Chapitre 5 : Feu impitoyable
Partie 7
« Seigneur… Vous êtes enfin là. »
Genou était apparu après qu’ils aient achevé André. Il était vêtu d’un body noir et d’une capuche noire. Sa tenue de ninja rendait les traits de son visage indiscernables. Mais le regard aiguisé qui émanait d’un petit trou dans son masque et le murmure bas de sa voix indiquaient clairement qu’il s’agissait de Genou.
« Tu l’as trouvé ? », demanda Ryoma.
Genou acquiesça sèchement.
« Bien sûr. Je les ai aussi mis en sécurité, et je me suis assuré que des gardes les escorteraient jusqu’au port. »
La tâche de Genou était de sécuriser les demi-hommes capturés. Genou et ses hommes avaient nagé dans la baie depuis le cap ouest. Comme il s’agissait de leur occupation principale, les ninjas d’Igasaki avaient parfaitement rempli leur mission. Ils s’étaient faufilés sous le couvert de l’obscurité de la nuit, et avaient pu s’infiltrer dans la ville sans nom par la mer.
Genou avaient découvert la prison où étaient détenus les demi-hommes, et avait attendu le signal de Ryoma avant d’y entrer.
« Bon travail. Ensuite, nous nous dirigeons vers le port et passons à la phase suivante. On dirait que le groupe de Sakuya est déjà en train de se déplacer. »
À l’extérieur de la fenêtre, des flammes s’élevaient de chaque direction, et les rues de la ville sans nom tombaient dans un état de chaos frénétique.
« Seigneur Boltz fait sceller l’escalier de la falaise… Du moment où nous nous emparerons du port, les habitants de cette ville n’auront nulle part où aller. »
« Bien. Donc tout se passe comme prévu, » dit Ryoma, ses lèvres se recroquevillant dans un sourire froid.
Ryoma n’aimait pas du tout le meurtre, mais il était plus que prêt à y recourir si la situation l’exigeait.
Que cette ville pécheresse brûle… ! Il n’y a ni bien ni mal ici. Tout sera réduit en poussière…
C’était une ville qui s’était développée grâce au piétinement des faibles. Elle ne pouvait être occupée que par des gens qui vivaient de cette façon. Ryoma ne pouvait pas imaginer une idée plus déformée.
Pour lui, cette ville était un lieu qui n’aurait jamais dû exister. Personne ne devrait vivre dans un tel endroit. Tout cela n’était qu’un tremplin dans le parcours de Ryoma.
Je vais devenir plus fort… Je le jure !
La haine s’était enflammée chez Ryoma. Une colère sans fond, juste, contre ce monde déraisonnable et furieux.
Les sœurs Malefist le suivant, Ryoma courut dans les rues alors que la fumée noire et les cris tourbillonnaient tout autour d’eux. Il faisait cela pour mettre fin à tout. Des cris et des hurlements de colère résonnaient de toutes parts.
« Shigesuke, regroupe-toi avec Sakuya. Koutarou, viens avec moi. Nous chassons les traînards. »
Genou avait rapidement donné des ordres, et les ombres autour d’eux s’étaient rapidement dispersées dans différentes directions.
Ryoma et les sœurs Malefist avaient tué André, l’un des trois chefs pirates. Le problème était les deux autres.
Maintenant, la question est de savoir où ils fuiront…
Le clan Igasaki s’était déjà emparé de la plus grande partie de la ville lors de leur première attaque, il serait donc difficile de s’échapper. Mais l’ennemi n’était pas assez fou pour penser qu’ils s’en sortiraient vivant s’ils se rendaient.
Dans ce cas, ils n’avaient que deux chemins à prendre pour s’échapper. L’escalier de la falaise, qui était gardé par Boltz, ou la mer, et par extension le port.
« Maître Genou… Nous avons trouvé les deux autres. Ils se dirigent vers le port. »
Un des hommes que Genou avait envoyé en avant était revenu, ce qui avait poussé le vieux ninja à courir vers le port alors que la ville brûlait autour de lui. Et alors que la mer bleue et étincelante se présentait, Genou pouvait entendre le bruit des armes qui s’entrechoquaient.
« C’est… » Se dit-il à lui-même.
Apparemment, leurs soldats affrontaient les pirates. Genou envoya un signe de la main aux ninjas qui le suivaient, et l’instant suivant, des kunais volèrent, perçant le dos des pirates.
*****
Dans la ville citadelle d’Epire. Un homme traversa les ruelles crasseuses et entra dans un hôtel de passe. Le grand homme lança sans mot une pièce d’argent sur le comptoir de la réception. Il portait une cagoule, comme pour cacher son identité. Le propriétaire de l’établissement, qui était en train de nettoyer la cuisine, avait simplement regardé l’homme des yeux et lui indiqua qu’il pouvait monter, lui signalant le deuxième étage.
Il n’avait pas demandé qui était l’homme. Toute l’affaire avait été arrangée au préalable.
« Chambre 204. »
Alors que le grand homme se dirigeait vers l’escalier, le propriétaire de l’hôtel lui murmura cela dans le dos. Après avoir dit ce qu’il voulait, le propriétaire détourna le regard et retourna à son affaire. Son attitude lui fit comprendre que, dans son secteur d’activité, il fallait adopter une approche « ne pas voir, ne pas entendre, ne pas parler. »
De nombreux clients avaient visité l’établissement avec l’intention de ne pas être vus ici. Et bien que ce soit un motel, certaines personnes n’y venaient pas nécessairement avec des personnes du sexe opposé. Pour tous, le propriétaire était concerné, mais tant qu’il était payé, les détails n’avaient pas d’importance. Il savait que le secret d’une longue vie était de ne pas se mêler des affaires des autres. Le démon de la curiosité pouvait emporter la vie d’une personne avec une rapidité déconcertante.
Ainsi, le propriétaire prenait simplement la pièce que l’homme avait laissée sur le comptoir, la mit dans son portefeuille et renvoya son regard vers la cuisine. Si on lui demandait ce qu’il avait vu ce jour-là, il répondrait probablement ainsi :
« Une auberge comme la mienne n’a pas de clients. »
*****
« Cela fait trop longtemps, Seigneur Mikoshiba. J’ai entendu dire que vous vous êtes débarrassé des pirates il n’y a pas si longtemps. Félicitations. »
Lorsque l’homme entra dans la pièce dont le propriétaire avait parlé, il fut accueilli par Simone, qui se leva de la chaise et baissa la tête respectueusement. Elle était vêtue d’une robe rouge avec un décolleté profond, et ses lèvres étaient teintées d’un cramoisi brillant avec du rouge à lèvres. La jupe de sa robe était ouverte sur les côtés, ce qui permettait aux yeux de Ryoma de bien voir ses jambes blanches.
Ce jour-là, Simone s’était montrée avec une tenue aussi sensuelle et dégénérée que celle des prostituées qui se promenaient dans les rues. Même ceux qui la connaissaient hésiteraient à dire que c’était la même personne que la femme qui dirigeait la compagnie Christof.
« Oui, ça fait un moment, Simone… Les nouvelles vous parviennent aussi vite que jamais. »
Il venait à peine de rapporter au comte Salzberg et à sa femme son succès dans la lutte contre les pirates, et pourtant Simone le savait déjà. Ryoma enleva sa capuche, révélant un sourire amer et quelque peu exaspéré.
« Les rumeurs circulent depuis un mois environ déjà. La baisse soudaine des activités des pirates était la preuve qu’il fallait. Et puis j’ai appris que vous étiez retourné à Epire. »
Simone termina son explication et regarda Ryoma avec un sourire.
Après un certain jour, il y a un mois, elle avait cessé d’entendre des histoires sur la façon dont les gens étaient blessés par les raids de pirates. Naturellement, les commerçants les plus perspicaces avaient rapidement commencé à recueillir des informations, et Ryoma voyait en Simone à la fois une fournisseuse et une espionne. Entre toutes les informations qu’elle avait recueillies jusqu’alors et le retour de Ryoma en Épire, elle était rapidement arrivée à la bonne conclusion.
« Mais vraiment, Simone, tu as certainement choisi un endroit intéressant pour une rencontre. », dit Ryoma avec un sourire ironique en plongeant son corps dans le canapé.
Simone lui rendit son sourire avec le sourire fantasque d’un enfant qui avait réussi une farce. En se rencontrant face à face à ce moment, ils risquaient d’éveiller les soupçons du comte Salzberg. C’était dans cette optique que Simone avait évoqué cet hôtel comme un lieu qui leur permettrait d’éviter d’attirer l’attention sur eux.
Quand bien même il possédait le bas rang de baron, Ryoma était encore un noble. Simone était également la présidente par intérim d’une grande compagnie qui, bien qu’elle soit actuellement en perte de vitesse, avait autrefois dirigé le syndicat d’Epire. Cet endroit était bien trop miteux pour que les gens de leur position puissent se rencontrer.
« Mais c’est un endroit parfait pour un rendez-vous clandestin. »
Mais c’était en effet un bon endroit pour éviter les regards indiscrets. C’était un quartier de la ville qui n’était pas aussi douteux qu’illégal, mais on pouvait s’en tirer à bon compte ici à condition de payer une belle somme.
C’était donc l’endroit idéal pour éviter les espions que le comte Salzberg avait placés sur eux deux. Même si Ryoma était inquiet, il pouvait toujours ignorer les accusations en disant qu’il avait passé son temps avec une prostituée. Après tout, sortir pour acheter les services d’une femme était une bonne raison de cacher son identité. Soit dit en passant, Simone était censée être cloîtrée dans sa succession, se remettant d’une maladie.