Wortenia Senki – Tome 5 – Chapitre 3

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Chapitre 3 : Le leader du Nord

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Chapitre 3 : Le leader du Nord

Partie 1

Une unique voiture heurta les dalles alors qu’il avançait. Celle-ci finit par s’arrêter devant l’entrée du domaine du comte Salzberg, situé dans le sud d’Epire. Le soleil s’était déjà couché et l’endroit était éclairé par des bougies.

La voiture noire à deux chevaux n’était que très peu décorée à l’extérieur. Elle n’était ni miteuse ni simple, car son extérieur était poli et bien entretenu, mais elle ne pouvait certainement pas être qualifiée de magnifique.

En un mot, elle semblait privilégier la fonctionnalité plutôt que l’apparence. Et franchement, cela ne semblait pas être le genre de véhicule qu’un noble pourrait utiliser. Mais son propriétaire ne s’en souciait guère. Ayant la tâche devant lui de développer la péninsule de Wortenia, les apparences étaient la dernière chose qui le préoccupait.

« Voilà, monsieur. »

Mike, qui accompagnait Ryoma en tant que conducteur de la voiture, lui ouvrit la porte.

Ryoma descendit de la voiture et s’avança sur le chemin, se retournant pour faire face à une rangée de serviteurs qui baissaient la tête pour le saluer.

« « « Nous vous souhaitons la bienvenue, Baron Ryoma Mikoshiba. » » »

Ils s’étaient inclinés en un seul mouvement fluide. C’était un accueil parfait effectué par les serviteurs d’une maison noble. Et comme si leurs paroles les incitaient, deux personnages apparurent à la porte du domaine.

« Mes respects, Baron Mikoshiba ! », dit un homme en écartant les mains dans un geste de bienvenue.

C’était le maître de ce domaine et le souverain de la citadelle de la ville d’Epire, le comte Salzberg. Il mesurait plus de cent quatre-vingts centimètres et semblait avoir la trentaine. À l’approche de la quarantaine, son instinct commençait à se manifester. Mais peut-être qu’en raison de son rôle de dirigeant d’une ville frontalière, sa position et sa force étaient clairement celles d’un guerrier.

J’ai entendu dire que la maison des Salzberg remonte à la fondation de Rhoadseria, mais apparemment, ce n’est pas seulement un noble stupide et décontracté… Mais pourquoi est-il si cordial envers moi ? Il me donne la chair de poule…

En termes de titre, Salzberg était un comte alors que Ryoma était un baron, il était deux rangs au-dessus de Ryoma. Ils étaient tous deux nobles de Rhoadseria, c’est vrai, mais leurs positions n’étaient en aucun cas égales. Ryoma était comme un employé promu au poste de chef de section, tandis que le comte Salzberg était comme le supérieur d’un directeur de succursale.

On n’était pas au Japon, dans un pays où le système de classes avait été aboli. Pour le meilleur ou pour le pire, il y avait une hiérarchie claire et distincte entre les deux. Ryoma était un vagabond qui avait été promu au statut de noble, tandis que le comte Salzberg était un noble d’une maison célèbre. Le fait d’être accueilli aussi chaleureusement frappa Ryoma, c’était vraiment quelque chose d’exceptionnellement étrange.

Je devrais me méfier de cet homme…

Ryoma mit à l’épreuve sa conscience. Il avait mal jugé les intentions de la reine Lupis, il serait donc naturel qu’il fasse preuve de prudence. Ce n’était pas comme s’il avait l’intention de le laisser paraître sur son visage, bien sûr. Ryoma sourit largement et baissa la tête respectueusement, tout comme Laura et Sara lui avaient appris à agir en présence d’autres nobles.

« Veuillez accepter mes plus humbles excuses pour cette visite soudaine. Je suis peut-être jeune, mais j’espère que nos futures relations seront mutuellement avantageuses, comte Salzberg. »

La tenue que Ryoma portait ce jour-là était loin d’être voyante. Il avait encore beaucoup d’argent provenant de la mort du marchand d’esclaves Azoth, mais en considérant l’avenir, il devait économiser autant d’argent que possible. Dans cette optique, insister pour commander des vêtements spéciaux lui semblait être du gaspillage.

Les nobles devaient cependant tenir compte de leur dignité et de leur honneur. Ryoma pensait que s’en préoccuper était une chose insensée, mais même lui réalisa que rencontrer un noble dans sa chemise et son pantalon noirs en chanvre habituel serait inapproprié. S’attirer des ennuis pour une chose aussi simple que le fait de ne pas être habillé pour l’occasion n’aurait aucun sens.

C’était pourquoi Ryoma s’était vêtu d’une belle chemise et d’un pantalon en soie noire, retenus par une ceinture avec une boucle dorée. Il avait également une cape qu’il portait à l’extérieur. Mais pour un noble, c’était le minimum absolu. Il n’avait que le minimum de manières requises.

Mais le comte Salzberg ne semblait pas mépriser Ryoma pour son apparence.

« Non, non, je suis honoré qu’un héros de la guerre civile vienne visiter mon humble demeure. La maison Salzberg est une famille de guerriers, je suis donc fier de vous avoir. Je m’excuse cependant de ne pas avoir beaucoup de choses à vous offrir. Votre visite a été un peu soudaine, mais nous vous avons préparé un bon dîner. Vous trouverez peut-être mon hospitalité un peu insuffisante, mais profitez de tout ce que nous pouvons vous offrir. »

Cela dit, le comte Salzberg prit la main de Ryoma et le fit entrer.

« Vos paroles me touchent beaucoup… Je vous en suis très reconnaissant. »

Ryoma baissa rapidement la tête.

« Mais non, mais non, lève la tête et viens par ici. Permettez-moi de vous présenter à ma femme. Vas-y, Yulia, présente-toi », dit le comte Salzberg en incitant la jeune femme épanouie derrière lui à s’avancer.

Elle semblait approcher de la trentaine. Ses cheveux tressés étaient d’une brillante couleur dorée. Elle mesurait environ un mètre soixante-dix et avait des membres voluptueux et attrayants. N’importe quel homme se ferait voler son cœur par son apparence séduisante. C’était effectivement une femme envoûtante. Ryoma ne manquait cependant pas le reflet intellectuel dans ses yeux.

« Mes respects, Baron Mikoshiba. Le voyage depuis la capitale a dû être très éprouvant. Si vous n’avez rien de pressant, vous pouvez vous reposer ce soir dans notre domaine. N’est-ce pas, chéri ? »

Le comte Salzberg fit un signe de tête magnanime aux mots de Dame Yulia.

« Comme le dit ma femme, j’espère que cette visite vous permettra de vous reposer de votre pénible voyage. Après tout, une fois que vous serez entré en Wortenia, il n’y aura plus de villages ni de villes pour vous reposer… Vous n’aurez pas d’autre choix que de faire venir du ravitaillement d’Epire dans un avenir proche. C’est au nom de notre amitié en tant que personnes qui règnent sur les terres voisines ! De plus, j’espère que cette amitié puisse durer le plus longtemps possible. »

« Euh… alors, j’accepte volontiers votre invitation… J’espère que vous serez en mesure de me guider dans mes futures fonctions. »

Ryoma baissa doucement la tête pour compter.

Hmph… Il a déjà compris mes intentions. D’après ce qu’il dit, il est prêt à m’aider avec les fournitures… La première chose à faire est de comprendre ses intentions.

Les yeux de Ryoma brillèrent fortement.

« Maintenant, venez, Baron Mikoshiba. J’ai ordonné à mon chef cuisinier de préparer un festin spécial pour vous accueillir. Malheureusement, ma terre se situe dans une région assez reculée par rapport à la capitale, nous n’avons donc pas beaucoup de spécialités locales. Mais c’est une terre généreuse, heureusement, nous possédons donc beaucoup de choses. Profitez-en. », dit le comte Salzberg.

Confirmant que Ryoma avait pris place, le comte ordonna le début du banquet. Sur ses paroles, les portes s’ouvrirent et les servantes entrèrent, poussant des chariots alignés avec de la vaisselle.

« Tout cela est très… »

Ryoma fut surpris par les nombreux plats posés sur la table. Du poulet, du bœuf, du poisson et un cochon rôti entier étaient servis comme plats principaux, entourés d’une abondance de salades, de fruits de mer et de légumes. Des fruits froids refroidis par des morceaux de glace étaient servis dans des coupes en or, remplissant les narines de Ryoma de l’agréable parfum froid des fruits de saison.

Seules trois personnes étaient assises à une table qui pouvait accueillir au moins vingt personnes. Et tous les plats étaient des délices qui n’étaient en rien inférieurs à ce qui était servi à Ryoma à Pireas pendant la fête célébrant la fin de la guerre civile.

Combien d’argent avait été gaspillé pour cette fête ? En tant qu’invité, Ryoma ne pouvait pas s’empêcher de se poser cette question avec un soupçon d’inquiétude.

« Non… Je suis un peu hors de moi et j’ai honte ici », dit le comte Salzberg en se grattant les cheveux.

« Un invité de la capitale ne le sait peut-être pas, mais il est de coutume ici de saluer les invités avec plus de nourriture qu’ils ne peuvent en manger… Cela ne me dérange pas si vous considérez cela comme une coutume stupide de l’arrière-pays. »

« Non… Je suis simplement surpris que vous organisiez un tel festin pour un arriviste comme moi. Je vous suis très reconnaissant, Comte Salzberg. »

« Ahaha ! Un arriviste, dites-vous ! Pas besoin de modestie, Baron Mikoshiba. Vos exploits dans la dernière guerre sont variés et grands. J’ai entendu dire que la reine Lupis vous faisait confiance… Pendant la guerre civile, je ne pouvais pas me permettre de quitter cette terre à cause de la menace d’une invasion de Xarooda. »

Le comte Salzberg avait conclu ses propos avec un soupçon d’autodérision.

« J’ai peur que ce soit vous qui soyez trop modeste, comte Salzberg. Je crois sincèrement que c’est votre protection du Nord qui a permis à la guerre civile de se terminer sans l’intervention d’un autre pays. », répondit Ryoma avec un sourire forcé.

« Bien-aimé, je crois que l’on a déjà suffisamment discuté. As-tu l’intention de faire manger un repas froid à notre invité ? »

Yulia réprimanda son mari.

« Oh ! Mes excuses… Le verre du baron Mikoshiba est-il vide ? Remplissez-le tout de suite ! »

Sur ordre du comte, du vin rouge fut versé dans le verre de Ryoma.

« Bon, très bien… Levons nos verres à l’épanouissement de la Maison Mikoshiba ! À la vôtre ! »

Ryoma descendit le verre. La première chose qu’il sentit fut le riche arôme qui remplissait sa bouche. Il fut bientôt accentué par un goût légèrement épicé et stimulant. Après avoir savouré le vin pendant deux ou trois secondes supplémentaires, l’arôme épais du vin emporta ses papilles gustatives. Enfin, il sentit la sensation agréable du vin glisser dans sa gorge, aussi lisse et élancé que de la soie de qualité.

Ce raisin est étonnant… Ce doit être un vin de grande qualité.

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Partie 2

Un lycéen comme Ryoma ne serait normalement pas très intéressé par les subtilités du vin, surtout un vin comme celui-ci, qui était si éloigné des bouteilles bon marché que l’on pouvait trouver dans un magasin de proximité. Mais en raison de la nature désinhibée de son grand-père, Ryoma avait goûté à l’alcool durant sa vie au Japon, et en avait bu quotidiennement depuis son arrivée dans ce monde.

Et d’après son expérience, le vin que le comte lui servait était du plus haut calibre possible. Il était fait de bons raisins cueillis à la main et produit par les meilleurs vignerons. Il avait reçu de bons vins pendant son séjour à Pireas, et ceux-ci n’étaient en rien inférieurs à cela.

Entre la cuisine et le vin… Quel ce qu’il veut de moi ? Non, oublie ça, d’où lui vient tout ce luxe ? La simple richesse peut-elle vraiment se permettre tout cela ?

On pourrait en dire autant des plats qui leur étaient servis. Les ingrédients étaient excellents, cueillis à la main et garnis des meilleures épices. Même s’il voulait accueillir Ryoma chaleureusement, c’était bien trop extravagant pour un baron débutant.

Est-ce de cette façon qu’ils reçoivent normalement… ?

Ryoma jeta un coup d’œil furtif au comte Salzberg, qui était heureux de manger.

Sa tenue est aussi assez voyante… Elle a un design élaboré, et est faite de soie de haute qualité… Ses ornements sont également incroyables.

Ryoma n’était pas jaloux de l’homme, mais il est indéniable qu’en termes de tenue, ils faisaient un étrange contraste.

Mais bizarrement, il n’y avait rien de vulgaire chez lui…

Fidèle à son statut de noble né, le comte Salzberg portait des ornements avec pierres précieuses qui mettaient en valeur sa position. Les boutons de sa chemise étaient ornés de perles, et la broche de sa poitrine était conçue sous la forme d’une fleur élaborée. Mais comme ils étaient tous très voyants, Salzberg avait réussi à les faire paraître naturels.

Bien sûr, en termes d’éclat, la robe qui ornait la femme à ses côtés, Yulia, dépassait de loin sa tenue. Elle avait un design original et frappant qui couvrait tout son corps, mais mettait quand même à nu son décolleté. Le tissu blanc s’harmonisait bien avec ses cheveux dorés.

Elle avait une petite couronne d’argent sur la tête, et ses doigts étaient ornés de bagues de rubis et de saphir. Un grand collier de diamants pendait à son cou. Dans l’ensemble, elle donnait l’impression d’une pierre précieuse ciselée en forme de femme.

Du point de vue d’un homme moderne, elle semblait trop décorée. Mais regarder Dame Yulia sourire chaleureusement juste devant lui donnait à Ryoma une impression de dignité noble, ainsi que la beauté équilibrée d’un bijou.

Au moins, on n’a pas l’impression qu’ils font semblant… Ils sont habitués à cela.

Il y avait beaucoup de gens qui prenaient des airs pour que les autres ne les regardent pas de haut. Mais la plupart de ces gens n’étaient pas capables d’entretenir correctement cette façade, ce qui permettait aux autres de dire facilement qu’ils faisaient semblant. C’était la différence entre le simple fait de revêtir les vêtements d’un noble et le fait de les porter vraiment naturellement.

Mais le comte Salzberg et dame Yulia n’avaient pas donné l’impression que c’était une façade. Ils semblaient parfaitement naturels.

Mais si c’est vrai…

Cela soulevait la question suivante : comment le comte Salzberg avait-il obtenu et maintenu tout ce luxe ? Leurs tenues étaient vraiment de grande classe et il était évident au premier coup d’œil qu’elles devaient coûter une fortune. Leurs repas correspondaient aux fêtes de la capitale.

Cela… n’a pas de sens. Les impôts seuls ne suffisent pas à maintenir ce mode de vie. Et si c’est le cas…

Ryoma n’en était pas certain. Il n’avait pas encore d’informations, mais si ce qu’il avait à l’esprit était vrai…

Je suppose que ça dépendra de ce que les autres peuvent trouver…

« Ooh. Vous ne semblez pas avoir beaucoup d’appétit, Baron Mikoshiba. La nourriture ne vous convient pas ? » demanda le comte Salzberg à Ryoma, qui se tut après avoir bu un peu de vin.

« Il doit être épuisé par ce long voyage. Est-ce que la viande a un peu trop de graisse… ? Anne, donnez au baron des fruits froids. Je suis sûre qu’il aimera. », fit remarquer dame Yulia.

Une servante plaça une coupe en or pleine de fruits devant Ryoma.

« Mes excuses, je ne voulais pas vous inquiéter », dit Ryoma, en apportant une orange froide de la coupe dans sa bouche.

En fait, il ne faisait que contempler les choses, mais il n’était pas enclin à corriger le malentendu de Salzberg.

« Vous devez vraiment être fatigué… J’ai entendu dire que vous étiez un guerrier de première classe, le baron Mikoshiba, mais il faut un demi-mois, même à cheval, pour atteindre Epire depuis la capitale. Je suppose que c’est logique. », dit le comte Salzberg.

« Bien-aimé ! Vous êtes grossier… Je suis sûre qu’avoir été fait noble si soudainement doit être épuisant pour lui. N’est-ce pas, baron ? »

Dame Yulia jeta un regard attentionné sur Ryoma.

« Oui… C’est trop soudain, » dit Ryoma tout en prenant un morceau de bœuf dans son assiette et en le portant à sa bouche.

« J’ai vécu comme un roturier jusqu’à présent, donc je ne suis pas sûr de savoir comment gérer le fait de régner sur un territoire… »

« Je vois… Mais j’ai entendu dire que vous étiez très intelligent et plein d’esprit », répondit le comte Salzberg.

« Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour vous aider. Notre domination sur les territoires adjacents doit être une sorte de coup du destin. Je suis sûr que nous nous entraiderons à l’avenir… Hmm ? Quelque chose ne va pas avec votre nourriture ? »

Le comte Salzberg avait soudainement regardé Ryoma avec suspicion alors qu’il mâchait la viande.

« Non… Le sel est juste un peu plus puissant que ce que j’avais imaginé. Entre le sel et les épices, c’est tellement différent des saveurs fades que je connais de la capitale. »

Les épices mises à part, le sel était une denrée assez rare sur cette Terre. Le sel était fondamental pour la vie quotidienne, mais ce monde n’avait pas de salières ni de mine de sel. Les territoires qui étaient proches de la mer avaient une source de sel, mais le comte Salzberg n’aurait pas dû avoir de terres qui correspondaient à cette description. Cela signifiait qu’il avait soit réussi à extraire du sel gemme, soit qu’il l’avait fait venir d’une autre terre.

« Ahaha. Je suppose qu’un homme trop habitué à la monotonie de la capitale pourrait se sentir ainsi. »

Ryoma avait alors choisi d’aller à l’essentiel. Son objectif était, bien sûr, de secouer le comte Salzberg.

« Je crois qu’aucune des terres que vous gouvernez ne soit adjacente à la mer… Avez-vous trouvé une veine de sel gemme ? Ou bien avez-vous fait du commerce avec les territoires voisins pour l’obtenir ? »

« Non, en fait… » Le comte Salzberg était sur le point de répondre à la question de Ryoma avec un sourire, mais…

« Oui, précisément… Nous avons trouvé une grande veine d’halite l’année dernière. »

Dame Yulia lui coupa la parole.

« Oh. C’est plutôt une chance. Je ne peux pas dire que je ne suis pas envieux. »

Ryoma accepta ses mots avec un sourire.

Il n’avait pas l’intention de critiquer le couple ici.

Le sel, hein… Voici encore un autre sujet que je devrais examiner… se dit Ryoma en avalant une autre bouchée de bœuf bien salé.

Le dîner s’était terminé sans incident trois heures plus tard, après quoi Ryoma et le comte s’étaient installés dans un salon. Ils discutèrent de sujets insignifiants et approfondirent leur amitié. Le comte Salzberg ouvrit une bouteille de vin très précieuse, au moment où dame Yulia commença également à participer à la conversation. Le couple ne faisait preuve d’aucune des vanités que Ryoma attendait de la noblesse et l’accueillit chaleureusement tout au long de la conversation.

À l’approche de la nuit, Ryoma s’apprêta à partir. Le comte Salzberg insista pour qu’il passe la nuit dans son domaine. Ryoma accepta par courtoisie. Alors que les servantes le conduisaient à sa chambre, il ne put s’empêcher de pousser un soupir.

Les meubles étaient tous fabriqués de main de maître, les rideaux et les draps étaient bien sûr en soie de haute qualité. Les murs et les étagères possédaient des peintures et des vases qui laissèrent une impression saisissante même à Ryoma, qui était détaché des arts. La chambre n’était pas sans rappeler la chambre d’une suite d’hôtel haut de gamme. C’était une véritable montagne de trésors.

« Je me demande s’ils me reprocheront d’en avoir pris un », chuchota Ryoma en se jetant dans le grand lit et en attrapant un des vases qui se trouvaient à son chevet.

Comme il allait bientôt devoir développer son territoire, il était très pressé par l’argent. Être dans cette chambre était donc mauvais pour le cœur de Ryoma.

Je suppose que c’est la preuve de la force de son économie… Mais quand je l’ai examiné dans la capitale, la seule chose que j’ai trouvé, c’était que ces territoires ne produisent rien de très remarquable…

Quelque chose n’allait vraiment pas dans l’attitude du comte Salzberg et de dame Yulia. En apparence, ils semblaient être un couple gentil et amical, mais Ryoma ne pouvait pas s’empêcher de penser que ces deux-là cachaient quelque chose en coulisse.

« Baron… Puis-je entrer ? » une voix de femme délicate avait soudain jailli de derrière la porte de la chambre.

« Oui… Qu’est-ce qu’il y a ? La porte n’est pas fermée. »

« Merci… Monsieur. »

Avec la permission de Ryoma, la porte s’était ouverte et une femme de ménage était entrée dans la chambre.

« Le comte vous a-t-il demandé de faire ça ? »

Ryoma avait compris la situation dès qu’il avait vu la façon dont la bonne était habillée.

« Ah… Euh… La Dame m’a dit de… Baron… »

La peau de la servante était cachée derrière un déshabillé blanc, assez transparent pour laisser entrevoir le soutien-gorge et la culotte rose qui se trouvaient en dessous. C’était un spectacle très sensuel et séduisant. Mais un regard sur ses épaules qui frissonnaient et sur la façon dont son expression semblait être troublée ferait comprendre à n’importe quel homme la signification de sa tenue.

 

***

Partie 3

« Cela vous causerait-il des ennuis si j’insistais sur le fait que ce n’est pas nécessaire ? », demanda Ryoma.

L’expression de la femme de chambre se teint de désespoir.

« Ah ! Euh… Je suis, euhh… Eh bien… Ce sera ma première fois, mais… Ah… Je vais faire de mon mieux pour… Euh… Est-ce que je suis… pas belle… ? »

Peut-être que la façon dont il l’avait dit était un peu trop brusque, parce qu’elle avait vraiment insisté. En voyant son visage rougir, il était impossible de la repousser.

« Vous êtes belle… Venez ici. », dit Ryoma aussi doucement que possible, pour ne pas l’effrayer.

Bien sûr, Ryoma n’avait pas d’expérience avec les femmes. Mais devenir timide ici porterait atteinte à sa dignité.

« Oui… »

La servante prit timidement sa main tendue.

Entendant sa réponse délicate, Ryoma tira doucement son corps contre le sien. Et alors qu’il le faisait, un léger arôme floral remplit ses narines. Peu de temps après, les bougies de la pièce furent soufflées et l’obscurité tomba sur la pièce. (NdT : Petite pensée sincère pour les jumelles ici.)

*****

Alors que Ryoma Mikoshiba profitait d’une nuit d’amour dans sa chambre, dans une autre partie du manoir, le comte Salzberg et dame Yulia avaient une conversation privée.

« Ma parole… Peut-être n’aurions-nous pas dû être aussi accueillants », se plaignait le comte Salzberg à sa femme en sirotant le thé.

« Ce garçon a-t-il vraiment assez de valeur pour égaler toutes les extravagances que nous avons dépensées pour lui ? »

Le sourire agréable qu’il affichait pendant le dîner et jusqu’au moment où il escorta Ryoma à sa chambre était parti sans laisser de trace. Son expression était remplie de l’arrogance et du mépris d’un noble à l’égard de la populace.

« Oui… Eh bien, il couche apparemment avec la bonne, alors je dirais que tout va en notre faveur », dit Lady Yulia avec un sourire.

Le comte Salzberg dirigea un regard amer sur sa femme.

« Tu vois, c’est ce qui me déplaît ! J’avais des vues sur cette fille, et tu la jettes à cet arriviste ?! »

Il était peut-être naturel pour le comte Salzberg d’exprimer clairement son mécontentement après avoir fait attribuer à un autre homme une servante qu’il désirait ardemment, mais dame Yulia ignora ses plaintes comme s’il s’agissait de la chose la plus insignifiante qu’on puisse imaginer.

« Est-ce vraiment important ? Nous pouvons te trouver plus de bonnes que tu n’en auras pour toute une vie… Et de toute façon, tu t’ennuierais avec elle dans le mois qui suit. »

Il y avait un soupçon d’exaspération et de reproche dans ses paroles.

Le fait que le comte Salzberg soit un coureur de jupons lubrique avait été une source constante d’inquiétude pour elle.

« Ce n’est pas la question ! Même si je me lasse d’elle et que je la rejette, je ne tolérerais pas qu’un autre homme la prenne ! Et je n’ai même pas encore posé la main sur elle… Bon sang ! Les femmes comme elle ne sont pas faciles à trouver ! »

Cela dit, le comte Salzberg prit une autre gorgée de thé, ses pieds frissonnaient de colère. Son irritation ne se calmera probablement pas avant un moment.

« Bien… Je vais demander à mes hommes de chercher une autre fille demain. »

« Je suis sûr que cela va de soi, mais je n’ai pas besoin de femmes d’occasion ! »

« Oui, oui, bien-aimé, ne t’inquiète pas… Je trouverai une fille à ton goût. »

Retenant son désir de rouler des yeux, dame Yulia essaya d’apaiser le comte.

Je te jure… Pourquoi son appétit sexuel doit-il être si odieux ? Il y a beaucoup d’esclaves et de femmes professionnelles qu’il pourrait appeler, mais il continue à chercher des vierges inexpérimentées… Et au bout de deux ou trois fois, il s’en lasse et les vend à des esclavagistes…

Le fait de penser à la préférence de son mari pour les vierges lui donnait un regard glacial. S’il devait avoir des concubines pour laisser des héritiers, elle pourrait accepter que cela fasse partie du devoir d’un noble. Mais le comte Salzberg ne faisait cela que pour assouvir sa convoitise. Il traînait toutes les jeunes femmes qu’il avait à portée de main, mais ne les faisait jamais devenir ses concubines. Même si elles concevaient des enfants, il ne leur permettait jamais d’accoucher.

Au bout de quelques semaines, un mois au mieux, il mettait de côté n’importe quelle fille. C’était ce qui finissait toujours par arriver. Même si cette Terre était un monde où les forts se régalaient des faibles, peu de gens appliquaient cette règle de manière aussi flagrante que cet homme.

Il était le pire mari possible et la pire personne avec laquelle on pouvait espérer s’associer. Mais le comte Salzberg n’avait jamais laissé ces aspects de sa personnalité remonter à la surface.

Je ne peux pas me permettre de gagner sa colère maintenant… Peu importe l’absurdité des choses qu’il dit…

Dame Yulia avait dû sacrifier beaucoup de choses jusqu’à ce jour. Abandonner à ce stade n’était pas une option.

« Hmph, bien… Les restes de ce roturier ne m’intéressent pas, de toute façon… »

Décidant qu’il s’était suffisamment plaint pour le moment, le comte Salzberg prit une profonde respiration et s’enfonça dans le canapé.

« Était-il cependant nécessaire de lui parler de la mine ? Ce n’était pas seulement pour attirer son attention, pas vraie ? »

Ses yeux, jusqu’alors obscurcis par la luxure charnelle, brillaient fortement. C’était peut-être un homme méprisable, mais c’était un dirigeant et un commandant habile. S’il ne l’était pas, il ne serait pas capable de gouverner cette zone frontalière et de contenir les aspirations militaires de Xarooda.

« Hmm… Je suppose que ce n’était pas tout à fait nécessaire… Mais je pense qu’il était bon de le faire. Il ne voulait pas avaler aveuglément tout ce qu’on lui disait… Il ne nierait pas nos paroles, mais il ne nous croirait pas non plus. Et si la question du sel l’intéressait, il s’en occuperait tout seul. Dans ce cas, le cacher ne signifierait pas grand-chose. Au contraire, cela pourrait le dissuader de s’y intéresser. »

Lady Yulia pouvait dire que Ryoma Mikoshiba n’était pas un homme ordinaire.

C’est un homme difficile… Tout au long du dîner, il a recueilli des informations discrètement, pour qu’on ne le remarque pas.

Elle avait pu en prendre connaissance grâce à ses propres compétences de commerçante avisée. Le comte Salzberg, cependant, s’était moqué de l’évaluation que sa femme faisait de cet homme.

« Hmph… Je doute qu’il soit aussi malin. Comment pourrait-il le savoir, de toute façon ? Ce n’est qu’un épéiste mercenaire qui a bien agi pendant la guerre civile. Comment ferait-il pour savoir où nous trouvons notre sel ? J’ai entendu dire que les soi-disant serviteurs qu’il a sont des sales mercenaires qui ont travaillé avec lui pendant la guerre civile, et qu’il les a fait nommer chevaliers par force. La seule chose pour laquelle les gens comme ça sont bons, c’est la guerre. »

Du point de vue du comte Salzberg, Ryoma n’était qu’un jeune homme bien bâti. Sur les conseils de dame Yulia, il l’accueillit aussi généreusement que possible, mais au fond de lui, il méprisait Ryoma.

Avec son physique, c’était probablement un guerrier habile… Mais à voir son visage, il n’avait pas l’air très intelligent.

Il semblait droit et recueilli, mais pas du tout brillant. Son comportement amical semblait indiquer une faiblesse de caractère, tandis que son attitude douce semblait manquer de détermination. L’opinion du comte Salzberg sur le jeune homme était qu’en dehors de son corps, il était tout à fait inacceptable.

« Je suis d’accord, il n’apparaissait pas comme une personne extrêmement intelligente, mais il n’y a tout simplement aucune possibilité que cela soit vrai », déclara dame Yulia.

« Tch… Oui, j’ai entendu les rumeurs… »

Le comte Salzberg claqua la langue de manière audible aux paroles de sa femme.

« Mais qui peut dire si elles sont vraies. Si tu veux mon avis, il a juste demandé la faveur d’Helena Steiner. Après tout, elle était appelée la déesse blanche de la guerre depuis plus de dix ans. Je ne serais pas surpris qu’elle commence à devenir sénile. »

Mais Lady Yulia s’était moquée de cette idée.

« Crois-tu vraiment que dame Helena permettrait cela… C’est vrai, elle n’est plus jeune, mais apparemment ses capacités n’ont pas du tout diminué. Elle a même tué le général Albrecht alors qu’il essayait de fuir la frontière. »

« Hmph… Je suppose que ce ne sont que des spéculations… Et ensuite ? Tu lui as envoyé cette fille, mais a-t-elle obtenu des informations ? »

Le comte Salzberg cracha ces mots avec haine.

« Elle n’obtiendra aucune information aussi rapidement. Ce soir, elle ne fait vraiment que lui faire l’amour… Mais demain, je lui demanderai d’en prendre la garde. »

Ryoma n’avait pas refusé la bonne qu’elle avait envoyée dans sa chambre. Il était soit faible avec les femmes, soit il l’avait fait par égard pour sa position. Quoi qu’il en soit, ils devraient être en plein milieu de l’acte.

Mais bon, il est probablement juste faible aux yeux des femmes… Et la plupart des hommes divulguent des informations dans la chambre à coucher… Après tout, elle ne voyait pas Ryoma Mikoshiba être froid avec une femme avec qui il a couché…

Lady Yulia jeta un regard cynique dans la direction de son mari. Elle était plus capable de cacher ses désirs que lui. Et ignorant les pensées de sa femme, le comte Salzberg se mit finalement à se plaindre de la reine Lupis.

« Bonté divine… Quand je pense que je dois solliciter les faveurs d’un sale roturier… C’est tellement ennuyeux… C’est à cause de cette stupide princesse… Cette satanée poupée aurait dû être mise à sa place afin de devenir la seconde femme d’Albrecht… »

Inutile de dire que c’était en effet des mots dangereux. S’ils étaient entendus par de mauvaises oreilles, le comte Salzberg pourrait se retrouver, ainsi que toute sa famille, exécuté sur place… Dame Yulia n’avait cependant pas sourcillé à son commentaire.

« Ce n’est pas une princesse stupide, bien-aimée, mais une reine stupide… Elle a récemment été couronnée reine de Rhoadseria. »

Il semblerait que dame Yulia n’avait pas voulu se battre contre le fait que la reine Lupis soit traitée de stupide. Aussi insolente qu’elle soit, les deux étaient d’accord sur ce point.

« Et maintenant, elle a même donné la péninsule de Wortenia à quelqu’un d’autre… Elle est complètement aveugle à tous nos efforts. Pourquoi devait-elle le faire ? »

« Allons, mon cher, assez de grognements… »

Dame Yulia le réprimandait, essayant d’apaiser sa colère.

« La seule chose que nous pouvons faire maintenant est de surveiller cet homme et de nous assurer qu’il ne fait rien d’inutile… »

« Tu as raison… Et si le pire des scénarios se produisait… »

« Je pense que tu sais très bien ce qui se passera alors », répondit dame Yulia.

« Les monstres de la péninsule sont toujours avides de nouvelles proies. Et regarde comme il est grand… Je suis sûre qu’il va leur remplir l’estomac. »

« Oui, oui. Ils auront plein de choses à mâcher. »

Le comte Salzberg écouta ses mots avec un sourire froid.

***

Partie 4

« Oui, mon garçon, j’ai entendu dire que tu avais passé une sacrée nuit ! »

L’homme d’âge moyen assis au siège conducteur de la voiture parla ainsi à Ryoma.

Les autres mercenaires avaient récemment suivi l’exemple de Boltz, et avaient commencé à appeler Ryoma « mon garçon ». Ils avaient combattu aux côtés de Ryoma pendant la guerre civile rhoadserienne, ils étaient donc déjà en bons termes avec lui.

« As-tu entendu parler de ça ? D’où, Mike ? »

Mike parla à Ryoma dès qu’ils avaient quitté la propriété du comte. C’était un court trajet qui ne consistait qu’à descendre la route principale d’Epire jusqu’au domaine. Peut-être parce que c’était au milieu de la ville, les chevaux semblaient s’ennuyer un peu, car ils ne pouvaient se déplacer que lentement.

« Aah, les serviteurs chuchotaient à ce sujet… Et j’ai gardé mes oreilles ouvertes, c’est tout ! »

Ryoma lui montra un air interrogateur.

« Est-ce Boltz qui t’a dit de faire ça ? »

« Oui… Quand il m’a dit de te conduire ici, il a dit que je devrais me mêler aux domestiques et essayer d’en tirer des informations si tu finissais par passer la nuit là-bas. », répondit Mike en se peignant la barbe avec ses doigts.

« Je dois reconnaître que Boltz… Il ne laisse pas une seule pierre non retournée. »

« Bien sûr que non. La sœur est la plus forte des guerriers, mais elle n’est pas très douée pour les opérations secrètes… C’est là que Boltz brille et la couvre ! »

Mike était un mercenaire de rang moyen parmi les Loups Rouges. Il était bien sûr habile avec une arme, mais aussi compétent pour l’espionnage et les travaux de construction. Et malgré son apparence sinistre, il était aussi sociable et amical. Il avait un grand sens du devoir et avait les lèvres bien cousues, ce qui le rendait parfait pour le travail de renseignement.

Il semblerait qu’on lui ait confié la tâche de chauffeur et de garde du corps pour Ryoma lors de cette visite, tout en recueillant des informations en coulisses.

« Pourtant, je ne pensais pas qu’il aurait raison et que vous finirez par passer la nuit… Bien que j’aie quand même dit oui. »

Ryoma répondit aux mots de Mike avec un sourire ironique. Il avait en effet reçu un accueil parfait, mais malheureusement, cela ne voulait pas dire que le séjour était forcément agréable.

« Oui, eh bien… La nourriture et les boissons étaient toutes de la plus haute qualité possible. Ils ont dû donner des instructions assez détaillées, car ils ne cessaient de sortir une assiette après l’autre. Honnêtement, ils me traitaient si bien que cela en était dégoûtant, et j’ai fini par me sentir encore plus mal à l’aise… »

« Pareil pour moi… Même s’ils ne m’ont pas donné de femme. Mais l’alcool et la nourriture qu’ils m’ont donnée n’étaient pas faits pour un domestique… La chambre était luxueuse aussi. »

« Toi aussi, hein… ? »

« Oui… Honnêtement, c’était sinistre. »

Ryoma fit un signe de tête aux mots de Mike et ferma les yeux en contemplation. Ils ressentaient tous les deux la même chose.

« Pourquoi sont-ils allés si loin ? Je veux dire, je ne suis pas aussi intelligent que vous ou Boltz, mais… Je peux seulement vous dire ce que mon instinct me dit. Si vous êtes d’accord avec ça… », demanda Mike, en regardant le visage silencieux de Ryoma.

Après avoir fait une pause, Mike lui donna ses impressions.

« Je pense qu’ils veulent soit vous demander quelque chose, soit vous chasser de cette terre avant que vous ne fassiez quelque chose qu’ils ne veulent pas que vous fassiez. »

« Ils veulent que je parte, mais ils ne veulent pas me combattre… C’est possible. »

Dans ce cas, il était possible que la reine Lupis tire les ficelles en coulisses. Ryoma et son groupe seraient une source d’anxiété pour elle jusqu’à ce qu’ils se rendent dans la péninsule de Wortenia. Elle avait peut-être ordonné au comte Salzberg de veiller à ce qu’ils y aillent.

Quoi qu’il en soit, je n’ai pas trop de choix… Ce n’est pas bon… J’ai besoin de plus d’informations. Je ne peux pas porter de jugement avant d’avoir entendu ce que Boltz et Genou ont trouvé…

« Je ne peux pas les imaginer traiter ce foutu chauffeur de voiture aussi bien… »

« C’était donc une stratégie… », murmura Ryoma.

« Oui… Probablement. »

Mike fit un signe de tête prudent.

Les deux hommes restèrent silencieux pendant quelques instants.

« Euh, au fait, Mike, pourrais-tu cacher à Laura et aux autres ce qui s’est passé hier soir ? »

Concluant que ruminer sur le sujet maintenant ne produirait pas de réponse, Ryoma décida de changer de sujet. Il n’y avait aucun moyen de savoir quelles étaient les intentions du comte Salzberg à ce moment-là, il devait donc faire tout ce qu’il pouvait pour l’instant.

Il devait donc faire tout ce qui était en son pouvoir pour l’instant. C’est-à-dire, en ce moment précis, s’assurer que Mike la ferme.

À la question de Ryoma, l’expression raide de Mike se fondit en un sourire.

« Oui, je me doutais que vous diriez ça. Si elles entendent parler du plaisir que vous avez eu hier soir… Rien que d’y penser, ça me fait frissonner ! Ces filles deviendraient folles. »

La civilisation n’était pas aussi développée dans ce monde, et les rapports sexuels étaient donc en quelque sorte l’une des rares sources de divertissement disponibles. Ryoma était bien sûr déjà allé avec les autres mercenaires dans des quartiers de plaisir. Heureusement, ce monde avait des remèdes qui prévenaient les maladies sexuelles, ainsi que des médicaments qui empêchaient les grossesses lorsqu’elles arrivaient.

À cet égard, ce monde était en fait plus développé que le monde de Ryoma. C’était une aubaine que les monstres avaient accordée à cette Terre. Il n’y avait probablement pas de monde plus adapté pour un groupe d’hommes qui voulaient se donner une nuit de plaisir.

Le seul problème était ce qui arrivait le matin suivant cette nuit-là.

« Hé, ne plaisante même pas avec ça ! Je ne sais même pas pourquoi, mais je les vois sérieusement s’énerver contre moi ! » Ryoma s’était retrouvé à élever nerveusement la voix contre l’homme.

« Je vais être honnête, mon garçon, mais c’est comme ça que ça se passe. Vous savez ce qu’elles ressentent pour vous, non ? »

Mike avait parlé à son maître, qui était en fait assez jeune pour être son fils, en lui donnant un conseil paternel.

« Eh bien… Je suppose que… »

C’était déjà clair sans que Mike n’eût à le dire. Les sentiments des jumelles Malfist étaient clairs et évidents.

« Alors vous comprenez probablement que ces deux-là veulent que vous le fassiez aussi. Elles veulent cela du fond du cœur. »

Ryoma les sauva du marchand d’esclaves peu de temps après qu’il ait été appelé en ce monde, et cela faisait presque six mois depuis. Ils avaient toujours opéré ensemble, il était donc naturel que des émotions romantiques se forment. Ryoma était conscient qu’elles étaient aussi des membres du sexe opposé.

« Je sais ça… »

Ryoma ne savait pas si c’était quelque chose dont il fallait être reconnaissant, mais ce monde n’interdisait pas la polygamie. Les hommes étaient libres d’avoir autant de femmes que leur fortune personnelle le leur permettait. Dans cette optique, il n’avait pas à s’inquiéter de devoir choisir l’une des jumelles plutôt que l’autre. Sauf que…

« Vous ne pouvez pas couper votre attachement à votre monde ? »

Les mercenaires des Lions Rouges étaient déjà au courant de la situation de Ryoma. Il le leur avait dit quand ils avaient rencontré Genou et que le terme « Hinomoto » était apparu.

« Je suppose que… Je comprends déjà ça, au moins dans ma tête. Mais… Je n’arrive pas à l’accepter, ou, enfin… »

La question de Mike avait laissé Ryoma inhabituellement non engagé.

L’esprit raisonnable de Ryoma avait déjà réalisé qu’il n’avait pas d’autre choix que de rester dans ce monde, mais son cœur ne pouvait pas l’accepter aussi facilement. Ses amis et sa famille étaient toujours au Japon. Ryoma avait peut-être une personnalité sévère qui ne montrait aucune pitié pour ses ennemis, mais il était toujours un homme ordinaire qui se lamentait et agonisait.

Pour coucher avec elles, il fallait être… résolu. Cela signifierait choisir de rester dans ce monde avec elles…

Il n’était pas aussi troublé quand il s’agissait de coucher avec une prostituée. C’était juste une question d’argent pour résoudre un problème, comme c’était souvent le cas. Mais les sœurs Malefist avaient fait preuve d’une affection désintéressée pour Ryoma. Serait-il capable de se résoudre à rentrer au Japon après leur avoir fait l’amour ? Non. Il ne pouvait pas se résoudre à être aussi cruel.

« Eh bien… Vous avez fait de nous des chevaliers et avez décidé de développer cette terre. Je pense que vous avez déjà fait ce choix », dit Mike.

« Oui… Je ne peux pas y retourner après vous avoir tous mêlés dans mon bordel… »

Les rouages du destin étaient déjà en marche. Que feraient Lione et les autres si Ryoma devait soudainement retourner dans son monde ?

Même si j’avais un moyen de rentrer chez moi, je…

Il en était déjà arrivé à ses conclusions. Il avait déjà pris ses décisions…

« Ne vous inquiétez pas, je ne parlerai pas de ce qui s’est passé la nuit dernière à ces deux-là… Mais en échange ! Payez-moi à boire la prochaine fois, hein ? » dit Mike, son visage barbu se contorsionnant en un sourire.

« Bien sûr… Je t’offrirai autant de verres que tu veux ! »

Mike changea de sujet uniquement par souci pour Ryoma, et il n’avait pas perdu le fil. Cette considération réchauffa le cœur de Ryoma.

Tout dépend de moi, hein…

Secoué par la voiture qui roulait dans les rues d’Epire, Ryoma soupira.

***

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