Chapitre 18 : Le duc est confus par cette situation
Leur fille avait peut-être été jetée en prison, mais la maison des Ferguson était plus active que jamais. Normalement, lorsqu’un de vos proches était qualifié de criminel, vous faisiez preuve de retenue dans tout ce que vous faites, même si vous étiez noble. Pourtant, dans le cas de Rachel, il s’agissait d’une condamnation arbitraire de la part du prince. La famille ducale ne reconnaissait donc pas ce crime. Et comme le roi n’avait pas encore rendu son jugement définitif, la maison était en fait en pleine effervescence. C’était comme s’ils étayaient leur affirmation disant que les accusations étaient fausses.
Le fils aîné, George, était du côté du prince, mais pour l’instant, son père Dan était toujours le chef de famille. Peu importe ce que son fils disait, il ne cédera pas sur ce point. C’était donc la raison pour laquelle la maison était inondée quotidiennement d’invités et de rapports.
Trouvant une pause momentanée dans toute cette agitation, Sofia, la servante de Rachel, était entrée dans le bureau du duc. Deux servantes l’accompagnaient et attendaient dans le hall, comme le jour où Rachel fut emprisonnée.
Sofia s’était alors avancée en faisant une révérence si jolie qu’elle semblait sortie tout droit du manuel.
« Excusez-moi, Maître. Je suis ici pour parler de la jeune maîtresse. »
« Oh, vous avez des nouvelles de Rachel ? », demanda le duc.
Il arrêta de signer des documents et regarda la servante de sa fille. Techniquement, toutes les servantes rendaient compte à sa femme, mais il avait l’impression que celles qui étaient assignées à sa fille lui étaient exclusivement loyales.
Si elle savait à quel point le duc était en conflit à ce sujet, le visage de Sofia était resté impassible tandis qu’elle hochait la tête et répondait. « Oui ».
« Eh bien, comment va-t-elle ? »
« Les rapports disent qu’elle va bien. »
Après avoir terminé son propre rapport, Sofia s’était inclinée.
Le duc fixa les toupets dans ses cheveux pendant dix bonnes secondes.
« Est-ce tout… ? », demanda-t-il, déçu, en réalisant qu’il n’y avait rien de plus à attendre.
Sofia acquiesça sérieusement : « Oui, si je le résume à l’essentiel. »
« Non, non, non ! Cela laisse de côté beaucoup trop de choses. Ça ne me suffit pas. »
« Je pensais que le fait de savoir que la jeune maîtresse se porte bien était suffisant. »
« Et c’est tout ! Rien de plus ! Si vous avez d’autres détails, donnez-les-moi. »
« Ah. Alors je vous les ferai livrer plus tard. »
Sofia, qui ne semblait pas convaincue de la nécessité de cette démarche, se tourna alors vers l’une des servantes derrière elle.
« Lisa, apporte les rapports quotidiens des veilleurs au maître. »
« Oui, madame ! »
« Meia, appelle le Dr Monton, et dis-lui que c’est urgent. »
« Oui, madame. Lequel ? Le maître chirurgien cardiaque ? Ou le jeune spécialiste de la médecine psychosomatique ? »
« Pourquoi dis-tu une chose aussi stupide ? Le maître va lire les dossiers des activités de la jeune maîtresse. Tu dois appeler les deux, évidemment. Fais preuve de bon sens. »
« Oui, madame ! »
Une fois qu’elle eut fini de donner des ordres, Sofia se retourna vers le duc.
« Maître, veuillez lire les rapports quotidiens lorsque vous serez allongé dans votre lit, et à un moment où votre rythme cardiaque sera stable. »
Alors qu’il écoutait les servantes parler, une chose frappa le duc. Qu’est-ce qu’elle entend par « bon sens » ?
Lorsqu’il revint à lui, le duc s’éclaircit la gorge bruyamment et dit : « Attendez. Si Rachel se porte bien, alors c’est parfait. Je ne peux pas me permettre de m’effondrer maintenant. »
Ce qu’elle avait fait, et quels avaient été les résultats… Avec autant de choses qui se passent en temps réel, il serait certainement mieux pour son état mental de ne pas en entendre parler. Avec cette idée en tête, le duc mit fin à la conversation. C’était vraiment une question de priorités. Ce n’était pas comme s’il voulait absolument repousser l’ouverture de cette boîte de Pandore. Non, vraiment.
Se raclant la gorge une fois de plus pour tenter de dissiper la gêne, le duc décida de consulter la servante de sa fille sur quelque chose qui le préoccupait.
« Ah, plus important, je voulais demander… Sa Majesté devrait bientôt revenir de son voyage. Quand il le fera, nous devrons régler les choses avec Son Altesse devant lui. Je dois m’y préparer dès maintenant, alors… »
Il avait l’intention de poursuivre en demandant : « Avez-vous une opinion sur ce qu’il faut faire ? » mais avant qu’il ne le fasse, Sofia l’avait interrompu.
« Sa Majesté ne reviendra pas avant un certain temps. »
« Pardon ? »
Comment une simple servante, qui ne pouvait pas connaître le calendrier des inspections royales, avait-elle pu obtenir cette information ?
Alors que le duc la fixait, incapable de comprendre ce qu’elle venait de dire, Sofia expliqua d’un ton désintéressé : « La jeune maîtresse a été fiancée au prince Elliott sur l’insistance de Sa Majesté, la reine. À ce titre, j’ai envoyé un rapport concernant la rupture des fiançailles et les événements qui l’ont précédée à Leurs Majestés par l’intermédiaire de certaines relations dans la maison du comte Naumann, chez qui ils sont en visite en ce moment. »
« Quand avez-vous… ? », murmura le duc.
Non seulement Sofia connaissait l’horaire, mais elle connaissait même les routes qu’ils allaient emprunter. En plus de cela, elle était capable de les contacter sur le terrain. C’était quoi ce bordel ? C’était terrifiant.
« J’ai également inclus une note qui disait, “Le chat joue”, l’entourage royal s’est donc arrêté aux sources chaudes de Fracker dans le domaine du comte et n’a pas bougé depuis. Je crois qu’ils ne reviendront pas à la capitale avant d’avoir pu régler la situation et décider d’une politique. »
Ayant dit tout cela avec un visage inexpressif, quelque chose sembla venir à l’esprit de Sofia, et elle ajouta : « Ou peut-être attendent-ils que la jeune maîtresse ait fini de se défouler pour ne pas être prise entre deux feux. »
Le duc avait ri à sa suggestion. Cependant, son rire sonnait creux.
« N-Non… Sincèrement, peu importe jusqu’où Rachel va, les flammes n’atteindraient pas Leurs Majestés. Suggérer qu’ils auraient peur d’être pris entre deux feux… C’est absurde ! Ha ha ha… »
« Mais c’est un fait que le grand-duc a déjà… »
Sofia fit alors une pause.
« Pardonnez-moi, je n’ai rien dit. »
« Le grand-duc ?! Qu’est-il arrivé au Grand Duc ?! Vous parlez du Grand Duc Vivaldi ?! »
« S’il vous plaît, ne vous inquiétez pas pour ça. C’est déjà fini. »
« Je suis quand même super inquiet ?! Qu’a fait Rachel ?! », demanda le duc, alarmé.
« Tout va bien. Ce n’était rien de grave. »
« Êtes-vous sûre de ça ?! Que diable Rachel a-t-elle fait ?! »
« Je crains de ne pouvoir être celle qui le dira… »
« Ça ne sonne pourtant pas du tout “bien” ?! »
« Par ailleurs, Maître… »
Alors que le duc était déjà en train de sombrer dans un état de panique, sans raison apparente, Sofia lui tendit une brochure.
« Vous semblez stressé. Puis-je vous suggérer un voyage aux sources chaudes avec votre femme ? »
« Et qui selon vous en est responsable ? Et dans ces circonstances ?! »
« Oui. Il se trouvera que vous rencontrerez par hasard Leurs Majestés lors d’un voyage aux sources chaudes. »
Le Duc comprit soudainement où Sofia voulait en venir.
« Vous voulez dire que je devrais quitter les lieux et prendre des mesures pour y remédier ? »
« C’est une coïncidence. Une simple coïncidence. »
Avec une expression impénétrable, Sofia poursuivit : « Après tout, personne au palais ne sait encore que le roi a changé son programme. Si vous deviez partir pour les mêmes sources chaudes en ce moment, personne ne pourrait prédire que vous tomberiez sur Leurs Majestés. »
Combien de choses ma fille fait-elle dans l’ombre ? C’était peut-être un peu tard pour le dire, mais un frisson parcourut l’échine du duc. Ma fille se développe rapidement d’une manière que je n’aurais jamais espérée. Que quelqu’un me sauve.
La proposition de Sofia était un geste brillant pour sauver Rachel. Si le palais n’était pas au courant, alors ce prince incompétent et ses acolytes n’auraient jamais pensé que le retour du roi pourrait être retardé. Ils n’auraient pas pu prévoir que le duc le rencontrerait sur la route. Pourtant, avant de suivre le plan de sa fille, il y avait quelque chose qu’il devait vérifier.
« Que comptez-vous faire à propos de notre situation ? Si nous ne sommes pas là, George aura le contrôle total de la maison, vous en rendez-vous compte ? »
Sans le duc et la duchesse, le contrôle reviendrait naturellement au fils aîné et héritier, c’est-à-dire George. Dans ce cas, Rachel ne pourra pas compter sur le soutien de la maison ducale elle-même. Mais si elle suggérait qu’ils fassent un long voyage, Rachel avait sans doute déjà pris cela en compte.
Sofia avait dû anticiper la question, car elle avait répondu sans se déconcerter : « En fait, il y a des moments où votre absence est plus pratique. »
« Que voulez-vous dire ? »
« Si vous ne partez que pour un court voyage, le fait que vous ne nommiez pas un représentant pour agir en votre absence ne sera pas inhabituel. Si aucun de vos proches n’est nommé comme représentant, et que le jeune maître est encore mineur, à qui revient donc la gestion de la maison ? »
Le duc et la servante se regardèrent dans les yeux… puis pivotèrent lentement pour regarder le majordome debout près du mur. Il eut soudainement l’air d’avoir une crise cardiaque et éparpilla les papiers qu’il tenait partout, mais… peu importe.
« Je vois… », se dit le duc.
« Oui. C’est peut-être un serviteur, mais si le maître lui confie les pleins pouvoirs… »
« Il ne peut pas dévier de ma politique, et George ne peut pas lui donner d’ordres. »
« Peu importe ce que dit le jeune maître, on peut y faire face en disant : “Cela contredit les instructions de votre père” ou “Veuillez vérifier auprès du maître”. Et les talents limités du jeune maître rendront difficile l’enregistrement d’une plainte auprès de vous pendant votre absence. », poursuivit Sofia.
« Oui, c’est comme ça qu’on fait une réponse bureaucratique », dit le duc.
Le maître et les serviteurs sourirent sombrement, tous leurs problèmes étant résolus. Mais le majordome, qui semblait prêt à pleurer, demanda : « Excusez-moi, mais dois-je vraiment m’occuper de lui tout seul ? »
« N’ayez aucune crainte, Jonathan. Vous avez Sofia avec vous dans le manoir, et si George devient incontrôlable, vous n’avez qu’à le dire à Martha et elle le jettera dans sa chambre. »
La femme de chambre au visage sévère avait été la nourrice de George, et même s’il était adulte maintenant, le fait qu’elle le prenne par la peau du cou ne sera pas un problème.
Le Duc, soudainement exalté, laissa le majordome s’affaler devant l’horrible situation dans laquelle il se trouvait et appela sa femme.
« Iseria, nous allons faire un voyage aux sources chaudes, tout de suite ! »
« Oh, Dan ! Qu’est-ce qui te prend tout d’un coup ?! Ce n’est pas le moment ! »
« C’est exactement pour ça qu’on y va ! »
« Huh ? »
*****
Alors qu’il ramassait les papiers éparpillés sur le sol, le majordome jeta un regard plein de ressentiment à la femme de chambre.
« Si mon cœur lâche et que je meurs de stress, j’espère que ma prime d’accident du travail sera versée ? »
« Qui peut le dire ? Veuillez vérifier auprès du maître. »
merci pour le chapitre