un cercle magique à haute densité, il était trop tard. Un grand nombre de chaînes d’argent émergèrent du vide, assaillant l’homme comme s’il s’agissait de serpents sensibles, bloquant tout son corps.

« La magie du contrôle spatial... !? C’est de la folie ! C’est un sort que seuls les plus grands praticiens de la magie peuvent réussir ! Comment une petite fille comme toi peut-elle... !? » La voix de l’homme déchu, alors que tout son corps était retenu par des chaînes, tremblait d’étonnement.

Mais la femme ne déclara pas un mot, tapant sur son parasol avec un soupir désintéressé. Puis, regardant sur le côté de son visage illuminé par le clair de lune, l’homme à la tête de léopard avait fait un faible gémissement.

« Je comprends maintenant... tu es Natsuki Minamiya ! Qu’est-ce que tu fais ici !? Tu n’as pas assez de sang de démon sur les mains, Sorcière du Vide... ! »

« Mon Dieu, mon Dieu... le chat errant peut franchement encore parler, » la femme au parasol avait fait sa déclaration avec froideur. D’un léger signe de la main, la main soi-disant coupée de la panthère-garou était apparue du vide, se plaçant à son bras comme si elle forçait les deux à se réparer.

« Qu’est-ce que tu fais ? » demanda l’homme, en jetant un coup d’œil à Natsuki.

Natsuki le regarda sans expression. « Ne t’inquiète pas. Je ne te guéris pas par gentillesse. C’est juste un petit coup de main pour arrêter l’hémorragie. Après tout, il serait inconvenant pour toi de mourir avant que nous n’ayons tiré l’information dont nous avons besoin de toi. »

« ... Penses-tu vraiment que je vais te donner des informations sur mes camarades ? »

« Je ne pense pas que des gens comme Kristof Gardos t’aient parlé de son vrai plan. »

« Qu’est-ce que tu veux dire... ? »

Natsuki lui tourna le dos sans donner de réponse à l’homme secoué.

« Je vais laisser l’interrogatoire sur ce que les terroristes de l’Empire du Seigneur de guerre ont l’intention de faire dans un Sanctuaire de Démons en Extrême-Orient aux individus de la Garde de l’île. Je n’en ai peut-être pas l’air, mais je suis très occupée. Je dois me préparer pour les cours demain, » déclara Natsuki.

« Te préparer pour les cours... ? » demanda l’homme.

Les mots extrêmement déplacés de Natsuki avaient empli de doute l’homme panthère-garou.

Sans doute ne comprenait-il pas que cette femme, dont l’alias « la Sorcière du Vide » faisait trembler les démons de l’Europe, était professeur d’anglais au lycée le jour.

Natsuki avait disparu, laissant derrière elle une légère ondulation dans l’espace. Derrière ça, l’homme bête au sol et enchaîné avait été abandonné, tout seul.

Malgré le chapelet de malédictions qui sortait de ses lèvres, l’homme avait fait un petit rire.

Non, ça n’avait rien changé. Même le fait qu’il ait été capturé ici n’avait rien changé à la situation. Le plan était déjà en marche. Même la puissance de la Sorcière du Vide ne changerait pas le destin de cette ville. Quoi qu’il en soit, cet endroit était destiné à périr.

Cette nuit-là aussi, la ville endormie se baignait dans la lueur silencieuse du clair de lune.

***

Partie 3

Avant l’aube...

Un navire était calmement ancré dans des eaux situées à près de 330 kilomètres au sud de Tokyo.

Le bateau avait été baptisé la Tombe d’Oceanus. Il mesurait environ quatre cents pieds de longueur. Dans la langue vernaculaire, on l’appelait un mégayacht.

C’était un bateau de croisière de style occidental. Le navire, dont la taille de la coque rivalisait avec celle d’un croiseur militaire, était si joliment décoré que même des paquebots extravagants ne pouvaient pas y être comparés. Sa majestuosité était telle qu’on pouvait l’appeler, sans ironie, un palais flottant.

Mais finalement, la Tombe d’Oceanus était un château d’un luxe effrayant, appartenant à un seul homme et construit pour lui.

Bien que ce fait semble irréaliste, n’importe qui l’accepterait instantanément en entendant le nom du propriétaire, car la Tombe d’Oceanus était la propriété privée du duc d’Ardeal, Dimitrie Vattler — un noble de l’Empire du Seigneur de Guerre.

Le propriétaire du navire profitait de la vue au clair de lune depuis le pont supérieur. Allongé sur une chaise longue extravagante, il pencha tranquillement un verre de liqueur de cassis dans sa main.

C’était un bel homme blond aux yeux bleus. En raison de son apparence, il avait peut-être une vingtaine d’années.

Cependant, il portait un titre de noblesse. En d’autres termes, c’était un vampire de la soi-disant Vieille Garde possédant un pouvoir extraordinaire. Son territoire étendu au sein de l’Empire de Seigneur de Guerre avait une armée permanente d’une telle puissance militaire qu’elle rivalisait avec les armées de l’alliance de l’Europe occidentale, il était lui-même un monstre possédant une puissance énorme, capable de détruire une grande ville en un clin d’œil.

Une silhouette élancée s’approchait du côté de ce jeune aristocrate.

Il s’agissait d’une jeune adolescente japonaise. Son corps de grande taille et gracieusement courbé était associé à des traits faciaux qui donnaient un sentiment d’élégance florale.

Ses longs cheveux étaient coiffés en une queue de cheval, dansant sans bruit pendant que la brise de mer les soufflait.

Elle portait l’uniforme scolaire d’une école de filles bien connue de la région d’Osaka.

Dans sa main droite, elle portait un étui d’instrument noir du genre qui contiendrait un clavier électronique.

« Vous étiez donc ici, Votre Excellence ? » La jeune fille aux cheveux longs s’arrêta, parlant avec une formalité respectueuse.

Par coïncidence, la destination du navire vers lequel il naviguait venait d’arriver à l’horizon. C’était une île solitaire flottant au-dessus de l’océan avec la mer dégagée tout autour. Elle avait été construite avec des structures flottantes de très grande taille, un gigafloat...

Construite dans le but de contrôler les « lignes du dragon », c’était maintenant une ville pour la recherche de la vie démoniaque et de leurs capacités. C’était le sanctuaire de démons connu sous le nom d’île Itogami.

« Alors c’est ça, l’enfant bâtard de la ferraille et de la sorcellerie ? Tout un engin que vous avez construit avec des bricoles. C’est pourquoi les humains sont si intéressants, » le jeune homme semblait murmurer à lui-même, son comportement n’indiquant pas s’il faisait des éloges ou des insultes.

La jeune fille repoussa ses mots avec un sourire froid et lui présenta une seule lettre.

« J’ai apporté la lettre de réponse du gouvernement japonais. »

« ... Hmm ? » Agissant comme s’il remarquait l’existence de la jeune fille pour la première fois, le jeune aristocrate se tourna lentement vers elle. Avec un sourire affable sur son visage, il ne projetait pas le sentiment d’oppression caractéristique des vampires et la puissance qu’ils cachaient.

La jeune fille accepta son regard un peu sardonique et continua à parler de façon décontractée.

« Il est dit qu’à compter de minuit aujourd’hui, la visite de Votre Excellence au sanctuaire de démons de l’Île d’Itogami a été approuvée. Par la suite, Votre Excellence sera traitée comme un envoyé diplomatique spécial de l’Empire du Seigneur de Guerre en vertu du Traité de la Terre Sainte. »

« C’est très bien. Une conclusion correcte et attendue, n’est-ce pas ? Eh bien ! S’ils m’avaient dit de me faire discret, j’avais l’intention d’y entrer de toute façon, mais cela aurait été une nuisance. » Toujours allongé sur la chaise longue, Dimitrie Vattler avait fait un rire innocent.

Mais l’expression de la jeune fille s’était durcie, comme si elle lui reprochait. « Il y a une condition. »

« Vraiment. Qu’est-ce que c’est ? »

« Le gouvernement japonais insiste pour vous acceptiez qu’il envoie un observateur et que vous écoutiez ses conseils. »

« Donc, un surveillant, alors ? Je vois, » déclara Vattler en hochant la tête avec un air intéressée. « Alors, qui va être cet observateur ? »

« Si vous me le permettez, je vous demanderais de me permettre d’accomplir cette tâche. »

La réponse de la jeune fille s’était faite d’une voix calme, soutenue par un regard provocateur sur son visage.

Bien qu’on l’appelle une observatrice, son devoir ne se limitait pas à jouer les guides touristiques. Elle déclarait essentiellement que si le gouvernement japonais considérait l’existence de Vattler comme une menace, et en dernier recours, elle l’éliminerait. Elle disait, en d’autres termes, qu’elle possédait assez de puissance pour détruire même un vampire de la vieille garde.

Vattler jeta un regard mystérieux sur la jeune fille en lui demandant : « Ahh, je vois. Au fait, qui êtes-vous ? »

La jeune fille poussa un léger soupir face aux paroles articulées et apathiques du jeune aristocrate.

« Je m’appelle Sayaka Kirasaka. L’Organisation du Roi Lion m’a décerné le titre de danseur de guerre chamanique. »

« Organisation du Roi Lion, Hmm. Je crois me souvenir d’avoir entendu le nom..., » Vattler murmura sans aucun sentiment de tension. La jeune fille secoua la tête, comme si elle était irritée.

« Une agence spéciale du gouvernement japonais chargée de lutter contre le terrorisme des sorciers. »

« ... Terrorisme des sorciers ? »

« Veuillez prendre note que, puisque la visite de Votre Excellence dans la Ville d’Itogami vous a placé sous la juridiction de l’agence, nous avons été chargés d’accompagner votre visite. »

« Hmm. Eh bien, peu importe ce que cela implique. » Le jeune aristocrate avait facilement consenti. Puis, il avait plissé les yeux avec un visage souriant. « Cela dit, c’est très malin de la part du gouvernement japonais d’envoyer une jolie fille comme vous pour me surveiller. » Alors que Vattler l’ajoutait, comme s’il s’adressait à lui-même, « Bien que j’aurais aussi été très bien avec un joli garçon, » Sayaka, bien sûr, lui avait lancé un regard désagréable.

« À ce propos, Votre Excellence. Mais même ainsi, je suis un Mage d’Attaque Anti-Démon autorisé à manier l’arc de type 6, Der Freischötz, qui purge les démons majeurs. N’oubliez pas qu’on m’a accordé le droit de décider de vous tirer dessus et de vous détruire, Votre Excellence. »

Vattler produisit de façon inattendue un rire plaisant face aux paroles aigres de Sayaka, apparemment destinées à l’intimider.

« Ha ha ha ha, excellent ! Assez intéressant, en effet. Je vous aime bien. Oui, oui, appelez-moi Dima ou Vattler, comme vous voulez. Plus de “Votre Excellence” ni d’autres formalités de ce genre. »

« ... Compris, duc Ardeal. » Sayaka ne déformerait son étiquette pour personne. Tandis que Vattler faisait un visage boudeur, il s’était assis et avait regardé Sayaka. Il y avait un scintillement brumeux et cramoisi dans ses deux yeux, comme un soleil scintillant. « Alors, qu’allons-nous faire de mon autre demande, je me le demande ? »

« Votre autre... demande ? »

L’expression de Sayaka s’était durcie face à l’aura froide que Vattler produisait.

« Pourriez-vous arrêter de jouer les idiots ? Vous l’avez trouvé il y a longtemps et vous le surveillez encore maintenant, n’est-ce pas ? Je parle du vampire le plus puissant du monde. »

« Si vous parlez du quatrième Primogéniteur, disons que je ne le nie pas. »

Vattler avait légèrement dénudé ses crocs en riant du comportement calme et professionnel de Sayaka.

« J’aimerais que vous me le présentiez. Bien que je comprenne pourquoi vous voulez le garder secret. »

Bien que le visage souriant du jeune aristocrate était aussi affable qu’avant, cette fois-ci tout son corps dégageait une aura puissante qui ressemblait à une pression physique et tangible. C’était comme si une émotion tordue et féroce avait pris forme physique. Si elle avait été un être humain normal et non un mage d’attaque anti-démon, elle aurait perdu conscience juste parce qu’elle se trouvait au même endroit que cette puissance maléfique.

Cependant, Sayaka avait gardé une expression neutre alors qu’elle secouait calmement la tête.

« Non, nous n’avons aucune raison de le protéger. »

Pendant qu’elle parlait, elle avait pris une seule photo. C’était la photo d’un lycéen en uniforme. Il ressemblait à un adolescent de sexe masculin tout à fait normal. Kojou Akatsuki. C’était son nom.

L’horizon aqueux avait commencé à acquérir un léger scintillement blanc. L’aube se lèverait bien assez tôt.

« Après tout, Kojou Akatsuki, le quatrième Primogéniteur, est notre ennemi ? »

Pendant que Sayaka murmurait, elle écrasa la photo du garçon dans sa main.

Le navire sur lequel elle et le jeune aristocrate se déplaçaient s’approchait lentement de l’île Itogami.

***

Chapitre 1 : Depuis l’Empire du Seigneur de Guerre

Partie 1

Mercredi, mi-septembre, 6 h 25...

Ce matin-là, pour une fois, Kojou Akatsuki s’était réveillé de lui-même.

On pourrait qualifier cet événement de tout à fait exceptionnel. Bien qu’il ne pouvait pas vraiment le révéler en public, Kojou Akatsuki était un vampire, et en tant que vampire, Kojou était condamné à être faible face à la lumière du soleil. C’était vrai même s’il portait un titre extravagant : le Quatrième Primogéniteur.

Les rayons du soleil matinal pénétraient particulièrement en profondeur. Bien qu’ils n’aient pas pu le brûler, cela avait provoqué une variété de symptômes tels que des sentiments de fatigue et d’ennui, de somnolence et d’une perte d’appétit. C’était ce dernier symptôme qui était vraiment gênant, mais pour les personnes non informées, ces symptômes étaient impossibles à distinguer d’un être humain normal qui ne dormait pas suffisamment et qui restait éveillé toute la nuit. Pour cette raison, Kojou était considéré par le monde entier comme un lycéen bon à rien qui n’étaient tout simplement pas une personne du matin.

Alors que Kojou pensait à de telles choses, ce qu’il trouvait vraiment regrettable, c’était que sa sœur cadette, Nagisa Akatsuki, ne faisait pas exception. À cause de cela, chaque jour, sa jeune sœur lui donnait des remontrances longues et pénibles tout en l’éveillant. Cela avait fait partie du quotidien de Kojou, en quelque sorte, de sa routine.

Cependant, ce matin seulement, Kojou n’avait pas senti le moment avant coureur de l’entrée de Nagisa dans sa chambre.

À la place, il l’entendait à travers le mur par bribes alors qu’elle parlait d’une voix joyeuse. Il ne pensait pas qu’elle aurait un invité à cette heure si matinale. Kojou se demandait si elle parlait à quelqu’un au téléphone alors qu’il sortait de sa chambre. Toujours à moitié endormi, il traîna ses pieds vers les toilettes pour mettre de l’ordre dans ses cheveux désordonnés par le sommeil.

Quand Kojou avait fini de faire sa toilette et était retourné au salon, il avait remarqué que le petit-déjeuner avait déjà été mis sur la table. Il y avait des sandwiches aux bagels faits à la main par Nagisa et de la salade italienne pour trois. Le menu était légèrement plus élaboré que d’habitude. Voyant cela, Kojou avait compris. Apparemment, leur mère était rentrée chez elle pour une fois.

Comme leurs parents avaient divorcé quatre ans plus tôt, la famille Akatsuki était actuellement composée de trois personnes. Mais leur mère, Mimori Akatsuki, était responsable de la recherche dans l’une des sociétés de l’Île d’Itogami — un poste assez prestigieux — et la plupart du temps, elle ne revenait jamais à la maison. Elle s’absentait pendant une semaine à dix jours avant de se présenter en pleine nuit ou le matin sans préavis. Elle vivait quelque chose comme la vie d’un hors-la-loi — ou d’un chat errant.

En un sens, Kojou n’avait pas d’autre choix que de croire que sa mère était revenue alors qu’il ne s’en rendait pas compte et se trouvait maintenant dans la chambre de Nagisa, bien qu’il n’ait aucune preuve directe. En effet, c’était un cas de force majeure.

« Nagisa. Désolé, je vais d’abord prendre mon petit-déjeuner. Si tu veux prendre un café, je t’en ferai assez pour toi aussi, quand je préparerai le mélange..., » parlant avec un bâillement mêlé à sa voix, Kojou avait ouvert la porte de la chambre de sa petite sœur.

La voix de Nagisa, qui avait continué sans une seule pause jusqu’à ce moment précis, s’était soudainement interrompue. Elle leva les yeux vers Kojou, les yeux grand ouverts avec un regard de surprise.

Bien qu’elle avait encore l’air un peu enfantine, c’était une étudiante du collège avec un regard constamment mignon sur son visage. Elle coiffait ses cheveux longs assez haut pour que là où cela s’arrêtait, ça lui donne un air de cheveux court. Elle tenait un uniforme de pom-pom girl sur ses genoux. Nagisa était membre du club des pom-pom girls du collège.

Et comme Kojou l’avait prévu, il y avait une autre personne dans la pièce avec Nagisa.

Cependant, ce que Kojou n’avait pas prévu, c’était que cette personne était une fille, beaucoup plus jeune que leur mère.

Et cette fille, se trouvant vers Kojou, portait des sous-vêtements — et rien d’autre.

« Qu... »

Ce spectacle totalement inattendu plongea Kojou dans la confusion la plus totale. Peut-être son étourdissement matinal expliquait-il pourquoi il n’arrivait pas à comprendre ce qui se passait.

La jeune fille sans défense, vêtue de sous-vêtements, jeta un coup d’œil maladroit par-dessus son épaule.

Kojou avait immédiatement retenu son souffle devant la beauté sereine de la jeune fille. Son corps était délicat, mais cela ne lui donnait aucune impression de fragilité. Même avec de légères traces de courbes de jeunesse, son corps possédait une symétrie parfaite, avec des courbes gracieuses. Elle avait l’air souple et tenace, comme une belle bête sauvage.

Les yeux de Kojou étaient restés totalement attirés par sa silhouette.

Sa voix était ébranlée quand il avait demandé, « ... Pourquoi est-ce que... Himeragi est là ? »

Yukina Himeragi. C’était le nom de la fille. Elle était en troisième année du collège, un an plus jeune que Kojou. Et seulement un demi-mois auparavant, elle avait été transférée à l’Académie Saikai, devenant la camarade de classe de Nagisa.

Et elle portait aussi le titre bizarre de Chamane Épéiste de l’Organisation du Roi Lion.

Elle était l’observatrice envoyée par cette organisation pour observer Kojou Akatsuki, le Quatrième Primogéniteur. C’était sa mission de rester près de Kojou, et si elle le considérait comme un être dangereux... elle était là pour l’éliminer.

Mais quoi qu’il en soit, cela n’avait pas changé le fait qu’elle était une très jolie fille.

« S-Senpai... !? » Yukina marmonna dans la direction de Kojou, comprenant enfin la situation.

« Salut, » répondit Kojou, réfléchissant à la salutation comme un parfait idiot. Malgré cela, son regard ne s’éloignait pas du tout d’elle.

En regardant la chair nue de Yukina telle qu’il était, on pourrait dire que c’était tout à fait naturel.

Sa peau blanche était comme du verre délicat. Sa clavicule élancée était comme une œuvre d’art. Elle avait une silhouette maigre, malgré tout, les lignes de son corps étaient mystérieusement douces. Il était impossible pour l’œil de ne pas être attiré par toutes ces choses.

 

 

Mais ce n’étaient pas les seules raisons pour lesquelles le regard de Kojou ne l’avait pas quittée, car les instincts du Quatrième Primogéniteur, le vampire le plus puissant du monde, l’avaient averti du danger.

On pourrait peut-être dire qu’il avait l’impression d’être face à face avec une bête carnivore, et s’il détournait les yeux ne serait-ce qu’un instant, il serait attaqué sans hésitation. C’était peut-être plus juste de dire que c’était comme si deux maîtres artistes martiaux se faisaient face, et ni l’un ni l’autre ne se permettait une ouverture. Un équilibre précaire avait été établi entre le regard fixe et immobile de Kojou et le silence de Yukina. Même le plus petit déclencheur aurait sûrement rompu cet équilibre en un instant.

Et celui qui avait créé cette gâchette, assise sur le bord du lit, avait été Nagisa.

« K-Kojou !? Qu’est-ce que tu fais !? » demanda Nagisa.

Nagisa s’était levée en glapissant. Sa voix avait brisé le sort enchaînant Kojou et Yukina.

Presque simultanément, le Kojou agité marmonna « um, um » pendant qu’il reculait, tandis que Yukina se couvrait les seins des deux mains, se tournant sans faire un bruit. Les cheveux flottants de Yukina, sa nuque blanche, son dos exposé et la petite taille de la zone de son corps en fait couverte de vêtements avaient tous défilé devant les yeux de Kojou. L’instant d’après, le talon de Yukina enveloppé d’une chaussette s’était cogné sur le côté du visage de Kojou.

Le temps que Kojou se rende compte qu’il avait pris un coup de pied tournant dans le mouvement, son corps était dans une splendide vrille alors qu’il volait vers l’autre côté de la pièce. L’impact avait été suffisant pour que le crâne d’un humain normal ait pu être à moitié fracassé.

Eeeeeeeeeek ! Avec un léger retard, il entendit Yukina crier. Kojou aurait aimé commenter le coup de pied tournoyant avant le cri, mais bien sûr il n’avait pas eu l’occasion de le faire pour l’instant. Sur le sol, face vers le haut, incapable de se lever, Kojou appuya sa main droite contre son visage. Tandis que le sang jaillissait de son nez, il lâcha un faible murmure mélangé à un soupir.

« ... Lâchez-moi un peu. »

Ce fut le début de la très longue journée de Kojou Akatsuki.

***

Partie 2

« Euh, Senpai... ton saignement de nez... est-ce vraiment fini maintenant ? »

Dans le wagon du monorail utilisé pour se rendre à l’école, Yukina, vêtue de son uniforme scolaire, avait levé les yeux vers Kojou lorsqu’elle le lui avait demandé.

Elle avait un étui de concert noir pour guitare basse sur son épaule.

Il n’y avait pas d’instrument de musique à l’intérieur, mais plutôt l’arme secrète de l’Organisation du Roi Lion, une lance spirituelle d’une puissance effrayante qui lui avait été accordée dans le but d’éliminer le vampire primogéniteur. Alors que Kojou regardait Yukina — l’observatrice de Kojou Akatsuki, le quatrième Primogéniteur — marcher avec cet objet dangereux qui ne la quittait jamais, son humeur s’était progressivement assombrie.

« Plus ou moins. De toute façon, c’est de ma faute. Non pas que j’avais l’intention de jeter un coup d’œil, mais je dois m’excuser, » s’excusa Kojou en se frottant le nez qui lui démangeait encore.

Le pouvoir régénérateur d’un vampire avait guéri les os du nez brisés par le coup de pied de Yukina, mais le saignement de nez en lui-même avait pris un certain temps pour s’arrêter. Mais grâce à cela, il n’avait pas été assailli par des pulsions vampiriques — il aurait peut-être dû en être reconnaissant.

« Ce n’est pas grave... Je ne suis plus fâchée à propos de ça, » déclara Yukina.

Avec un soupir dans la voix, Yukina avait ajouté : « Et je t’ai frappé de plein fouet. » Bien que son ton ait semblé mêler résignation et embarras, elle n’avait certainement émis aucune trace de colère. Une expression soulagée était apparue sur le visage de Kojou.

« C’est... c’est correct, » déclara Kojou.

« Euh, eh bien... Je savais depuis le début que tu étais un pervers, Senpai, alors c’est ma faute si j’ai baissé ma garde, » déclara Yukina.

« Hein ? » s’exclama Kojou.

« Je n’aurais pas dû oublier la possibilité qu’un tel comportement accidentel puisse venir de toi, Senpai, » déclara Yukina.

« Pourquoi agis-tu comme si c’était une évidence que je jetterais un coup d’œil ? C’était vraiment un accident, tu sais. Je veux dire, je suis désolé pour cette erreur, mais quand même ! » déclara Kojou.

« Hee-hee. » Yukina avait fait un petit rire en regardant Kojou essayer de s’opposer.

Apparemment, elle voulait vraiment lui pardonner. Comme Yukina suggérait que « Oui, un peu d’introspection serait bien, » avec un regard méprisant et réprimandant sur son visage, les lèvres de Kojou s’étaient un peu tordues quand il respirait et se caressait le torse avec soulagement. Cependant...

« Ce n’est pas bon, Yukina, si tu pardonnes à ce pervers si facilement... ! »

C’était Nagisa qui avait brisé le climat de réconciliation, s’insérant comme pour protéger Yukina.

Portant le même uniforme que Yukina, elle leva les yeux vers Kojou avec une colère apparente dans ses yeux.

Au-delà des fenêtres du monorail s’étendait un ciel bleu sans nuages avec une mer d’outremer. Alors que les rayons du soleil matinal illuminaient impitoyablement l’intérieur du wagon, la voix aiguë de Nagisa résonnait malgré le volume restreint.

« Je n’arrive pas à y croire. Ce n’est pas possible. Et comment peut-on appeler cela comme étant un accident, le fait de faire irruption dans la chambre d’une fille sans frapper à la porte ? Kojou, tu es le pire. Je t’ai dit hier, avant de me coucher, que Yukina venait me voir le lendemain matin, n’est-ce pas ? » demanda Nagisa.

« Ah... Maintenant que tu le dis, j’ai l’impression que tu aurais pu me le dire... » Le visage de Kojou s’effondra lorsqu’il se remémora d’un souvenir assez vague. « Mais je n’ai rien entendu sur Himeragi qui se changeait chez nous. Qu’est-ce que vous faisiez toutes les deux à cette heure-là ? »

« Arrête avec ton imagination bizarre, bon sang ! Nous prenions des mesures pour ajuster les tenues pour le festival sportif. » Et Nagisa ajouta ça avec un grognement grossier. « Je t’en ai parlé hier. » Mais même en se faisant dire cela, Kojou n’avait aucune idée des circonstances.

« ... Comment ça, des tenues pour le festival sportif ? Ce ne sont que des maillots de gym, n’est-ce pas ? »

« Non. Ce n’est pas pour les matchs, c’est pour les pom-pom girls. Ne peut-on pas utiliser des uniformes des pom-pom girls pour encourager notre propre classe ? Nous devons ainsi en créer de nouveaux. Les filles du club d’économie ménagère s’occupent des détails, et les garçons s’occupent de l’argent. »

Nagisa avait bavardé, expliquant des détails qu’il n’avait jamais demandés. La quantité de mots qui sortaient de la bouche de Nagisa était l’un de ses rares défauts, mais dans des moments comme celui-ci, il était reconnaissant qu’elle ait parlé vite.

« Des uniformes de pom-pom girls... attends, Himeragi en porte un aussi ? » demanda Kojou.

Kojou leva les sourcils d’un air dubitatif lorsqu’il le demanda à Yukina, qui avait un regard maussade pour une raison inconnue.

Bien que le festival sportif soit un événement officiel de l’école, il n’y avait aucune règle selon laquelle les filles devaient se déguiser pour encourager les gens. Il pouvait comprendre Nagisa, une membre active du club de pom-pom girls, de se précipiter à n’importe quel événement de pom-pom girls, mais il avait senti qu’il était un peu inattendu pour Yukina de se porter volontaire pour participer à un événement comme celui-ci.

Une expression lugubre était apparue sur les traits gracieux de Yukina pendant qu’elle parlait.

« Je n’avais pas l’intention de faire une telle chose, mais je n’ai pas été capable de refuser... »

Elle poussa un soupir, expirant son angoisse. « Non, tu ne pouvais pas, » déclara Nagisa, avec sa voix joyeuse. C’était tout le contraire.

« Tous les garçons de notre classe ont baissé la tête et supplié Yukina. Si la princesse les encourageait dans une tenue de pom-pom girl, ils feraient n’importe quoi pour elle en tant que loyaux serviteurs et se démèneraient pour gagner pour elle. »

« Tous les garçons se sont inclinés ? »

Kojou avait été déconcerté par l’explication de Nagisa. Yukina se couvrit les yeux d’une expression encore plus maladroite. Alors « Princesse » est le surnom de Yukina, n’est-ce pas ? Pas mal, morveuse, pensa Kojou avec un soupçon d’admiration. Apparemment, sans que Kojou s’en rende compte, Yukina avait atteint le rang de princesse de classe. Il pouvait imaginer à quel point Yukina devait avoir l’air maladroite avec une foule de camarades de classe qui s’inclinaient devant elle.

« D’habitude, je les aurais tous fait partir au loin, mais je peux comprendre pourquoi les garçons diraient ça. Je veux dire, c’est Yukina, alors j’ai dit : “Hé, les filles, travaillons ensemble là-dessus”. »

Pour une raison inconnue, Nagisa en était très fière. Kojou avait enfin compris les circonstances. « Alors, vous allez toutes les deux applaudir ensemble. »

« Tee-hee, rien de mal à ça. Ah, Kojou, tu voulais peut-être qu’on t’encourage ? »

Kojou donna une réponse indifférente et secoua la tête. « Non, tout est vraiment pareil pour moi. »

L’expression de Nagisa, qui avait tendance à se trémousser beaucoup, s’était transformée pour une fois en un froncement de sourcils évident. « Hein ? Pourquoi pas !? Ça ne te rendra-t-il pas heureux ? »

« Je serais embarrassé d’avoir ma petite sœur qui m’encourageait et qui s’excite à cause d’un tournoi sportif intra-muros. » Kojou avait laissé échapper son commentaire sur un ton très brutal. Il avait seulement voulu transmettre l’opinion qu’il n’avait aucun intérêt à prendre plaisir à faire porter à sa propre petite sœur un costume de pom-pom girl, mais Yukina, en écoutant du côté, semblait en tirer un sens différent.

« E-Embarrassant... costume... » Marmonnant comme en état de choc, Yukina avait penché la tête en signe de découragement. Pour une fille aussi sérieuse, porter une tenue de pom-pom girl devait être un obstacle de taille.

« Euh, non. Je ne dis pas que je serais gêné de te voir m’encourager, Himeragi, » déclara Kojou.

« Ah ? Qu’est-ce que c’est ? C’est bon avec Yukina, mais c’est embarrassant si je t’encourage !? » s’écria Nagisa.

« Ce n’est pas ça. Je dis juste qu’un tournoi sportif intra-muros, c’est juste pour s’amuser, et non pas pour faire des pieds et des mains pour venir me voir à un match, » expliqua Kojou en agitant la main, l’air ennuyé par cette peine.

Nagisa leva les yeux vers son visage pendant un moment, les lèvres effectuant une moue. Et comme son expression devenait soudainement raide, elle s’enquit d’un ton vaguement inquiet. « ... Kojou, ça te dérange toujours ? Je veux dire... à propos du tournoi de l’an dernier. »

« Tournoi ? » demanda Kojou.

Pendant un moment, Kojou ne savait sérieusement pas de quoi elle parlait, alors il regarda dans les yeux de sa petite sœur en réponse. Constatant que, comme cela arrivait rarement, elle semblait hésiter à dire quelque chose, il avait finalement compris le sens de sa question.

À l’époque où Kojou faisait partie de l’équipe de basket-ball du collège, il avait eu l’expérience juvénile d’être isolé dans une équipe en étant obsédé par la victoire. Cela l’avait complètement déprimé et c’était le déclencheur pour l’avoir fait arrêté le basket-ball.

Regarder Kojou parler d’elle qui viendrait l’encourager avait dû faire en sorte que Nagisa se souvienne de tout cela.

« Ahh, non, non. Ça n’a rien à voir avec ça, » déclara Kojou.

« Vraiment ? » demanda Yukina.

« Cela ne me fait plus rien du tout. Et ce n’est pas comme si je détestais le basket ou quoi que ce soit, » déclara Kojou.

Comme le disait Kojou, il haussa les épaules comme s’il cachait son embarras.

C’est vrai qu’il n’avait pas tenu compte du passé. Kojou n’était après tout pas le seul à avoir quitté son club après l’obtention de son diplôme d’études secondaires. Il n’avait donc aucune signification particulière. Les gars du club de basket de l’époque s’efforçaient de bien faire, même maintenant.

Quoi qu’il en soit, dans son état actuel, Kojou ne pouvait pas s’immerger sérieusement dans le sport. Kojou était, après tout, le vampire le plus puissant du monde. Il ne pouvait pas utiliser les extraordinaires capacités physiques et démoniaques d’un « Primogéniteur » au milieu des sports ordinaires du lycée.

Mais Nagisa, qui ne connaissait pas ces circonstances, avait souri joyeusement en écoutant les paroles de Kojou.

« Vraiment ? Alors, peut-être qu’on peut encore voir ton match à ce festival sportif, non ? » demanda Nagisa.

« Pas forcément dans un match comme tu l’espères, » répliqua Kojou.

Kojou avait ressenti une légère sensation de palpitation lorsqu’il avait lâché ce commentaire.

Dans le cadre du festival sportif, les garçons du lycée allaient participer à trois événements : le basket-ball, le tennis de table et le badminton. Il n’avait pas encore été décidé que Kojou ait un rôle à jouer.

En premier lieu, ils donneraient probablement la priorité aux personnes ayant de l’expérience pour la compétition, de sorte qu’il y avait de grandes chances que Kojou soit affecté au terrain de basket-ball. Ce n’était peut-être pas grave selon Kojou.

Bien qu’il n’ait pas pu s’amuser sérieusement dans une compétition d’équipe aussi intense qu’avant, s’il pensait que c’était pour donner un cadeau à sa petite sœur inquiète, jouer tout en se retenant un peu n’était pas si mal du tout.

« On ne peut rien y faire. Eh bien, si tu participes, il faut vraiment qu’on t’encourage. Pas vrai, Yukina ? » demanda Nagisa.

Hochant la tête, de bonne humeur pour une raison inconnue, Nagisa demanda l’accord de Yukina.

Pendant un moment, les yeux de Yukina clignèrent dans l’étonnement. Nul doute qu’elle n’aurait jamais imaginé qu’on l’obligerait à aussi encourager Kojou.

Pour Yukina, qui s’inquiétait de porter une tenue de pom-pom girl, l’invitation avait dû être très pénible. En premier lieu, Yukina avait été envoyée comme observatrice du quatrième Primogéniteur, et encourager Kojou dans un festival sportif ne faisait pas vraiment partie de sa mission.

Cependant, avec le visage radieux de Nagisa tourné vers elle, il n’était pas surprenant qu’elle ne puisse pas dire non.

« Je suppose que tu as raison... Je t’encouragerai aussi, » déclara Yukina.

Enfin, Yukina poussa un soupir, comme si elle transmettait à Kojou sa reddition à contrecœur. Voyant le sourire faible et tendu sur son visage, Kojou avait fait son propre sourire douloureux. Un instant plus tard, le monorail arriva à la gare vers laquelle il se dirigeait.

Comme d’habitude, ils étaient sortis du wagon tous les trois en même temps, en échangeant les formalités habituelles.

C’était une scène courante et quotidienne...

Kojou n’avait pas encore remarqué, mais dans le port d’Itogami, visible depuis les fenêtres du monorail, était amarré un navire unique, peu familier, très extravagant.

***

Partie 3

Kojou s’était séparé de Yukina et Nagisa juste avant leur arrivée aux portes de l’école. Yukina et Nagisa s’étaient dirigées vers le campus du collège à une courte distance de là tandis que Kojou se dirigeait directement vers le bâtiment du lycée.

L’Île d’Itogami était l’île de l’été éternel, flottant au milieu de l’océan Pacifique.

Même à la mi-septembre, il n’y avait même pas le moindre soupçon d’automne, et les rayons impitoyables du soleil du milieu de l’été se répandaient sur le terrain de l’école.

Tandis que Kojou s’avançait dans l’entrée, se sentant comme une moisissure visqueuse essayant frénétiquement d’échapper à la lumière ultraviolette, le visiteur précédent était juste devant lui. Une écolière changeait ses chaussures devant les casiers à chaussures de la classe de Kojou.

Elle avait une coiffure voyante et un parfum raffiné. Avec un bon sens de la mode, elle portait son uniforme scolaire de la bonne façon pour se démarquer de ses camarades de classe.

« Bonjour, Kojou. Quand je pense que tu es arrivé à l’heure pour une fois, » déclara la fille.

Elle lui avait parlé d’un ton facile comme si elle était un garçon. Bien que ses lèvres galbées soient plissées en un sourire, c’était une expression mystérieusement affable et mémorable. Elle avait pris un grand sac de sport placé juste à côté de ses mocassins et l’avait jeté vers lui.

« C’est quoi tout ça, Asagi ? » demanda Kojou avec désinvolture en récupérant ses propres chaussures.

Pendant que Kojou le faisait, Aiba Asagi avait largement souri en le regardant.

« Désolée, tu arrives juste au bon moment. C’est plus lourd que ce à quoi je m’attendais et c’est une vraie douleur pour mes épaules, » déclara Asagi.

« Je n’ai pas dit un mot sur le fait de le porter pour toi, » déclara Kojou.

« Oh, tu m’aiderais beaucoup si tu pouvais le mettre devant le casier…, » déclara Asagi.

Ignorant les maigres protestations de Kojou, Asagi donna des ordres partiaux. Kojou, renonçant à toute résistance supplémentaire, ramassa le sac à contrecœur. À travers l’espace laissé par la fermeture éclair partiellement ouvert, il avait vu un certain nombre de vieilles raquettes et de volets blancs — des volants pour le badminton.

« Une raquette de badminton ? C’est pour quoi faire ? » demanda Kojou.

« C’est pour la pratique du festival sportif. J’ai demandé une faveur et ma sœur aînée me l’a prêtée. L’école n’a pas assez d’équipement, » déclara Asagi.

« Huh, » murmura Kojou en admiration apparente. « Tu fais des choses sensées parfois. »

« Tu n’avais pas besoin de dire “parfois”. Après tout, je suis aussi connue sous le nom d’Asagi, la belle lycéenne très attentionnée, » déclara Asagi.

« Une belle lycéenne très attentionnée ne dirait pas ça d’elle-même, » déclara Kojou.

« Oh la ferme. En fait, Rin m’a demandé de faire ça hier, » déclara Asagi.

Asagi lui avait fait une confession sans excuse pendant qu’ils montaient les escaliers pour aller en classe.

« Alors, qu’est-ce que tu vas faire, Kojou ? » demanda Asagi.

« Qui sait… ? J’ai demandé à Tsukishima d’en faire un événement aussi amusant que possible, » répondit Kojou d’un ton peu enthousiaste. Une fois que la représentante de classe, Rin Tsukishima, avait entendu tout le monde dire à quel événement sportif ils voulaient participer, elle assignait les individus en utilisant son propre jugement. Elle avait adopté une position ferme : Si vous avez un problème avec l’événement qui vous est assigné, vous êtes seul quand il s’agit de négocier un échange.

« Mince, » dit Asagi, expirant, semblant quelque peu déprimée.

« Abandonne tout de suite. Les anciens sportifs au sang chaud et ennuyeux ne valent rien dans des festivals sportifs comme celui-ci, alors donnes-y plus d’énergie, Kojou l’irritant, » continua Asagi.

« Qui est Kojou l’irritant ? Attention à ce que tu dis. Tu devrais t’excuser auprès de tous les anciens membres du club d’athlétisme du pays, » déclara Kojou.

Atteignant le haut de l’escalier, et agissant comme d’habitude, Kojou et Asagi étaient entrés dans la salle de classe.

Un instant plus tard, l’atmosphère avait repris le dessus.

Environ 70 % des élèves étaient déjà en classe. Tous s’étaient retournés et avaient regardé Kojou.

« Qu-Quoi ? » demanda Kojou.

« Ne me demande pas mon avis. Je viens d’arriver, comme toi, » déclara Asagi.

Il y avait un mélange étrange de consentement et de confiance qui flottait dans l’air de la salle de classe. Ce n’était pas un sentiment glacial. En effet, c’était un étrange sentiment d’anticipation.

En réponse à ce comportement déroutant, Kojou et Asagi s’étaient mis à leur place, se sentant plutôt mal à l’aise.

« Hé, Kojou. Se pointer avec le matériel de sa partenaire comme ça, c’est ton truc. Mec, t’es vraiment dans le coup. »

Un élève près du bureau du professeur leur avait crié cela de très bonne humeur. Le garçon, aux cheveux courts et hérissés de pointes, se grattait le dos et dégageait un air frivole, était Motoki Yaze. Il était à la fois le mauvais ami de Kojou au collège et l’ami d’enfance d’Asagi.

Kojou et Asagi regardèrent avec un mécontentement apparent l’ami qui les connaissait si bien.

« Partenaire ? » demanda Kojou.

« … Qu’est-ce que tu racontes ? Le fait d’avoir été largué par ta copine aînée t’a-t-il embrouillé le cerveau ? » demanda Asagi.

« Je ne suis pas brouillé, jeté ou en train de jouer avec ! Là ! Vous voyez ? » demanda Yaze.

Parlant d’une voix excitée, Yaze montra du doigt le tableau noir qui se tenait derrière lui.

Rin Tsukishima se tenait juste là. C’était une grande écolière qui dégageait un air d’adulte. Elle avait écrit au tableau noir, avec son souci du détail caractéristique, les noms de tous leurs camarades de classe.

« J’annonçais juste qui participerait à quels événements sportifs, » déclara Yaze.

« D’accord…, » déclara Asagi.

Kojou et Asagi avaient tous les deux essayé de paraître raisonnables au fur et à mesure que leurs visages se rencontraient. Ils n’avaient aucune idée de pourquoi cela attirait l’attention sur eux deux. Incapable de se calmer, Kojou avait regardé les lignes de ce qui était écrit au tableau noir à la craie blanche.

« Double mixte de badminton ? Asagi et moi, en couple ? » demanda Kojou.

Kojou était en état de choc lorsqu’il avait remarqué leurs noms dans un endroit inattendu.

Bien sûr, Kojou n’avait aucune expérience en badminton, il ne se souvenait pas non plus d’avoir demandé à participer à cette épreuve. Il savait dès le départ que ce serait des doubles mixtes. De plus, toutes les paires de joueurs à côté de Kojou et Asagi étaient des couples reconnus publiquement.

« … Pourquoi dois-je faire équipe avec Kojou ? » demanda Asagi avec une expression réservée sur son visage.

Cependant, Rin avait fait un sourire calme. « C’est une nouvelle règle pour cette année. Les matchs solos sont abandonnés, il y a donc de la place pour plus de paires de doubles mixtes. Ah, et les vraies filles du club de badminton ne sont pas autorisées. »

« Alors pourquoi ça doit être moi et Kojou !? » demanda Asagi.

« Asagi, tu m’as déjà dit que tu l’aimais bien, n’est-ce pas ? » demanda Rin.

« E-Excuse-moi !? Quand... Quand ai-je dit quelque chose comme ça… !!? » demanda Asagi.

« Pour le badminton, » déclara Rin.

Rin parlait avec sa voix normale et sereine. Asagi fit un petit bruit et choisit ses mots avec plus de soin. « … Je ne m’entraîne avec ma sœur aînée qu’une fois de temps en temps, donc je ne suis pas vraiment bonne ou quoi que ce soit. »

« Si tu comprends les règles, c’est suffisant. » Parlant sur un ton très calme, Rin fit taire Asagi. « Akatsuki a dit qu’il n’avait aucune préférence pour les événements, donc aucune plainte, non ? En fait, j’avais pensé à lui faire jouer au basket, mais désolé, je n’en savais rien avant. »

Regardant Rin se couvrir maladroitement les yeux, Kojou avait répondu à une question avec un regard de suspicions présent sur son visage. « Qu’est-ce que tu veux dire ? »

Pour une raison quelconque, Rin regarda pitoyablement Kojou en secouant la tête. « Il n’y a pas besoin de te forcer. Yaze m’a parlé d’Akatsuki au collège. »

« Hein ? » demanda Kojou.

« Qu’en raison d’incidents répétés de harcèlement pervers impliquant des membres féminins du club de basket-ball, on t’a ordonné de rester à l’écart du terrain de basket-ball, oui ? » demanda Rin.

« Hein !? » La déclaration un peu farfelue de Rin avait court-circuité les circuits mentaux de Kojou pendant un moment.

Certes, Kojou avait eu de mauvaises expériences liées au basket-ball au collège, mais il n’avait aucun souvenir d’un acte criminel de ce genre.

« Ce n’est pas vrai !? De quel harcèlement parles-tu ? » demanda Kojou.

« Mais ne t’inquiète pas, tout va bien. Même si tu es un pervers tordu accro à l’odeur des chaussures et des maillots de basket des filles, notre classe ne t’abandonnera pas, Akatsuki, » déclara Rin.

« Attends un peu… ! Ne crois pas ce genre de conneries ! C’est une invention de toute façon ! » Kojou avait crié avec insistance, mais sans dire un mot, ses camarades de classe ne lui avaient renvoyé que des regards empreints de pitié et peu enthousiastes.

« Alors c’est comme ça, » déclara Asagi, ses yeux se rétrécirent en poussant un grand soupir.

« Je comprends maintenant. C’est de ta faute, n’est-ce pas, Motoki ? » demanda Asagi.

« Belle intervention, non ? » demanda Yaze.

Alors que son amie d’enfance le dévisageait, Yaze avait fait ce qui était, pour une raison ou une autre, sa marque de fabrique, le pouce levé. Apparemment, il était le cerveau derrière le jumelage de Kojou et Asagi.

Kojou ne savait pas ce qu’il faisait, mais c’était probablement l’un de ses plans pourris.

« Et voilà que tu vas mettre ton nez là où tu n’en as plus besoin… ! Et Rin est dans le coup, hein ? » s’écria Asagi.

Asagi avait une expression grognon présente sur son visage alors qu’elle contre-interrogeait la représentante de classe au visage serein.

Rin avait fait un sourire plutôt espiègle en parlant sur le même ton calme que d’habitude. « Vous avez la permission d’utiliser la cour. Amusez-vous bien en vous entraînant aujourd’hui après les cours. »

***

Partie 4

« Asagi ? Tu es toujours en classe ? »

Ce jour-là, après les cours.

Asagi Aiba, après avoir quitté Kojou Akatsuki des yeux pendant un court moment s’immobilisa un moment après avoir entendu son nom crier à l’improviste depuis un angle mort. Réfrénant les cris qui menaçaient de s’échapper de ses lèvres, elle se retourna, gardant son sang-froid.

Ignorant le travail acharné d’Asagi, Kojou avait son expression léthargique habituelle.

Apparemment, même s’ils avaient été choisis pour un double, Kojou n’y voyait qu’une équipe de festival sportif, sans rien de spécial.

Bien que son expression indifférente menaçait de transformer sa tension en soif de sang spontanée, Asagi s’était en quelque sorte limitée à s’éclaircir la gorge. Elle était assez consciente d’elle-même pour savoir qu’elle n’avait aucune raison d’avoir du ressentiment.

Devant l’attitude de mécontentement évident d’Asagi, Kojou hésita un instant et plissa les sourcils.

« Si on doit s’entraîner pour ce festival sportif, on devrait s’en débarrasser le plus vite possible, » déclara Kojou.

« Ah… D’accord. Je vais me changer, alors va à la gym avant moi, d’accord ? » Le sourire d’Asagi était présent quand elle parlait.

Kojou acquiesça docilement. « Eh bien, à plus tard. Je vais emprunter une raquette. »

« Ah, d’accord, d’accord, » déclara Asagi.

Asagi avait fait un signe de la main au départ de Kojou avant de pousser un long soupir.

Ce faisant, elle entendit soudain une voix. « Hmmmm. »

C’était la voix cool et composée de Rin Tsukishima. Rin, vêtue de vêtements de gymnastique bleus par-dessus sa grande silhouette, affichait une expression qui semblait heureuse quand elle regardait et comparait le départ de Kojou avec l’attitude d’Asagi.

« Quoi ? » demanda Asagi.

« Akatsuki est parti assez facilement, n’est-ce pas ? J’aurais pensé qu’il n’aurait pas aimé le fait de s’entraîner pour le festival sportif, » déclara Rin.

« En fin de compte, il aime gagner. C’est un garçon comme ça, » déclara Asagi.

Asagi fit un grand haussement d’épaules en parlant. Rin, pour sa part, inclina légèrement son cou avec un regard sérieux présent sur son visage.

« Je me le demande. C’est peut-être le fait qu’il soit associé à toi qui l’a gonflé à bloc ? » demanda Rin.

« Attends un peu. » Asagi se tordit la langue dans ce qui semblait être une moue quand elle regarda Rin. « Arrête de jouer avec cet idiot de Motoki contre moi, et Kojou. Tu te mêles de tout et tu mets ton nez dans les affaires du festival du sport comme ça… »

« Est-ce un problème ? » demanda Rin avec un ton riant dans sa voix. Asagi poussa un soupir maussade.

« Un gros problème. D’abord, qu’est-ce que c’est que cette tenue ? » Pendant qu’elle parlait, elle montrait le sac en nylon sur ses genoux. À l’intérieur du sac se trouvait une serviette de sport et des vêtements de gymnastique pour la pratique du festival de sport.

« Qu’est-ce que tu demandes… ? C’est un uniforme de badminton, bien sûr. Je l’ai mis de côté pour toi, mais peut-être que la taille n’est pas tout à fait correcte ? Serait-ce parce que tu as tant grandi dans certains endroits que tu ne peux pas le porter ? » demanda Rin avec un ton d’inquiétude.

« Je peux le porter, » avoua Asagi sans réfléchir. « Ça ne veut pas dire que je devrais porter quelque chose d’aussi spectaculaire à un petit événement scolaire. »

Il s’agissait d’une jupe courte plissée et d’un polo, sans manches, et Asagi avait souligné les nombreux endroits où l’uniforme la laisserait sérieusement exposée. Ce n’était peut-être pas pour un match de tournoi public, mais elle n’avait pas pu s’empêcher d’être gênée de le porter à l’entraînement pour un simple festival sportif.

Pourtant, Rin avait quand même fait un rire espiègle. « Mais Asagi, tes jambes sont si jolies. »

« Euh, quoi ? » demanda Asagi.

Asagi s’était figée, incapable de répondre aux paroles inattendues de son amie, qui n’aimait généralement pas les blagues. Cependant, le ton de la voix de Rin était resté parfaitement calme.

« … Eh bien, Yaze dit que cet élève transféré au collège n’est pas du tout de taille face à toi selon lui, » déclara Rin.

« Pourquoi est-ce que tu es en train de me parler de cette fille, Himeragi, dans ce genre de conversation… ? » Asagi gardait sa voix basse pendant qu’elle demandait. Elle voulait garder son sang-froid, mais le choc soudain avait donné un ton désagréable à sa voix.

Yukina Himeragi, élève transférée au collège. Une fille si ridiculement jolie qu’Asagi ne pouvait même pas rêver d’être jalouse, et en plus, elle s’était étrangement bien entendue avec Kojou avant même son transfert. Certains étudiants l’avaient apparemment prise pour la petite amie de Kojou. Bien que ce ne soit pas un fait qu’Asagi ait voulu reconnaître, sans aucun doute, que cette fille était la cause de la chute d’Asagi ces derniers temps.

« Bien que je crois que tu en connaisses bien la raison, plus encore que moi, Asagi…, » déclara Rin.

L’expression de Rin n’avait pas changé lorsqu’elle avait jeté un coup d’œil vers l’angle du bâtiment du collège.

« Elle est très mignonne. C’est la camarade de classe de la petite sœur d’Akatsuki, non ? » demanda Rin.

« On dirait bien, oui, » déclara Asagi.

Voyant comment Asagi était incapable de cacher son inconfort, Rin fit un sourire doux.

« Bien que je me sois donné la peine de préparer l’uniforme, je ne te forcerai pas à le porter. Si tu veux dans tous les cas utiliser ta tenue de gym en sueur des cours du matin pendant que tu passes du temps avec Akatsuki…, » déclara Rin.

« Ce n’est pas en sueur. J’ai utilisé du déodorant et tout…, » Asagi protesta d’une voix faible.

Rin ne répondit rien, agitant la main et s’éloignant. « Je vais à la salle de ping-pong. Bonne chance, Asagi. »

Alors qu’elle s’en allait avec les élèves qui formaient l’équipe de tennis de table, Asagi était la seule qui restait derrière.

Regardant l’uniforme étendu sur son bureau, Asagi expira d’irritation.

« Bon sang… pourquoi dois-je m’inquiéter pour ce genre de choses ! Stupide Kojou ! » déclara Asagi.

***

Partie 5

Je ne comprends pas vraiment tout ça, c’est ce que Kojou ressentait honnêtement. C’était à propos d’Asagi, bien sûr.

Il pouvait comprendre pourquoi elle était fâchée que Yaze et Rin aient comploté pour la forcer à former un couple avec Kojou. Mais en fait, il n’avait pas senti qu’Asagi était sérieusement en colère à un moment donné.

Après avoir été d’une humeur si amère pendant la matinée, à la pause de midi, elle s’était rétablie et avait parlé normalement à Yaze et aux autres. Tout d’abord, les camarades de classe de Kojou et d’Asagi les taquinèrent en leur racontant à quel point ils s’entendaient bien depuis le collège. Il ne pensait pas qu’Asagi s’énerverait tout d’un coup.

Ce qu’il ne comprenait pas, c’était son attitude envers lui.

Même quand il essayait de lui parler, elle semblait vraiment raide, mais elle jetait de temps en temps un coup d’œil à Kojou, tout cela était gênant. Et pourtant, elle n’avait pas l’air d’être de mauvaise humeur.

Il avait l’impression d’avoir vu un comportement étrange et inhabituel de la part d’Asagi ces derniers temps.

Kojou s’était enfin souvenu de quelque chose.

L’attitude d’Asagi était devenue bizarre à la fin des vacances d’été.

C’était juste quand Kojou avait rencontré Yukina.

« Euh, Akatsuki ? Tout seul ? Où est Aiba ? »

Quand Kojou était arrivé au gymnase, son camarade de classe Uchida l’avait vu et l’avait appelé. C’était un joli garçon de petite taille et aux traits délicats qu’on prenait parfois pour une fille, même dans son uniforme scolaire.

Yuuho Tanahara se tenait à côté d’Uchida. C’était une grande fille obstinée, mais devant Uchida, elle avait l’air d’une personne différente, montrant un côté beaucoup plus mignon. C’était l’archétype de la jeune fille amoureuse.

Tous les deux étaient au milieu des poteaux présents sur le terrain du gymnase qui était utilisé les filets de badminton. Même si c’est tout ce qu’ils devraient faire, pour une raison ou une autre, d’autres s’étaient tenus à l’écart avec une attitude amicale, comme s’ils ne voulaient pas s’en mêler. Quoi qu’il en soit, l’atmosphère disait de ne pas s’approcher du petit monde qu’ils avaient autour d’eux.

Ils n’étaient pas les seuls à dégager cette épaisse odeur de couple, les autres paires à l’intérieur du gymnase étaient exactement dans le même cas. Ils se serraient les coudes en s’exerçant à servir, se regardant dans les yeux au moment où cet instant les frappait — ils ne se rendaient probablement même pas compte de ce qu’ils faisaient, mais pour le très simple Kojou, cela le mettait mal à l’aise.

Kojou décida alors seul qu’il était naturel qu’Asagi soit en colère.

« Asagi va apparemment prendre son temps pour se changer. Vous feriez mieux de commencer l’entraînement sans nous. Je vais y aller doucement, » déclara Kojou.

« Je suppose qu’on va le faire. Désolé, mon pote, » déclara Uchida.

Agitant la main à Uchida, Kojou était sorti du gymnase.

Il était déjà plus de quatre heures de l’après-midi. Le ciel avait déjà commencé à se déplacer progressivement vers le coucher du soleil, mais le soleil de l’après-midi était fort et l’humidité était meurtrière.

Kojou, marchant le long du couloir de liaison à la recherche d’un endroit même légèrement frais, s’était assis sur le palier en haut de l’escalier de secours. Il ferma les yeux et s’allongea face vers le haut.

Alors…

« Senpai ? »

Il entendit une voix choquée qui venait du dessus de sa tête.

La voix lui paraissait familière, Kojou avait ouvert les paupières en une fente.

Ce qui remplissait son champ de vision, c’était des jambes minces vêtues de chaussettes bleu foncé.

Kojou s’était levé d’un coup, rencontrant les yeux de Yukina alors qu’elle le fusillait du regard, avec son expression froide. Apparemment, elle venait de descendre les escaliers d’urgence.

« Qu’est-ce que tu fais dans un endroit pareil ? » demanda Yukina en tenant la jupe de son uniforme scolaire. De l’attitude qu’elle avait émise, il y avait clairement un malentendu.

Kojou secoua rapidement la tête et désigna son propre uniforme de sport. « Comme tu peux le voir, je me prépare pour l’entraînement de badminton. J’attends que ma partenaire vienne. »

« Badminton… ? Pas de basketball ? » Les yeux de Yukina voltigeaient curieusement comme elle le demandait. Puis, sa voix s’était soudainement endurcie. « Par partenaire, tu veux dire une fille ? »

« Ouais, mais ce n’est pas comme si j’avais demandé à participer à un double mixte, » déclara Kojou.

Kojou, ayant l’impression d’être grondé pour une raison inconnue, s’était donné la peine de se défendre.

« Cela ne me dérange pas particulièrement, mais…, » déclara Yukina.

Tandis que Yukina le regardait droit dans les yeux, Kojou avait voulu répliquer : « Ai-je fait quelque chose dont je devrais me sentir coupable ? »

Se sentant nettement mal à l’aise, Kojou força un changement de sujet.

« Alors, que fais-tu ici, Himeragi ? C’est le campus du lycée, » déclara Kojou.

« … Vraiment ? Je suis désolée, Senpai, sais-tu où est la salle du club des pom-pom girls ? » demanda Yukina.

« La salle du club des pom-pom girls du lycée ? » demanda Kojou.

« Oui. Nagisa m’a demandé de venir, mais je me suis perdue en chemin, » déclara Yukina.

Kojou pensait que les mots qui sortaient de la bouche de Yukina étaient suspects. Le club des pom-pom girls de l’Académie Saikai était divisé en deux clubs : le club du collège et le club du lycée, chacun ayant ses propres activités, ils ne partageaient sûrement pas la même salle de club.

« Je sais où c’est, mais qu’est-ce qu’elle fait au club des pom-pom girls du lycée ? » demanda Kojou.

« C’est pour l’essayage des vêtements. Apparemment, elle veut emprunter des jupes de tennis, alors…, » déclara Yukina.

Yukina expira légèrement pendant qu’elle parlait, son expression devenant de plus en plus trouble. Sans doute qu’elle n’était pas faite pour les pom-pom girls. Même ainsi, c’était bien adapté pour la trop sérieuse Yukina d’aller s’habiller comme on lui avait dit.

« Je suppose que je vais l’aider un peu, » murmura Kojou à lui-même avec un sourire tendu. « Je te guiderai. C’est un peu compliqué là-bas, alors je ne suis pas sûr de pouvoir l’expliquer assez bien. »

« Je te remercie beaucoup. Mais, Senpai, tu n’as pas d’entraînement ? » demanda Yukina.

Kojou avait fait un signe de tête enjoué en réponse à l’air inquiet qui s’était emparé de Yukina.

« Ce n’est pas grave. Asagi n’est pas encore là, et je serai de retour dans moins de cinq minutes, j’en suis sûr, » déclara Kojou.

« Aiba… c’est ça ? Est-ce ta partenaire pour les doubles, Senpai… ? » Yukina, s’arrêtant soudain sur place, demanda cela d’une voix grave.

Sans raison apparente, Kojou se sentait nerveux.

« Euh, elle l’est, mais ce n’est pas ce que tu crois. Ce n’est pas comme si j’avais demandé à être jumelé avec Asagi, » déclara Kojou.

Il avait rapidement exprimé son excuse. Les yeux indifférents de Yukina regardèrent Kojou en soupirant. « Ce n’est pas que ça me dérange particulièrement. »

Entendant beaucoup de mécontentement dans ses paroles, Kojou leva les yeux vers le ciel et soupira.

***

Partie 6

Cela se passait sur le chemin du retour après avoir vu Yukina au club des pom-pom girls. Kojou Akatsuki se tenait dans un coin d’un distributeur automatique, tenant une canette de soda qu’il avait miraculeusement trouvée dans la poche de sa tenue de gym.

« Merde… Je me sens vraiment épuisé…, » murmura-t-il.

Il avait versé de la glace râpée sans saveur dans le gobelet en papier qu’il avait pris dans le distributeur automatique, le noyant dans le cola coloré. « Ne me regarde pas comme ça, » réprimanda Kojou en grondant le distributeur automatique qui ne répondit pas, puis s’était assis sur un banc, regardant paresseusement le soleil couchant.

Il s’était dit qu’Asagi devrait enfin avoir fini de se changer et d’arriver au gymnase à peu près à ce moment-là.

Bien qu’il ne soit pas vraiment ravi de retourner à cette atmosphère de couple rempli d’amour, Kojou savait que laisser Asagi là-bas toute seule ne ferait que créer plus de problèmes plus tard. Alors qu’il finissait la glace, Kojou s’était levé paresseusement, se dirigeant de l’arrière du gymnase vers l’entrée.

Un moment plus tard…

Le banc sur lequel Kojou s’était assis jusque-là s’était soudain gonflé et avait éclaté comme un ballon.

« … Hein ? »

Des fragments de bois brisé avaient frôlé la joue de Kojou pendant qu’ils volaient. Malgré cela, Kojou ne comprenait pas ce qui s’était passé.

Les restes du banc détruit étaient tombés au sol au ralenti. Sentant instinctivement le danger, ses cellules nerveuses de vampire s’étaient mises en marche. Même si ce n’était qu’un seul instant, il avait l’impression que cela s’était éternisé des dizaines de fois. En échange, ses yeux et sa peau le firent souffrir soudainement, comme s’ils étaient en feu. Ses sens maintenant aigus criaient à cause des rayons du soleil qui descendaient directement sur lui.

Mais d’un autre côté, sa sensation douloureusement aiguë avait alerté Kojou d’un nouveau danger.

Un rayon d’argent s’était dirigé vers les pieds de Kojou alors qu’il restait gelé en place.

Son corps bougea plus vite qu’il ne réfléchissait. Il avait heurté le sol, comme s’il plongeait la tête la première, esquivant le rayon juste à temps. Le rayon était en fait une flèche métallique. Avec la pointe aiguisée à l’avant et l’arrière d’une flèche d’arc de style occidental, elle plongea dans le sol aux pieds de Kojou.

« C’est quoi… ce bordel !? »

Incapable de comprendre que quelqu’un le visait, Kojou fixa du regard la flèche enfoncée dans le sol.

Le couloir de communication, l’escalier de secours, le gymnase, le toit, l’ombre de l’arbre commémoratif : Peu importe combien il regardait autour de lui, il n’arrivait pas à savoir où le tireur se cachait. Dans ces circonstances, ne sachant pas qui le visait ni d’où, Kojou avait commencé à paniquer légèrement. Alors…

La flèche qui s’était enfoncée dans le sol avait soudainement perdu sa forme. Comme un rideau qui avait perdu son fermoir, le métal était devenu une mince feuille et s’était étalé, prenant finalement une nouvelle forme.

La tôle s’était dilatée, pliée en angles aigus et s’était transformée en une forme complexe et bestiale.

« U-Un chien !? Non… un lion !? »

Avec une fausse vie insufflée en lui, le lion avait rugi comme une bête qui marchait sur Terre.

Il se déplaçait avec la bestialité d’un vrai prédateur. Sans aucun doute, c’était un monstre créé par des forces obscures.

Au moment où Kojou avait gémi, « Tu te fous de moi », la bête de métal avait bondi.

Kojou toucha le sol et roula une fois de plus, évitant les frappes des pattes avant de la bête.

Les pattes de la bête, construites en acier, compensaient leur manque d’épaisseur en étant aussi tranchantes et polies que des couteaux. S’il laissait ces choses le toucher, il serait tranché jusqu’à l’os.

« Il en a après moi !? Pourquoi… !? » demanda Kojou, avec sa respiration en lambeaux. Bien sûr, la bête n’avait pas répondu. Le seul son que sa gorge d’acier avait fait était un grognement rauque et menaçant.

Puis une autre bête était apparue derrière un Kojou agité. C’était en effet une autre bête métallique qui était apparue, un loup qui donnait des coups de pied sur les restes du banc. C’était probablement la flèche qui l’avait attaqué en premier, transformée en une nouvelle forme.

« C’est… mauvais…, » murmura Kojou.

Kojou serra avec force ses dents et gémit quand le lion et le loup d’acier l’attaquèrent en tenaille de l’avant et de l’arrière.

Bien que ces choses aient été produites par un rituel, l’agilité des monstres n’était pas différente de celle des vraies bêtes. Comme leur corps tout entier était comme des lames, ils auraient pu être plus dangereux que la vraie créature.

Bien sûr, si Kojou sortait son propre Vassal Bestial, il pourrait vaporiser des monstres de ce degré en un instant.

Mais s’il faisait ça, le bâtiment de l’Académie Saikai ne s’en sortirait pas non plus en douceur. S’il n’était pas prudent, cela pourrait toucher tous les élèves, effaçant toute l’école sans laisser de traces. Les capacités de Kojou en tant que vampire le plus puissant du monde étaient trop puissantes pour se déchaîner contre ce niveau d’adversaire.

Cela dit, il n’avait aucune chance de victoire au combat physique. Sous le soleil brûlant, les capacités physiques de Kojou étaient à leur nadir. La prochaine fois, si les deux bêtes attaquaient simultanément, il n’y aurait pas de fuite pour lui. Si Kojou devait être mortellement blessé, les chances de voir l’un des Vassaux Bestials de Kojou devenir fou à lier étaient très élevées.

« Qu’est-ce que je vais faire !? » se demanda Kojou. Mais avant de trouver une réponse, les deux bêtes avaient sauté en même temps.

Sachant au fond de lui qu’il ne pouvait pas les éviter, Kojou avait retenu son souffle.

« Senpai ! À terre ! » Avec un choix du moment de dernière minute, la voix d’une fille familière résonna.

Kojou se pencha aussitôt quand un vent rugissant sembla passer au-dessus de sa tête.

C’était la lance d’argent — un long manche entièrement en métal, dont la conception ressemblait à celle d’un avion de chasse avec des ailes balayées vers l’arrière.

La lance semblait voler tel un vent violent alors qu’elle perçait le lion d’acier qui attaquait Kojou, le brisant.

« Himeragi !? » s’écria Kojou.

Celle qui avait lancé sa lance et sauvé Kojou du danger était une collégienne de petite taille. C’était Yukina, avec qui il s’était séparé tout à l’heure au club. Ressemblant à une belle bête alors qu’elle se précipitait, elle dansait dans les airs avec la même force, donnant un coup de pied au loup d’acier qui visait le dos de Kojou.

Le loup, avec sa propre chair telle une lame tranchante, ressemblait, vu de profil, à une mince plaque de métal. Il avait été renversé par le puissant coup de pied de Yukina. La créature s’était écrasée contre le mur avec un rugissement.

« “Sekkarou” — ! » cria Yukina.

Yukina retira la lance qui était empalée dans le sol. D’un seul mouvement fluide, la pointe de la lance en argent s’enfonça dans le loup d’acier. Ce seul fait avait facilement brisé le loup en morceaux. On ne pouvait plus appeler cela un combat. La scène ressemblait à une simple lutte contre des parasites.

Sa capacité de combat dépassait de loin celle des monstres qui avaient poussé Kojou dans un coin. C’était la vraie forme de Yukina, celle d’une Chamane Épéiste de l’Organisation du Roi Lion.

« Ça va, Senpai ? » demanda Yukina en posant sa lance, regardant autour d’elle sans baisser sa garde.

Elle ne portait pas son uniforme scolaire habituel, mais plutôt une jolie tenue de pom-pom girl avec des lignes bleues sur fond blanc.

Kojou expira de fatigue, alors que son sentiment de tension avait été anéanti par la jolie tenue.

Les attaques de l’ennemi invisible semblaient s’être interrompues. Il n’avait pas l’intention d’impliquer Yukina, ou peut-être qu’il avait jugé qu’elle ne pouvait pas gagner. Quoi qu’il en soit, il n’y avait aucun doute qu’elle l’avait sauvé.

« Désolé, tu m’as vraiment sauvé la mise. Mais que fais-tu ici, Himeragi ? » demanda Kojou.

Kojou avait brossé la poussière de son corps en se levant.

Yukina avait continué à serrer le bâton pendant que son dos se raidissait.

« Je suis désolée, Senpai. Le shikigami que j’avais placé sur toi pour t’observer est venu m’informer qu’il avait détecté une énergie rituelle offensive, alors j’étais inquiète et je suis venue…, » déclara Yukina.

« Ha ? Observer ? C’est quoi, un shikigami ? » demanda Kojou.

Comme Kojou le demanda brusquement, Yukina détourna les yeux et les épaules tremblantes.

Regardant Yukina placée sur le côté, Kojou avait continué à regarder sans un mot quand Yukina avait pris la peine de s’éclaircir la gorge et de lever le visage. Elle avait poussé sa poitrine comme si elle disait, ce n’est rien dont je devrais me sentir coupable.

« … C’est ma mission ! » déclara Yukina.

« Attends une seconde !! Tu veux dire que tu m’as observé tout ce temps !? Pas seulement aujourd’hui !? » demanda Kojou.

« Calme-toi, s’il te plaît. Je respecte ta vie privée, Senpai, » déclara Yukina.

« Comment puis-je être calme à ce sujet ? » demanda Kojou.

Kojou s’était gratté la tête en criant. Il avait baissé sa garde, pensant que dernièrement elle avait été plus ouverte, mais elle était en effet une harceleuse accréditée au niveau national avec une personnalité follement trop sérieuse.

Ne sachant tout simplement pas comment ce shikigami fonctionnait et se déplaçait, Kojou s’était vraiment demandé dans quelle mesure elle lui laissait sa vie privée. Mais il ne pensait pas qu’elle le regardait dans son bain ou aux toilettes. Quoi qu’il en soit, aussi jolie soit-elle, Kojou n’était pas enclin à se réjouir qu’elle jette un coup d’œil dans sa vie privée.

« Plus important encore, Senpai, as-tu une idée de qui en a après toi ? » demanda Yukina en s’éclaircissant la gorge une fois de plus.

Kojou grimaça et secoua la tête.

Comme Yukina demandait clairement que l’incident d’observation soit mis de côté jusqu’à plus tard, la question en jeu était l’existence d’un ennemi qui avait attaqué Kojou.

« Alors c’est après moi qu’ils en avaient ? » demanda Kojou.

« Il semblerait que oui… mais plutôt qu’un sort te ciblant, Senpai, c’est…, » commença Yukina.

Murmurant comme si elle parlait toute seule, Yukina ramassa l’un des fragments de la bête d’acier qu’elle avait détruit. C’était un mince morceau de métal bon marché. Kojou avait gémi sous le choc en le regardant.

« … Des boîtes de conserve ? C’est ce qu’étaient vraiment les monstres qui m’ont attaqué ? » demanda Kojou.

« Ce sont aussi des shikigamis. À l’origine, ils étaient destinés à transmettre des messages à d’autres personnes sur de longues distances plutôt que d’être utilisés de façon offensive comme ceci, mais…, » murmura Yukina.

Tandis que Yukina murmurait à elle-même en soupirant, elle avait plié le fragment de métal qu’elle avait ramassé. Elle changea sa forme en deux triangles se rencontrant, elle flotta doucement dans l’air. Elle voulait apparemment qu’il agisse comme un papillon.

Le papillon en herbe, ressemblant à quelque chose qu’un enfant du primaire griffonnerait, voltigeait pendant un certain temps alors qu’il volait tout autour en fonction de la brise, mais finalement sa force s’était affaiblie et il était retombé au sol. Yukina fit un petit soupir en le regardant.

« Il semblerait que le lanceur de sorts se soit enfui. Je pensais pouvoir tracer l’énergie du rituel, mais…, » déclara Yukina.

« Je vois. » Comme Kojou n’aurait pas compris, même si elle avait expliqué les détails, il hocha la tête dans sa direction. L’essentiel, selon lui, c’est qu’elle avait essayé de traquer qui que ce soit et qu’elle avait échoué. Si même les arts rituels de Yukina ne pouvaient pas les traquer, Kojou ne pouvait pas les poursuivre.

En regardant par-dessus le banc détruit, Kojou haussa les épaules — ce n’était pas comme si c’était sa faute — et Yukina poussa également un soupir apparemment découragé. L’expression de Yukina devint soudain pâle.

Elle regardait un porte-vélos derrière le gymnase. Deux écolières de passage sur le chemin du retour de l’école montraient du doigt une clôture en direction de Kojou et Yukina, parlant de quelque chose.

« … Himeragi ? » demanda Kojou.

« Je suis désolée, Senpai. Elles ont vu Sekkarou. Je dois les capturer et effacer leurs souvenirs immédiatement —, » déclara Yukina.

« Attends, Himeragi ! » déclara Kojou.

Kojou s’était rapidement déplacé pour arrêter Yukina, qui tenait sa lance et semblait prête à s’envoler.

« Tu n’es pas obligée de faire ça ! Pour te le dire franchement, tu n’as pas à t’inquiéter ! » déclara Kojou.

« Comment peux-tu l’ignorer comme ça !? » Yukina avait regardé vers lui avec une expression qui n’avait pas de place pour le doute. Pour Yukina, une étudiante exceptionnelle et trop sérieuse qui était idéale pour faire face aux problèmes lorsqu’ils survenaient, c’était sa plus grande faiblesse. Kojou avait essayé de la calmer tout en lui montrant les choses calmement.

« Euh, mais en agitant ça dans ces vêtements, elles vont penser que tu es juste une fille qui aime vraiment le cosplay, » déclara Kojou.

« Euh… Hmm…, » murmura Yukina.

Regardant comment elle était habillée, Yukina, incapable de protester, avait tenu sa langue.

Un uniforme de pom-pom girl associé à une lance d’argent à l’allure futuriste. Il n’y avait à peu près personne qui regardait une collégienne habillée comme ça et qui se disait : « Oh, c’est une Mage d’Attaque Anti-Démon d’une organisation secrète ! » Alors même qu’elle n’était pas satisfaite à l’idée d’être confondue avec une cosplayeuse, Yukina avait renoncé à poursuivre les témoins oculaires.

Kojou avait fait un sourire tendu en regardant le regard déprimé de Yukina.

« Himeragi, ces vêtements, est-ce que c’est… ? » demanda Kojou.

« J’ai couru au milieu de l’essayage de la tenue. S’il te plaît, ne me fixe pas autant, » déclara Yukina.

Yukina fixa Kojou en tenant le bord de sa jupe plissée. La jupe étant si courte, on pouvait voir ce qu’il y avait sous la jupe dès qu’elle faisait le moindre mouvement.

« Mais tu, euh, as-tu quelque chose en dessous, » demanda Kojou.

« Même ainsi, tu ne peux pas regarder, Senpai. Tu as un regard pervers en ce moment sur ton visage, » déclara Yukina.

« Hé, c’est malpoli, » déclara Kojou.

Kojou se tordait la bouche, dérangé par des paroles aussi injustes. Malgré tout, il savait qu’il devait la remercier d’être venue à son secours alors qu’elle portait une tenue aussi embarrassante. « Eh bien… Bref, je vais bien, grâce à toi. »

« Ce n’est rien du tout. C’est ma mission, après tout. » Yukina parlait sur le même ton brutal que d’habitude. Tandis qu’elle faisait la réponse attendue, Kojou avait sorti la langue un tout petit peu.

« Ah… et ces vêtements te vont bien, » déclara Kojou.

« Hein !? » s’exclama Yukina.

À cet instant, les joues de Yukina semblaient exploser d’un rouge éclatant. Incapable de se comporter calmement, elle vérifia que sa tenue était à nouveau en ordre avant qu’un étrange mélange d’embarras et de colère ne surgisse sur son visage en disant « merci » d’une voix qui menaçait de disparaître complètement.

Elle semblait timide et heureuse. Kojou la regarda, pensant que c’était drôle comme ses réactions ressemblaient à celles d’un chiot.

 

 

Nagisa aimait à dire que les filles devraient être complimentées chaque fois qu’elles portaient quelque chose de différent. Tout ce que Kojou avait fait, c’était d’obéir fidèlement à ses paroles, mais après avoir vu cette expression sur le visage de Yukina, les conseils de sa jeune sœur bruyante s’étaient avérés très utiles.

« Cet origami d’avant… Tu as dit que c’est un moyen d’envoyer des lettres, non ? » demanda Kojou.

Tandis que Yukina était sous le choc, les yeux de Kojou s’étaient posés sur le sol. Il y avait quelque chose qui était tombé au milieu des restes brisés du banc. Comme si elle avait retrouvé ses esprits, Yukina hocha la tête.

« Oui. C’est vrai, mais…, » déclara Yukina.

« Celle-ci m’est donc adressée, » déclara Kojou.

Avec ces mots, Kojou ramassa une lettre scellée et flambant neuve. La lettre ornée, brodée de feuilles d’or, avait été soigneusement scellée avec de la cire de couleur argentée.

L’expression de Yukina s’était durcie quand elle avait remarqué avec quel sceau elle était marquée.

« Ce sceau… Ce n’est pas possible…, » déclara Yukina.

« Himeragi ? » Voyant Yukina nier cela, Kojou parla d’une voix perplexe. « Sais-tu de qui vient cette lettre ? J’ai un mauvais pressentiment à ce sujet… »

« Oui… mais ça ne devrait pas être…, » déclara Yukina.

Pendant que Yukina parlait, elle s’était mordu la lèvre. Le sceau était orné d’un symbole de serpent et d’épée. Cela semblait très digne, mais Kojou trouvait que le design était plutôt effrayant.

Kojou attendait qu’elle poursuive son explication alors qu’ils regardaient tous les deux la lettre scellée.

« — Kojou ? » C’est alors que quelqu’un avait appelé le nom de Kojou de façon inattendue.

En entendant la voix de Kojou, l’une de ses camarades de classe avait sorti sa tête de l’ombre de l’immeuble. C’était une étudiante avec des traits de visage élégants. Kojou et Yukina avaient dégluti alors que leurs visages se rencontraient.

« Qu’est-ce que tu fais à faire du grabuge ici ? Tu as du culot de ne pas venir à l’entraînement, de me laisser là avec les couples amoureux et de me faire venir te chercher…, » déclara Asagi.

« A-Asagi ? » demanda Kojou.

L’expression choquée que Kojou avait ressentie sur son visage était due à la tenue inattendue qu’elle portait.

C’était un polo sans manches avec une jupe de tennis d’un blanc épouvantablement court et pur. Ce n’était pas étrange pour un uniforme de badminton — et pourtant, étant donné que ce n’était pas un match public, mais plutôt un entraînement pour un simple festival sportif, Kojou avait trouvé cela terriblement révélateur.

Pour une raison inconnue, Asagi était sans expression lorsqu’elle regarda Kojou et Yukina alors qu’ils s’arrêtaient. Alors…

« … C’est quoi cette lettre ? » demanda Asagi.

« Hein ? » demanda Kojou.

Comme elle l’avait demandé d’une voix calme, Kojou avait finalement compris la gravité de la situation.

Un garçon et une fille se rencontrant derrière le gymnase après les cours, évitant les regards indiscrets, et tenant dans leurs mains une lettre inhabituellement extravagante. En regardant cela, elle avait dû penser que soit Kojou, soit Yukina donnait la lettre à l’autre…

D’après la pensée de tout observateur impartial, c’était quelqu’un qui confessait tendrement son amour.

« Ai-je interrompu quelque chose ? » demanda Asagi avec une expression maladroite. Son attitude était celle d’une personne en état de choc.

Kojou et Yukina secouèrent vigoureusement la tête en même temps.

« Non, tu ne le fais pas. J’ai rencontré Himeragi ici à cause d’un incident imprévisible, d’une situation d’urgence, ce n’est absolument pas qu’on échange une lettre ici, pas vraie, Himeragi ? » demanda Kojou.

« En-En effet. Cette tenue est pour les pom-pom girls de classe, je ne la porte certainement pas, car elle convient aux goûts d’Akatsuki-senpai…, » déclara Yukina.

Même si c’étaient les faits réels, même Kojou les trouvait étrangement peu convaincants. Il se demandait s’il serait normalement plus heureux d’être pris en sandwich par deux filles en jupe courte.

Asagi maintenait une étrange réserve tandis que Kojou et Yukina continuaient à expliquer en tandem. « Ça suffit, » dit-elle en soupirant longtemps. « C’est bon, peu importe. Ça n’a rien à voir avec moi, de toute façon. »

Pendant qu’elle parlait, elle avait fait un petit sourire. Son sourire était parfait, mais Kojou ne sentait pas les fantaisies habituelles d’Asagi, au contraire, son visage souriant semblait vidé de toute émotion.

Tout en gardant ce sourire artificiel sur son visage, Asagi avait tourné le dos à Kojou et Yukina.

« Ah, hey, Asagi… ! » déclara Kojou.

Ignorant les paroles de Kojou voulant la faire rester là, Asagi avait à nouveau disparu dans l’ombre de l’immeuble.

Kojou pensait, comme étrangement détaché, qu’Asagi s’était inquiétée pour lui, et tout cela, seulement pour subir un choc lourd dû à un malentendu complet.

« Oh, merde. Elle va penser qu’elle a quelque chose sur moi, c’est sûr. Je vais devoir lui payer quelque chose ou la soudoyer avec de la nourriture pour qu’elle se taise à nouveau… et pourquoi était-elle habillée comme ça, de toute façon ? » demanda Kojou.

Kojou se tenait sa tête, essayant de comprendre pourquoi Asagi était partie étonnamment facilement.

En voyant Kojou comme ça, Yukina le regarda avec un visage en quelque sorte plein de reproches.

« Senpai…, » marmonna-t-elle avec un faible soupir mêlé.

***

Partie 7

L’homme se trouvait dans un coin d’une pièce morne où l’on voyait du métal nu.

Le seul son dans ce laboratoire silencieux et peu éclairé était celui des ventilateurs de refroidissement. La température était assez basse pour que les expirations se transforment en brume blanche, sans doute pour protéger les circuits électroniques entassés dans la pièce comme un bosquet dense d’arbres.

L’image affichée par le moniteur central énumérait des caractères étranges d’origine inconnue.

Sans aucun avertissement, les portes de séparation du laboratoire s’étaient soudainement ouvertes.

Un groupe de trois personnes étranges avait fait irruption.

Deux d’entre eux étaient des hommes en costume noir. La troisième était une jeune femme portant une robe couverte de volants. La femme avait un visage de chérubin comme celui d’une petite fille.

La chaise de l’homme avait grincé lorsqu’il s’était retourné pour faire face aux intrus qui n’étaient pas à leur place.

« Qui êtes-vous, vous autres ? C’est une zone classée de Rang 6. L’entrée de personnel non autorisé est strictement —, » commença l’homme.

Les fixant comme un oiseau de proie dont le nid avait été perturbé, il menaça les hommes en noir. Mais son expression était devenue rigide au milieu de la phrase. Il avait remarqué les badges d’identification que portaient les hommes en costume.

« … Je présume que vous êtes Yousuke Makimura de la Kano Alchemical Industries Research Branch, » l’un des hommes en costume noir parlait d’une voix impersonnelle, dépourvue d’inflexion.

Les insignes identifiant les hommes en costumes portaient de simples cercles magiques d’étoiles à cinq branches pour leur protection personnelle. Ces hommes avaient été identifiés comme étant des Mages Anti-Démon nationaux affectés à l’Unité Spéciale Anti-Démon de la Police du District qui s’occupait des délits nationaux de sorcellerie.

« Chef de la recherche Makimura. Nous pensons que ce laboratoire utilise du matériel en violation de la Loi sur le contrôle des importations de produits de sorcellerie. Nous exigeons que vous nous remettiez toutes les données de recherche sur place ainsi que tous les matériaux, » déclara le même homme en noir.

« Violation de la loi sur le contrôle des importations ? » demanda Makimura.

L’homme nommé Makimura se leva de son siège, la sueur apparaissant sur son front.

« Attendez. Il doit y avoir une erreur ! C’est un laboratoire qui décode les langues anciennes. Nous avons l’autorisation de la Société d’Administration. Si vous parlez au directeur…, » commença Makimura.

« Il y a quelques jours, nous avons appréhendé un subordonné de Kristof Gardos, » l’autre homme en costume noir avait sorti un pistolet, informant le chercheur d’une manière dominatrice.

Makimura avait fortement inhalé.

« Je vous place en état d’arrestation en vertu de l’article 5 du Code spécial de sécurité publique du district. Tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous devant un tribunal. Vous devriez faire attention à ce que vous dites et faites, » déclara le deuxième homme.

« Argh… ! » Makimura avait gémi.

L’homme en costume noir avait pris le bras de Makimura et lui avait passé les menottes… Mais à ce moment, l’homme en costume noir avait été assailli par un impact puissant.

Comparé à l’élégant Makimura, l’homme en costume noir avait une carrure beaucoup plus robuste. Il y avait une différence de poids entre eux d’une quarantaine de kilogrammes environ. Mais lorsque Makimura secoua le bras de l’homme en costume noir, c’était ce dernier qui s’envola. L’homme en noir s’écrasa contre un pilier voisin, expirant d’angoisse alors qu’il s’effondrait sur le sol.

Tout comme certains reptiles modifiaient le pigment de leurs cellules selon leur humeur, Makimura était capable de changer la nature même de ses cellules selon sa propre volonté. C’était un homme bête, un loup-garou. Le chercheur s’était transformé en un redoutable berserker avec la force et la violence d’une bête féroce.

L’autre homme en noir avait instantanément tourné son pistolet sur Makimura. D’un mouvement bien entraîné, il avait tiré des balles d’alliage d’argent et d’iridium, communément appelées Tueurs de Lycan. Cependant, Makimura avait glissé devant la pluie de balles et avait fait tomber le pistolet des mains de l’homme en costume noir.

Il fit alors un saut puissant vers les portes de séparation encore ouvertes, tentant de s’enfuir à l’extérieur.

« C’est donc un démon non enregistré… un sympathisant du Front de l’Empereur de la Mort Noire ? » la femme qui surveillait le dos de Makimura alors qu’il fuyait, Natsuki Minamiya, murmura comme si elle s’ennuyait beaucoup. Puis, elle avait discrètement donné son ordre.

« … Astarte, ça ne me dérange pas si tu es un peu dure. Arrête-le. »

« Acceptez. »

Comme pour empêcher Makimura de s’échapper, une petite fille aux cheveux indigo se tenait devant les portes de séparation.

Elle avait une peau blanche, comme translucide et des yeux bleus. Elle avait un visage parfaitement symétrique. La jeune fille donnait l’impression d’être un être vivant, mais elle semblait fragile et féerique.

La fille portait une robe à tablier avec un grand espace ouvert sur le dos. En voyant la jeune fille sans arme, le Makimura bestial avait férocement dénudé ses crocs en riant.

« Homoncule !? Tu crois que cette gosse peut m’arrêter… ! » s’exclama Makimura.

« … Exécution de “Rhododactylos.”, » déclara Astarte.

L’instant d’après, c’était comme si la chair d’Astarte était déchirée par l’aile qui sortait de son dos et qui brillait des couleurs de l’arc-en-ciel. L’onde de choc avait déformé l’air à l’intérieur du labo. C’était une impulsion d’énergie magique si dense qu’elle gagnait en solidité et en masse physique. Baigné dedans à bout portant, Makimura hurla.

« Quoi… !? »

L’aile qui avait poussé du dos de la jeune fille avait pris la forme d’un bras géant. C’était le bras d’un golem, couvert d’une armure aux couleurs de l’arc-en-ciel. Avec toute la force d’un canon, son poing avait frappé de plein fouet le loup-garou.

Le son gênant et brutal donnait l’impression que l’os et la chair étaient écrasés.

C’était une force qui aurait sûrement tué n’importe quel humain normal. Mais la petite fille nommée Astarte n’avait apparemment rien caché.

« Un… un Vassal Bestial !? C’est de la folie… Pourquoi un homoncule a-t-il un Vassal Bestial… !? » s’écria Makimura.

Crachant une masse de sang, Makimura fit un gémissement frêle qui semblait délirant.

Les yeux sans expression d’Astarte, comme la surface d’un lac calme, regardaient Makimura de haut alors que le bras s’étendant de son dos retenait son corps. La vraie nature de ce bras géant était une masse sensible d’énergie magique connue sous le nom de Vassal Bestial.

Il s’agissait de bêtes appelées d’un autre monde, prenant une forme physique en échange de la consommation de la force vitale de leur hôte.

Au fur et à mesure que les familiers agissaient, c’étaient les pires des pires, épuisant soudainement la force vitale de leurs contractants et leur accordant la mort.

Mais de la même façon, la capacité de combat d’un Vassal Bestial était immense. C’est parce que les vampires pouvaient utiliser les Vassaux Bestiales qu’ils étaient les plus redoutables de tous les démons.

Et seuls les vampires, aux forces de vie « négatives » infinies, pouvaient apprivoiser les Vassaux Bestiales…

Astarte était la seule et unique exception. Rhododactylos était un Vassal Bestial artificiel construit pour un certain objectif par un apôtre armé lotharingien.

Makimura, incapable de maintenir son état bestialisé en raison des blessures graves qu’il avait subies, toussa violemment lorsqu’il revint à sa forme humaine. Se précipitant pendant qu’ils en avaient l’occasion, les hommes en costumes noirs avaient attaché un anneau de métal autour du cou de Makimura. Il s’agissait d’un dispositif de rétention anti-démon qui utilisait un faible courant électrique pour jeter le système nerveux dans le désarroi et prévenir la bestialisation.

« … Je suis vraiment désolé, instructrice Minamiya. Votre aide a été inestimable. »

L’un des hommes en noir, appuyé sur son bras cassé, déclara des mots de remerciement à Natsuki. Elle secoua élégamment la tête en ouvrant un éventail à volants noirs.

« Pas besoin de me remercier. Ce n’est pas moi qui ai fait le travail, » déclara Natsuki.

Tandis qu’elle parlait, elle reniflait d’un air ennuyé. Bien que sa façon de parler soit dominatrice, sa voix trop enfantine et sa grâce naturelle l’empêchaient de la faire voir comme grinçante.

En effet, les hommes en noir se réjouissaient de la froideur avec laquelle elle les traitait. Tout cela faisait partie du charme de Natsuki.

Entre-temps, elle avait regardé plusieurs photographies réparties sur le bureau de Makimura.

Il s’agissait de photos de tablettes de pierre qui avaient été extraites de ruines anciennes. Gravés sur les faces des tablettes de pierre étaient les mêmes symboles indéchiffrables que ceux affichés sur l’écran du laboratoire. Mais en regardant simplement ces lignes de texte, elle comprenait instinctivement.

Ce qui était écrit ici contenait une puissance terriblement dangereuse…

« Voici donc ce que le Front de l’Empereur de la Mort Noir s’est donné la peine de faire entrer clandestinement depuis l’Asie du Sud-Est… Ce n’est pas une simple relique après tout… Où est l’original ? » demanda Natsuki.

« … Impossible de confirmer la cible. Hypothèse : La cible a déjà été retirée de cette installation, » répondit Astarte avec désinvolture aux réflexions de Natsuki. La fille homoncule avait pointé du doigt une caisse d’expédition en métal laissée dans un coin de la pièce.

Bien qu’il s’agisse d’un type spécial sur lequel étaient empilés des sceaux rituels, il était vide, les sceaux étaient déjà brisés.

Quelqu’un avait dû prendre les tablettes de pierre contenues ailleurs.

« En d’autres termes, est-ce donc trop tard ? » demanda Natsuki.

Alors qu’elle se demandait ça d’une voix déplaisante, Natsuki leva les yeux vers l’image affichée par l’écran.

D’une manière ou d’une autre, Makimura avait utilisé les installations de recherche de sa propre entreprise pour déchiffrer la tablette de pierre. Mais le déchiffrage n’était pas encore terminé, la seule chose qu’il avait réussi à déchiffrer était un seul mot. L’expression de Natsuki s’aiguisa lorsqu’elle regarda les caractères qui formaient le mot : « Nalakuvera ».

« C’est de la folie… À quoi pensez-vous, Kristof Gardos… ? » demanda Natsuki.

Makimura, toujours par terre, avait fait un rire aigu en écoutant leur conversation.

C’était le rire bruyant et fou d’un terroriste qui aspirait à la destruction mondiale.

***

Partie 8

Kojou Akatsuki marchait le long d’un sentier en bord de mer éclairé par les rayons du soleil du soir.

À côté de lui se trouvait Yukina, portant son étui de guitare sur son dos. En raison des caprices d’Asagi, qui avait transformé l’entraînement pour le festival sportif en un fiasco, ils avaient fini par rentrer chez eux ensemble.

Tous deux faisaient un petit détour, se dirigeant vers un supermarché près de l’endroit où ils vivaient. Grâce au retour tardif de Nagisa lié à son activité du club, l’achat des ingrédients pour le souper sur le chemin du retour était devenu un rituel quotidien pour eux.

« L’expéditeur est… Dimitrie Vattler, duc d’Ardeal… C’est qui, lui ? » En chemin, Kojou lui avait donné l’enveloppe scellée qu’ils avaient ramassée derrière le gymnase, marmonnant avec un regard perplexe.

La lettre laissée par le shikigami en métal était une invitation à une fête qui devait avoir lieu ce soir-là. Apparemment, c’était une grosse affaire sur un bateau de croisière amarré sur l’Île d’Itogami.

Mais Kojou ne connaissait personne du nom de Vattler. Bien sûr, il ne pouvait pas imaginer pourquoi il avait été invité à cette fête. Il avait un mauvais pressentiment.

« La principauté d’Ardeal est l’un des territoires autonomes de l’Empire du Seigneur de Guerre, » expliqua Yukina sur un ton grave. Kojou et Yukina venaient d’arriver au supermarché où ils allaient. L’air conditionné qui sortait de l’entrée automatique de l’entrée était vraiment bon.

Kojou avait répondu par une question alors qu’il posait un panier sur un chariot laissé près de l’entrée. « L’Empire du Seigneur de Guerre ? »

« Un Dominion en Europe de l’Est… la terre sous le contrôle du Premier Primogéniteur. Tu connais le Premier Primogéniteur, le “Seigneur de Guerre Perdu”, oui ? » demanda-t-elle.

« J’ai déjà entendu le nom. C’est un conquérant-vampire servi par soixante-douze Vassaux Bestiales… n’est-ce pas ? » demanda Kojou.

Kojou était sidéré que quelque chose d’aussi absurde soit sorti de sa propre bouche.

Après tout, même un seul Vassal Bestial contrôlé par un vampire de classe primogéniteur pouvait anéantir une ville ou deux, ils étaient de véritables monstres. Il n’arrivait pas à s’imaginer en contrôler des douzaines.

Il avait l’impression qu’il devait douter qu’un tel être puisse même exister.

C’était en vérité Kojou, pensant de telles pensées, qui était le vampire le plus puissant du monde, surpassant même le Premier Primogéniteur, mais…

« On dit que le Traité de Terre Sainte qui a permis la coexistence de l’homme et du démon n’a été rendu possible qu’avec la coopération de ce dirigeant. Sinon, les Primogéniteurs restants n’auraient probablement jamais participé aux négociations, car même parmi les autres Primogéniteurs, l’Empire du Seigneur de Guerre jouit d’une supériorité militaire écrasante et est le plus ancien Dominion, » expliqua-t-elle.

Yukina expliquait le pouvoir effrayant du Premier Primogéniteur comme si elle blâmait le nonchalant Kojou. Kojou haussa les épaules avec désinvolture. En tout cas, le problème qui se posait à lui n’était pas le « Seigneur de Guerre Perdu » en lui-même.

« … Donc, ce Vattler est le serviteur du Premier Primogéniteur ? » demanda Kojou.

« C’est à ça que ça revient. C’est un noble dirigeant son propre territoire autonome, c’est-à-dire un parent du Premier Primogéniteur lui-même, ce que l’on pourrait appeler un vampire pur sang, » répondit Yumina.

« Hmmmm, » murmura Kojou.

S’appuyant sur la note que Nagisa lui avait donnée, Kojou avait mis des légumes et des fruits dans le panier. Les ingrédients étaient suffisants pour nourrir trois personnes, assez pour Kojou, Nagisa et Yukina. C’était le résultat de Nagisa, bien consciente que Yukina vivait seule, l’invitant avec vigueur à dîner.

Nagisa était après tout ravie d’avoir quelqu’un à qui parler pendant les repas. Kojou était très reconnaissant à Yukina d’avoir joué le rôle d’auditrice à sa place. Tout d’abord, le fait d’observer Kojou étant l’objectif principal de Yukina, ce n’était pas vraiment une mauvaise affaire pour elle non plus. Ainsi, comme tous leurs intérêts coïncidaient, il était devenu habituel à un moment donné que Yukina vienne dans l’appartement de la famille Akatsuki pour le souper.

« Pourquoi un gros bonnet comme lui vient-il sur l’Île d’Itogami ? Hé… c’est trop d’oignons ! » déclara Kojou.

« Tu ne dois pas être pointilleux avec tes légumes. Aussi, je pense que son but est probablement de te rencontrer, Senpai, » déclara Yukina.

« N’est-ce quand même pas parce que je suis le 4e Primogéniteur… ? » demanda Kojou.

« Il n’y aurait vraiment pas d’autre raison… et Senpai, ne remets pas les oignons verts sur le comptoir. Tu n’es pas un enfant, » répliqua Yukina.

Yukina soupira quand Kojou ramena les oignons jaunes qui étaient verdâtres et qu’il détestait dans le chariot. Ils ressemblaient à un jeune couple récemment marié qui s’entendait bien pendant qu’ils faisaient leurs courses, mais aucun d’eux ne s’en était rendu compte. Ils essayaient de converser sur ce qui était un sujet assez sérieux.

En fait, entre les employés du magasin et les voisins, les gens murmuraient des rumeurs telles que « Vivent-ils ensemble ? » « Pas frère et sœur ? » « Il semble vivre avec une autre fille… » « Ne me dites pas que les trois vivent ensemble… » Mais bien sûr, les personnes concernées n’avaient rien remarqué de tout cela.

« Pourquoi un vampire de quelque part en Europe connaît-il mon nom… ? » demanda Kojou.

Kojou murmura en étant insatisfait alors qu’il vérifiait le nom auquel l’invitation était adressée une fois de plus.

Yukina, se sentant apparemment coupable, avait poussé un soupir.

« Je crois qu’il a remarqué ton existence à cause de l’incident de l’apôtre armé Lothargien ces derniers jours. C’est parce que tu as brûlé la ville comme tu l’as fait…, » déclara Yukina.

« Ce n’était pas moi ! Ce Vassal Bestial l’a fait tout seul ! » déclara Kojou.

« Bien sûr, je comprends cela… mais le monde en général ne pense peut-être pas ainsi, » déclara Yukina.

« Merde… Ce n’est pas une raison pour qu’un morceau d’origami vienne m’attaquer. A-t-il fait tout ce chemin depuis si loin pour se battre ? » demanda Kojou.

Kojou avait fait un gémissement de dégoût en se souvenant des bêtes d’acier qu’il avait rencontrées à l’école. Il y était parvenu sans encombre parce que Yukina était venue, mais si elle ne l’avait pas fait, les Vassaux Bestiales de Kojou auraient pu devenir fous furieux.

Pour quelqu’un qui connaissait bien le danger posé par les Vassaux Bestiales du Primogéniteur, c’était une façon assez violente de faire les choses.

« Une déclaration de guerre… peut-être ? » demanda Yukina.

Les lèvres de Yukina formèrent des mots sinistres. Un Primogéniteur ayant autorité sur un Dominion était traité de la même façon qu’une armée nationale en vertu du droit international. Kojou, bien qu’il n’ait pas d’acolytes ni de frères, n’avait pas fait exception sur le plan technique.

« Bien que ce ne soit pas impossible, je crois qu’il cherche la négociation pour le moment…, » déclara Yukina.

« Donc je dois répondre à cette invitation de toute façon, hein… ? » demanda Kojou.

Alors que Kojou déployait l’invitation en parlant, un regard perplexe se fit sur son visage en lisant le contenu.

Tandis que Yukina levait les yeux, elle leva les yeux d’un air dubitatif vers Kojou.

« Senpai ? Qu’est-ce qu’il y a ? » demanda Yukina.

« Euh… c’est écrit ici que je dois amener ma partenaire…, » répondit Kojou.

« Partenaire ? » Yukina avait fait un « Ahhh » et elle avait fait un signe de tête affirmatif. « Maintenant que j’y pense, c’est la norme d’amener sa conjointe ou son amante lorsque vous assistez à une fête dans l’Ouest. »

« … Hé, c’est un gros problème, comme ça, sans prévenir. Qu’est-ce qu’un célibataire est censé faire ? » demanda Kojou.

« Dans ces circonstances, peut-être pourrais-tu demander à une connaissance d’agir comme substitut ? » demanda Yukina.

« Substitut… tu dis, » déclara Kojou.

Les lèvres de Kojou se tordaient comme s’il était en conflit. Un substitut pour une conjointe devrait être quelqu’un de proche en âge, un membre de la famille ou un bon ami, et en outre, du sexe opposé…

« Je ne peux pas emmener Nagisa à une fête organisée par des vampires, et Asagi a l’air en colère à cause de quelque chose, et de toute façon, je ne veux pas vraiment la mêler dans quelque chose de mauvais…, » déclara Kojou.

« Je suppose que non, » Yukina s’était légèrement éclairci la gorge et regarda Kojou. « Je pense que tu n’as pas d’autre choix que de choisir quelqu’un qui connaît ta vraie nature et qui peut gérer des situations dangereuses. »

« Supposons que oui, » déclara Kojou.

Kojou baissa les yeux et poussa un soupir de réticence devant la gêne occasionnée.

« Je n’aime pas l’impliquer, mais… peut-être que je peux essayer de demander à Natsuki, » déclara Kojou.

« Qu-Quoi ? » s’exclama Yukina.

Les yeux de Yukina s’ouvrirent avec stupeur et se retrouvèrent paralysés. Kojou n’avait pas remarqué ça alors qu’il se grattait la tête.

« J’ai peur de la faveur qu’elle me demandera plus tard, mais ce n’est ni le moment ni l’endroit pour se plaindre… Je parie qu’elle viendra à une simple fête si l’un de ses adorables élèves le lui demande sérieusement, » déclara Kojou.

« … Comment le nom de Mme Minamiya a-t-il pu été mentionné ? » demanda Yukina à voix basse. Il n’y avait pas eu de grand changement dans l’expression de son visage, mais chaque mot était tellement chargé d’électricité qu’il donnait une impression très épineuse. Elle avait l’air contrariée pour une raison ou une autre.

« Euh, je veux dire, elle sait tout de mon état, elle a sa certification de mage d’attaque anti-démon, donc elle est appropriée, non ? Bien que je pense qu’avoir l’air un peu trop jeune pourrait être un problème, » répondit Kojou.

« Je crois qu’il y a quelqu’un d’autre qui a l’âge approprié, qui connaît ton état, et qui a aussi la certification de mage d’attaque anti-démon, Senpai, » murmura Yukina d’un ton brutal, presque comme si elle parlait à elle-même. En écoutant Kojou, il avait finalement compris la raison de la colère de Yukina.

« Puis-je te demander de venir ? Cela ne serait-il pas un problème avec l’Organisation du Roi Lion ? » demanda Kojou.

« On ne peut pas faire autrement. Dans ce cas, je pense que te laisser hors de ma vue serait le plus gros problème, Senpai, » déclara Yukina.

Yukina parlait froidement, comme pour cacher son rougissement. Voyant son humeur se rétablir, Kojou poussa un soupir de soulagement et fit un sourire tendu.

« Je vois. Désolé, » déclara Kojou.

« Non, t’observer est après tout ma mission, Senpai… ah ! » s’exclama Yukina.

Après avoir parlé sur un ton de plaisanterie, l’expression de Yukina s’était soudainement assombrie.

« Himeragi ? Il y a donc un problème ? » demanda Kojou.

« Je suppose que ça… pourrait être un problème. Je n’ai pas de vêtements à porter pour une fête, » déclara Yukina.

Yukina avait l’air sombre quand elle s’était mordu la lèvre. En regardant son visage comme ça sur le côté pendant un moment, Kojou avait spontanément éclaté de rire. Tandis que les épaules affaissées de Kojou tremblaient, Yukina lui fit alors un regard indigné.

« Il y a quelque chose de drôle ? » demanda Yukina.

« Euh, désolé. Je pensais que tu étais comme Cendrillon. Alors même toi, tu t’inquiètes pour ces choses, Himeragi, » répondit Kojou.

« … Je suppose que oui. Si je suis la princesse couverte de suie, tu dois être la méchante demi-sœur, Senpai, » déclara Yukina.

Le regard de Yukina tourné vers Kojou était comme de la glace. Kojou avait l’air un peu blessé.

« Si tu ne dis pas que je suis le prince, fais au moins de moi le magicien ! » répliqua Kojou.

« Dans les Contes de l’enfance et du foyer, Cendrillon a arraché les talons et les orteils de ses demi-sœurs et leur a arraché les yeux. S’il te plaît, sois prudent, Senpai, » déclara Yukina.

« … Je pense que tu es mignonne dans n’importe quoi, alors ce n’est pas un problème, Himeragi, » déclara Kojou.

Kojou s’était efforcé d’avoir un visage sérieux pendant qu’il parlait. Il n’avait pas l’intention de le considérer comme une flatterie oiseuse, puisque c’était son opinion honnête, mais tout de même…

« Tu es si transparent, Senpai, » déclara Yukina.

Yukina avait simplement poussé un soupir, comme si elle abandonnait. Toujours en colère, Yukina était partie à un rythme rapide, Kojou poussant le chariot devant lui alors qu’il la suivait.

Après avoir terminé leurs courses, Kojou et Yukina avaient porté divers sacs à provisions en rentrant chez eux.

Le soleil du soir s’était déjà couché sous l’horizon, le crépuscule commençait déjà à envelopper la ville. Il y avait encore trois heures et des poussières jusqu’à ce que la fête de Dimitrie Vattler commence. Ce n’était vraiment pas beaucoup de temps à perdre.

« Si tu vas jusqu’à l’île ouest, il y a des magasins de location, mais je doute qu’ils soient encore ouverts à cette heure. Nagisa n’a pas non plus de vêtements pour une fête, alors peut-être qu’emprunter quelque chose à Natsuki pourrait être notre seul…, » commença Kojou.

« Tu veux dire… les vêtements occidentaux de Mlle Minamiya… ? Cependant, je ne pense pas pouvoir les porter…, » déclara Yukina dans un murmure.

Yukina avait appuyé ses seins en murmurant ça. Certes, les deux étaient de petites filles, mais Natsuki était encore beaucoup plus petite que Yukina, à la fois en taille et en silhouette.

« Euh, mais…, » balbutia Kojou.

« Je ne les porterai pas, mais qu’est-ce que c’est ? » demanda Yukina.

Kojou, qui s’apprêtait à dire qu’il n’y avait pas beaucoup de différence entre elles en ce qui concerne la taille des seins, se tut pendant que Yukina le regardait fixement. L’atmosphère glaciaire avait continué jusqu’à ce que Kojou et Yukina reviennent dans leur immeuble. Alors…

« C’est quoi ce paquet ? » demanda Kojou.

Kojou avait légèrement incliné la tête lorsqu’il avait remarqué un bordereau sur lequel figurait un avis de livraison. Apparemment, un colis avait été livré au casier pour les livraisons à domicile. Bien que rien ne lui vienne à l’esprit, Kojou n’avait aucun doute particulier lorsqu’il avait ouvert le casier.

À l’intérieur, il y avait une boîte de carton rectangulaire et plate. Vu sa taille, elle n’était pas très lourde.

Mais quand ils avaient vu le nom de l’expéditeur sur le paquet, Kojou et Yukina étaient tous les deux surpris.

« Organisation du Roi Lion ? » demanda Kojou.

« Mais… pourquoi l’adresse de Senpai ? » demanda Yukina.

Tous les deux étaient sous le choc face à ce colis d’un expéditeur complètement inattendu.

L’Organisation du Roi Lion était une agence spéciale sous le contrôle du gouvernement japonais pour faire face aux grandes catastrophes de sorcelleries et au terrorisme.

Le fait qu’ils aient envoyé Yukina pour surveiller Kojou était aussi pour la sécurité nationale… En d’autres termes, ils avaient jugé que l’existence même de Kojou constituait une grave menace à l’échelle nationale.

Et pourtant, un tel groupe avait fait des pieds et des mains pour envoyer quelque chose à Kojou. Kojou n’arrivait pas à croire que ça voulait dire quelque chose de bien.

Même Yukina, une Chamane Épéiste de l’Organisation du Roi Lion, semblait dans le noir sur ce que c’était.

Les yeux de Kojou et Yukina avaient rencontré des regards perplexes sur le visage de l’autre, durcissant apparemment leur détermination avant d’étirer leurs mains vers le haut de la boîte en carton. Ils avaient prudemment retiré l’emballage et avaient ouvert le colis en retenant leur souffle.

À l’intérieur de la boîte se trouvait quelque chose de méticuleusement plié, fait d’un tissu fin et brillant. Il était clairement fait d’un matériau coûteux. Kojou en vint immédiatement à soupçonner l’existence d’une sorte de malédiction. Cependant, Yukina n’avait fait que secouer la tête en silence. Apparemment, elle ne sentait aucun danger particulier.

Kojou avait repéré une note en petits caractères dans le coin de la boîte et l’avait ramassée. Pendant ce temps, Yukina souleva doucement le tissu par le bord. Avec un léger bruissement, cela s’était répandu en une jupe aux volants volumineux. Le reste de ce qui était emballé tombait doucement avec un doux bruit. C’était des sous-vêtements en soie.

« Le problème, c’est que… Robe de fête fait sur commande, type 1 ? Cent cinquante-six centimètres, B soixante-seize, W cinquante-cinq, H soixante-dix-huit, C soixante… pour Mlle Yukina Himeragi, payé en totalité… eh ? » pendant que Kojou lisait à haute voix ce qui était écrit sur la note, il leva soudain la tête, regardant Yukina qui se tenait juste devant ses yeux.

En regardant le changement chez Yukina qui présentait un visage rouge et la note avec des lettres et des chiffres mystérieux dessus, Kojou avait finalement compris la raison pour laquelle les épaules de Yukina tremblaient de honte.

Un silence gênant se fit sur les deux étudiants. Se sentant nettement mal à l’aise, Kojou avait jugé que le silence était un mauvais plan d’action. Pensant qu’il devait d’abord la consoler, il regarda la poitrine de son uniforme.

« Euh… C, hein ? C’est plus que je ne le pensais. Hmm, je suis impressionné, » déclara Kojou.

À cet instant, l’air semblait se geler. Tout le corps de Yukina, sans expression, avait émis une incroyable poussée de soif de sang. Réalisant qu’il avait parlé d’une manière inappropriée, Kojou s’était raidi, incapable de bouger, comme un cadavre en rigidité cadavérique.

« Est-ce tout ce que tu as à dire avant que j’efface ta mémoire, Senpai ? » demanda Yukina.

D’une voix tremblante, Yukina se leva sans bruit, serrant les poings quand elle posa sa question à Kojou. Attends, calme-toi et respire profondément, pensa-t-il. Kojou avait désespérément essayé de la calmer.

« Tout va bien, Himeragi. La robe est rembourrée et tout est —, » déclara Kojou.

Avant que Kojou n’ait fini ce dernier mot, le talon déchaîné de Yukina avait plongé sur la tête de Kojou. « Hrgh !! » dit-il en agonie, la tête serrée. En le regardant de haut, les joues de Yukina s’étaient gonflées dans ce qui ressemblait à une moue.

***

Partie 9

Un peu après 21 h, Kojou avait fini de se changer et était sorti de sa chambre.

Il portait un smoking trois-pièces. Il avait été emballé avec la robe de Yukina dans le paquet envoyé par l’Organisation du Roi Lion. Leur objectif n’était pas clair, mais apparemment ceux de l’Organisation du Roi Lion voulaient que Kojou et Yukina rencontrent cet aristocrate de l’Empire du Seigneur de Guerre.

Bien qu’il ait trouvé qu’être utilisé sans raison apparente était de mauvais goût, ce n’est pas comme s’il avait d’autres vêtements qu’il pouvait porter à une fête. Les vêtements n’ont commis aucun crime, s’était dit Kojou en attachant sa cravate et en fermant les boutons de sa veste, puis en se dirigeant vers l’entrée. Alors…

« K-Kojou ? Qu’est-ce que c’est ? C’est quoi ces vêtements ? » demanda Nagisa.

Arrivée face à face avec Kojou dans le salon, Nagisa, tout juste sortie du bain, avait écarquillé les yeux en le regardant.

Ses cheveux étaient trempés, ses joues encore un peu roses. Avec des gouttelettes d’eau encore sur sa peau, elle avait l’air tout à fait sans défense avec seulement une serviette de bain enroulée autour d’elle. Kojou avait été un peu déconcerté par son regard fixe sur sa tenue pendant qu’elle se promenait comme ça.

« Ah, ça. En fait, je travaille à mi-temps, » déclara Kojou.

Il lui avait donné l’excuse qu’il avait trouvée avant.

Nagisa fut instantanément déconcertée, regardant l’ensemble de la silhouette de Kojou dans ce qui semblait être un choc.

« Un travail à temps partiel ? La nuit ? » demanda Nagisa.

« Je remplace un camarade de classe qui s’est évanoui en travaillant trop dur. C’est juste pour ce soir. De son côté, ses parents ont une dette de cent cinquante millions de yens à payer, donc si je ne le fais pas à sa place, ils ne pourront pas payer les frais médicaux de sa grande sœur malade, » déclara Kojou.

« Vraiment… ? » demanda Nagisa.

Kojou pensait que c’était une excuse pitoyable à ses yeux, mais Nagisa semblait y croire avec une facilité surprenante. Le smoking devait avoir ajouté de la crédibilité. En fait, un lycéen normal n’avait que très peu d’occasions de porter quelque chose comme ça, sauf s’il travaillait à temps partiel dans un bar.

« Je suppose qu’on ne peut rien y faire. Mais ne fais rien d’indécent, » l’avertit Nagisa d’une expression mal à l’aise.

Qu’est-ce qui l’inquiète ? pensa Kojou avec un sourire peiné.

« Ouais, ce n’est pas grave. Ça n’arrivera pas. Désolé de te laisser t’occuper de tout ici, mais merci, » déclara Kojou.

« Oui, je comprends… Prends soin de toi, Kojou, » déclara Nagisa.

Kojou était parti pendant que Nagisa le regardait s’en aller avec un joyeux signe de la main.

Bien qu’il se sentait coupable d’avoir menti à sa jeune sœur, il ne pouvait pas être honnête avec elle et dire qu’il rencontrait un vampire de l’Empire du Seigneur de Guerre, donc il ne pouvait pas faire autrement.

Kojou s’était rendu dans le couloir, exhalant d’un souffle d’ennui, complètement dégoûté de lui-même.

Ce faisant, Kojou avait senti quelqu’un s’approcher encore plus près de lui, comme pour se blottir contre lui.

Quand Kojou regarda, Yukina se tenait là. Elle avait sans doute entendu la conversation de Kojou avec Nagisa.

Jetant un coup d’œil de côté à la porte de la résidence Akatsuki, elle parla comme si elle essayait de consoler Kojou.

« Nagisa est une gentille fille, » déclara Yukina.

« Eh bien, plus une histoire est sauvage, plus elle le croira facilement, tu pourrais… sa…, » commença Kojou.

Pendant que Kojou parlait, se retournant pour faire face à Yukina, il était soudain devenu à court de mots.

Son regard avait été captivé par la tenue si différente de celle qu’elle portait d’habitude.

C’était une robe de fête blanche avec des reflets bleu foncé. Le décolleté était conservateur, mais au contraire, l’ensemble avait été coupé audacieusement de ses épaules jusqu’au bas de son dos. Le tissu fin faisait ressortir les contours du corps de Yukina, avec ses cuisses blanches et fermes qui sortaient de dessous sa minijupe élégamment faite avec des volants.

Comme on pouvait s’attendre à quelque chose pour une tenue faite sur mesure, cela convenait à Yukina à un degré effrayant. L’ensemble était bien assorti, joli, et dégageait une sensation un peu risquée. Même Kojou, qui connaissait bien la beauté de Yukina, ne pouvait qu’avoir l’air en état de choc avec un regard ébahi visible sur son visage.

« Senpai ? » demanda Yukina.

Comme si elle donnait un avertissement, Yukina fixa Kojou d’un regard à moitié étroit.

« O-Ouais ? » demanda Kojou.

« Cette tenue… C’est ridicule, n’est-ce pas ? » demanda Yukina.

« Non, ce n’est pas du tout… Mais ! Eh !? Quoi… ? Pourquoi pointes-tu cette lance sur moi !? » demanda Kojou.

En voyant le bout de sa lance devant ses yeux, l’expression de Kojou se crispa rapidement. Tout en gardant sa lance d’argent à portée de main, Yukina regarda froidement Kojou, parlant finalement d’un ton aigu.

« Je suis désolée. J’ai senti un danger et j’ai réagi sans réfléchir, » déclara Yukina.

« C’est… c’est vrai, » déclara Kojou.

Le visage de Kojou s’était renfrogné lorsqu’il avait senti la présence d’un parfum métallique dans ses narines.

Bien qu’il n’en fût pas lui-même conscient, Kojou était maintenant un vampire, et l’espèce de vampire était connue comme telle en raison de l’existence d’un instinct dangereux, à savoir, les pulsions vampiriques — l’envie de mettre ses crocs dans le cou d’un autre et de sucer le sang qu’il voulait désespérément. Et le déclencheur des pulsions vampiriques était la luxure. Tout à l’heure, Kojou, ébahi en regardant Yukina, était apparemment en danger de voir son esprit occupé par des pulsions vampiriques. Yukina avait sans doute sorti Sekkarou parce qu’elle l’avait instinctivement senti.

C’est donc la Vision Spirituelle d’une Chamane Épéiste, pensa-t-il en admiration tranquille.

« … Tu es trop facile à comprendre, Senpai. Quand tu penses à des choses indécentes, c’est écrit sur ton visage, » comme si elle lisait dans l’esprit de Kojou, Yukina avait parlé avec un soupir mélangé. « Le dos est vraiment… trop exposé, n’est-ce pas ? Le tissu est fin et la jupe si courte. C’est juste que… »

« Ça veut dire que c’est facile de se déplacer avec, n’est-ce pas ? C’est mieux que si la jupe est sur ton chemin si ça se résume à une bagarre, » déclara Kojou.

« … Même si ce que tu dis est sensé, tes arrière-pensées se sont répandues sur ton visage, » déclara Yukina.

« Ce n’est pas le cas, » avait gémi Kojou d’une voix maussade.

Yukina fit un petit haussement d’épaules, et pensant à quelque chose, elle se mit soudain à tirer un peu sur le bord de sa jupe.

« Eh bien, c’est très bien. Le jupon que le club de pom-pom girls m’a donné a été utilisé à bon escient, » déclara Yukina.

« Un jupon !? » demanda Kojou.

Inconsciemment penché vers l’avant, Kojou s’était affaissé les épaules alors qu’il se lamentait.

« Senpai, donc tu étais vraiment…, » commença Yukina.

« Euh, non. Je n’essayais pas du tout de jeter un coup d’œil, c’est juste qu’un jupon avec cette tenue est injuste, j’ai l’impression que mes rêves ont été brisés, je veux dire, la raison pour laquelle le chat de Schrödinger se retrouve avec des philosophes tout excités est bien parce qu’ils ne savent pas vraiment si c’est mort ou vivant…, » déclara Kojou.

« Je n’ai aucune idée de ce à quoi tu fais référence, mais j’en déduis que tu as un intérêt extraordinaire pour ce qui est sous la jupe d’une fille, Senpai, » déclara Yukina.

« Alors, arrête de pointer cette lance sur moi ! » déclara Kojou.

Kojou, poussé jusqu’au mur, fit des gestes désespérés et suppliants.

« Senpai, vraiment, tu es…, » commença Yukina.

Pour une raison inconnue, Yukina poussa un soupir d’abandon apparent, abaissant doucement sa lance. Elle l’avait ramené à sa configuration de rangement et l’avait mis dans la valise à ses pieds.

Ce qu’elle avait avec elle n’était pas l’étui habituel de guitare noire, mais un étui avec une poignée en forme d’attaché. Ça n’avait pas l’air si mal à l’aise avec son look de robe de fête. Elle ressemblait à une joueuse d’un instrument classique qui se dirigeait vers un spectacle de théâtre orchestral. Alors…

« Cette tenue… n’est-ce vraiment pas ridicule ? » demanda Yukina.

Yukina, fermant la boîte et se levant, leva soudain les yeux vers Kojou. Puis les yeux tournés vers le haut, elle demanda ça d’une voix calme.

« Non, pas du tout. Ça te va bien, » déclara Kojou.

« Vraiment ? » demanda Yukina.

Kojou hocha la tête sèchement en réponse et se mit à marcher avec Yukina jusqu’à l’ascenseur. Là où ses cheveux étaient relevés, sa nuque était légèrement rouge. Elle semblait rougir secrètement.

Kojou inclina la tête lorsqu’il remarqua l’ornement de cheveux qui tenait les cheveux de Yukina en place. C’était une barrette argentée stylisée comme une croix chrétienne. Il n’était pas non plus dans la boîte de matériel envoyé par l’Organisation du Roi Lion. Il était rare pour Yukina, qui avait peu de biens personnels, de s’accessoiriser de cette façon.

« Himeragi, cet ornement de cheveux…, » commença Kojou.

« Eh… ? » demanda Yukina.

Yukina avait mis la main sur ses cheveux avec surprise, portant l’expression d’un enfant dont la farce avait été découverte.

« Est-ce… bizarre, par hasard ? » demanda Yukina.

« Non, pas du tout. Ça te va bien, » déclara Kojou.

Kojou avait répété exactement la même phrase de tout à l’heure. Cette fois aussi, Yukina avait eu un regard honnêtement heureux.

« Sayaka… ma colocataire quand j’étais à la Forêt des Grands Dieux… m’a donné ça, » déclara Yukina.

« Colocataire ? Est-elle une Chamane Épéiste comme toi ? » demanda Kojou, son intérêt s’éveilla quelque peu.

La Forêt des Grands Dieux était le nom de l’école pour filles que Yukina avait fréquentée jusqu’au mois dernier.

Cependant, il s’agissait en fait d’un centre d’éducation pour les Mages de l’Organisation du Roi Lion, dans le cadre de combat contre les démons.

Yukina lui avait dit que ses propres capacités de Chamane Épéiste lui avaient été inculquées à cet endroit.

Il pensait qu’il était très improbable qu’une fille vivant avec Yukina soit une personne ordinaire sans lien avec la magie rituelle.

« Elle n’est pas Chamane Épéiste, mais Sayaka est aussi CDMA de l’Organisation du Roi Lion, » répondit Yukina.

Yukina avait donné la réponse que Kojou attendait. Pour une raison quelconque, sa voix était teintée de fierté.

« Elle a un an de plus que moi, donc elle a déjà quitté la Forêt des Grands Dieux pour une mission officielle. »

« Euh… De bonnes amies, vous deux ? » demanda Kojou.

Yukina fit un timide clin d’œil d’assentiment au murmure de Kojou.

« Je suppose que oui. Je la considère vraiment comme une sœur. Elle est belle et mignonne, et sa personnalité est mignonne aussi, elle est si douce… Je suis fière de l’avoir eu comme colocataire, » déclara Yukina.

« Ça me donne envie de la rencontrer, » pensa Kojou à voix haute dans une ambiance décontractée. À cet instant, l’expression de Yukina s’assombrit soudainement.

Elle avait touché une fois son ornement de cheveux et l’avait informé d’une toute petite voix. « Il vaudrait peut-être mieux que tu ne le fasses pas, Senpai… Je pense qu’il est probable qu’elle chercherait à te tuer. »

***

Partie 10

Le paquebot de croisière de Dimitrie Vattler, duc d’Ardeal, était amarré à une immense jetée sur l’Île Ouest. La fête devait commencer à 22 h. Ils pouvaient voir un grand groupe d’invités grimper la passerelle et monter à bord du navire.

« … Un cimetière flottant… hein ? Son nom est de mauvais goût, » murmura Kojou.

Regardant le nom gravé sur la coque, Kojou était hors de lui lorsqu’il avait lu le nom du navire, Oceanus Grave.

Mais malgré son nom inquiétant, la coque illuminée présentait fièrement, sous le ciel du soir, une dignité élégante et prestigieuse.

« Est-ce un navire personnel… ? De toute façon, ces aristocrates de l’Empire du Seigneur de Guerre sont-ils vraiment si riches ? » demanda Kojou.

« Je crois qu’il y a un objectif stratégique à montrer fièrement son autorité de cette manière, » avait expliqué Yukina d’un ton serein.

« Bien qu’il soit purement superstitieux que les vampires ne puissent traverser l’océan, il n’en reste pas moins vrai que leurs capacités sont limitées lorsqu’ils sont au-dessus de l’eau. Pour un Dominion comme celui-ci, ses nobles qui affrètent ouvertement des navires agissent comme une démonstration de force envers d’autres nations et cela même s’il s’agit de simples navires civils plutôt que de navires de guerre, » déclara Yukina.

« Hmm… ou peut-être que c’est juste qu’ils aiment se montrer, » déclara Kojou.

L’humeur plutôt pesante, Kojou leva à nouveau les yeux vers la coque bleu-blanc.

Le navire civil Oceanus Grave ne portait aucune arme. Cependant, le propriétaire du navire était un vampire noble. Les Vassaux Bestiales qu’il pouvait invoquer avaient une capacité de combat égale à celle des porte-avions de premier ordre. En d’autres termes, l’Île d’Itogami avait actuellement l’équivalent d’un navire de guerre du Dominion ici, juste sous ses yeux — une situation délicate.

C’était peut-être à cause de cela que de nombreuses personnes à bord de l’Oceanus Grave avaient des visages qu’il avait vus aux nouvelles. Il s’agissait de politiciens de premier plan et de gros bonnets financiers, de dignitaires du gouvernement et de la Ville d’Itogami.

Puisque l’hôte de la fête était un noble de l’Empire du Seigneur de Guerre, ce n’était pas du tout contre nature. Mais…

« … On est les seuls à ne pas avoir l’air à leur place, hein ? » demanda Kojou.

Kojou murmura à lui-même, « Je me demande si venir ici était la bonne décision, » se sentant assez mal à l’aise.

Maintenant qu’il y avait réfléchi, cette invitation aurait pu être un faux envoyé par quelqu’un pour tromper Kojou et Yukina. Vu les circonstances de l’arrivée de l’invitation, ce n’était pas exactement une spéculation sans fondement.

Cependant, alors que Kojou pensait à de telles choses, Yukina leva les yeux vers lui, regardant à côté d’elle.

« Non, un envoyé du Premier primogéniteur arrivant sur cette île devrait saluer le souverain de cette terre, le Quatrième Primogéniteur, avant tous les autres. Tu es l’invité principal de la fête, Senpai. S’il te plaît, agis de manière plus appropriée, » déclara Yukina.

« Plus facile à dire qu’à faire, bon sang. Je ne suis qu’un lycéen normal ! » Kojou s’y opposa faiblement. Bien que traité arbitrairement par les autres autour de lui comme un Primogéniteur, Kojou lui-même avait été un être humain normal jusqu’à il y a quelques mois. Même s’il était incongru dans une telle situation, il n’y avait aucune raison pour lui de savoir comment se comporter « convenablement ».

Lorsque son invitation avait été vérifiée et qu’il soit monté à bord du navire, il s’était senti encore plus comme un poisson hors de l’eau : L’éclairage était éblouissant, la nourriture était exquise, tous ces gens d’allure importante étaient réunis en un seul endroit. Un jeune homme comme Kojou qui se promenait ne méritait pas plus un regard qu’un rocher sur le bord de la route.

« Alors… où est le type qui nous a appelés ici ? » Kojou murmura en regardant autour de lui à l’intérieur de la salle de réception, continuant à se sentir très en dehors de son élément.

La salle de réception à l’intérieur du navire, aujourd’hui un lieu de fête, était d’une taille inimaginable. Il devait y avoir au moins cinq cents invités.

Trouver un envoyé du Premier Primogéniteur, dont il ne connaissait même pas le visage, au milieu de tout cela n’était pas chose facile.

Mais d’un autre côté, Kojou avait eu un sentiment étrange depuis le moment où il était arrivé à bord du navire.

C’était comme la montée qu’on avait eue juste avant de commencer un match de basket-ball. La peur, le plaisir, le sentiment d’urgence et l’exaltation semblent se combiner en un seul sentiment agréable de tension.

Réalisant qu’il était proche de l’un de ses frères possédant un grand pouvoir, il avait l’impression que chaque nerf de son corps était aiguisé. En tant que vampire, le sang de Kojou… et les Vassaux Bestiales qui y habitaient… avaient bouilli dans l’attente de rencontrer un ennemi puissant.

Cet émoi lui disait que le noble de l’Empire du Seigneur de Guerre était sans doute très proche.

« Au-dessus de nous. Le duc Ardeal est probablement sur le pont supérieur extérieur…, » déclara Yukina.

Comme pour confirmer la prémonition de Kojou, Yukina avait parlé en levant les yeux au-dessus de sa tête. Tout comme Kojou, Yukina savait probablement où était Dimitrie Vattler grâce à sa Vision Spirituelle de Chamane Épéiste.

« Au pont supérieur… hein ? Alors, comment monte-t-on là-haut ? » demanda Kojou.

« Par ici, Senpai, » déclara Yukina.

Yukina avait montré du doigt un escalier dans le coin du hall, se frayant un chemin sur un trajet où les invités se mêlaient.

Tandis que Kojou se dépêchait de la rattraper, Yukina avait regardé en arrière et avait tendu la main. Sans se poser la moindre question, il s’était mis à saisir sa main.

C’est à l’instant suivant que Kojou sentit un éclair d’argent, accompagné d’une soif de sang, se précipiter sur lui.

« … Sei !! »

« Uoo !? »

Tandis que Kojou sautait instantanément en arrière, la pointe bien aiguisée d’une fourchette juste devant ses yeux lui frôlait le bras.

La fourchette avait été saisie par une jeune femme. Elle semblait mesurer près de 170 centimètres de hauteur, mais semblait être une fille encore à la mi-adolescence. Elle avait de longs cheveux châtains et une peau blanche. Son visage avait une élégance charmante et accrocheuse.

La tenue de style cheongsam qu’elle portait sur son corps mince lui allait très bien.

« Pardon, excusez-moi. Ma main a glissé, » déclara la fille.

La fille aux cheveux longs avait parlé, ne faisant pas comme si elle était particulièrement désolée. Kojou la regarda d’un air mécontent.

« Si vous savez comment quelqu’un peut glisser et balancer une fourchette vers quelqu’un d’autre, par tous les moyens, dites-le-moi… Attendez, n’avez-vous pas crié comme un artiste martial tout à l’heure !? » s’écria Kojou.

« C’est parce que vous avez essayé de toucher Yukina avec votre main sale et souillée, Kojou Akatsuki, » déclara l’autre.

« Quoi… !? » s’exclama Kojou.

Kojou l’avait regardée avec surprise en entendant son nom. Elle avait continué à tenir sa fourchette en réponse tout en faisant à Kojou un regard glacial.

L’aura qu’elle avait dégagée ressemblait un peu à celle de Yukina juste après leur rencontre, mais celle-ci était beaucoup plus hostile. On aurait dit que s’il montrait la moindre ouverture, elle l’attaquerait sans pitié.

« Qui diable êtes-vous ? » demanda Kojou.

Kojou était perplexe alors qu’il le lui demandait. Les invités de la fête tout autour d’eux haussèrent leur voix en raison de la situation. Yukina était revenue l’instant d’après.

« … Sayaka !? » s’écria Yukina.

Se plaçant entre les fêtards les regardant, Yukina avait l’air stupéfaite lorsqu’elle avait crié le nom de la fille aux cheveux longs.

À ce moment, la fille nommée Sayaka avait montré un changement très dramatique. Comme un bourgeon dur qui s’épanouissait en fleur, un sourire élégant s’était élargi sur tout le visage, avec l’élan de soif de sang qui émanait de tout son corps remplacé par une aura pleine d’affection douce.

« Yukina ! » s’écria Sayaka.

La fille aux cheveux longs avait serré Yukina dans ses bras. Kojou avait l’impression de voir des sœurs qui s’entendaient bien et qui s’étaient miraculeusement retrouvées. Ses cheveux, dans une queue de cheval derrière elle, se balançaient comme la queue d’un chien heureux.

« Ça fait si longtemps, Yukina. Vas-tu bien ? » demanda Sayaka.

« O-Oui, » répondit Yukina.

 

 

Yukina semblait un peu perdue d’être soudainement réunie avec l’autre fille. Son air de surprise avait l’air de gagner contre sa joie d’être à nouveau ensemble. Mais sans tenir compte de la réaction de Yukina, la fille appelée Sayaka avait pressé sa propre joue contre le cou de Yukina, la frottant.

« Ahh, Yukina, Yukina, Yukina, Yukina… ! !! Pauvre petite chose, avoir le poste de surveillant du 4e Primogéniteur qui t’est poussé dessus alors que je n’étais pas là ! Je me demande pourquoi le Comité exécutif de l’Organisation du Roi Lion a traité ma Yukina d’une manière si cruelle ! » déclara Sayaka.

« Ah, euh… Sayaka… ! !? » s’écria Yukina.

« Mais tout va bien maintenant. Si ce pervers pose un doigt sur toi, je l’éliminerai immédiatement. Tant sur le plan sociétal que biologique…, » déclara Sayaka.

« Quoi… ! S-Sayaka… c’est un peu… ouais ! » déclara Yukina.

« Hey, » déclara Kojou.

Alors que Sayaka s’était confiée à Yukina, en se laissant grande ouverte, Kojou lui avait fait un petit coup à l’arrière de la tête. « Eek ! » s’exclama Sayaka d’une voix amère, apparemment effrayée en reculant.

Yukina, finalement libérée des griffes de Sayaka, avait l’air soulagée alors qu’elle tournait derrière le dos de Kojou.

Sayaka, pressant une main à l’arrière de sa tête où elle avait été giflée, fixa du regard Kojou.

« Qu’est-ce que vous faites !? Ne me touchez pas, quatrième Primogéniteur ! Non, Pervogenitor ! » déclara Sayaka.

« Qui est le pervers !? Retirez ça ! Primo et pervers ne se ressemblent pas, alors vous l’avez fait exprès ! » Kojou avait dénudé ses dents quand il avait crié en réponse.

Avec un « Hmph », Sayaka avait expiré grossièrement, « Je suppose que oui. Je suis désolée, ô grand Primogéniteur pervers. Tout d’abord, je ne veux pas que Yukina respire le même air que vous, donc je ne veux pas que vous entriez dans un rayon de cinq mètres autour d’elle. Après ça, je vous arracherai les yeux. Je ne veux pas que votre regard impur regarde Yukina. »

« Bien sûr que si ! Qu’est-ce qui vous prend de sortir ça et de parler comme ça ? » demanda Kojou.

« Ne vous approchez pas. C’est dégoûtant, » cria Sayaka en poussant la fourchette à Kojou, menaçante.

Quelle femme impolie ! s’indigna Kojou en se retournant vers Yukina.

« Sayaka, est-ce l’ex-colocataire dont tu as parlé, Himeragi ? » demanda Kojou.

« … Oui, » répondit Yukina.

Yukina leva les yeux vers Kojou et hocha la tête d’une manière qui semblait s’excuser. Comme si elle essayait d’interrompre leur conversation, Sayaka s’était placée sur le côté.

« Sayaka Kirasaka, danseuse de guerre de l’Organisation du Roi Lion, Kojou Bakatsuki, » déclara Sayaka.

« C’est A-ka-tsu-ki. Ne le dites pas mal exprès ! » Kojou avait répondu en criant, en ayant assez d’elle.

Mystérieusement, en dépit d’un tel vacarme, les invités de la salle de fête ne semblaient pas s’en rendre compte. Il semblait que Yukina avait tranquillement utilisé une incantation de rejet.

« Qu’est-ce qu’une danseuse de guerre ? Est-ce différent d’une Chamane Épéiste ? » Kojou avait posé une autre question à Yukina. Yukina secoua un peu la tête.

« Les deux sont des Mages d’Attaque, mais les compétences que nous avons apprises sont différentes, » déclara Yukina.

« Compétences ? » demanda Kojou.

En regardant Kojou plisser les sourcils, Sayaka avait annoncé avec fierté. « Les danseuses de guerre se spécialisent dans les malédictions et les assassinats. En d’autres termes, c’est mon devoir d’éliminer les pervers qui planent autour de Yukina, comme vous. »

« Je ne tourne pas autour d’elle ! Si quelqu’un tourne autour de moi, c’est bien elle !! » s’écria Kojou.

« De quoi êtes-vous si fier !? Ce n’est pas comme si j’étais jalouse ou quoi que ce soit ! » déclara Sayaka.

« Alors, ne dites pas des choses qui font croire aux gens que vous êtes jalouse ! » déclara Kojou.

Kojou et Sayaka se regardaient avec indignation. Yukina se couvrit les yeux en secouant légèrement la tête.

« Mais pourquoi es-tu ici, Sayaka ? N’étais-tu pas affectée aux crimes de sorcellerie multinationaux de la branche étrangère ? » demanda Yukina.

« Je le suis toujours. Je suis venue sur cette île à cause de ma mission. » Sayaka répondit d’une voix douce qui semblait venir d’une personne différente. Yukina avait rétréci les yeux de surprise.

« Ta mission ? » demanda Yukina.

« Comme toi, Yukina. Surveiller un vampire. Il est de mon devoir de veiller sur le duc Ardeal pour qu’il ne cause aucun tort aux habitants de la Ville d’Itogami. En ce moment, je suis ici parce qu’il m’a demandé de vous faire entrer, » déclara Sayaka.

En entendant l’explication négligente de Sayaka, Kojou avait finalement compris les circonstances.

Tout comme Yukina était venue sur l’Île d’Itogami pour l’observer, Sayaka avait reçu l’ordre d’observer Vattler.

Ce n’est pas comme si elle avait essayé de poignarder Kojou avec une fourchette, mais…

« Très bien, alors. Faites-nous entrer, » déclara Kojou.

« Je vous conduirais, mais pas parce que vous l’avez dit. Alors s’il vous plaît, meurs déjà, comme maintenant, » déclara Sayaka.

« Putain, non ! » Crier de nouveau dans l’ennui, Kojou alla derrière Sayaka en haut des escaliers. Yukina, la dernière dans la file, leur avait fait un regard inquiet.

Regardant en réponse la forme gracieuse de Sayaka, Kojou poussa un soupir exaspéré.

Elle avait dit que Vattler lui avait demandé de lui amener Kojou et Yukina.

Cela étant, c’était probablement elle qui avait envoyé l’invitation avec le shikigami qui avait attaqué Kojou pendant la journée.

Ce n’était pas qu’elle avait un objectif stratégique, elle détestait de tout son cœur Kojou.

Apparemment, Sayaka était enveloppée d’une profonde affection envers Yukina. Donc, de son point de vue, Kojou était un vampire méchant mettant sa précieuse Yukina en danger.

Kojou avait même peur de penser à la réaction de Sayaka si elle découvrait qu’il avait sucé le sang de Yukina. Maintenant, il comprenait très bien pourquoi Yukina craignait que Sayaka ne vienne pour lui trancher son cou.

Mais pour Kojou, Sayaka n’était pas la vraie menace ici.

L’agitation dans le « sang » de Kojou devint encore plus féroce. Le sang du Primogéniteur qui coulait dans le corps de Kojou lui avait dit qu’un vampire possédant un vaste pouvoir était à proximité.

Kojou ne connaissait pas la vraie nature de l’autre ni son objectif. Il ne pensait pas que l’accord de cessez-le-feu entre les Primogéniteurs s’appliquait au quatrième Primogéniteur, qui n’existait pas officiellement. Selon le déroulement des négociations, dans le pire des cas, les combats pourraient éclater sur le champ.

C’était un noble de l’Empire du Seigneur de Guerre. Un vampire au sang pur descendant directement d’un Primogéniteur. Même s’il n’était pas au même niveau que le Premier Primogéniteur, on pouvait penser qu’il possédait des capacités de combat à peu près à la même échelle.

Au contraire, même si Kojou était appelé le quatrième Primogéniteur, il ne pouvait pas utiliser la grande majorité de ces capacités. Il s’était dit qu’il n’avait presque aucune chance de gagner dans un combat direct.

Sentiment de malaise et de confusion s’infiltrant une fois de plus, Kojou grimpa sur le pont supérieur du navire.

Il y avait là un homme seul, debout dans un coin du large pont, face à une mer d’un noir de jais et le ciel nocturne.

C’était un beau jeune homme portant un manteau blanc pur. Il était grand, mais ses contours étaient affinés, sans aucune domination.

Caressant ses cheveux blonds vers l’arrière, le jeune homme regarda Kojou avec ses yeux bleu pâle.

À ce moment, tout son corps était enveloppé d’un faisceau de lumière blanche pure.

« … Senpai ! » cria Yukina.

Yukina avait été la première à réagir. Sortant sa lance de son étui à instruments, elle sauta devant Kojou. Pour protéger Yukina, Sayaka avait aussi bougé. Tout s’était fait en un clin d’œil.

Cependant, même les actions promptes des filles n’avaient pas pu les protéger du rayon blanc pur.

La vraie nature de la lumière déchaînée par l’homme en manteau était un serpent de flamme rougeoyant de blanc. C’était le Vassal Bestial d’un vampire entouré d’une chaleur brûlante. Même si le Vassal Bestial avait été envoyé à la vitesse d’une comète, Kojou n’avait pas du tout réagi. Il ne savait même pas ce qui se passait.

« Guo... oo... ! »

Ce n’était pas Kojou qui avait réagi, mais les Vassaux Bestials qui habitaient dans le sang de Kojou. Des éclairs éblouissants enveloppèrent tout le corps de Kojou, libérant un éclair qui contre-attaqua le serpent de flamme.

C’était l’un des douze vassaux bêtes qui servaient le quatrième Primogéniteur. C’était le coup de foudre de « Regulus Aurum », le seul Vassal Bestial que Kojou pouvait contrôler correctement. Il avait repoussé l’attaque à la place de son maître abasourdi.

Le fait de tirer sans discernement avec une telle puissance aurait détruit le navire, et peut-être tout le port avec… mais apparemment, cette fois, même le Vassal Bestial de lion calamiteux l’avait mieux pris en compte.

Au moment où le serpent flamboyant blanc pur fut annihilé, la foudre de Kojou fut également anéantie.

« C’était… c’était pas loin ! Bon sang, c’était ça !? »

En ayant été témoin du pont brûlé et de l’air brûlant, les séquelles de la collision violente de deux vastes forces magiques avaient fait renaître Kojou à la raison. À ce moment-là, le son de la lumière claquant des mains résonnait dans l’air.

Les applaudissements venaient de l’homme en blouse blanche. Ayant d’abord lancé l’attaque sur Kojou, il semblait en fait heureux que Kojou l’ait repoussée.

« C’est tout à fait splendide. Donc ce niveau de Vassal Bestial n’a même pas été capable de vous égratigner, » l’homme avait parlé d’une voix détendue. Sa voix semblait innocente sans une once de tension.

Kojou gardait son centre de gravité bas en regardant l’homme en face.

Le comportement frivole de l’homme dissimulait l’immense pouvoir qu’il avait derrière lui. C’est ce que la chair de Kojou lui avait instinctivement dit, le mettant sur ses gardes. Le serpent flamboyant n’était qu’une partie de son pouvoir. S’il avait vraiment lâché son Vassal Bestial, même Regulus Aurum n’aurait peut-être pas réussi à l’arrêter…

Réfléchissant, Kojou regarda l’autre homme s’approcher.

Mais le comportement ultérieur de l’homme avait pris Kojou par surprise.

Il s’abaissa à un genou devant Kojou, s’inclinant comme un vénérable noble devant son seigneur.

« Je m’excuse du fond du cœur d’avoir été grossier en testant votre force. Je m’appelle Dimitrie Vattler, celui à qui notre Primogéniteur, le Seigneur de Guerre Perdu, a accordé le titre de duc d’Ardeal. Je suis extrêmement ravi que vous soyez venu nous rendre visite ce soir… »

Kojou avait été complètement déconcerté par la façon extrêmement éloquente dont cet homme parlait.

Yukina, avec sa lance d’argent en position, et même Sayaka, avait été stupéfaite alors qu’elles se tenaient en place.

« Vous êtes donc Dimitrie Vattler… ? Le type qui m’a appelé ici ? » demanda Kojou d’une voix haletante.

Vattler leva le visage avec un large sourire. C’était un sourire affable qui diffusait autant de ruse que de malice.

« Peut-être devrais-je dire, c’est un plaisir de vous rencontrer, Kojou Akatsuki. Ou plutôt… Le quatrième Primogéniteur, mon bien-aimé ! » déclara Vattler.

Pendant que Vattler parlait, il fit à Kojou un regard affectueux et désireux. Il avait alors ouvert les deux bras comme pour accueillir Kojou. « Alors c’est comme ça après tout, » dit Sayaka en secouant la tête. Yukina était hors d’elle.

« … Hein ? »

Incapable de comprendre le sens des mots qui s’adressaient à lui, Kojou avait émis un souffle frêle. En un sens, la rencontre de Kojou Akatsuki, quatrième Primogéniteur, avec Dimitrie Vattler, duc d’Ardeal, avait été fatidique.

***

Partie 11

« Hein ? Et puis tu t’es enfuie ? »

Elle avait entendu la voix exaspérée de son ami d’enfance au téléphone.

Asagi, qui était allongée sur son lit, était un peu fâchée quand elle avait vigoureusement répondu ainsi. Il était juste avant minuit. Elle se trouvait dans un environnement familier à sa résidence. Elle était vêtue d’un débardeur et de sous-vêtements, et non d’un look qu’elle voulait vraiment que les autres voient. Elle avait enveloppé ses cheveux, encore humides en sortant du bain, avec une serviette de bain.

« Ce n’est pas comme si je m’étais enfuie. C’était tellement stupide que cela m’a assez énervée pour que je ne puisse plus y rester, » déclara-t-elle.

L’autre partie au long appel téléphonique était Motoki Yaze. Bien qu’il n’y avait pas de sentiments intimes entre eux, c’était un ami précieux avec qui elle pouvait avoir d’agréables et franches conversations grâce à la connaissance qu’elle avait l’une de l’autre depuis si longtemps. Elle avait l’intention de se plaindre au sujet de l’incident du festival sportif, mais à un moment donné, la situation avait changé et elle s’était plainte personnellement de Kojou.

« Je ne m’attendais certainement pas à ce qu’une fille transférée du collège passe à l’attaque avec une tenue de pom-pom girl. Mais tu portais une jupe de tennis, alors tu aurais dû être aussi bien assortie. Et tu aurais dû être encore plus surprenante qu’elle, » déclara Yaze.

« Assortie… Qu’est-ce que tu racontes ? » demanda Asagi en s’irritant du ton taquin de la voix de Yaze.

Yaze avait dit. « Comment dire ça ? » avant de réfléchir. « Une bagarre sans merci entre deux filles pour savoir à qui appartient Kojou. »

« Ce n’est pas vrai !! Celle qui sort avec Kojou n’a rien à voir avec moi, » déclara Asagi.

« Ça n’en a pas l’air d’être le cas pour moi, » Yaze avait parlé d’une voix étrangement sérieuse.

« Oh, ferme ta gueule, » dit Asagi à voix basse.

« Ce que je n’aime pas, c’est comment cet idiot cache quelque chose. S’il sort avec cette fille, Himeragi, il devrait le faire au grand jour. La façon dont il nous cache des secrets, même à nous, m’ennuie vraiment. C’est vraiment louche, » déclara Asagi.

Asagi chercha l’accord de Yaze comme une évidence, mais Yaze répondit par des mots inattendus.

« C’est seulement s’ils sortent vraiment ensemble, non ? » demanda Yaze.

« Hein ? » demanda Asagi.

« Si Kojou pense sérieusement que tu n’es qu’une amie, alors il n’y a aucune raison qu’il sorte avec Himeragi en secret vis-à-vis de toi, » déclara Yaze.

Asagi avait accepté à contrecœur l’affirmation étonnamment logique de Yaze.

« Mmm… ouais. On pourrait penser qu’il s’en vanterait, » déclara Asagi.

« Cela dit, je ne pense pas qu’il ait les couilles d’être avec deux filles en même temps, » déclara Yaze.

« Ah… non. À tous les coups, non, » cette fois, Asagi fut immédiatement d’accord.

« Bien sûr, » dit Yaze, en continuant fièrement. « Donc oui, Kojou n’a aucune raison de nous cacher sa petite amie Himeragi. Mais quand même, il s’est faufilé avec Himeragi qui a l’air coupable… »

« Ouais, » déclara Asagi.

« Alors, il n’y a qu’une seule possibilité à laquelle je puisse penser, » déclara Yaze.

« … Quoi ? » demanda Asagi.

« L’étudiante transférée a quelque chose sur Kojou, j’en suis sûr, » déclara Yaze.

« E-Euh ? Quelque chose sur lui ? » Demanda Asagi.

Asagi avait été décontenancée pendant un moment par la suggestion de Yaze. Mais Yaze avait parlé d’une voix très sérieuse.

« Eh bien… quelque chose comme un secret embarrassant qu’elle menace de révéler… Quelque chose te vient-il à l’esprit comme ça ? » demanda Yaze.

« Son comportement quand il est avec l’élève transféré n’est pas naturel, » répondit Asagi.

Asagi avait gémi en se rappelant le comportement de Kojou ces derniers temps. Tous ces souvenirs étaient désagréables, mais elle pouvait accepter ce comportement à la suite de l’intimidation de Yukina Himeragi. En y repensant, Yukina avait elle-même dit quelque chose.

Qu’elle était l’Observatrice de Kojou ou quelque chose du genre… !

« Ouais. Tu vois ? » demanda Yaze.

De l’autre côté de l’appel, Yaze avait fait entendre une voix en triomphe apparent, ce qui avait vraiment ennuyé Asagi.

« Alors, que dois-je faire ? » demanda Asagi.

« Hmm… et si tu mettais un terme à ses plans en séduisant Kojou ? » demanda Yaze.

« Hein !? Pourquoi est-ce que je dois séduire… !? » Asagi avait crié de nouveau dans la panique, d’une manière irresponsable même selon les critères de Yaze. Mais même maintenant, Yaze parlait d’une voix sérieuse.

« L’approche sexy est l’un de tes principes de base de la collecte de renseignements. Tu sais, des pièges à miel, » déclara Yaze.

« Motoki… tu t’amuses vraiment bien avec ça, n’est-ce pas ? » demanda Asagi.

« Oh non, qu’est-ce que tu dis ? Je pense sérieusement pour une fois pour le bien de mon amie d’enfance. Je veux aussi aider Kojou en tant qu’ami, vu qu’il est inquiet et qu’il ne peut en parler à personne, » déclara Yaze.

« D’accord… en tant qu’ami. Des amis de part en part, » déclara Asagi.

Bien que conscient que Yaze était à la traîne, Asagi avait eu du mal à contester sa logique lorsqu’il l’avait formulée comme ça. Mais même si elle avait essayé l’approche sexy, elle ne savait pas comment s’y prendre compte tenu de sa relation avec Kojou. Si c’était si facile d’attacher ce crétin, Asagi n’aurait pas eu autant de mal dès le départ.

« Il est temps pour moi d’appeler Hiina. On en reparlera une autre fois, » déclara Yaze.

Interjectant soudain, Yaze interrompit l’appel de sa fin. Hiina était le nom de la petite amie aînée que Yaze avait rencontrée pendant les vacances d’été et qu’il fréquentait actuellement.

« Attends — Je n’avais pas fini de parler — c’est comme ça que tu te comportes avec ta précieuse amie d’enfance !? » s’écria Asagi.

Malgré les objections véhémentes d’Asagi, l’appel était déjà terminé. Asagi avait jeté grossièrement son téléphone portable, se retrouvant sur le lit.

« Si ce n’est pas une chose, c’en est une autre…, » déclara Asagi.

Elle s’était assise devant son bureau en grommelant. Des vêtements occidentaux étaient sortis de son placard.

Il y avait des magazines, des cosmétiques et des peluches ici et là. La chambre d’Asagi était vraiment une chambre de fille.

Mais le coin autour du bureau se trouvait la seule exception. Un moniteur spartiate de bureau avait été connecté à un cluster de PC monté en parallèle sur un rack. L’ordinateur était au même niveau que ceux utilisés dans les entreprises informatiques ou les laboratoires universitaires, mais ici, il reposait sur un simple bureau. C’était une scène surréaliste.

Bien que personne d’autre que ses amis les plus proches ne le sache, Asagi était une programmeuse informatique très douée. Bien sûr, elle ne s’appelait pas ainsi, mais le monde des hackers lui avait donné le surnom embarrassant de « Cyber Impératrice ». Elle avait mis à profit son passe-temps personnel pour faire du travail à temps partiel bien rémunéré pour des entreprises de l’Île d’Itogami et de la Corporation de Management de l’île Artificiel.

Cela dit, elle n’avait pas vraiment envie de travailler aujourd’hui. Pensant qu’elle pourrait aussi se plaindre à Rin Tsukishima, si elle était encore éveillée, Asagi vérifia ses messages et remarqua l’existence d’un e-mail qui ne lui était pas familier.

L’adresse de l’expéditeur était celle de la Kano Alchemical Industries Corporation. C’était une grande entreprise qui avait déjà fait appel à Asagi de nombreuses fois.

Mais ce n’était pas une demande pour faire un travail payant. Le message ne contenait qu’une paire de mots.

« Demande de déchiffrage… ! » murmura Asagi. « Qu’est-ce que c’est ? Ça ne ressemble pas à un e-mail de virus, mais… »

Comme Asagi inclinait la tête, elle ouvrit les données jointes.

Un assortiment de caractères bizarres d’origine inconnue avait été exposé devant elle. Le système était extrêmement complexe, l’arrangement complètement fou. Elle différait de toute langue connue parmi les peuples de la Terre. Mais elle différait des sorts utilisés dans la sorcellerie et le ritualisme. N’importe quel linguiste, ou même des équipes d’utilisateurs de magie auraient sans doute du mal à le déchiffrer. Mais…

« Un puzzle ? Tu as beaucoup de cran pour me défier, » déclara Asagi.

Asagi gloussa amusée, se repositionnant devant le moniteur.

Son instinct de hackeuse lui avait dit que ce n’étaient pas des caractères qui existaient pour le bien des hommes. C’est pourquoi ils ne pouvaient être déchiffrés par aucune approche linguistique ordinaire.

C’était un langage écrit pour quelque chose qui n’était pas humain. C’était un programme… des codes de commande pour contrôler quelque chose avec une architecture spéciale inconnue de l’homme moderne.

Asagi s’était plongée dans le décryptage des caractères, en partie par dépit et pour échapper aux réalités de la vie réelle, et aussi parce qu’elle avait été stimulée par pure curiosité intellectuelle. Les caractères démontés et bizarres formaient un mot traduit à l’écran.

« Nalakuvera… ? » marmonna brusquement Asagi en regardant le seul mot qui venait à la surface de l’écran.

Dans le Sanctuaire des Démons de la Ville d’Itogami, la nuit s’était prolongée…

***

Chapitre 2 : Révélation de la Terreur

Partie 1

C’était une chambre dans un immeuble d’appartements avec vue sur la mer. Baigné par les rayons du soleil du matin qui s’échappait par la fenêtre, Kojou Akatsuki s’était réveillé.

« Kojou ! Allez, Kojou ! »

La voix qui l’avait réveillé était celle de Nagisa, qui bourdonnait dans ses oreilles avec 50 pour cent plus de lustre que d’habitude.

Après s’être changée depuis longtemps dans son uniforme d’écolière, elle avait ouvert les rideaux de la chambre de Kojou, arrachant la couverture sous laquelle il essayait de s’échapper de la lumière directe du soleil.

« C’est le matin. Réveille-toi. Tu vas être en retard. Qu’est-ce que tu vas faire pour le petit-déjeuner ? Aaah, tu as encore éteint ton réveil, n’est-ce pas !? As-tu mis de l’ordre dans tes manuels scolaires ? Tes devoirs ? Et tes vêtements sont partout sur le sol. Attends, qu’est-ce que c’est !? Pourquoi ce smoking est-il tout brûlé ? » demanda Nagisa.

« Désolé, Nagisa… tu peux me laisser dormir 30 secondes de plus ? » demanda Kojou.

Kojou fit un vague gémissement d’une voix cassée alors qu’il enterrait son visage dans son oreiller.

Quand Kojou et Yukina avaient terminé leur rencontre avec Dimitrie Vattler et qu’ils étaient rentrés chez eux, il était plus de trois heures du matin. Bien sûr, il manquait de sommeil. Le smoking carbonisé était naturellement la faute de l’attaque de Vattler, ce qui n’avait fait qu’ajouter à sa fatigue.

« Tu l’as dit tout à l’heure, Kojou ! Ce n’est pas ma faute si tu es vraiment en retard ! » déclara Nagisa.

Il sentit Nagisa quitter la pièce en soupirant de résignation apparente.

Couvrant son visage de la couverture qu’il avait récupérée, Kojou poussa un soupir de soulagement. En entendant les pas de sa petite sœur s’éloigner, la tête endormie de Kojou se souvient des détails de leur conversation avec Vattler la veille au soir.

***

« … Cette Aura tout à l’heure…, Regulus Aurum, eh… ? Comme c’est inattendu. Il semble que cela vient confirmer que les rumeurs d’un homme ordinaire ayant consommé le quatrième Primogéniteur valaient vraiment la peine que je m’y attarde, » déclara Vattler.

Ainsi parlait l’aristocrate de l’Empire du Seigneur de Guerre complètement indifférent malgré l’attaque soudaine contre Kojou.

Le pont supérieur du paquebot de croisière Oceanus Grave était immense. Alors que la brise nocturne faisait tourner les bords de son manteau, un regard de plaisir se fit sentir sur son visage.

« … Vous connaissez Regulus Aurum… ? » demanda Kojou.

D’un regard déconcerté, Kojou fixa le visage souriant innocemment de Vattler.

Bien qu’il ressemble à un jeune homme d’une vingtaine d’années, c’était un vampire de la vieille garde, un monstre qui avait vécu plusieurs fois plus longtemps qu’il n’en avait l’air. Bien sûr, il possédait beaucoup plus de souvenirs que Kojou. Vattler devait savoir beaucoup de choses que Kojou ne savait pas. Et il était probable que la connaissance du quatrième Primogéniteur, c’est-à-dire Kojou lui-même, n’avait pas fait exception à ça.

« C’est le cinquième Vassal Bestial d’Avrora Florestina, le Sang de Kaleid, non ? J’avais entendu dire que c’était assez sauvage et difficile à contrôler, mais vous l’avez bien apprivoisé. Le sang du médium spirituel devait en effet être très beau, » déclara Vattler.

Kojou grimaça son visage sans rien dire devant les paroles de Vattler qu’il prononça avec désinvolture. Le « Sang de Kaleid », « Avrora Florestina »… ces mots avaient perturbé le psychisme de Kojou, apportant un mal de tête difficile à endurer.

Bien qu’il ait dû la rencontrer dans le passé, Kojou ne s’en souvenait même pas d’une once. La mémoire de Kojou avait été volée, comme si elle avait été scellée par une puissante malédiction.

« Quelle relation aviez-vous avec Avrora ? » demanda Kojou alors qu’il souffrait d’un terrible mal de tête sans raison apparente.

Se comportant comme un acteur sur scène, Vattler avait mis la paume de sa main sur sa propre poitrine, un désir ardent dans ses yeux rétrécis.

« N’ai-je pas dit ça au début ? Je l’aime. Je l’aime vraiment. Je lui ai juré mon amour éternel, » déclara Vattler.

« Jurez de l’aimer… ? Ne faites-vous pas partie du clan du Premier Primogéniteur ? » demanda Kojou.

« Eh bien, oui. Mais notre Primogéniteur n’est pas du genre à se soucier de ce genre de choses, voyez-vous, » déclara Vattler.

Pendant que Vattler parlait, son sourire exposait ses canines blanches.

« Si le “sang” est fort, tout va bien. De solides familles de sang survivent, peu importe qui étaient leurs ancêtres. N’est-ce pas comme ça avec les vampires ? Alors, parlerons-nous d’amour avec tendresse, Kojou Akatsuki ? » déclara Vattler.

« Attendez, attendez ! Pourquoi est-ce comme ça !? » demanda Kojou.

Kojou se dépêcha de repousser le Vattler qui approchait.

« Hm ? » demanda Vattler.

« N’est-ce pas à Avrora que vous avez juré d’aimer ? » demanda Kojou.

« Mais elle n’existe plus. Vous l’avez consumée, n’est-ce pas ? » demanda Vattler.

Kojou avait avalé son souffle d’un « urk » aux mots que Vattler avait lancés avec désinvolture.

Kojou n’avait aucun souvenir de cette nuit-là. Il ne se souvenait plus de ce qui s’était passé. Mais Kojou, qui avait été un être humain normal jusqu’à quelques mois à peine auparavant, avait obtenu le pouvoir du vampire connu sous le nom de quatrième Primogéniteur.

La seule possibilité envisageable était que Kojou ait consommé le Primogéniteur, en fusionnant avec le quatrième Primogéniteur précédent et en la consommant, saisissant ses capacités et son être même.

Pour Kojou, un supposé simple humain, de consommer un vampire… il avait imaginé que cela avait dû faire un spectacle abominable.

Cependant, rien dans le ton de la voix de Vattler ne suggérait qu’il réprimandait Kojou.

En effet, son visage souriant semblait faire l’éloge de Kojou lorsqu’il léchait le coin de ses lèvres retroussées.

« … Cependant, je vous dédie mon amour pour elle, l’héritier de son “sang”. Après lui avoir juré mon amour éternel, ma conduite est très naturelle, n’est-ce pas ? » demanda Vattler.

« Je vous dis que c’est de la logique de merde ! Alors, quoi, tout est permis si c’est la même lignée !? » demanda Kojou.

« Mais bien sûr. Le fait que vous ayez hérité du pouvoir du quatrième Primogéniteur signifie qu’elle vous a accepté. Comparé à ça, le fait d’être deux hommes n’est qu’une petite chose insignifiante, » déclara Vattler.

« Ce n’est pas insignifiant. C’est un gros problème ! Et allez-vous arrêter d’utiliser votre langue comme ça !? » déclara Kojou.

Kojou avait crié après le jeune aristocrate qui agitait sa langue de façon provocante.

Puis, repoussant Kojou, Yukina s’avança devant lui, l’étui à instruments à la main.

« Duc Ardeal… il y a quelque chose que je dois vous demander, » déclara Yukina.

Vattler avait jeté un regard mystifié sur l’intrusion inattendue et interdite. Il semblait qu’il n’avait pas pris plus note de l’existence de Yukina que celle d’un caillou jusqu’à présent.

« Et vous êtes ? » demanda Vattler.

« Je m’appelle Yukina Himeragi, Chamane Épéiste de l’Organisation du Roi Lion. Je suis venue ce soir en tant qu’observatrice du quatrième Primogéniteur, » déclara Yukina.

« Hmm… Je vois. Alors, la collègue de Mlle Sayaka ? » demanda Vattler.

Vattler baissa les yeux vers Yukina, en murmurant son identification formelle.

« D’ailleurs, le corps de Kojou porte la même odeur que votre sang… Étiez-vous par hasard le médium spirituel de Regulus Aurum ? » demanda Vattler.

« … ! ? »

Tout le corps de Yukina s’était maladroitement raidi face à Vattler, annonçant la vérité de façon inattendue.

L’expression de Kojou s’était aussi figée. Kojou avait hérité de douze vassaux bestiaux du précédent quatrième Primogéniteur. Cependant, ils n’avaient pas reconnu Kojou comme leur maître, ce qui les rendait incontrôlables, une situation dangereuse qui perdurait encore aujourd’hui.

Parmi eux, Regulus Aurum était le seul qu’il avait réussi à dompter. Au bout de nombreuses péripéties, Kojou avait finalement réussi à mettre un Vassal Bestial sous son contrôle en suçant le sang de Yukina.

Bien sûr, ils n’avaient pas été négligents au point de parler du fait qu’il avait sucé le sang de la fille qui veillait sur lui aux autres, mais…

« Vous voulez dire… qu’on peut même le voir à l’odeur du sang… !? » demanda Kojou.

Kojou avait été fortement déconcerté lorsqu’il avait posé une question. Il sentit un regard pénétrant par-derrière. Il connaissait la source sans même prendre la peine de regarder en arrière. C’était Sayaka Kirasaka, regardant Kojou avec des yeux remplis de haine.

Kojou avait eu un frisson dans la colonne vertébrale à cause de la soif de sang pur qui lui était imposée. Sayaka s’était qualifiée de spécialiste des malédictions et des assassinats. Certes, ce niveau de la soif de sang, c’était plus que suffisant pour jeter une malédiction meurtrière sur une personne ou deux.

« Non, j’ai menti. Je voulais juste le dire, » déclara Vattler.

Le visage souriant de Vattler semblait tout à fait satisfait, comme s’il était tout à fait satisfait de voir Kojou et Yukina se balancer sur leurs talons.

« Mais, voyez-vous, si vous êtes vraiment une candidate pour être la “compagne de sang” de Kojou, vous êtes ma rivale amoureuse. En signe de respect, je ferai une exception et répondrai à votre question. Que souhaitez-vous demander ? » demanda Vattler.

« Il y a beaucoup de mal avec ce préambule. Ce n’est pas une candidate ou votre rivale amoureuse ! » s’écria Kojou.

Bien que Kojou l’ait sérieusement réfuté, Vattler avait laissé passer les mots comme s’il ne l’écoutait pas du tout.

Yukina avait fait une forte expiration, avec un regard aiguisé sur son visage alors qu’elle regardait Vattler directement.

« Veuillez nous faire part de la raison de votre visite sur l’Île d’Itogami. Ou alors, votre objectif est-il d’établir une relation inconvenante avec le quatrième Primogéniteur ? » demanda Yukina.

Même la façon provocatrice de Yukina n’avait pas fait s’effondrer la façade souriante de Vattler. En effet, ses sourcils s’élevaient dans un plaisir apparent.

« Bien sûr, c’est tout à fait mon objectif. Ah, mais je suis négligent. Il y avait aussi une autre affaire, » déclara Vattler.

« Alors vous êtes venu pour ça ! » marmonna Kojou en grommelant. Yukina, enveloppée d’une aura hostile, fixa Vattler comme pour l’intimider.

« Et cette autre question est… ? » demanda Yukina.

« J’ai dû prendre les dispositions nécessaires. J’ai pensé que si ce Sanctuaire des Démons est bien le territoire du Quatrième Primogéniteur, que je devais d’abord faire un salut approprié. Après tout, cela pourrait être un peu gênant pour vous, » déclara Vattler.

Pendant que Vattler parlait, il avait gracieusement claqué des doigts. Sur ce signal, une horde de serviteurs émergea de l’intérieur du navire l’un après l’autre. Le chariot de nourriture qu’ils transportaient était rempli à ras bord de divers plats. On avait apporté de la nourriture dans la salle de réunion pour la fête, mais cela semblait minable par rapport à la cuisine exquise d’ici.

« … Qu’entendez-vous par “gênant” ? » demanda Yukina sans même jeter un coup d’œil à la nourriture qui avait été apportée.

Vattler, s’engageant dans de mauvaises manières en ramassant une tranche de jambon cru avec ses doigts, avait fait un sourire.

« Connaissez-vous le nom de Kristof Gardos, Kojou ? » demanda Vattler.

« Non, qui est-ce ? » demanda Kojou en réponse.

Tandis que Kojou secouait la tête, un homme qui semblait être le majordome de Vattler lui remit un verre de vin. Comme Kojou était mineur, il avait commencé à refuser, mais il avait cédé en voyant le visage de l’homme. Bien que son comportement soit calme et intellectuel, c’était un homme âgé avec un visage sévère qui portait une aura incroyablement dominatrice. Il y avait une vieille et grande cicatrice sur une joue, faisant croire qu’il avait eu une vie difficile.

***

Partie 2

Vattler accepta également un verre du majordome, le levant de Kojou alors qu’il portait un toast. Kojou avait dû admettre à contrecœur que c’était parfait.

« C’est un ancien soldat originaire de l’Empire du Seigneur de Guerre, son nom étant brièvement connu en Europe comme un terroriste. En tant que dirigeant d’un groupe de radicaux connu sous le nom du Front de l’Empereur de la Mort Noire, il a été responsable d’attentat contre l’Assemblée nationale à Prague il y a environ dix ans, ce qui a fait plus de 400 morts. »

« J’ai entendu parler du Front de l’Empereur de la Mort Noire. Mais n’ont-ils pas été anéantis il y a des années ? Je suis sûr que leur chef a été tué…, » Kojou murmura en se souvenant vaguement d’un vieux reportage. Kojou s’en souvenait à l’époque où il était à l’école primaire, donc cela avait dû être un incident assez grave.

« Oui. Je l’ai tué, bien qu’il ait été un vieil homme bête âgé avec une capacité spéciale quelque peu gênante, » déclara Vattler.

Alors que Vattler inclinait son verre de vin, il répondit avec un sourire désinvolte. Kojou fixa silencieusement le jeune aristocrate se tenant devant ses yeux. En dépit de son comportement frivole actuel, il sentait vivement qu’il s’agissait d’une figure importante dans le monde en général.

« Gardos est un survivant du Front de l’Empereur de la Mort Noire. Ou, pour être plus précis, Gardos sert de nouveau chef commandant les restes du Front de l’Empereur de la Mort Noire. Il a après tout une carrière illustre de terroriste, » déclara Vattler.

« Attendez un peu. Vous avez dit que votre raison de venir sur l’Île d’Itogami est liée à ce Gardos ? » demanda Kojou en sentant soudain une mauvaise prémonition. Vattler avait fait ce qui semblait être un signe d’admiration.

« Votre vivacité d’esprit rend les choses faciles, Kojou. Précisément. On m’a rapporté que Gardos, et ses subordonnés du Front de l’Empereur de la Mort Noire avec lui, ont infiltré cette île, » déclara Vattler.

« … Pourquoi les radicaux européens viendraient-ils jusqu’ici ? » demanda Kojou.

« Qui sait… ? Ils ont sûrement quelque chose en tête, » déclara Vattler.

Kojou grinça des dents devant l’ignorance feinte du jeune aristocrate. Après avoir observé en silence jusqu’à présent, Sayaka avait soudain parlé à Kojou sur un ton d’homme d’affaires.

« Le Front de l’Empereur de la Mort Noire est un groupe d’hommes-bêtes suprématistes. Leurs objectifs sont la rupture complète du Traité de la Terre Sainte et la chute du Premier Primogéniteur qui règne sur l’Empire du Seigneur de Guerre…, » déclara Sayaka.

Sans réfléchir, Kojou avait jeté un regard irrité sur l’attitude froide de Sayaka, qui semblait lui dire : « Tu ne le savais même pas ? »

« Tout cela a encore moins à voir avec cette île, » déclara Kojou.

« Non, Senpai. C’est inexact. » Yukina réprimanda Kojou d’une petite voix.

« Tout à fait, » déclara Vattler, faisant un clin d’œil malicieux. « L’Île d’Itogami est un sanctuaire de démons… une ville établie selon le Traité de la Terre Sainte. Pour eux, c’est une raison suffisante pour créer un incident ici. Le Front de l’Empereur de la Mort Noire s’enorgueillit de son symbolisme. »

« Qu… Qu’est-ce que c’est que cette logique unilatérale ? » déclara Kojou en gémissant.

« Cela dit, le Japon n’est pas le seul pays à avoir un sanctuaire de démons. Il est naturel de supposer qu’ils ont une autre raison de venir sur l’Île d’Itogami en particulier, » déclara Vattler.

« Une autre raison… comme quoi ? » demanda Kojou.

« Cela, je ne le sais pas, » déclara Vattler.

Vattler secoua la tête avec insouciance. Sa voix était d’une étrange légèreté.

« Si j’osais deviner, Hmm, ils chercheraient peut-être un moyen de vaincre un Primogéniteur, car tuer le Premier Primogéniteur est leur objectif final, » déclara Vattler.

« … Et quoi, vous êtes d’accord avec ça ? » Kojou soupira d’un air abasourdi.

Les Primogéniteurs étaient les plus anciens, les plus puissants de tous les vampires. Si le Front de l’Empereur de la Mort Noire avait obtenu le pouvoir de vaincre ce Primogéniteur, cela signifiait qu’il représentait une menace pour l’existence de tous les autres vampires également. Vattler aurait dû être en danger comme tout le monde. Mais…

« Ça ne me dérange pas vraiment… C’est ce que le vieux dirait. Compte tenu des diverses circonstances qui me préoccupent, je ne peux pas dire le contraire, » déclara Vattler.

Ouvrant les bras comme si c’était le problème de quelqu’un d’autre, Vattler avait laissé échapper un rire riche de sens.

Yukina fixa le mystérieux jeune aristocrate d’un regard très sérieux sur son visage.

« Avez-vous l’intention de tuer Kristof Gardos ? » demanda Yukina.

« Pas du tout. Je n’ai pas l’intention de faire quoi que ce soit d’aussi gênant. En premier lieu, mes Vassaux Bestiales ne sont pas orientés vers un travail aussi délicat. Leur spécialité est plutôt de brûler les villes jusqu’au sol, » déclara Vattler.

Vattler s’était échappé du contre-interrogatoire de Yukina comme une anguille. « Fier de ça, hein ? » murmura Kojou d’un soupir silencieux. Cependant, c’était la vérité flagrante que les Vassaux Bestiales des vampires n’étaient pas orientés vers des attaques de précision. Si Vattler n’avait pas l’intention de se battre contre les terroristes, c’était un soulagement… mais au moment où Kojou s’était permis un sentiment de soulagement…

« Mais vous savez, si le camp de Gardos venait à essayer de me tuer, je serais obligé de les engager. Cela sera de la légitime défense. N’est-ce pas le cas ? » demanda Vattler.

Comme s’il se moquait de Kojou pour avoir baissé sa garde, Vattler parla, cherchant son accord. C’est à ce moment-là que Kojou, lui aussi, avait finalement compris ce qu’il faisait.

Vattler, qui avait tué le chef du groupe de radicaux connu sous le nom de Front de l’Empereur de la Mort Noire, était pour ainsi dire la cible de leur revanche. Les restes du Front de l’Empereur de la Mort Noire attendaient sûrement l’occasion de se venger de lui, même maintenant.

Si Gardos obtenait vraiment le pouvoir de tuer un Primogéniteur, il irait directement chez Vattler. Vattler aussi le voulait.

« Vous êtes venu sur l’Île d’Itogami pour railler les terroristes et les faire sortir, hein ? Monter à bord de ce navire ridiculement tape-à-l’œil est aussi…, » commença Kojou.

« Non, non… mon premier objectif était de vous rencontrer, mon bien-aimé. » Tandis que Vattler prononçait ces mots, il jeta un regard insistant sur Kojou.

La voix de Kojou s’était déchirée. « Comme si c’était le moment de plaisanter. Si vous voulez faire la guerre, faites-le dans votre propre pays. Ne causez pas d’ennuis dans les villes des autres ! »

« Bien sûr, j’aimerais qu’on puisse éviter de tels ennuis. Si les agents anti-démon de cette ville capturaient Gardos, je n’ai aucune plainte à formuler. Ce serait bien si on m’épargnait cette peine. Bien sûr, s’ils peuvent l’attraper, » déclara Vattler.

Avec un petit secouage de tête et un haussement d’épaules, Vattler poussa un soupir exagéré.

Puis, il tourna un beau visage souriant vers Kojou ce qui le fit frissonner.

« Mais avec les neuf Vassaux Bestiales qui m’obéissent… Si le danger m’atteint, moi, leur maître, qui sait ce qu’ils pourraient faire ? Couler cette île ne les préoccupe pas beaucoup. C’est pourquoi j’ai pensé que je devrais m’excuser auprès de vous… à l’avance, » déclara Vattler.

« Quoi… !? » Cette fois, c’était Kojou qui s’était exclamé.

Vattler venait de dire clairement qu’il était prêt à couler l’île Itogami. Si de simples douzaines de terroristes en avaient après sa vie, il détruirait l’île et tous ceux qui s’y trouvaient.

Et il avait fait cette déclaration devant Kojou. C’était aussi sa déclaration selon laquelle Kojou ne pouvait rien faire pour l’arrêter. Si Kojou se mettait en travers de son chemin, il ferait aussi chuter Kojou…

Ces sentiments, cachés derrière ses paroles frivoles et superficielles, étaient les vrais sentiments de Dimitrie Vattler.

Ce n’était pas que ça ne l’avait pas énervé. Mais en vérité, Kojou n’avait aucun moyen d’arrêter Vattler.

Car même si Kojou tentait d’arrêter Vattler par la force, le combat qui s’ensuivrait entre eux causerait à lui seul d’immenses dommages à l’Île d’Itogami.

Tant que Vattler invoquait la légitime défense, ni Yukina, ni Sayaka, ni l’Organisation du Roi Lion ne pouvaient lever la main pour l’arrêter. Le simple fait que des terroristes en avaient après la vie de Vattler, un émissaire officiel étranger, n’était pas un motif suffisant pour l’expulser de l’Île d’Itogami.

La situation n’offrant aucune issue de secours, Kojou avait commencé à sombrer dans le désespoir lorsque…

« Si je puis me permettre, vous n’avez pas à vous inquiéter, Duc Ardeal. »

C’était Yukina qui avait donné son opinion d’une voix claire et froide.

« H-Himeragi ? » demanda Kojou.

« … Comment ça, je me le demande ? Vous ne suggérez pas que Kojou pourrait s’occuper de Gardos à ma place ? Je pense que même mes Vassaux Bestiales se comportent mieux que celles du 4e Primogéniteur…, » déclara Vattler.

Kojou et Vattler avaient tous les deux été surpris en posant leurs questions en réponse.

Les traits gracieux de Yukina hochèrent la tête en faisant preuve d’une détermination tranquille.

« Je suppose que oui. Par conséquent, j’appréhenderai les restes du Front de l’Empereur de la Mort Noire à la place du quatrième Primogéniteur, » déclara Yukina.

« … Yukina !? » Sayaka avait crié. Aussi talentueuse qu’elle fût, quand Yukina était concernée, sa réserve semblait s’envoler par la fenêtre. Mais Kojou comprenait trop bien pourquoi elle était nerveuse.

« Pourquoi ça doit être comme ça !? S’en prendre à ce Gardos à ma place ou quoi que ce soit d’autre…, » déclara Kojou.

« Silence, s’il vous plaît, tous les deux. En tant qu’observatrice, c’est la conclusion évidente. Je ne peux pas permettre au quatrième Primogéniteur d’entrer en contact avec des terroristes, après tout, d’autant plus qu’ils cherchent à tuer des Primogéniteurs, » déclara Yukina.

Yukina avait parlé d’une voix dure et plate. Pour un observateur impartial, elle avait l’air d’avoir la tête bien froide, mais c’était le regard qu’elle faisait toujours lorsqu’elle plantait ses talons dans le sol. Ayant une personnalité si sérieuse, elle était assez obstinée une fois qu’elle s’était fixée sur quelque chose.

Aussi, Vattler regarda Yukina comme s’il se méfiait d’elle.

« Hmm… Je vois. Intéressant… peut-être devrais-je dire, comme je devrais m’y attendre de ma rivale amoureuse ? » déclara Vattler.

« Hein ? Non, ce n’est pas du tout comme ça que…, » déclara Yukina.

L’expression raide de Yukina s’était adoucie en laissant échapper une voix perplexe.

Mais le jeune aristocrate semblait prendre plaisir à faire ce qui semblait être un rire cruel en faisant sa déclaration.

« Très bien, voyons d’abord la puissance de la Chamane Épéiste de l’Organisation du Roi Lion. Montrez-moi si vous êtes digne d’être la compagne de Kojou, » déclara Vattler.

« Ce n’est pas à vous d’en décider, » murmura Kojou, mais Yukina et Vattler l’ignoraient complètement quand ils se regardaient.

Jetant un coup d’œil sur le côté, il vit que Sayaka était dans un léger étourdissement, encore sous le choc. Apparemment, Yukina lui avait dit de se taire, ce qui lui avait fait un choc.

Yukina fit un signe de tête silencieux au jeune aristocrate en lui faisant un sourire narquois.

Telles étaient les circonstances du rendez-vous de cette nuit-là avec Vattler. Sur cette note, Kojou et Yukina avaient terminé leur rencontre nocturne avec l’envoyé du Premier Primogéniteur.

Et puis…

***

 

« Kojou ! Oh, Kojou ! »

Tout à coup, en entendant une voix à son oreille, les yeux de Kojou frémirent de surprise.

Ce n’était certainement pas une voix désagréable. En effet, il avait un son intime à l’oreille. Mais il avait toujours un très mauvais pressentiment. Pourquoi entendait-il sa voix ici… ?

« Vas-tu dormir combien de temps ? Si tu ne te réveilles pas vite, tu vas être en retard, » déclara la voix.

Avec le corps violemment secoué, Kojou avait ouvert lentement les paupières.

Peut-être qu’il était encore dans le brouillard parce qu’il avait fait un long rêve. Il n’avait pas vraiment remarqué qu’il y avait une fille dans son champ de vision. Ses cheveux étaient bien coiffés, ses cils très galbés. Elle avait un visage étonnamment bien maquillé et élégant. C’est la chaleur de son corps doux et le parfum du savon qui avaient réveillé Kojou.

« A-Asagi ? » demanda Kojou.

« Bonjour, Kojou. Tu es en retard, » déclara Asagi.

C’était le matin dans la résidence Akatsuki, dans sa propre chambre très familière. En regardant le Kojou fraîchement réveillé, Asagi Aiba avait souri.

***

Partie 3

On disait qu’une surprise venait du degré de différence entre un événement inattendu et la normalité, mais quand la différence était trop grande, on était d’autant plus calme que la situation était simplement trop absurde.

Au fil des surprises, le fait qu’une fille de sa classe se présente sur son propre lit était beaucoup plus choquant pour lui que toute rencontre avec un aristocrate plus grand que nature de l’Empire du Seigneur de Guerre.

Montée au sommet d’un Kojou complètement abasourdi, Asagi avait frappé le bout du nez de Kojou.

« Pourquoi, Kojou, toi... Si tu continues à dormir comme ça, je vais te faire des farces ! » déclara Asagi.

« … Qu’est-ce que tu fais ? As-tu mangé quelque chose de bizarre… ? » Kojou se plaignait de sa conduite trop mignonne qui la rendait d’autant plus inquiétante.

En se basant uniquement sur l’apparence du visage, Asagi ne pouvait être classée que comme une véritable beauté, mais elle n’était pas du genre à être courtoise envers les garçons, que ce soit par accident ou volontairement. Elle était lunatique, n’accordait aucune attention au sexe opposé et n’exigeait aucune attention particulière en retour. Si Kojou devait la décrire, il devrait la classer dans la catégorie des « plus proches d’être un gars ». Même s’il était gênant de le dire à voix haute, Kojou considérait que c’était l’un de ses arguments de vente. Le fait d’avoir quelqu’un comme ça qui se comportait de façon si mignonne envers lui l’avait rendu méfiant.

Asagi elle-même semblait se rendre compte que c’était vraiment sans espoir, retournant à son ton cynique habituel.

« Je ne l’ai pas fait. Les gars aiment ce genre de choses… Euh… c’est ce qu’on dit sur le Net et tout, » déclara Asagi.

« Je n’en suis pas vraiment sûr, mais je pense qu’il y a probablement quelques failles dans cette information, » déclara Kojou.

« Ah… tu le penses aussi ? Ça m’a paru un peu bizarre, » déclara Asagi.

« Bon sang, » Asagi regarda le plafond en soupirant, comme si tout cela lui causait des ennuis.

En regardant son comportement, Kojou en était maintenant sûr. Asagi avait envahi le lit de Kojou avec un autre objectif en tête. Nul doute que cet objectif n’était rien de bon…

« Au fait, peux-tu bouger ? Tu es lourde, » déclara Kojou.

« Ça ne te dérange pas de dire des choses grossières haut et fort, n’est-ce pas ? Je bougeais, que tu le dises ou… euh, qu’est-ce que c’est, c’est dur… ? » demanda Asagi.

Avec un petit bruit d’effort, Asagi, assise à cheval sur Kojou, qui était couchée face vers le haut, se déplaça pour sortir du lit quand elle inclina la tête en touchant par hasard quelque chose d’inconnu près du bas-ventre de Kojou. La main mince d’Asagi avait saisi avec aisance une partie de sa chair qui s’était animée comme une réaction physiologique normale le matin.

« K-K-K-K-K-K-Kojou ! » s’écria Asagi.

Réalisant la vraie nature de ce qu’elle touchait, Asagi avait poussé un cri mélangé à un hurlement.

Asagi, qui avait des sœurs, mais pas de frères, en avait inconsciemment peur. Kojou s’était senti offensé en sautant du lit.

« Pourquoi t’énerves-tu contre moi ? C’est toi qui as décidé de me ramper dessus ! » déclara Kojou.

« Oh mon Dieu… comment as-tu pu me forcer à le toucher ? Cette dure sensation de chair… ughhh, dégueulasse ! » s’écria Asagi.

« Eh bien, ne me blâme pas !! » s’écria Kojou.

Blessé par la réaction d’Asagi, Kojou s’y était également opposé. Alors qu’il essayait de calmer la fille énervée, ils avaient fini par tomber tous les deux sur le lit.

« … Asagi, désolée de t’avoir poussée à faire ça. Je dois aller au club des pom-pom girls, mais as-tu réussi à réveiller Kojou ? » demanda Nagisa.

À ce moment-là, Nagisa avait ouvert brutalement la porte, faisant irruption avec un bruit rapide. Son visage souriant s’était figé quand elle avait vu Kojou et Asagi s’entrelacer sur le lit.

Kojou et Asagi, eux aussi, s’étaient immobilisés dans leur position actuelle. Un silence étouffant s’était installé au milieu de la pièce.

« … Qu’est-ce que vous faites tous les deux ? » demanda Nagisa.

C’était bien la question digne de Nagisa qui avait brisé le silence.

« N-Nagisa !? Je vois, c’est toi qui as laissé Asagi entrer dans la maison toute seule… ! » déclara Kojou.

Kojou, d’une manière ou d’une autre, avait compris la situation. Après avoir pris un moment pour réfléchir, bien sûr que c’était logique.

Même Asagi ne serait pas assez audacieuse pour entrer seule dans la chambre de Kojou. Sauf si quelqu’un l’avait invitée dans la maison.

Mais sa complice, Nagisa, n’avait sûrement pas imaginé que Kojou et Asagi se comporteraient de la sorte.

« Je ne me souviens pas lui avoir demandé de coucher avec toi. Qu’est-ce qu’Asagi a attrapé, Kojou… ! » s’écria Nagisa.

« Quoi, est-ce ma faute… !? » demanda Kojou.

Prenant le blâme pour un coup du destin clair, Kojou avait envie de pleurer. Et, comme pour lui donner un coup de pied pendant qu’il était à terre, derrière le visage féroce de Nagisa, une petite silhouette s’était fait connaître.

« … Senpai ? Qu’est-ce que tu fais ? » demanda Yukina.

« Ah, ne fais pas ça ! Si tu regardes ces gens impurs, ça te tachera aussi, Yukina ! » déclara Nagisa.

« … Hein ? » demanda Yukina.

Au moment où Yukina avait regardé dans la pièce, les yeux clignèrent d’un regard perplexe, ses yeux avaient instantanément perdu toute émotion. Leurs deux visages côte à côte avaient des yeux de poupées, sans expression, ce qui leur inspirait d’autant plus de terreur.

« Attends un peu ! Pourquoi Himeragi est-elle aussi dans la maison… ! » demanda Kojou.

« C’est parce que tu as dormi si longtemps ! Je ne pouvais pas la faire attendre dans la chaleur dehors, alors j’ai pensé la laisser entrer pour qu’elle soit plus au frais ! » déclara Nagisa.

Kojou se taisait alors qu’elle faisait sa fulgurante diatribe.

Alors, c’était ça. Ce n’était apparemment pas que Nagisa essayait de piéger Kojou par malice.

Mais quelle était l’atmosphère qui enveloppait la chambre de Kojou et qui l’avait poussé à fuir ?

Asagi, qui était restée dans ce qui ressemblait à une position partiellement clouée au sol, avait mis Kojou, prêt à courir, dans une prise de tête, alors qu’elle lançait sur Yukina un regard provocateur. En revanche, l’expression de Yukina était illisible.

« Je suis désolée, Yukina… Es-tu… contrariée ? » demanda Nagisa.

« Non, pas particulièrement, » déclara Yukina.

La Chamane Épéiste de l’Organisation du Roi Lion répondit à la question nerveuse et inquiète de Nagisa en secouant doucement la tête.

Puis, Yukina hocha la tête à Kojou et Asagi comme si rien ne s’était passé du tout.

« Je crois que je vais attendre dehors après tout. Senpai, prends ton temps, » déclara Yukina.

Elle quitta lentement la pièce, laissant ces mots derrière elle. Son attitude était absolument calme et ordinaire.

Mais une trentaine de secondes après que Kojou eut senti que la porte d’entrée était fermée…

Il entendit un bruit sourd semblable à celui d’un coup de tonnerre qui fit trembler tout le bâtiment.

C’était comme l’impact d’un maître de karaté qui claqua son pied dans le mur devant lui d’une frappe puissante. Kojou tremblait de la sensation froide et absurde qu’il ressentait le long de sa colonne vertébrale.

Asagi regarda entre la réaction de Kojou et la direction dans laquelle Yukina était partie avec un profond intérêt.

« Je me demande si c’est la jalousie qui parle, » demanda Asagi.

« C’est peu probable. Ce n’est pas comme si on sortait ensemble, » répondit Kojou sans réfléchir particulièrement. Pour une raison inconnue, les yeux d’Asagi étaient écarquillés quand elle regardait Kojou.

« … C’est vrai. Ce n’est pas comme si tu sortais avec quelqu’un, » déclara Asagi.

Après ce murmure, qui semblait mémoriser cette pensée dans sa mémoire, Asagi indiqua la direction que Yukina avait laissée comme elle l’avait demandé. « Quel genre de fille est-elle, de toute façon ? »

« Quel genre ? Elle est à quoi elle ressemble. Ce n’est pas une mauvaise personne. Elle peut cependant causer des ennuis parfois, » répondit Kojou.

Kojou poussa un léger soupir alors que les souvenirs passaient devant ses yeux.

« Kojou, cette fille a-t-elle quelque chose sur toi ? » demanda Asagi.

« Quelque chose sur moi ? » demanda Kojou.

« Ouais, un secret que tu ne peux dire à personne d’autre, » déclara Asagi.

Asagi se glissa plus près du visage de Kojou alors qu’elle le demandait.

« N — non… ce n’est pas… ça n’a rien à voir, » déclara Kojou.

Kojou avait inconsciemment détourné les yeux d’Asagi quand la sueur lui avait humidifié le dos.

Maintenant qu’elle l’avait dit, beaucoup trop de choses lui étaient venues à l’esprit : En tant que vampire appelé le quatrième Primogéniteur, ses capacités qui pouvaient brûler la ville, les millions de yens de dommages causés, le fait qu’il avait sucé son sang — il avait l’impression que Yukina avait un certain nombre de secrets qui pouvaient complètement gâcher sa vie.

« Hmmmm. Je vois… même Motoki est parfois dans le mile, » déclara Asagi.

En observant le comportement suspect de Kojou, Asagi fit un signe de tête satisfait.

« Yaze ? Il t’a dit quelque chose ? » demanda Kojou.

Kojou lui avait renvoyé la question avec un grand malaise. Apparemment, ce type avait fait qu’Asagi ait ce comportement excentrique ce matin-là. Mais quoi qu’il en soit…

« Désolée, mais je dois vraiment y aller, » déclara Asagi.

Asagi, parlant avec un sourire étrangement lumineux sur son visage, piétina Kojou et sauta du lit.

« Assure-toi aussi d’arriver à l’heure à l’école. Nagisa, allons à l’école ensemble ! » déclara Asagi.

« Hé, Asagi ? »

Alors qu’Asagi tenait chaleureusement l’épaule encore un peu étonnée de Nagisa, elle lui déclara. « À plus ! » et elle fit signe à Kojou. Kojou se gratta les cheveux ébouriffés en regardant les deux filles sortir de la pièce.

« De toute façon, pourquoi es-tu vraiment venue… ? » demanda Kojou.

Semblant se parler à voix haute, Asagi se retourna un seul instant et répondit. « Hmm… Je me le demande. Une déclaration de guerre… peut-être ? »

Soudain abandonné dans sa solitude, Kojou avait déclaré pour lui. « De quoi s’agit-il ? » alors qu’il inclinait la tête.

Près de la fenêtre, un oiseau tout seul s’était arrêté, regardant Kojou.

L’oiseau, dont les plumes gris foncé semblaient construites en métal, fixait Kojou au milieu des rayons éblouissants du soleil matinal.

 

***

 

Entre-temps…

Une adolescente toute seule se tenait au sommet d’un immeuble dans le district sud de l’Île Sud — le district sud de l’île Itogami.

C’était une adolescente aux cheveux longs. Il y avait un grand étui à instruments noir aux pieds de la jeune fille.

Le regard de la jeune fille était dirigé vers le neuvième étage d’un immeuble d’appartements situé sur la rive opposée, avec une rue interposée entre eux.

Un oiseau avait été arrêté près de la fenêtre de la pièce. La fille empruntait les yeux de l’oiseau pour regarder ce qui se passait à l’intérieur du bâtiment.

« Comme… comme c’est indécent… ! »

Un petit murmure s’échappa des lèvres de la fille. Les joues blanches de la jeune fille étaient teintées d’un soupçon de rouge — peut-être par colère, elle ne pouvait-elle pas être cachée, peut-être par embarras.

« Il semble que l’homme ait effectivement besoin d’une punition appropriée… »

Ses cheveux légèrement pigmentés de châtaignes dansaient et voltigeaient dans la brise forte qui soufflait de la mer.

Se penchant vers le bas, elle avait sorti de son étui à instrument une épée…

C’était une épée à deux mains, de couleur argentée, avec une surface métallique lisse et incurvée.

***

Partie 4

« Hé, Himeragi, » Kojou avait appelé Yukina à l’intérieur du monorail qu’ils utilisaient pour se rendre à l’école.

Yukina, tenant une main courante de couleur métallique, se retourna lentement pour regarder Kojou. Ses yeux, comme des lacs profonds, affichaient la lumière froide qu’il avait vue quand ils s’étaient rencontrés pour la première fois.

« Qu’est-ce qu’il y a, Akatsuki-senpai, qui m’a fait attendre dehors avec une camarade de classe féminine ? » répliqua Yukina d’une manière stoïque et d’une voix robotique. Kojou s’éclaircit la gorge de façon audible.

« J’entends clairement la mauvaise volonté dans ce ton cynique, tu sais, » déclara Kojou.

« Je suis désolée. Excusez-moi, Akatsuki-senpai, qui s’entend très bien avec ses camarades de classe dans son lit le matin, » déclara Yukina.

« Gaaah ! C’est simplement qu’Asagi a décidé de grimper dans mon lit pendant que je dormais ! Elle fait toujours des farces. C’est probablement parce qu’elle s’est fâchée hier, » avait crié Kojou en serrant sa propre tête des deux mains. Selon lui, c’était une théorie très convaincante. En ce qui concerne Asagi, il était très plausible d’avoir une petite rancune à l’idée de s’éclipser de l’entraînement pour le festival sportif en partant avec Yukina.

« Alors Aiba avait fait tout ça toute seule… l’a-t-elle fait ? » demanda Yukina.

Yukina avait fait sortir une expiration qui ressemblait à un soupir.

« C’est ce que je pensais. Bien que je ne sois pas sûre que c’était une “farce”, » déclara Yukina.

« Quoi — Tu veux dire que ce n’était pas juste un malentendu ? » demanda Kojou.

Kojou regardait Yukina en soupirant de soulagement maintenant qu’elle était revenue à son ton de voix habituel. Ce faisant, elle le regarda d’un regard rétréci.

« Même si tu es immoral, Senpai, je crois au moins que tu n’es pas quelqu’un qui s’immergerait dans une conduite inconvenante avec Nagisa à proximité, » déclara Yukina.

« Donc dans tous les cas, tu dis que je suis immoral ? » demanda Kojou.

Kojou se tordit les lèvres d’insatisfaction. Mais d’après ce qu’on lui avait dit jusqu’à présent, même lui n’était pas trop idiot pour le ramasser : Yukina n’en voulait vraiment pas à Kojou par jalousie.

« Alors, si tu sais tout ça, pourquoi es-tu si en colère ? » demanda Kojou.

« Bien que j’espère que le comportement obscène d’Aiba n’était pas dû à un comportement intentionnel de ta part, Senpai, je ne pense pas que cela signifiait que tu aurais pu résister à sa séduction, » déclara Yukina.

« Sa séduction ? » demanda Kojou.

« Qu’aurais-tu fait si tu avais été agressé par des pulsions vampiriques ? » demanda Yukina.

Le souffle de Kojou s’était instantanément arrêté face à la question sereine de Yukina.

Yukina tenait fermement la poignée de l’étui de guitare sur son dos pendant qu’elle fixait Kojou en silence.

C’était la caractéristique abominable que possédait l’espèce vampire. Enracinés au plus profond de leurs instincts, ils ressentaient une soif de sang, qui privait facilement un vampire de sa raison et faisait de lui un monstre violent.

C’était un puissant besoin que même les Primogéniteurs ne pouvaient contrôler. Et c’était la luxure qui l’avait fait naître.

Si, à cet endroit, il avait été agressé par des pulsions vampiriques, Kojou aurait bien pu attaquer Asagi. Et Nagisa aurait vu ses crocs s’enfoncer dans le cou d’Asagi. En un instant, il aurait pu blesser et perdre sa précieuse amie et sa seule petite sœur.

« … Supposons que tu aies raison. Désolé, » murmura Kojou d’une voix feutrée. Cela l’avait frappé qu’il ait été si négligent que Yukina ait dû le lui montrer. D’une façon ou d’une autre, Yukina était inquiète pour Kojou. Bien sûr qu’elle était en colère.

« Réfléchis, s’il te plaît, afin de ne pas retomber dans une situation aussi dangereuse, » déclara Yukina.

Yukina parlait sur le même ton qu’on avait l’habitude d’entendre quand on grondait un chiot.

« Eh bien, oui, mais, » dit Kojou, ses lèvres s’effilochent dans ce qui semblait un peu de déplaisir. « Euh, mais je pense que ce matin était vraiment un acte de Dieu… »

« Non, je pense qu’il vaut mieux que tu sois plus résolu, Senpai. S’il te plaît, considère bien la situation, » déclara Yukina.

« Euh, mais que dois-je faire si quelqu’un décide seul de venir dans ma chambre pendant que je dors… ? » demanda Kojou.

« Je crois qu’il vaut mieux que tu restes toujours sur tes gardes pour que cela ne se produise pas. Réfléchis-y, s’il te plaît, » déclara Yukina.

« Ah, en y repensant, si c’est pour ça que tu étais en colère, pourquoi es-tu partie, Himeragi ? N’aurait-il pas été préférable de rester là pour que tu puisses m’arrêter si…, » commença Kojou.

« Uunh... »

« … Je ferai attention à l’avenir, » déclara Kojou.

Tandis que Yukina commençait à faire un son grave, Kojou inclina profondément la tête.

« Bonté divine, » déclara Yukina, faisant une expiration qui semblait pleine d’exaspération.

« En tout cas, si tu bois le sang de quelqu’un autre que le mien, je serai alors vraiment en colère, » déclara Yukina.

« D-D’accord, » déclara Kojou.

C’était comme si elle disait qu’elle était d’accord si c’était son sang qu’il suçait. En y pensant, Kojou était profondément reconnaissant à Yukina de l’intérêt qu’elle lui portait. Par principe, Yukina n’était qu’une observatrice : un Mage d’attaque anti-démon à qui on avait accordé l’autorisation d’éliminer Kojou. Malgré tout, elle s’occupait de lui comme ça. Même si ses réprimandes étaient un peu irrationnelles, ce n’était pas une raison pour lui de se plaindre.

« Quoi qu’il en soit, Himeragi, qu’as-tu l’intention de faire maintenant ? » demanda Kojou, son expression devenant plutôt sérieuse.

« Veux-tu parler du fait de chercher le Front de l’Empereur de la Mort Noire ? »

D’un point de vue perspicace, Yukina avait immédiatement rebondi à la question. « Oui, » déclara Kojou d’un signe de tête.

« C’est une situation différente de celle d’avant avec ce vieil Eustache. Tu n’arriverais pas vraiment à trouver des terroristes sans piste, n’est-ce pas ? » demanda-t-il.

« Je suppose que non. Cependant, je voulais d’abord parler à quelqu’un, quelqu’un qui devrait avoir des informations, » déclara Yukina.

« … Quoi ? Connais-tu un courtier en information ? » demanda Kojou.

On dirait un drame policier, pensa Kojou, étrangement intéressé.

Mais Yukina dit. « Pas du tout », secouant la tête d’un air désolé.

« Cependant, le duc Ardeal a dit que les agents anti-démon de l’Île d’Itogami essaient d’attraper le front de l’Empereur de la Mort Noire, n’est-ce pas ? » demanda Yukina.

« Agents anti-démon ? » demanda Kojou.

« Oui. Agents anti-démon, » répondit Yukina.

Yukina hocha la tête tandis que Kojou la regardait. Kojou avait réfléchi, puis il murmura. « ohh, » et frappa des mains comme s’il se souvenait de quelque chose.

***

Partie 5

Académie de Sakai, bâtiment du lycée, dans la section du personnel…

Pour une raison inconnue, le bureau de Natsuki Minamiya situé au dernier étage — encore plus haut que le bureau du directeur —, avait une vue extravagante et imposante.

Le tapis épais était en velours. Les meubles étaient des antiquités. Il y avait un lit à baldaquin. La pièce était entourée d’une élégance qui donnait envie de se demander quel palais elle avait dévalisé.

« Désolé, Natsuki. Il y a un petit quelque chose sur lequel j’espérais que vous pourriez nous aider…, » déclara Kojou.

Kojou ouvrit l’épaisse porte en bois et entra brusquement dans la pièce. Et l’instant d’après…

« Guoo !? »

Le crâne de Kojou avait subi un impact soudain, le faisant rouler sur son dos.

« S-Senpai !? »

Yukina, entrant immédiatement après Kojou, se précipita pour relever Kojou alors qu’il gémissait de douleur.

Dans le centre de la pièce, Natsuki Minamiya, vêtue d’une robe noire, les fixait froidement tous les deux.

C’était une petite femme au visage de bébé qui ressemblait à une petite fille, mais c’était en fait une prof d’anglais qui prétendait avoir vingt-six ans. Elle était également un Mage d’attaque national anti-démon en service actif. Un certain nombre d’agents anti-démon avaient été chargés d’assurer la sécurité des élèves dans les établissements scolaires de l’Île d’Itogami.

Natsuki était l’une d’elles.

Assise très profondément dans une chaise antique de luxe, elle avait ouvert un éventail pliant à volants noirs.

« Je vous ai dit de ne pas m’appeler Natsuki. Apprenez déjà cela, Kojou Akatsuki, » déclara-t-elle.

Pendant qu’elle parlait, elle avait déplacé son regard vers Yukina.

« Oh, vous êtes là, vous aussi, l’élève du collège qui change d’école. Alors, quelle est votre question ? Vouliez-vous savoir comment faire des bébés ? » demanda Natsuki.

« E-Excusez-moi ? » demanda Yukina.

Pendant un moment, Yukina était dans un léger état de choc, incapable de comprendre les mots qui lui étaient adressés, après quoi Yukina secoua rapidement la tête. Kojou, pressant une main sur son front, puis il avait bondi avec une grande vigueur.

« Bien sûr que non ! Qu’est-ce que vous racontez, à l’improviste ? » déclara Kojou.

« … Ah, ce n’est pas le cas ? Qu’est-ce que vous voulez alors ? » demanda Natsuki.

Natsuki avait fait une expiration d’ennui. Je me demande à quel point elle voulait vraiment parler de la façon de faire des bébés, pensa Kojou alors que son visage choqué devenait sérieux.

« Nous cherchons un homme appelé Kristof Gardos. Nous aimerions que vous nous fassiez part des pistes que vous avez, » déclara Kojou.

À ce moment, l’aura de Natsuki avait complètement changé. Son petit corps, qui ne mesurait même pas 150 centimètres de haut, produisait une aura d’oppression si épaisse qu’il était difficile de respirer.

« Où avez-vous entendu ce nom ? » demanda Natsuki, rétrécissant les yeux comme une belle poupée occidentale.

Elle est donc au courant pour lui, pensa Kojou. Peu importe son emploi de jour, Natsuki était apparemment l’une des cinq meilleures agentes anti-démon sur l’île Itogami. Kojou et Yukina s’attendaient à ce qu’elle soit pleinement informée de l’apparition d’un grand criminel du niveau de Gardos.

« Directement de Dimitrie Vattler. Je suis sûr que vous le connaissez ? Il possède un grand paquebot de croisière amarré à l’Île d’Itogami ? Il a dit qu’il venait de l’Empire du seigneur de Guerre pour anéantir Gardos, » déclara Kojou.

« Tch, » alors que Natsuki écoutait l’explication de Kojou, elle avait fait claquer sa langue avec irritation.

« Je vois… J’aurais dû m’attendre à ce que le frivole Maître des Serpents vous appelle. Il fourre vraiment son nez là où on n’en veut pas…, » déclara Natsuki.

Natsuki parlait mal de Vattler comme si elle le connaissait personnellement. Les « serpents » dont elle parlait étaient sans doute les Vassaux Bestiales de Vattler. Même si ce n’était qu’un instant, Kojou avait vu ce Vassal Bestial enveloppé lui-même d’une lumière incandescente.

« C’est donc vrai que des terroristes de l’Empire du Seigneur de Guerre sont venus sur l’Île d’Itogami, hein ? » demanda Kojou.

« Si Vattler l’a dit, c’est sûrement vrai, » déclara Natsuki.

Natsuki avait parlé d’un ton désinvolte. Elle avait jugé que c’était quelque chose qu’elle ne pouvait pas cacher.

« Et si je vous dis où est Gardos, que se passe-t-il ? » demanda Natsuki.

« Je l’attraperai avant qu’il n’entre en contact avec le duc Ardeal, » Yukina répondit instantanément à la question de Natsuki.

Avec cette seule déclaration, Natsuki avait apparemment une compréhension des circonstances générales. S’il entrait en combat avec les restes du Front de l’Empereur de la Mort Noire, Vattler libérerait volontiers ses propres Vassaux Bestiales. Il n’y avait aucun doute que l’Île d’Itogami subirait d’énormes dommages. Yukina disait qu’elle y mettrait fin.

Mais la réponse de Natsuki était assez directe.

« Inutile. Abandonnez tout ça. Ah, Astarte… vous n’avez pas besoin de servir ces deux-là, c’est une perte de thé. Cependant, apportez-moi ce nouveau thé noir, » déclara Natsuki.

« … Confirmé. »

Natsuki ordonnait grossièrement à la jeune fille portant une tenue de bonne pour lui apporter du thé à l’orge. Surpris par l’écho quelque peu familier de sa voix, Kojou et Yukina avaient tous deux levé la tête sous le choc.

Portant un plateau argenté, une fille aux cheveux indigo se tenait devant eux.

Les traits de son visage étaient artificiellement symétriques, avec des yeux bleu pâle, sans expression. Il y avait un tablier très révélateur présent sur son corps mince et immature.

« Tu es l’hôte du Vassal Bestial qui était avec le vieux Eustache… ! » déclara Kojou.

« Astarte… !? » s’exclama Yukina.

« Ahh oui, à bien y penser, c’est un visage familier pour vous deux, » Natsuki parla sans changer d’expression.

Kojou s’approcha d’elle en parlant d’une petite voix. « Pourquoi cette fille est-elle à l’école ? Plus que ça, c’est quoi cette tenue ? »

« La forme de vie artificielle Astarte a été condamnée à trois ans de probation pour complicité dans le raid sur la Porte de la Clef de Voûte, » expliqua Natsuki.

Trouvant l’affaire gênante, Natsuki avait repoussé Kojou alors elle lui expliqua. « En tant qu’Agent Anti-Démon de niveau national et professeur, je suis le choix logique pour prendre sa garde. En plus, j’étais à la recherche d’une bonne loyale. »

« Nul doute que la raison à la fin est la vraie raison… Eh bien, si elle est contente, c’est génial, » murmura Kojou comme s’il se racontait ça à lui-même.

La femme de chambre Astarte commença à préparer du thé noir comme Natsuki l’avait ordonné. L’expression de ses traits féeriques n’avait pas changé, mais d’une manière ou d’une autre, elle avait l’air de penser que cela en valait la peine.

Certainement, comparée à l’époque où elle était obligée de chasser les démons avec rien d’autre qu’un manteau, elle pourrait être un peu plus heureuse maintenant.

« … Madame Minamiya. Que voulez-vous dire par “il est inutile de capturer Gardos” ? » demanda Yukina.

Yukina, finalement guérie de sa surprise, semblait enfin se souvenir de revenir à son sujet.

« Je n’ai pas dit qu’il était inutile de le capturer. Je dis qu’il n’est pas nécessaire que vous le fassiez tous les deux, » déclara Natsuki.

« Hein ? » demanda Yukina.

« Le Front de l’Empereur de la Mort Noire ne peut rien faire, en tout cas, pas contre Vattler. Au-delà des apparences, c’est le monstre connu comme “l’être le plus proche d’un Primogéniteur”, » déclara Natsuki.

« Mais, » continua Yukina, s’accrochant à son ton de voix sérieux. « J’ai entendu dire que le Front de l’Empereur de la Mort Noire voulait tuer le Premier Primogéniteur. Ils sont peut-être venus sur l’Île d’Itogami à la recherche des moyens d’en faire une réalité. »

Si le Front Empereur de la Mort Noire obtenait le pouvoir de tuer le Premier Primogéniteur, il pourrait aussi tuer Vattler — « l’être le plus proche d’un Primogéniteur ». Mais bien qu’elle l’ait compris, Natsuki avait fait une inclinaison fastidieuse de sa tête.

« Je suppose que oui. C’est pour ça que c’est inutile. Gardos en a après le Nalakuvera, » déclara Natsuki.

« Nalakuvera… ? » demanda Yukina.

Yukina avait plissé les sourcils devant le mot inconnu. Apparemment, le mot n’était même pas dans son vocabulaire.

« Un artefact préhistorique extrait de la ruine Mehelgal Numéro Neuf en Asie du Sud. On dit que c’est une arme des dieux qui a détruit d’innombrables villes et cultures qui existaient autrefois, » avait expliqué Natsuki d’une voix superficielle, digne d’un professeur. Kojou avait un très mauvais pressentiment.

« L’arme des dieux… N’est-ce pas une chose assez dangereuse ? Vous n’êtes pas en train de dire qu’il y en a une sur l’Île d’Itogami, n’est-ce pas ? » demanda Kojou.

« Bien que cela n’ait pas été rendu public, une société appelée Kano Alchemical a apparemment fait passer en contrebande un échantillon d’objets issus de ruines. Bien sûr, les terroristes l’ont saisi il y a peu de temps, » déclara Natsuki.

« Il y en a un !? Et il a été volé !? » déclara Kojou.

« C’est une curiosité faite il y a plus de neuf mille ans. Qu’est-ce qui vous rend si nerveux ? » En voyant Kojou tout agité, Natsuki parla avec mépris apparent. « Je vous l’ai dit, ce qu’ils ont volé a été déterré dans une ruine. C’est un tas de ferraille bien après sa date de péremption. Même s’ils le faisaient bouger, comment le contrôleraient-ils ? »

« … Peut-être que le Front Empereur de la Mort Noire a posé les yeux sur cette arme ancienne parce qu’il connaissait un moyen de la contrôler ? » Yukina avait calmement souligné une possibilité.

Les coins de la bouche de Natsuki s’élevèrent avec un léger plaisir. « Hmph, vous avez de bons instincts, étudiante transférée. Certes, une tablette de pierre avec ce qui semble être un sort de contrôle pour le Nalakuvera qui y est gravé a été découverte récemment. »

« Si c’est le cas, il est vraiment possible qu’ils puissent utiliser cette arme ? » demanda Yukina.

« C’est un casse-tête difficile à résoudre qui a vaincu les experts linguistiques et les agences de sorcellerie dans le monde entier. Une bande de terroristes qui s’y adonnent ne mènera pas à grand-chose, » déclara Natsuki.

Tandis que Kojou s’effilochait les lèvres, Natsuki le renvoyait joyeusement.

« Nous avons arrêté un laborantin qui nous aidait à déchiffrer la tablette de pierre. Ce n’est qu’une question de temps avant que les restes du Front de l’Empereur de la Mort Noire ne soient trouvés. Il n’y a pas beaucoup d’endroits où les infiltrés peuvent se cacher internationalement avec leur curiosité stupidement grande, après tout. Les gardes de l’île s’attendent à capter Gardos d’un jour à l’autre, » déclara Natsuki.

« Vous avez arrêté… ? Les aidez-vous aussi, Natsuki ? » demanda Kojou.

Le visage de Kojou grimacé pendant qu’il parlait. Ayant déjà capturé un co-conspirateur de Gardos, Natsuki était sans doute déjà profondément impliqué dans l’incident actuel. Il ne pensait pas qu’elle essayait d’avertir Yukina parce qu’elle ne voulait pas que sa proie lui soit volée, mais…

« Ne m’appelez pas Natsuki ! Quoi qu’en dise le Maître des Serpents, ce n’est pas votre tour d’être sur la scène. Si vous devez dire quoi que ce soit, dites-lui de faire attention aux kamikazes à mesure que le nœud coulant se resserre, » déclara Natsuki.

« Les kamikazes… ! » demanda Kojou.

Le visage de Kojou avait pâli face à l’avertissement de Natsuki. C’était certainement l’un des moyens qu’un faible nombre de terroristes pouvaient utiliser pour infliger des dommages à Vattler. Les chances que les résidents de l’Île d’Itogami soient pris dans l’explosion n’étaient certainement pas faibles.

« Je vais donner un autre avertissement. Kojou Akatsuki, méfiez-vous de Dimitrie Vattler, » murmura Natsuki quand on lui apporta son thé noir. « À ce jour, il a vaincu deux “Sages” au-dessus de son rang descendant du Second Primogéniteur… et les a consumés. »

« … Il a… consommé… d’autres vampires ? » s’exclama Kojou en repensant au jeune aristocrate sociable. Comme on pouvait s’y attendre, Yukina avait également été choquée.

« C’est pour ça qu’on l’appelle “l’être le plus proche d’un Primogéniteur”. Au moins, veillez à ce qu’il ne vous consume pas, » déclara Natsuki.

Natsuki avait fait un sourire impétueux pendant qu’elle parlait. Malgré son ton nonchalant, c’était une possibilité réaliste. Kojou ne pouvait que hocher la tête en silence.

***

Partie 6

« Je me demande si ce que Mme Minamiya a dit est vrai, » se demanda Yukina à voix haute.

Après avoir quitté la pièce de Natsuki, Kojou et Yukina s’étaient dirigés vers leur propre classe, avec leurs pas lourds. En chemin, Yukina s’arrêta et lui posa sa question.

« Sa personnalité est peut-être déformée quant à certains points, mais je ne pense pas qu’elle soit une menteuse par nature. » Se frottant la tête, ce qui lui faisait encore un peu mal, Kojou exprima ses pensées à voix haute.

« D’une façon ou d’une autre, je vois ce que tu veux dire, » déclara Yukina, un sourire tendu lui venant à l’esprit.

L’Organisation du Roi Lion dont faisait partie Yukina s’entendait assez mal avec Natsuki et d’autres agents nationaux anti-démon. Naturellement, Yukina avait envisagé la possibilité que Natsuki ait fourni à Yukina une fausse information, mais ceux qui connaissent la personnalité de Natsuki ne penseraient pas qu’elle ferait quelque chose d’aussi gênant.

Fondamentalement, le mensonge était quelque chose que les faibles faisaient en tant que mécanisme de survie. Quelqu’un d’aussi puissant que Natsuki n’en avait pas besoin. Si quelqu’un lui en tirait une balle rapide, elle aurait pris un morceau de sa chair en représailles, si quelqu’un s’opposait à elle, elle les réduisait en poussière, qu’il soit ami ou ennemi. C’était le modus operandi de Natsuki, la source de son charisme. Bien qu’elle soit une simple humaine, elle était une créature beaucoup plus proche d’un Primogéniteur que quelqu’un comme Kojou.

C’est pourquoi on pouvait lui faire confiance, même si les détails étaient inconnus. Cela incluait le fait que Vattler avait consumé ses frères.

« Tu m’as dit qu’un Sage est un vampire de deuxième génération, non ? » Kojou avait vérifié cela avec Yukina d’un ton de voix incertain.

« Oui, » indiqua Yukina, acquiesçant d’un signe de tête ferme.

« Ce sont eux qui sont choisis pour recevoir le sang des Primogéniteurs. Cela ne se limite cependant pas aux fils et filles biologiques des Primogéniteurs, » déclara Yukina.

« … Les apôtres, les successeurs et tout ça, hein ? » demanda Kojou.

« Ils ont probablement volé l’idée aux apôtres autour de ce type qu’ils appelaient le Fils de Dieu à l’époque, » murmura Kojou. Les Primogéniteurs étaient directement le sang de ce qui constituait « la plus ancienne génération » de vampires. Bien sûr, leurs capacités devaient être bien supérieures à celles des vampires normaux.

« Selon cette définition, Vattler n’est donc pas directement lié au Premier Primogéniteur ? » demanda Kojou.

« Je suppose que non. On l’appelle un noble de sang pur, mais à la fin, il n’est qu’un lointain descendant des Sages, » pendant que Yukina parlait, son expression s’était assombrie. « Cependant, si le duc d’Ardeal a vraiment consommé plus d’un sage, il pourrait bien posséder une sorte de capacité spéciale. Une capacité spéciale qui peut renverser un avantage lié par le rang du sang… »

« Le rang du sang… hein ? » murmura Kojou, regardant sa propre paume.

Pour les vampires invétérés, le sang était la source de leur force magique. C’était leur moyen d’invoquer les Vassaux Bestiales ainsi que le fondement de leur existence même. En suçant le sang de nombreux êtres, les vampires de longue durée avaient accumulé encore plus de pouvoir magique dans ce sang. Les vampires de la Vieille Garde possédaient plus de pouvoir que les jeunes générations pour cette raison même. C’est encore plus le cas pour les Sages.

Mais cela ne voulait pas dire qu’un vampire plus jeune n’était pas capable d’obtenir une grande puissance plus tôt que prévu. Il n’avait qu’à voler le pouvoir magique directement du sang de vampires plus puissants.

Pour les vampires qui consommaient le sang des autres vampires, leur existence même… c’était, en un sens, du cannibalisme.

Mais on disait qu’on ne pouvait normalement pas consommer un vampire plus puissant que soi-même. Même s’il suçait le sang de l’autre personne, il prendrait le contrôle de sa propre chair et de son esprit de l’intérieur. Celui qui tenterait de consommer serait plutôt lui-même consommé. C’était le danger du cannibalisme, et la principale raison pour laquelle les vampires de la jeune génération n’avaient pas vaincu leurs supérieurs.

C’est-à-dire qu’en temps normal, Vattler n’aurait tout simplement pas été capable de battre un Sage.

« Oh ouais, il était plutôt accro au sang, n’est-ce pas ? » demanda Kojou.

Kojou avait parlé en se souvenant de la déclaration de Vattler la veille au soir. Yukina avait commencé sa réponse en disant. « Ce n’est pas seulement le duc d’Ardeal qui est obsédé par les lignées de sang, mais l’espèce des vampires dans son ensemble. »

« Bien que c’est certain qu’il soit un peu anormalement attaché à toi, Senpai. » Continua Yukina.

« Ce n’est pas à moi qu’il est attaché. C’est le sang du 4e Primogéniteur auquel il est accroché, » déclara Kojou.

Kojou avait l’air d’avaler du sable pendant qu’il la corrigeait. Bien qu’il ait dit qu’il avait juré son amour à Avrora, il l’avait facilement transféré à Kojou en apprenant qu’il avait hérité de son sang.

Même quand on regardait son attitude frivole, c’était vraiment trop frivole, mais cela disait vraiment à quel point il était attaché au sang du quatrième Primogéniteur.

« Si c’est le cas, le conseil de Mme Minamiya de faire attention à ce qu’il ne te dévore pas pourrait bien être valide…, » déclara Yukina.

Yukina leva les yeux vers Kojou pendant qu’elle parlait. Vattler avait déjà consommé deux Sages au-dessus de son rang. Par conséquent, la possibilité qu’il s’en prenne même à un Primogéniteur au pouvoir magique beaucoup plus grand ne pouvait être écartée à la légère.

« Supposons que oui, » déclara Kojou d’une voix timide. « Comme je suis maintenant, je ne gagnerais probablement pas s’il essayait sérieusement de me tuer… Ce serait une autre histoire si je pouvais contrôler au moins quelques Vassaux Bestiales de plus. »

« Vassaux Bestiales, est-ce que c’est… ? » pour une raison inconnue, il y avait un regard sombre sur le visage de Yukina alors qu’elle murmurait.

Kojou n’avait qu’un seul Vassal Bestial qu’il pouvait contrôler. Regulus Aurum était une bête de classe mondiale, c’était un vassal convoqué avec le pouvoir magique du quatrième Primogéniteur, mais il n’en était qu’un.

En utilisant Regulus Aurum pour attaquer, Kojou lui-même était impuissant. Il n’y avait aucune garantie que Regulus Aurum gagnerait si elle affrontait les neuf Vassaux Bestiales de Vattler en même temps.

« … Senpai, » déclara Yukina.

« Hein ? » demanda Kojou.

« Tu penses que tu veux… encore faire ça ? » demanda Yukina.

Les yeux inébranlables de Yukina reflétaient le visage de Kojou sur eux. Son regard très sérieux avait permis à Kojou de redresser son dos sans réfléchir. Cependant, il n’arrivait pas à saisir le sens de sa question.

« Comment ça… ça ? Encore ? » demanda Kojou.

« Ça. Tu sais… comme… sucer… mon…, » Balbutia Yukina.

Tout à coup, Yukina avait détourné les yeux, sautant une partie de la phrase, comme si elle était un peu en colère et un peu gênée.

Alors que la fine courbe de sa nuque à sa clavicule se présentait dans son regard, Kojou avait fini par comprendre la véritable signification de la déclaration de Yukina.

Kojou avait réussi à apprivoiser Regulus Aurum parce qu’il avait bu le sang de Yukina. Cela étant dit, boire à nouveau son sang pourrait lui permettre de prendre le contrôle d’un autre Vassal Bestial — c’est ce que disait Yukina.

Cependant, le fait de le réaliser signifiait aussi que l’excitation sexuelle de Kojou était dirigée vers Yukina…

« Euh, non ! Ce n’est pas ce que je voulais dire quand je parlais tout à l’heure ! Ce n’est pas comme si je trouvais ton sang savoureux, Himeragi, même pas un peu ! » déclara Kojou.

Kojou avait désespérément nié. Bien que la situation d’urgence précédente, où l’Île d’Itogami était menacée de destruction, ait pu la rendre inévitable dans un sens, cette situation était complètement différente. Il pensait que c’était mal d’agir avec autant d’assurance envers Yukina, qui n’était guère son amante.

« … Mon sang ne t’intéresse pas, n’est-ce pas ? Même pas un peu… ? » demanda Yukina.

Mais pour une raison inconnue, le ton de la voix de Yukina était soudainement devenu glacial. Les yeux sans expression qui levaient les yeux vers Kojou ressemblaient au bord d’un couteau glacé.

« Quoi qu’il en soit, je pense que je pourrais me débrouiller avec ça. J’ai l’impression que Vattler ne pense pas à me consommer tout de suite. S’il ne fait pas attention et qu’il me met au pied du mur, mon Vassal Bestial pourrait devenir sauvage comme avant. »

Se sentant coupable pour une raison qu’il n’arrive pas à trouver, Kojou avait travaillé dur pour parler d’une voix optimiste.

Ce n’était pas quelque chose sur lequel ils pouvaient compter du tout, mais Kojou avait une base pour ses paroles. Les choses que les vampires immortels détestaient le plus étaient l’isolement et l’ennui. Pour Vattler, l’existence du quatrième Primogéniteur était comme un ami perdu depuis longtemps ou peut-être un rempart infaillible contre l’ennui. Kojou avait vaguement ressenti ces deux sentiments à cause de son attitude.

D’ailleurs, Vattler lui-même avait parlé des Vassaux Bestiales en fureur s’ils sentaient que leur hôte était en danger.

« Tu as peut-être raison. » Yukina continua à regarder froidement Kojou alors qu’elle avait acquiescé. « Si tes Vassaux Bestiales incontrôlés se déchaînent à nouveau, le montant que tu dois augmentera de plusieurs dizaines de milliards de yens. Non pas que des gens comme moi puissent y faire quoi que ce soit. »

« Euh, ouais. Eh bien… mm, » déclara Kojou.

Kojou ne pouvait que marmonner maladroitement.

« De plus, l’attitude du duc d’Ardeal envers toi n’était pas celle d’une seule personne envers sa proie, mais plutôt celle d’une personne cherchant sincèrement une relation physique, n’est-ce pas ? » demanda Yukina.

« S’il te plaît, ne dis pas des choses effrayantes comme ça. Tu me fais vraiment flipper, » déclara Kojou.

« Désolée. C’est de ma faute, mais j’ai eu une mauvaise prémonition. Bien qu’il n’y ait rien que des gens comme moi puissent y faire, » déclara Yukina.

« Maintenant, Himeragi. Pourrais-tu être, ah, contrariée par quelque chose ? » demanda Kojou.

« Non, pas du tout. Pas même un tout petit peu, » déclara Yukina.

L’attitude de Yukina le laissant naufragé sans île, Kojou n’avait finalement pas pu endurer davantage et avait détourné les yeux.

« … Eh bien, je pense qu’on devrait mettre de côté l’affaire Vattler et se concentrer sur le problème des terroristes. Je sais que Natsuki a dit de ne pas s’inquiéter pour ça, mais…, » déclara Kojou.

« À l’heure actuelle, nous avons si peu d’information qu’il est difficile de prendre une décision, n’est-ce pas ? » demanda Yukina.

« Info, hein… ? » demanda Kojou.

Kojou croisa les bras et s’enfonça dans ses pensées. Le manque d’informations était certainement un grave problème. Il ne pensait pas que Natsuki lui mentirait, mais prendre ses paroles pour argent comptant et ne rien faire ne ferait que l’inquiéter davantage. Dans tous les cas, ils avaient besoin d’autres informations pour voir ce qu’il y avait derrière les paroles de Natsuki.

« En y repensant, elle a dit qu’il y avait une compagnie qui a fait passer le Nalakuvera dans la Ville d’Itogami, non ? » demanda Kojou.

Kojou se souvint soudain que Natsuki avait dit quelque chose à ce sujet.

« Kano Alchemical Industries Corporation, n’est-ce pas ? C’est un fournisseur de composants alchimiques, enfin, je crois, » déclara Yukina.

« Si c’est le cas, nous pourrions peut-être examiner la question de notre côté. Désolé, mais pourrais-tu retourner au collège, Himeragi ? Je te contacterai plus tard, » déclara Kojou.

« J’ai une vague idée de ce que tu penses, Senpai, mais…, » déclara Yukina.

L’expression de Yukina semblait bouder, comme si elle avait quelque chose à dire. Pour une raison ou une autre, elle s’était arrêtée dans sa phrase, regardant lentement autour d’elle.

Tandis que Yukina se taisait, aiguisant ses sens, Kojou l’appelait, perplexe.

« … Himeragi ? Quelque chose ne va pas ? » demanda Kojou.

« Rien…, » finalement, Himeragi expira doucement en secouant la tête comme si ce n’était rien. « J’avais l’impression que quelqu’un me regardait, mais ça devait être mon imagination. »

***

Partie 7

Quand Kojou était arrivé en classe, il était sur le point d’être en retard, et il entra juste un instant après la première sonnerie annonçant le début des cours. La plupart de ses camarades de classe étaient déjà dans la classe. Bien sûr, Asagi était parmi eux.

« — Asagi ! » déclara Kojou.

« Ahh, Kojou. Bon matin, » déclara Asagi.

Remarquant Kojou s’approchant rapidement d’elle, Asagi fit une réponse nonchalante. C’était comme si le tumulte dans la chambre de Kojou ce matin-là n’avait jamais eu lieu, et son attitude était exactement la même que d’habitude.

« Alors tu es après tout allé à l’école. Et voilà pour toi. Ça valait le coup de te réveiller, » déclara Asagi.

« Tu l’as réveillé ? Qu’est-ce que ça veut dire ? » demanda Yaze.

Yaze, à qui Asagi enseignait à propos d’exemples de problèmes, avait capté ses paroles avec ses oreilles pointues. Rin Tsukishima, également proche, murmura « Hehe »… en faisant à Kojou un air riche de sens.

« Ce n’est pas quelque chose que je peux laisser passer, » déclara Rin.

« S’il vous plaît, laissez-faire. Elle m’a giflé et c’est tout, » déclara Kojou.

Alors que Kojou leur répondait, il s’était penché juste à côté d’Asagi. Il avait bougé son visage près de son oreille.

« Quoi qu’il en soit, Asagi, as-tu une minute ? » demanda Kojou.

« Hein ? Qu’est-ce que c’est ? C’est sorti de nulle part ? Le cours va commencer, » déclara Asagi.

Alors que sa bouche se plaignait, Kojou s’emparait avec insistance du bras d’Asagi, et Asagi ne le rejeta pas. Leurs camarades de classe avaient regardé avec grand intérêt Kojou conduire Asagi hors de la classe par la main. Mais comme des excuses maladroites auraient l’effet contraire à celui escompté, il n’avait pas dit un mot. Quoi qu’il en soit, sans tomber sur aucun professeur, Kojou avait amené Asagi dans les escaliers d’urgence où il n’y avait aucun signe de vie.

« Désolé. Il y a quelque chose que je dois te demander, » déclara Kojou.

« Qu’est-ce que c’est ? J’ai un mauvais pressentiment, mais…, » déclara Asagi.

Asagi regarda Kojou d’un air soupçonneux clairement visible sur son visage. Comme on pouvait s’y attendre de quelqu’un qui connaissait Kojou depuis si longtemps, elle semblait pouvoir très bien le lire.

« Je veux que tu te penches sur la Kano Alchemical Somethin Corporation — en particulier les filiales et les laboratoires de recherche ici dans la Ville d’Itogami, » déclara Kojou.

« Hein ? Pourquoi dois-je sécher les cours pour faire ça ? » demanda Asagi.

Kojou inclina sincèrement la tête en réponse à la question naturelle d’Asagi.

« Je t’inviterai à dîner ou à prendre un dessert après, alors s’il te plaît ! » déclara Kojou.

« Je ne veux pas. Cette fille Himeragi t’a probablement poussé à le faire, de toute façon. Je ne veux pas t’aider pour quelque chose comme ça, » déclara Asagi.

Asagi avait dénudé ses dents en s’irritant pendant qu’elle parlait.

Kojou avait vaguement remarqué auparavant, mais Asagi et Himeragi ne semblaient pas s’entendre très bien. Il ne savait pas pourquoi, mais leur relation était difficile.

« Alors, mettons ça de côté. Au moins, regarde ce truc de Nalakuvera qu’ils importent, » déclara Kojou.

« … Nalakuvera ? » demanda Asagi.

Pour une raison inconnue, Asagi avait répondu à ce mot inattendu. Elle avait attrapé Kojou par la poitrine et l’avait rapproché.

« Qu’est-ce que c’est que ça ? Est-ce que tu le sais ? » demanda Asagi.

« Oui. C’est une sorte de relique ancienne extraite d’une tombe quelque part, mais…, » expliqua Kojou d’une voix tendue. C’était l’information que Natsuki lui avait donnée un peu plus tôt.

« Une vieille relique… hein ? Et c’est lié à Kano Alchemical ? » demanda Asagi.

« Ouais. Probablement, » déclara Kojou.

En regardant Kojou hocher la tête, Asagi avait fait un « Hmm » et avait expiré. Elle avait déplacé son regard vers un espace vide comme si elle y réfléchissait un peu.

« Très bien. Je suis juste un peu intéressée, alors je vais jouer le jeu, » déclara Asagi.

Asagi avait largement souri pendant qu’elle parlait.

« C’est… c’est vrai. C’est une aide énorme. Que devrions-nous faire ? » demanda Kojou.

« Il nous faut d’abord un ordinateur connecté à Internet. À cette heure-ci, on pourrait peut-être accéder à la salle du conseil étudiant ? » demanda Asagi.

« La salle du conseil étudiant ? » demanda Kojou.

Maintenant qu’il y pensait, Kojou se souvient qu’il y avait un tas de terminaux utilisés pour l’administration du site Web de l’école et le travail de bureau.

« Mais c’est fermé à clé, n’est-ce pas ? On a besoin de l’une de ces cartes à puce que la compagnie de sécurité utilise, » déclara Kojou.

« Ce n’est pas grave. Laisse-moi m’en occuper, » déclara Asagi.

Tandis qu’Asagi parlait de façon rassurante, elle l’attrapait alors qu’elle bondissait pratiquement en avant, marchant vers la salle du conseil étudiant.

Les cours étaient sur le point de commencer, mais cela ne semblait pas la déranger particulièrement. Elle semblait plutôt s’amuser de la situation avec Kojou, mais comme il était habitué à ses manières capricieuses, il ne trouvait pas cela particulièrement étrange.

« Je cassais le cryptage de ce niveau à la maternelle… tu vois ? » déclara Asagi.

Asagi avait sorti son téléphone portable, l’avait mis sur écoute contre la porte de la salle du conseil étudiant, et avec une force impressionnante, une cascade de chiffres avait traversé l’écran. Cela ne faisait même pas cinq secondes lorsque la serrure s’était ouverte. Elle avait apparemment utilisé le terminal de paiement numérique interne du téléphone pour pirater la serrure numérique de la société de sécurité. Bien sûr, Kojou n’avait pas la moindre idée de comment elle pouvait faire ça.

« … Tu es vraiment incroyable. En tout cas, pour ce que tu viens de faire, » déclara Kojou.

« Il n’y a pas de quoi se vanter. Arrête, tu me fais honte, » déclara Asagi.

Le visage d’Asagi rougissait lorsqu’elle parlait d’un ton apparemment en colère. Et tordant la langue dans un déplaisir apparent, elle fixa Kojou d’un regard furieux.

« Et n’y a-t-il pas d’autres choses sur moi que tu devrais complimenter ? » demanda Asagi.

« Hein ? » demanda Kojou.

« C’est quoi ce regard choqué ? » demanda Asagi.

« Ah, maintenant que tu en parles, tes manches à l’avant-bras sont plus courts qu’ils ne le sont d’habitude —, » commença Kojou.

« Eh bien, excuse-moi de les couper trop court ! Fait comme si tu ne le voyais pas ! » déclara Asagi.

Les sourcils d’Asagi s’étaient plissés et elle avait livré un crochet du gauche à la cage thoracique de Kojou. Kojou fit sortir un souffle angoissé. Il n’avait pas vraiment compris, mais il avait l’impression qu’elle lui infligeait un traitement extrêmement irrationnel.

« Alors pourquoi veux-tu en savoir plus sur cette société ? » demanda Asagi en démarrant un ordinateur situé au milieu de la pièce.

« Je veux en savoir plus sur le Nalakuvera qu’ils importent secrètement. Apparemment, il a été pris par les restes d’un groupe terroriste appelé le Front de l’Empereur de la Mort Noire, » déclara Kojou.

« Nalakuvera… hein ? Je pense que c’est probablement ce dont tu parles, Kojou, » déclara Asagi.

Asagi, tapant sur un ordinateur ne montrant que des chiffres à l’écran, avait finalement affiché une sorte de fichier sur un grand écran. Ce que l’écran affichait, c’était une masse de pierre trapue et ovoïde. C’était un corps rond tout enroulé, comme celui d’un insecte. Ou peut-être s’agissait-il d’une machine de guerre avec une armure épaisse recouvrant son châssis robuste…

« Un artefact mit au jour à l’état dormant à la fin du XXe siècle… donc un type de forme de vie inorganique. Une arme vivante, hein, » murmura Asagi.

« Une arme vivante ? » demanda Kojou.

« En termes modernes, c’est un peu comme un avion de chasse sans pilote. Il dit, puisqu’ils pensent qu’il était basé sur le Pushpaka Vimana dans la mythologie indienne et le Prince Nezha vénéré par les taoïstes, il possède probablement plusieurs systèmes d’armes et capacités de vol, » déclara Asagi.

« Je n’ai pas vraiment compris, mais je crois comprendre que c’est dangereux, » déclara Kojou.

Kojou parlait avec une humeur très pesante. Il ne comprenait pas ce que c’était concrètement, mais si c’était une arme sur le plan mythologique, il ne faisait aucun doute qu’elle contenait une puissance exceptionnelle. Les mots que Natsuki avait utilisés, « arme des dieux », n’étaient peut-être pas des vantardises vides de sens.

« Ouais, tu pourrais combattre même le Premier Primogéniteur avec ça… C’est pour ça que le Front de l’Empereur de la Mort Noire le veut, » déclara Kojou.

« Premier Primogéniteur ? Tu dis n’importe quoi depuis tout à l’heure, tu sais ? » déclara Asagi.

Asagi avait rétréci les yeux en regardant Kojou avec suspicion. Incapable de trouver tout de suite une excuse naturelle, Kojou avait dit. « Euh, c’est… » alors qu’il devenait agité. Alors…

« … ! »

Un instant plus tard, Asagi enroula férocement les deux bras autour du cou de Kojou, le tirant sur le sol. Kojou, maintenant collé à Asagi dans une étreinte profonde, était très confus.

« A-Asagi !? » demanda Kojou.

« Chut ! Tais-toi ! Tais-toi ! » déclara Asagi.

Alors qu’Asagi parlait d’une voix calme, elle avait forcé le corps de Kojou à s’écrouler avec le sien sous le bureau de l’ordinateur.

Elle regardait la porte à l’entrée de la salle du conseil étudiant. Bien que Kojou soit sûr qu’elle avait été fermée de l’intérieur, il sentait quelqu’un entrer.

« Qui est-ce ? » demanda Kojou.

« Peut-être Matsui-sensei, le Conseiller du conseil étudiant. Il prend son travail très au sérieux, » déclara Asagi.

Asagi marmonna un « Hmm » en faisant un mouvement de griffes avec ses doigts.

Un enseignant d’âge moyen était entré dans la salle du conseil étudiant, s’était assis sur une chaise en métal et avait commencé à mettre de l’ordre dans les papiers. Quoi qu’il en soit, quitter la salle du conseil étudiant sans qu’il s’en aperçoive était pratiquement impossible.

La pensée rapide d’Asagi avait éteint l’écran de l’ordinateur, mais si Matsui s’approchait, Kojou et Asagi, qui se cachaient, seraient rapidement exposés.

« Ce n’est pas le moment d’admirer ! Qu’est-ce qu’on va faire ? » demanda Kojou.

« J’ai dit, tais-toi ! Que… où penses-tu que tu touches !? » demanda Asagi.

« Ce n’est pas fait exprès ! C’est parce que tu me pousses ! » déclara Kojou.

« C’est un espace restreint donc je ne peux pas m’en empêcher ! » déclara Asagi.

D’une voix calme, Asagi poussa un faible soupir, mais elle souffla droit dans l’oreille de Kojou.

Ce n’était pas le seul endroit où ils étaient proches l’un de l’autre, l’un des bras de Kojou touchait les seins amples d’Asagi, et à un moment donné, le poignet de Kojou s’était arrêté juste entre les cuisses d’Asagi.

Asagi ne pouvait s’empêcher d’être sensible à chaque petit mouvement du corps de Kojou.

Cependant, comme aucun des deux ne pouvait s’éloigner de l’autre, les deux étudiants étaient restés couchés et avaient gardé leur respiration sous contrôle.

Asagi n’était peut-être pas aussi mince que Nagisa ou Yukina, mais le volume de sa poitrine était très différent. Il ne pouvait s’empêcher de remarquer le parfum, le shampooing et les autres senteurs féminines qui dérivent dans l’air.

Réalisant que son cœur battait plus vite et que sa gorge était desséchée, Kojou fit involontairement un bruit à travers les dents serrées. C’était de mauvais présages, les précurseurs des pulsions vampiriques.

À ce rythme, il n’était pas impossible que Kojou perde la raison et attaque Asagi, qui ne se doutait de rien, tout comme Yukina avait peur que cela n’arrive.

« Asagi… ces boucles d’oreilles, ce sont ces…, » commença Kojou.

C’était de petites boucles d’oreilles en or. Kojou les avait achetées pour l’anniversaire d’Asagi… ou plus précisément, elle l’avait forcé à les acheter pour elle. Aujourd’hui, c’était le premier jour où il voyait Asagi les porter. Kojou s’était demandé quel genre de changement dans son état mental cela indiquait.

« Tu as pris ton temps à remarquer, idiot de Kojou, » déclara Asagi.

Asagi avait fait un sourire large et charmant, les yeux un peu larmoyants en levant les yeux vers Kojou. Kojou avait baissé la tête et s’était dit qu’elle était très jolie.

À peu près à ce moment-là, Kojou sentit Matsui, le professeur, quittait la pièce. La tension avait chuté comme une pierre. Alors…

« K-Kojou !? Vas-tu bien !? » demanda Asagi.

L’instant d’après, les yeux d’Asagi se mirent à gonfler en voyant la grande quantité de sang jaillir du nez de Kojou qui saignait.

« Hein ? Wôw !? » s’exclama Asagi.

Agité, Kojou s’était couvert le nez des deux mains. Ses pulsions vampiriques, ayant atteint des niveaux dangereux, s’effondrèrent avec facilité et disparurent. Oui. L’excitation sexuelle était la source des pulsions vampiriques, mais la bouche ne se souciait pas vraiment de savoir à qui appartenait le sang — même si le sang était le sien.

 

 

« Eh bien, que puis-je dire… ? J’ai été idiote d’attendre quelque chose de toi avec une telle humeur, » murmura Asagi.

Asagi poussa un faible soupir alors qu’elle plaçait des mouchoirs de poche qu’elle avait pris quelque part dans les narines de Kojou. Kojou, ayant gagné la bataille contre les pulsions vampiriques, reniflait d’un air fatigué.

***

Partie 8

« T’es-tu calmé un peu ? » Asagi demanda avec un regard léthargique quand elle regarda Kojou, les mouchoirs encore entassés dans son nez.

Après s’être glissés hors de la salle du conseil étudiant, Kojou et Asagi s’étaient dirigés vers le jardin sur le toit. Sur le terrain exigu de l’Académie Saikai, des parterres de fleurs et des bancs avaient été placés sur les toits, ouverts aux étudiants en remplacement d’une cour intérieure.

Cela dit, la lumière du soleil était en effet féroce, donc peu d’étudiants l’utilisaient. C’était un environnement particulièrement dur pour un vampire comme Kojou. Mais peu de gens l’utilisaient, ce qui signifiait qu’il y avait peu de chances d’être vu par quelqu’un d’autre, donc c’était un endroit pratique pour éviter les regards indiscrets des étudiants.

« Désolé que tu aies séché les cours, » déclara Kojou.

« Oui, c’est vrai. Je vais bien, mais… mes notes sont bonnes, et j’ai un surplus de jours de présence, » déclara Asagi.

« Argh… mes journées d’assiduité devraient être à peine suffisantes avec les leçons supplémentaires pendant les vacances d’été…, » déclara Kojou.

Kojou avait gémi avec désespoir, comme s’il essayait de détourner les yeux de la réalité.

Prendre une pause non excusée dans ses cours lui vaudrait le jour suivant une réprimande de la part de Natsuki. Bien qu’il ait obtenu quelques résultats en retour, la réponse était bizarre. La vraie nature du Nalakuvera et son emplacement restaient inconnus. Gardos et ses hommes l’avaient probablement avec eux.

Bien sûr, comme Natsuki l’avait dit, tant que la méthode de commande n’était pas déchiffrée, l’échantillon qu’ils possédaient présentait un défaut assez grave. C’était l’essentiel, de toute façon.

« Hey… Kojou, » en regardant Kojou de profil, Asagi avait soudain posé une question. « Ce Nalakuvera de tout à l’heure, il a été introduit clandestinement avec une tablette de pierre, non ? »

« Ouais. C’est à peu près tout ce dont je m’en souviens, » déclara Kojou.

« Cette formule écrite dessus, c’est… mauvais si elle est déchiffrée, n’est-ce pas ? » demanda Asagi.

« Énormément. Si quelqu’un de sain d’esprit s’en est occupé, c’est une chose… mais pourquoi cette partie te dérange-t-elle autant ? » demanda Kojou.

« Eh !? Pas possible, ça ne me dérange pas du tout, » déclara Asagi.

Asagi avait détourné les yeux d’une manière non naturelle pendant qu’elle parlait. Kojou voulait lui demander plus, mais avant qu’il n’ait pu, l’estomac de Kojou avait fait un gros grondement. Asagi pouvait à peine se contenir.

« Kojou, as-tu pris ton petit-déjeuner ? » demanda Asagi.

« Comme si je pouvais manger quelque chose dans cette situation, » déclara Kojou.

Kojou regarda Asagi d’un air amer. Le cerveau derrière le gâchis de la matinée paisible dans la résidence Akatsuki avait tapoté le dos de Kojou avec un sourire imperturbable sur son visage.

« Je suppose que non. On ne peut rien y faire… Asagi la grande sœur t’accordera la moitié de sa boîte à bento, » déclara Asagi.

« Tu as juste faim, j’en suis sûr. Ce n’est pas que je me plaigne d’avoir la moitié, » déclara Kojou.

« Tu devrais être plus reconnaissant. Ce n’est pas souvent que je partage ma nourriture avec quelqu’un d’autre, » déclara Asagi.

« J’ai l’impression que je t’invite toujours à manger, » déclara Kojou.

Asagi avait sorti sa boîte à bento de la pochette qu’elle avait apportée de la classe. C’était une petite boîte à lunch inattendue pour une fille qui pouvait manger une quantité si étonnamment grande.

Constatant qu’il n’y avait qu’une seule paire de baguettes, Asagi semblait hésiter un peu, mais apparemment, à la fin, elle s’en ficha. Après avoir découpé l’œuf au plat, en prenant une bouchée comme si elle l’avait goûté, Kojou avait ouvert la bouche pour dire. « Quoi, tu manges ça ? » à laquelle Asagi avait annoncé : « Tu es grand ouvert ! » en fourrant le reste dans la bouche de Kojou.

« C’est délicieux, » déclara Kojou.

« Ouais. Je dois l’admettre, cette femme sait cuisiner, » déclara Asagi.

Asagi parlait de sa mère comme si elles n’étaient pas apparentées. Ses parents ne s’étaient remariés que deux ans auparavant, elle n’était pas liée par le sang à sa mère actuelle. Ce n’est pas qu’elles ne s’entendaient pas, mais elle sentait assez de distance avec elle pour éviter de l’appeler « maman ».

Comme il s’agissait d’un sujet difficile à commenter, Kojou avait mordu dans son œuf au plat en changeant de sujet.

« Dire que notre école a un endroit comme ça, » déclara Kojou.

« Apparemment, la copine de Motoki lui en a parlé. C’est la première fois que je viens ici, depuis que j’ai entendu dire que seuls les couples venaient ici pendant les vacances d’été pour déjeuner ensemble…, » après avoir dit cela, Asagi se tut soudain.

Elle semblait soudain se rendre compte de la situation dans laquelle ils se trouvaient tous les deux. Ils étaient là, à sécher les cours et à partager le même bento. De plus, elle avait utilisé ses propres baguettes pour porter de la nourriture à la bouche de Kojou…

Un observateur impartial ne pouvait pas croire qu’ils étaient tout sauf un couple en très bons termes.

« Je vais chercher quelque chose à boire. Tu peux avoir le reste ! »

« D-D’accord. »

Après avoir poussé la boîte à bento vers Kojou, Asagi s’était enfuie avec une vigueur incroyable. Kojou ne comprenait pas pourquoi elle rougissait comme ça maintenant, mais sans réfléchir profondément, il s’était dit. Je suppose qu’elle a des humeurs comme ça certains jours.

Quoi qu’il en soit, il avait mangé avec reconnaissance le repas qui lui avait été remis et avait commencé à réfléchir à la façon dont il allait transmettre l’information sur le Nalakuvera à Yukina.

C’était le moment suivant où le banc de béton sur lequel Kojou était assis avait été brisé avec un grand rugissement.

« … C’est… Bon sang !? » s’écria Kojou.

Un instant plus tard, le corps de Kojou avait été envoyé par l’explosion.

L’impact avait joué avec Kojou comme une poupée de chiffon, le faisant rouler sur la surface du toit avec les décombres.

Il se demanda si le banc avait explosé, mais bien sûr, c’était impossible. Il y avait un cratère d’un mètre de diamètre qui creusait l’endroit où se trouvait le banc un moment auparavant.

Les dommages étaient comme si quelqu’un avait lancé une grenade à main, mais il n’avait détecté aucune odeur d’explosif. À sa place se trouvaient des vestiges d’énergie rituelle. C’était une libération de pouvoir interne qui ressemblait aux compétences spéciales de Yukina — une attaque physique incorporant des arts rituels.

« Vous êtes vraiment quelque chose, Kojou Akatsuki, sécher les cours pour aller à un rendez-vous secret avec une camarade de classe. »

Kojou, couché face vers le haut, entendit une voix méprisante venant d’en haut de sa tête.

Levant aussitôt les yeux, Kojou aperçut une grande et mince adolescente.

Elle portait une jupe courte plissée et une veste d’été. Cela correspondait à une écolière normale, mais l’épée géante dans sa main gauche ne l’était pas.

Cela lui avait fait penser à une aile d’avion. C’était une longue et élégante épée. La lame mesurait environ 120 centimètres de long. La lame de l’épée était épaisse, apparemment soudée le long d’un motif de lignes droites qui parcourait sa surface. Son éclat argenté reflétait les rayons du soleil et ressemblait beaucoup à celui de l’arme de Yukina.

« Vous êtes… la fille d’hier…, » déclara Kojou.

Kojou connaissait le nom de cette fille. Elle portait ses longs cheveux châtains regroupés dans une queue de cheval. Comme une fleur de cerisier en fleur, elle avait un aspect soigné, charmant et magnifique. Et elle regardait Kojou d’un air menaçant…

C’était Sayaka Kirasaka, danseuse de guerre de l’Organisation du Roi Lion.

« Qu’est-ce que vous foutez ici ? Ne surveillez-vous pas Vattler ? » demanda Kojou en se mettant à genoux et en se levant, il s’était levé et avait regardé Sayaka. L’expression de Sayaka n’avait même pas tremblé.

« À l’heure actuelle, Oceanus Grave est ancré à l’extérieur de la juridiction territoriale japonaise. Dimitrie Vattler est actuellement là-bas. Ma mission d’observation a été temporairement suspendue, » déclara Sayaka.

« Oh, vraiment. Qu’est-ce que ça a à voir avec l’explosion du banc sur lequel j’étais assis ? » demanda Kojou.

« … J’ai observé vos actions jusqu’à présent, Kojou Akatsuki, » déclara Sayaka.

Sayaka pointa le bout de son épée vers Kojou pendant qu’elle parlait. Kojou s’était saisi la tête dans la frustration.

« Vous aussi, vous m’avez “observé” !? C’est tout ce que font les gens de l’Organisation du Roi Lion ? » demanda Kojou.

« Silence, criminel ! » cria Sayaka.

« C-Criminel !? » La bouche de Kojou était ouverte face à la réprimande inattendue de Sayaka.

Voyant la réaction de Kojou, les coins des yeux de Sayaka s’élevèrent plus loin.

« Ne faites pas l’idiot avec moi, 4e Primogéniteur. Vous avez bu le sang de Yukina, n’est-ce pas ? » demanda Sayaka.

« Uhhh…, » Kojou s’était effondré alors que sa plus grande dette envers Yukina était soulignée. « On n’y pouvait rien ! C’était la seule façon de faire face à la situation d’urgence de l’époque — . »

« Je comprends cela. Bien sûr que si. Sinon, ma petite ange Yukina n’aurait jamais laissé un idiot comme vous sucer son sang, vous qui êtes un homme sans valeur et sale, » déclara Sayaka.

« Vous n’êtes pas obligé de le dire comme ça !? » s’exclama Kojou.

Naturellement, Kojou s’était mis en colère et avait protesté. Même s’il se sentait humble à l’intérieur, il ne voulait pas entendre tout cela de la bouche d’une fille qu’il venait juste de rencontrer.

Cependant, Sayaka avait saisi son épée des deux mains tout en tremblant de colère.

« Vous êtes l’homme appelé le quatrième Primogéniteur. Si vous aviez été un homme digne de ce titre, enveloppé d’une personnalité noble et digne de Yukina, avec un revenu annuel de plus de dix millions de yens, et si vous vous étiez castré comme preuve de votre amour éternel et de votre soumission absolue envers elle, j’aurais alors pensé vous épargner votre vie, mais…, » déclara Sayaka.

« C’est de la folie ! N’est-ce pas des normes incroyablement élevées !? » s’écria Kojou.

« Et pourtant, quand je suis venue vous voir, et vous flirtiez avec d’autres filles…, » déclara Sayaka.

« Attendez une seconde, de quoi parlez-vous ? » demanda Kojou.

« Jouer les idiots ne vous mènera nulle part. Depuis le matin, vous avez amené une camarade de classe dans votre lit, vous vous êtes glissé lors d’un rendez-vous secret dans la salle du conseil étudiant devant les yeux de Yukina, et en plus, vous vous êtes amusé sur un toit isolé, à manger de la nourriture, à partager les mêmes baguettes, je voyais tout. Comme c’est indécent ! » déclara Sayaka.

Sayaka était devenue furieuse d’elle-même alors qu’elle lâchait les accusations devant Kojou.

Voyant la lueur de son épée levée, les joues de Kojou devinrent pâles.

« A-Attendez ! Asagi et moi n’avons rien fait qui mérite de nous excuser…, » déclara Kojou.

« C’est ce que disent tous les hommes infidèles ! Frappe scintillante ! » cria Sayaka.

« Attendez, qu’est-ce que vous essayez de faire avec cette épée !? » demanda Kojou.

« Yukina est venue sur cette île pour veiller sur le quatrième Primogéniteur. Si vous mourrez, il n’y aura aucune raison pour qu’elle reste ici, et aucune de vos actions ne pourra faire pleurer cette fille… ! » déclara Sayaka.

« Pourquoi ça doit être comme ça !? » s’écria Kojou.

Kojou avait poussé un cri débridé sur la logique excessivement autoritaire et sauvage de Sayaka.

Cependant, Sayaka était au-delà de tout raisonnement, brandissant son épée sans pitié.

C’était une attaque à l’épée si rapide que même la vision cinétique stimulée par les vampires ne pouvait la suivre complètement. Kojou avait roulé, se fiant surtout à son intuition, évitant à peine un coup direct.

« Pourquoi avez-vous esquivé ça !? » s’écria Sayaka.

« Si je ne l’évitais pas, je mourrais !! » déclara Kojou.

« Alors, mourrez maintenant comme un homme, ennemi de la femme ! Comment osez-vous humilier ma Yukina ! » déclara Sayaka.

Sayaka avait continué à brandir son épée tout en continuant à faire valoir ses prétentions irrationnelles. Kojou n’avait fait que fuir pour sauver sa vie.

En pure habileté au combat, l’adresse à l’épée de Sayaka était aussi bonne que celle de Yukina, voire même meilleure. Cependant, grâce à sa colère, elle mettait trop de force, ce qui affaiblissait sa compétence normale dans le processus. Grâce à cela, Kojou avait pu échapper à ses attaques.

« Vous lui avez passé vos lèvres sur son cou, vous lui avez respiré dessus, vous avez mordu, elle ne me laisse même pas faire ça ! Impardonnable !! » s’écria Sayaka.

« Vous voulez dire que c’est juste de la jalousie !? » s’écria Kojou.

« Sans vous, elle n’aurait pas à faire face à un tel danger. Elle n’a aucune raison de combattre l’apôtre armé lotharingien et les restes du front de l’Empereur de la Mort Noire ! » déclara Sayaka.

« Uhh. »

Bien que Sayaka se soit perdue dans sa colère, ses paroles frappèrent avec précision les parties de Kojou qu’il voulait le moins toucher. Yukina avait dû consacrer la majeure partie de sa vie quotidienne à regarder Kojou et son implication dans des combats dangereux était toute deux attribuables à l’existence de Kojou. Tant que Kojou continuerait à être surveillé par Yukina, Yukina serait liée à l’existence de Kojou. Peu importe son entêtement, peu importe les sermons bruyants qu’il pouvait endurer, c’est pourquoi Kojou ne pouvait pas se résoudre à la haïr.

« Vous n’avez pas que cette Aiba. Vous avez une petite sœur, deux parents et beaucoup d’amis à l’école, n’est-ce pas !? Et vous voulez me prendre Yukina !? Ma seule amie dans le monde entier… ! !? » cria Sayaka.

À cause des cris de Sayaka qui l’avait privé de sa capacité de concentration, Kojou avait réagi un moment trop tard à son attaque.

Sayaka avait poussé son épée en avant avec une telle force que c’était comme une soif de sang sous une forme physique. Quand il réalisait qu’il ne pouvait s’y soustraire, Kojou s’était contracté face à la douleur imminente — .

« Oh, merde… ! » s’écria Kojou.

À cet instant, chaque cheveu du corps de Kojou se leva et se rendit compte que quelque chose bougeait en lui. Il sentait l’éveil d’une grande puissance démoniaque, il avait l’impression que son sang bouillonnait dans tout son corps. Répondant aux instincts d’autodéfense de Kojou, l’un de ses Vassaux Bestiales endormis se réveillait : un nouveau Vassal Bestial qu’il ne pouvait encore contrôler…

« Eh !? »

L’expression de Sayaka s’était figée lorsque son épée, qui aurait dû le traverser, avait été déviée.

Son attaque avait rebondi sur un mur invisible qui avait surgi avec Kojou en son centre.

Le mur invisible était vraiment une onde de choc. La vibration, grondant comme un tremblement de terre, faisait des fissures le long du toit de béton, tandis que Kojou était enveloppé d’une houle dans l’air qui était devenue un tourbillon. Le Vassal Bestial avait donné naissance à ce niveau de calamité avant même de s’éveiller, n’utilisant qu’une petite fraction de son pouvoir magique. Alors…

« Kojou !? »

Incapable de faire autre chose que de rester immobile, les oreilles de Kojou entendirent le cri d’une fille. C’était Asagi, portant une bouteille en plastique, qui avait crié. Elle avait acheté son verre et était revenue.

Remarquant Sayaka face à Kojou, Asagi était arrivée en courant. L’obstination d’Asagi s’était manifestée au pire moment possible. Sayaka ne pouvait pas non plus, face à une situation inattendue, faire quoi que ce soit pour y faire face.

« Putain de merde ! Asagi, recule !! » cria Kojou.

Kojou criait, ne se souciant pas de son apparence. Il fallait toute la force de Kojou pour empêcher le Vassal Bestial de se déchaîner, il n’avait plus rien pour contrôler la fuite d’énergie démoniaque.

« Eh !? Ow... ah... aaaaah ! »

Le tremblement de terre atmosphérique indistinctement libéré avait assailli Asagi comme un boum supersonique et destructeur.

Asagi s’était couvert les deux oreilles d’angoisse et s’effondra alors. Elle avait perdu connaissance, incapable de résister au violent changement de pression atmosphérique.

« Kojou Akatsuki ! Arrêtez ça… ! » cria Sayaka en brandissant son épée. La protection de cette épée était sans doute la raison pour laquelle elle allait bien malgré le même boom supersonique que celui qui avait frappé Asagi qui s’était aussi écrasée sur elle. Cependant, contrairement à Sekkarou de Yukina, il ne pouvait apparemment pas nier complètement l’énergie magique de Kojou.

La destruction du toit, incapable de résister à la libération d’une puissance démoniaque aussi énorme, s’était accélérée.

« Asagi ! »

Kojou avait élevé la voix dans l’angoisse en réalisant que le corps d’Asagi, couché sur le toit, serait pris dans la destruction.

À cet instant, il entendit un son strident, comme si deux morceaux de métal se rencontraient, et une petite ombre dansa au-dessus des têtes de Kojou et de Sayaka.

« Moi, Vierge du Lion, Chamane Épéiste du Dieu Suprême, je vous en supplie ! »

La jupe de son uniforme du lycée et ses cheveux noirs flottant à l’atterrissage, une collégienne avait posé une longue lance de couleur argentée. Comme si elle dansait, elle agita la lance, poussant la pointe dans le toit, qui était lui-même sur le point de se briser.

« Ô divin loup de la congère des neiges, que les échos de tes mille hurlements deviennent un bouclier et repoussent cette calamité ! » déclara Yukina.

Comme pour répondre à son incantation solennelle, la lance argentée émettait de la lumière.

C’était la lueur du Schneewaltzer, l’arme secrète de l’Organisation du Roi Lion, capable de déchirer toute barrière et d’annuler l’énergie démoniaque d’un Primogéniteur.

Comme si son rayonnement l’en empêchait, Kojou cessa aussi de libérer de l’énergie magique. Les tremblements du sol et les sons atmosphériques émis par le Vassal Bestial sur le point de s’éveiller disparurent également, de même que le sentiment de Kojou que son propre sang était en feu. Bien qu’il n’ait pas réussi à contrôler le Vassal Bestial, le danger qu’il se déchaîne semblait pour l’instant écarté. Bien que le toit ait l’air d’une ruine, avec des fissures partout, Asagi était en sécurité, mais pas de beaucoup.

Kojou et Sayaka, avec leurs forces épuisées, s’effondrèrent simultanément là où ils s’étaient tenus.

Ils étaient toujours ainsi alors que Yukina s’approchait lentement.

« Que faites-vous tous les deux dans un endroit pareil ? » demanda Yukina.

Parlant très sèchement, elle avait enfoncé le bout de Sekkarou dans le sol juste devant leurs yeux.

Nul doute qu’elle avait senti Kojou et Sayaka se battre et s’était précipitée hors de la classe. Les épaules minces de Yukina semblaient faire rebondir en de petits mouvements de haut en bas pendant qu’elle respirait.

« Euh, c’est… Mlle Jalousie a lancé ici une attaque non provoquée…, » déclara Kojou.

« C’est… Ce n’est pas vrai. Ce pervers se comportait de façon indécente dans ton dos…, » déclara Sayaka.

Comme des chiots qui se faisaient gronder, Kojou et Sayaka se désignèrent l’un l’autre pendant qu’ils parlaient.

Yukina posa une main sur sa hanche, parlant comme si elle était une sœur de plusieurs années leur aînée.

« Je peux deviner ce qui s’est passé ici, mais… Sayaka, » déclara Yukina.

« O-Oui ? » demanda Sayaka.

« Observer le quatrième Primogéniteur est ma mission. Veux-tu intervenir, Sayaka ? Me fais-tu si peu confiance ? » demanda Yukina.

Le dos de Sayaka se secoua comme une petite fille effrayée alors qu’elle secouait vigoureusement la tête.

Yukina avait expiré assez profondément.

« Et Senpai… bien sûr, tu comprends ce qui arriverait si un Vassal Bestial devenait fou dans un endroit comme celui-ci. Comment assumerais-tu la responsabilité s’il arrivait quelque chose à tous les élèves ici ? » demanda Yukina.

« … Désolé. Je vais faire mieux. Désolé, » déclara Kojou.

Kojou avait envie de s’évanouir en se penchant vers l’avant.

Si Yukina n’était pas venue quand elle l’avait fait, Asagi aurait certainement été blessée par l’énergie magique de Kojou. Quand il l’avait imaginé, son corps était saisi d’une grande peur.

Comparée à sa peur de perdre Asagi, la réprimande amère de Yukina ressemblait au doux reproche d’une mère affectueuse.

Mais le soulagement de Kojou n’avait pas duré plus longtemps que cela.

« Yukina ! Tu t’es enfui si vite et avec tant de force, tu vas bien !? » demanda Nagisa.

Kojou avait entendu des bruits de pas agités lorsqu’une écolière en uniforme du collège lui avait montré son visage. C’était la voix familière de Nagisa. Surprise, Nagisa regarda Asagi, allongée sur le toit à moitié détruit, et Kojou et Sayaka en train de réfléchir sur leurs péchés.

« Que s’est-il passé ? Qu’est-ce que c’est que ça ? Pourquoi le toit est-il en ruine ? Et, Asagi !? Elle est blessée !? Qu’est-ce qu’on va faire ? » demanda Nagisa.

« … Réfléchissez à ce que vous avez fait pendant un moment. Nagisa et moi allons amener Asagi-senpai à la clinique, alors partez. Occupe-toi de Sekkarou pour moi, » déclara Yukina.

Yukina, parlant d’une voix calme, remit la lance à Kojou sous sa forme soigneusement pliée.

Certes, ils ne pouvaient pas laisser Asagi allongée comme ça, mais cela dit, elle ne pouvait pas entrer dans la salle de soins avec sa lance à la main. Comme elle devait également administrer les premiers soins à une Asagi inconsciente, Yukina et Nagisa emmenèrent Asagi dans la salle de soins. Comme le plan de Yukina était tout à fait logique, Kojou n’avait pas d’objections particulières.

À une exception près.

« Hein ? En réfléchissant ensemble… vous ne voulez pas dire, moi et Mademoiselle Jalousie ici !? » demanda Kojou.

« Pourquoi dois-je être avec cet homme indécent ? » demanda Sayaka.

Kojou et Sayaka se lançaient des insultes l’un contre l’autre alors qu’ils s’opposaient farouchement.

Yukina les regarda tous les deux, les yeux aussi glacés qu’un glacier.

« Il y a un problème avec ça ? » demanda Yukina.

Kojou et Sayaka secouèrent la tête en silence, tous deux agenouillés formellement pour montrer leur volonté de considérer leurs erreurs.

***

Partie 9

Il n’y avait aucun signe de l’enseignante dans la salle de soins, là, en son absence, Astarte la remplaçait.

Astarte était normalement assez près de la salle de soins, et apparemment Natsuki s’était rendu compte de l’utilité de la jeune fille, alors elle l’avait traîné chez elle comme sa propre servante.

Actuellement, la fille homoncule était vêtue d’une tenue de bonne quelque peu perverse, avec un tablier blanc, se penchant sur le côté du lit pendant qu’Asagi dormait.

À l’origine, c’était un homoncule conçu par un producteur pharmaceutique pour des expériences de médicaments. Elle possédait les connaissances nécessaires pour fonctionner dans un environnement médical, qui avaient été gravées dans sa mémoire ROM flash dans le cadre de son installation de base. Il avait été dit qu’elle avait un degré élevé de connaissances médicales égal à celui d’un médecin fraîchement diplômé.

« Vérification médicale terminée. » Après une simple vérification, Astarte fit entendre une voix sans expression. « Je déduis un choc léger causé par une onde de choc et un changement soudain de la pression atmosphérique. Il n’y a pas lieu de s’inquiéter des séquelles. Cependant, je recommande le repos et le calme pour le reste de la journée. »

« Compris. Je te remercie énormément, » déclara Yukina.

Yukina expira en soulagement, remerciant Astarte maintenant que son diagnostic était complet.

Même les joues sèches de Yukina avaient retrouvé un peu de leur douceur. Le fait qu’Asagi n’ait pas été grièvement blessée était une bonne nouvelle. Si Kojou apprenait qu’Asagi n’allait pas bien, il serait sûrement voulu profondément.

Et à moitié cachée dans le dos d’une Yukina soulagée, Nagisa s’agitait.

« Y-Yukina, c’est une bonne. Je n’ai jamais vu de vraie bonne. Pourquoi y a-t-il une bonne dans la salle de soins ? Ou est-ce un nouveau style de robe blanche ? Une sorte de cadeau pour les étudiants ? Yukina, tu la connais ? » demanda Nagisa.

« Euh…, » répondit Yukina

Yukina était un peu perdue pour les questions rapides de Nagisa. Il s’agissait de questions auxquelles Yukina n’était pas certaines de la réponse à donner. Donc, à la place de la Yukina en détresse…

« Astarte est une domestique à mon service, Nagisa Akatsuki, » déclara Natsuki.

Natsuki, entrant soudainement dans la salle de soins, avait jeté sa déposition sans scrupules.

Nagisa jeta un coup d’œil, ses yeux s’élargissant en état de choc.

« Ah, Mme Minamiya. Merci de toujours prendre soin de mon frère. Ces vêtements sont très jolis, » déclara Nagisa.

« Une fille très polie, je vois, contrairement à votre frère, » déclara Natsuki.

Natsuki rendit le salut de tête poli de Nagisa avec un sourire éhonté et hautain. Même Natsuki, toujours aussi glorieuse, était heureuse quand on la complimentait pour ses vêtements.

Puis Natsuki jeta un coup d’œil en réponse sur Asagi qui dormait encore.

« Et c’est le résultat de votre manque de rigueur en tant qu’observatrice, étudiante transférée ? » demanda Natsuki.

« Oui. Je suis désolée, » déclara Yukina.

Yukina n’avait trouvé aucune excuse et avait baissé la tête. « Hmph, » grogna Natsuki, semblant ennuyée. « Alors je vous laisse nettoyer ce bordel. J’aimerais vraiment aller rendre visite à cet idiot de Kojou Akatsuki, mais j’ai une affaire urgente à régler. »

« … Savez-vous où se cache le Front de l’Empereur de la Mort Noire ? » Yukina avait plissé ses sourcils quand elle l’avait demandé.

« Le sous-flotteur est actuellement en construction. C’est une planque bien rangée. Je comprends ce que vous ressentez, mais ne mettez pas votre nez là-dedans. Gérer ces terroristes, c’est notre travail, » déclara Natsuki.

Tandis que Yukina hochait la tête en signe de reconnaissance, Natsuki avait fait un sourire calme.

« Je laisse Astarte ici. Si vous manquez d’infirmières, utilisez-la, » déclara Natsuki.

Natsuki avait laissé son commentaire derrière elle en quittant immédiatement la salle.

Entre-temps, Nagisa avait commencé à traiter une Asagi endormie.

Le traitement ne signifiait rien de spécial, tout en ajustant ses couvertures et en vérifiant la position de son oreiller, elle regarda avec jalousie les longs cils d’Asagi, poussant un soupir de plainte, et renifla un peu son parfum.

Yukina n’avait pas pu s’empêcher de faire un sourire tendu à la façon dont la forme de Nagisa avait fait sa muse sur les liens de sang de Nagisa avec Kojou…

… L’instant d’après, Asagi ouvrit soudain les yeux.

« Euh… où est-ce ? La chambre de soins ? » demanda Asagi.

Asagi grimaça de douleur alors qu’elle se levait lentement en mettant une main sur sa tête.

Devant elle, Nagisa se pencha avec une grande vigueur.

« Asagi, tu es réveillée ? Sais-tu qui je suis ? Combien de doigts vois-tu ? Ça fait mal quelque part ? Kojou t’a-t-il fait quelque chose ? » demanda Nagisa.

Asagi fut un moment décontenancée par l’inquisition de Nagisa.

« C’est dur de se faire griller comme ça au réveil. Hmm, que s’est-il passé ? » demanda Asagi.

« On dirait qu’un des tuyaux du toit s’est rompu. C’est là que tu t’es évanouie à cause du choc, » déclara Nagisa.

« Tuyaux ? Rupture ? Ahh, je crois que j’ai entendu ce son aigu, » déclara Asagi.

Asagi avait plissé ses sourcils comme si elle se souvenait de l’expérience désagréable.

« Hmm, mais je pensais que Kojou était poursuivi par une fille bizarre avec une épée… Où est Kojou ? » demanda Asagi.

« Je suis désolée, Aiba. C’est une amie à moi. Akatsuki-senpai va bien également, » déclara Yukina.

Yukina s’était timidement avancée devant Asagi pendant qu’elle parlait.

Comme perplexes, les yeux d’Asagi clignèrent devant les aveux soudains de Yukina. Asagi ne semblait pas comprendre ce que Yukina faisait ici en premier lieu.

« … Vous êtes Himeragi, n’est-ce pas ? Pourquoi votre amie attaquait-elle Kojou ? » demanda Asagi.

Yukina était devenue un peu incohérente à la question hautement légitime d’Asagi.

« C’est, je crois… que c’était peut-être de la jalousie dirigée contre Akatsuki-senpai ? » avoua Yukina.

« Jalousie ? Quoi, parce que j’étais avec Kojou ? » demanda Asagi.

« Je suppose que oui. Je crois que c’est l’une des causes, » déclara Yukina.

La jalousie de Sayaka était dirigée contre Kojou pour lui avoir volé Yukina, mais bien sûr Asagi ne savait rien de tel. Plus simplement, Sayaka était jalouse parce qu’elle et Kojou s’entendaient bien — Asagi comprenait cela pour dire, en d’autres termes, Sayaka aimait Kojou.

C’est à ce moment qu’Asagi pensait intérieurement que Sayaka était une « ennemie ».

Et bien sûr, Nagisa, qui avait le même malentendu, s’était approchée de Yukina, semblant très intéressée.

« Qu’est-ce que ça veut dire ? Ce n’est pas une étudiante de l’Académie Saikai. Elle est très jolie, mais depuis quand Kojou la connaissait-il ? Était-ce bien de laisser Kojou avec elle ? Il n’y aura pas d’alchimie bizarre entre eux… ? » demanda Nagisa.

« Hein ? C-C’est vrai. Je pense qu’Akatsuki-senpai et Sayaka vont s’en sortir, mais…, » déclara Yukina.

La fin des mots de Yukina s’était évanouie, sans doute parce qu’elle ne pouvait pas rejeter la possibilité que les deux reprennent leur dispute. Cependant, sa réponse timide n’avait fait qu’ennuyer Asagi davantage.

« Comment pouvez-vous le rejeter comme ça ? » demanda Asagi.

« … Asagi ? » demanda Nagisa.

Nagisa s’étonna du ton de voix d’Asagi, qui était devenu très aigu.

Asagi haussa un peu les épaules.

« Ça me dérange depuis un moment. Quel genre de relation entretenez-vous avec Kojou ? Kojou se faufile toujours avec vous, mais que savez-vous de Kojou ? » demanda Asagi.

« C’est… Je suis désolée, je ne peux pas répondre, » déclara Yukina.

Yukina secoua fermement la tête. Asagi regarda Yukina d’un air plus loin, faisant un bruit de déplaisir.

« Franchement… Très bien, je vais devoir le demander à Kojou de ma propre initiative, » déclara Asagi.

« Non, euh, Asagi-senpai… ! » déclara Yukina.

Yukina bougea nerveusement pour arrêter Asagi alors qu’elle retirait sa couverture et se levait.

Astarte, n’ayant pas dit un mot jusqu’à présent, avait pris ce moment pour se coincer dans la conversation des filles.

« — Avertissement. J’ai détecté la présence d’intrus dans l’école, » déclara Astarte.

« Des intrus ? » demanda Asagi.

Asagi, bien sûr, s’était figée sous le choc face aux mots complètement inattendus, mais Yukina aussi.

« Deux intrus au total. D’après leur vitesse de déplacement et leur endurance, j’en déduis qu’il s’agit de démons non enregistrés, » déclara Astarte.

Astarte continua son avertissement. Les yeux de Yukina s’étaient immédiatement levés vers le toit.

« Des démons !? Ne pourraient-ils pas être après Akatsuki-senpai ? » demanda Yukina.

« Négatif. Je pense que cet endroit, la salle de soins de l’Académie Saikai, est leur cible, » déclara Astarte.

« Hein ? » s’exclama Yukina.

Pendant un moment, Yukina ne pouvait pas comprendre le sens de ce que les mots d’Astarte transmettaient.

Alors qu’elle se tenait là, quelqu’un s’était soudain accroché à son dos.

« Impossible…, » murmura Nagisa alors que tout son corps tremblait violemment. Entendre sa voix avait mis Yukina en état de choc.

Elle marmonnait faiblement, comme si c’était une personne complètement différente de son être vivant habituel.

Le visage terrifié de Nagisa était complètement pâle, ses doigts étaient froids, comme s’ils avaient perdu toute circulation sanguine. Ce n’était clairement pas une condition ordinaire.

« Nagisa ? » demanda Yukina.

« Qu’est-ce qu’on va faire, Yukina… ? J’ai… J’ai… peur…, » déclara Nagisa.

Yukina était déconcertée, tenant contre elle Nagisa, qui continuait à trembler comme un poussin nouveau-né, d’une main.

Elle avait entendu dire que les habitants de l’Île d’Itogami, un sanctuaire de démons, s’étaient habitués à l’existence des démons. En fait, même lorsque les habitants de l’île avaient vu des démons avec leur carte d’identité de démon dans la ville, cela avait suscité peu d’attention. Les collégiennes portant des jupes courtes étaient soumises à des regards beaucoup plus intenses.

Le taux de criminalité parmi les démons enregistrés était bien en dessous de la moyenne, si les démons commettaient un crime, la garde bien armée de l’île sortait en force pour rétablir l’ordre. Les habitants ordinaires de l’île n’avaient aucune raison de craindre les démons.

Mais cela n’explique pas pourquoi Nagisa avait si peur.

« Je ne comprends pas vraiment, mais fuyons. C’est mieux que de rester ici ! » déclara Asagi.

Peut-être parce qu’elle avait vu Nagisa trembler comme ça, Asagi avait prononcé ces mots en se dirigeant vers la sortie de la salle.

Mais avant son arrivée, la porte s’était ouverte violemment.

En voyant la silhouette faire irruption, Asagi avait poussé un petit glapissement.

Un grand homme portant un uniforme militaire gris était apparu comme pour bloquer le chemin d’Asagi. Son visage était couvert de poils bestiaux argentés, avec des crocs aiguisés sortant de ses lèvres effilées.

« … L’homme-animal ? » murmura Asagi.

Entendant le murmure d’Asagi, Nagisa fit un bruit de peur. Avec la force qui jaillissait dans le bras avec lequel Yukina la tenant, elle était persuadée qu’elle pouvait vaincre un seul homme bête dans un combat sans armes.

Mais c’était si Yukina était seule. C’était beaucoup plus difficile si elle devait couvrir Asagi et Nagisa, même si elle avait l’élément de surprise, d’autant plus avec Nagisa dans cet état de désespoir.

Laisser sa lance derrière elle avait été une gaffe de la part de Yukina. Même à l’école, elle n’aurait jamais dû sortir Sekkarou.

« Tu l’as trouvée, Grigore ? »

Un autre homme bête portant un uniforme militaire était entré après le premier. Celui-ci était encore sous forme humaine, mais l’homme d’âge moyen possédait une aura incroyablement oppressante.

« C’est l’un de ces trois-là, lieutenant-colonel. En comparant leurs odeurs une à une, on le saura bien assez tôt, » déclara le premier.

Parlant d’une voix râpeuse et difficile à comprendre, l’homme bête avait jeté la petite chaussure qu’il tenait à la main sur le sol.

En voyant cela, Yukina avait inhalé brusquement. Ils venaient jusqu’à la salle de soins en suivant l’odeur de cette chaussure. En d’autres termes, le propriétaire de la chaussure était celui qu’ils cherchaient.

« Je ne peux pas distinguer ces visages japonais… Très bien, alors. Amenez-les toutes. Elles serviront de monnaie d’échange, j’en suis sûr. En tant qu’otages. »

« … »

Asagi s’éloigna lentement tout en regardant l’homme bête qui s’approchait.

Un instant plus tard, une voix antiseptique, sans accent, résonnait dans toute la pièce lorsque la jeune fille en robe blanche s’avança.

« Régulation de Protection Homunculus, Exception Spécial Numéro Deux, autodéfense de base, Invocation. Exécution, Rhododac — . » Mais elle n’avait jamais fini de donner son ordre à son Vassal Bestial artificiel.

Avec une vitesse à laquelle même Yukina ne pouvait pas réagir, l’homme en uniforme militaire, qu’on avait appelé lieutenant-colonel, avait sorti son pistolet et lui tira dessus.

En un instant, six coups de feu avaient frappé Astarte et son corps s’était soudainement envolé contre le mur. Asagi et les autres étaient en état de choc devant l’horrible scène qui se déroulait sous leurs yeux.

« … Lieutenant Colonel ? »

Le visage de l’homme bête se demandait si l’attaque de son supérieur était exagérée contre une petite fille, même si elle était un homoncule.

« J’ai senti une étrange énergie démoniaque couler de cette poupée — peut-être une sorte de système d’autodéfense. »

Le lieutenant-colonel avait parlé avec désinvolture pendant qu’il rangeait son arme. Il parlait sans réflexion personnelle ni regret particulier.

Mais Yukina, observant son attitude sauvage, savait qu’il avait pris la bonne décision en tant que soldat.

Un Vassal Bestial artificiel avec une capacité de combat écrasante habitait à l’intérieur du corps d’Astarte. Sans aucun avertissement préalable, il avait détecté sa présence et avait rendu l’hôte incapable de combattre avant qu’elle ne puisse invoquer le Vassal Bestial — une décision qu’un militaire normal ne pouvait prendre. Cet homme était un soldat de première classe, d’une compétence absurde. Il n’y avait aucun moyen pour Yukina de le vaincre sans Sekkarou dans ses mains. Non, elle n’était pas sûre de pouvoir gagner, même avec Sekkarou…

« Ahh, désolé de vous avoir fait peur. Détendez-vous. Si vous obéissez à nos instructions, nous n’avons pas l’intention de vous faire de mal. »

Le lieutenant-colonel parlait couramment le japonais comme pour apaiser les inquiétudes des filles terrifiées.

« L’une d’entre vous est Asagi Aiba, n’est-ce pas ? Nous avons un petit travail que nous aimerions que vous fassiez. Je vous promets qu’une fois terminés, nous vous relâcherons toutes les trois saines et sauves. »

« … Qui êtes-vous, vous autres ? »

Comme pour protéger Yukina et les autres, Asagi s’avança, interrogeant les hommes en réponse. Elle devait avoir aussi peur que les autres, mais sa voix ne tremblait pas du tout.

Le lieutenant-colonel regarda la vaillante démonstration d’Asagi avec une expression de louange. C’est précisément parce qu’il était un soldat d’une telle valeur qu’il avait fait preuve de respect pour le courage des autres. C’était peut-être simplement leur mode de vie.

« Je m’excuse pour notre impolitesse. Je suis un homme grossier qui ne connaît rien d’autre que les tactiques du champ de bataille et je dois m’excuser de ne pas m’être présenté devant une dame. »

L’homme qu’on avait appelé lieutenant-colonel enleva son chapeau alors qu’il parlait avec un comportement de gentleman.

« Je m’appelle Kristof Gardos — un ancien soldat de l’Empire du Seigneur de Guerre, actuellement activiste révolutionnaire. Certains me traiteraient de terroriste. »

Comme il s’appelait Gardos, Yukina le regardait, aspirant son souffle.

Il avait un front magnifique et un nez pointu et crochu. Il avait un visage âgé qui se vantait à la fois d’être intelligent et d’avoir une aura sévère et oppressante.

Sur sa joue, il avait une cicatrice qui se détachait. Une grande et vieille cicatrice…

***

Chapitre 3 : Le Nalakuvera

Partie 1

Un jeune homme tout seul courait, parcourant les espaces entre les bâtiments qui s’étendaient tout autour de la plate-forme du monorail.

Il portait l’uniforme du lycéen de l’Académie Saikai. Ses cheveux étaient courts et légèrement teints, il portait un casque fermé autour du cou.

C’était Motoki Yaze, camarade de classe du quatrième Primogéniteur, Kojou Akatsuki.

« Oh merde ! Kojou, espèce de salaud, c’est l’endroit où tu as choisi de te déchaîner ? » s’écria Yaze.

Yaze fit claquer la langue en s’irritant du bruit telle une tempête de sable qui affligeait encore ses oreilles.

La météo sur l’Île d’Itogami était belle ce jour-là, avec une brise rare et légère. Cependant, alors qu’il se tenait sur la plate-forme du monorail, de puissants tourbillons avaient soufflé à peu près tout autour de lui.

« Mon “paysage sonore” est une épave grâce à toi ! Tes Vassaux Bestiales ne sont que des ennuis. »

Pendant que Yaze parlait, il avait sorti un certain nombre de pilules médicinales d’une poche. Il s’agissait de capsules bicolores qui ressemblaient à des médicaments contre le rhume vendus sans ordonnance. Les jetant dans sa bouche, il les avait violemment écrasés sans même une gorgée d’eau.

Motoki Yaze avait un type particulier de constitution génétique connu sous le nom de « Hyper-Adaptateur ». Ce n’était pas un démon, mais un humain né avec des capacités inhabituelles. Un médium pourrait être une façon beaucoup plus simple de le dire.

La famille Yaze était profondément impliquée dans l’alliance d’entreprises qui avait fondé le Sanctuaire des Démons, mais c’était aussi une lignée familiale qui avait donné naissance à un grand nombre de personnes aux capacités spéciales. Motoki était aussi l’un de ces individus aberrants.

Utilisant un type de psychokinésie, le sens de l’ouïe de Yaze était aussi précis qu’un système radar de haute précision. C’était comme s’il voyait le son de ses propres yeux. Utilisant son étrange sens de l’ouïe, Yaze avait déployé un réseau de surveillance dans toute l’Académie Saikai, lui permettant d’observer tout ce qui se passe dans l’école. Kojou était l’une des personnes qu’il surveillait.

Une capacité passive reposant uniquement sur l’écoute du son — de plus, même Yukina, qui possédait une excellente vision spirituelle, ne pouvait pas détecter l’observation de Yaze.

Mais son environnement sonore avait des faiblesses, bien sûr.

Tout comme l’image d’une caméra baignée d’une lumière vive sera effacée, de grands bruits explosifs avaient détruit l’environnement sonore. Les ondes sismiques libérées par le Vassal Bestial de Kojou étaient plus que puissantes pour déchiqueter son champ délicat.

Il avait fallu environ soixante-quatorze minutes pour recréer le champ lorsqu’il avait été détruit. L’enlèvement d’Asagi Aiba avait coïncidé avec le moment où ses défenses avaient été coupées.

« S’attaquer à Asagi avec ce chronométrage… ce bâtard de Gardos n’est pas bien dans la tête, non plus ! » murmura Yaze en jetant plusieurs autres capsules dans la bouche.

C’était juste après que le Vassal Bestial de Kojou ait libéré tant d’énergie démoniaque. Bien sûr, Gardos et ses hommes avaient remarqué l’existence du quatrième Primogéniteur. Cependant, à ce moment-là, il était tout aussi vrai que le système de sécurité de l’Académie Saikai avait été démantelé au cours du processus. Leur priorité était la réussite de l’enlèvement, même au risque de rencontrer un Primogéniteur.

Il avait fallu beaucoup de courage pour le faire.

Yaze poursuivait Asagi qui se trouvait avec les autres filles et ses ravisseurs dans la voiture du Front de l’Empereur de la Mort Noire.

Il était seul sur ses deux jambes et poursuivait la voiture à une soixantaine de kilomètres à l’heure. Le vent arrière de quatre-vingt-dix kilomètres à l’heure, qui soufflait violemment tout autour de lui, lui avait permis de sprinter à cette vitesse par rafales.

Le flux et la direction du signal pouvaient changer, mais les microphones et les haut-parleurs fonctionnaient fondamentalement de la même manière. C’était la même chose pour la capacité de Yaze. Sa capacité, normalement utilisée pour « écouter » passivement, créait maintenant une perturbation dans le mouvement de l’atmosphère, à ce moment-là, Yaze avait créé un souffle de son propre gré, manipulant librement l’écoulement de l’air.

Bien sûr, ce n’était pas un pouvoir qu’un humain en chair et en os pouvait utiliser sans coût.

Les pilules que Yaze avait prises étaient des médicaments chimiques qui renforçaient temporairement ses capacités. Les effets secondaires étaient graves et une surutilisation entraînerait un coût élevé. Malgré tout, il ne pouvait compter que sur eux pour le moment.

« Héliport ? Ont-ils l’intention de les emmener au large de l’Île d’Itogami… ? »

Réalisant où le Front de l’Empereur de la Mort Noire se dirigeait, Yaze avait finalement réduit sa vitesse.

C’était l’héliport d’une compagnie d’aviation civile de l’Île Est. Son activité principale était la photographie aérienne et les circuits touristiques, mais elle louait aussi des hélicoptères.

Un hélicoptère apparemment maintenu en attente avait décollé dès qu’Asagi et les autres filles ligotées y avaient été embarquées.

S’ils quittaient l’île, même les capacités de Yaze ne pourraient pas les suivre plus loin. Mais —

« … Est-ce qu’il l’atteindra ? »

Yaze avait avalé un grand nombre de pilules, s’était couvert les oreilles avec ses écouteurs et avait fermé les yeux.

Il avait libéré sa capacité, se sentant comme si ses nerfs étaient en feu. Le champ de vision de Yaze s’était ouvert soudain, lui donnant une image claire même à des dizaines de kilomètres au-dessus de l’océan.

Plusieurs centaines de mètres au-dessus de la tête de Yaze, un double de lui avait été créé à partir du flux d’air. Utilisant les vibrations atmosphériques pour imiter sa chair et son système nerveux, il y avait transféré sa conscience. Yaze l’appela ainsi, son atout, « Air Loading ». 

Bien qu’il utilise le même principe que la projection astrale des spiritualistes, Air Loading, cela avait l’avantage de la forme physique, et cela pouvait transmettre des images aussi précisément que l’œil physique.

Mais alors qu’il découvrit la destination de l’hélicoptère maintenant loin au-dessus de l’océan, Yaze était profondément perplexe.

« C’est la planque du Front Empereur de la Mort Noire… ? Qu’est-ce que ça veut dire ? »

Un instant plus tard, Yaze entendit une voix sarcastique venant directement de derrière son corps réel.

« Contrôle acoustique, je présume ? Hmm… une capacité assez rare, très différente de la magie druidique. Peut-être une capacité semblable à celle des mystiques sur le continent ? »

« C’est quoi ce bordel !? »

L’inconvénient de la capacité de Yaze était de projeter sa conscience à son double, ce qui réduisait considérablement la conscience de son propre corps.

Il avait à peine réussi à répondre à la voix, mais il n’avait toujours pas réussi à localiser l’orateur.

Puis Yaze sentit une poussée massive d’énergie magique derrière lui.

Il avait une explosivité énorme qui rivalisait même avec les Vassaux Bestiales de Kojou.

« Qu’est-ce que c’est que ce pouvoir — ! !? »

Le double de Yaze avait été enveloppé d’un pouvoir magique ressemblant à un rayon de lumière et il fut annihilé. Quelqu’un au sol avait abattu sa masse d’air concentrée dans le ciel alors qu’elle volait à quelques centaines de mètres au-dessus du sol.

Laissant échapper un gémissement angoissé en raison de la douleur du contrecoup, Yaze s’effondra sur le sol.

« C’est de la folie. Pourquoi êtes-vous… !? »

Cette fois, il cria à la vue de l’homme qui se tenait là.

Debout contre le rétroéclairage, un grand homme riait en claquant légèrement des doigts.

Une masse géante de flammes était présente dans son dos.

« Désolé, c’est gênant pour moi si vous vous en mêlez tout de suite… Ne vous inquiétez pas, vous ne mourrez pas. Probablement. »

Avant que l’homme n’ait fini de parler, le serpent de flamme s’était jeté sous les pieds de Yaze. Les blocs de cendres surchauffés avaient éclaté, tirés par gravité, ils étaient tombés en morceaux comme si c’était une avalanche.

Au-dessous se trouvait la surface aqueuse d’un canal de transport qui continuait vers l’océan. Incapable de crier, Yaze avait été entraîné vers le bas avec les débris, faisant une éclaboussure spectaculaire et s’enfonçant dans l’eau boueuse.

***

Partie 2

À cette même période, Kojou et Sayaka étaient assis l’un à côté de l’autre dans l’escalier de secours derrière le gymnase de l’école, loin des regards indiscrets. Au début, l’atmosphère avait été très orageuse, mais au fil du temps, cela s’était en effet estompé.

Avec des expressions vides sur leurs visages, les deux agissaient en s’ennuyant, regardant le flot des nuages, jusqu’à ce que Sayaka fasse finalement un petit bâillement. Pendant qu’elle le faisait, Kojou regarda dans sa direction, observant le côté de son visage.

« … Qu’est-ce que vous regardez ? » demanda Sayaka.

Sayaka le dévisagea soudain, ses joues rougissant.

« Euh… Désolé, » s’excusa Kojou avec une vague ennuyée. Les lèvres de Sayaka s’agacèrent de voir Kojou l’écarter comme un chiot bruyant.

Des notes aigres similaires avaient été frappées à plusieurs reprises depuis, épuisant l’énergie mentale de Kojou et Sayaka.

« Hey. Combien de temps devons-nous rester comme ça ? » demanda Kojou.

« Je pense que cela sera jusqu’à ce que Yukina revienne, non ? » demanda Sayaka.

Pendant que Sayaka parlait, elle tenait une paire de sacs qu’elle avait placés sur ses genoux. L’un d’eux contenait l’étui à clavier qui contenait l’épée de Sayaka. L’autre était l’étui à guitare contenant la lance de Yukina.

« Pour que les choses soient claires, je ne veux pas passer un seul instant avec un homme indécent comme vous. Et si je tombais enceinte en respirant le même air que vous ? » s’écria Sayaka.

« Comme si ça pouvait arriver ! Qu’est-ce que vous croyez qu’un vampire est !? » demanda Kojou.

« Je ne voudrais pas que ça vous échappe. Vous avez bu le sang de ma Yukina — vous avez bu le sang de ma Yukina !! »

D’un ton de voix aigri, Sayaka avait fait un gémissement discret. Kojou pensa, eh bien, c’est déprimant, suivi d’un profond soupir.

À cause de cela, Kojou s’était rendu compte qu’ils étaient tous les deux têtus.

S’il avait affaire à quelqu’un de plus jeune, comme Yukina, il sourirait tout simplement et laisserait faire tout cela, si c’était quelqu’un de plus âgé, comme Natsuki — les apparences mises à part — il serait tout à fait disposé à faire preuve d’humilité.

Alors qu’il y pensait, il rencontra soudain les yeux de Sayaka. Elle avait l’air d’avoir observé Kojou pendant tout le temps qu’il pensait. Alors…

« Hey. »

« Hey. »

Après s’être si mal entendus, les deux individus avaient ouvert la bouche en même temps. Sayaka s’était mise à grogner, exhortant Kojou, « Vous d’abord. » Kojou haussa les épaules avec consternation.

« Euh… Je veux dire, désolé, pour ces trucs, » déclara Kojou.

« Hein ? » Les yeux de Sayaka s’étaient élargis en état de choc. « Pourquoi vous excusez-vous ? Ça me fait flipper. »

« Oh, la ferme ! Je veux dire, je pense que vous avez eu raison de dire ce que vous avez dit, Kirasaka, » déclara Kojou.

Pendant que Kojou parlait, il tirait le capuchon du parka qu’il portait sur ses yeux. Parler de cela tout en regardant dans les yeux de l’autre personne le faisait rougir d’une façon ou d’une autre.

« Avec le vieil apôtre armé il n’y a pas si longtemps et avec les affaires terroristes cette fois-ci, Himeragi a été impliquée dans des incidents gênants à cause de moi. J’ai donc pensé qu’il était naturel que son amie en soit bouleversée, » déclara Kojou.

Pour une raison inconnue, Sayaka avait effilé ses lèvres avec un regard d’insatisfaction.

« Certes, c’est votre faute, mais on ne peut rien y faire, parce que c’est la mission de Yukina de veiller sur vous, ce n’est pas comme si elle vous aidait parce qu’elle le voulait. Vous n’avez pas vraiment besoin de vous inquiéter pour ça, » déclara Sayaka.

« Ah… Eh bien, c’est peut-être vrai, mais la vérité reste que c’est elle qui m’a toujours aidé, » déclara Kojou.

Kojou secoua la tête avec un sourire mélangé de douleur. Sayaka était tellement à contre-courant qu’elle s’était mise à consoler Kojou au milieu de ses paroles. Ayant elle-même réalisé cela à mi-chemin, Sayaka avait fait une expression de dégoût.

« Vous êtes certainement un vampire bizarre… D’habitude, je ne pense pas qu’on remercierait quelqu’un qui le surveille. Ou peut-être que vous agissez pour ce genre de choses ? » demanda Sayaka.

« Je ne remercie personne de m’avoir observé, » déclara Kojou d’une voix maussade. « C’est juste que regarder me dérange, mais Himeragi est quelqu’un de bien. »

« Je pensais que vous étiez un homme complètement désespéré, mais il semble que vous soyez au moins un peu sensible. Je vous l’accorde, » déclara Sayaka.

Sayaka avait l’air contente quand elle parlait. Il semblait que les compliments sur Yukina l’avaient mise de bonne humeur. Elle aime vraiment Yukina, pensa Kojou en souriant, alors pourquoi doit-elle me regarder de haut comme ça ?

« Mais je ne peux pas donner de crédit pour des compliments aussi simples. Si vous voulez faire l’éloge de Yukina, vous devez faire preuve de plus de détermination et de respect, » déclara Sayaka.

« … Comment complimenter avec détermination et respect ? » demanda Kojou.

« Ce n’est pas compliqué. Il suffit de décrire fidèlement Yukina telle qu’elle est vraiment : sa peau claire, les cheveux doux et le doré de ses joues, la petite rongeur sous sa clavicule, les lignes de ses omoplates, comme les ailes d’un ange, sa taille si serrée jusqu’à ses hanches courbées, ses fesses dorées… ! » déclara Sayaka.

« … Ce n’est que de l’apparence physique, n’est-ce pas !? » Kojou interrompit, incapable de supporter que Sayaka commence à parler des charmes de Yukina. « Il y a d’autres compliments à faire, n’est-ce pas ? Et vous avez l’air complètement obsédée !! »

« … À part son apparence ? » demanda Sayaka.

Sur ses gardes, Sayaka regarda Kojou. Cet homme est dangereux, en effet…

« Je suppose que oui. Certes, il y a eu la fois où je me suis glissée en douce dans le lit de Yukina et où son parfum persistant m’a entourée… Ahh, quel bonheur…, » déclara Sayaka.

« … Qui complimente les gens pour leur odeur ? » Kojou éleva la voix, alors qu’un mal de tête aigu s’approchait. « Ce n’est pas ce que je veux dire, parlez plutôt de sa personnalité, bon sang ! Elle est si sérieuse, et elle travaille si durement. Elle est surprenante pour les autres, même si elle est timide et très volontaire, mais elle a aussi des points faibles et des faiblesses et tout ça… »

« Pas mal, Kojou Akatsuki. »

Sayaka regarda Kojou avec une expression abasourdie.

« Dire que vous pourriez rivaliser avec moi…, » déclara Sayaka.

« Euh ! Non pas que j’essaie de rivaliser avec vous, mais…, » déclara Kojou.

On n’est pas exactement sur la même longueur d’onde ici, pensa Kojou, fatigué.

« Sachez que j’ai été dans le bain avec Yukina ! » déclara Sayaka.

« Comme si ça m’intéressait !! J’ai les nerfs à cause de tous ces trucs que vous me dites ! » déclara Kojou.

« Oh, la ferme ! Je suis avec cette fille depuis qu’elle a 7 ans. J’ai passé plus de temps avec elle que sa famille ne l’a fait…, » pendant qu’elle parlait, Sayaka poussa son téléphone portable devant Kojou, comme si elle se réjouissait de la victoire.

Une vieille photo montrant deux jeunes filles était affichée à l’écran.

 

 

Elles étaient âgées de sept ou huit ans. Il y avait une fille aux yeux étincelants et une fille aux cheveux châtains clairs.

Sur une toile de fond froide au milieu de l’hiver, les filles aux pieds nus se serraient fortement les mains, se blottissant l’une contre l’autre, comme si c’était toutes les deux contre le monde entier.

En regardant la photo, Kojou se souvint soudain.

Yukina avait dit qu’elle ne se souvenait pas de ses propres parents.

C’était probablement la même chose pour Sayaka. L’Organisation du Roi Lion avait rassemblé des orphelins de tout le pays, les élevant au rang de jeunes Mages d’Attaque anti-démon. Sayaka avait dit qu’elle avait passé plus de temps avec Yukina que sa vraie famille. Mais pour elle, cela signifiait aussi que Yukina avait été à ses côtés pendant un temps tout aussi long.

Sayaka, ayant perdu une famille, en avait finalement gagné une autre avec Yukina après qui sait combien de mois ou d’années. En y pensant de cette façon, il pouvait complètement compatir avec le niveau d’amour et d’affection que Sayaka avait pour Yukina.

« Hmm. C’est certainement mignon, » murmura Kojou.

Kojou regarda encore une fois la photo des filles. Yukina et Sayaka ont toutes les deux des soupçons de leur apparence d’enfant, même maintenant, pensa-t-il. Elles ressemblaient un peu à des mascottes de personnages super déformés sur la photo.

Bien sûr, Sayaka s’était bombé la poitrine, pleinement satisfaite.

« Je l’ai dit depuis le début, non ? Ma Yukina est un ange, » déclara Sayaka.

« Euh, bien sûr, cela vaut aussi pour Himeragi, mais vous étiez vous-même assez jolie à l’époque…, » déclara Kojou.

« Hein… !? »

Comme une statue, tout le corps de Sayaka s’était figé devant le commentaire de Kojou, fait sans la moindre arrière-pensée.

En interne, Kojou n’avait aucune idée qu’il avait dit quoi que ce soit d’étrange. Certes, il y avait des problèmes avec sa personnalité, mais si elle ne parlait pas, elle serait sans doute une belle fille. Et surtout sur cette photo d’enfance, elle était aussi adorable qu’une fée. Si Yukina était un ange à l’époque, Sayaka devait sûrement l’être aussi, c’était ce qu’il pensait.

« C’est… c’est… fou… qu’est-ce que vous… ? » balbutia Sayaka.

Cependant, le commentaire désinvolte de Kojou avait provoqué un niveau de panique amusant chez Sayaka. Elle était rouge vif, comme si sa peau pâle était en train de bouillir, ses deux épaules tremblaient.

Alors…

« … Je devrais vraiment vous tuer ici et maintenant ! » s’écria Sayaka.

« Pour quoi faire !? » demanda Kojou.

Tandis que Sayaka dégainait et levait soudainement son épée, Kojou s’était précipité loin d’elle et Kojou allait se sauver. Pendant un instant, un puissant faisceau de lumière scintilla dans le coin de leur champ de vision.

Un peu après les faits, un bruit d’explosion sourde avait résonné dans l’air. En plein vol, une boule de feu orange s’était mise à gonfler, ressemblant à un feu d’artifice, se brisant en fragments noirs avant de disparaître. Enfin, une flamme enveloppée d’une fumée noire de mauvais augure s’éleva du sol, haut dans les airs.

« Qu’est-ce que c’était !? On aurait dit qu’un hélicoptère a été abattu…, » déclara Sayaka.

« Un accident ? Ou peut-être… »

Kojou et Sayaka chuchotèrent tout en restant sous le choc.

Pour pouvoir descendre un hélicoptère en un seul coup, il fallait utiliser un missile sol-air ou une arme similaire. Les seules personnes qui auraient lâché quelque chose comme ça dans une zone urbaine étaient celles qu’on appelle normalement des terroristes.

« C’est peut-être le Front de l’Empereur de la Mort Noire !? » s’écria Sayaka.

« Cette direction… C’est l’extension du sous-flotteur en construction ! » déclara Kojou.

Sayaka et Kojou criaient en même temps alors qu’ils commencèrent à descendre les escaliers de secours.

Yukina leur avait peut-être dit de réfléchir calmement, mais si le Front de l’Empereur de la Mort Noire était vraiment fou de rage, ce n’était pas le moment de traîner.

Kojou ne pensait pas que l’accident d’hélicoptère avait quelque chose à voir avec le Nalakuvera, mais en premier lieu, le Front de l’Empereur de la Mort Noire était un groupe terroriste. Il ne pouvait pas rejeter la possibilité qu’ils lancent des attaques aveugles contre la ville. Il ne pouvait pas l’ignorer.

Mais au moment où ils se précipitaient au premier étage du gymnase, Kojou s’était soudainement arrêté. Agacée, Sayaka essaya de pousser Kojou, maintenant un obstacle sur son chemin, hors de sa route.

« Qu’y a-t-il, Kojou Akatsuki ? Vous êtes sur mon chemin ! » déclara Sayaka.

« C’est quoi ce parfum…  !!? » demanda Kojou.

« Parfum ? » demanda Sayaka.

Comme appâté par les paroles de Kojou, Sayaka renifla avec force. Son expression s’était ensuite transformée en confusion. Elle aussi avait remarqué l’odeur étrange qui dérivait à l’intérieur de l’école.

« L’odeur du sang !? » demanda Sayaka.

« Non… c’est similaire, mais ce n’est pas du sang…, » déclara Kojou.

Kojou avait ouvert la fenêtre la plus proche et sauta dans le bâtiment de l’école. L’odeur étrange du sang, presque, mais pas du tout, n’avait fait que s’intensifier. Réalisant la source de l’odeur, Kojou s’était précipité, ouvrant avec force la porte de l’infirmerie.

« … Astarte !? »

Ce que Kojou avait vu, c’était la fille homoncule, allongée sur le côté sur le sol, couvert de fluides corporels cramoisi clair.

« Ces blessures… des coups de feu !? Qu’est-ce qui s’est passé !? » demanda Kojou.

Sayaka s’était précipitée et avait retiré les vêtements d’Astarte pour vérifier l’état de ses blessures. Il restait des blessures épouvantables sur son corps après avoir été frappé par tant de tirs.

Bien qu’elle ne puisse plus bouger de son plein gré, Astarte semblait à peine avoir conservé sa conscience. Identifiant Kojou de vue, elle avait fait une frêle expiration mélangée à du sang.

« … Rapport au quatrième Primogéniteur : vingt-cinq minutes, treize secondes avant l’heure actuelle, une personne se faisant appeler Kristof Gardos apparaît dans la cour de l’école. Il a emmené Asagi Aiba, Nagisa Akatsuki et Yukina Himeragi, » déclara Astarte.

« Quoi… !? » s’exclama Kojou.

Kojou était sous le choc face à l’information qu’Astarte lui avait communiquée.

Certes, Yukina lui avait dit qu’elle amenait Asagi à l’infirmerie et Nagisa avait dû partir avec elle. Mais dans la salle de l’infirmerie, il ne restait que l’Astarte ensanglantée. Il n’y avait aucun signe de Yukina ou des autres…

« Leur destination est inconnue. Je m’excuse… Je n’ai pas été en mesure de les protéger… elles…, » déclara Astarte.

Les yeux bleu clair d’Astarte vacillaient pendant qu’elle parlait. Un gros caillot de sang s’était répandu de sa gorge. Elle n’aurait pas dû parler dans un tel état. C’était presque un miracle qu’elle soit vivante.

« H-hey, Astarte !? Astarte, reste avec moi… ! » Kojou avait crié désespérément à la fille homoncule.

Sur le côté, Sayaka commença à stopper méticuleusement l’hémorragie d’Astarte.

***

Partie 3

Yukina et les autres étaient dans une pièce exiguë avec les fenêtres fermées.

À l’origine, il s’agissait probablement d’un entrepôt pour le stockage de denrées alimentaires et d’autres produits du genre. C’était une pièce terne, pas même meublée d’une seule chaise. Les tuyaux au plafond étaient nus et exposés, le sol était légèrement rouillé.

En ayant eu les yeux bandés lorsqu’on les avait amenés ici, elles ne connaissaient pas les conditions qui prévalaient autour d’elles. La pièce était probablement souterraine. Le léger balancement de l’édifice qu’elles avaient senti pourrait leur indiquer que c’était un transport par hélicoptère.

« Hé… Où croyez-vous que c’est ? » demanda Asagi, recroquevillée sur une caisse vide en bois, avec hésitation.

Le regard présent en ce moment sur son visage était plus dur que d’habitude, peut-être parce qu’elle se sentait responsable de l’enlèvement de Yukina et Nagisa. Mais cela ne voulait pas dire qu’elle paniquait en ce moment.

Yukina, soulagée, secoua la tête.

« Je n’en sais rien. Je crois que l’hélicoptère a volé pendant une dizaine de minutes, donc je ne pense pas que nous aurions pu aller très loin, mais…, » déclara Yukina.

En regardant cette réaction chez Yukina, Asagi avait plissé ses yeux dans une suspicion apparente.

« Vous êtes très calme, hein ? N’avez-vous pas peur ? » demanda Asagi.

« Hein ? Ah, euh… ce n’est pas vrai, mais ah, vous êtes aussi calme, Aiba, » déclara Yukina.

« Est-ce vraiment le cas ? » murmura Asagi, l’air un peu gêné en jetant un coup d’œil sur le visage de Nagisa pendant qu’elle était inconsciente.

Nagisa était encore inconsciente alors qu’elle s’accrochait à l’épaule de Yukina. Asagi avait dû penser que Nagisa s’était évanouie en raison de la peur provoquée par l’enlèvement.

Cependant, la vérité était que, comme elle tombait dans un état de panique, Yukina l’avait assommée d’un coup de poing. Bien qu’elle ne soit pas fière de ses méthodes violentes, c’était le seul moyen pour elle de protéger Nagisa dans cette situation. Elle aurait été en danger de subir une dépression mentale si Yukina l’avait laissée ainsi.

Yukina pensait que la peur de Nagisa envers les démons était vraiment anormale. C’était clairement contre nature pour un résident d’un sanctuaire des démons.

« … C’est parce que j’ai vu Nagisa comme ça. Je me disais que je devais donc rester calme, comprenez-vous, » déclara Yukina.

Comme si elle remarquait les réticences de Yukina, Asagi avait parlé avec un sourire tendu.

« Savez-vous pourquoi Kojou et sa famille ont déménagé sur l’Île d’Itogami ? » demanda Asagi.

« … Non, » répondit Yukina.

Yukina secoua lentement la tête. Kojou et sa famille avaient déménagé au Sanctuaire des Démons il y a quatre ans. Même les rapports de l’Agence du Roi Lion n’en contenaient pas la raison. Et ce, malgré le fait que tous les immigrants du sanctuaire des démons avaient fait l’objet d’une vérification approfondie de leurs antécédents…

« J’aimerais que vous gardiez ça entre nous, » déclara Asagi.

Asagi leva son index contre ses lèvres en baissant légèrement le regard. Il était rare qu’elle ait une expression franche et sérieuse.

« Nagisa a failli mourir une fois, » déclara Asagi.

« Hein ? » s’exclama Yukina.

« Il y a quatre ans, elle a été prise dans un accident de train impliquant des démons. Elle a survécu d’une façon ou d’une autre, mais ils disaient qu’elle pourrait ne jamais reprendre connaissance, et encore moins retourner à une vie normale…, » déclara Asagi.

Asagi secoua un peu la tête en parlant. Les lèvres de Yukina frémirent d’étonnement.

« Mais Nagisa ne montre aucun signe de…, » déclara Yukina.

« Ouais, je sais. Je ne connais pas moi-même les détails, mais elle semble recevoir un traitement de faveur. C’est après tout un sanctuaire de démons, » déclara Asagi.

Yukina s’était tue devant les explications d’Asagi.

Le Sanctuaire des Démons de l’Île d’Itogami était une ville savante. Des recherches avaient été effectuées sur les corps et les capacités démoniaques sur une base quotidienne, conduisant au développement de nouvelles technologies et de nouveaux produits. Et cette recherche comprenait une technologie médicale de haut niveau : une technologie médicale expérimentale, non approuvée.

« Ses blessures sont complètement cicatrisées, mais je m’attends à ce qu’elle subisse des examens réguliers, même maintenant, cela semble aussi coûter beaucoup d’argent. Je pense que cela a quelque chose à voir avec la raison pour laquelle, après le divorce de leurs parents, leur mère ne rentre pas beaucoup à la maison, » déclara Asagi.

Après avoir tant parlé, Asagi fit un grand haussement d’épaules. Elle semblait gênée d’avoir parlé d’une manière si inhabituellement sérieuse.

« C’est peut-être pour ça que Nagisa a peur des démons ? » demanda Yukina.

« Vous devriez lui demander, mais je ne serais pas choquée si c’était le cas, » déclara Asagi.

Yukina hocha la tête sans dire un mot.

Elle avait l’impression de comprendre pourquoi Kojou, ayant acquis des pouvoirs vampiriques contre sa volonté, essayait si désespérément de cacher ce fait à sa petite sœur. La vie quotidienne dont ils jouissent actuellement ne pourrait pas continuer si Nagisa apprenait que l’un de ses parents de sang était devenu lui-même un démon.

Semblant préoccupée par le silence de Yukina, Asagi avait soudain parlé sur le ton de sa voix habituelle et légère.

« Aussi, désolée. C’est ma faute si vous êtes impliquée là-dedans, » déclara Asagi.

Yukina se sentait coupable en secouant la tête. Asagi n’avait pas besoin de se sentir responsable des crimes du Front de l’Empereur de la Mort Noire. Si quelqu’un était responsable, c’était Yukina pour avoir été incapable de les protéger.

« Aiba, savez-vous pourquoi ils vous ont enlevée ? » demanda Yukina.

« Non, je ne sais pas, » répondit Asagi.

Asagi étendit les bras avec insouciance en soupirant.

« Ce n’est pas comme si je n’en avais aucune idée. Ils ont dit qu’ils avaient un travail pour moi, » déclara Asagi.

« Un travail, vous dites ? » demanda Yukina.

Yukina avait répété les mots en réponse, avec un regard vide dans les yeux alors qu’elle inclinait son cou.

« Je garde cela secret pour l’école, » déclara Asagi, en tirant un peu la langue. « Je fais quelque chose comme de la programmation à temps partiel en free-lance, vous voyez. Parfois, ce qui est demandé ressemble beaucoup à du piratage illégal. Bien sûr, je n’ai jamais eu le bras aussi tordu jusqu’à maintenant. »

« Du piratage à mi-temps, vous dites ? » demanda Yukina.

Yukina était de plus en plus confuse. Bien que Yukina soit une mage d’attaque anti-démon qualifiée au niveau national avec une connaissance approfondie de la magie rituelle, l’inconvénient de cette éducation spéciale était que sa connaissance des autres matières était inférieure à celle des autres filles du collège. Même si elle avait déjà entendu le terme piratage auparavant, elle ne pouvait pas s’imaginer les détails de façon concrète.

« C’est un travail spécial qui utilise des ordinateurs. C’est des trucs comme écrire des programmes personnalisés, envahir les réseaux d’entreprise, déchiffrer les mots de passe…, » expliqua Asagi.

« … Pourquoi le Front de l’Empereur de la Mort Noire ferait-il tout son possible pour exiger que vous fassiez un tel travail pour eux ? » demanda Yukina.

Avec la garde de l’île à leur poursuite, le Front de l’Empereur de la Mort Noire prenait vraiment un risque en enlevant une simple lycéenne comme elle. Elle ne comprenait pas pourquoi ils voulaient un seul programmeur au point de courtiser un tel danger.

« Je trouve aussi ça étrange. Ce sont bien les terroristes du Front de l’Empereur de la Mort Noire qui causaient des problèmes en Europe il y a quelques années, non ? Je me demande ce qui a attiré leur attention sur moi, » déclara Asagi.

Asagi, en utilisant son téléphone cellulaire sans réception à la place d’un miroir, avait redressé ses cheveux à l’avant qui étaient ébouriffés. Ce faisant, elle ne ressemblait en effet à rien de plus qu’une lycéenne ordinaire. Yukina ne pensait pas qu’elle était une personne d’une capacité inhabituelle au point d’attirer les yeux de Gardos. Mais…

Soudain, Gardos avait ouvert la porte et entra, parlant d’une voix très militaire. « … Vous ne semblez pas connaître votre renommée, Mademoiselle Aiba. » Asagi avait retenu son souffle et s’était retournée.

Derrière Gardos, deux hommes se tenaient debout, portant des uniformes militaires de camouflage urbain. Ils étaient probablement tous des hommes bêtes.

« Dans tous les cas, il n’y a pas un seul technicien à notre service qui ne connaisse pas votre nom. Bien sûr, même eux ne pensaient pas que la célèbre Cyber Impératrice était une si jolie jeune femme, » déclara Gardos.

« Pensez-vous que de telles flatteries creuses vont me mettre dans une atmosphère de coopération ? » Asagi parla en regardant le visage de Gardos, sans reculer.

L’officier âgé avait fait un rire satisfait en vue de sa réaction.

« Pardonnez mon impolitesse. Je ne veux pas dire par là qu’il s’agit d’une flatterie creuse, mais j’apprécie grandement votre sang-froid et votre attitude résolue. Je ne veux pas abattre des civils qui perdraient la tête dans cette situation, mais je ne voudrais pas leur confier un travail important, » déclara Gardos.

Gardos baissa les yeux vers Nagisa, encore endormie et sans réaction, tandis qu’il poursuivait sa route.

Asagi avait fait un regard mécontent en se levant.

« Si je suis la seule que vous voulez, laissez-les rentrer chez elles d’abord. Les affaires peuvent venir après, » déclara Asagi.

« Si vous insistez absolument, je me conformerai à vos exigences, mais…, » déclara Gardos.

Gardos fit un sourire doux et tendu.

« Si vous souhaitez sincèrement la sécurité de ces filles, je ne peux soutenir cette décision, » continua Gardos.

« Qu’est-ce que vous voulez dire par là ? Sachez que si vous posez un seul doigt sur l’une d’elles…, » déclara Asagi.

« Nous sommes une bande organisée de guerriers. Aucun d’entre nous ne maltraiterait un civil comme un simple voyou, » déclara Gardos.

La voix grave et résolue de Gardos résonnait, comme pour dissiper les doutes d’Asagi.

Malgré tout, Asagi avait regardé dans les yeux de Gardos.

« Et l’homoncule que vous avez abattu dans la salle de soins ? » demanda Asagi.

« Elle était un outil de combat, comme nous, » déclara Gardos.

Parlant d’une voix complètement calme, Gardos baissa les yeux comme s’il pleurait pour Astarte. Son ton de voix respectueux contrastait avec ses paroles, mais à travers elles, on sentait ses convictions inébranlables de guerrier.

« … Puis-je vous faire confiance ? » demanda Asagi.

« Je jure sur nos camarades morts et sur l’honneur du Front de l’Empereur de la Mort Noire, » déclara Gardos.

« Très bien, alors. J’écouterai au moins ce que vous avez à dire. Allez-y, expliquez-moi, » déclara Asagi.

Prenant une grande respiration, Asagi s’était placée au sommet de la caisse en bois.

« Hmph, » dit Gardos, les lèvres doucement recourbées de satisfaction en regardant ses hommes.

Ses subordonnés avaient apporté un anneau qui reliait un document assez épais. On aurait dit des plans et un manuel d’équipement électrique.

« Vous reconnaissez ceci ? » demanda Gardos.

« “Souverän Nine” !? Où en avez-vous eu un comme ça ? » demanda Asagi.

Asagi avait émis une voix choquée en regardant le manuel en anglais.

« De quelqu’un qui sympathise avec notre cause. L’armée australienne devait l’acheter avant qu’il ne soit détourné. C’est le dernier modèle de la série de supercalculateurs qu’utilise la société de gestion de l’Île d’Itogami, n’est-ce pas ? » demanda Gardos.

« Ce que vous voulez dire, c’est qu’il faut utiliser ça pour déchiffrer les codes de commande de cette arme ancienne Nalakuvera ? » murmura Asagi d’un ton très franc.

Cette fois, c’était Gardos qui avait retenu son souffle. Nul doute, qu’il n’avait jamais imaginé qu’une personne sans lien comme Asagi serait au courant de l’existence de l’arme ancienne connue sous le nom de Nalakuvera.

« Il semblerait que nous ayons besoin d’augmenter notre évaluation sur vous de plusieurs crans. Remarquable, » déclara Gardos.

« C’est vous qui m’avez envoyé ce puzzle ennuyeux hier, n’est-ce pas ? » demanda Asagi en le regardant d’un air mécontent. Gardos acquiesça solennellement.

« Nous avons envoyé le même courriel à plus de cent cinquante pirates informatiques, mais seulement huit individus ont été capables de déchiffrer ce que vous appelez un “puzzle ennuyeux”. Parmi eux, vous seule avez produit la bonne réponse sans aucune erreur. De plus, vous l’avez terminé en moins de trois heures, un temps étonnamment court, » déclara Gardos.

« Il s’est passé beaucoup de choses ce jour-là. Je voulais m’évader de la réalité, » déclara Asagi.

S’adressant à elle-même dans une moue, Asagi avait jeté un coup d’œil de côté à Yukina pour une raison inconnue. Yukina avait cligné des yeux avec un sentiment d’égarement, détournant ses yeux à la suite d’un vague sentiment de culpabilité.

Gardos n’avait pas fait attention pendant qu’il continuait à parler.

« Nos objectifs sont la destruction immédiate de ce maudit Traité de la Terre Sainte et l’anéantissement du Premier Primogéniteur, traître de tout démon. Le pouvoir du Nalakuvera est nécessaire à la réalisation de nos objectifs, » déclara Gardos.

« Il n’y a aucune chance que je coopère après avoir entendu ça, n’est-ce pas ? Si vous réussissez avec un plan comme ça, dans le pire des cas, ça plongerait le monde entier dans la guerre ! » cria Asagi en claquant le manuel sur le sol. Un rire était sorti des lèvres de Gardos.

« C’est le monde auquel nous aspirons… mais il est certain que cela va à l’encontre de vos valeurs. Et pourtant… non, parce qu’il en est ainsi, j’espère que vous coopérerez avec nous, » déclara Gardos.

« Hein ? Qu’est-ce que vous voulez dire par là ? Il n’y a aucune chance que je…, » commença Asagi.

« Savez-vous ce que c’est ? » demanda Gardos.

Pendant que Gardos parlait, l’un de ses hommes avait sorti une fine tablette PC.

L’écran affichait une ligne de texte étrangement longue. Bien qu’elle ressemblait à un sort, elle ne relevait d’aucun des rituels magiques dont Yukina était au courant. Mais elle ne pensait pas qu’il s’agissait d’une phrase dénuée de sens.

C’était une formule compliquée, décomposée en une forme que les humains pouvaient prononcer. Asagi le regarda d’un air aigre.

« Le puzzle que j’ai déchiffré… les codes de commande pour l’arme ancienne, hein ? Mais ne s’agit-il pas d’une pièce d’un puzzle plus vaste ? » demanda Asagi.

« C’est tout à fait exact. Au total, cinquante-quatre tablettes de pierre ont été excavées en même temps que le Nalakuvera. Ce n’était que l’une seul d’entre elles. Mais vous vous souvenez de ce qu’il y avait sur celui-ci, n’est-ce pas ? » demanda Gardos.

« Vous ne pouvez pas… dire ça…, » demanda Asagi.

En entendant les paroles de Gardos, le visage d’Asagi devint pâle.

Le terroriste de l’Empire du Seigneur de guerre avait l’air très heureux alors qu’il faisait un sourire glacial.

« C’est bien vrai. Le titre de cette tablette de pierre est “Les premiers mots” — la commande de démarrage du Nalakuvera, » déclara Gardos.

***

Partie 4

Le dos appuyé contre le mur de l’infirmerie, Kojou tremblait. Même s’il avait appelé Asagi et les autres par téléphone cellulaire, tout ce qu’il avait reçu, c’était un message vocal disant qu’elles étaient à l’extérieur de l’école.

Apparemment, le rapport était correct — elles avaient vraiment été enlevées par le Front de l’Empereur de la Mort Noire.

Mais Kojou ne comprenait pas la raison. Certes, Yukina en avait après le Front de l’Empereur de la Mort Noire, mais ce n’était pas une raison pour l’enlever. D’autant plus avec Asagi et Nagisa, qui ne devraient pas être liés au Front de l’Empereur de la Mort Noire de la moindre façon…

« Attends…, » murmura-t-il.

Il y avait une chose, et une seule, qui liait les filles entre elles. Kojou avait broyé des dents comme il s’en était rendu compte.

Le Nalakuvera. Kojou avait demandé à Asagi d’enquêter sur l’arme ancienne passée en contrebande, mais pour une raison inconnue, elle semblait déjà connaître le nom. De plus, elle avait été attirée par la tablette de pierre qui montrait comment contrôler le Nalakuvera.

Kojou connaissait bien les compétences d’Asagi en tant que craqueuse de mots de passe. Si le Front de l’Empereur de la Mort Noire pensait qu’ils pourraient utiliser ses talents pour déchiffrer la tablette de pierre…

« Kojou Akatsuki, n’ont-ils pas déjà envoyé une ambulance ? » demanda Sayaka.

La voix emplie d’urgence de Sayaka interrompit la pensée de Kojou.

Elle était en train de donner les premiers soins sur les blessures graves d’Astarte.

« Ils ont envoyé une ambulance, mais on dirait qu’elle ne va pas arriver tout de suite, » déclara Kojou.

« Pourquoi pas !? » demanda Sayaka.

« Je ne sais pas. Mais je pense que ça a quelque chose à voir avec l’accident d’hélicoptère. Peut-être qu’ils sont à court, peut-être que la route est bloquée ? » demanda Kojou.

« Je vois… c’est tout…, » déclara Sayaka.

Sayaka s’était mordu la lèvre dans une apparente angoisse.

« Elle ne tiendra pas à ce rythme. Si je n’arrête pas au moins la fuite de liquide…, » déclara Sayaka.

« Arrêter l’hémorragie ? Mais… » demanda Kojou.

Kojou s’était arrêté alors qu’il était sur le point de dire : « Pouvez-vous au moins faire ça ? »

Les blessures par balle d’Astarte étaient à un niveau qui aurait instantanément tué une personne normale. Même avec un puissant Vassal Bestial fabriqué par l’homme qui habitait dans son corps, Astarte n’était pas un homoncule prévu pour le combat. Sa solidité physique était probablement comparable à celle d’une personne normale.

« Ce n’est pas grave. Je vais m’en occuper. Vous devez m’apporter des antiseptiques et des pansements, » déclara Sayaka.

En prononçant ces mots sur un ton qui écartait tout doute, Sayaka avait retiré quelque chose de la manchette de son uniforme. C’était une aiguille métallique d’une quinzaine de centimètres de long, si fine que l’œil nu pouvait à peine s’en détacher.

« La cartographie du système nerveux est de Type un — Humanoïde standard. Cela devrait fonctionner…, » alors que Sayaka murmurait, elle plongea l’aiguille dans le dos d’Astarte.

« Kirasaka !? » demanda Kojou.

« Ne vous inquiétez pas. C’est comme l’acupuncture. Ça la met dans le coma et maintient ses constantes au strict minimum. Cela devrait arrêter le saignement et minimiser les dommages cellulaires et cérébraux, » déclara Sayaka.

« … L’acupuncture… vous pouvez faire ça ? » demanda Kojou.

Kojou regarda les délicats doigts de Sayaka avec étonnement. Certes, elle était la seule sur qui il pouvait compter dans cette situation, mais…

Puis, Sayaka avait fait un rire chaleureux, apparemment destiné à elle autant qu’à lui.

« Je vous l’ai dit, les danseurs de guerre chamaniques de l’Organisation du Roi Lion sont des spécialistes des malédictions et des assassinats, non ? C’est ma mission de contrôler si quelqu’un vit ou meurt. Je ne laisserai pas une fille qui a aidé Yukina mourir sous mes yeux ! » déclara Sayaka.

Une expression terriblement sérieuse était apparue sur le visage de Sayaka pendant qu’elle parlait.

Les yeux de Kojou avaient été captivés par sa vue. Il sentait que Sayaka, alors qu’elle continuait à traiter le saignement frais d’Astarte, était d’une certaine manière sublime, voire magnifique. Les Danseurs de Guerre chamaniques — en d’autres termes, une prêtresse dansante. Sans doute que, tout comme Yukina, elle était une spiritualiste à travers laquelle les voix des dieux résonnaient, voyant et connaissant tout.

« … J’ai une suggestion, quatrième Primogéniteur… »

La jeune homoncule impuissante, toujours par terre, avait crié à Kojou d’une voix qui menaçait de disparaître. Kojou rapprocha son oreille de ses lèvres.

« Astarte ? » demanda Kojou.

« Le Maître est… actuellement… en route vers la cachette du Front de l’Empereur de la Mort Noire… pour les appréhender… Je crois qu’Asagi Aiba et les autres kidnappées par Kristof Gardos se dirigeaient vers la cachette de ce même Front de l’Empereur de la Mort Noire…, » déclara Astarte.

« … Donc Asagi et les autres pourraient être détenus là où Natsuki va ? » demanda Kojou.

« Affirmatif, » répondit Astarte.

Après avoir transmis toutes les informations dont elle avait besoin, une expression de soulagement était apparue sur Astarte alors qu’elle ferma les yeux. Elle avait alors complètement perdu connaissance. Elle était entrée dans un profond sommeil mortel. Cependant…

« Elle va probablement s’en sortir. Les hôpitaux d’un sanctuaire de démons devraient avoir des cuves de restauration pour les homoncules, et les filles comme elle n’ont pas à s’inquiéter du rejet d’organe, » déclara Sayaka.

Sayaka avait parlé en s’effondrant sur le sol. Un sourire satisfait était apparu sur ses lèvres.

« Je vois. Vous avez vraiment sauvé la journée, Kirasaka. Merci d’être venue, » déclara Kojou.

Alors que Kojou expirait en soulagement, il tendit la main à Sayaka. Elle lui prit la main et se leva.

« Euh, ouais. Merci… Non pas que je faisais ça pour vous, bien sûr ! » déclara Sayaka.

Soudain, elle retrouva ses esprits et Sayaka lâcha violemment la main de Kojou.

« Ça fait mal. C’est quoi votre problème ? » demanda Kojou.

« Rien du tout. Va mourir maintenant… bon sang ! » déclara Sayaka.

Crachant ses mots derrière elle, Sayaka s’était dirigée vers les toilettes de l’infirmerie, se lavant les mains tachées de sang.

Pendant ce temps, Kojou avait essayé encore une fois d’utiliser son téléphone portable. C’était un appel au numéro de Natsuki. Mais…

« … Je suppose qu’il n’y a pas de signal ! Merde, même si Natsuki sait où est la cachette terroriste, si je ne sais pas où elle est, ça ne veut rien dire ! » déclara Kojou.

Comme l’appel cellulaire refusait de se connecter, Kojou avait rapidement abandonné, poussant un soupir exaspéré.

Si Natsuki se dirigeait vers la cachette du Front de l’Empereur de la Mort Noire comme Astarte l’avait dit, il devait y avoir un combat. Il y avait une forte probabilité qu’Asagi et les autres soient prises dans les combats. Il devait trouver Natsuki et lui parler de l’enlèvement avant que ça n’arrive.

Mais Kojou n’avait aucun moyen de savoir où se trouvait Natsuki en ce moment…

« Kojou Akatsuki. L’homoncule a dit que son maître se dirigeait vers le Front de l’Empereur de la Mort Noire, oui ? » demanda Sayaka.

Sayaka était revenue après avoir lavé le plasma artificiel, en enlevant son pull d’été taché pendant qu’elle parlait.

« Ouais, » répondit Kojou.

« Alors il y aura un combat acharné, » déclara Sayaka.

« Je sais. C’est pour ça que je suis si nerveux. » Kojou répondit avec irritation. Sayaka avait regardé Kojou comme s’il était un idiot. Elle parlait comme si elle était une détective célèbre qui taquinait un détective paumé.

« Alors. Question : Où se déroule un combat acharné sur cette île, en ce moment même ? » demanda Sayaka.

« Ah…, » s’exclama-t-il.

Où se déroulait une bataille féroce, telle qu’un hélicoptère heurté par un missile sol-air qui s’écrasait ?

Kojou frappa des mains en se souvenant de l’endroit.

***

Partie 5

L’Île d’Itogami était fondamentalement composée de quatre Gigaflotteurs — Est, Ouest, Sud, Nord — mais l’île avait aussi de nombreuses petites unités d’extension tout autour.

Elles remplissaient diverses fonctions, telles que les dépôts flottants de pétrole brut, les cales sèches pour la réparation des navires, ou même servir de décharge géante pour le stockage des déchets ininflammables. Les bâtiments du sous-flotteur no 13 de l’Île d’Itogami constituaient une de ces installations d’enfouissement.

***

« — Désolé, mais je ne peux pas aller plus loin. La police a bouclé la route. »

Le chauffeur de taxi avait arrêté la voiture avant qu’ils n’atteignent un accès entre les îles.

Les passagers à l’arrière, Kojou et Sayaka, s’étaient penchés vers l’avant et avaient regardé la scène devant eux.

Un terrain en forme d’éventail d’un rayon d’environ cinq kilomètres était présent sur la surface de la mer.

Il s’agissait d’un vaste espace plat et vide, suggérant un site d’enfouissement encore en construction. La seule différence identifiable avec un site d’enfouissement était la présence de plaques d’acier épaisses couvrant toute la surface.

Il y avait certainement une barricade jaune et noire placée sur le pont qui reliait le pont au sous-flotteur. Kojou pouvait aussi voir des voitures de patrouille avec des feux rouges clignotants.

« Ce n’est qu’une rumeur que j’ai entendu de la part d’autres chauffeurs de taxi, mais j’ai entendu dire qu’ils avaient trouvé des terroristes recherchés à l’échelle internationale. Hé, avez-vous entendu ce bruit tout à l’heure ? C’est un coup de feu. Je connais bien ce son, car j’ai vécu dans la zone de conflit civil de Shimabara avant d’obtenir ce poste, » déclara le chauffeur.

Pendant que le conducteur parlait, il haussait les épaules en entendant des crépitements intermittents à travers les vitres.

Sayaka murmura, « Ah, je vois » et elle fit un signe de tête approprié.

« Compris. Je vous remercie. On va descendre ici, » déclara Sayaka.

« Bien sûr. Ça fera huit cent quatre-vingt-dix yens, » déclara le chauffeur de taxi.

Le chauffeur de taxi n’avait pas fait d’effort particulier pour arrêter Kojou et Sayaka, n’exigeant que ses honoraires.

Il s’agissait d’une paire de lycéens et de lycéennes qui sentaient distinctement le sang et qui transportaient avec eux un étui d’instrument de musique suspect. Ce n’était pas surprenant qu’il ne veuille pas être impliqué, mais…

« Vous l’avez entendu, Kojou Akatsuki. Payez l’homme, » déclara Sayaka.

« Comment ça !? Vous recevez aussi de l’argent de l’Organisation du Roi Lion, n’est-ce pas !? Appelez ça une dépense, » déclara Kojou.

« Je n’ai pas mon portefeuille sur moi. Vous êtes Primogéniteur, vous pouvez payer dans ce cas. Oh, et vous pouvez déjà mourir, » déclara Sayaka.

« Comme si j’allais mourir ! N’appelez pas un taxi si vous n’avez pas de portefeuille !! » s’écria Kojou.

Kojou s’était plaint pendant tout ce temps et avait dû payer le prix de la course. Pour Kojou, qui vivait avec le maigre budget d’un lycéen, ces frais représentaient beaucoup d’argent.

Grâce à cette extravagance, ils avaient considérablement raccourci leur temps de déplacement. Après avoir quitté l’école, il leur avait fallu une quinzaine de minutes pour en arriver là. L’épave de l’hélicoptère écrasé brûlait encore à l’extrémité la plus éloignée de la large plate-forme. Et même maintenant, une fusillade s’était poursuivie à l’intérieur de la fumée blanche suspendue au-dessus de la zone.

« C’est vraiment la guerre dehors, bon sang…, » murmura Kojou.

Kojou gémissait d’irritation et de frustration en écoutant les tirs incessants.

Le sous-flotteur en construction présentait des grues et des tours en acier qui se tenaient comme des arbres décrépis. La plus grande tour était un bâtiment cylindrique d’environ cinq étages.

Un certain nombre de camions blindés épais se trouvait là, et ils encerclaient cette tour.

Les gardes de l’île avaient emmené des troupes mécanisées qui s’étaient abritées dans l’ombre des camions blindés alors qu’ils tiraient à l’aveuglette avec des armes légères. Chaque fois qu’ils l’avaient fait, les tirs de riposte provenaient du côté de la tour. Cette lutte acharnée était tombée dans une impasse totale.

Il y avait des débris de camion blindé éparpillés tout autour de la tour, et le nombre de victimes n’était pas négligeable. C’était une guerre d’usure, comme marcher dans un marais. Il n’avait pas l’impression que des civils comme Kojou et Sayaka devaient se fourrer le visage dans quelque chose.

« On dirait que les terroristes défendent cet endroit, » déclara Sayaka, évaluant froidement la situation au combat.

« Défendre ? Dans un endroit comme ça ? » demanda Kojou.

Kojou se tourna vers elle avec un regard empli de doute.

Il n’y avait rien à gagner pour le Front de l’Empereur de la Mort Noire à défendre un endroit où ils ne pouvaient s’attendre à aucun soutien de la part des alliés et où ils avaient des armes et des munitions limitées. Il ne pensait pas que Gardos, qui avait fréquenté une école militaire, choisirait une stratégie aussi stupide.

Mais Sayaka avait montré l’épave de l’hélicoptère qui brûlait encore.

« Je me demande s’ils n’avaient pas l’intention de s’en servir pour s’échapper. Mais les gardes de l’île ont abattu l’hélicoptère, alors ils ont perdu les moyens de fuir, » déclara Sayaka.

« Vous dites qu’ils n’ont donc pas d’autre choix que de le faire ? » demanda Kojou.

Kojou avait fait un « mmm » par le nez. L’explication de Sayaka a du sens à première vue, pensa-t-il. Les criminels en fuite avaient tendance à se terrer dans n’importe quel bâtiment à proximité.

Mais bien qu’il n’ait pas pu le formuler clairement, Kojou avait toujours un malaise étrange en lui.

« Atterrir un hélicoptère à la vue de tous, c’est pratiquement supplier les gens de l’abattre, n’est-ce pas… ? » demanda Kojou.

« Hein ? » s’exclama Sayaka.

« Euh, rien. De toute façon, si le Front de l’Empereur de la Mort Noire n’a nulle part où aller, il est possible qu’ils utilisent Himeragi et les autres comme otages ? » demanda Kojou.

« O-Otages… ? » murmura Sayaka.

À ce moment, le petit visage de Sayaka avait rougi en produisant un son agité venant d’elle. Ce n’est pas bon, pensa Kojou en faisant claquer sa langue. En raison de l’insouciance de Kojou, Sayaka avait complètement perdu son sang-froid.

Sans hésitation, Sayaka avait sorti son épée de l’étui à clavier qu’elle portait.

« Yukina… Je dois… Je dois aller la sauver…, » déclara Sayaka.

« Du calme, Kirasaka ! La garde de l’île a verrouillé l’entrée. Si on fait irruption, ils nous arrêteront en un rien de temps ! » déclara Kojou.

Kojou avait attrapé les bras de Sayaka par-derrière en criant dans son oreille.

Sayaka avait lutté avec les bras et les jambes.

« Je comprends ça, bon sang ! Vous ne pouvez rien faire !? » demanda Sayaka.

« Qu’est-ce que ça veut dire, quelque chose ? » demanda Kojou.

« Des sorts, comme charmer les policiers avec un œil maléfique, se transformer en brume pour passer à côté d’eux, voler dans le ciel, des choses comme ça, » demanda Sayaka.

« Je n’ai pas de compétences surhumaines comme ça ! » déclara Kojou.

« Hein !? Vous êtes un vampire Primogéniteur, n’est-ce pas ? » demanda Sayaka.

Sayaka avait regardé en réponse, choquée par les aveux tout à fait francs de Kojou.

« Je vous l’ai dit, j’étais un être humain normal jusqu’à récemment ! » déclara Kojou.

« Vassaux Bestiales !? N’avez-vous pas de pouvoirs que vous pouvez utiliser avec les douze Vassaux Bestiales du quatrième Primogéniteur ? » demanda Sayaka.

Elle fit à Kojou un regard d’attente tel qu’il hésitait à répondre, comme s’il était intimidé par elle.

« Non, je n’ai qu’un seul Vassal Bestial qui m’écoutera correctement en ce moment. Ce Vassal m’a finalement reconnu comme son maître quand j’ai sucé le sang d’Himeragi il y a quelque temps, » déclara Kojou.

« Quoi… !? » s’exclama Sayaka.

La force était montée en flèche dans la main gauche qui tenait l’épée de Sayaka.

« Vous voulez dire que c’est ça que le Duc Ardeal voulait dire quand il a parlé de médium spirituel… ! !? Yukina vous a laissé sucer son sang pour que le Vassal Bestial ne devienne pas fou ? Alors quel était le Vassal Bestial que vous avez utilisé sur le toit là-bas… ? » demanda Sayaka.

« Je ne l’ai pas utilisé. L’un d’eux a essayé de sortir de sa propre volonté, » déclara Kojou.

« De sa propre volonté… ? » répéta Sayaka.

Déprimée, Sayaka avait titubé comme si elle avait un vertige.

Finalement, comme si elle décidait de quelque chose, elle plissa ses beaux sourcils et fixa du regard les policiers qui bloquaient son chemin.

« Je comprends très bien que je ne peux pas compter sur vous. Je vais devoir le faire moi-même…, » déclara Sayaka.

« Attendez, attendez ! Qu’est-ce que vous croyez faire !? » demanda Kojou.

Kojou s’était précipité pour bloquer le chemin de Sayaka alors qu’une expression sanguinaire lui tombait sur le visage.

« C’est bon, je ne vais pas être maladroite et laisser des preuves, » déclara Sayaka.

« Je ne parle pas de ça ! Ah, merde. L’important, c’est qu’il faut qu’on arrive au sous-flotteur là-bas, d’accord ? » demanda Kojou.

« … Qu’avez-vous l’intention de faire ? » demanda Sayaka.

Tandis que Kojou reformulait la situation, Sayaka lui lança un regard inquiet.

Kojou posa l’étui à guitare contenant la lance sur son dos et encercla rapidement le flanc de Sayaka.

« Désolé, ne bougez pas, OK ? » déclara Kojou.

« Hein ? Qu’est-ce que… yaah !? » s’écria Sayaka.

Tout le corps de Sayaka s’était pratiquement figé sous le choc d’avoir été soulevée comme une jeune mariée dans les bras de son mari.

Pendant ce temps, Kojou s’était mordu la lèvre. Il avait utilisé le goût du sang qui tourbillonnait dans sa bouche comme déclencheur pour libérer sa force vampirique. Tout en serrant Sayaka dans ses bras, il avait couru vers le sous-flotteur.

La seule chose que la police avait bouclée, c’était le pont reliant le sous-flotteur à l’île. En d’autres termes, ils pouvaient passer de n’importe où, tant qu’ils n’utilisaient pas le pont.

La distance entre elle et l’Île d’Itogami proprement dite était d’environ huit mètres. Même un être humain normal pourrait sauter cette distance avec un départ en courant… s’il était un athlète olympique d’athlétisme.

Avec l’aide de la force d’un vampire, il aurait dû être capable de transporter même quelques bagages supplémentaires… du moins le pensait-il.

« … Wôw !? Hein, c’était plus près que je ne le pensais, » déclara Kojou.

Atterrissant juste au-dessus du bord de la falaise du sous-flotteur, Kojou avait fait une expiration éreintante. Un pas de moins et tout faux pas les auraient mis en danger de tomber à l’eau.

Peut-être était-il en effet produit par la difficulté de faire un tel saut en portant une autre personne, même avec la force d’un vampire. Ou peut-être que Sayaka était plus lourde qu’elle n’en avait l’air… Alors que Kojou avait eu cette pensée impolie…

« Qu’est-ce... Qu’est-ce que vous croyez faire !? » s’écria Sayaka.

Sayaka se déchaîna soudain dans les bras de Kojou.

« On a traversé, n’est-ce pas ? Je n’ai pas eu non plus à blesser de policiers…, » déclara Kojou.

« Ça ne compte pas ! Ça ne compte pas, vous m’entendez !? » s’écria Sayaka.

Sayaka frappa Kojou à la tête en disant des mots apparemment dénués de sens. Les coups de poing étaient beaucoup plus timides que ce que l’on pourrait attendre d’un Mage d’Attaque anti-démon.

« Qu’est-ce que vous racontez ? Et ne bougez pas comme ça, on va tomber dans l’océan ! » déclara Kojou.

« Taisez-vous, taisez-vous ! Brûlez en cendres ! » cria Sayaka.

« Aïe !? Hé, vous, arrêtez avec l’épée, ce n’est pas drôle ! » déclara Kojou.

Pour une raison quelconque, Sayaka avait les larmes aux yeux quand elle avait balancé son épée. Kojou l’avait instantanément esquivée, mais il était tombé, alors que Sayaka était encore dans ses bras, et il avait fini par la plaquer au sol.

Sayaka n’ayant pas encore cessé ses attaques, Kojou avait réussi à coincer les deux bras.

« … Qu’est-ce que vous faites tous les deux ? »

Soudain, une masse de volants apparut soudain sous les yeux de Kojou et Sayaka, semblant sortir de nulle part.

Elle avait un parasol cher et une robe noire trop ornée, Kojou ne connaissait qu’une seule personne qui porterait une telle tenue au milieu de l’été interminable de l’île Itogami.

« Natsuki ? N’étais-tu pas en train de t’attaquer aux terroristes ? » demanda Kojou.

« Je dois laisser les gardes de l’île obtenir la gloire de temps en temps. Il semble que l’équipe d’assaut a les survivants du Front de l’Empereur de la Mort Noire sur ses talons, donc ils n’ont pas besoin d’aide, » répliqua Natsuki en regardant attentivement la poursuite de la fusillade dans la tour. Le Front de l’Empereur de la Mort Noire s’y cachait donc, comme Kojou et Sayaka l’avaient déduit.

« Alors, pourquoi cette bouche m’appelle Natsuki ? » demanda Natsuki.

« Ow, ow, ow, ow, arrête ça…, » cria Kojou.

 

 

Natsuki avait tordu la joue de Kojou qui ne résistait pas beaucoup. Les bras de Kojou n’étaient pas disponibles, occupés, car ils gardaient Sayaka coincée.

« Ce n’est pas le moment pour ça… Himeragi et les autres ont été kidnappées et pourraient être des otages —, » cria Kojou.

Malgré cela, Kojou avait parlé d’un ton désespéré, comme pour exprimer la gravité de la situation.

C’est le moment suivant que les bruits féroces des coups de feu cessèrent brusquement.

Kojou et les autres levèrent la tête devant l’étrange silence qui s’était soudainement installé.

Rugissssementttttt —

Un grand rugissement, tel celui d’une bombe qui explosait, avait retenti aux oreilles des gens qui s’y trouvaient.

Alors que le rugissement résonnait dans les airs au-dessus du sous-flotteur, le sol tremblait violemment, comme lors d’un tremblement de terre.

Le point d’origine du bruit rugissant était la tour dans laquelle le Front de l’Empereur de la Mort Noire s’était retranché. La tour à ossature d’acier était enveloppée de flammes, le personnel de la garde de l’île entourant la tour avait baissé la tête pour éviter les débris volants.

« C’était cette explosion !? Ça vient de l’assaut des gardes de l’île, aussi ? » demanda Kojou.

La tour recouverte de flammes continuait de se briser. Kojou était sous le choc alors qu’il regardait cette vue apparemment irréelle.

Natsuki continua à tenir la joue tordue de Kojou en secouant la tête.

« Non… suicide, peut-être ? » demanda Natsuki.

« Suicide… ? » demanda Kojou.

Un groupe de terroristes d’hommes bêtes semblait avoir échappé à la tour enveloppée de fumée. Mais beaucoup d’entre eux avaient été pris dans l’effondrement de la tour. S’ils étaient responsables de l’explosion, cette situation ne ressemblait certainement à rien d’autre qu’un suicide, mais…

« C’est quoi… cette présence… !? » demanda Sayaka.

Sayaka repoussa Kojou et sauta sur ses pieds.

Elle regardait la base de la tour détruite. Il y avait quelque chose de gigantesque qui sortait de l’énorme tas de débris qui tombait un peu partout.

Une énergie magique titanesque jaillissait des profondeurs de la terre. L’Aura était très dense, étrangement artificielle et étrangement tordue.

« Hmm, je n’en suis pas vraiment sûr, mais ça pourrait être… mauvais ? » demanda Kojou.

Kojou et les autres, submergés par la vue bizarre, entendirent un rire sarcastique derrière eux.

Alors que Kojou se retournait, il vit un beau jeune homme blond vêtu d’un costume trois-pièces blanc…

« Vattler !? Pourquoi êtes-vous là aussi !? » demanda Kojou.

« Qu’est-ce que vous faites ici !? » demanda Sayaka.

En voyant Dimitrie Vattler, Kojou et Sayaka avaient fait entendre leur voix simultanément.

Natsuki plissa également les sourcils avec déplaisir.

« Que veux-tu, Maître des Serpents ? » demanda Natsuki.

« Bon sang, laissons la longue discussion pour plus tard. Vous devriez peut-être demander à votre unité de se retirer d’abord. En tout cas, Gardos n’est pas là. Le groupe resté ici est un leurre simple, » déclara Vattler.

Tandis que Vattler retirait ses lunettes de soleil légèrement entrouvertes, ses beaux yeux bleus se rétrécissaient de façon taquine.

Le beau visage de chérubin de Natsuki s’était tordu quand elle l’avait regardé fixement.

« Leurre ? Qu’est-ce qu’ils gagnent à rassembler la garde de l’île dans un endroit comme celui-ci ? » demanda Natsuki.

« Bien sûr, c’est nécessaire pour leur objectif, un test de leur arme nouvellement obtenue. N’avez-vous pas oublié ce que le Front de l’Empereur de la Mort Noire a apporté sur cette île ? » demanda Vattler.

« … L’arme !? » s’écria Natsuki.

À cet instant, une expression glaciale vint sur Natsuki.

Les doutes qui tourbillonnaient dans l’esprit de Kojou étaient soudain apparus avec acuité.

Une impasse sans espoir de victoire, un hélicoptère abattu, comme ça — peut-être que l’objectif du Front de l’Empereur de la Mort Noire était d’attirer les membres de la force mécanisée de la Garde insulaire pour qu’ils soient détruits.

Ce qui signifie que ce qui était caché dans la cavité creuse sous le sous-flotteur était…

« — Le Nalakuvera !? » demanda Kojou.

Comme pour répondre à l’appel de Kojou, une silhouette géante avait franchi les débris en y émergeant.

Puis Kojou vit un rayon cramoisi de lumière balayant le sol. Le rayon avait déchiré les camions blindés avec facilité, comme s’ils étaient faits de papier fragile. Ils explosèrent de flammes féroces, des morceaux se dispersant dans toutes les directions.

***

Partie 6

Kristof Gardos avait observé l’explosion en temps réel via un flux en direct sur le réseau. Il s’était tourné vers le microphone d’une radio militaire et s’était enquis d’une voix pleine de satisfaction.

« Rapport de situation, Grigore, » demanda Gardos.

« Ici Grigore. Bingo, lieutenant-colonel. Le cobaye est en mouvement, » son subordonné, monté à bord du Nalakuvera, cria d’un ton de voix teinté d’excitation.

Appelée arme des dieux, la vraie nature du Nalakuvera était une bête sensible et mécanique.

Une fois activé, il agirait selon son propre jugement pour attaquer de façon autonome et anéantir tous ceux qui s’y opposaient.

Un contrôleur pouvait lui donner des ordres, mais le contrôleur du Nalakuvera devait utiliser des codes de commande vocaux spéciaux pour ce faire. Seuls ceux qui pouvaient déchiffrer les paroles des dieux pouvaient faire obéir l’arme des dieux.

« Pouvez-vous continuer le combat ? » demanda Gardos.

« C’est un jeu d’enfant. Tout ce que je fais, c’est m’asseoir et regarder. Je ne sais pas combien de temps l’île tiendra le coup, » déclara l’autre.

Une fois qu’il lui avait parlé, Grigore avait fait un rire féroce.

De toute façon, le seul code de commande qu’ils possédaient était « Le Premier Mot » qu’Asagi avait déchiffré. Avec le Nalakuvera en mouvement, aucun mortel ne pouvait l’arrêter.

« Bien reçu, Grigore, » déclara Gardos.

Gardos coupa la transmission et se tourna lentement dans la direction d’Asagi.

Asagi avait un regard apparemment tranquille présent sur son visage alors qu’elle regardait l’image affichée sur sa tablette PC.

Chaque fois que le Nalakuvera libérait son faisceau, l’explosion géante qui en résultait secouait le sous-flotteur. Des camions blindés brûlaient. Les gardes de l’île couraient pour sauver leur vie. Cette tragédie était le résultat du code de commande qu’Asagi avait analysé. Ce fait l’avait sûrement profondément touchée.

« … Alors, c’est aussi. Vous avez encore des questions ? » demanda Gardos en regardant l’Asagi sans expression et les autres.

Tandis qu’Asagi gardait le silence, Yukina demanda à sa place.

« Pourquoi ? » demanda Yukina.

« … Pourquoi ? » demanda Gardos.

« Qu’est-ce que vous faites ici ? » demanda Yukina.

« Je crois que j’ai déjà expliqué nos objectifs, non ? » demanda Gardos.

« Non, ce n’est pas ce que je veux dire, mais pourquoi le duc d’Ardeal coopère-t-il avec vous ? » demanda Yukina.

Gardos plissa un peu les sourcils. Ses yeux gris avaient enregistré une légère surprise.

« Je vois. Je ne vous ai pas reconnu à cause de la tenue différente, mais c’est vous qui accompagniez le quatrième Primogéniteur ce soir-là, » déclara Gardos.

« C’était dans l’Oceanus Grave, n’est-ce pas ? » demanda Yukina.

Yukina poussa un léger soupir en hochant la tête.

Yukina, elle aussi, avait tardé à s’en rendre compte : le grand vieillard au front marqué d’une cicatrice, le regard d’une intelligence qui ne correspondait pas à la sensation macabre et oppressante, l’intendant de Vattler, servant de serveur la nuit où Vattler avait invité Kojou…

L’homme qu’ils cherchaient était sous leur nez depuis le début.

« Donc la raison pour laquelle les individus de la Garde de l’île n’ont pas pu trouver la cachette du Front de l’Empereur de la Mort Noire était qu’elle était à l’intérieur d’un vaisseau protégé par l’immunité diplomatique… n’est-ce pas ? » demanda Yukina.

« Il ne semble pas y avoir de raison de le cacher maintenant, » déclara Gardos.

Gardos avait fait un murmure brusque, ordonnant apparemment à ses hommes d’ouvrir les fenêtres.

Ils avaient ouvert les fenêtres scellées par des volets… révélant la vaste surface de l’océan, scintillant sous le soleil. Ils avaient vu la silhouette artificielle de l’Île d’Itogami flotter à l’horizon.

Yukina et les autres devaient être à une dizaine de kilomètres de la côte.

« À l’intérieur… d’un navire…, » Asagi éleva faiblement la voix, rétrécissant les yeux devant les rayons éblouissants du soleil.

« C’est le croiseur personnel du Duc Ardeal de l’Empire du Seigneur de Guerre, » expliqua Gardos en passant. La visite d’un noble de l’Empire du Seigneur de Guerre avait même été retransmise au grand public. Comme le beau Vattler était un sujet brûlant dans les talk-shows, même vous, Asagi devait avoir entendu parler de lui.

« Alors, pourquoi ? » demanda Yukina.

Yukina avait encore posé la même question.

« Le Front de l’Empereur de la Mort Noire est une organisation suprémaciste d’hommes bêtes. Vous et le duc Ardeal, un noble de l’empire du Seigneur de Guerre, devriez être ennemis, d’autant plus qu’il était le cerveau derrière l’assassinat de votre chef, l’Empereur de la Mort Noire…, » déclara Yukina.

« Oui. C’est pourquoi même les forces de sécurité du Sanctuaire des Démons n’ont jamais soupçonné ce navire, » déclara Gardos.

Gardos était sans expression, l’énonçant sans aucun sens particulier de triomphe.

« Environ la moitié de l’équipage de ce vaisseau est des survivants du Front de l’Empereur de la Mort Noire. Mais les apparences mises à part, Vattler est de la noblesse. Il n’a jamais pris la peine d’examiner les antécédents des membres d’équipage de son propre navire. Il laisse cette responsabilité à la société de gestion de l’équipage du navire, en d’autres termes…, » déclara Gardos.

Yukina fronça les sourcils de mécontentement.

« Vous affirmez que le duc Ardeal savait tout ça. Quel est l’intérêt de tout cela pour lui ? » demanda Yukina.

« Bien que je ne daigne pas connaître la pensée d’un vampire invétéré, j’imagine que c’est probablement l’ennui, » déclara Gardos.

« … L’ennui ? » demanda Yukina.

« Oui. C’est pourquoi il souhaite combattre le Nalakuvera, l’arme des dieux qui pourrait vaincre même un Primogéniteur : un splendide compagnon de jeu pour un vampire qui a trop de temps libre. Si le quatrième Primogéniteur se bat d’abord contre le Nalakuvera, il pourra profiter de la vue. Dans un tel cas, il s’avérera qu’il ne s’ennuiera certainement pas, » déclara Gardos.

« C’est…, » commença Yukina.

Yukina avait ressenti une vague de confusion et de colère face au processus de pensée déviante de Vattler. Pour un soulagement temporaire de l’ennui, il irait jusqu’à utiliser et abriter des terroristes qui en avaient après sa propre vie. Ce n’était pas la conduite d’un homme sain d’esprit.

Comme si elle était d’accord avec les pensées de Yukina, une expression de dégoût était apparue sur le visage de Gardos.

« Nous n’avons pas de si mauvais goût. Mais le Front de l’Empereur de la Mort Noire a besoin du pouvoir de vaincre un Primogéniteur de toute façon. Vattler, considéré comme l’homme le plus proche d’un Primogéniteur en puissance, est un excellent adversaire pour tester la puissance du Nalakuvera. Nous voulons tous les deux que cette bataille ait lieu, dans ce cas-ci, nos intérêts coïncident complètement, » déclara Gardos.

« … Vous avez ressuscité ce monstre pour une raison aussi futile ? Toute l’Île d’Itogami pourrait être détruite… ! » s’écria Yukina.

« Si des dizaines de milliers d’humains qui ont construit cette cage qu’ils appellent un “sanctuaire des démons” et leurs animaux domestiques apprivoisés et nourris à la main sont tués, nous ne nous sentirons pas du tout coupable, » Gardos parlait sur un ton dépourvu d’émotion.

« Bien sûr, nous ne voulons pas d’un massacre insignifiant. Notre objectif premier est la destruction de notre cible, Vattler. Nous minimiserons autant que possible les dommages causés à la ville… si nous pouvons contrôler complètement le Nalakuvera, bien sûr, » déclara Gardos. « Si vous ne voulez pas que l’Île d’Itogami se transforme en cendre, donnez-moi les codes de commande déchiffrés. »

Après avoir gardé le silence tout ce temps, Asagi avait jeté un regard venimeux sur Gardos.

Les coins des lèvres de Gardos s’étaient plissés en un sourire.

Le Nalakuvera avait déjà été activé. La seule façon d’arrêter la destruction aveugle était pour Asagi de déchiffrer les codes de commandement, sachant pertinemment que le Front de l’Empereur de la Mort Noire pourrait utiliser le Nalakuvera comme il le souhaitait avec des conséquences directes.

« C’est très bas. Vous êtes vraiment un terroriste, » déclara Asagi.

« Le Souverän Nine est à l’intérieur. Toutes les données nécessaires ont été mises à votre disposition, il dispose d’un accès réseau complet, alors utilisez-le comme vous le souhaitez, » déclara Gardos.

« Je n’ai pas le choix. Très bien, alors. Mais ça va vous coûter cher, » déclara Asagi.

Sans prêter la moindre attention au langage abusif d’Asagi, Gardos était sorti de la pièce, emmenant ses hommes.

Finalement, il se retourna un instant vers Asagi.

« Ce n’est pas que je doute de vos compétences, mais vous devriez vous dépêcher autant que possible. Ce ne sera pas pratique pour nous deux si l’île coule avant qu’on ait ces codes de commande, » déclara Gardos.

« Je fais ça pour moi, pas pour vous… ! » Alors qu’Asagi criait, emplie de dégoût, elle avait violemment frappé la porte intérieure de la pièce.

C’était une chambre froide pour la conservation du poisson frais. Cependant, la salle spartiate ne contenait ni poisson ni viande fraîche, mais plutôt des serveurs de calcul haute performance placé dans un montage en baie — en d’autres termes, un supercalculateur. Avec un abandon sauvage, Asagi avait pris d’assaut la pièce refroidie à l’air pour éviter que les circuits ne soient trop chauds. À ce moment, une voix lui vint d’une direction inattendue.

« … Ne soyez pas impatiente, jeune femme. » Une voix claire et fraîche avait jailli des lèvres de Nagisa, qui aurait dû dormir profondément.

Asagi se retourna, attirée par la réverbération étrange de la voix.

Les cheveux attachés de Nagisa étaient maintenant lâches, coulant presque jusqu’à ses hanches. Ses yeux, avec ses iris grands ouverts, ne projetaient aucune émotion, comme la surface d’une mare d’eau calme. Ses lèvres formaient un sourire toutes seules.

« Ne laissez pas votre esprit être troublé. Avec les capacités de cet engin, il ne vous faudra pas beaucoup de temps pour déchiffrer un document d’une civilisation morte depuis longtemps, » déclara Nagisa.

« Nagisa, c’est toi… ? » demanda Asagi.

Déconcertée, Asagi s’adressa à Nagisa, qui donnait l’impression d’être une personne complètement différente de ce qu’elle était habituellement.

Yukina secoua la tête avec un regard de surprise.

« Non, ce n’est pas… Cette condition est… la possession divine ? Ou un esprit… ? » demanda Yukina.

« Ho-hoho, je vois. Vous êtes donc vous aussi une jeune fille de sanctuaire, Chamane Épéiste du Roi Lion, » déclara Nagisa.

Nagisa avait fait un sourire de plaisir apparent pendant qu’elle parlait. Profondément perturbée, Yukina la regarda fixement, comme si elle essayait d’évaluer la situation.

« Alors, vous devez aussi le comprendre. Même si vous ne vous en souciez pas, ce garçon vous fera gagner du temps — du temps pour que cette jeune femme puisse aller de l’avant avec son plan, » déclara Nagisa.

« Qui… êtes-vous… !? » Yukina avait brusquement plissé ses yeux quand elle avait demandé cela en réponse. Cependant, Nagisa n’avait répondu d’aucune façon. Sans un mot de plus, ses paupières se fermèrent doucement, s’effondrant comme une marionnette dont les cordes avaient été coupées.

« Qu’est-ce que c’était ? Qui était-ce ? » demanda Asagi.

Yukina n’avait rien dit et avait secoué la tête face aux questions d’Asagi.

Même Yukina n’avait pas pu expliquer le comportement anormal de Nagisa. Elle avait clairement été témoin de quelque chose de plus grand qu’un être humain prenant le contrôle de la fille. Peut-être qu’il s’agissait d’une possession divine, qui aurait pu aussi être une personnalité latente enfouie au plus profond de la psyché de Nagisa. Peut-être que cela avait quelque chose à voir avec les blessures qu’elle avait subies et qui n’avaient jamais été indiquées dans le rapport de l’Organisation du Roi Lion… mais en tout cas, ce n’était ni le moment ni le lieu pour s’en occuper.

Yukina s’était giflée et s’était relevée, comme si elle forçait ses émotions à changer de vitesse.

« Aiba. Puis-je emprunter votre portable ? » demanda Yukina.

« Bien sûr, mais qu’est-ce que vous préparez ? » demanda Asagi.

Asagi avait donné son smartphone rose clair à Yukina. Elle aurait pu recevoir un signal cellulaire maintenant que le vaisseau s’approchait de l’Île d’Itogami.

« Désolée. J’ai eu une mauvaise prémonition, donc je suis un peu mal à l’aise…, » déclara Yukina.

Ralentie parce qu’elle utilisait un téléphone cellulaire qu’elle ne connaissait pas, Yukina avait composé un numéro de téléphone qu’elle avait mémorisé.

La mystérieuse personnalité qui avait possédé Nagisa lui avait rafraîchi la mémoire.

Oui, Kojou Akatsuki essayait probablement d’arrêter l’attaque du Nalakuvera.

Même s’il ne souhaitait pas personnellement qu’il en soit ainsi, étant lui-même, il était fort probable qu’il s’y embarquerait de toute façon.

Sans que Kojou s’en rende compte, le pouvoir trop écrasant du quatrième Primogéniteur avait déformé le destin, l’entraînant sur le champ de bataille. L’adolescent était vraiment un aimant à problèmes, on ne pouvait pas le quitter des yeux une seconde.

Mais c’était probablement la raison pour laquelle il protégerait cette ville.

Cependant, cette certitude avait rendu Yukina d’autant plus mal à l’aise. Le Nalakuvera était une arme ramenée à la vie pour combattre les Primogéniteurs. Seul, en vue de comment était maintenant son pouvoir, Kojou pourrait ne pas être capable de vaincre l’arme ancienne.

Il avait besoin de puissance. C’était une situation à laquelle Yukina n’avait pas voulu penser, mais il y avait quelque chose qu’elle devait dire à Kojou Akatsuki avant qu’une situation vraiment pire se présente.

« On pourrait penser que Sayaka serait la dernière personne à s’emmêler avec Senpai, mais…, » déclara Yukina.

Pendant que Yukina murmurait, elle avait mis le téléphone portable à son oreille. Alors que l’appel se connectait, elle entendit la voix de Kojou.

***

Partie 7

En regardant les rayons cramoisis se disperser, Vattler avait fait des acclamations. Il avait l’air de vraiment s’amuser.

« C’est donc ça, la “lance crachant des flammes” du Nalakuvera ? Eh bien, c’est assez puissant, n’est-ce pas ? » déclara Vattler.

Déprimé à la vue de Vattler, Kojou avait donné un coup de pied au sol dans la frustration.

« Ah, merde. Qu’est-ce que vous foutez là ? Et votre précieux vaisseau ? » demanda Kojou.

« Ahh, ça. En fait, le navire Oceanus Grave a été détourné, » Vattler l’avait dit d’un ton distant.

La bouche de Kojou s’était ouverte en grand. « Détourné !? »

« Oui, oui. Alors, je suis venu ici en fuyant pour ma vie, vous voyez, » déclara Vattler.

Menteur ! cria Kojou à l’intérieur de sa tête. Comme si de simples terroristes pouvaient lui détourner un navire.

Si c’était vrai, il n’y avait qu’une seule possibilité : Vattler avait remis avec joie son navire au Front de l’Empereur de la Mort Noire de son plein gré.

« Je comprends maintenant. Gardos et ses hommes ont été amenés sur l’Île d’Itogami sur votre vaisseau…, » déclara Natsuki.

Natsuki poussa un éventail pliant noir vers Vattler comme s’il portait un couteau.

Un faux regard de mélancolie était apparu sur son visage.

« Eh bien, pour vous le dire franchement, j’ai été assez surpris. Dire que des terroristes ont été mêlés à l’équipage de mon propre navire…, » déclara Vattler.

« Donc vous avez l’intention de jouer la pauvre victime ? Vous êtes ce genre d’homme depuis longtemps, » Natsuki expira très profondément, abandonnant l’idée d’aller plus loin.

« C’est vraiment très embarrassant, » déclara Vattler en riant. « Ah, pour vous l’avouer, j’ai ramassé ça en chemin alors que je fuyais. »

Comme de vieux chiffons, il fit un petit lancer, jetant quelque chose à ses pieds.

Un étudiant portant l’uniforme de lycéen avait fait un bruit mouillé en roulant. Il avait l’air de s’être noyé dans l’océan, son visage ne pouvait être identifié à cause des algues qui recouvraient tout son corps.

Mais Kojou avait reconnu les cheveux courts et pointus et les écouteurs autour de son cou.

« Y-Yaze !? » s’écria Kojou.

« Ah, est-ce que ça pourrait être l’une de vos connaissances ? » demanda Vattler.

Vattler avait souri avec un plaisir apparent en regardant la réaction choquée de Kojou.

Yaze était inconscient, mais il ne semblait pas en danger de mort. En raison de sa perte de conscience avant de tomber dans l’océan, il ne semblait pas avoir avalé d’eau de mer.

Qu’est-ce qu’il faisait ? se demanda Kojou, fatigué en secouant la tête.

« Eh bien, vous pouvez dormir tranquille. J’en prendrai la responsabilité et détruirai le Nalakuvera. » Vattler en avait profité pour faire une déclaration d’une voix vive.

« Reposez-vous bien, mon cul ! Vous vouliez vous battre contre cette chose depuis le début, n’est-ce pas !? » Kojou avait rugi en réalisant ce que Vattler mijotait.

C’est un peu plus tard que le téléphone cellulaire de Kojou avait sonné en réponse à un appel entrant.

« Ah, merde. Qui est-ce à un moment comme celui-ci —, » déclara Kojou.

Pendant tout ce temps, Kojou s’était plaint et il avait sorti son téléphone portable, retenant son souffle quand il avait vu l’identification de l’appelant affichée.

« Asagi !? » s’écria Kojou.

« … C’est moi, Senpai, » déclara une autre voix.

Après que Kojou ait crié avec force, son oreille avait détecté un soupir insatisfait de Yukina.

« Eh !? Himeragi ? » demanda Kojou.

Un assaut soudain et inattendu avait déséquilibré Kojou.

« Yukina, tu vas bien !? Où es-tu maintenant !? » demanda Sayaka.

Sayaka appuya son visage contre l’oreille de Kojou pendant qu’elle criait.

Comme on pouvait s’y attendre, elle avait rapidement agi en ce qui concerne Yukina. D’un autre côté, elle n’avait apparemment pas remarqué qu’elle se trouvait dans une position extrêmement intime en étant ainsi contre Kojou. Les respirations de Sayaka lui chatouillaient la joue.

« Je vais bien, » répondit Yukina d’un ton habituel, trop sérieux. « En ce moment, nous sommes dans l’Oceanus Grave. À l’heure actuelle, ni Aiba ni Nagisa n’ont été lésées. »

« Je vois. Pour l’instant, c’est beaucoup plus sûr là-bas qu’ici avec nous, » déclara Kojou.

Kojou était tellement soulagé que cela l’avait épuisé, et il avait laissé échapper ses pensées, son autodérision et tout.

« Vous êtes donc bien près du Nalakuvera, » déclara Yukina.

« O-Ouais, » déclara Kojou.

« Fourrer votre nez dans un autre endroit dangereux tout seul… vous devriez vraiment réaliser à quel point vous êtes une personne dangereuse, Senpai. S’est-il passé quelque chose entre Sayaka et vous ? » demanda Yukina.

« Peu importe, on ne pensait pas qu’ils sortiraient ce truc…, » déclara Kojou.

« Nous avons appris que toi et les autres aviez été kidnappées, et j’étais inquiète…, » déclara Sayaka.

Grondés par la malheureuse Yukina, Kojou et Sayaka avaient continué à trouver des excuses douloureuses.

Mais Yukina les avait coupés à mi-chemin.

« Mais c’est bien que vous l’ayez fait. Senpai, ralentissez le Nalakuvera pour qu’il ne s’approche pas de la ville elle-même, » déclara Yukina.

« … Le ralentir ? » demanda Kojou.

« Oui. En ce moment, Aiba est en train de déchiffrer les codes de commande du Nalakuvera. Quand elle aura fini, le déchaînement indiscriminé actuel pourra être arrêté, vois-tu, » déclara Yukina.

« Asagi… Je vois, c’est donc ça…, » déclara Kojou en faisant un signe de la tête solennel.

Il ne connaissait pas les détails, mais il avait une assez bonne idée de la situation dans laquelle se trouvaient Yukina et les autres.

Comme Kojou s’y attendait, le Front de l’Empereur de la Mort Noire utilisait Asagi pour déchiffrer les codes de commande de l’arme ancienne. Asagi cherchait les ordres pour arrêter les ravages, en d’autres termes, les terroristes ne pouvaient pas non plus contrôler le Nalakuvera.

« … Ralentir, c’est suffisant. S’il te plaît, n’essaye pas trop fort de le détruire et d’augmenter encore la dévastation. Maintenant, Sayaka…, » déclara Yukina.

« Quoi ? Si je peux faire quelque chose, dis-le-moi ! » déclara Sayaka.

Alors que Yukina l’appelait par son prénom, la voix de Sayaka s’était échappée en gardant son oreille pressée sur le téléphone.

Mais Yukina l’avait balayée d’une voix froide.

« Recule un peu, s’il te plaît. Je veux parler seul avec Akatsuki-senpai, » déclara Yukina.

« Hein ? Ehh !? » s’écria Sayaka.

Comme si elle était sur le point de verser des larmes, Sayaka s’était retournée en arrière, s’accroupissant et s’étreignant les genoux. À ce moment-là, Kojou avait ressenti de la sympathie pour elle alors qu’il secouait la tête face à cette vue.

« … Parler de quoi, Himeragi ? » demanda Kojou.

« Nous n’avons pas le temps, alors je serai brève, » déclara-t-elle.

Yukina s’éclaircit la gorge de façon audible. Elle avait recommencé, posant sa question d’un ton urgent.

« Senpai, pensez-vous qu’un second Vassal Bestial pourrait être nécessaire ? » demanda Yukina.

« Un second Vassal Bestial ? » Kojou avait dégluti à la question de Yukina qui allait droit au but.

Apprivoiser un Vassal Bestial exigeait du sang, tout comme lorsque Kojou avait sucé le sang de Yukina pour mettre Regulus Aurum sous son contrôle — du sang d’une qualité suffisante pour satisfaire les Vassaux Bestiales du quatrième Primogéniteur.

La voix de Kojou s’était mise à s’écrier quand il avait imaginé ce qu’il faudrait pour l’obtenir.

« N-Non, je ne pense pas. Je n’y ai pas pensé un seul instant ! » déclara Kojou.

« Je vois. Si c’est le cas, tant mieux, mais en fait…, » déclara Yukina.

Yukina avait poursuivi, « À propos de Sayaka », en baissant la voix en un chuchotement.

« … Eh !? » s’écria Kojou.

Quand Kojou avait fini d’écouter Yukina, il s’était mordu la lèvre en silence pendant un moment. Le fait que de brèves informations fragmentaires avaient fait taire Kojou de la sorte signifiait que c’était bien au-delà de ses attentes.

Le dos encore courbé, Sayaka leva les yeux vers Kojou en silence, avec du ressentiment dans ses yeux.

Kojou, ayant retrouvé son sang-froid, secoua la tête comme s’il sortait d’un grand nombre de toiles d’araignée.

« Compris. Laisse-moi m’en occuper. Je vais le ralentir d’une façon ou d’une autre, » déclara Kojou.

« Compris. Fais attention, Senpai, » déclara Yukina.

Après ça, l’appel avait pris fin. Kojou avait regardé vers la tour détruite en plaçant le téléphone dans une poche.

Le Nalakuvera, toujours enseveli sous les décombres, ne bougeait pas. Il avait sans aucun doute détruit le peloton mécanisé de la Garde de l’île pour éliminer la menace la plus pressante qui se présentait à lui.

Mais cela ne signifiait en aucun cas que la crise était passée.

Quelque chose tel un globe oculaire sur la tête du Nalakuvera continuait sans cesse à balayer la zone. Il recueillait des informations sur les cibles qu’il devait éliminer. À la moindre provocation, le Nalakuvera reprendrait le combat, il ne fait aucun doute que cette fois-ci, l’Île d’Itogami sera mise à feu.

« Comment se passe la retraite des gardes de l’île ? » demanda Kojou.

Vattler répondit en douceur à la question de Kojou. « Ils ont réussi à sortir du sous-flotteur. Le nombre de victimes est inférieur à ce à quoi je m’attendais. »

Pourquoi réponds-tu à ça ? pensa Kojou en le regardant fixement. S’il observait toute la région, il savait sûrement exactement quand le combat recommencerait. Mais…

« Compris. Alors, je m’en occupe. Les filles capturées sont entre vos mains, Natsuki, » déclara Kojou.

Sans demander l’avis de personne, Kojou l’avait déclaré.

Natsuki avait tordu son élégant parasol, fixant Kojou d’un regard aigre. Peut-être qu’elle était en colère contre sa déclaration arbitraire, ou peut-être qu’elle n’aimait tout simplement pas la façon dont Kojou utilisait avec désinvolture son prénom. Mais, pour une fois, elle ne s’était pas plainte du tout. Cela avait dû vouloir dire qu’elle était provisoirement d’accord.

« Ne pensez-vous pas que voler la proie de quelqu’un d’autre est mal élevé, Kojou Akatsuki ? » demanda Vattler.

Pour sa part, Vattler avait fait cette légère objection. Cependant, Kojou ne mordrait pas à l’hameçon.

« Si vous parlez de manières, venir sur le territoire d’un autre et faire ce que vous voulez, c’est plutôt vous qui êtes malpoli. Restez en dehors de ça jusqu’à ce que cela soit fini, Dimitrie Vattler, » déclara Kojou.

Le jeune noble acquiesça et l’accepta étonnamment facilement. Alors…

« Alors, je vous donnerai, souverain de ce pays, un cadeau pour faire preuve de respect, afin que vous puissiez vous battre sans hésitation… Manashi ! Uhatsura! » déclara Vattler.

« Quoi — !? » s’écria Kojou.

Kojou avait été à court de mots alors que Vattler libérait une vague d’une énorme énergie magique.

Deux serpents de plus de dix mètres de long apparurent derrière le dos du jeune aristocrate. Le premier était un serpent noir qui ressemblait à une mer déchaînée, l’autre était un serpent bleu, comme la surface d’une piscine gelée et devenue totalement solide. C’était les Vassaux Bestiales de Vattler, le maître des serpents. De plus, il en utilisait deux simultanément. Les deux serpents s’étaient entrelacés dans les airs, changeant de forme pour devenir un seul dragon géant.

« Fusionner deux Vassaux Bestiales !? C’est donc la capacité spéciale de Vattler… ! » Kojou parla d’une voix dure à la vue du Vassal Bestial, qui ressemblait à une trombe d’eau enragée.

Yukina l’avait dit une fois. Pour que Vattler, un noble d’une jeune génération, ait vaincu un magicien de rang supérieur, il devait posséder une sorte de pouvoir spécial.

C’était probablement la clé pour percer ce secret. Kojou n’avait jamais entendu parler de l’existence d’un vampire capable de fusionner deux Vassaux Bestiales en un seul, plus puissant Vassal Bestial.

Mais la vérité était que la bête fusionnée que Vattler avait invoquée dégageait une énergie magique comparable à celle du Regulus Aurum de Kojou. Cela constituait une preuve suffisante que Vattler possédait vraiment un pouvoir proche de celui d’un Primogéniteur.

« Eh bien, je crois que c’est mieux comme ça, » Vattler fit un murmure satisfait alors que son dragon outremer enragé descendait.

Il avait ensuite détruit toutes les ancres reliant le sous-flotteur no 13 à l’île Itogami proprement dite. Ces ancres, faites de blocs de béton et de fils métalliques pesant plusieurs centaines de tonnes chacune, avaient été brisées en petits morceaux comme du verre et, à la suite de ces explosions, le sous-flotteur avait lentement commencé à flotter librement au-dessus de l’océan.

« Vous avez coupé le sous-flotteur de l’Île d’Itogami… !? » s’écria Kojou.

Kojou leva les yeux en réalisant ce que Vattler visait. Le jeune aristocrate se retourna.

« De cette façon, vous pouvez utiliser votre pouvoir comme bon vous semble sans vous soucier des dommages causés à la ville. Faites en sorte de m’amuser, » déclara Vattler.

« B-Bon…, » déclara Kojou.

Pendant un moment, Kojou hésita à dire des remerciements symboliques, mais il mit immédiatement cette pensée de côté. Il s’était rendu compte que l’attaque du Vassal Bestial venait de faire des dégâts considérables sur la zone principale de l’Île d’Itogami. Kojou était absolument certain que les propos de l’homme sur les dommages causés à la ville n’étaient qu’une excuse pour qu’il puisse batailler les problèmes.

« Le Nalakuvera est en mouvement, Kojou Akatsuki ! » déclara Sayaka.

Kojou se hâta de regarder la voix emplie d’urgence de Sayaka qui arrivait à ses oreilles.

Le Nalakuvera avait fait tomber les débris et les poutres autour de lui, et tout son corps avait finalement été exposé.

C’était un char à six pattes de sept ou huit mètres de haut. Pris dans son ensemble, il ressemblait à une fourmi géante portant la carapace d’un homard. Il y avait deux petites armes qui ressemblaient à des palpeurs reliés à la tête elliptique allongée.

La texture de l’armure ressemblait à celle de l’argile ou du bronze, ce qui lui donnait un aspect « arme ancienne ».

« Hmmmm. Il semble qu’il soit passé du statut d’insignifiant à menace en raison de mon Vassal Bestial. Je vois, donc il fonctionne en fait sur un programme d’autodéfense seul…, » murmura Vattler.

« Alors, c’est à cause de vous qu’il a commencé à bouger !? » s’écria Kojou sur Vattler qui murmurait tout ça d’un ton détaché.

L’œil cramoisi du Nalakuvera les dévisageait tous les deux, faisant jaillir un rayon de lumière.

« Kojou Akatsuki ! » cria Sayaka en déplaçant son épée.

« Aw, merde ! Alors c’est comme ça que ça va se passer ! » cria Kojou.

Alors que le vent soufflait sur tout le corps de Kojou, il s’était déplacé pour mettre un terme au déchaînement de l’arme ancienne.

***

Chapitre 4 : Le Bicorne

Partie 1

Le dieu Nezha adoré par les taoïstes possédait trois visages et huit bras. Il était un dieu du combat avec un corps artificiel fait de racines de lotus et d’or, brandissant une lance crachant du feu et un brassard qui pouvait fracasser les têtes de ses ennemis…

Cependant, le Nalakuvera, modelé en hommage au dieu Nezha, possédait une forme beaucoup trop tordue et diabolique pour être lui-même appelé un dieu.

Enveloppé par une armure épaisse, il possédait six pattes qu’il utilisait pour piétiner l’épave d’un camion blindé et faucher les grues qui s’élevaient dans la zone. Les éblouissants rayons pourpres étaient crachés de sa tête et déchiraient facilement le sous-flotteur recouvert d’acier, créant ainsi d’énormes explosions.

Cette puissance destructrice, qui dépassait de loin le niveau des armes terrestres conventionnelles, rivalisait certainement avec celle des Vassaux Bestiales des vampires.

Kojou comprenait très bien pourquoi le Front de l’Empereur de la Mort Noire voulait cela. Cependant, cette arme ancienne avait continué à se déplacer de son propre gré, quelle que soit la volonté de son pilote.

Même sans que Yukina ne l’explique clairement, il n’y avait aucun moyen pour lui de laisser un monstre dangereux comme celui-ci entrer dans les limites de la ville.

Cependant, en regardant le Nalakuvera de près, il ne savait pas comment il devait s’attaquer à quelque chose d’aussi ridiculement énorme…

« Qu’allez-vous faire, Kojou Akatsuki ? Comment comptez-vous ralentir ce monstre ? »

Debout à contrecœur à côté de Kojou, Sayaka avait parlé d’un ton grincheux. Les yeux de Kojou s’écarquillèrent vers elle.

Il y avait au plus trente mètres, entre eux et le Nalakuvera. À en juger par la grande taille de l’arme ancienne, ils étaient tout aussi en danger que s’ils se tenaient juste en face d’elle.

« Kirasaka !? Qu’est-ce que vous venez faire ici ? » demanda Kojou.

« Yukina a dit qu’elle voulait que vous gagniez du temps, alors c’est naturel pour moi de coopérer, vous savez ! » déclara Sayaka.

« C’est… c’est pour ça ? » demanda Kojou.

Bien qu’il ne s’agisse probablement pas d’une pensée calme et rationnelle, l’affirmation vigoureuse de Sayaka fit que Kojou accepta immédiatement cette idée. Sayaka ajouta un signe de tête, avec son visage qui était très sérieux.

« Tout à fait d’accord. En plus… »

Avant qu’elle n’ait fini de parler, un rayon avait jailli de la tête du Nalakuvera.

La lance qui crachait du feu… en termes modernes, c’était un canon laser de gros calibre. La lance se déplaçant à la vitesse de la lumière possédait une température dépassant les vingt mille degrés à son point focal, et elle pourrait sans aucun doute transformer la chair d’un vampire en cendres en un instant.

Mais Sayaka avait terminé son mouvement avant même que le rayon ne soit libéré.

La Danseuse de Guerre Chamanique de l’Organisation du Roi Lion avait vu et agi un moment dans le futur à travers sa Vision Spirituelle. La défense de Sayaka était donc plus rapide que l’attaque du Nalakuvera qui allait à la vitesse de la lumière.

« … Kirasaka !? » s’écria Kojou.

« Ma Frappe scintillante  possède deux capacités… L’une d’elles est de neutraliser les attaques physiques. Soyez reconnaissant, Kojou Akatsuki. Si je n’avais pas été là, vous seriez des cendres en ce moment même ! » déclara Sayaka.

Ce n’était pas la matière physique que l’épée de Sayaka avait coupée, mais l’espace qui la maintenait ensemble. Quelle que soit la vitesse de l’attaque, quelle que soit la chaleur de l’attaque, elle ne pouvait pas infliger de dégâts dans l’espace lui-même. Pour cet instant, l’espace que la Frappe scintillante avait coupé s’était transformé en un mur de défense absolue et invincible.

Sous les yeux de Kojou, le laser de gros calibre du Nalakuvera semblait s’enfoncer dans un mur invisible qui obstruait son chemin, disparaissant dans le néant.

« Ainsi, le mur qui peut se défendre contre toute attaque est, en d’autres termes, la lame la plus résistante du monde. Il n’y a rien que ma danse de l’épée ne puisse couper, même une arme des dieux… ! » déclara Sayaka.

Le Nalakuvera ayant terminé de tirer son laser, Sayaka avait sprinté vers les pieds de l’arme ancienne maintenant sans défense, l’épée levée.

C’était une épée tout à fait trop énorme pour qu’une fille mince puisse s’en servir. Sayaka la contrôlait comme s’il faisait partie de sa propre chair et de son sang en réalisant une belle danse. Elle frappa la jambe du Nalakuvera avec la lame d’argent, la tranchant malgré son armure épaisse, puis la tranchant à nouveau dans une succession d’attaques. Pour l’œil, c’était une danse de l’épée qui contrastait la magnificence avec la férocité.

Kojou ne pouvait que regarder attentivement le spectacle. La capacité de combat de Yukina était inhumaine, mais l’art de l’épée de Sayaka ne l’était pas moins. Dans un sens, elle, qui pouvait affronter un monstre sur un pied d’égalité, était elle-même un monstre.

Sayaka avait continué ses attaques féroces. Bien qu’elle n’ait pas été en mesure de le couper en deux, ses attaques incessantes tranchantes avaient sectionné une jambe du Nalakuvera.

Sayaka avait continué, concentrant ses attaques sur les deux jambes restantes de ce côté. Finalement, les jambes endommagées du Nalakuvera n’avaient pas pu supporter son poids, et donc l’énorme corps s’était lentement effondré. Une jeune fille seule, avec une seule épée, avait mis l’arme des dieux à genoux. Kojou ne pouvait qu’appeler ça une force absurde.

Il se demandait si, à ce rythme, la jeune fille allait vaincre le Nalakuvera toute seule…

C’est un moment après que Kojou ait embrassé un tel espoir fugace que le corps de l’arme ancienne avait subi un changement soudain.

« Eh… !? » s’écria Kojou.

L’épée de Sayaka, après avoir traversé le Nalakuvera d’un seul côté jusque-là, avait rebondi soudainement sur la surface de son armure. Sayaka avait répété son attaque coupante, mais l’arme antique s’était aussi défendue contre cela.

Un symbole mystérieux émergea sur l’armure du Nalakuvera, enveloppant la machine d’une légère lueur d’énergie magique.

Sayaka s’exclama en réalisant la vraie nature de cette lueur. « Un bouclier de répulsion !? »

Les attaques utilisant la Frappe scintillante  pouvaient trancher dans l’espace des connexions. Cependant, cela signifiait aussi que la lame ne pouvait que sectionner l’espace avec lequel elle était en contact. Le champ de répulsion enveloppant la surface de l’armure du Nalakuvera avait évolué pour repousser l’épée de Sayaka avant même que la lame ne la touche.

Ses attaques ne fonctionneraient plus contre le Nalakuvera…

« C’est ce dont l’arme des dieux est capable… !? » s’exclama Sayaka.

Une arme apprenante et évolutive. Sayaka frissonna face à l’idée. C’était devenu une faille momentanée dans sa défense.

Les antennes du Nalakuvera regardaient Sayaka du dessus de sa tête.

Le temps que Sayaka s’en rende compte, il était déjà trop tard. Les pointes des palpeurs avaient projeté des rayons cramoisis. Une Sayaka réagissant tardivement n’avait pas pu les repousser.

Les jets incandescents pouvaient traverser de l’acier épais en un instant.

Sans aucun doute, si le corps de Sayaka en était baigné, il n’en resterait aucune trace.

Mais ce qui avait frappé Sayaka n’était pas un rayon incandescent, mais un simple impact physique.

Quelqu’un avait repoussé Sayaka avec un tacle maladroit.

« … Allez-vous bien, Sayaka !? » s’écria une voix d’homme.

C’était Kojou qui avait plongé la tête la première dans Sayaka, mais alors qu’il criait, elle était tombée sur le sol dur.

Le corps bien entraîné de Sayaka avait amorti la chute sans réfléchir et cela l’avait immédiatement ramenée sur ses pieds. Tous les dommages graves avaient été évités. Cependant, ses troubles mentaux étaient profonds.

« Kojou Akatsuki !? Cette blessure !? » s’écria Sayaka.

Kojou, se levant difficilement à ses pieds, présentait de la fumée blanche qui s’élevait de sa cuisse gauche creusée. Il avait été touché par le laser du Nalakuvera lorsque Kojou avait protégé Sayaka.

« Je vais bien, je vais bien. Une blessure aussi petite va se refermer en un rien de temps, » répondit Kojou.

Kojou avait souri alors même que son visage était grimacé par la douleur.

Un vampire ancien était inviolable et immortel. Cependant, la douleur qu’ils ressentaient lorsqu’ils se blessaient n’était pas différente de celle d’un humain normal.

Sayaka en était sans doute bien consciente. Sayaka avait un peu pâli, apparemment incapable de trouver les mots qu’elle devait lui adresser.

« … Bref, qu’est-ce qu’il fait, ce type ? » demanda Kojou.

Se forçant à se tenir debout sur sa jambe gauche blessée, Kojou avait tourné son regard vers le Nalakuvera. L’arme ancienne, endommagée par les attaques de Sayaka, avait apparemment cessé de bouger.

À la place, l’armure légèrement courbée sur le dos s’était lentement ouvert.

Ils avaient vu une série d’ailes qui ressemblaient à celles des coléoptères s’étirer de là. À l’intérieur de l’armure se trouvaient des tuyères de propulseur de forme cylindrique.

« Essaie-t-il de voler !? » demanda Kojou.

Les données qu’Asagi avait sur le Nalakuvera suggéraient une capacité de vol. Kojou avait serré ses dents en se rappelant ce fait.

Les buses du Nalakuvera s’étaient dispersées dans un grondement hurlant, soufflant du vent partout.

Ce n’était pas un vol ailé comme le feraient les oiseaux et les ptérosaures. C’était un vol motorisé par la force brute.

Mais les limites de l’Île d’Itogami n’étaient qu’à quelques kilomètres de là. S’il pouvait s’envoler, il pourrait sûrement atterrir à l’improviste dans la cité. Ils ne pouvaient pas permettre au Nalakuvera de s’échapper de là.

« … Frappe-le, Regulus Aurum ! » cria Kojou.

Kojou leva le bras droit au-dessus de sa tête. Du sang frais en avait jailli.

Son sang frais avait créé une masse d’une énorme puissance magique qui s’était transformée en un rayon doré d’énergie magique. Le faisceau condensé s’était formé en prenant celle d’une bête géante dans les airs — un grand lion enveloppé d’éclairs.

C’était celui de Kojou Akatsuki, alias le quatrième Primogéniteur, le Vassal Bestial, Regulus Aurum…

Bien que nominalement apprivoisé, il avait hésité à faire appel à sa trop grande puissance. Mais ce n’était plus le moment ni le lieu pour de telles préoccupations.

« Oooooooooooooooooooooo... ! » Le lion d’éclairs avait répondu à l’esprit combatif de Kojou en courant à travers les cieux.

D’une altitude supérieure à celle du Nalakuvera, il s’était transformé en éclair et avait couru vers le sol. La lumière diffusée dans toutes les directions par les éclairs dorés se rapprochait rapidement de l’arme ancienne.

Le Vassal Bestial du Primogéniteur, dit rival d’une catastrophe naturelle, avait alors frappé.

La machine Nalakuvera avait résisté. Malgré l’écrasement des deux ensembles d’ailes, la coupure de ses jambes et la perte d’environ la moitié de son armure sur tout le corps, elle avait réussi à ne pas exploser.

Cependant, il était impossible de nier tout l’impact féroce.

Le lion de foudre avait poursuivi sa descente vigoureuse, écrasant le Nalakuvera dans le sol.

La construction creuse du sous-flotteur n’avait pu résister à la force des choses. L’acier épais qui recouvrait la surface de la surface s’était retourné vers l’extérieur, brisant l’ossature d’acier tendue à l’intérieur.

L’énorme corps du Nalakuvera était devenu un boulet de canon, perçant la surface et s’enfonçant profondément en dessous.

Et tout naturellement, Kojou et Sayaka avaient été pris dans l’onde de choc qui avait suivi.

« Uoooh !? »

Le sol sur lequel se tenaient Kojou et Sayaka s’était effondré sans aucun avertissement.

Un grand trou s’était ouvert à leurs pieds qui semblaient se poursuivre jusqu’aux enfers. Kojou savait qu’il tombait quand un désagréable sentiment d’apesanteur l’avait assailli.

Sayaka était juste à côté de lui. Au milieu des échos des vents turbulents et du grondement des débris qui tombaient…

« Espèce d’idiot… !! » cria Sayaka.

… en quelque sorte, le son de son cri avait été la seule chose qui avait captée par les oreilles de Kojou comme étrangement distinctes.

***

Partie 2

Le sous-flotteur no 13, construit comme une poubelle géante, avait été conçu fondamentalement comme un pétrolier. Les seules différences étaient qu’il était destiné à stocker des déchets compactés, et non de pétrole, et qu’il était d’un ordre de grandeur supérieur en taille.

Bien que divisée par de nombreuses cloisons, il s’agissait essentiellement d’une boîte vide enveloppée d’une robuste coque en acier.

De la surface à la partie la plus profonde, il y avait une trentaine de mètres…

Comme c’était l’équivalent d’un immeuble de dix étages, il était en fait plus haut que l’immeuble dans lequel vivaient Kojou et Nagisa. Naturellement, ce n’était pas une hauteur que l’on pouvait atteindre sans équipement. Étant tombé d’une telle hauteur, c’était presque miraculeux qu’ils soient encore vivants.

« D’une façon ou d’une autre, tout va bien… hein ? »

Debout sur une montagne de débris, Kojou poussa un soupir très profond.

Ce n’était pas qu’ils étaient tombés de trente mètres en ligne droite, leur descente avait été relativement indulgente, comme lors d’un glissement de terrain. Ils avaient heurté plusieurs cloisons en descendant, ce qui ralentissait encore plus leur vitesse de chute.

La santé de Kojou et Sayaka était le produit de coïncidences empilées l’une sur l’autre.

Ils avaient eu de la chance que le sous-sol du sous-flotteur soit vide.

S’il avait été plein comme les autres sous-flotteurs de type décharges, ils auraient probablement été enterrés vivants sous des dizaines de milliers de tonnes de déchets. Il pensait que même un Primogéniteur immortel ne se remettrait probablement pas d’une telle situation.

Et alors que Kojou poussait un soupir de soulagement, Sayaka avait fait entendre un « Kii ! » d’une voix aiguë.

« Nous n’allons pas bien ! Qu’est-ce qui vous a pris ? N’avez-vous aucun concept de retenue !? Vous n’aviez pas besoin de le faire passer à travers toute la construction !! » s’écria Sayaka.

« Je n’ai pas pu m’en empêcher, j’avais peur que ce monstre-crabe ne s’échappe… et qu’il n’essaie de s’envoler…, » répliqua Kojou d’une petite voix hésitante. Il avait vraiment voulu limiter les dégâts aux alentours, même si cela ne servait pas à grand-chose puisqu’il y avait une barrière. Mais…

« Bon sang ! » déclara Sayaka, semblant stupéfaite quand elle secoua la tête. « Certes, je peux accepter cette puissance digne du vampire le plus puissant du monde, mais ce Vassal Bestial n’est rien d’autre qu’un problème. Un faux pas et vous, son maître, seriez pris dedans et tué, vous aussi. »

« J’admets que c’est un problème… mais il a abattu ce monstre-crabe, alors ça a marché. »

Kojou avait jeté sa réponse alors qu’il brossait son parka poussiéreux.

Voyant que Kojou n’avait pas l’air du tout désolé, Sayaka s’était mise un peu en colère.

« Et le Nalakuvera ? » demanda Sayaka.

« Qui sait ? Mais on croirait que c’est retrouvé enterré là-dessous, » répondit Kojou.

Kojou avait montré du doigt le tas de débris tombés pendant qu’il parlait. À l’endroit où l’arme ancienne s’était apparemment écrasée, un tas de débris d’une dizaine de mètres de haut s’était empilé sur l’endroit.

Avec une telle quantité de barres d’armature et de plaques d’acier empilées sur le chemin, il n’y avait aucun signe du Nalakuvera. Cependant, Kojou n’avait rien senti non plus se tortiller en dessous.

« L’avez-vous détruit ? » demanda Sayaka.

« Probablement. Ça ou alors, il a subi tant de dégâts qu’il ne peut pas bouger sans une réparation, » répondit Kojou.

« Je vois. C’est très bien, mais… bon, qu’est-ce qu’on fait maintenant ? » demanda Sayaka.

Kojou s’était gratté la tête en réponse à la question de Sayaka.

Le sous-flotteur, construit uniquement pour le stockage d’une énorme quantité de déchets, avait un intérieur vraiment immense. De plus, comme l’installation était encore en construction, il y aurait très peu d’installations et peu d’éclairage disponible, soit le strict minimum requis en cas d’évacuation. Ils ne s’attendaient pas vraiment à ce que quelqu’un s’y aventurait, après tout.

« Si nous regardons autour de nous, nous devrions au moins pouvoir trouver une échelle d’inspection, » déclara Kojou.

Pendant qu’il parlait, Kojou regardait autour de lui et se dirigeait vers un endroit approprié.

« Attendez, ne pensez-vous quand même pas me quitter ? » demanda Sayaka.

Sayaka, qui semblait sur le point d’être abandonnée, se dépêcha de suivre Kojou.

« Ah ! » s’exclama Sayaka.

À ce moment-là, le sol sous ses jambes était devenu un problème pour elle. Alors qu’elle grimpait sur un tas de débris de forme irrégulière, le mouvement des débris avait fait perdre l’équilibre à Sayaka et cela l’avait fait tomber.

« Wo-woaahhh !? » s’écria Sayaka.

Heureusement, Kojou était là, en train de réfléchir. Il l’avait rattrapé de dos alors qu’elle allait tomber la face vers le haut. Il plissa les sourcils, car les paumes de ses mains avaient senti la présence de quelque chose d’assez ample et flexible.

« … Hya !? » s’écria Sayaka.

Alors que Kojou finissait par serrer généreusement les seins de Sayaka, elle avait poussé un cri très féminin.

Réalisant la vraie nature de ce qu’il saisissait, Kojou retira rapidement les deux mains.

En raison du pull d’été, il n’avait pas remarqué, mais Sayaka était apparemment du type bien doté. Malgré sa minceur, le volume de ses seins était incroyable.

« Euh, désolé, » déclara Kojou.

Kojou s’était senti mal à l’aise lorsqu’il s’était immédiatement excusé. Sayaka appuya ses mains sur ses propres seins tout en jetant un coup d’œil sur Kojou.

« Pourquoi vous excusez-vous ? L’avez-vous fait exprès ? Aviez-vous donc de mauvaises intentions ? » demanda Sayaka.

« Ce n’est pas le cas. Ce n’est pas ça, mais… Himeragi m’en a parlé au téléphone tout à l’heure, » déclara Kojou.

Sayaka inclina la tête avec un regard perplexe.

« Yukina ? Qu’est-ce qu’elle a… ? » demanda Sayaka.

« La raison pour laquelle vous détestez tous les hommes, » déclara Kojou.

Kojou baissa les yeux vers ses propres pieds pendant qu’il parlait, baissant le ton de sa voix.

Le regard de Sayaka s’était raidi, devenant comme celui d’une poupée.

« Désolé. Je ne savais pas que vous aviez peur que les hommes vous touchent, » déclara Kojou.

Yukina n’avait pas expliqué les détails, mais Kojou avait une assez bonne idée des circonstances.

Enfant née avec d’excellentes aptitudes spirituelles, elle avait souvent été maltraitée par ses parents. Le seul et unique père de Sayaka était apparemment le genre d’homme qui recourait régulièrement à la violence contre elle. Quand son père était mort avant que Sayaka n’entre à l’école primaire, l’Organisation du Roi Lion l’avait accueillie.

Cependant, la peur qu’elle éprouvait à l’égard de son père à un si jeune âge demeurait dans son cœur sous la forme d’une haine générale envers les hommes. Kojou ne voulait pas offrir une sorte de sympathie bon marché, mais il ne pensait pas qu’on puisse en vouloir à Sayaka.

Même s’il s’agissait d’une situation d’urgence, Kojou avait réfléchi au fait qu’il l’avait attrapée, l’avait plaquée au sol et l’avait touchée de façon insensible à plusieurs endroits de son corps sans tenir compte de ça.

Pendant un moment, Sayaka fixa Kojou, avec un regard d’étonnement clairement lisible sur son visage.

Puis, elle avait soudain saisi les lèvres de Kojou, les tordant grossièrement vers le haut. Kojou, incapable de serrer les dents, s’y était opposé, mais sans opposer une grosse résistance.

« Qu’est-ce que vous faites !? Ça fait mal ! » cria Kojou.

« Je me demande pourquoi Yukina vous en a parlé…, » déclara Sayaka.

Sayaka avait parlé comme si elle se posait la question. Ses lèvres étant encore tordues, Kojou haussa les épaules.

« Elle m’a fait la morale par rapport au fait que je ne devais rien faire qui vous ferait peur. Elle s’inquiétait pour vous, » déclara Kojou.

« Ce n’est pas que j’en ai peur, c’est plutôt dégoûtant ? Dégueu ? » déclara Sayaka.

« C’est encore pire. Normalement, ça me déprimerait, » déclara Kojou.

Secouant la tête avec force, Kojou avait finalement libéré ses lèvres de son emprise. Sayaka regardait ses lèvres rouges et enflées avec le sourire. C’était un visage doux, souriant, sans aucune hostilité.

« Vous êtes vraiment un vampire étrange, » déclara Sayaka.

Sayaka toucha doucement le dos de la main de Kojou du bout des doigts de sa main droite libérée.

Elle avait augmenté la force de sa prise, comme si elle confirmait soigneusement quelque chose.

Kojou la regardait avec étonnement, n’ayant aucune idée de ce qu’elle faisait.

Mais il avait compris que pour Sayaka, toucher un garçon de son plein gré était un acte de courage.

« C’est une blessure d’avant, ça va ? » demanda Sayaka.

Sayaka regarda la jambe de Kojou d’un air inquiet. C’était la jambe blessée quand il avait protégé Sayaka.

Kojou avait légèrement fléchi son genou de haut en bas. Il lui restait encore quelques douleurs, mais il avait retrouvé presque toutes ses sensations.

« C’est au moins assez guéri pour que je puisse marcher dessus, » répondit Kojou.

« Je vois, c’est bien… Euh… merci de m’avoir sauvée, » déclara Sayaka.

Comme si elle rougissait, Sayaka baissa le visage pendant qu’elle parlait. Le cœur de Kojou avait fait un gros bruit sourd et du sang s’était répandu dans ses artères au niveau de ses joues chérubins et blanches, de l’arête raffinée de son nez et de ses longs cils soulignés.

« Froid !? » s’écria Kojou.

« Po-Pourquoi !? J’ai enfin été gentille avec vous et tout… ! » déclara Sayaka.

Les joues de Sayaka s’enflaient violemment à la réaction complètement inattendue de Kojou.

Kojou secoua la tête en levant la main dans le dos.

« Non, ce n’est pas vous… Il y a quelque chose de froid contre mon dos…, » répondit Kojou.

À ce moment, un cri délicat de « Hya ! » était sorti de la bouche de Sayaka.

Quand elle avait appuyé sur l’épaule de son uniforme, il était devenu complètement trempé. L’eau tombait comme de la pluie sur toute la structure du sous-flotteur.

« Qu’est-ce que c’est ? De l’eau de mer !? » demanda Sayaka.

« Merde… ce flotteur va aller dans les profondeurs ! » s’écria Kojou.

Peu importe la solidité de la construction d’un sous-flotteur, le Vassal Bestial de Vattler, le tir de laser du Nalakuvera et le coup de grâce de Regulus Aurum avaient apparemment dépassé ses limites, et ce, de façon impitoyable. Kojou et Sayaka n’avaient tout simplement pas remarqué comment l’eau s’infiltrait déjà de tous côtés.

« Ce n’est pas le moment de se plaindre ! Nous devons trouver un moyen de retourner à terre et vite ! » cria Sayaka.

Sayaka avait froidement souligné la situation. L’eau ne s’infiltrait pas très fortement, mais si les joints de la cloison anti-inondation se rompaient, la fuite deviendrait beaucoup plus massive. Ce n’était pas très agréable d’être mouillé et bloqué dans un endroit comme celui-ci.

« Et si on marchait le long d’un des murs comme quand on est perdu dans un labyrinthe ? » demanda Kojou.

« Tout est bon tant que c’est rapide ! » déclara Sayaka.

Alors qu’ils se livraient à de stupides bavardages, Kojou et Sayaka commencèrent à marcher en avant.

À ce moment-là, la mince obscurité dans le sous-sol du sous-flotteur avait été baignée d’une lumière cramoisie et éblouissante.

Un faisceau de lumière avait coupé l’obscurité dans toutes les directions, s’enfonçant indistinctement dans l’ossature du sous-flotteur. C’était le laser de gros calibre du Nalakuvera.

Une montagne de débris s’était écrasée avec un rugissement.

À l’intérieur de ça, l’arme ancienne émergeait, entourée d’une lumière blanc pâle. Sa forme avait été légèrement modifiée, mais le blindage et les jambes qui étaient dans tous les cas détruits avaient été réparés.

« Pas possible !? Pourquoi ça bouge après qu’on l’ait endommagé à ce point… !!? » s’écria Kojou.

« Ça ne peut pas être une transmutation !? Il a fusionné avec les matériaux de construction du sous-flotteur pour se régénérer ! Il ne semble pas avoir repris son vol, mais…, » répondit Sayaka.

L’arme ancienne avait fusionné avec les débris tout autour d’elle pour réparer les dommages qu’elle avait subis.

Ses deux palpeurs pointaient au-dessus de sa tête, il avait sans doute conclu qu’il ne pouvait pas s’échapper en montant.

Le Nalakuvera avait incliné le canon de son laser de gros calibre vers ses propres pieds.

Le mur extérieur d’un sous-flotteur s’étendait à trente mètres sous l’eau. Le faisceau incandescent avait traversé le mur d’acier allié, d’une épaisseur de plusieurs dizaines de centimètres, en un instant, ouvrant un énorme trou.

L’eau de mer accélérée par la pression de l’eau avait jailli haut comme un geyser. Cela devint soudain un ruisseau boueux qui avançait sur les pieds de Kojou et de Sayaka.

« Merde… franchement !? » s’écria Kojou.

Le Nalakuvera s’était échappé par le trou qu’il venait de faire. Cependant, ni Kojou ni Sayaka n’avaient eu le temps de s’inquiéter à ce sujet. En raison de cette attaque au laser, de violentes inondations avaient commencé dans tout le sous bassement.

Main dans la main, les deux individus s’étaient enfuis. Ils étaient entièrement trempés dans l’eau de mer de la tête aux pieds.

***

Partie 3

Asagi avait continué à déchiffrer les codes de commande dans la pièce qui ressemblait à un réfrigérateur. La façon douce dont elle tapait sur le clavier ressemblait moins à un programmeur qu’à un pianiste bien formé.

Libérant des souffles blancs, Asagi avait utilisé le micro pour l’appeler « partenaire » à travers le réseau.

« Mogwai, pas besoin d’autres analyses morphologiques. Applique les algorithmes ER, réévalue tous les paramètres préliminaires, exécute le processus spéculatif basé sur la distribution zêta, et après cela, tu peux commencer la comparaison des données étape par étape, » ordonna Asagi.

« Vous êtes aussi dure que d’habitude, jeune fille. Le bus système est à sa limite supérieure. Si vous faites plus, cela nuira au maintien de l’environnement de l’île Itogami. »

C’était une voix calme et mécanique qui répondait à l’appel d’Asagi. C’était la voix des cinq supercalculateurs qui tenaient à leur portée toutes les fonctions urbaines de l’Île d’Itogami. Asagi avait surnommé l’IA « Mogwai. »

Estimant que l’utilisation du Souverän Nine à l’intérieur du navire prendrait trop de temps, elle avait utilisé le réseau pour appeler Mogwai et enrôler le cerveau de l’île Itogami pour déchiffrer les codes de commande.

« Continue comme ça même si les tampons sont tous dans le chaos. On règle ça en moins d’un quart d’heure, » déclara Asagi.

« Ku-ku-ku-ku… c’est bon de vous retrouver ainsi, » répliqua Mogwai.

« Oh, tais-toi, » déclara Asagi avec un sourire féroce alors que cela lui venait à l’esprit. « J’ai enfin compris les règles de ce puzzle. Ils n’arrêtent pas de l’appeler une arme des dieux, n’est-ce pas ? C’est pourquoi les linguistes ont tous jeté l’éponge. Ils n’ont jamais imaginé un langage qui n’a pas besoin de logique ou de processus de pensée. »

La logique n’était pas nécessaire. En d’autres termes, le Nalakuvera n’avait pas évalué la situation. Après tout, c’était une arme qui n’existait que pour détruire. Les armes anciennes ne pensaient pas plus qu’un fusil ou une bombe.

Quand il avait trouvé quelque chose à détruire, le Nalakuvera le détruisait, et c’était tout. C’était la même logique fondamentale d’un dieu — « Que la lumière soit », et la lumière surgissait — les paroles des dieux qui différaient fondamentalement de celles des hommes.

« Mais si tu comprends comment tout cela est assemblé, c’est une architecture obsolète comme les autres, » annonça Asagi.

Après avoir fini de déboguer le programme d’analyse, Asagi avait fait sortir un « Hmph » par le nez.

Il y avait au total cinquante-deux tablettes de pierre contenant les codes de commande du Nalakuvera. L’analyse serait terminée en quinze minutes. Cela signifiait que l’arme ancienne redoutable tomberait sous le contrôle total des terroristes. Mais maintenant que le Nalakuvera était actif, c’était le seul moyen de l’arrêter.

Puisque le Front de l’Empereur de la Mort Noire n’était pas une bande d’idiots, ils surveillaient sûrement le travail d’Asagi de quelque part.

Dans la situation actuelle, avec Nagisa, Yukina et l’Île d’Itogami elle-même prises en otage, il n’y avait aucune raison de ralentir son travail ou d’essayer d’en faire un rapide.

Mais ce n’était pas le style d’Asagi Aiba de se laisser commander comme ça…

« Que dois-je faire maintenant, je me le demande… ? » murmura Asagi en caressant inconsciemment sa boucle d’oreille.

Comment se venger d’une bande qui avait daigné la faire travailler gratuitement ?

***

 

Alors que le visage d’Asagi était couvert d’un regard glaçant de sang, Yukina s’était glissée hors de la pièce en douce, la laissant derrière elle.

Yukina ne savait pas vraiment ce que faisait Asagi. Cependant, son génie inégalé était évident, même pour les yeux non entraînés de Yukina. Le sens et la perspicacité d’Asagi sur la programmation n’étaient pas vraiment le produit d’un processus de pensée logique, il était plus proche de la Vision Spirituelle de Yukina et Sayaka ou même de la possession divine.

À sa grande surprise, si Asagi avait été élevée par l’Organisation du Roi Lion, elle pourrait déjà être une Chamane Épéiste surpassant même Yukina. Elle aussi était une résidente du Sanctuaire des Démons.

« … Pourquoi ? » murmura Yukina.

Contre son attente, il n’y avait pas de gardes à l’extérieur de la pièce des filles.

Yukina s’était glissée hors de la pièce parce qu’elle avait des soupçons à ce sujet.

Même à bord d’un navire qui n’avait nulle part où aller, ils avaient fait preuve d’un peu trop de négligence, ce à quoi on ne s’attendait pas de la part du Front de l’Empereur de la Mort Noire, très entraîné. Alors qu’elle réfléchissait à de tels doutes, Yukina se dirigea vers un couloir le long du côté du navire. Mais elle n’arrivait pas à distinguer les gardes.

L’Oceanus Grave était si silencieux qu’il ressemblait presque à un navire fantôme.

Elle s’était rendu compte qu’une des embarcations de secours de l’Oceanus Grave était en train d’être descendue à la surface de la mer. L’équipage du navire et le personnel non combattant du Front de l’Empereur de la Mort Noire montaient à bord de l’embarcation de secours l’un après l’autre. C’est sans doute la raison pour laquelle il n’y avait pas de soldats qui montaient la garde.

« … Pourquoi évacuer des non-combattants à un moment pareil ? » demanda Yukina.

Yukina était perplexe, mais bien sûr aucune réponse ne lui venait à l’esprit. Pour l’instant, l’Oceanus Grave n’était pas particulièrement en danger. Elle ne voyait aucune raison pour qu’ils abandonnent le navire sur le point de s’emparer du Nalakuvera, créant ainsi une situation résolument favorable pour eux.

S’il y avait un danger, ce n’était pas de l’extérieur du vaisseau…

« Ce n’est pas possible… !? » s’écria Yukina.

Suivant son instinct de Chamane Épéiste, Yukina avait sprinté. Sa destination n’était pas jusqu’à la passerelle, mais vers le bas, vers la soute au fond du navire. Bien que l’Oceanus Grave soit un bateau de croisière, il avait aussi une large porte comme un cargo. En d’autres termes, il était capable de transporter une énorme quantité de marchandises.

Comme pour confirmer les attentes de Yukina, le couloir qui continuait vers la soute était garni des troupes du Front de l’Empereur de la Mort Noire qui montaient la garde : deux hommes-bêtes armés de pistolets automatiques.

Elle n’avait pas eu le temps d’hésiter. Yukina sauta dans le couloir, sprintant de toutes ses forces pour réduire la distance avec les soldats. Comme elle s’y attendait, les soldats n’y étaient pas préparés, et leurs réactions avaient été trop lentes.

Yukina s’était envolée en un vol plein avant qu’ils ne puissent pointer leurs armes.

« … Tonnerre accroupi ! » cria Yukina.

Elle avait fait un puissant coup de pied dans la tête de l’un des soldats alors qu’il se retournait.

Bien que les hommes bêtes aient une endurance exceptionnelle, leur anatomie était identique à celle des êtres humains. Si vous frappiez le cerveau, vous pourriez infliger une légère commotion cérébrale, surtout si vous l’avez fait avant qu’ils ne se transforment en bête.

« Éclair brut ! » continua Yukina.

S’accroupissant pour utiliser le soldat inconscient comme bouclier, elle avait continué avec une frappe vers le plexus solaire de l’autre soldat, libérant l’énergie rituelle à l’intérieur de son corps au cours du processus. L’homme bête soldat s’était évanoui de douleur à la suite du seul coup infligé à son corps.

Yukina se tourna vers la soute, ne jetant même pas un coup d’œil aux soldats tombés au combat. Elle poussa la lourde porte métallique, puis ses yeux s’élargirent en raison du choc de ce qu’elle voyait.

« C’est… »

La vaste soute contenait des armes blindées solides et épaisses. Chacune avait six pattes, deux bras et un œil cramoisi et luisant.

« Ce n’est pas possible… Ce sont tous des Nalakuvera !? » s’écria Yukina.

Il y avait cinq armes anciennes inactives au total. Il y avait quelque chose d’encore plus grand à l’intérieur, mais Yukina n’arrivait pas à le distinguer depuis son emplacement.

Yukina entendit alors derrière elle une voix féroce, mais calme.

« … Chamane Épéiste de l’Organisation du Roi Lion, c’est ça ? Encore mieux que les rumeurs. En Europe, peu de gens peuvent abattre un homme bête sans arme, même par surprise. C’est un magnifique travail. »

« Kristof Gardos… ! » s’exclama Yukina.

Yukina avait prononcé le nom de l’homme. L’officier âgé du Front de l’Empereur de la Mort Noire avait souri en regardant Yukina, totalement calme.

« Même Vattler n’est pas au courant. Il n’aurait peut-être pas coopéré avec nous s’il avait su, » déclara Gardos.

« C’est donc ça, votre véritable objectif ? Vous mettez la main sur une armée de Nalakuvera !? » s’exclama Yukina.

Gardos acquiesça solennellement. « La guerre n’est pas décidée par les capacités de chaque arme individuelle, mais par la force militaire combinée. La capacité de combat du Premier Primogéniteur est redoutable, mais un seul homme ne peut défendre tout l’Empire du Seigneur de Guerre. Une troupe de machines de combat qui consomment des débris pour se réparer, capables de se battre à perpétuité… un spectacle pour faire battre le cœur, vous ne trouvez pas ? »

Prenant plaisir à regarder une Yukina horrifiée, Gardos continua son explication pédante. Apparemment, bien qu’il soit le chef d’un groupe terroriste, il avait eu la chance d’avoir un don pour l’oraison.

« Même si nous ne détruisons pas le Premier Primogéniteur, l’effondrement de son Dominion rendra le Traité de la Terre Sainte insoutenable. Ce faisant, nous atteindrons notre objectif. Ce maniaque de combat Vattler ne peut sûrement pas comprendre nos raisons, » continua Gardos.

« Vous dites donc que vous sacrifierez non seulement l’Île d’Itogami, mais aussi les habitants de votre propre pays, l’Empire du Seigneur de Guerre ? » demanda Yukina.

Yukina regarda Gardos d’un air furieux. Gardos hocha la tête, alors que son expression demeurait inchangée.

« Bien sûr que oui. C’est pourquoi ils nous appellent terroristes, » déclara Gardos.

Sans un mot, Yukina avait abaissé son centre de gravité.

Même un seul Nalakuvera avait menacé de détruire la totalité de la Ville d’Itogami. Et le Front Empereur de la Mort Noire en avait cinq autres. Elle ne pouvait pas laisser un tel pouvoir leur tomber entre les mains.

Si elle pouvait faire tomber Gardos ici, même si cela signifiait se sacrifier…

« Hu-hu-hu-hu, assez ambitieux, n’est-ce pas ? C’est vraiment dommage. Si j’avais eu des individus comme vous dans mon unité, je n’aurais pas eu à regarder mon vieil ami, l’Empereur de la Mort Noire, être tué sous mes yeux…, » déclara Gardos.

En regardant Yukina se placer dans une position de combat, Gardos semblait content alors qu’il caressait la vieille cicatrice sur sa joue. Il avait sorti un couteau de son dos. Son corps s’était mis à grincer alors que ses muscles enflaient sur tout son corps. Il était en train de se transformer en bête.

Quelle que soit l’intelligence dont il avait fait preuve, son instinct était celui d’un terroriste qui avait soif de bataille et de destruction. Haussant sa voix dans la joie devant le massacre attendu, il frappa avec son couteau avec une force incroyable.

Yukina avait esquivé l’attaque bestiale d’une épaisseur de cheveux.

« Ha-haha ! Splendide. Vous avez évité mon couteau ! » déclara Gardos.

Gardos avait immédiatement modifié la trajectoire de son couteau. Mais le mouvement puissant avait créé une ouverture sur le côté. Yukina passa devant l’attaque de Gardos et posa une paume sur son flanc.

« … Distorsion ! » cria Yukina.

Elle avait déclenché une frappe de paume à bout portant.

En combat rapproché, c’était l’atout de Yukina — envoyer la force d’un impact au-delà de la chair épaisse d’un homme bête directement dans ses entrailles. Elle avait une fois utilisé la même technique pour détruire la tenue blindée de l’apôtre lothargien.

Mais le feed-back de la paume de la main de Yukina était étrange. Son visage était devenu grognon quand elle avait mis de la distance entre eux.

Le corps de Gardos n’avait pas été endommagé. La frappe de la paume de la main de Yukina n’avait pas fonctionné sur lui.

« … Biobarrière !? » s’exclama Yukina.

« C’est ce que vous appelez le qi gong, n’est-ce pas ? Vous pensiez que je n’étais pas versé dans les arts martiaux parce que je suis un homme bête, n’est-ce pas ? » demanda Gardos.

Gardos avait fait un sourire amusé en repositionnant son couteau.

Pour Yukina, le couteau n’était pas la vraie menace. La collision avec le corps de Gardos pourrait facilement briser les os de Yukina, un plaquage au sol avec cette carrure massive briserait sans doute le corps de Yukina en lambeaux.

Même en sachant cela, la retraite n’était pas une option pour Yukina.

« … Tonnerre rugissant ! » cria Yukina.

En utilisant des frappes sur le mur et le plafond pour l’accélération, Yukina avait effectué un coup de pied volant délicat, l’utilisant pour frapper le côté de la tête de Gardos.

Il n’y avait pas moyen d’échapper à l’attaque, mais Gardos l’arrêta froidement avec son front. Sa vitesse de réaction et sa rapidité de décision étaient le fruit d’une vaste expérience martiale.

« Hnng !! »

Gardos changea de direction en secouant la tête, renvoyant le corps léger de Yukina.

Yukina sauta en l’air comme un chat avant d’atterrir sur le sol avec grâce. Gardos avait choisi ce moment précis pour avancer avec son épaule placée à l’avant. Yukina avait à peine réussi à reculer et à l’éviter.

L’action de Gardos semblait suicidaire, mais l’officier âgé avait percé le mur extérieur de l’Oceanus Grave, se dirigeant droit dehors avec à peine une égratignure.

C’était une puissance destructrice ridicule, même selon les normes des hommes bêtes rusés.

Yukina avait poursuivi Gardos sur le pont. Elle pensait que le combat y serait plus avantageux que dans les couloirs étroits du navire. Cependant, à ce rythme, même si elle continuait à se battre, elle n’avait aucun moyen pour elle de gagner.

Leur compétence au combat était à peu près égale. Gardos avait l’avantage absolu en vitesse, Yukina avait l’avantage en réactivité. Mais la différence de puissance était trop grande.

Même si un coup de Gardos pourrait mettre Yukina hors du combat, aucune de ses attaques n’avait fonctionné sur lui.

De plus, Gardos ne se retenait pas et ne sous-estimait pas du tout Yukina.

À ce rythme, la défaite était inévitable. Dès qu’un tel sentiment de désespoir avait commencé à tenir Yukina dans ses griffes…

… Une rafale d’une force incroyable les avait frappés tous les deux.

« C’est quoi ce vent !? » s’exclama Gardos en réponse à ce changement soudain. C’était un vent violent qu’on ne pouvait appeler qu’une tempête de vent. La vitesse du vent était sûrement la rivale d’un typhon de catégorie 5. La légère Yukina risquait d’être facilement emportée par le vent à la moindre perte de concentration. Elle ne pouvait pas baisser sa vigilance face à la masse d’air qui claquait directement en elle.

Mais ce qui était vraiment surprenant, c’était la tranquillité de la mer tout autour de l’Oceanus Grave. La rafale faisait seulement rage dans les environs de Yukina et Gardos.

Quelque chose volait, avançant dans le vent. Il avait une belle lame en argent. Sa pointe avait été fendue en une triple fourchette. La silhouette ressemblait à celle d’un avion de chasse à voilure balayée. C’était une lance complètement métallique, de couleur argentée.

« Sekkarou !? » s’écria Yukina.

Dans les airs, Yukina arracha la lance volante qui avait chevauché le vent.

À ce moment-là, la tempête de vent s’était calmée, comme si maintenant que Yukina avait reçu la lance, son devoir était accompli…

« Qui a fait ça… !? » s’écria Yukina.

Elle regarda avec un regard choqué la lance qui était retournée dans sa propre main.

Le Sekkarou entièrement en métal n’était en aucun cas une arme légère. Même s’il s’était approché beaucoup plus près de la terre ferme, l’Oceanus Grave se trouvait encore à quelque quatre ou cinq cents mètres de l’île Itogami.

Pour lancer la lance de cette distance pour la livrer à Yukina… elle ne savait pas qui c’était, mais il fallait que ce soit quelqu’un d’extrêmement compétent.

Personnellement, elle ne connaissait personne capable d’un tel exploit. De plus, pour cette personne, le fait de savoir que Yukina était la manieuse de la lance signifiait qu’elle savait exactement qui et ce qu’était Yukina. Mais elle s’inquiéterait de l’identité de la personne plus tard. L’homme qu’elle devait vaincre était sous ses yeux.

« Hmm. Un Maître du Vent, c’est ça ? » murmura Gardos tout en balayant les écluses avant été envoyé par le vent.

« Comme on pouvait s’y attendre du sanctuaire des démons d’Extrême-Orient, tant de gens font appel à des talents irréguliers. Cependant…, » déclara Gardos.

Tandis que Yukina le regardait fixement, la lance en équilibre, ses lèvres se plissèrent vers le haut en se réjouissant.

« Donc ça veut dire que je vais enfin voir votre vrai pouvoir. Intéressant. Une bataille stratégique de frappe, de poussée, d’acier et de sang, voilà à quoi devrait ressembler la guerre, » déclara Gardos.

La joie du combat brûlait brillamment dans les yeux de l’homme-animal. Mais ce qui sortait des lèvres de Yukina, c’était un chant serein, le contraire polaire du rugissement féroce de l’officier âgé.

« — Moi, Vierge du Lion, Chamane Épéiste du Dieu Suprême, je vous en conjure. »

L’énergie rituelle avait surgi dans le corps de Yukina, amplifiant Sekkarou. La lueur fit rétrécir les yeux de Gardos. Il s’était rendu compte que la lance d’argent dans les mains de Yukina était extrêmement dangereuse pour les créatures démoniaques.

Gardos avait levé son couteau et avait chargé une Yukina dansant sans défense. Yukina s’était déplacée pour intercepter le coup, avec ses mouvements plutôt lents…

« Ô lumière purificatrice, ô divin loup de la dérive des neiges, par votre divine volonté d’acier, abattez les démons devant moi ! » déclara Yukina.

La victoire et la défaite se décideraient en un instant. Alors que la belle lumière argentée se croisait et disparaissait, la seule attaque que Yukina avait déclenchée avait coupé Gardos au bras supérieur, prenant avec elle la main qui maniait un couteau.

« … Magnifique, Chamane Épéiste. Mais je serai le vainqueur de la guerre, » déclara Gardos.

Alors que du sang frais jaillissait de la plaie ouverte, Gardos avait ri. Il avait pris le bras droit sectionné et avait sauté par-dessus la tête de Yukina, se dirigeant vers le pont supérieur.

Il y avait deux hommes de Gardos là-bas.

L’un tenait une tablette PC contre sa poitrine, l’autre tenait une fille en uniforme scolaire dans chacun de ses bras.

« Asagi-senpai !? Nagisa !? » s’écria Yukina.

Yukina poussa de brefs cris en voyant la vue des filles qui dormaient profondément.

Cédant à la colère, elle leva sa lance et chargea vers eux. Mais un rayon de lumière pourpre avait soudain balayé devant elle : le tir d’un laser de gros calibre.

« Nalakuvera !? Ce n’est pas possible… !? » s’écria Yukina.

Le sang avait disparu du visage de Yukina lorsqu’elle avait vu la vue inquiétante d’une arme ancienne perçant la surface de la mer à mesure qu’elle émergeait.

Même si le Nalakuvera s’accrochait à la coque de l’Oceanus Grave, il n’attaquait personne.

Quand Yukina s’en était rendu compte, elle avait vraiment connu la peur.

Cette arme ancienne n’était pas dans un état de folie. Elle se déplaçait selon la volonté de son contrôleur.

« Le décryptage de la tablette de pierre ? » demanda Gardos.

Gardos questionna ses hommes afin d’obtenir des informations. L’un d’eux avait répondu en posant Asagi et Nagisa sur le pont.

« On dirait que c’est fini. Grigore a déjà confirmé que le contenu est correct, comme vous pouvez le voir. »

« Je vois, » déclara Gardos, faisant un signe de tête satisfait. L’hémorragie provoquée par Yukina qui avait coupé le bras s’était déjà arrêtée, et pressant l’avant-bras sur ça, cela avait déjà commencé à fusionner. Sa vitalité était d’un niveau choquant même pour les hommes bêtes.

« … Alors, c’est ainsi. Rendez-vous maintenant, Chamane Épéiste de l’Organisation du Roi Lion. J’ai attendu Vattler longtemps. Je n’ai pas le temps de jouer avec des individus comme vous, » déclara Gardos.

Yukina était complètement poussée dans un coin. Même avec Sekkarou, affronter Gardos et deux autres hommes bêtes en même temps serait une bataille difficile. En plus de cela, ils avaient Asagi et Nagisa en otage, en plus, ils avaient le Nalakuvera sous contrôle. D’une façon ou d’une autre, Yukina n’avait aucune chance de victoire.

L’Oceanus Graves se déplaçait le long du sous-flotteur n° 13, avec le Nalakuvera en remorque.

Gardos et son groupe avaient sans doute pour objectif de transporter les Nalakuvera inactifs dans la soute à terre et de les activer une fois sur place. Ils voulaient combattre Vattler avec les six Nalakuvera en même temps.

Même en sachant cela, Yukina ne pouvait rien y faire. La porte arrière de l’Oceanus Grave s’ouvrait en ce moment avec le rugissement de sa pompe hydraulique.

Un instant plus tard…

Les oreilles de Yukina avaient été percées par un hurlement bestial qui résonnait dans l’air.

Et le sous-flotteur s’ébranla violemment, et d’innombrables fragments se dispersèrent, comme s’il avait été frappé par une bombe.

***

Partie 4

« Merde… c’est aussi une impasse par là, hein ? »

La voix fatiguée de Kojou résonnait dans l’obscurité. Ils se trouvaient à l’intérieur de l’un des puits d’entretien étroits répartis dans l’ensemble du sous-flotteur.

Logiquement, le chemin continuerait jusqu’à la surface, mais ce n’était pas si simple en pratique. En plus d’être dans une structure telle un labyrinthe, diverses sections avaient été bloquées par les décombres. Après plusieurs allers-retours, Kojou et Sayaka avaient complètement perdu leur chemin.

Cependant, l’eau de mer continuait de s’écouler à leurs pieds. L’eau qui venait d’un peu partout avait déjà trempé Kojou et Sayaka de la tête aux pieds.

« Ce n’est pas bon. Le niveau de l’eau monte plus vite. À ce rythme, il ne restera pas plus de dix minutes avant de couler, » Sayaka envoya un regard haineux vers les décombres qui leur bloquait le chemin alors qu’elle murmurait.

Kojou s’était placé avec une poutre en acier à côté de ses pieds.

« … Ne puis-je pas tout faire disparaître avec Regulus Aurum, non ? » demanda Kojou.

Sayaka fixa Kojou du regard.

« Si vous appeliez une masse d’électricité dans un endroit aussi mouillé, je serais brûlé avec n’importe qui d’autre présent ici… Même vous, vous seriez très malmené, n’est-ce pas ? » demanda Sayaka.

« Ouais, supposons que c’est bien ce qui arrivera, » déclara Kojou.

Kojou affaissa ses épaules. Il avait déjà eu une vague idée de cela auparavant, mais il y avait trop de situations où les Vassaux Bestiales d’un vampire n’étaient d’aucune utilité. Même le rétroéclairage de son téléphone cellulaire était beaucoup plus utile comme lampe de poche que ce lion de foudre diabolique.

« La Frappe scintillante ne peut rien faire non plus face à un tas de débris de cette taille, » Sayaka avait parlé en tenant sa lourde épée avec sa main gauche.

Je suppose que c’est vrai aussi, pensa Kojou.

« Même si un maître épéiste peut couper un rocher en deux, on ne peut pas creuser un tunnel avec un katana, hein, » déclara Kojou.

« Ouais, » répondit Sayaka.

Faisant un faible sourire pendant qu’elle répondit, Sayaka éternua, et c’était étrangement charmant.

Kojou remarqua que ses épaules trempées tremblaient un peu.

« Il doit faire froid ici, tout mouillé comme ça, » murmurant cela alors qu’il laissait sortir des bouffées d’airs blancs, les yeux de Kojou tombèrent soudain sur les seins de Sayaka.

Son chemisier mouillé à col ouvert s’accrochait à sa peau, alors son soutien-gorge était facile à voir à travers lui. Le motif floral rose clair s’enroulait autour de deux collines généreuses séparées par une vallée d’une profondeur enchanteresse.

Selon la vision nocturne d’un vampire, c’était une image beaucoup plus vivante que nécessaire.

« Qu’est-ce qu’il y a ? » demanda Sayaka.

Tandis que Kojou se tut soudain, Sayaka lui jeta un coup d’œil vers son visage, comme s’il y avait quelque chose de mystérieux là-dedans.

« D-D’accord, » déclara Kojou en détournant les yeux en toute hâte. Sayaka regarda carrément Kojou, avec un regard suspicieux bien visible sur son visage, et elle avait fini par haleter avant de couvrir ses seins.

« Kojou Akatsuki… ! » s’écria Sayaka.

« Je n’ai rien fait de mal ! J’ai juste pensé qu’il faisait froid, alors je me suis dit que je devrais peut-être vous prêter mon parka…, » déclara Kojou.

« Comme si j’accepterais de porter une parka trempée d’hormones ! Je tomberais enceinte ! » cria Sayaka.

« Bien sûr que si !! Croyez-vous vraiment que les vampires sont ainsi ? » Kojou avait crié avec force. Mais pour une raison inconnue, il n’avait pas entendu la réplique attendue de Sayaka. Elle avait penché la tête sur place et s’était mise à jouer avec ses doigts.

« … Ça me fait de la peine pour Yukina, » déclara Sayaka.

« Ah ? Yukina n’a rien à voir avec ça. Tenez, commencez par mettre ça, » déclara Kojou.

Kojou avait placé de force sa propre parka sur les épaules de la fille. Elle était encore trempée, mais la chaleur du corps de Kojou l’aiderait sûrement un tout petit peu.

Comme si elle goûtait cette chaleur corporelle pour elle-même, Sayaka avait rapproché le col du parka contre elle.

« Hé, Kojou Akatsuki ? » demanda Sayaka.

« Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? » demanda Kojou.

« Croyez-vous que ça marcherait si vous utilisiez un autre Vassal Bestial ? » demanda Sayaka.

« Eh bien… dans cette situation, je suppose que oui, » répondit Kojou après y avoir réfléchi.

Kojou fronça les sourcils en se souvenant que quelqu’un lui avait posé une question très semblable il n’y a pas si longtemps.

Kojou avait hérité des douze Vassaux Bestiales du quatrième Primogéniteur. L’un d’entre eux pourrait certainement faire exploser les débris en morceaux dans cette situation, peut-être celui qui avait été sur le point de pulvériser le toit de l’école.

« … Mais quand Regulus Aurum est venu contre ma volonté, il a brûlé une partie de l’Île Est. Si une telle chose se produisait ici, une île artificielle à bout de souffle comme celle-ci coulerait directement au fond de la mer, » déclara Kojou.

Après avoir dit cela, Kojou poussa un soupir. Pourquoi les Vassaux Bestiales du Quatrième Primogéniteur devaient-ils être si difficiles à utiliser ?

Mais Sayaka continua à regarder Kojou.

« Si vous pouvez le contrôler, c’est bon, non ? Yukina vous a laissé sucer son sang pour que vous puissiez le faire, non ? » demanda Sayaka.

« Kirasaka ? » demanda Kojou.

Kojou avait plissé les sourcils devant Sayaka qui faisant comme si elle réfléchissait a quelque chose.

Pour une raison inconnue, les joues de Sayaka étaient rouges, alors que son regard vagabondait.

« Euh, ah, vous savez, je suis vraiment… grande, n’est-ce pas ? »

Alors qu’elle posait sa question abrupte, la réponse de Kojou s’était prise dans sa gorge. Son regard s’était déplacé inconsciemment vers la façon dont ses seins sortaient des coutures du parka.

« Vous n’êtes certainement pas petite comparée à Himeragi, » répondit Kojou.

« Je suppose que non, et pas mignonne du tout, » Sayaka avait parlé avec un sourire d’autodérision.

Qu’est-ce qu’elle veut dire par là ? Kojou se posa cette question, perplexe. Peut-être qu’elle ne pouvait pas porter de jolis soutiens-gorge parce que ses seins étaient trop gros ou quelque chose comme ça ? On pourrait certainement dire que le corps de Sayaka était trop courbé pour ça. Mais…

« Il n’y a rien dont vous deviez vous inquiéter, » déclara Kojou.

« Hein ? » s’exclama Sayaka.

« Beaucoup de mecs aiment quand c’est ainsi, non ? Plus féminine. » Kojou parlait pendant que sa tête palpitait en se souvenant de son meilleur ami.

Mais Sayaka inclina la tête avec un regard perplexe.

« Plus féminine ? Plus petit n’est-ce pas plus mignon ? » demanda Sayaka.

« Il y a certainement des individus qui aiment ça aussi. Les gens ont des goûts différents à ce sujet. Par contre, cela peut être dur sur les épaules d’une fille, » déclara Kojou.

« … Dur sur les épaules ? Qu’est-ce que vous voulez dire ? » demanda Sayaka.

Sayaka avait cligné des yeux à plusieurs reprises. Kojou inclina un peu la tête, tout comme elle.

« Euh ? N’est-ce pas ainsi ? J’ai cru voir une gravure idol en parler une fois…, » déclara Kojou.

« Une gravure idol ? » demanda Sayaka.

Le visage de Sayaka devint sérieux, alors que l’air de confusion s’évanouissait. Finalement, ses épaules commencèrent à trembler lentement et furieusement pendant qu’elle parlait.

« … Qui parle de seins ici !? Je parle de la taille, simplement de la taille ! » déclara Sayaka.

« Ah ? Pourquoi parlez-vous de la taille tout d’un coup ? » demanda Kojou.

« J’en parle depuis le début ! » s’écria Sayaka.

Sayaka grogna comme un chien féroce.

Kojou affichait un regard léthargique en regardant Sayaka de haut en bas.

« Kirasaka, de toute façon, ce n’est pas comme si vous étiez si grande. À peu près, cent soixante-six ou sept, non ? C’est tout à fait normal selon moi, » déclara Kojou.

En tant qu’ancien joueur de basket-ball, Kojou trouvait que la hauteur de Sayaka était tout à fait normale. Il pensait même que le niveau de ses yeux la rendait plus facile à approcher de près.

Peut-être que la dernière phrase avait été bien comprise, car l’humeur de Sayaka s’était légèrement améliorée.

« Malgré tout, j’étais la plus grande fille de toute mon école ! À cause de cela, j’ai continué à recevoir le traitement d’une princesse royale…, » déclara Sayaka.

« Le traitement d’une princesse royale… ? » demanda Kojou.

Kojou se souvint qu’elle avait crié désespérément : « Ça ne compte pas. » Et elle avait l’air étrangement énervée, mais pour Sayaka, qui était si sensible à sa taille, c’était une grosse affaire.

« C’est pour ça que je suis un peu heureuse. Cela ne m’était jamais arrivé avant. » Sayaka avait parlé, alors que le rouge de betterave montait jusqu’au bout des oreilles. « C’est juste que c’est vraiment bien. Ce n’est pas que je rêvais d’avoir un jour une rencontre fatidique avec un homme qui me fait tomber amoureuse de lui ou quoi que ce soit d’autre… ! »

« D-D’accord, » répondit Kojou.

Kojou était un peu soulagé que Sayaka ne soit pas en colère.

En ce moment, elle ressemblait à une lycéenne ordinaire, tout comme les camarades de classe de Kojou. On ne croirait pas qu’elle et le danseur de guerre qui avait combattu si vaillamment le Nalakuvera étaient une seule et même personne. C’était probablement la Sayaka que Yukina avait toujours considérée comme sa colocataire. Il pouvait même être d’accord avec l’idée qu’elle était mignonne.

Sayaka avait alors saisi l’uniforme de Kojou au niveau de son estomac et lui fit une légère traction. En faisant ça, elle s’était rapprochée de Kojou. Avant que Kojou ne s’en rende compte, les deux individus étaient assez proches pour que leurs respirations se mélangent.

« Alors… gardez ça secret vis-à-vis de Yukina, OK ? »

La voix de Sayaka tremblait alors qu’elle lui murmurait. C’était sans doute à cause du froid et de la peur.

Mais semblant avoir pris sa décision, son tremblement cessa dès qu’elle se pencha complètement sur lui.

« Je pense vous laisser sucer mon sang pour vous remercier, juste une fois. Ou peut-être que je ne suis pas assez bien pour vous ? » demanda Sayaka.

Kojou fut ému par la vue des yeux larmoyants de Sayaka qui le regardait ainsi.

« Non, rien de tout ça, mais ça ne vous dérange pas, Kirasaka… ? » demanda Kojou.

Sayaka avait répondu à la question de Kojou en bougeant doucement ses mains afin d’entourer le dos de Kojou.

Les corps de Kojou et Sayaka étaient encore froids et humides. Cependant, leur peau, pressée ainsi, transmettait une douce chaleur à l’autre.

 

 

« Je n’ai… pas peur de vous. C’est étrange, n’est-ce pas… ? Vous êtes le vampire le plus puissant du monde et malgré ça…, » murmura Sayaka.

Alors que Sayaka le disait, elle toucha doucement la bouche de Kojou, et les crocs pointus et effilés de Kojou…

L’écoulement de l’eau dans le couloir avait augmenté en vigueur, c’était assez fort pour qu’ils puissent être emportés s’ils ne se tenaient pas si fortement l’un contre l’autre. Enfin, leurs deux silhouettes s’étaient confondues en une seule, avec les minuscules échos de Sayaka se rependant à la surface de l’eau.

***

Partie 5

« Merde… ça ne marchera pas. »

Yaze avait une respiration difficile alors qu’il recrachait les restes de capsules qu’il lui avait enfoncées dans la gorge.

Le tourbillon chaotique d’air qui l’entourait était une conséquence de l’utilisation de ses capacités.

Cela avait permis d’envoyer le Sekkarou jusqu’à Yukina qui se trouvait sur l’Oceanus Grave qui flottait sur l’océan. C’était un travail de fortune qui n’était possible qu’avec le contrôle du vent par Yaze, mais cela avait bien fonctionné.

Yukina avait vaincu Gardos comme il l’avait espéré. Selon les calculs de Yaze, Yukina et les autres filles seraient enfin en sécurité. Il ne s’attendait pas à ce que les codes de contrôle du Nalakuvera soient déchiffrés plus vite que prévu.

« Même Himeragi ne peut rien faire contre cette arme ancienne. Bon sang, Asagi, j’ai risqué une réaction indésirable pour t’aider, mais tu as dû travailler si dur…, » Yaze avait craché des plaintes frêles en s’affalant sur le sol.

Tout en regardant Yaze comme ça avec une expression amusée, Vattler, vêtu de son costume trois-pièces voyant, avait parlé. « Je vois. En tant qu’observateur, il vous est donc interdit d’intervenir directement au combat. Ça doit être dur pour vous… »

« J’ai dû agir seulement parce que vous m’avez gêné. Cela se serait un peu mieux passé si vous ne l’aviez jamais fait, » répliqua Yaze.

Yaze tourna son regard vers Vattler, le fusillant du regard. Yaze avait réalisé que le Front de l’Empereur de la Mort Noire était monté à bord de l’Oceanus Grave juste après qu’Asagi et les filles aient été enlevées. S’il avait pu divulguer ces renseignements à la garde de l’île, ils ne seraient pas tombés dans le piège, les choses se seraient sans doute déroulées très différemment.

« Mais grâce à ça, cela a été assez amusant à voir, » Vattler avait dit ça sans la moindre honte.

Cinq unités de Nalakuvera étaient sorties hors de l’Oceanus Grave juste au moment où il se trouvait le long du sous-flotteur no 13.

Déjà que l’une des armes anciennes possédait une capacité de combat considérable, alors qu’ils en possédaient six au total. Pour Vattler, c’était sûrement une bataille fascinante. C’est pour ça qu’il avait fait tout ce chemin jusqu’à une petite île en Orient.

« Maintenant, les préparatifs de Gardos semblent terminés, alors peut-être que c’est enfin à mon tour ? » déclara Vattler.

Anticipant une bataille à mort comme il ne l’avait pas connue depuis un certain temps, Vattler s’était mis à marcher joyeusement vers l’avant.

Yaze avait fait un rire sarcastique dans son dos.

« N’en soyez pas si sûr. Permettez-moi de dire ceci en tant que meilleur ami du quatrième Primogéniteur… Je ne pense pas que vous devriez vous attendre à ce qu’il se comporte comme prévu, » déclara Yaze.

Comme pour étayer ses propos, la zone autour de Vattler et Yaze avait été baignée d’un son douloureux, à haute fréquence.

Il s’en était suivi un tremblement féroce qui avait fait grincer et trembler tout le sous-flotteur.

« … Oh mon Dieu, » murmura Vattler avec ce qui semblait être de l’admiration. Une masse incroyable de pouvoir magique avait émergé du dessous du sous-flotteur, libérant une vague inquiétante et aveugle dans toutes les directions.

C’était une masse d’énergie sauvage et violente qui surpassait même le Vassal Bestial fusionné de Vattler. Une telle chose n’existait pas sur l’Île d’Itogami, à la seule exception des Vassaux Bestiales de Kojou Akatsuki, le quatrième Primogéniteur…

« Te voilà, Kojou, » murmura Yaze avec une allure de satisfaction, les yeux fermés. Ces forces étaient apparemment épuisées.

Un bruit d’explosion avait jailli du sous-sol, devenant une onde de choc qui avait déferlé à la surface du sous-flotteur, projetant une énorme quantité de débris dans l’air. Malgré cela, le rugissement qui secoua le sol ne disparut pas.

Le tremblement avait déformé la condensation de l’atmosphère, créant un scintillement, et enfin, le scintillement s’était transformé en bête : une bête géante, portant deux cornes, avec une crinière incandescente et scintillante…

***

La manière dont Gardos s’était comporté avait été rapide et décisive.

« L’un des Vassaux Bestiales du quatrième Primogéniteur ! Grigore ! Je vais aller dans la reine. Retiens-le jusque-là, » déclara Gardos.

« … Bien reçu, lieutenant-colonel, » répondit Grigore.

Avec cette dernière phrase à la radio, le premier Nalakuvera s’était mis en route avec un rugissement. Il se dirigea vers le Vassal Bestial à deux cornes en dispersant son rayon cramoisi tout autour de lui.

« Attendez, Kristof Gardos ! » cria Yukina.

Yukina avait tourné sa lance d’argent et les avait pourchassés. Avec un regard méprisant et agacé, l’un des hommes de Gardos lui avait jeté quelque chose. C’était un cylindre métallique de la taille d’un contenant de jus en aluminium.

Yukina avait été terrifiée dès qu’elle avait réalisé que c’était une grenade.

Leurs otages, Asagi et Nagisa, avaient été laissés sur le pont supérieur. Si elles l’encaissaient à bout portant, les filles sans défense seraient tuées sans laisser la moindre chance de survie.

Yukina avait alors renoncé à poursuivre Gardos et s’était précipitée pour couvrir les filles couchées sur le pont. Son intention était d’utiliser son corps comme bouclier pour les protéger de l’explosion de la grenade.

« … ! »

Mais Yukina n’avait pas été frappée par l’impact auquel elle s’était résignée.

Un peu plus loin, un peu d’eau pulvérisée s’était envolée et s’était dispersée sur la mer.

« Hein ? » s’exclama Yukina.

Désorientée, Yukina se leva. On n’avait pas eu le temps de ramasser la grenade et de la lancer. Il n’y avait certainement pas eu assez de temps pour la lancer à une telle distance.

Mais la grenade avait été déplacée dans tous les cas, comme si quelqu’un l’avait téléporté avec l’espace qui l’entourait…

« … Il semblerait que vous soyez toutes en sécurité, relativement parlant. »

Juste devant les yeux de Yukina, l’espace vide avait formé ce qui ressemblait à une ondulation, avec une petite femme qui en sortit lentement — une femme avec une robe élégante et un parasol à volants noirs.

« Grâce à votre coup de lance, la barrière autour de ce vaisseau s’est brisée, alors j’ai enfin pu me téléporter. Je dois vous remercier d’avoir protégé mes élèves, Yukina Himeragi, » déclara la petite femme.

« Mlle Minamiya !? »

Yukina fut frappée de surprise en levant les yeux vers le vide d’où Natsuki était sortie sans un bruit.

La téléportation spatiale était un type de magie de la plus grande difficulté. Même au sein de l’Organisation du Roi Lion, seules quelques personnes pouvaient l’utiliser sur un plan individuel. Elle n’avait jamais entendu parler d’un utilisateur qui pourrait l’utiliser avec la même facilité que de respirer.

Son apparence était peut-être celle d’un chérubin, mais elle était apparemment plus monstrueuse que Yukina ne l’avait imaginé.

Peut-être fallait-il s’y attendre de la part de la maîtresse de classe du quatrième Primogéniteur. Son attitude hautaine constante envers lui n’était pas pour rien.

« Je vais les emmener dans un endroit sûr. Qu’allez-vous faire, étudiante transférée ? Venez-vous avec nous ? » demanda Natsuki en prenant dans ses bras Asagi et Nagisa endormies.

Yukina secoua la tête en se levant.

« Je vais retrouver Akatsuki-senpai. Je suis son Observatrice, après tout, » répondit Yukina.

« Hmph. Un vrai bourreau de travail. Faites ce que vous voulez, » déclara Natsuki en se penchant vers l’espace tremblant. Elle y avait jeté les Asagi et Nagisa encore endormies dedans. Puis, avec un léger soupçon de malice, elle avait souri d’un petit rire. « Mais votre aide n’est peut-être même pas nécessaire. »

« Hein ? » demanda Yumina.

Laissant derrière elle ce commentaire significatif, Natsuki s’était évanouie dans les airs. Toujours confuse, elle chercha Kojou, qui était sûrement en train de combattre contre le Nalakuvera.

Au-dessus du sous-flotteur, le Vassal Bestial de Kojou dominait l’arme ancienne endommagée : un animal bicorne avec une crinière incandescente, un Vassal Bestial inconnu de Yukina.

Il n’y avait qu’une seule chose que cela pouvait signifier. Quelque part où Yukina ne pouvait pas voir, Kojou avait sucé le sang de quelqu’un.

Pour une raison ou une autre, en pensant à ce fait, Yukina était très mal à l’aise, elle était un peu perplexe devant l’irritation qu’elle ressentait.

Mais d’un point de vue rationnel, Yukina était bien sûr en colère parce qu’il suçait le sang d’une autre personne de lui-même, sans même dire un mot à son observateur. Oui, c’est tout, se dit Yukina.

C’est alors que Yukina avait entendu la sonnerie d’un appel entrant à côté d’elle. La sonnerie venait du smartphone d’Asagi.

En regardant le nom affiché à l’écran, Yukina avait répondu à l’appel.

« Hé, jeune fille. Le travail est terminé. »

La voix qu’elle avait entendue par la liaison numérique était la voix artificielle du partenaire d’Asagi.

Avec les fonctions de l’Île d’Itogami à portée de main, passer un appel à un téléphone cellulaire n’était pas un grand exploit.

« Euh… Mogwai, c’est ça ? » Yukina avait très timidement prononcé son nom.

Mogwai avait semblé identifier immédiatement l’oratrice grâce à l’analyse de sa voix.

« Oh mon Dieu. Vous êtes l’étudiante transférée, la rivale de la jeune femme, n’est-ce pas ? » demanda Mogwai.

« Hein ? Rivale ? » demanda Yukina.

« Et Asagi, où est-elle ? » demanda Mogwai.

« En ce moment, elle a été évacuée vers un endroit sûr. Elle devrait être endormie en ce moment, » répondit Yukina.

Mogwai avait fait un « Hmm » face aux mots de Yukina, comme s’il contemplait quelque chose. Pour une intelligence artificielle, c’était une action assez raffinée. Il ne faisait aucun doute que son apparence exagérée, mêlée à une réelle subtilité, était le reflet de la personnalité de son maître.

« Je vois. Qu’est-ce que je vais faire ? Elle m’a dit de l’envoyer sur son portable sans que les terroristes s’en aperçoivent, mais…, » déclara Mogwai.

« Qu’est-ce que vous racontez ? » Yukina haussa sa voix.

Asagi travaillait secrètement sur quelque chose sous le nez de Gardos. Elle pensait que ça devait être très important.

« Eh bien, vous voyez…, » Mogwai avait ouvert la bouche à contrecœur, comme intimidé par la manière menaçante de Yukina. « C’est un code de commande pour l’arme ancienne… le cinquante-cinquième. »

***

Partie 6

Kojou et Sayaka se tenaient ensemble au sommet d’une colline en pente douce.

C’était la première fois depuis longtemps qu’ils pouvaient voir le soleil brillant au-dessus de leur tête. La brise de mer de l’été faisait du bien sur leur corps froid et humide.

Derrière Kojou et Sayaka, il y avait un cratère qu’on pouvait confondre avec un lac asséché d’environ trois cents mètres de diamètre.

Dans un cercle concentrique, les plaques d’acier qui recouvraient la surface du sous-flotteur s’étaient enfoncées et, au centre de ce cratère englouti, une créature bicorne incandescente faisait vibrer les oreilles par sa seule présence.

« … Vous êtes vraiment quelqu’un de spécial, » murmura Sayaka.

Regardant le cratère, Sayaka poussa un soupir de lamentation, observant ce qui était à côté d’elle.

Mais ses paroles étaient teintées d’un ton qui semblait amusé.

« Certes, cela nous a ramenés à la surface, mais vous n’aviez pas besoin de faire ce cratère ridiculement énorme. Si je ne nous avais pas protégés des débris avec la barrière de la Frappe scintillante, nous aurions tous les deux été enterrés vivants, » déclara Sayaka.

« Si ça vous pose un problème, dites-le-lui. J’allais être bien assez content si ça faisait quelque chose à propos des débris qui bloquaient le couloir, » répliqua Kojou d’une voix qui suintait d’une grande fatigue mentale.

Eh oui, la puissance du Vassal Bestial nouvellement obtenue avait emporté les débris dans le couloir.

C’était tout ce que Kojou voulait. Cependant, ce qui s’était réellement passé, c’est que le Vassal Bestial, se disant que si le plafond est trop haut pour s’échapper, il suffisait de le baisser, alors il s’était engagé dans une destruction totale. En raison des vibrations et des ondes de choc, les piliers et les parois internes du sous-flotteur avaient été pulvérisés et le plafond s’était effondré.

Regulus Aurum était un énorme tas d’ennuis, mais ce cheval sauvage à deux cornes l’était tout autant, peut-être même pire… ou peut-être que cette impression extrêmement horrible n’était que le fruit de son imagination. Mais pour l’instant, il comptait sur cette férocité.

« Yukina est vraiment en danger d’être proche de quelqu’un comme vous, » déclara Sayaka.

Sayaka leva les yeux vers Kojou pendant qu’elle parlait. Il n’y avait rien de l’acuité de sa voix. Elle se blottissait contre lui alors qu’ils se tenaient debout côte à côte, avec un sourire sur son visage.

« C’est pourquoi, cette fois, je prendrai très bien soin de vous. Réglons ça rapidement, » déclara Sayaka.

Le regard de Sayaka se tourna à nouveau vers la direction de l’ancienne arme qui atterrissait. C’était le Nalakuvera blessé contre lequel Kojou et Sayaka s’étaient d’abord battus.

Sa forme n’avait pas changé depuis la dernière fois qu’ils l’avaient vue. Cependant, ses mouvements étaient clairement différents. Il s’agissait de mouvements intelligents reflétant la volonté d’un pilote. Il s’était servi du terrain effondré comme d’un bouclier lorsqu’il avait lancé un rayon cramoisi.

Seul, Kojou n’aurait probablement jamais pu éviter une attaque aussi peu orthodoxe.

Mais l’épée de Sayaka avait stoppé l’attaque à la vitesse de la lumière. Prenant bien soin de lui comme elle l’avait promis, elle agissait comme le bouclier de Kojou.

« Viens ici, Vassal Bestial Numéro Neuf : “Al-Nasl Minium”… ! » cria Kojou.

La chair du Vassal Bestial, en apparence chatoyante, donnait l’impression d’être comme une oscillation incroyable sans une forme donnée.

Les deux cornes qui sortaient de sa tête résonnaient comme un diapason, se propageant autour de lui en une vibration diabolique à haute fréquence. Cette vibration pourrait réduire les rochers en poussière, déchirer le métal. En termes de gêne pour les voisins, c’était sans conteste le plus affreux des Vassaux Bestiales.

Et le rugissement du cheval à deux cornes devint un barrage d’ondes de choc qui avait assailli le Nalakuvera.

L’énergie magique titanesque possédée par le Vassal Bestial du Primogéniteur avait transformé l’« oscillation » en une masse d’énergie physique et il l’avait pilonnée sur l’arme. Cela avait détruit l’arme des dieux jusqu’à ses entrailles. L’armure avait été brisée, l’endosquelette s’était fragmenté, et le changement radical de la pression de l’air avait chauffé l’air environnant à des milliers de degrés Celsius, brûlant la machine en cendre.

Frappé depuis une distance de plusieurs centaines de mètres, le Nalakuvera s’était arrêté.

« Oh, merde… Le pilote est mort à l’intérieur ? » demanda Kojou.

Il s’agissait de Kojou qui était hors de lui lors de l’attaque impitoyable du cheval à deux cornes.

Il devait y avoir un terroriste du Front de l’Empereur de la Mort Noire dans le Nalakuvera. Il ne pensait pas qu’on puisse survivre à une telle frappe, mais…

« La force vitale d’un homme bête est trop forte pour en mourir. Je ne pense pas qu’il bougera avant un moment, » cria Sayaka dans les oreilles de Kojou, troublé. « Plus important encore, les cinq unités là-bas ! Frappez-les avant que les pilotes n’entrent ! »

« C-Compris ! » déclara Kojou.

Sayaka montrait du doigt les Nalakuvera qui avaient été sortis de l’Oceanus Grave. En l’absence de pilotes, les unités étaient inertes, même maintenant. Si cela restait ainsi, il aurait dû être possible de les écraser sans aucune difficulté.

Cependant, lorsque la créature à deux cornes incandescente s’était déplacée pour attaquer l’essaim d’armes anciennes, son corps géant avait été frappé sur le côté par une explosion tout aussi géante.

« … Vraiment !? » s’écria Kojou.

Ce qui avait arrêté l’avance du bicorne, c’était un disque volant qui crachait des flammes. Il ressemblait beaucoup aux chakrams utilisés par un certain dieu de la bataille de la Chine occidentale. Et le chakram qui s’était violemment écrasé sur la créature à deux cornes explosa, l’enveloppant dans un tourbillon géant de feu.

Apparemment, le chakram fonctionnait vraiment comme un missile avec une ogive remplie d’explosifs.

Sa puissance était probablement égale ou supérieure à celle des missiles guidés pour attaquer les zones urbaines. Ce n’était pas assez de puissance pour vaincre d’un seul coup le Vassal Bestial du Primogéniteur, mais elle était certainement capable d’arrêter la charge de la créature bicorne.

Le Vassal Bestial incandescent ennuyé par l’attaque s’était débarrassé des flammes qui persistaient sur tout son corps.

La créature à deux cornes s’était ensuite dirigée vers le pont arrière de l’Oceanus Grave. Quelque chose d’énorme avait déchiré la coque du beau mégayacht et en avait émergé.

Cette chose était couverte du même type d’armure que le Nalakuvera, mais beaucoup, beaucoup plus grande. Elle avait huit pattes et trois têtes. Son torse était gonflé comme celui d’une reine fourmi. Des chakrams creusés dans les interstices de l’armure recouvrant le torse étaient présents, ressemblant à un système de lancements multiples de fusées…

Il lança une volée massive de chakrams vers la créature bicorne rugissante et menaçante.

« Kojou Akatsuki, à terre ! » cria Sayaka.

« Quoi… !? » s’exclama Kojou.

Sayaka avait déplacé son épée, créant une barrière défensive. L’air au-dessus de la barrière protégeant Kojou et Sayaka avait été rempli de flammes venant des explosions. La créature bicorne avait libéré sa propre onde d’oscillation pour contrer la volée de chakrams. Les deux puissantes forces s’étaient violemment affrontées, répandant d’incroyables destructions dans toute la région.

Tandis que le vent le secouait, Kojou leva les yeux, abasourdi.

Les dommages n’étaient pas limités au sous-flotteur no 13. Ayant perdu leur cible dans les flammes de l’explosion, plusieurs chakrams étaient tombés sur l’Île d’Itogami.

De grandes explosions avaient éclaté les unes après les autres. De la fumée noire s’était répandue de l’intérieur de la ville.

« Pourquoi… est-ce en train d’arriver… ? » demanda Kojou.

Kojou, tombant faiblement à un genou, s’était mis en colère et avait cogné fort contre le sol.

Les habitants des environs auraient dû être évacués par la garde de l’île. Mais cela n’avait pas changé le fait que des dommages s’étaient produits. Comme un véritable groupe terroriste, le Front de l’Empereur de la Mort Noire détruisait sans discernement la vie de personnes sans aucun lien de parenté.

La Reine Nalakuvera, déjà en mouvement, avait atterri doucement sur le sous-flotteur.

Les cinq autres Nalakuvera avaient également bougé.

Fonctionnant en parfaite synchronisation, ils avaient encerclé Kojou et Sayaka. Il ne fait aucun doute qu’ils étaient commandés par la reine Nalakuvera.

C’était donc la vraie forme des armes. C’était des armes destinées à combattre en tant qu’unité dans la poursuite d’objectifs opérationnels.

« Hmmmm… alors c’est la vraie force du Nalakuvera ? »

Tandis que Kojou broyait ses dents sans réfléchir, ses oreilles détectèrent la voix d’un homme qui venait de quelque part. C’était Vattler, marchant tranquillement au milieu de la fumée parfumée au charbon de bois.

« Tu m’as vraiment bien eu, Gardos, en gardant un atout comme ça dans ta manche. Qu’allez-vous faire, Kojou ? Je devrais peut-être le faire à votre place ? » demanda Vattler.

Vattler parla à Kojou avec ses crocs blanc sortie comme s’il s’agissait d’un défi. Même dans ces circonstances, l’homme snobinard se comportait avec une courtoisie particulière.

Kojou avait fait un bruit désagréable de sa langue et le regarda d’un air hostile.

« Je vous ai dit de ne pas vous en mêler, Vattler… ! J’en ai assez que tout le monde fasse ce qu’il veut ! » cria Kojou.

Comme s’il dépassait son point d’ébullition, le corps de Kojou avait été enveloppé d’une véritable colère. Les flammes avaient été allumées, réveillant l’esprit combatif qui se cachait en Kojou, faisant bouillir son « sang » de Primogéniteur.

« Je me fiche de savoir si c’est contre vos terroristes ou vos armes anciennes ou quoi que ce soit d’autre. À partir de maintenant, c’est mon combat ! » déclara Kojou.

Vattler regarda avec un sourire d’admiration l’aura menaçante qui enveloppait Kojou.

Et, aussitôt à droite de Kojou, une petite silhouette s’avança, comme si elle prenait naturellement sa place.

« … Non, Senpai. C’est notre combat, » déclara la fille nouvellement arrivée.

C’était une jeune fille en uniforme de collégienne, portant une lance en argent. Pour une raison ou une autre, Yukina Himeragi regardait Kojou d’un air renfrogné.

***

Partie 7

« H… Himeragi ? » Kojou avait crié son prénom en raison de la surprise.

Les yeux de Yukina étaient restés froids et sans expression alors qu’elle inclinait légèrement la tête.

« Oui, qu’est-ce qu’il y a ? » demanda Yukina.

« Euh, ah… pourquoi es-tu là ? » demanda Kojou, ressentant un malaise sans fondement mélangé à des sentiments de culpabilité.

Elle devait être sur l’Oceanus Grave avec Asagi et Nagisa jusqu’à maintenant. Cela voulait dire que ces deux filles avaient été évacuées vers un endroit sûr, et qu’en plus, elle avait pu le retrouver une fois de plus. C’était un bon travail dans un délai aussi court.

« Je suis une observatrice, après tout. Ton Observatrice, » déclara Yukina.

Pour une raison quelconque, Yukina avait mis l’accent sur cette dernière partie en tournant la pointe de sa lance vers Kojou. Son visage était resté sans expression lorsqu’elle avait regardé Kojou, Sayaka et la créature bicorne incandescente qui émergeait des flammes de l’explosion.

« Alors tu as apprivoisé un nouveau Vassal Bestial, Senpai. »

Yukina l’avait dit d’une voix froide et sans inflexion. Kojou avait dégluti et hocha la tête, rencontrant les yeux de Sayaka.

« O-Ouais. D’une façon ou d’une autre, des choses sont arrivées et cela s’est passé comme ça, » déclara Kojou.

« C-C’est vrai. C’est une urgence imprévue qui s’est produite, un véritable cas de force majeure, » déclara Sayaka.

Tandis que Sayaka baissait maladroitement les yeux, le bout de ses doigts tirait sur le col du parka qu’elle portait.

Yukina regarda son comportement avec un regard quelque peu surpris visible sur son visage.

« Je vois, » déclara Yukina.

Ils sont tous les deux sans espoir, avait-elle pensé, en poussant un long soupir. Elle avait repositionné sa lance d’argent, la dirigeant vers les Nalakuvera.

« Nous reporterons donc cette discussion à plus tard. D’abord, nous devons nous rapprocher d’eux, » déclara Yukina.

« D-D’accord, » faisons ça, faisons ça, acquiesça Kojou.

Yukina avait fait un autre bref soupir, regardant la gigantesque arme ancienne ramper sur le sol pendant qu’elle parlait.

« Senpai, Kristof Gardos est à l’intérieur de la Reine Nalakuvera, » déclara Yukina.

« Reine… Donc c’est leur unité de commandement ? » demanda Kojou.

Avant même que Kojou n’ait fini sa phrase, la reine des armes anciennes lâcha une autre volée de chakrams. Le rugissement de la créature bicorne les abattit, remplissant à nouveau l’air autour d’eux d’explosions de flammes.

Les cinq plus petits Nalakuvera avaient suivi l’attaque en dispersant des rayons cramoisi autour d’eux.

Sayaka avait désespérément abattu chaque rayon incandescent alors qu’ils attaquaient la zone autour de Kojou et les filles les unes après les autres.

Les attaques avaient mis le feu à la coque de l’Oceanus Grave, et le sous-flotteur sur lequel était Kojou et les autres avaient fait un craquement inquiétant. Il n’était guère surprenant que même le mur extérieur, construit de manière robuste, ait finalement atteint ses limites.

« Merde, ils deviennent tous fous… ! », déclara Kojou.

Kojou gémissait en se couvrant les oreilles devant les bruits incessants des explosions.

Sayaka respirait amplement tout en criant, « Kojou Akatsuki. C’est de pis en pis ! »

« Je le sais ! … Viens ici, Regulus Aurum ! » ordonna Kojou.

Kojou leva le bras droit en l’air, invoquant son autre Vassal Bestial.

Les éclairs lancés par le lion d’éclair dansèrent vers la formation ennemie, balayant les cinq armes anciennes en un instant.

Puis, comme un éclair, il avait chargé vers l’unité de commandement. Le corps géant de la reine Nalakuvera plongea dans la mer.

Le lion se déplaça pour poursuivre l’unité de commandement submergée.

« Senpai, non ! Si un tel éclair frappe l’eau… ! » cria Yukina.

Yukina s’était précipitée pour maîtriser Kojou. Cependant, à ce moment-là, la créature de tonnerre avait déjà terminé sa plongée vers la surface de la mer. Son courant électrique massif s’était répandu à la surface de l’océan, la chaleur provoquant une explosion massive de vapeur.

« Gwa... ! »

Un gigantesque jet d’eau s’éleva à des centaines de mètres dans les airs alors que l’onde de choc de l’explosion secouait le sous-flotteur. Kojou s’était senti mal à l’aise face à l’impact inattendu. Apparemment, la nature de Regulus Aurum en avait fait un Vassal Bestial impossible à utiliser sous l’eau.

« Alors, je vais le faire… ! »

Les attaques du chakram ayant cessé, la créature bicorne ainsi libérée avait hurlé. Ses cornes jumelles résonnèrent, amplifiant l’oscillation. L’impact avait fait trembler le sol et avait provoqué la formation de vagues géantes. C’était comme quelque chose de l’Ancien Testament, la mer se sépara, avec le Vassal Bestial incandescent au centre.

En regardant Kojou et les autres se battre, Vattler avait applaudi en faisant un « haha ! »

« Alors vous avez séparé la mer, Kojou ! Comme prévu d’un Vassal Bestial du quatrième Primogéniteur. C’est un très beau spectacle, » déclara Vattler.

« Ce n’est pas un spectacle ! »

En lançant un cri de colère contre les agissements idiots du jeune noble, Kojou avait continué avec des attaques plus féroces. La créature à deux cornes envoya des attaques d’ondes de choc vers le corps géant de la reine Nalakuvera, maintenant exposée. Ils étaient entrés en collision avec le fond de la mer maintenant sans eau, enterrant plus de la moitié de la grande arme ancienne et la maintenant en place.

La mer qui se séparait était après ça revenue à son état antérieur, avec les vagues violentes qui recouvrèrent la Reine Nalakuvera.

« Est-ce qu’on l’a eu… ? » murmura Kojou d’un ton léthargique. Le fait de contrôler deux Vassaux Bestiales à la fois était bien sûr épuisant mentalement. S’il lâchait son contrôle une seconde, ils peuvent devenir fous à tout moment.

Mais Sayaka gronda vivement un Kojou à moitié soulagé.

« Pas encore, Kojou Akatsuki ! » déclara Sayaka.

Son épée bougea rapidement, protégeant Kojou d’un rayon cramoisi venant d’en bas.

Les cinq Nalakuvera qu’il pensait avoir détruit avec Regulus Aurum était de nouveau en mouvement. Et de l’autre côté, la première unité, détruite par la créature à deux cornes, se levait, tout en ayant son corps encore brûlé de partout.

« Autoréparation… !!? Ils peuvent revenir même de ça !? » s’écria Kojou.

« Ce n’est pas tout. Ils ont modifié la composition de leur armure endommagée pour mieux résister aux vibrations et aux impacts. Ils ont analysé vos attaques et ont pris des contre-mesures contre eux, » déclara Sayaka.

Sayaka avait évalué la situation avec une expression calme. C’était la même chose que quand il avait bloqué sa danse de l’épée. Une fois qu’il avait subi une attaque ennemie, il avait appris et s’était modifié pour résister à cette attaque.

De plus, il semblerait qu’ils aient été en mesure d’échanger instantanément des informations avec d’autres unités de Nalakuvera par le biais d’un réseau commun. Même si un Nalakuvera était retiré du combat, les autres unités s’étaient déjà armées pour faire face à la même attaque. Et grâce à l’autoréparation des unités détruites, même elles étaient retournées sur la ligne de front.

« S’ils ont résisté à l’attaque de Regulus Aurum, c’est parce qu’ils l’ont déjà appris. Ils deviennent de plus en plus fort après avoir pris des coups… comment peut-on battre une chose pareille ? » demanda Kojou.

Kojou s’était rendu compte qu’il se sentait dépassé. Peu importe le nombre qu’il aurait détruit, ils se régénéraient. De plus, plus on les attaquait, plus les armes devenaient fortes. Peut-être avaient-ils vraiment le pouvoir de vaincre les Primogéniteurs.

Mais alors que le malaise s’emparait de Kojou, Yukina leva les yeux vers lui et lui fit un doux sourire.

« Non, Senpai. C’est bon, on va gagner, » déclara Yukina.

Tandis qu’elle parlait, elle avait sorti un petit smartphone violet clair.

Elle avait fait appel à l’intelligence artificielle qui ressemblait à un ours en peluche flottant sur l’écran LCD.

« … N’est-ce pas, Mogwai ? » demanda Kojou.

« Oh ouais. La contre-attaque se déroule selon les plans de Mlle Asagi, » déclara Mogwai.

« Asagi… ? » demanda Kojou.

Kojou était surpris face à la mention d’un nom inattendu. Que pouvait faire Asagi, censée être une lycéenne sans défense, contre une arme ancienne invincible ?

« Pendant qu’Aiba analysait les codes de commande du Nalakuvera, elle mettait au point en secret un nouveau code de commande, » expliqua Yukina.

« C’est un type de virus informatique… corrompant la fonction d’autoréparation du Nalakuvera pour qu’ils se détruisent eux-mêmes. Elle l’appelle “Les derniers mots”, » continua Yukina.

« Un virus… Était-ce facile à faire ? » demanda Kojou.

Bien sûr, Kojou était bien conscient qu’Asagi était une programmeuse brillante.

Cependant, l’adversaire n’était pas un ordinateur personnel ou une machine de jeu. C’était une arme des dieux, pas quelque chose créée par l’homme. Pour elle, d’avoir analysé des tablettes de pierre qui avaient résisté aux efforts des chercheurs du monde entier et utilisé leurs faiblesses pour planter un virus dans tout ça…

Le mot génie ne semblait pas suffisant pour décrire une telle tricherie. C’était de la folie pure et simple.

« Je dirais que cette jeune femme est la seule qui aurait pu le faire… La chance des terroristes a tourné quand ils ont mis en colère la Cyber Impératrice. Assurez-vous de ne pas trop faire surgir le mauvais côté de cette jeune femme. Ku-ku-ku-ku..., » déclara Mogwai.

Mogwai avait parlé sur un ton qui semblait taquin. Kojou haussa les épaules en silence.

« Alors, qu’est-ce qu’on est censés faire, Himeragi ? » demanda Kojou.

« Les Nalakuvera sont à commande audio. Si nous entrons dans la Reine Nalakuvera et utilisons le fichier audio d’Aiba, cela devrait les arrêter tous, » déclara Yukina.

Pendant qu’elle parlait, Yukina déplaçait son regard vers la mer. La grande arme ancienne, qui aurait dû être au fond de la mer, faisait surface juste après avoir terminé sa propre réparation.

« Alors, rentrez dans la grande… Euh, comment ? Ils vont nous couper en morceaux. Si nous pouvions les empêcher de bouger un peu…, » avait gémi Kojou alors que sa prémonition désespérée le dévorait.

Les deux Vassaux Bestiales de Kojou s’étaient déjà déplacés pour les protéger. Ils avaient les pattes et les sabots occupés contre une tempête de chakras venant vers eux ainsi que les tirs incessants de lasers de gros calibre.

Les attaques des Vassaux Bestiales auraient peu d’effet maintenant que les Nalakuvera les avaient appris.

Pour l’instant, ils repoussaient encore l’ennemi avec une force brute écrasante, mais cette supériorité ne durerait sûrement pas longtemps.

Kojou pensait que lui et les filles qui s’approchaient de la reine Nalakuvera en chair et en os dans ces circonstances n’étaient rien de moins qu’un suicide.

S’ils pouvaient les détruire encore une fois, en faisant une ouverture pendant qu’ils se régénéraient, ils pourraient y arriver, mais…

Tout comme Kojou serrait ses dents sur son impuissance…

« Je vais bloquer le Nalakuvera, Yukina, » déclara Sayaka.

Sayaka s’avança, ses longs et beaux cheveux se balançant derrière elle.

« Kirasaka ? » demanda Kojou.

« Vous comprenez bien, Kojou Akatsuki ? S’ils évoluent en fonction de nos attaques, nous n’avons qu’une seule chance. Si Yukina et moi allons face à ça, nous brûlerons toutes deux, » déclara Sayaka.

Saisissant son épée de la main gauche, Sayaka l’avait poussée vers l’avant.

La lame d’épée argentée s’était soudainement fendue vers l’avant et vers l’arrière. En utilisant la partie reliée à la poignée comme point d’appui, la moitié de la lame fendue s’était tournée de 180 degrés. Tirant une corde d’arc en argent tendue, cela s’était transformé en une arme entièrement nouvelle.

« … Un arc !? » s’écria Kojou.

Kojou avait fait entendre une voix d’admiration. L’épée de Sayaka était maintenant transformée en un magnifique arc argenté et arqué. Il avait la forme moderne et occidentale d’un arc recourbé.

Soulevant sa propre jupe, elle avait sorti une flèche en métal à partir d’un étui en cuir enroulé autour de sa cuisse.

« Der Freischötz. C’est la vraie forme de mon arme…, » déclara Sayaka.

D’un mouvement doux et beau, elle avait placé une flèche et avait tiré sur la corde de l’arc avec force.

« … Moi, Danseuse du Lion, Archère du Dieu Suprême, je vous en conjure, » un chant cristallin coulait des lèvres de Sayaka.

L’énergie rituelle qui jaillissait dans son corps amplifiait encore la puissance de l’arc alors qu’elle pointait la flèche d’argent vers le ciel.

Sayaka avait dit que son arme avait deux capacités. La première était d’annuler les attaques physiques avec une barrière défensive absolue. Si c’était le cas, quelle était l’autre… ?

« Cheval flamboyant très brillant, illustre Kirin, celui qui gouverne le tonnerre céleste, transperce ces mauvais esprits de votre colère… ! » déclara Sayaka.

Sayaka avait lâché sa flèche d’argent.

S’envolant d’un son strident en fendant l’air, ce qui ressemblait à une voix de plainte s’était transformé en un coup de tonnerre menaçant. Ce son aigu était la véritable capacité de Der Freischötz, l’arc magique maudit.

« … Son !? »

Kojou, lui aussi, avait réalisé la calamité que la flèche magique avait causée. La flèche que Sayaka avait lâchée ne visait pas le Nalakuvera. La flèche d’argent était en réalité une flèche sifflante, une flèche rituelle libérant un grand son pour chasser les démons.

Sayaka avait chanté dans un rituel comme elle avait utilisé le projectile magique comme voix. Le cri de la flèche sifflante avait enveloppé tout le champ de bataille de son charme, dessinant un cercle magique géant et invisible sur un kilomètre de rayon.

Puis, l’énorme miasme s’était répandu sur les armes anciennes, neutralisant leurs fonctions mécaniques.

« Senpai ! » cria Yukina.

La lance d’argent de Yukina avait étincelé pendant qu’elle fonçait.

Le miasme était si puissant que même les armes des dieux ne pouvaient y résister. La vie d’un humain normal qui s’y baignait serait sûrement perdue. Il n’était pas clair si les vampires pouvaient quand même y résister. Mais la lance de Yukina, capable de couper n’importe quel pouvoir magique, avait neutralisé le miasme.

Kojou s’était aussi mis à courir en la suivant. Ils n’avaient qu’une cible : la reine Nalakuvera.

Mais elle avait déjà appris les attaques des Vassaux Bestiales de Kojou. Alors que devrait-il faire… ?

« Allez, c’est fini… Regulus Aurum ! Al-Nasl Minium ! » cria Kojou.

À cet instant, la vue de Vattler fusionnant ses deux Vassaux Bestiales s’était précipitée du fond de l’esprit de Kojou.

En l’état actuel des choses, Kojou était incapable d’un tel exploit. Mais si c’était une simple attaque simultanée…

Le lion d’éclair et le cheval bicorne incandescent se soulevèrent, résistant au miasme, et attaquèrent la reine Nalakuvera. Ce n’était pas de la foudre. Ce n’était pas une onde de choc. Il s’agissait d’une énorme pression explosive engendrée par les attaques simultanées de la gauche et de la droite. C’était le but de Kojou.

N’ayant pas appris cette attaque, même cette arme des dieux ne pouvait pas la supporter. En n’ayant nulle part où s’enfuir, la super haute pression avait écrasé l’armure de l’énorme arme ancienne, écrasant bruyamment son cadre intérieur.

Grâce à la mise hors service de la reine, les petits Nalakuveras qui les entouraient devinrent également inertes.

Ce n’était pas un coup mortel. Mais jusqu’à ce qu’il ait fini de se réparer, ce n’était rien d’autre que des tas de ferraille.

« … Ha-ha-ha-ha, la guerre, c’est tellement amusant, Chamane Épéiste ! »

Kojou et Yukina entendirent la voix de Gardos venant d’en haut. Le vieil officier bestial avait ouvert le cockpit de la Reine Nalakuvera, sortant avec le corps couvert de sang.

Sans doute voulait-il les combattre même en chair et en os. Gardos avait sorti son couteau et il le tenait dans sa main gauche.

Alors que la folie de la bataille le tenait dans ses griffes, Yukina leva les yeux vers lui et secoua la tête, comme si elle avait pitié de lui.

« Ce n’est pas une guerre. Vous n’êtes qu’un simple criminel. Quelqu’un comme vous qui n’avez pas de pays à protéger n’a pas le droit de parler de guerre ! » murmura Yukina.

Le murmure de Yukina avait fait trembler le sourire de Gardos. Kojou s’était rendu compte qu’une seule phrase d’une jeune fille « impuissante » avait gravé une défaite décisive dans le cœur de l’officier âgé.

Gardos chargea vers Yukina, rugissant de rage.

Yukina n’avait même pas bougé sa lance, ne faisant pas le moindre mouvement de son corps.

Une flèche volante et tombante perça l’épaule gauche de Gardos, l’étourdissant. Bien sûr, Sayaka avait tiré la flèche. Et de plus :

« … C’est fini, vieil homme ! » cria Kojou.

Kojou enfonça avec force son poing dans le ventre vulnérable de Gardos.

Kojou l’avait encore frappé. Et encore une fois. Il faisait le premier coup pour avoir enlevé Asagi et Nagisa, et un coup de plus, pour Yukina.

Finalement, le corps massif de Gardos tomba doucement au sol, alors que ses forces semblaient épuisées.

Les Vassaux Bestiales, eux aussi, avaient finalement atteint les limites de leur constitution robuste.

« Brisez vous par vous-même, Nalakuvera. » Yukina, en montant dans le cockpit maintenant vide, avait fait jouer le fichier audio qu’Asagi avait fourni.

Laissant derrière eux des voix frêles et pleurnichardes, toutes les armes anciennes étaient tombées au sol comme des arbres pourris.

Incapables de résister aux impacts de chutes, des fissures avaient parcouru l’armure des Nalakuveras. Ils ressemblaient à des blocs rocheux fortement érodés, produisant finalement un grand bruit quand leurs corps géants s’étaient ouverts. C’était le travail du programme qu’Asagi avait fait.

En envoyant leur fonction d’autoréparation dans la folie, les Nalakuvera s’étaient démantelés. Enfin, toutes les armes anciennes s’étaient effondrées en poussière, emportées par le vent dans la mer, disparaissant totalement.

L’ensemble du processus avait pris moins de cinq minutes.

 

***

 

« … Ça vous pose un problème, Vattler ? »

Kojou regarda d’une manière léthargique vers l’arrière lorsqu’il posa sa question. Le jeune aristocrate de l’Empire du Seigneur de Guerre, qui n’avait même pas transpiré, venait de s’approcher, tapant dans ses mains avec un « bravo ! »

« Ahh, pas du tout. Vous m’avez bien satisfait, Kojou. Je crois que je ne m’ennuierai pas avant un moment, » répondit Vattler.

« Ah ? »

La soif sanguinaire de Kojou s’était accrue lorsqu’il avait laissé entendre que lorsqu’il s’ennuierait à nouveau, il provoquait un tout nouvel incident.

Vattler n’avait rien remarqué quand il s’était approché de Gardos tombé au champ d’honneur.

« Puis-je arrêter les membres du Front de l’Empereur de la Mort Noire ? Ils seront punis selon les lois de l’Empire du Seigneur de Guerre. Ils ont coulé mon bateau après tout, je me sentirais mal si je n’en faisais pas au moins ça, » déclara Vattler.

« … Faites ce que vous voulez, » déclara Kojou.

Kojou avait accepté la déclaration égoïste de Vattler d’un geste de la main agacé. Si Kojou refusait, Vattler exigerait simplement que le gouvernement japonais extrade lui-même les criminels. S’il voulait s’occuper des retombées, il valait mieux tout laisser entre ses mains.

Ayant perdu tous les Nalakuvera, le Front de l’Empereur de la Mort Noire ne représentait plus aucune menace. Pour Kojou et les autres, leur devoir était accompli.

« Oh oui. Ne vous inquiétez pas, ils ne seront pas exécutés. Je trouverais si ennuyeux de tuer un puissant ennemi qui essaie de me tuer, ils sont si précieux, » déclara Vattler.

Alors que Vattler laissait tomber cette déclaration troublante juste avant de partir, Kojou sentit son mal de tête s’aggraver d’autant plus.

Apparemment, cet homme n’avait absolument rien appris. Il chercherait sûrement un autre ennemi pour venir lui chercher des poux et un jour, il se lancerait dans un incident similaire. Kojou ne pouvait que prier pour qu’il ne soit pas pris dedans.

Et il y avait une raison de plus pour laquelle l’esprit de Kojou était accablé…

« Alors tu as sucé le sang de Sayaka, n’est-ce pas, Senpai ? » demanda Yukina.

Yukina leva les yeux vers Kojou pendant qu’elle demandait, alors que ses yeux étaient un lac très profond.

Kojou avait retenu son souffle. C’était la situation dont il avait le plus peur. En premier lieu, en tant qu’observatrice de Kojou, Yukina avait reçu l’autorisation d’éliminer Kojou selon son propre jugement.

Il avait sucé le sang de son amie là où Yukina ne pouvait pas voir. Il serait naturel que Yukina s’enflamme à ce sujet. Il avait espéré que s’il ne disait rien, peut-être que ça ne sortirait pas, mais sans surprise, cet espoir était vain.

« Ah, euh… Non, c’est ah, eh bien…, » balbutia Kojou.

« Une situation d’urgence. Oui, c’était une situation d’urgence, Yukina, » déclara Sayaka.

Kojou et Sayaka, côte à côte, s’étaient désespérément excusés. Yukina était sans expression en les regardant.

« Est-ce que c’est le cas ? » demanda Yukina.

« C’est vrai, c’est vrai. Nous avons été ensevelis sous terre avec des débris obstruant la sortie et de l’eau arrivait sur nous, ce qui nous aurait tués d’ici peu, » déclara Kojou.

La réaction calme et inattendue de Yukina avait encore plus troublé Kojou et Sayaka.

« T-Tout a fait. À ce rythme-là, j’ai cru qu’on allait se noyer. Le fait de penser qu’on devrait te le cacher était juste…, » déclara Sayaka.

« Pourquoi êtes-vous tous les deux si nerveux ? » leur demanda Yukina d’une voix calme et posée. Puis, Yukina avait déplacé son regard de façon inattendue vers Sayaka.

« Maintenant que j’y pense, Sayaka, c’est le parka de Senpai, n’est-ce pas ? » demanda Yukina.

Sayaka avait fait un son « hiuuu » pendant que tout son corps était figé.

« Tu te trompes, Yukina. Cet homme m’a soudain imposé son parka contre mon gré…, » déclara Sayaka.

« Euh, attends, » déclara Kojou à haute voix en direction d’elle.

« Je n’ai pas eu besoin d’agir avec force pour vous le mettre sur le dos ! Et n’avez-vous pas aimé recevoir le traitement d’une princesse royale !? » demanda Kojou.

« Espèce d’idiot ! Pourquoi dites-vous quelque chose comme ça maintenant ? » s’écria Sayaka.

Avec un bruit d’ennui, Sayaka commença à frapper le front de Kojou. Yukina l’avait regardé fixement pendant un certain temps alors que les deux s’engageaient dans ce qui ne pouvait être considéré que comme une querelle d’amoureux.

« Je suis contente que vous vous entendiez si bien. Mais je serais contrariée si tu avais sucé le sang de Sayaka contre sa volonté, Senpai, » déclara Yukina.

Finalement, elle poussa un soupir très profond. Kojou tourna maladroitement la tête et regarda Yukina.

« Alors… tu n’es pas en colère maintenant… non ? » demanda Kojou.

« Non. Pas du tout. Pas même un tout petit peu, » répondit Yukina.

Yukina avait fait un sourire tendu. En le voyant, Sayaka était tellement soulagée qu’elle s’était effondrée par terre.

C’était une démonstration de faiblesse ce qui donnait l’impression que ses vaillants combats antérieurs n’étaient qu’un mirage. Tandis que Sayaka s’accrochait à elle en disant : « Je suis si contente », Yukina caressa doucement la tête en disant : « Voilà, voilà. »

Quand Kojou les avait vues en agissant d’une manière si intime, Kojou poussa un soupir de soulagement, il rencontra soudain les yeux de Yukina qui le regardait droit dans les yeux. Yukina avait un joli sourire pendant qu’elle parlait.

« … Ce n’est pas comme si je pensais à la façon dont Senpai m’a traitée de mignonne quand il a sucé mon sang ! » déclara Yukina.

***

Épilogue

C’était un hôtel de luxe à l’intérieur de Porte de la Clef de Voûte, se trouvant dans la section centrale de l’Île d’Itogami. Dimitrie Vattler s’était assis dans une chaise élégante, regardant les invités dans le hall d’entrée aller et venir.

Il sentit alors quelqu’un marcher lentement derrière lui. C’était une petite personne, sans doute. Faisant des pas légers qui semblaient ne pas avoir de poids en eux, la personne s’était assise sur une chaise avec son dos tourné vers Vattler.

Comme un peu de temps passait sans que rien se produise, la personne avait finalement demandé à Vattler avec un murmure comme si elle parlait à elle-même. « … Avez-vous terminé votre investigation ? »

C’était la voix d’une jeune fille. Même si le ton de la voix était respectueux, cela n’avait pas l’air formel.

On aurait dit qu’elle souriait en le taquinant.

« Oh oui. Le fait d’être un diplomate a ses avantages, » répondit Vattler.

Vattler ne regarda pas non plus dans sa direction, ne répondant à personne en particulier.

« Cela fait longtemps, “Bruit du Papier”… ou devrais-je m’adresser à toi en tant que premier des Trois Saints de l’Organisation du Roi Lion ? » demanda Vattler.

« Vous êtes libre d’utiliser l’un ou l’autre, » répondit l’autre.

Elle avait laissé échapper ce qui semblait être une expiration effrayante en réponse à sa formalité exagérée.

Vattler avait fait un rire sarcastique en lui posant une question.

« Qu’est-ce qui t’amène aujourd’hui ? Mais si tu es venu pour me tuer, je t’invite à essayer ? » déclara Vattler.

« Malheureusement, cela doit attendre une autre occasion. Aujourd’hui, je suis simplement venue apporter le document que vous avez demandé… Et si je peux vous demander une seule chose ? » demanda l’autre.

Il l’avait sentie sortir une mince enveloppe. « Hmm, » fit le jeune aristocrate, l’exhortant à continuer.

Après une pause momentanée et silencieuse, elle avait posé sa question. « A-t-il mis en marche ce complot du Front de l’Empereur de la Mort Noire ? »

C’était comme si elle avait peur de former le nom avec ses propres lèvres.

Vattler s’était enfoncé dans son fauteuil, ferma les yeux, et choisit ses mots avec beaucoup de soin.

« J’ai causé tout ce tumulte pour mon amusement personnel. Restons-en là. C’est bon, il reste encore un peu de temps, » déclara Vattler.

« Vraiment ? » demanda l’autre.

Un poids semblait lui avoir été enlevé des épaules à mesure que son timbre reprenait son éclat normal. Elle était sur le point de se lever sur cette note quand Vattler l’avait appelée nonchalamment : « Au fait, est-il sûr de dire que tu as gagné ton pari ? »

« Mon Dieu ! » Elle murmura, sa voix ressemblant à celle d’un enfant surpris en train de faire une farce.

« C’est ce que vous avez remarqué, » déclara la femme.

« Oh, bien sûr, » Vattler se replaça sur sa chaise, faisant un bruit d’orgueil avec sa gorge.

« Elle est tombée amoureuse de lui étonnamment vite. Quand j’ai entendu dire qu’elle détestait les hommes, je n’étais pas sûre de ce qui pouvait arriver, » déclara la femme.

« Si tu connaissais notre objectif, pourquoi coopérer ? » demanda Vattler.

Elle inclina légèrement la tête.

« Si l’on désire un repas savoureux, il faut au moins engraisser le gibier de façon appropriée. Un tel festin raréfié ne devrait pas être consommé avant qu’il ne soit bien cultivé, » déclara l’autre.

Vattler fit un sourire de plaisir apparent, ses crocs aiguisés sortant de ses lèvres.

« Il n’y a rien de mal à ce que nos intérêts mutuels coïncident cette fois-ci. On espère que tout se passera si bien la prochaine fois, » déclara Vattler.

« Je suis d’accord, » répondit l’autre.

Réajustant le bord de la jupe de son uniforme d’écolière en se levant, elle s’était éloignée sans même jeter un coup d’œil sur lui.

S’entrelaçant avec la vague de personnes dans le hall d’entrée, elle avait immédiatement disparu de sa vue.

Sayaka Kirasaka avait fini de s’occuper de l’hébergement à la réception et était retournée dans le hall d’entrée.

En chemin, elle était passée à côté d’une fille au visage inconnu. C’était une collégienne, portant des lunettes et un livre sous le bras. Ce qui lui avait sauté aux yeux et l’avait fait regarder la jeune fille, c’est le fait qu’elle portait le même uniforme du collège que Yukina.

Mais n’accordant plus d’attention particulière, Sayaka se dirigea vers le jeune aristocrate dont l’apparence se détachait beaucoup plus.

« Désolée de vous avoir fait attendre, Duc Ardeal, » déclara Sayaka.

« Ah, bon retour parmi nous. Comment était-ce ? » demanda Vattler.

Vattler brossait ses cheveux blonds vers l’arrière, regardant une lettre qu’elle n’avait jamais vue auparavant quand il le lui avait demandé.

« Aucun problème, quel qu’il soit. La pièce est apparemment prête, » déclara Sayaka.

Sayaka s’exprimait sur un ton digne d’un homme d’affaires. Elle avait remplacé son uniforme d’école trempé par une veste et un pantalon gris d’allure très adulte. Grâce à sa taille, elle ressemblait beaucoup à une cadre d’entreprise. Vattler avait demandé à Sayaka de prendre les dispositions nécessaires pour qu’ils restent dans cet hôtel.

Comme l’Oceanus Grave avait été coulé dans la tourmente des combats, ils avaient besoin de toute urgence d’un endroit pour passer la nuit.

C’était une demande très soudaine, mais aussi tordue qu’il était, Vattler était encore un grand noble de l’Empire du Seigneur de Guerre, alors l’hôtel avait préparé une suite royale aussi vite qu’il pouvait le faire. Bien que Vattler lui-même ait été profondément intrigué à l’idée de rester debout toute la nuit dans un restaurant familial 24 h/24 et 7 j/7, elle avait réussi à l’en dissuader et à le traîner jusqu’ici.

« Je vous remercie. Excusez-moi, je vous demande de prendre les dispositions pour l’hôtel. Je suis à court de majordomes compétents en ce moment, » déclara Vattler.

« … Je suis votre observatrice, après tout, » répondit Sayaka.

Sayaka était en colère alors qu’elle se souvenait encore une fois de l’imprudence de Vattler en engageant un majordome qui était un terroriste cherchant activement à le tuer.

« Et si je prenais un billet d’avion pour le retour ? » Sayaka avait demandé avec le désir implicite qu’il quitte le Japon dès que possible. Maintenant que son précieux paquebot de croisière avait coulé, un avion serait la seule chose que Vattler pourrait utiliser pour rentrer dans son pays natal.

Maintenant qu’il avait atteint son objectif d’appréhender le front de l’Empereur de la Mort Noire, il n’avait plus de raison de rester sur l’île Itogami.

Cependant, déclara Vattler, d’un ton complètement indifférent… « Ahh, pas besoin de ça. »

« Hein ? » demanda Sayaka.

« Je n’y retournerai pas, » déclara Vattler.

Sayaka regarda Vattler stupéfait, comme s’il était un enfant faisant une déclaration égoïste.

Réprimant désespérément son désir de crier, Sayaka avait forcé sa voix à sortir calmement. « Qu’entendez-vous par… ? »

« Une lettre vient d’arriver, pendant votre absence. Vous voyez ? » déclara Vattler.

Vattler avait retiré une sorte de lettre fantaisiste de l’enveloppe.

Il s’agissait d’un document officiel délivré par le gouvernement japonais qui consentait officiellement à la création d’une ambassade. En d’autres termes, le gouvernement japonais avait officiellement autorisé l’Empire du Seigneur de Guerre à ouvrir une ambassade dans le sanctuaire des démons de la Cité d’Itogami.

L’ambassade serait dirigée par l’ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire, le duc d’Ardeal, Dimitrie Vattler…

Maintenant, il pourra continuer à rester sur l’Île d’Itogami aussi longtemps qu’il le voudra, sur la même île que Kojou Akatsuki, le quatrième Primogéniteur.

« Je suis sûr que vous recevrez un nouvel avis de nomination dans les plus brefs délais. Meilleures salutations, maintenant et dans l’avenir, » déclara Vattler.

Vattler avait souri en prononçant les mots. Sayaka avait simplement posé ses mains sur sa tête et avait soupiré.

***

Ce soir-là…

Asagi Aiba s’était réveillée dans une pièce éclairée par le soleil couchant rouge qui semblait persister.

Ses cheveux scrupuleusement entretenus étaient en désordre, et son apparence raffinée était plus jeune qu’éblouissante. Elle portait ses boucles d’oreilles turquoise. Kojou regarda nerveusement son visage tandis que ses yeux flous levaient les yeux vers le plafond.

« Tu es consciente, Asagi ? » demanda Kojou.

« … Kojou ? » demanda Asagi.

Asagi avait crié le nom de Kojou d’une voix un peu cassée. Une expression de soulagement était apparue sur son visage, alors que son sourire larmoyant habituel revenant finalement sur ses lèvres.

« Ça veut dire que tu regardais mon visage pendant que je dormais ? » demanda Asagi.

« Au moins, appelle-le “s’occuper de toi” ! Bon sang, » répliqua Kojou.

Les lèvres de Kojou se tordirent avec un sourire tendu. Il craignait qu’elle n’ait souffert d’un traumatisme psychologique du fait de son enlèvement, mais si elle était en train de lui reprocher ça dès qu’elle avait ouvert les yeux, elle n’était probablement pas mal.

« Où suis-je ? » Asagi s’était assise pendant qu’elle parlait.

« L’infirmerie de l’école. Par contre, c’est celui du collège, » répondit Kojou.

Il avait mieux pensé à l’ajouter, car la salle de l’infirmerie du lycée était toujours fermée à cause de la fusillade d’Astarte.

« … Le Nalakuvera ? » demanda Asagi.

La voix d’Asagi s’était durcie en raison d’un malaise. Kojou haussa vaguement les épaules.

« Tous détruits. Un vampire s’est déchaîné et les a tout écrasés. Natsuki a dit que c’était grâce au virus que tu as trouvé, » déclara Kojou.

« Je vois. Natsuki nous a sauvés, n’est-ce pas ? » demanda Asagi.

« Ouais, » répondit-il.

Cette fois, Kojou fit un signe de tête ferme. Techniquement, ce n’était pas un mensonge.

Comme on pouvait s’y attendre, Asagi s’était effondrée sur le lit de soulagement.

« Nagisa et l’autre ? » demanda Asagi.

« Elles sont sorties manger quelque chose. Elles n’avaient rien mangé depuis le petit déjeuner. Il vaudrait peut-être mieux que tu aies aussi quelque chose dans le ventre. Ils prendront ta déposition plus tard, » déclara Kojou.

« Uwaa… quel ennui… ! » s’exclama Asagi.

Asagi se retourna sur le lit. Kojou avait fait un sourire tendu à sa façon typiquement impolie de parler.

« C’est Himeragi qui m’en a parlé. On dirait que c’était plutôt dur, » déclara Kojou.

« Ouais. J’ai dû un peu utiliser ma tête… mais… ah, d’accord, Himeragi, hein… ? » demanda Asagi.

Elle s’arrêta de bouger, regardant Kojou de côté.

« Alors pourquoi es-tu ainsi ? Tu as du sang sur ton uniforme et tu pues la sueur, » déclara Asagi.

« Hein !? C’est que j’étais vraiment énervé quand j’ai appris que tu avais été kidnappée, alors je suis tombé à la mer ? » déclara Kojou.

Même pour Kojou, c’était de minces excuses, mais c’était un regard de pitié qui était apparu sur le visage d’Asagi.

« Hmm… il y a une montagne de choses que je veux te demander à toi et Himeragi plus tard, mais c’est bon. Ne t’inquiète pas. Je te pardonne, juste pour aujourd’hui, » déclara Asagi.

« Difficile de rester tranquille comme on dit, mais…, » déclara Kojou.

Le murmure agacé de Kojou n’avait jamais quitté l’intérieur de sa bouche.

« Ah, c’est vrai. Il y a une chose que je dois absolument te dire, » déclara Asagi.

Après avoir dit ça, Asagi se leva avec force du lit. Kojou avait fait un regard suspicieux en réponse alors qu’elle s’agenouillait sur le dessus du lit en forme classique japonaise. Il était un peu tendu, sentant que quoi que fasse Asagi, rien de bon n’en sortirait.

« Qu’est-ce qu’il y a ? » demanda Kojou.

« Avant ça, pourrais-tu jeter un œil à cette boucle d’oreille ? La pierre n’a-t-elle pas l’air un peu lâche ? » demanda Asagi.

Asagi leva les yeux vers Kojou alors qu’elle touchait l’un de ses lobes d’oreille. Ne te donne pas trop de mal, pensa Kojou, s’approchant d’elle avec sa garde baissée.

« Ce côté ? » demanda Kojou.

À l’instant où il regarda le visage d’Asagi, elle avait saisi le visage de Kojou des deux mains. Alors…

« … !? »

Soudain, en sentant quelque chose de doux s’appuyer sur ses lèvres, le souffle de Kojou s’arrêta.

Tous les sons avaient disparu du monde.

Bien qu’énergique, c’était un baiser gênant. Leurs deux respirations s’étaient mélangées.

La tête de Kojou s’était vidée. Il ne savait pas combien de temps passait.

Quand il était revenu à la raison, Asagi était de retour en position agenouillée au sommet du lit.

Ses yeux étaient légèrement humides alors qu’elle souriait.

« Alors, c’est comme ça, » déclara Asagi.

Asagi avait souri en parlant, comme si elle cachait un rougissement. Même si son ton était le même que d’habitude, Kojou ne pouvait que hocher la tête, choquée par la façon dont elle avait exprimé ce qui était, selon ses critères, des sentiments très sérieux.

« … D-D’accord, » murmura Kojou.

La lumière du soleil couchant rendait les joues d’Asagi rougeoyantes. La brise qui soufflait par la fenêtre l’entraînait vers l’avant.

Alors qu’elle semblait se brosser les cheveux de la joue avec irritation, son cou svelte fut exposé.

Et les yeux d’Asagi s’élargirent quand elle regarda Kojou.

« Attends un… K-Kojou !? Vas-tu bien !? Kojou !? » s’écria Asagi.

Elle cria de peur devant la force du sang qui jaillissait du nez de Kojou.

À ce moment, la porte de l’infirmerie s’était ouvert avec deux filles portant des uniformes du collège qui émergèrent l’une à côté de l’autre. Réalisant que quelque chose ne tournait pas rond à cause de la voix alarmée d’Asagi, elles avaient jeté un coup d’œil à travers l’espace des rideaux au coin du lit.

« A-Asagi, tu es réveillée !? Je suis si contente que tu sois… Hé, Kojou. Qu’est-ce que c’est !? Un saignement de nez !? Bon sang, ça fait beaucoup de choses qui sortent ! Qu’est-ce que vous avez tous les deux ? » demanda Nagisa.

Nagisa Akatsuki était dans un état de confusion quand elle avait crié. Asagi semblait rougir un peu en sortant la langue.

« Hmm, je me le demande. Peut-être devrais-je… m’entraîner pour le festival sportif ? » demanda Asagi.

« Ehh... ? »

Un regard suspicieux s’était posé sur le visage de Nagisa alors qu’elle regardait entre le visage de son frère aîné et celui de son amie.

Kojou, la main encore appuyée sur sa bouche couverte de sang, accepta gracieusement la boîte de mouchoirs qui lui était offerte de côté. Il s’était essuyé le visage et la main sale quand le saignement s’était finalement atténué. Alors qu’il touchait un mouchoir plié à son nez…

 

 

« … Je t’ai dit d’y réfléchir, n’est-ce pas, Senpai ? » demanda Yukina.

Entendant la voix de Yukina, qui semblait être une lame glacée, il toussa violemment cette fois-ci.

Les grands yeux de Yukina étaient inopinément proches, avec son regard tourné vers Kojou.

Kojou, complètement perdu, secoua désespérément la tête.

« Attends, tu as dit d’y réfléchir, mais ce n’est pas le même problème ici…, » déclara Kojou.

Pour une raison faible, la voix de Yukina était faible, comme celle d’une enfant qui boude.

« Tu es vraiment sans espoir, Senpai, » déclara Yukina.

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Illustrations

Fin du tome 2

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