Strike the Blood – Tome 8 – Chapitre 1 – Partie 4

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Chapitre 1 : Les fugitifs

Partie 4

« Merde… »

Kojou vacilla sur ses pieds en se dirigeant vers l’aile médicale.

Le torrent de visions avait disparu, mais la douleur dans ses côtes avait fortement augmenté. Son cœur battait assez fort pour faire trembler ses tympans. Tout son corps était comme en feu, comme si chaque goutte de sang était en ébullition.

« Par ici… peut-être ? »

Il n’avait aucune idée de l’endroit où il allait. Cependant, il avait l’impression que quelqu’un l’appelait tout le temps. Il avait continué à avancer, c’était comme si une voix infime faisait bouger ses jambes.

Avec la carte d’accès qu’il venait de recevoir, il avait franchi la porte automatique.

L’intérieur du bâtiment était sombre — peut-être l’électricité était-elle coupée à cause de l’explosion précédente. La route inconnue devant lui était devenue labyrinthique. Malgré cela, Kojou avait continué sans hésitation.

Des particules de poussière dansaient dans le passage. Des odeurs âpres et étranges frappaient ses narines. Le bâtiment était fissuré à plusieurs endroits, et une partie du passage s’était effondrée.

Kojou trébucha sur un morceau de gravats alors qu’il avançait plus profondément.

Il n’y avait aucun signe d’autres humains dans le passage. C’était comme si l’obscurité et les débris bloquaient toute intrusion extérieure.

À un moment donné, une brume blanche commença à apparaître, suspendue dans l’obscurité. Le froid lui piquait la peau comme s’il le gelait.

« Glace… ? »

La glace recouvrait les murs et le sol du passage, et un givre épais recouvrait les joints de connexion en métal. De minuscules cristaux de neige semblables à des pétales de fleurs se mêlaient à l’air brumeux.

D’innombrables piliers de glace jaillissaient de la surface du sol, comme des épines acérées tenant les intrus à distance. Kojou s’arrêta.

Il se trouvait dans une pièce assez grande, comparable à une salle de classe. L’intérieur sans ornement était composé d’innombrables boîtes en bois et d’autres objets similaires empilés à l’intérieur. Apparemment, cette section était utilisée comme entrepôt.

Au centre de la pièce se trouvaient des escaliers menant sous terre, et de larges fissures couraient le long du sol qui l’entourait. L’air y était glacial, plus froid que partout ailleurs dans la pièce. C’était probablement de là qu’était partie l’explosion.

Le béton sous ses pieds était fragile, probablement à cause de la chute soudaine de la température. Jugeant que toute autre approche était futile, Kojou avait lentement examiné son environnement.

Quelque part, la chaleur de son corps avait diminué. La douleur dans ses côtes avait aussi disparu. Pourtant…

« Y a-t-il… quelqu’un ? »

La voix de Kojou résonna au milieu de la brume blanche. Comme pour répondre à son appel, il entendit de faibles bruits de pas de quelqu’un qui marchait sur ce qui semblait être de la neige fraîche.

« … Hein !? »

Quand Kojou se retourna, il ouvrit les yeux en signe de choc et se figea complètement.

Sans un mot, elle se tenait dans les rayons du soleil couchant qui traversaient le toit ouvrant de l’entrepôt : une jeune fille aux traits délicats et féeriques.

Ses membres étaient aussi fins que ceux d’un enfant, son physique était élancé, et ses yeux étaient d’un bleu pâle comme un glacier. Ses cheveux étaient d’un blond pâle, comme un arc-en-ciel, ils semblaient changer de couleur selon l’angle. Elle possédait un visage d’une beauté inhumaine, qui semblait tout droit sorti d’une peinture occidentale, le genre de beauté qui inspirait une crainte instinctive.

Kojou se tenait debout de façon instable alors qu’il gémissait, « Pourquoi… je te connais… !? »

Une fois de plus, d’innombrables visions s’étaient déversées dans son cerveau.

Il la connaissait.

Il l’avait ailleurs rencontrée bien avant aujourd’hui. Un endroit taché de violence, de massacre et de sang — .

« Gah !? »

La fille s’était avancée doucement. Auparavant enveloppée d’une brume blanche et pure, la totalité de son corps svelte était devenue visible. À cet instant, l’expression de Kojou s’était déformée à cause de la nervosité, car il avait finalement réalisé que la fille ne portait pas un seul vêtement. Ses côtes légèrement visibles, le léger gonflement de ses seins, sa peau si pâle qu’on pouvait presque voir à travers elle… Elle était complètement nue, son corps entièrement exposé aux yeux de Kojou.

« Attends… »

Kojou tendit une main pour essayer de l’arrêter, mais les pieds de la fille ne s’arrêtèrent pas. Kojou ne pouvait pas non plus détourner le regard, il était envoûté par elle, incapable de bouger, un peu comme les bourdons captivés par leur reine des abeilles.

« Merde… à un moment comme celui-ci… »

Kojou avait soudainement eu du mal à respirer. Une odeur métallique avait assailli ses narines, le goût du sang s’était répandu dans sa bouche. Il saignait du nez.

Les causes en étaient probablement la chute précipitée de la température et le changement de pression atmosphérique qui l’accompagnait, plus le stress lié à la situation bizarre qui se présentait à lui. Il voulait croire que ce n’était pas parce qu’il était excité de la voir nue.

La fille avait fait un sourire en coin quand elle avait vu l’expression sur le visage de Kojou. C’était un joli sourire qui convenait à son apparence d’elfe, mais quelque part, il semblait malicieux.

Kojou étant incapable de bouger, la fille s’était dirigée vers lui à une vitesse surprenante, approchant son visage du sien. Des crocs blancs et étincelants dépassaient de ses lèvres profilées.

La douce sensation de ses lèvres qui se pressaient contre lui avait figé Kojou, qui n’avait pas réagi.

Après un moment, la fille s’était éloignée de Kojou. Une fine ligne de sang frais et brillant coulait du bord de sa bouche. Elle l’avait léchée, en plissant les yeux avec une satisfaction évidente.

 

 

La voix de Kojou trembla lorsqu’il réalisa ce qu’était réellement la fille devant ses yeux.

« Tu as… bu mon sang… !? »

C’était un démon. Plus que ça, c’était un vampire non enregistré qui exerçait un pouvoir immense, hors normes.

L’explosion qui avait secoué l’hôpital et l’air froid et glacé étaient probablement des manifestations de l’éveil de son pouvoir démoniaque. Même Kojou, résident d’un Sanctuaire de Démons, n’avait jamais rencontré un vampire aussi puissant.

Kojou s’était résigné à mourir de ses mains. Elle était un démon non enregistré, les lois du Sanctuaire des Démons n’avaient aucune emprise sur elle. Ni le réseau de surveillance réparti sur l’île ni les Mages d’attaque de la Garde de l’île ne pouvaient le protéger maintenant.

Même si elle était de petite taille, les prouesses physiques d’un Démon étaient écrasantes. Elle n’aurait jamais eu besoin d’utiliser le Vassal Bestial de vampire. Elle pouvait facilement déchirer Kojou à mains nues.

Mais sa prochaine action n’était pas celle que Kojou attendait.

Ses yeux avaient cligné lourdement, comme si elle venait de se réveiller. Elle avait regardé Kojou, qui se tenait juste devant elle, et avait reculé timidement devant lui.

« U… a… »

La fille laissa échapper un cri instable en cachant ses seins nus avec ses deux bras. Elle n’avait rien à voir avec la fille qui venait de lécher le sang de Kojou avec un sourire malveillant. Maintenant, elle avait l’air d’une personne complètement différente : un enfant sans défense et sans assurance.

« Tu es… »

Kojou n’avait pas pu cacher sa stupéfaction devant cette soudaine volte-face.

Instantanément, un sentiment de culpabilité mystérieux, sans précédent et féroce, avait envahi Kojou. Si un étranger les voyait à ce moment précis, il serait sûrement convaincu qu’il avait agressé la fille nue.

Et comme si les pires craintes de Kojou étaient exaucées, une présence était apparue derrière lui à ce moment précis : une femme portant un manteau noir, pointant quelque chose comme un pistolet sur Kojou en criant :

« — Ne bougez pas ! »

« Ah !? »

Par réflexe, Kojou avait en réponse levé les deux mains en l’air en la regardant.

La personne qui se tenait là était une jeune et séduisante brune. Son visage était ciselé et raffiné, mais étonnamment jeune, Kojou aurait pensé qu’elle avait seulement deux ou trois ans de plus que lui.

La femme pointait une arbalète noire et métallique sur lui. Mais elle n’était pas chargée. C’était du bluff, une simple menace.

Kojou la regarda fixement. « Hein !? Vous êtes vous aussi un vampire, non ? Alors est-ce vous les intrus qui ont fait irruption dans le laboratoire ? »

Étrangement, il n’avait ressenti aucune peur. Malgré les vêtements de dame-chic qu’elle portait, il n’y avait aucune aura de violence émanant de la jeune fille. Au contraire, elle ressemblait à une petite fille douce et gâtée dont les défenses étaient à peine imperméables.

La femme n’avait pas répondu à Kojou, posant sa propre question à la place.

« Juste pour être sûr - vous êtes Kojou Akatsuki, n’est-ce pas ? »

Kojou avait cligné des yeux de surprise. Il avait inconsciemment vérifié qu’il ne portait pas une sorte de badge.

« Comment connaissez-vous mon nom ? »

« Je suis Veldiana Caruana, la fille du Duc Caruana de l’Empire du Seigneur de Guerre. »

« Caruana… !? »

Ses mots avaient déconcerté Kojou. Bien sûr, c’était la première fois qu’il rencontrait la vampire qui se tenait devant ses yeux.

Si elle était liée au Duc de l’Empire du Seigneur de Guerre, elle était une descendante de sang pur du Premier Primogéniteur, le Seigneur de Guerre Perdu — pas le genre de personne que Kojou, un simple élève de collège, devrait avoir comme connaissance.

Et pourtant, il avait l’impression de l’avoir déjà vue.

Pour être plus précis, il connaissait quelqu’un qui lui ressemblait vraiment : une belle chercheuse, avec ses propres cheveux bruns coupés court. Quelqu’un qui avait risqué sa vie pour protéger Kojou et Nagisa…

« Je suis consciente que vous avez perdu vos souvenirs de l’île de Gozo. Peut-être ne vous en souvenez-vous pas, mais je veux que vous me croyiez : Je ne suis pas votre ennemie, et je n’ai pas l’intention de faire du mal au MAR. »

Kojou avait jeté un coup d’œil à son environnement misérable et avait soupiré avec une apparente incrédulité.

« Pas l’intention de faire du mal… Alors, quoi, l’explosion souterraine, ce n’était pas vous ? »

Veldiana avait détourné son regard avec une expression coupable.

« Cette fille était retenue en captivité. Je voulais simplement la faire sortir. »

Veldiana désignait la fille vampire blonde en parlant. Les épaules de la fille avaient tressailli et tremblé, pour une raison inconnue, elle s’était cachée dans le dos de Kojou.

« … Retenue captive ? Vous voulez dire qu’elle était une patiente ici ? »

« Si je dois être précise, “cobaye” serait plus exact… »

Veldiana avait plissé les yeux d’un air de pitié en regardant la jeune fille blonde.

« Est-elle un sujet de recherche du MAR ? Parce que c’est un vampire ? »

« Oui, c’est exact. Cette fille n’est pas normale, mais plutôt un vampire très spécial. »

Veldiana, jugeant apparemment que Kojou n’avait aucune intention hostile, abaissa l’arbalète dans sa main. C’est alors que Kojou remarqua le sang frais qui coulait sur son bras droit.

« Cette blessure… Est-ce un garde qui vous a tiré dessus ? »

Veldiana appuya sa main gauche sur la plaie ouverte et grogna : « Ne sous-estimez pas la capacité de guérison d’un vampire. Une blessure comme celle-ci se refermera bien assez vite. »

Cependant, elle semblait souffrir considérablement. En regardant de plus près, il remarqua que ses yeux étaient larmoyants.

Kojou secoua péniblement la tête et la regarda fixement.

« … Peut-être si c’était une blessure normale, mais c’est un Sanctuaire des Démons. Il est impossible qu’ils n’aient pas utilisé des balles spéciales anti-démons. »

« Je suppose que vous avez raison. C’est pourquoi je ne veux pas l’exposer au danger si c’est possible. »

Veldiana accepta la déclaration de Kojou avec une facilité surprenante. Puis, elle plia l’arbalète et la lui présenta.

« S’il vous plaît. Travaillez avec moi, Kojou Akatsuki. »

« Travailler avec… ? »

Même lorsque Kojou lui avait pris l’arbalète, il était confus, incapable de discerner sa véritable intention. Pour être franc, le fait qu’elle ait lâché l’arbalète déchargée l’avait fait sursauter.

« Je veux que vous la preniez et que vous vous échappiez. Je vais distraire les gardes. Utilisez l’ouverture pour la faire sortir d’ici d’une manière ou d’une autre. Si vous êtes le fils de Gajou, vous pouvez sûrement faire ça. »

« Hein ? »

Qu’est-ce que papa a à voir avec ça ? s’était demandé Kojou, encore plus déconcerté. Quoi qu’il en soit, les choses commencent à prendre un sens. Si la vampire était une connaissance de Gajou, cela expliquerait comment elle connaissait le nom de Kojou. Il est donc logique que sa personnalité soit juste un peu différente, pensa-t-il.

Puis, prenant peut-être le silence de Kojou pour un oui, Veldiana s’était éloignée de lui et de la jeune fille en sortant.

« Mettez-la en sécurité. Je viendrai la chercher plus tard. »

« Hé, attendez ! »

Kojou avait fait une objection urgente. Il n’y avait rien d’autre à faire que de s’attirer les foudres de cette fille à poil sans aucune explication.

« Expliquez un peu les choses, bon sang ! Pourquoi supposez-vous que je vais aider — !? »

« Il n’y a pas le temps d’expliquer ! » cria Veldiana avec une pointe d’agacement. Derrière Kojou, la jeune fille blonde tressaillit et frémit d’une frayeur apparente. Irritée, Veldiana soupira. « Je vais au moins vous dire ceci. Vous avez le devoir de la protéger. »

« Quel “devoir” ? »

« Si je dis que seule elle peut sauver Nagisa Akatsuki, l’accepteriez-vous ? »

« … Qu’est-ce que vous voulez dire ? »

L’expression de Kojou s’était transformée en grognement et il lança un regard noir à Veldiana.

Son tempérament avait changé à l’instant où elle avait invoqué le prénom de sa petite sœur. La force qui montait dans les yeux de Kojou, ressemblant à une soif de sang, avait fait que les mots de la vampire s’étaient coincés dans sa gorge.

« Exactement ce que j’ai dit. L’affliction de Nagisa Akatsuki ne peut être traitée par la médecine, même avec la technologie du Sanctuaire des Démons. C’est étonnant qu’elle soit encore en vie. Un jour prochain, elle périra. »

« Nagisa va… mourir… ? »

Kojou grogna et serra le poing. Sa bouche ne pouvait pas former une réfutation.

Personne ne lui avait dit, mais il aurait menti s’il avait dit qu’il ne s’en était pas rendu compte.

Le corps de Nagisa s’affaiblissait, lentement mais sûrement.

Les blessures de l’incident survenu trois ans auparavant avaient guéri, mais son énergie physique n’était jamais revenue. C’était comme si Nagisa avait continué à saigner d’une blessure invisible pendant tout ce temps, son essence vitale s’épuisant à chaque instant, même si Mimori Akatsuki et la technologie médicale du MAR faisaient tout leur possible pour prolonger sa vie.

« Avec elle, vous pouvez sauver Nagisa ? » demanda Kojou en désignant la jeune fille blonde.

La jeune fille semblait ignorer les circonstances, car elle baissait inconfortablement les yeux. Veldiana la fixa et déclara néanmoins :

« Elle est la douzième Sang de Kaleid… Son nom est Avrora Florestina. »

« … Avrora ? »

Kojou ressentit une douleur sourde du côté droit de sa cage thoracique. Une fois de plus, il avait eu des hallucinations — ou des flashbacks — provenant des recoins de son esprit. La fille flottant dans la glace. La princesse endormie. Avrora Florestina — Kojou connaissait ce nom.

« Mon souverain, permettez-moi de vous quitter pour le moment. »

Veldiana s’était agenouillée devant la fille timide, lui offrant son propre manteau.

« A… U… »

Avec une voix frêle, la fille continua à se cacher derrière Kojou. Il semblerait qu’elle ne comprenait pas vraiment la situation dans laquelle elle avait été placée. Elle semblait avoir des difficultés à juger si Veldiana était son alliée.

Pensant peut-être qu’elle devait dire quelque chose, la jeune fille ouvrit la bouche en tremblant. D’une belle voix claire et aiguë, elle déclara :

« Je le permets. »

***

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Claramiel

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