Strike the Blood – Tome 5 – Chapitre 3

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Chapitre 3 : La Tombe d’Oceanus II

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Chapitre 3 : La Tombe d’Oceanus II

Partie 1

Un sentiment étrange l’avait assailli dès l’instant où il avait mis le pied dans le bâtiment.

Le monde avait changé de couleur comme s’il hallucinait. L’air s’était asséché, avec une sensation de rugosité présente sur sa peau. C’était désagréable, mais pour lui, l’atmosphère était aussi quelque peu nostalgique.

Le lycée de l’Académie privée de Saikai était rare parmi les établissements d’enseignement du Sanctuaire des Démons, car le campus ne disposait d’aucune installation spéciale pour la recherche sur les démons. C’était un lycée normal et banal. Malgré cela, il y avait une étrange présence tourbillonnant dans l’enceinte de l’école.

Ici, au plus profond de la nuit, le campus ne présentait aucune trace des étudiants, les lampes de secours et la lumière de la lune éclairaient faiblement les différents couloirs.

Dans les salles de classe vides, les tableaux noirs étaient pleins de caractères. Il s’agissait de sorts, écrits avec des symboles magiques d’un pays étranger. C’était des versets d’un ancien grimoire.

Les innombrables symboles écrits de façon étouffante et rapprochée dégageaient une lumière pâle et dorée en émettant une puissante poussée d’énergie magique. Ils formaient une porte par laquelle le pouvoir entrait d’un autre monde.

Le jeune homme sourit faiblement, avec charme, alors qu’il ne murmura à personne en particulier.

« … La Bible noire… »

Ses lunettes ajoutaient un air d’éducation et d’intelligence. Sur son avant-bras gauche se trouvait une menotte grise à laquelle pendait une chaîne courte et coupée. Il était l’un des sept évadés de la Barrière pénitentiaire. C’était l’homme que Schtola D avait appelé Meiga.

Les pas silencieux du jeune homme résonnèrent lorsqu’il monta les escaliers, ses pieds ne s’arrêtèrent que lorsque les silhouettes tombées dans le couloir piquèrent son intérêt.

C’était les cadavres de sorciers, découpés par une épée géante.

Les individus au sol possédaient des poignards, des baguettes et des grimoires ornés de bijoux — toutes des armes magiques dotées d’un pouvoir considérable. Cependant, elles n’avaient plus d’éclat de pouvoir magique, elles avaient été transformées en déchets inutiles.

L’atmosphère bizarre qui régnait dans la cour de l’école les avait privés de leurs enchantements.

« S’agit-il de sorciers du LCO ? » demanda le jeune homme en se tournant vers le centre de la pièce.

En entendant sa voix, une jeune femme portant une robe de cérémonie en noir et blanc se retourna.

C’était Aya Tokoyogi, la sorcière de Notaria…

Elle tenait dans sa main un petit morceau de craie qu’elle avait utilisé pour copier un verset d’un grimoire sur le tableau noir derrière elle. Les caractères étaient terriblement petits.

De façon énigmatique, Aya avait accueilli le jeune homme, lui demandant avec réflexion. « … Un évadé de la prison… oui ? Tu es celui qui s’appelle Meiga ? »

« Je ne suis qu’un simple Mage d’Attaque marginal. Mon nom n’est pas très important, » répondit-il.

Alors que le jeune homme lui souriait avec sociabilité, le sourire d’Aya était teinté d’un éclat de sang.

« … Ce sont des mots bien choisis pour quelqu’un qui est entré indemne dans mon monde, » déclara Aya.

Le jeune homme avait laissé le regard hostile d’Aya s’éloigner de lui alors qu’il levait son bras gauche devant ses yeux.

« Qu’est-il arrivé à ta menotte, Aya Tokoyogi ? » demanda-t-il.

« … À quoi fais-tu référence ? » demanda-t-elle.

« Si tu as volé les souvenirs de Natsuki Minamiya, la clé de la Barrière pénitentiaire — alors le programme pour la décoder — est sûrement inclus. Même si Natsuki Minamiya s’est échappée, tu ne l’as pas poursuivie… parce que tu n’en avais pas besoin, n’est-ce pas ? » demanda Meiga.

Le jeune homme avait parlé en regardant le bras gauche de la sorcière. Caché sous la manche de sa robe de cérémonie, son poignet ne portait pas de menotte comme il aurait dû. Aya Tokoyogi était déjà complètement libérée de la Barrière pénitentiaire.

Cependant, elle n’avait pas informé les autres prisonniers qu’elle avait la clé en sa possession. Grâce à cela, les autres évadés — à l’exception du jeune homme — poursuivaient Natsuki Minamiya à ce moment précis. Elle avait utilisé Natsuki comme un leurre.

Cependant, le fait même de l’avoir fait remarquer n’avait valu qu’un rire moqueur d’Aya.

« Et qu’en est-il ? Es-tu venu pour recevoir un morceau du programme de décodage, Loup de l’Enfer ? »

Le jeune homme soupira et secoua la tête. Il semblerait qu’il n’aimait pas ce surnom étrange.

« … Non. J’ai déjà une idée de la façon de retirer ceci, crois-moi, » déclara-t-il.

La suspicion s’était emparée du visage d’Aya. « Alors pourquoi es-tu ici ? »

« Je voulais simplement voir par moi-même, » déclara-t-il.

« … Voir par toi-même ? » demanda Aya.

« Oui, qu’est-ce que tu as bien pu faire pendant que nous, les évadés, étions distraits par Natsuki Minamiya, » déclara-t-il.

Ceci dit, le jeune homme marcha légèrement sur le poignard en or qui était tombé devant lui. Le poignard, qui aurait dû être imprégné d’un puissant enchantement, se brisa avec facilité, ressemblant presque à une brindille que l’on brise.

« C’est donc cela le pouvoir de la Bible noire ? » demanda-t-il.

« Correct, » dit Aya d’un signe de tête, son regard dérivant vers la craie qu’elle tenait.

« La Bible noire elle-même a déjà été perdue. Natsuki Minamiya a brûlé le livre… Ce qui est écrit ici n’est que la connaissance de la sorcellerie qui existait dans ses souvenirs. »

Une note amusée s’échappa de la gorge du jeune homme.

« Tu as donc volé ses souvenirs pour ainsi pouvoir recréer la Bible noire… ? Je vois, c’est pour ça qu’on t’appelle la sorcière de Notaria…, » déclara-t-il.

Il avait souri en regardant le texte sur le tableau.

Les livres de pouvoir connus sous le nom de grimoires étaient des collections de connaissances et de sorts liés à la sorcellerie qui avaient pris une vie propre et devenaient eux-mêmes de puissants magiciens. Ces dispositifs magiques, sous forme de livres, accordaient au lecteur un pouvoir dépassant l’entendement humain au prix de grands désastres.

La capacité spéciale d’Aya, et la raison pour laquelle elle avait été appelée la Sorcière de Notaria, étaient d’être capable de copier ces grimoires. Ce qu’elle avait écrit n’était pas une simple copie du texte, elle avait complètement recréé le pouvoir magique et les sorts sombres du tome original à partir duquel elle avait travaillé.

Et elle avait fait revivre la Bible noire, le plus abominable de tous les grimoires, à partir des souvenirs de Natsuki Minamiya. Chaque caractère qu’Aya avait écrit sur les tableaux noirs dans la pièce faisait partie d’un nouveau grimoire, émettant une vaste énergie magique à part entière. Nul doute que les êtres humains normaux ne seraient plus capables de regarder directement les tableaux noirs et encore moins le toucher. L’ensemble du campus de l’Académie de Saikai avait été transformé en une nouvelle Bible noire.

Aya fixa le jeune homme du regard. « As-tu l’intention de t’en mêler ? »

Derrière elle, l’air vacillait alors qu’un chevalier de l’ombre, vêtu d’une armure noire, s’élevait. Il dégaina son épée géante et poussa la pointe vers l’avant jusqu’à ce qu’elle soit juste sous les yeux du jeune homme.

Son interlocuteur avait calmement saisi la pointe de l’épée pointée vers lui à main nue. « Non, je trouve simplement que ton expérience a une valeur inattendue. »

Alors qu’il finissait de parler, la forme du chevalier noir se déforma, comme si elle devenait floue.

Le jeune homme n’avait rien fait de plus que de lui donner une légère touche. C’était suffisant pour déformer l’être même du Gardien de la sorcière. Aya se mit à froncer les sourcils en faisant reculer son chevalier noir.

« Je vois. Tu… Tu es de l’Organisation du Roi Lion…, » déclara Aya.

Le regard noir d’Aya s’était rétréci lorsqu’elle avait regardé le visage que le jeune homme cachait derrière ses lunettes.

Le jeune homme avait tourné le dos à la sorcière, se laissant sans défense. Puis il était sorti de la classe.

« Je prie pour le succès de ton expérience, Aya Tokoyogi. Puisses-tu trouver le festival agréable…, » déclara-t-il.

Ces mots étaient tout ce que le jeune homme avait laissé derrière lui lorsqu’il était entré dans l’obscurité et avait disparu.

Laissée derrière, Aya avait écrasé la craie qu’elle avait saisie dans un accès de colère. Elle avait alors utilisé la poussière blanche laissée sur ses doigts pour écrire des symboles sur le tableau noir — les derniers caractères qui avaient rendu la Bible noire complète.

Après avoir été remise en état, la Bible noire s’était activée.

Son monde avait commencé à empiéter sur l’au-delà.

La sorcière laissa échapper un rire perçant, comme si elle était un signe avant-coureur de la mort elle-même.

Les habitants du Sanctuaire des Démons n’avaient pas réalisé que leur destruction avait commencé à ce moment précis…

***

Partie 2

Le navire était amarré dans les eaux calmes du vaste quai connu sous le nom d’Île Est.

Même parmi les nombreux gros navires amarrés à l’île d’Itogami, c’était un navire extravagant qui volait tous les regards.

Il s’agissait d’un paquebot de croisière privé — un mégayacht dont le tonnage rivalisait avec celui d’un destroyer militaire.

Alors qu’il était immobile à l’intérieur du navire et se sentait très mal à l’aise, Kojou Akatsuki avait saisi son téléphone portable.

C’était Yukina à l’autre bout.

« Ah ? La Tombe de l’Océanus II… tu dis ? »

Ayant perdu le contact avec Kojou lorsqu’il était allé sauver Asagi, Yukina l’avait appelé par inquiétude, depuis une cabine téléphonique près de la Porte de la Clef de Voûte.

Et lorsque Kojou lui avait communiqué son emplacement actuel, un écho de colère non dissimulé s’était mêlé à elle.

« Veux-tu dire le mégayacht du Duc d’Ardeal ? Que fais-tu là, Senpai ? »

« Eh bien ! Cela a en quelque sorte… fini de cette façon. »

Le mécontentement dans la voix de Yukina n’avait fait que croître.

« Excuse-moi ? »

Apparemment, les signes de combat avec les évadés étaient encore frais tout autour de la Porte de la Clef de Voûte, où elle et Sayaka se trouvaient actuellement. Même au téléphone, Kojou pouvait clairement entendre les sirènes des ambulances transportant des gardes blessés, des cris de diverses personnes et des officiers hurlants des ordres de dispersion pour les badauds.

Il ne faisait aucun doute que Yukina et Sayaka avaient toutes deux essayé furieusement de retrouver Kojou.

Il n’était pas étonnant que Yukina ait été bouleversée lorsque Kojou et les deux filles s’étaient avérés passer du temps sur un bateau de croisière extravagant, bien que, du point de vue de Kojou, être avec Vattler était plus que suffisant pour garder son cœur loin de la paix.

Sayaka avait apparemment attrapé le récepteur de Yukina et s’était immiscée dans la conversation.

« Kojou Akatsuki, comprends-tu seulement ce que tu as fait ? Le navire du Duc d’Ardeal a l’immunité diplomatique, donc Yukina et moi ne pouvons pas mettre un pied dessus ! Pourquoi as-tu amené la Sorcière du Néant dans un endroit comme celui-ci ? Es-tu un imbécile ? Veux-tu être réduit en cendres ? »

Kojou s’était retrouvé avec un air renfrogné face à ces reproches.

« Je n’ai pas pu l’en empêcher ! Ce cinglé veut utiliser Natsuki comme leurre pour faire sortir les évadés. En vue de comment cela se passait, j’ai pensé que c’était beaucoup plus sûr s’ils se battaient proches de l’eau plutôt qu’au milieu de la ville. »

« Eh bien, je suppose que tu as raison, mais… »

Sayaka était d’accord à contrecœur, bien qu’un mécontentement marqué restait dans son ton.

Apparemment, elle avait provisoirement accepté qu’il y eût pour une fois une bonne dose de logique pour soutenir le jugement de Kojou.

Il y avait encore un certain nombre de prisonniers évadés qui en avait après Natsuki. S’ils combattaient Vattler au milieu de la ville, Kojou ne pouvait même pas imaginer les dégâts qu’ils allaient provoquer autour d’eux. Cela étant, les dégâts seraient certainement minimisés s’ils s’embourbaient plutôt dans l’eau.

Il avait entendu la voix de Yukina au téléphone une fois de plus.

« Donc Aiba et Mme Minamiya vont toutes les deux bien ? »

Eh bien, en quelque sorte ? répondit Kojou dans son esprit, un mauvais goût dans la bouche.

« Hum, elles n’ont pas l’air trop mal en point selon moi, » avait-il poursuivi à voix haute. « Je ne suis pas sûr de pouvoir dire que Natsuki va bien en ce moment, mais… »

Yukina soupira faiblement. « Je suppose que non… »

Elle avait vu par elle-même à la télévision que Natsuki avait été transformée en enfant d’âge préscolaire.

« Je pense que… il est préférable que tu renvoies au moins Aiba à sa propre résidence. Après tout, si elle reste là-bas, elle sera certainement prise dans un combat. »

« Je suis d’accord avec toi à cent pour cent sur ce point, » marmonna amèrement Kojou. « Mais elle ne m’écoute pas. Elle est plus têtue qu’elle n’en a l’air. Elle est aussi totalement éprise de Sana… »

Yukina était tombée dans une pause silencieuse et emplie de doutes.

« Sana… dis-tu ? »

« Son surnom est “Petite Natsuki”. »

« Ahhh… » exhala Yukina, apparemment prête à accepter pleinement cela pour une raison inconnue. Mais le ton de sa voix s’était immédiatement transformé en malaise. « De toute façon, Sayaka et moi allons nous rapprocher le plus possible de toi. S’il te plaît, ne crée pas encore plus de difficultés. »

« Qu’est-ce que ça veut dire… des difficultés ? » demanda Kojou.

« Comme, ah… avoir des pulsions vampiriques devant Aiba et l’agresser… »

« Comme si je le ferais ! Il y a une petite fille qui regarde ! »

« J’espère que cela restera ainsi. »

Yukina semblait inquiète jusqu’à son dernier mot lorsqu’elle avait coupé l’appel. Kojou avait remis son téléphone portable dans sa poche et s’était appuyé contre un mur voisin, épuisé. Et puis…

« Qui appelais-tu ? » demanda Asagi.

« Uwaa !? »

Kojou avait poussé un cri alors qu’il se tournait vers Asagi et Sana, n’ayant jamais réalisé qu’elles se tenaient juste là.

« A-Asagi !? Ne t’es-tu pas changée ? Vattler a dit que les servantes te donneraient quelque chose à porter ? » Kojou se mit à divaguer, une tentative désespérée pour changer de sujet.

Asagi et Sana étaient encore dans les vêtements déchirés et sales de la période où les évadés les avaient agressés.

Ah, ça ? semblait dire Asagi, en soulevant la manche de sa chemise boueuse.

« Elles ont dit qu’elles préparaient un bain. » Elle avait haussé les épaules.

« Bain ? »

« Elles disent qu’il y a un grand bain ici sur le bateau. Vattler ne fait pas de demi-mesures. C’est bien approprié pour un seigneur… Il est vraiment riche. »

Asagi avait parlé avec une admiration visible en regardant l’intérieur du navire.

« Je suppose qu’il l’est, » avait convenu Kojou. Il n’arrêtait pas d’oublier, en raison de la personnalité du type, mais c’était un noble de l’Empire du Seigneur de Guerre — un seigneur de haut rang. Normalement, il était vu ici comme un invité de l’État.

Asagi s’était approchée de Kojou et l’avait regardé en lui demandant. « Alors, Kojou, pourquoi connais-tu quelqu’un comme ça ? »

Kojou détourna les yeux sans réfléchir. « Eh bien, ah, nous avons des conditions physiques similaires… Euh, nous avons quelques problèmes communs, tu vois. »

Les yeux d’Asagi à moitié fermée se rapprochèrent encore plus de Kojou.

« Oh, vraiment… ? »

Avant que Kojou ne s’en rende compte, il avait été plaqué contre le mur, le regard sérieux d’Asagi le transperçant silencieusement. Apparemment, les excuses médiocres n’allaient pas suffire ici.

« Tu sais, Kojou… ces derniers temps, quand je te parle, j’ai l’impression que tu essaies de me cacher quelque chose, et parfois ça m’énerve vraiment… »

Kojou s’était soudain senti extrêmement coupable en écoutant ces propos honnêteté. Les excuses n’allaient pas suffire, précisément parce que Kojou lui cachait quelque chose. Mais Asagi avait haussé légèrement les épaules en disant : peu importe, je laisse facilement Kojou échapper à la corde.

« De toute façon, je le laisse tomber jusqu’à la fin du bain. Mais après ça, tu vas tout avouer cette fois-ci. Allons-y, Sana. »

Asagi s’était dirigée vers les installations, tenant la main de Natsuki, sous forme d’une fillette, qui la suivait. Kojou avait regardé son dos disparaître avant d’expirer profondément.

Il était reconnaissant d’avoir eu le temps de mettre de l’ordre dans ses sentiments, mais en d’autres termes, cela aurait pu être l’ultimatum d’Asagi. Il semblait que les tentatives continues de Kojou pour lui cacher la vérité sur lui-même avaient atteint leur limite.

De plus, il semblait qu’il n’y aurait nulle part où se cacher d’Asagi ce soir — elle se méfiait particulièrement du fait que Vattler était apparemment l’une de ses connaissances. Kojou ne savait toujours pas pourquoi elle était si nerveuse à ce sujet alors que c’était elle qui était montée à bord, déjà bien consciente du danger.

Eh bien, Vattler était dangereux dans les deux cas, et la méfiance d’Asagi à son égard était une bonne chose — ou du moins, c’était la conclusion inoffensive que Kojou s’était forcé à accepter.

Alors qu’il pensait cela, Kojou avait soudain levé la tête. Un inconnu s’approchait de lui, comme s’il remplaçait ses compagnons disparus.

C’était un jeune homme portant un smoking argenté. En apparence, il avait quinze ou seize ans. Il était de petite taille et son visage présentait un regard doux, ce qui faisait de lui un joli garçon.

Ses cheveux étaient gris, ses yeux étaient vert jade. Ses cils étaient longs. C’était peut-être pour cela qu’il avait un air fragile qui avait éveillé les instincts protecteurs de Kojou, même s’il était du même sexe.

Au moment où ses traits ciselés avaient captivé les yeux de Kojou, il avait demandé. « Akatsuki, n’est-ce pas ? »

L’appel de son nom par la voix du jeune homme, qui apparemment n’avait pas encore mué, avait finalement ramené Kojou à la raison.

« Et vous êtes ? » demanda Kojou.

« Je m’appelle Kira Lebedev Voltisvala, de la lignée du seigneur de guerre perdu. Je m’excuse de ne pas m’être présentée plus tôt au seigneur du Sanctuaire des Démons d’Extrême-Orient, je vous demande de me pardonner, Quatrième Primogéniteur. »

Le garçon qui se faisait appeler Kira arborait un beau sourire charmant, même dans sa révérence.

« Ce n’est pas comme si c’était mon territoire, alors vous n’aviez pas vraiment besoin de venir me saluer… Mais de toute façon, ravi de vous rencontrer. Ah, vous pouvez m’appeler Kojou. »

En disant cela, Kojou avait fait un sourire amical à Kira. Étant de la lignée du seigneur de guerre perdu, il était probablement un aristocrate de l’Empire du Seigneur de Guerre, tout comme Vattler. Même s’ils avaient le même âge — du moins en apparence — Kojou n’était pas très à l’aise lorsqu’on lui parlait avec un langage aussi étouffant et poli.

« … Comme je m’y attendais, » murmura Kira avec admiration, son regard remontant le long du corps de Kojou. « Vous êtes vraiment un homme effrayant, qui dirige la population depuis les ténèbres par la peur et le chaos plutôt que par des démonstrations de force… Je suis profondément ému. »

« Euh, non, ce n’est pas du tout comme ça… Vraiment, » déclara Kojou.

Alors que Kira lui lançait un regard de pure admiration, Kojou soupira doucement.

Apparemment, Vattler avait donné au garçon une impression manifestement erronée de Kojou. Kira semblait complètement ignorer le fait qu’on jouait avec lui. Il a probablement une personnalité très sérieuse, pensa Kojou, qui avait pitié du garçon. Il pensait que le nouveau venu ressemblait un peu à Yukina, à cet égard.

« Alors, que me voulez-vous ? »

Kira avait discuté avec Kojou en japonais courant, presque trop courant — .

« Oui, si je puis me permettre, nous avons préparé un changement de tenue. S’il vous plaît, purifiez-vous d’abord, puis —, » déclara Kira.

Apparemment, ils avaient prévu des vêtements pour que Kojou puisse se changer.

« “Purifiez-vous”… ? Voulez-vous dire prendre un bain, non ? » demanda Kojou.

Pour une raison inconnue, Kira était devenu timide à ce moment-là, alors même qu’il affichait un petit sourire ironique dans la direction de Kojou.

« Oui. Bien que la vue de vous couvert de sang ait un certain charme… féroce, » déclara Kira.

Kojou avait été un peu décontenancé par le léger souffle qui lui était parvenu à la poitrine. Hé, attends, ce joli visage me déconcerte peut-être un peu, mais c’est un mec. À tous les coups un mec.

« Ha ! Ce n’est pas pour moi. Mais je vous suis reconnaissant de pouvoir prendre un bain. Me montrez-vous où c’est ? » demanda Kojou.

« Oui, si cela ne vous dérange pas, Maître Kojou, » déclara Kira.

« Bien sûr, ça ne dérange pas. Ce bateau est si énorme que je me perdrais sûrement tout seul, » répondit-il.

Kira avait encore salué avant d’aller plus loin. Kojou avait essayé de suivre ses pas lorsque le regard furtif qu’il avait senti de derrière lui avait fait que ses pieds étaient restés immobiles.

Un jeune homme que Kojou n’avait pas reconnu se tenait en haut d’une volée d’escaliers, regardant Kojou en bas.

Il était probablement de la même génération que Kojou. Sa taille était aussi à peu près la même. Il portait un smoking argenté très semblable à celui de Kira, mais l’air antagoniste qui l’enveloppait donnait une impression complètement différente. Le visage du jeune homme était très beau, rappelant une lame d’acier froide. L’hostilité était évidente sur son visage lorsqu’il fixait Kojou du regard.

« Qui est-ce ? » demanda Kojou.

Kira semblait en conflit lorsqu’il avait répondu à la question de Kojou.

« Tobias — le Seigneur Tobias Jagan. Lui aussi est un noble de l’Empire du Seigneur de Guerre, mais —, » répondit Kira.

« Euh… ai-je fait quelque chose pour l’indisposer ? » demanda Kojou.

« Non… Ce n’est pas ça, » répondit Kira doucement. « C’est peut-être, ah… de la jalousie. »

« Jalousie… ? » demanda Kojou.

Pour une raison inconnue, les joues de Kira rougissaient lorsqu’il parlait, et il baissait les yeux avec un regard encore plus contradictoire.

« Oui. Après tout, le Duc Ardeal est toujours très attentif au Maître Kojou, donc…, » déclara Kira.

Mon Dieu, pensa Kojou avec perplexité. Oui, Vattler avait « juré son amour éternel » à Kojou ou quelque chose de stupide comme ça, mais c’était purement lié à sa soif du sang puissant du quatrième Primogéniteur. Ce n’était certainement pas une raison pour que cet homme le considère comme un ennemi. Cela dit, s’il était effectivement « jaloux » de Kojou malgré tout, cela devait signifier — .

Alors que Kojou examinait la question avec une grande et sérieuse intensité, il sentit un étrange frisson monter le long de sa colonne vertébrale.

« … Désolé. Je vais faire comme si je n’avais rien entendu, » murmura-t-il.

Tobias Jagan avait continué à fixer Kojou et Kira sans un mot tant qu’il était visible.

***

Partie 3

Kojou, portant une serviette de sauna, soupirait d’admiration en faisant le point sur son environnement.

« Ce bain n’est pas grand, il est énorme. »

Bien qu’il n’ait pas été aussi grand qu’un établissement de bains japonais, le bain était si bien conçu qu’il faisait presque oublier qu’on était sur un bateau. Le niveau de l’eau était peu profond, mais on pouvait y faire entrer dix personnes avec de la place en plus.

Même sans l’ornementation pompeuse, le blanc pur qui recouvrait la salle de bains donnait un air de haute société. Kojou n’avait pas de mal à imaginer un homme riche dans la baignoire, entouré de jeunes amoureuses passionnées.

Grâce à de telles pensées d’excès, Kojou avait immédiatement imaginé Vattler là-bas, servi par Kira et Tobias… et il s’était rapidement effondré. L’image lui avait causé des dommages psychologiques d’une ampleur surprenante.

Malgré tout, Kojou était assez reconnaissant d’avoir eu la chance de laver sa crasse. Son corps tout entier était dans le chaos à cause de la sueur et du sang provenant des multiples combats.

Kojou avait son propre sang sur lui, et aussi celui de Yuuma de quand il la portait — .

« … Yuuma… attends-moi, » chuchota Kojou en frottant le sang séché, qu’il fit disparaître sous une lourde mousse de savon.

L’image de son amie d’enfance, blessée et en lambeaux, lui avait envoyé une douleur dans la poitrine.

Même si ce n’était pas une course contre la montre, cela laissait Yuuma planer proche de la porte de la mort. Pour la sauver, ils devaient d’abord sauver Natsuki, mais Natsuki avait perdu son pouvoir magique et avait aussi les évadés à ses trousses.

Il s’inquiétait également du fait qu’Aya Tokoyogi était introuvable. De plus, il ne savait pas quand ni où Vattler se mettrait en colère comme il le souhaitait. La capacité cérébrale de Kojou était proche de la surcharge en raison du nombre de problèmes. Malgré cela, il n’avait aucune chance de s’enfuir avec la vie de Yuuma en jeu.

Calmes-toi, pensa Kojou, en prenant plusieurs grandes respirations. C’est précisément dans des moments comme celui-ci qu’il ne pouvait pas tout oublier. Il fallait d’abord qu’il se calme et règle les problèmes un par un, ou — .

Avant que Kojou ne puisse terminer cette pensée exceptionnellement sérieuse — .

« La température du bain vous convient-elle, Quatrième Primogéniteur ? » demande une voix de fille.

« Uwah !? »

La présence soudaine derrière lui avait mis en pièces le calme intérieur de Kojou.

Avec un bruit de pieds nus, des jeunes filles inconnues étaient entrées dans la salle de bain.

Elles étaient cinq, chacune portant un maillot de bain d’une couleur différente. Leur âge allait de la petite adolescence à la mi-vingtaine. Elles semblaient être une bande de sœurs qui s’entendaient bien, mais leurs origines et leurs morphologies n’avaient rien en commun. Le seul point commun était qu’elles étaient toutes très belles. Chacune d’entre elles possédait une beauté comme si elle était née dans la haute société.

Bien sûr, Kojou, nu, s’était empressé d’enrouler une serviette autour de ses reins et s’était levé.

« Qu’est-ce que c’est que ça ? » demanda Kojou.

La belle brigade de jeunes filles en maillot de bain l’entoura sans pitié.

Une femme blonde de vingt ans, à peu près, s’était penchée près de Kojou pendant qu’elle parlait. « Nous sommes une troupe de domestiques au service du Duc d’Ardeal. Nous avons pensé que nous pourrions vous laver le dos. »

Elle portait un bikini en hibiscus rouge qui couvrait son corps glamour.

« Nan, c’est bon, vous n’avez pas besoin de me laver le dos ou quoi que ce soit…, » déclara Kojou.

Kojou n’avait aucune idée de la raison pour laquelle les servantes de Vattler s’étaient introduites dans la salle de bains.

« Alors, l’avant ? » Elle répondit.

« Pas non plus l’avant ! Et s’occuper de quelqu’un dans le bain n’est pas un travail de domestique de toute façon, n’est-ce pas !? » demanda Kojou.

La plus âgée et la plus grande d’entre elles, d’apparence réservée et féminine dans son maillot de bain bleu, répondit doucement à Kojou. « … Je vois que le chat est effectivement sorti du sac. »

Kojou l’avait mentalement surnommée Bikini Bleu.

« Sorti du… sac ? » demanda Kojou.

« En fait, nous ne sommes pas du tout des femmes de ménage, vous voyez, » déclara celle en rouge.

« Hein ? »

Une jeune fille à la peau brune avait parlé sur un ton d’indifférence. « Nous sommes en fait des otages. »

Elle avait un visage plutôt jeune et un maillot de bain jaune. Le design du maillot de bain présentait un aspect sportif, correspondant à son jeune physique.

« … Des otages ? »

La fille au bikini blanc avait répondu en première. « Oui. Nous sommes les filles de membres de la famille royale et de hauts fonctionnaires de pays limitrophes de l’Empire du Seigneur de Guerre, y compris quelques princesses de pays que le Duc d’Ardeal a personnellement détruits… En fin de compte, nous lui avons été vendues en échange de la préservation de nos terres natales. »

Celle au bikini noir avait ajouté. « La grâce salvatrice est le fait que Duc Ardeal se penche de cette façon, donc il nous laisse faire à peu près tout ce que nous voulons. Il ne semble pas s’intéresser aux femmes, vous voyez… »

Ces deux dernières avaient chacune murmuré à l’une des oreilles de Kojou. Elles étaient aussi les plus proches de Kojou en âge, ce qui ne faisait qu’amplifier sa gêne.

La beauté blonde en bikini rouge avait posé ses mains sur ses hanches et avait poussé sa poitrine avec fierté.

« Nous nous sommes donc dit que nous allions nous élever dans le monde maintenant et nous venger de la mère patrie qui nous a vendu. »

La soudaine et féroce sécheresse de la gorge de Kojou le rendit nerveux.

Le défaut prédestiné du vampire était que la luxure éveillait ses pulsions vampiriques. Un vampire en proie à de telles pulsions se perdait jusqu’à ce qu’il ait goûté le sang de quelqu’un. Le fait d’être séduit par une petite armée de beautés en maillot de bain dont les visages étaient de la même classe que ceux des idoles de gravure était plus que destructeur pour stimuler les pulsions de Kojou. Il serait très dangereux d’être aspiré par leur rythme.

Kojou détourna les yeux des filles et demanda d’une voix aussi sérieuse que possible. « S’élever dans le monde ? »

Celle au bikini rouge avait pressé une main sur la poitrine de Kojou, comme si elle voulait anéantir tous ses efforts désespérés.

« Oui, par exemple en portant les enfants du quatrième Primogéniteur, » répondit-elle.

Kojou s’était férocement éclairci la gorge.

Noir et blanc : Kojou était bloqué à gauche et à droite.

« Il est fort possible qu’un descendant direct du quatrième Primogéniteur soit un vampire dépassant le Duc Ardeal en termes de pouvoir, » déclara celle en noir.

« Ou bien nous pourrions boire le sang d’un Primogéniteur et devenir nous-mêmes des vassaux de sang, » souligna celle en blanc.

« … Et si vous me donniez une chance ? » déclara celle en rouge, en se tenant juste devant Kojou et en se montrant du doigt. Kojou était choqué de voir à quel point sa déclaration était trop brutale.

Un Vassal de Sang était un pseudo-vampire, ils ne pouvaient être créés que par contrat vampirique par les vampires de la première génération. On disait qu’ils possédaient une capacité de combat parfois supérieure à celle des vampires de sang pur et vivaient avec leurs maîtres pour l’éternité.

L’objectif des filles semble être de devenir les vassales de sang de Kojou et d’acquérir une puissance de combat comparable à celle du quatrième Primogéniteur lui-même. Kojou se sentait en fait soulagé que leur comportement jusqu’alors soit froidement calculé et ne soit pas uniquement basé sur le désir sexuel.

Pensant peut-être qu’elle était trop attirante pour Kojou, celle en rouge avait soudain baissé les yeux timidement. « Ah, mais c’est notre première fois, alors soyez gentils… »

Elle avait commencé à le câliner quand Kojou avait secoué la tête pour essayer de la repousser.

« Je ne fais rien à personne ! » déclara-t-il.

La plus jeune fille, celle en maillot de bain jaune, le regardait avec inquiétude, les yeux humides et levés.

« … Vous ne nous aimez pas ? » demanda-t-elle.

En premier lieu, Kojou pensait que poser la main sur une telle fille était un crime en soi.

« Non, ce n’est vraiment pas du tout ça —, » déclara Kojou.

Alors que Kojou soupirait et caressait ses cheveux mouillés vers l’arrière, ses yeux s’étaient levés alors que quelque chose semblait le harceler soudainement. Pour commencer, comment ces filles savaient-elles que Kojou entrait dans le bain… ?

« Attendez! Est-ce Vattler qui vous a demandé de faire ça ? Vous a-t-il ordonné de venir me séduire ? » demanda Kojou.

La question de Kojou, diffusée à voix basse, avait raidi tous les visages de la brigade des jolies filles.

Si les filles agissaient sur les ordres de Vattler, Kojou pouvait facilement comprendre pourquoi elles étaient après lui pendant qu’il prenait son bain. Les faire courir après Kojou pour le soulager de son ennui semblait être exactement le genre de chose que Vattler ferait.

Celle au bikini noir s’était détournée afin de fuir le regard interrogateur de Kojou.

« Euh… ce n’était pas un ordre, plutôt, nos intérêts coïncident… ? » répondit-elle.

Celle au bikini blanc s’était excusée avec un sourire gêné, mais charmant. « C’est vrai, c’est vrai. Et c’est tout à fait vrai que nous sommes des otages. »

Kojou n’avait pas le sentiment que les filles lui mentaient. Donc, au moins, les filles étaient entrées dans l’immense salle de bain de leur plein gré. Cela ne changeait rien au fait que Vattler les avait incitées à le faire, mais — .

« … Pourquoi veut-il que je boive du sang à ce point ? » demanda Kojou.

La dame en bikini bleu répondit sérieusement au murmure de Kojou. « Je me pose vraiment la question. J’ai l’impression qu’il attend quelque chose, pourtant… »

« Il attend quelque chose ? » demanda Kojou.

« Oui. C’est comme s’il cherchait le pouvoir de combattre quelque chose de plus dangereux qu’un Primogéniteur —, » répondit-elle.

Kojou avait haleté.

D’une part, vous aviez le Nalakuvera que les terroristes avaient ramené à la vie, d’autre part, la Fausse-Ange de Kensei Kanase — de toute façon, Vattler avait montré un intérêt pour des armes qui avaient le potentiel de surpasser un Primogéniteur en capacité de combat. Et Kojou, le quatrième Primogéniteur — le vampire le plus puissant du monde — était certainement qualifié pour être en possession d’un pouvoir « supérieur à celui d’un Primogéniteur ». C’était peut-être une simple coïncidence, mais cela s’était étrangement additionné.

Bien que Vattler ait été un homme comme les autres, il aurait pu simplement vouloir jouer avec un adversaire puissant…

Celle en rouge avait eu le dernier mot lorsque les filles avaient quitté le bain : « Puisque c’est comme ça, appelez-nous à tout moment si vous changez d’avis à ce sujet. Nous la laisserons prendre le relais pour aujourd’hui… »

Kojou avait rougi en entendant des phrases comme « Il est plus mignon que je ne le pensais » et « C’est sûr ! » en provenance du vestiaire. Il se sentait très fatigué alors qu’il se recroquevillait en boule.

Il avait à peine réussi à contrôler ses pulsions vampiriques, mais son cœur battait déjà très fort. Il n’était pas en état de penser de manière rationnelle.

Mais décidant qu’il pouvait se plonger tranquillement dans le bain entre-temps, Kojou s’était déplié et avait commencé à marcher vers le bain. Mais alors qu’il le faisait, il se rappela soudain les derniers mots de la brigade.

« “Laissons-la prendre le relais”… ? Qui ? »

Alors que Kojou s’arrêtait pour réfléchir, ses oreilles captèrent le bruit de nouveaux pas qui s’approchaient du vestiaire. Une voix familière s’était alors fait entendre.

« — Attends, Sana ! Attention, le sol est mouillé ! »

« Eh… ? » Kojou fit écho.

Deux silhouettes humaines avaient émergé du côté opposé de la vapeur blanche. L’une était une toute petite fille avec une serviette de bain couvrant pratiquement tout son corps. L’autre était une lycéenne avec de magnifiques traits de visage.

Remarquant la présence de Kojou, Asagi s’était arrêtée à ce moment-là et là, avec une surprise évidente.

« Eh !? »

Ses yeux s’ouvrirent largement alors qu’elle se tenait debout, raide, regardant Kojou avec stupéfaction.

Pendant un moment, ils s’étaient regardés sans un mot, puis ils avaient poussé deux grands cris d’horreur simultanément.

***

Partie 4

Kojou marmonnait de manière incohérente alors qu’il s’enfonçait dans le bain turc peu profond.

« A-Asagi, pourquoi es-tu… ? » demanda-t-il.

Asagi s’était assise, mais avec le dos tourné vers lui.

« K-Kojou, pourquoi es-tu là ? » demanda-t-elle à son tour.

Tous deux avaient plongé dans l’eau pour cacher leur corps, et aucun des deux n’était en mesure de partir.

Pour sa part, Sana s’amusait, nageant dans l’eau du bain, peut-être excitée d’être dans un bain aussi large pour une fois.

C’est alors que Kojou avait réalisé qu’il y avait des portes de vestiaires à gauche et à droite. « Donc, euh, peut-être que c’est un… bain mixte ? Et c’est seulement les entrées qui sont différentes pour les garçons et les filles ? »

Il ne s’attendait pas à ce qu’un navire battant pavillon de l’Empire du Seigneur de Guerre ait été construit comme ça.

Kojou ne doutait pas que Vattler, qui en était conscient depuis le début, avait fait exprès de se taire. Ce salaud, pensa Kojou en secouant silencieusement son poing.

Asagi avait demandé humblement. « Hum, as-tu… vu ? »

La réponse de Kojou n’était cependant pas celle de l’innocent Vue quoi ?

« N-nah, pas du tout. C’était juste une seconde, » déclara Kojou.

« C’est ainsi, » répondit-elle.

Kojou et Asagi avaient ri poliment, de manières sèches et raides, en même temps. Comme si c’était voulu, la salle de bain avait volontairement fait écho de leurs voix sur les murs, et après quoi, il ne resta plus qu’un silence inconfortable.

Alors que la pause silencieuse se poursuivait, Kojou avait entendu un plop, comme si quelque chose s’enfonçait.

Kojou et Asagi avaient échangé des regards interrogateurs lorsque chacun d’eux était soudainement devenu pâle. Au moment où ils l’avaient quittée des yeux, le corps de Sana avait coulé au fond du bain. La seule chose à la surface de l’eau était quelques petites bulles.

« H-hey !? » cria Kojou.

« S-Sana !? » s’écria Asagi.

Ils s’étaient tous les deux levés en raison de la surprise, se précipitant vers la fille engloutie sous l’eau.

Cependant, contrairement à la nervosité qui régnait en Kojou et Asagi, Sana, qui nageait tranquillement dans le bain, avait levé la tête au-dessus de la surface de l’eau comme si rien ne s’était passé. Puis, elle avait recommencé à nager comme un chien. Les éclaboussures avaient fait balancer les pétales de rose à la surface de l’eau.

 

 

« Elle était juste en train de plonger, hein… ? » Kojou avait réfléchi à ce qui s’était passé.

« C’est bien dommage, » répondit Asagi.

Kojou et Asagi s’étaient fait face en se tapotant la poitrine avec soulagement.

Ils avaient tous deux immédiatement réagi et ils avaient coulé en toute hâte leurs zones importantes sous le niveau d’eau.

Même avec des serviettes de bain enroulées sur le corps, c’était un peu trop stimulant à si courte distance.

Cependant, le dos et les épaules d’Asagi étaient encore exposés, la serviette de bain, imbibée d’eau chaude, épousait les contours de son corps. Pour commencer, le simple fait d’être dans le même bain qu’une camarade de classe était une situation anormale, les nerfs de Kojou n’allaient pas tenir le coup.

Sans autre choix, Kojou avait renforcé sa détermination et il avait déclaré. « Alors, je vais d’abord sortir. Désolé, pourrais-tu fermer les yeux un moment ? »

Mais juste au moment où Kojou essayait de se lever, Asagi avait saisi sa main et avait tiré fortement dessus.

« Attends ! » déclara Asagi.

« Qu-Quoi — !? » s’exclama Kojou.

Son équilibre étant rompu, Kojou était tombé dans le bain avec une grande force. En conséquence, les deux individus s’étaient retrouvés l’un sur l’autre. Et comme si c’était un défi total, Asagi regarda directement dans les yeux de Kojou.

« C’est une grande opportunité. Alors, pourquoi ne me dis-tu, ici et maintenant, ce que tu me caches exactement ? » demanda Asagi.

« Asagi… »

Attaqué de tant de façons inattendues, l’intérieur de la tête de Kojou était déjà complètement vide.

Il n’avait plus rien pour trouver une excuse. Les seules réponses qu’il avait à ses questions étaient maintenant la vérité littérale. Asagi en était sans doute bien consciente et pensait qu’elle pouvait l’interroger ainsi.

Comme si elle s’était brièvement enfoncée dans ses pensées, Asagi avait pris une profonde respiration et avait posé sa question.

« Kojou, est-ce que tu… aimes les hommes ? » demanda Asagi.

« … Hein ? »

Alors qu’Asagi attendait sa réponse en retenant son souffle, Kojou la regarda fixement avec un regard idiot. Pendant un moment, ce qu’elle lui avait demandé ne s’enfonçait pas dans son cerveau.

« Attends une minute !? D’où te vient cette idée !? » s’écria Kojou.

Les joues d’Asagi brûlaient de rouge pendant qu’elle précisait ses pensées. « Je — je veux dire, je ne vois pas d’autre raison pour laquelle tu serais copain-copain avec un noble de l’Empire du Seigneur de Guerre ! Je veux dire, ce gars est un beau garçon… »

Kojou se demandait si c’était la question brûlante qui l’avait le plus tourmenté depuis le début. Était-ce la cause de sa nervosité inhabituelle — ?

Kojou pouvait sentir un frisson sur ses deux bras. Sérieux, il répondit. « Même si c’est une blague, arrête… Tu me donnes la chair de poule là… »

Cependant, les lèvres d’Asagi s’étaient quand même légèrement pincées. « Yuuma a aussi ce sentiment de jeunesse… »

« Euh, Yuuma est mon amie depuis que nous sommes petits. Aimer ou ne pas aimer n’est pas le problème, » déclara Kojou.

« C’est — c’est comme si mon corps ne t’intéressait pas, et pourtant…, » déclara Asagi.

Cette observation inattendue avait fait grimace à Kojou. « Hahh ? Qui diable t’a dit ça ? »

C’était peut-être la surprise d’Asagi de voir à quel point il avait mordu à l’hameçon qui avait fait que les mains d’Asagi avaient saisi le bord de sa serviette de bain, tenant la fermeture devant sa poitrine alors que ses yeux scintillaient.

« Veux-tu voir ? » demanda Asagi.

Alors même que Kojou était angoissé par la raison pour laquelle elle lui faisait avouer quelque chose de si embarrassant à son égard, sa réponse était plutôt directe.

« Eh bien, bien sûr que je le veux…, » déclara Kojou.

Asagi pencha la tête d’un air curieux comme si l’affaire concernait quelqu’un d’autre et poussa plus loin…

« Ah, est-ce vrai ? » demanda Asagi.

« Oui, ça l’est ! Mais je ne veux pas que tu me détestes pour ce genre de choses ! Je veux dire, tu es, comme, une amie spéciale pour moi et tout —, » répondit Kojou.

En regardant Kojou hausser la voix dans un tel désespoir, Asagi avait fredonné. « … Spéciale, hein ? Je vois… »

Le regard taquin qu’elle avait sur les lèvres était celui d’une femme normale, de tous les jours.

« Est-ce donc pour cela que tu gardais tes distances avec moi après notre baiser ? » demanda Asagi.

Kojou avait répondu de la manière la plus directe qu’il ait pu trouver. « Eh bien, excuse-moi. Je veux dire, j’avais mes propres émotions que je devais mettre en ordre — . »

Ce faisant, il avait senti une douceur inattendue sur son dos. Asagi, qui ne portait qu’une serviette de bain, s’était blottie contre lui.

« A-Asagi !? »

« Un cadeau. Mais ne regarde pas par là, » répondit Asagi.

« O-okay ? »

Cette fois, le comportement totalement indéchiffrable d’Asagi avait plongé Kojou dans une panique totale. Il se demandait si ce n’était pas plutôt un billet gratuit pour un aller simple vers une crise cardiaque, alors que…

« … Kojou ? Qu’est-ce que c’est que ces blessures ? » demanda Asagi.

Le visage d’Asagi s’était affaissé lorsqu’elle avait remarqué la blessure sur la poitrine de Kojou. Il était évident, même pour un amateur complet, qu’il ne s’agissait pas d’une cicatrice normale. Il n’y avait pas moyen que des excuses à moitié inventées puissent la tromper maintenant.

Kojou avait sombré dans le silence et n’avait pas répondu.

Cependant, la raison de son silence n’était pas son incapacité à trouver une excuse adéquate. C’était plutôt parce que Kojou avait remarqué que, distrait par sa blessure, Asagi s’était penchée vers l’avant, ce qui avait permis au bord de sa serviette de bain de glisser vers le bas — .

« Désolé, Asagi. J’ai atteint ma limite… ! » s’exclama Kojou.

Kojou avait repoussé le corps d’Asagi et s’était levé avec force.

« Eh !? A-Attends, Kojou !? » s’écria Asagi.

Asagi, qui était tombée dans le bain sur ses fesses, avait levé les yeux en état de choc vers Kojou, qui était ensanglanté.

Le nez de Kojou avait fait jaillir du sang avec une force que l’on attendrait de la rupture d’une artère.

Le sang frais s’était répandu tout autour du bain, teintant la surface de l’eau de sorte qu’elle ressemblait à une sorte de marbre cramoisi.

Cependant, à ce moment-là, Kojou avait déjà sauté hors du bain, se précipitant dans le vestiaire.

Asagi était restée sur ses fesses dans l’eau chaude.

« Mon Dieu… qu’est-ce qu’il a ? » marmonna-t-elle.

Cependant, malgré son soupir, l’expression de son visage était en quelque sorte celle d’un diablotin. Elle ricanait en repensant à l’expression du visage de Kojou.

Pendant ce temps, sans un seul mot, Sana ramassait l’eau du bain à deux mains et la regardait.

« … »

L’eau, teintée de cramoisi vif, était mélangé avec le sang du quatrième primogéniteur — .

***

Partie 5

La cabine que Vattler avait aménagée pour Kojou et les deux filles n’avaient qu’un seul grand lit. C’était une suite familiale de part en part.

Kojou s’attendait à ce que ça se passe comme ça, alors il s’était écroulé sur le canapé contre le mur sans y penser. En tout cas, c’était la meilleure solution pour assurer la sécurité de Sana et Asagi.

Asagi n’avait pas non plus déposé de plainte particulière. Elle s’était probablement dit qu’il valait mieux être avec Kojou plutôt que sur le bateau d’un étrange vampire, toute seule.

Cette même Asagi avait regardé Kojou, maintenant couché sur le côté, et lui avait demandé avec une inquiétude évidente. « Tu vas bien, Kojou ? Tu avais l’air d’être sur le point de mourir, là-bas. »

Kojou s’était assis avec lenteur et avait fait un sourire frêle avec ses lèvres ridées. « Ne t’inquiète pas… il y a juste un peu de sang ici. »

Asagi affaissa ses épaules, exaspérée. « C’est parce que tu t’es tellement vidé du nez là-bas… »

Asagi portait désormais un yukata à la place de ses vêtements de ville sales. Apparemment, l’une des servantes de Vattler, ignorant les détails du festival de la Veillée Funèbre, avait dû se dire. C’est un festival au Japon, il faut donc porter le yukata, et elle avait prêté à Asagi un exemplaire de sa garde-robe personnelle.

Asagi, baissant la voix pour que Sana — qui sautait actuellement sur le lit comme un trampoline — n’entende pas, avait demandé. « Alors, Natsuki est-elle vraiment la clé de toute cette histoire de la Barrière pénitentiaire ? »

C’était approprié venant d’une résidente d’un Sanctuaire des Démons comme elle. Asagi n’avait apparemment pas de mal à croire que c’était vraiment Natsuki dans un état de vieillissement réduit.

« Probablement. Ce serait pour cela que les évadés sont après elle. Apparemment, elle a perdu la mémoire et a été miniaturisée à cause du grimoire d’une des sorcières qui s’est évadée. »

« Une malédiction ? » demanda Asagi.

Kojou repensa à la discussion entre les évadés qu’il avait entendue à la Barrière pénitentiaire. « Elle a dit qu’elle avait volé le temps qu’elle avait vécu… »

Asagi avait plissé ses élégants sourcils. « Le grimoire de l’Histoire personnelle ? C’est un objet dangereux de classe interdite, n’est-ce pas ? »

« Selon moi, c’est probablement parce qu’elle a utilisé ce truc qu’ils ont pu sortir de la Barrière pénitentiaire, » déclara Kojou.

Asagi fit un signe de tête sinistre. « Oui, je vois… »

Il va sans dire que l’évasion de criminels sorciers de la Barrière pénitentiaire était un grave problème, non seulement pour Kojou et ses connaissances, mais aussi pour chaque homme et femme de l’île d’Itogami.

« Tu as donc été mêlé à cet incident à cause de Yuuma ? » demanda Asagi.

La façon dont Asagi avait posé la question avait fait que Kojou avait répondu sérieusement. « Eh ? Comment as-tu su que… ? »

« Bon sang, » soupira Asagi.

« Parce que j’ai regardé les dossiers de la Corporation de Management du Gigaflotteur. Il y a dix ans, la sorcière Aya Tokoyogi a été capturée par Natsuki lors de l’incident dit “de la Bible noire”. Yuuma est liée à cela, n’est-ce pas ? Tokoyogi est un nom très rare, ce n’est donc pas une coïncidence, n’est-ce pas ? »

« C’est… tellement… »

Kojou s’était mordu la lèvre amèrement en écoutant la révélation.

Maintenant qu’elle l’avait dit, il restait bien sûr une trace de l’autre bataille entre Natsuki et Aya Tokoyogi, une dizaine d’années auparavant.

Si c’était le cas, Asagi connaissait sûrement aussi la Bible noire et les éléments qui y étaient associés.

Cependant, avant que Kojou ne puisse poser des questions à ce sujet, une voix zézayante avait appelé Asagi.

« Maman… »

Sana, agenouillée sur le lit, regardait Asagi, ses yeux incapables de se concentrer.

Asagi était intriguée alors qu’elle approchait son visage de la mini-Natsuki. « Sana ? Qu’est-ce qu’il y a ? »

« Dormir. »

« Ah… Il est assez tard, n’est-ce pas… ? » déclara Asagi.

Asagi avait fait un sourire tendu en regardant une horloge indiquant qu’il était presque minuit. Asagi s’allongea avec Sana, la tenant dans ses bas chaleureusement et lui caressa doucement la tête.

Sana avait appuyé son visage contre la poitrine d’Asagi et avait fermé les yeux, apparemment soulagée. Bientôt, elle s’endormit rapidement, comme toute fille normale. C’était une scène qui, d’une certaine manière, réchauffait le cœur.

« Franchement, tu as l’air d’une vraie mère avec sa vraie fille là, » chuchota Kojou en admirant la scène.

Sana était certainement une fille très mignonne, mais la façon dont Asagi s’occupait d’elle avec tant de tendresse l’avait surpris.

Quoi? Tu pensais que je ne pouvais pas le supporter ? répondit Asagi en murmurant, les joues rougies par un léger picotement.

« Arrêtons-nous là. Je veux dire, si c’est ma fille, ça fait de toi le père —, » déclara Asagi.

« Hein ? »

La réponse de Kojou à la plainte d’Asagi avait été un grognement de surprise incohérent. Asagi, se rendant compte qu’elle avait dérapé, s’était amendée de façon radicale. « Je — je veux dire dans cette situation. C’est ce à quoi cela ressemblerait pour un observateur impartial. »

« C-C’est vrai. Tu marques un point…, » déclara Kojou.

Kojou l’avait désespérément aidée dans sa tentative d’arrêter le glissement vers des eaux dangereuses.

Même si elle était minuscule pour l’instant, Asagi dormait dans le même lit que son professeur principal. Il était préférable d’éviter autant que possible toute question de comportement inapproprié.

Pensant qu’il ferait mieux de changer de sujet, Kojou avait exprimé ses pensées honnêtes sur un autre sujet.

« En y réfléchissant bien, ce yukata te va étonnement à ravir, » déclara-t-il.

Sa petite sœur lui avait fait comprendre que les filles voulaient être complimentées sur leurs vêtements lorsqu’elles se changeaient pour quelque chose d’un peu différent de leur habituelle tenue. Cependant, Asagi avait jeté un regard furieux sur Kojou, avec une insatisfaction visible.

« Que veux-tu dire par “étonnamment” ? Bien sûr que ça me va bien ! Et d’ailleurs, pourquoi portes-tu un maillot de sport ? » demanda Asagi.

« Comme Vattler n’a rien envoyé de correct, Kira m’a prêté quelque chose qui lui appartenait. C’est un gars assez sympa, tu sais. Tu vois ? C’est un maillot de Boston de l’époque où ils étaient champions, » répondit Kojou.

C’est ainsi que Kojou avait expliqué tout ça sur le maillot de sport qu’il avait emprunté. Apparemment, Kira était un fan des Celtics de Boston. Asagi se retourna avec un agacement prononcé face à l’expression de fierté que Kojou arborait sur son visage.

« Hé, je ne sais rien de ce genre de choses, » rétorqua Asagi. « Et franchement, ne me regarde pas autant. Je suis assez ordinaire en ce moment. »

« Ah… ? Je suppose que tu es…, » balbutia Kojou.

Ce n’est que maintenant que Kojou s’était rendu compte qu’elle donnait une impression différente de la norme. Comme il était d’accord avec son évaluation, il avait brusquement fixé Asagi du regard, longuement et sérieusement.

« Tu es très bien dans des vêtements normaux, d’allure mûre, comme ça, alors pourquoi t’habilles-tu toujours de façon aussi flamboyante ? » demanda Kojou.

« HEIN !? »

On aurait dit que quelque chose s’était brisé à l’intérieur d’Asagi alors que ses tempes se gonflaient de rage.

Sans un mot, Asagi avait enlevé les sandales qu’elle portait, les tenant toutes les deux dans une main. D’un mouvement en uppercut, elle les avait frappées sur le menton de Kojou, avec force.

Alors qu’un bruit sourd retentissait, Kojou avait gémi de l’agonie et il pressa une main sur sa mâchoire.

« Ça fait mal ! Qu’est-ce qui t’arrive tout d’un coup ? Est-ce que tu frappes toujours les gens avec tes sandales ? » demanda Kojou.

« C’est toi qui l’as dit il y a longtemps, bon sang ! Tu es trop ordinaire, alors tu devrais faire un peu plus attention à ton apparence et tout ça. C’est pour ça que je… ! » s’écria Asagi.

« J’ai — j’ai fait cela… !? » s’exclama Kojou.

Kojou avait enduré la douleur des coups de pied tranchants dans le dos alors qu’il se remémorait d’un vague souvenir.

Maintenant qu’elle l’avait mentionné, il se peut qu’il ait fait un commentaire désobligeant comme celui-là au collège. Il pensait qu’elle avait gâché un si beau visage en essayant délibérément de se fondre dans la foule. Wôw, elle s’est souvenue de cela depuis longtemps, pensait Kojou, admirant une partie qui était plutôt hors sujet. Et puis…

À ce moment, la Sana soi-disant endormie avait soudain ouvert les yeux.

La petite fille dans un yukata s’était lentement levée. Ses mouvements étaient contre nature et semblaient défier les lois de la gravité.

L’aura bizarre qui l’entourait avait complètement déstabilisé Kojou et Asagi. Sana n’était manifestement pas dans son état normal. On avait l’impression qu’une entité inconnue avait pris possession de son corps.

Puis, alors que Kojou et Asagi l’observaient, la petite fille avait pris une profonde respiration.

« — Na — tsu — kyun ! »

Faisant une pose adorable et décisive comme une sorte de chanteuse idole, elle le cria du haut du lit.

Sana émettait une vibration de haute tension qui semblait bizarre au point d’être incompréhensible par rapport à avant, effrayant Kojou et Asagi.

« Bon sang ! »

« Sana !? »

Sana avait encore la main droite levée en un signe alors que ses yeux vides s’arrêtèrent de bouger.

Comme le mannequin d’un ventriloque, rien ne bougeait sauf ses lèvres lorsqu’elle commença à parler sur un ton robotique.

Pour parler franchement, Kojou avait trouvé le spectacle terrifiant.

« — Le passage de la personnalité principale au mode sommeil est confirmé. Blocage du sommeil non-REM. Connexion de la conscience latente après le blocage de la mémoire de sauvegarde. Initiation de la restauration du temps personnel accumulé. Une minute cinquante-neuf secondes avant la fin de la restauration. »

« Qu’est-ce que c’est que ça ? » se demanda Kojou à voix haute.

Asagi, elle aussi, avait parlé avec perplexité alors qu’ils regardaient Sana, abasourdi.

« Peut-être que les souvenirs de Natsuki… sont revenus ? » demanda Asagi.

Quand Sana avait entendu cela, elle avait soudain tourné la tête et avait souri avec force à ces deux-là. C’était un sourire splendide et parfait, que la vraie Natsuki n’aurait pas fait si sa vie en dépendait.

« Désolée. Je suis en fait la personnalité de réserve de Natsu-kyun Minamiya. — Kyun ! »

Sana avait sorti sa langue, une autre pose mystérieusement adorable.

Sans surprise, même Kojou s’habituait lentement à cette situation bizarre. « Euh, je ne pense pas que ce soit vraiment un moment “kyun”… ? »

« Quand on pense que Natsuki avait une personnalité latente comme celle-là, elle la gardait au fond d’elle-même, » murmura Asagi, épuisée. « Je ne sais pas si je suis surprise ou pas du tout… »

Apparemment, l’actuelle Natsuki était une sorte de sauvegarde d’urgence qu’elle avait préparée.

Elle lui avait probablement jeté un sort spécial pour que, si un ennemi lui volait ses souvenirs comme cela s’était produit ici, une sauvegarde temporaire émerge et travaille à la restauration de ses souvenirs.

Cela laissait à une mage d’attaque de premier ordre comme elle la possibilité de se préparer. La seule erreur de calcul était le fait que sa personnalité de secours avait quelques petites… bizarreries.

Kojou avait un faible espoir lorsqu’il avait demandé. « Donc, si tu restaures à partir de la sauvegarde… Natsuki va revenir ? »

Cependant, la personnalité de sauvegarde s’était mise à tournoyer sur le dessus du lit sans raison apparente.

« Désolé ! Cela pourrait ne pas être possible ! Les souvenirs sont une chose, mais je ne pense pas que ce corps puisse supporter la pression des sorts ! D’abord, il n’y a pas assez de pouvoir magique ! »

« … Je vois. Donc ça ne marchera pas si on ne détruit pas le grimoire d’Aya Tokoyogi, hein ? » demanda Kojou.

« Totalement exact. Ou tu pourrais attendre dix ans pour que je grandisse comme avant, Kyun ? » déclara Sana.

« Il n’est pas question d’attendre si longtemps ! » s’exclama Kojou.

Kojou soupira, lésé, devant le discours totalement désintéressé de la sauvegarde.

C’était un moment plus tard que la télévision à écran plat nichée dans le mur de la cabine s’était mise en marche sans que personne ne touche à la télécommande. Et maintenant ? pensa Kojou en jetant un coup d’œil douteux.

Un ours en peluche mal fait en image de synthèse avait flotté sur l’écran.

« — J’ai enfin obtenu une connexion. Vous entendez ça, Petite Demoiselle ? »

Asagi avait crié sur l’ours en peluche à la télévision. « M-Mogwai !? »

Kojou connaissait le nom. C’était l’avatar des cinq superordinateurs qui administraient l’île d’Itogami — le partenaire d’Asagi en matière d’IA.

« … Que fais-tu à surgir dans un endroit comme ça ? » demanda Asagi.

« C’est parce que votre smartphone n’a plus de batterie. J’ai utilisé le signal de diffusion pour le pirater. Désolé, mais il y a encore plus de problèmes en chemin. J’aimerais que vous me donniez un coup de main, mais… »

« Oh, vraiment. Je ne veux pas, » déclara Asagi.

Asagi avait éteint la télévision sans la moindre hésitation. Cependant, la télévision s’était rallumée instantanément, pour montrer Mogwai à genoux.

« Je vous en supplie ! »

« J’ai dit NON. Combien comptes-tu faire travailler ainsi une lycéenne normale ? À cause de toi, le premier jour du festival a été un échec total, » déclara Asagi.

Asagi avait appuyé sur le bouton de la télécommande avec vitesse, pendant qu’elle parlait. Quand elle avait vu que cela n’allait pas servir, elle avait déplacé sa main vers le cordon d’alimentation de la télévision. Mogwai secoua désespérément la tête.

« Attendez, attendez, attendez, ce problème vous affecte aussi totalement, Petite Demoiselle ! »

« Ha ? Comment cela ? » demanda Asagi.

« Une étrange distorsion spatiale apparaît, avec le campus de l’Académie de Saikai au centre. Tout dispositif utilisant un pouvoir magique est inopérant à l’intérieur de celui-ci, et il semble aussi annuler tous les sorts en cours de fonctionnement. »

« … Tu dis qu’elle neutralise les sorts ? » demanda Asagi avec scepticisme.

Mogwai acquiesça gravement. « C’est la version courte. »

« Cela semble agréable et paisible, » déclara Asagi.

« Si ce n’était pas une île artificielle, je serais peut-être d’accord avec vous — . »

« Ah… ! » s’exclama Asagi, saisissant enfin la gravité de la situation.

L’île d’Itogami était une île artificielle, une ville flottant sur l’océan Pacifique construite à partir de Gigaflotteurs reliés entre eux.

Bien sûr, la technologie normale ne pourrait pas faire flotter sur l’eau une ville géante de plus de cinq cent mille âmes. Le Sanctuaire des Démons de la Ville d’Itogami était une ville qui dépendait de sorts magiques.

« Ne veux-tu pas dire que les sorts renforçant les Gigaflotteurs sont également annulés ? » demanda Asagi.

« Oui. Durcissement, réduction de masse, stabilisation spatiale, répulsifs à fantômes… tous les types de sorts auxquels vous pouvez penser perdent de leur puissance. Pour l’instant, cela n’affecte encore que la zone autour de l’Académie de Saikai, mais si la zone d’effet augmente à ce rythme, ça va devenir… un peu rude. »

Asagi s’agrippa à la tête et soupira avec force. « … C’est la pire situation. »

La cause de l’annulation magique n’était pas encore claire, mais tôt ou tard, la ville deviendrait incapable de supporter son propre poids, et l’île d’Itogami s’effondrerait. Ce n’était certainement pas quelque chose qu’elle pouvait simplement ignorer.

« Donc vous voyez, nous faisons travailler tous ceux que nous pouvons sur les calculs de force, les plans de renforcement et les programmes de guide d’évacuation. On va payer cher. »

« Eh bien, je comprends ce que tu veux dire maintenant… mais c’est assez serré de ce côté-là aussi, alors je ne peux pas courir à la Société de gestion au pied levé. Les monorails sont toujours en panne, n’est-ce pas ? » déclara Asagi.

« J’ai compris. Je vais préparer quelque chose de ce côté pour vous — . »

L’écran de télévision sur lequel l’avatar de l’ours en peluche était affiché s’était soudainement éteint.

« … Mogwai ? »

Au-dessus des têtes d’Asagi et de Kojou, le bruit d’une explosion géante avait retenti, secouant férocement la coque de la Tombe de L’Océanus II.

Kojou s’était mis à crier en tombant sur le lit après avoir perdu l’équilibre.

« Et maintenant ? »

À un moment donné, le navire avait perdu ses lumières habituelles, et était passé aux feux de secours.

Ils avaient déjà à s’inquiéter du changement soudain de Sana et de l’anomalie affectant l’île d’Itogami. Ces deux problèmes étaient déjà suffisamment graves, mais Kojou et Asagi devaient maintenant se concentrer sur le seul problème restant. Kojou s’était souvenu de ce que c’était alors que les impacts continuaient à frapper le navire.

La sauvegarde avait regardé par la fenêtre en disant. « C’est un prisonnier évadé, miaou. On dirait qu’il vient à bord du navire par l’avant, miaou. »

Kojou soupira en lançant un regard glacial à la sauvegarde.

« … C’est bien, mais tu es vraiment hors de ton personnage, tu sais. Si ce n’est pas pire que ça, Vattler va s’en occuper. Après tout, il nous a fait venir ici justement pour les attirer sur ce navire… »

Mais la sauvegarde affichait un regard sombre.

Kojou avait vu les flammes cramoisies du ciel nocturne se refléter dans les pupilles de la jeune fille. L’air était empli d’une intense puissance démoniaque : une puissante poussée d’énergie dépassant de loin la norme. Il se pourrait bien que Vattler ait appelé un vassal bestial.

L’instant suivant, un seul faisceau brûlant avait assailli le navire, créant une grande explosion dans son sillage. Une partie du navire avait été engloutie par les flammes, tandis que des débris s’étaient éparpillés et s’étaient brisés de toutes parts. Quelque chose avait frappé le pont de la Tombe de l’Océanus II avec une force énorme.

Au centre de l’explosion se trouvait un jeune homme blond portant un manteau blanc. Les flammes avaient brûlé autour de Vattler alors qu’il était couché sur le côté, le sang couvrant tout son corps.

Vattler avait tenté de contre-attaquer les évadés, mais était-ce lui qui s’était fait souffler — ? Lui, un vampire de la Vieille Garde — ?

La sauvegarde s’était cognée les articulations contre sa propre tête et elle lui avait tiré la langue.

« Ça n’a pas l’air très bon… Kyun, » déclara-t-elle.

Alors même que sa pose inutilement surdramatique l’agaçait, Kojou l’avait saisie, ainsi que les mains d’Asagi, et il s’était précipité hors de la cabane.

***

Partie 6

Un peu avant que le raid des prisonniers n’enflamme la Tombe de l’Océanus II…

… Il y avait deux filles sur la grande jetée du port d’Itogami.

L’une était une grande fille brandissant une longue épée. L’autre était une jeune fille en tenue d’infirmière, portant une lance de couleur argentée. Il s’agissait de Sayaka et Yukina, qui suivaient les pas de Kojou.

Sayaka était furieuse en regardant le bateau de croisière extravagant qui flottait sur la mer la nuit.

« À quoi penses-tu, Kojou Akatsuki ? Rester dans la même chambre qu’une fille de ta propre classe, avec un lit à deux places… ce pervers éhonté… ! » s’écria Sayaka.

Les filles ne pouvaient pas voir l’intérieur du gigantesque yacht de luxe depuis le quai sur lequel elles se trouvaient. Cependant, Sayaka avait envoyé un shikigami fait d’une fine plaque de métal pour surveiller Kojou et les deux filles. Pour Sayaka, bien formée aux arts de la malédiction et de l’assassinat, l’utilisation de la magie rituelle pour faire de la reconnaissance faisait partie de sa spécialité.

Techniquement, Yukina pouvait utiliser le même sort, mais Sayaka était bien plus habile avec. Des deux, seule Sayaka la danseuse de guerre chamanique pouvait pénétrer dans le champ d’anti-magie déployée sur tout le navire de Vattler pour y jeter un coup d’œil.

« Sana est aussi avec eux, n’est-ce pas ? Ils ne sont donc pas seuls, » répondit Yukina.

« Maintenant que tu en parles, je pense que ces deux-là s’entendent très bien ! En ce moment, Asagi Aiba est en train de frapper Kojou Akatsuki avec une sandale. »

« Est-ce… ainsi qu’ils s’entendent bien ? » murmura Yukina.

En s’appuyant sur Sayaka comme intermédiaire, Yukina avait une faible connaissance de la situation actuelle à bord du navire. En conséquence, l’image mentale de Yukina s’était gonflée d’elle-même, dans sa tête, quelque chose d’important se passait entre Kojou et Asagi.

Pour sa part, Sayaka avait continué à concentrer son esprit sur son shikigami, en penchant la tête d’un air tout à fait mystifié.

« Aiba Asagi est d’une telle beauté. Pourquoi Kojou Akatsuki n’agit-il pas comme s’il en était conscient ? » demanda Sayaka.

« Hum… Je ne pense pas vraiment que tu sois du genre à pouvoir en parler, Sayaka…, » Yukina la réprimanda doucement. Son supérieur de l’agence était également connu pour son manque de conscience de soi.

Et puis, avant qu’elle ne puisse en dire plus, elle avait fait tourner la pointe de sa lance vers les ténèbres derrière elle.

« — Au fait, n’est-ce pas vous qui avez forcé Akatsuki-senpai et Aiba à se faire face, Duc Ardeal ? » demanda-t-elle.

Une voix à l’écho snobinard flottait dans l’air sombre.

« Oh, tu l’as remarqué, n’est-ce pas ? Comme c’est approprié pour une Chamane Épéiste de l’Organisation du Roi Lion comme toi. »

Une brume dorée chevauchant le vent s’était fondue dans la forme d’un jeune homme portant un manteau blanc — Dimitrie Vattler.

Apparemment, il les avait observées pendant qu’elles observaient le navire. Seuls les sens spirituels extrêmement aiguisés de Yukina lui avaient permis de remarquer l’aura du vampire alors qu’il se transformait en brume.

« … Voulez-vous qu’Akatsuki-senpai boive le sang d’Aiba ? » demanda Yukina. « Pourquoi vous donnez-vous tant de mal pour offrir un sacrifice au quatrième Primogéniteur ? »

Vattler avait souri avec désinvolture en répondant.

« Parce que je pensais que c’était plus amusant de cette façon. Le moyen le plus rapide de réveiller les vassaux bestiaux d’Avrora est que Kojou boive le sang d’un médium spirituel qualifié. Je pense que cette fille a une excellente chance de réussir. »

« Pourquoi comptez-vous accorder autant de pouvoir au quatrième Primogéniteur ? » demanda Yukina.

Lorsque Yukina avait posé sa question, l’expression qu’elle avait donnée à Vattler en était une d’un sérieux mortel.

Pour Vattler, un parent de sang du premier primogéniteur, le chef de guerre perdu, le quatrième Primogéniteur, d’un point de vue coût-bénéfice, était un ennemi. Pour Vattler, il était très étrange de se comporter de manière à faire profiter Kojou d’un avantage, et cela à plusieurs reprises.

Même la soif de combat de Vattler — son envie de combattre des adversaires plus puissants que lui — n’était pas une explication suffisante. Après tout, les autres nobles et anciens de l’Empire du Seigneur de Guerre approuvaient en silence la conduite de Vattler, le fait que ce dernier ait été nommé ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire en étant la preuve suffisante.

Vattler avait répondu à Yukina par une question de son cru dans un effort apparent pour détourner le sien. « Yukina Himeragi… Je me demande si tu réalises la vraie raison pour laquelle tu as été choisie pour être l’Observatrice de Kojou. »

Yukina avait plissé ses sourcils en signe d’agacement, soupçonnant une ruse. « Que voulez-vous dire par là… ? »

Yukina avait été informée qu’elle avait été choisie pour être l’observatrice de Kojou parce qu’elle était la seule Chamane Épéiste du même âge que lui qui pouvait rester à proximité sans éveiller de soupçons. Elle ne pensait pas qu’il y avait une autre raison.

Vattler avait regardé avec un plaisir apparent la réaction de Yukina.

« Permets-moi donc de modifier la question. Pour commencer, qui est le quatrième Primogéniteur ? Si seulement trois Primogéniteurs vampires, les piliers de la race, devaient exister, pourquoi y en aurait-il un quatrième ? »

« Si Kojou devient un véritable quatrième Primogéniteur, nous pourrions apprendre la raison pour laquelle un quatrième a vu le jour. Et aussi, combattre et consommer Kojou dans cet état semble très amusant, » continua-t-il.

Vattler riait alors que sa vulgaire soif de bataille se révélait enfin dans sa plénitude. C’était un rire à gorge déployée qu’il gardait normalement bien caché.

Yukina avait inconsciemment repositionné sa lance en regardant l’homme. « Duc Ardeal… vous êtes un tel... »

Sayaka, après avoir écouté silencieusement leurs échanges pendant tout ce temps, avait levé son épée avec un niveau d’inimitié similaire visible à l’œil nu.

En les regardant toutes les deux avec un sourire satisfait, Vattler leur tourna brusquement le dos.

« Vous n’avez pas besoin de faire des visages aussi effrayants. Ce n’est pas grave, c’est pour l’avenir. Ayant trouvé mon bien-aimé après tout ce temps, je dois simplement en tirer du plaisir. D’ailleurs, » murmura Vattler, « Kojou n’est pas l’invité d’honneur de ce soir — . »

Une onde sonore maligne avait roulé sur tout le corps de Vattler. Il regardait fixement une grande silhouette inconnue se dresser à l’extrémité de la jetée.

C’était un homme portant une armure noire à partir du cou, avec une énorme épée dans le dos. Ses cheveux gris mal soignés ressemblaient à la crinière d’une bête sauvage. Sa peau avait de la couleur de l’acier. Il n’avait pas de caractéristiques démoniaques évidentes, mais il ne ressemblait certainement pas à un être humain normal.

« Un évadé de la Barrière pénitentiaire… ! » s’était exclamée Yukina. Elle et Sayaka avaient immédiatement tourné leurs armes vers le nouvel arrivant.

Il y avait une menotte en argent qui couvrait le gantelet de l’avant-bras gauche de l’homme. Lui aussi était l’un des évadés de la prison qui poursuivait Natsuki Minamiya à la recherche d’une liberté totale de la Barrière pénitentiaire.

Il s’était approché de l’épée géante qui se trouvait dans son dos. Cependant, avant qu’il ne puisse la dégainer, Vattler avait déclenché son attaque. Sans prévenir, le Vassal Bestial de Vattler apparut dans le ciel et cracha un rayon vert maladif, frappant l’homme au centre de la mort et l’enveloppant dans une énorme explosion.

Yukina était restée sous le choc en regardant l’un des côtés de la jetée s’effondrer.

« D-Duc Ardeal — !? » s’écria Yukina.

La frappe du vampire de la Vieille Garde n’avait pas du tout été retenue même un peu. Elle pensait que personne ne pouvait supporter un tel coup. Il s’agissait certainement d’une attaque-surprise, ne laissant aucune possibilité de mettre en place une défense.

Cependant, Vattler avait observé les restes enveloppés de fumée de la jetée avec un regard plein d’attente.

« Je n’ai pas besoin d’un adversaire qui meurt d’une si faible attaque. Je n’aurais pas besoin de me déranger pour si peu dans ce cas, » déclara Vattler.

« — Alors je vous rendrai vos paroles avec intérêt, Dimitrie Vattler ! »

Une lumière argentée traversa le nuage de fumée qui planait.

D’un coup de pied au sol et en sautant haut, l’homme en armure avait dégainé la grande épée massive de son dos et l’avait enfoncée dans le vassal bestial de Vattler. Le monstrueux serpent vert foncé mesurait des dizaines de mètres de long, mais son corps tout entier avait frémi en poussant un rugissement angoissé. Des faisceaux de lumière se dispersèrent de lui alors qu’il explosait dans toutes les directions. Puis, l’homme en armure se dirigea vers Vattler, sans défense avec la perte de son vassal bestial.

« Gwah !? »

Encaissant une impitoyable attaque de flanc, la grande forme de Vattler avait été balayée. Il avait été projeté jusqu’à la Tombe de l’Océanus II, percutant le navire, éparpillant des débris qui l’avaient également enterré et caché. Des fragments du vassal bestial rompu s’étaient déversés sur le navire, provoquant des explosions et des incendies en de multiples endroits.

« Duc Ardeal ! » s’exclama Yukina.

« Il a coupé… un vassal bestial !? Pas possible… !? » dit Sayaka, les yeux écarquillés en raison de l’étonnement.

Le vassal bestial d’un vampire était une créature invoquée d’un autre monde, utilisant une vaste énergie magique pour prendre forme physique.

De par leur nature même, étant eux-mêmes des masses d’énergie magique, ils ne pouvaient être vaincus qu’en leur insufflant une énergie magique encore plus grande.

Cependant, l’homme en armure en avait abattu un d’un seul coup d’épée. Même si Yukina et Sayaka venaient d’en être témoins de leurs propres yeux, il leur était encore difficile de le croire.

L’homme en armure avait après ça sauté vers le pont du navire à la poursuite du vampire blessé.

Yukina et Sayaka s’étaient empressées de poursuivre l’homme à leur tour. Kojou et les deux filles se trouvaient à l’intérieur du navire en feu. Elles ne pensaient pas que Kojou, dans son état actuel, pouvait faire quoi que ce soit contre un adversaire qui avait vaincu d’un seul coup un individu comme Vattler. Protéger Asagi, une personne ordinaire, ou Natsuki, une personne d’âge réduit semblait une tâche totalement impossible pour lui seul, mais…

Un nouvel homme s’était soudain présenté devant les filles. Il avait les cheveux roux, une petite stature et un large sourire d’une luminosité inappropriée.

« Ooh… il a vraiment fait une entrée grandiose. Tch, bon sang, je suis en retard à la fête ! »

Il parlait d’une voix emplie d’admiration à la vue du navire en feu, peut-être son apparence reflétait-elle une personnalité dite ardente.

Yukina s’était arrêtée là où elle se tenait et elle avait levé sa lance. « Qui êtes-vous… !? »

Alors qu’elle le demandait, elle se souvint du visage de l’homme. C’était le prisonnier appelé Schtola D.

Les commissures de ses lèvres s’étaient relevées lorsqu’il avait regardé Yukina avec amusement, maintenant en position de combat.

« Qu’est-ce que c’est… ? Dans ce Sanctuaire de Démons, même les infirmières travaillent comme Mage d’Attaque ? » demanda Schtola D.

« Hein ? »

« Bon, d’accord. Je te dois une faveur pour avoir marché sur ma fierté, petite infirmière — ! » déclara Schtola D.

Yukina n’avait pas eu le temps de répliquer, je ne suis pas infirmière ! mais c’était apparemment une affaire banale pour Schtola D. Il avait levé sa main droite au-dessus de sa tête, et l’avait immédiatement baissée.

Yukina s’était mordu la lèvre. C’était sa frappe tranchante invisible, l’attaque mystérieuse que même le Loup de la dérive des neiges, capable d’annuler tout type d’énergie magique, ne pouvait pas bloquer complètement. Comme elle n’arrivait pas à déterminer le moment ou la distance, la déviation semblait la meilleure option — .

Yukina leva donc sa lance, en se fiant uniquement à son intuition. Elle ne pouvait pas esquiver une attaque quand elle ne connaissait pas la portée de frappe de l’ennemi. Elle n’avait pas d’autre choix que de la bloquer.

Mais juste avant l’attaque de Schtola D, une silhouette avait dansé sous les yeux de Yukina.

« — Qu’est-ce que tu essaies de faire à ma Yukina, petite enflure ! »

Les longs cheveux de Sayaka se balançaient alors qu’elle se déplaçait avec sa longue épée en argent.

L’une des capacités de l’épée de Sayaka, Écaille Lustrée, était d’annuler les attaques physiques.

En coupant l’espace lui-même, la zone tranchée par l’Écaille Lustrée était devenue une barrière momentanée qui était totalement invincible contre les attaques physiques.

Ainsi, la frappe de Schtola D s’était écrasée contre le mur invisible sous les yeux de Sayaka, rebondissant et s’essoufflant.

Le visage de Schtola D s’était tordu de malice alors qu’il parla. « … C’est un joli tour que tu as, salope ! »

Il avait une confiance absolue dans sa propre attaque, la voir bloquée avait vraiment fait bouillir son sang. C’était un trait de personnalité assez gênant.

 

 

« Je m’en occupe, Yukina. Va aider Kojou et les autres ! » déclara Sayaka.

Ayant ainsi parlé, Sayaka avait jeté un regard furieux sur le prisonnier évadé.

Yukina avait observé Sayaka par-derrière avec un regard inquiet pendant un seul instant, mais elle avait rapidement fait un signe de tête et s’était mise à courir, se dirigeant vers le navire enveloppé de flammes.

***

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Claramiel

Bonjour, Alors que dire sur moi, Je suis Clarisse.

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