Strike the Blood – Tome 12 – Chapitre 2 – Partie 3

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Chapitre 2 : Champ de bataille de la brume blanche

Partie 3

La crevasse s’étendait sur quarante ou cinquante mètres en ligne droite, mais il ne voyait pas le fond. Il n’y avait aucun doute : jusqu’à la dernière goutte d’eau contenue dans le lac Kamioda avait été complètement gelée. L’énergie magique de quelqu’un avait gelé tout le lac.

« Mais comment… ? Rien de moins qu’un vassal bestial de Primogéniteur ne devrait pouvoir le faire… »

Shio frissonna et secoua la tête en réalisant qu’elle se trouvait sur les lieux d’un désastre de sorcellerie sans précédent.

Gajou sourit comme si c’était le problème de quelqu’un d’autre. « Le vassal bestial d’un Primogéniteur, hein. Si c’est le cas, ça veut dire que c’est exactement comme ça. »

« … Gajou Akatsuki ? »

Incapable de discerner le sens de l’affirmation de Gajou, Shio jeta un coup d’œil sur le côté de son visage. Cependant, Gajou restait silencieux, fixant le brouillard blanc pur.

« Nagisa… hein ? »

Gajou murmura, parlant d’une voix basse et réservée. Lorsqu’elle l’entendit, Shio le remarqua également : Une petite silhouette traversait calmement la glace, s’approchant de la paire de l’autre côté de la crevasse.

« Non, pas elle… »

Gajou, qui tenait toujours Shio, la posa à terre tout en continuant à fixer la silhouette.

La jeune fille qui s’approchait d’eux portait une tenue de prêtresse blanche.

Son visage était bien celui de Nagisa Akatsuki. Cependant, la couleur de ses cheveux était différente. Ils étaient blonds, pâles, et changeaient de couleur selon l’angle de la lumière, un peu comme si l’on regardait à travers un prisme. Les cheveux aux couleurs de l’arc-en-ciel ressemblaient à des flammes naissantes.

« Qui êtes-vous ? »

Shio laissa involontairement échapper sa voix. La jeune fille en tenue de prêtresse blanche fixait Shio avec des yeux comme des flammes bleues pâles. Shio frissonna, sa colonne vertébrale se figea sous l’effet de l’énergie démoniaque et malveillante qu’elle sentait émaner de la jeune fille.

À cet instant, Shio, en tant que Mage d’attaque, comprit instinctivement : c’était cette fille qui avait provoqué cet étrange phénomène de gel —

« On dirait que tu es enfin réveillée, princesse. »

Gajou écarta les deux bras en s’adressant à elle, apparemment pour montrer qu’il n’était pas hostile. Il parlait avec l’affection de quelqu’un qui salue un vieil ami.

« Vous êtes… »

La jeune fille en tenue blanche fixa ses yeux flamboyants sur Gajou.

« Tu te souviens de moi, Belle au bois dormant ? »

Gajou lui adressa un léger sourire.

Les cheveux aux couleurs de l’arc-en-ciel de la jeune fille se balancèrent tandis qu’elle secoua faiblement la tête.

« Pourquoi souriez-vous ? » demanda-t-elle d’une voix brisée. « Je… n’ai pas de mots pour me racheter… Quel que soit le mépris, le ressentiment ou les malédictions que vous portez à mon égard, je m’y résigne. »

« Ne te méprends pas, princesse. Aucun d’entre nous ne t’en veut. Ni moi, ni Kojou. »

Gajou Akatsuki avait fait cette déclaration avec force dans la voix. Shio écoutait avec impatience l’équilibre précaire de la conversation entre les deux individus, comme s’ils marchaient sur une corde raide au milieu d’une fosse de pics.

« Nagisa est-elle en sécurité ? »

Lorsque Gajou posa cette question, un sourire se dessina pour la première fois sur les lèvres de la jeune fille. C’était un beau sourire, éphémère, le genre de sourire destiné à quelqu’un de précieux.

« L’âme de la douce prêtresse est… ici — ! »

La jeune fille ferma les yeux, pressant ses deux mains sur sa poitrine.

Puis, comme vidée de ses forces, elle s’effondra immédiatement.

Shio lâcha enfin le souffle qu’elle retenait. Au fur et à mesure que l’esprit de la jeune fille se dissipait, le sentiment de puissance et d’oppression qui faisait grimacer Shio s’estompait tout autant. Le froid qui planait dans l’air autour d’elles sembla également s’atténuer.

« Gajou Akatsuki… Qui… était-ce, à l’instant ? »

Shio demanda d’une voix dure et tendue.

Gajou ne répondit pas à la question de Shio et il souleva Nagisa Akatsuki qui dormait.

« Désolé, Li'l Shio. Puis-je te faire confiance pour prendre soin d’elle ? »

« Cela ne me dérange pas du tout, mais… qu’avez-vous l’intention de faire ? »

Shio fronça les sourcils en répliquant. Qu’est-ce que Gajou Akatsuki comptait faire au juste pour laisser derrière lui la fille qu’il avait enfin récupérée ? Sans que l’on sache pourquoi, son cœur se mettait à battre la chamade.

« J’aimerais dire que je vais chercher le bébé de Yuiri à ta place, mais… ne sens-tu pas ce qu’il y a dans l’air ? »

« … Dans l’air ? »

Lorsqu’il dit cela, Shio s’en aperçut enfin. L’air tremblait légèrement. La surface dure et gelée du lac se balançait de façon irrégulière. C’était un tremblement étrange, comme si une masse énorme se déchaînait au loin.

« Y a-t-il… quelque chose là… !? »

L’espace d’un instant, Shio aperçut l’ombre de quelque chose qui ressemblait à une forteresse noire comme de l’eau de roche à travers une brèche dans la brume.

Il avait des ailes extrêmement larges qui ressemblaient à des lames déformées. Ses quatre membres étaient si robustes qu’ils donnaient l’impression que les véhicules blindés étaient délicats. Sa tête ressemblait à celle d’un féroce lézard carnivore. Il avait des crocs acérés et des yeux pourpres.

Même si c’était la première fois qu’elle en voyait un de ses propres yeux, même les enfants connaissaient le nom de la plus grande des bêtes démoniaques.

« Pas question… »

Les lèvres de Shio se contractèrent et tremblèrent.

Alors qu’une épaisse brume blanche tourbillonnait autour de lui, un dragon noir poussa un terrible rugissement.

+++

La douleur sur ses joues la réveilla. Quelqu’un giflait grossièrement le visage d’Asagi. La voix aiguë d’une jeune fille continuait à résonner dans ses oreilles.

« Impératrice ! Impératrice… ! »

« Peux-tu arrêter de m’appeler comme ça… !? »

La paume de Lydianne la giflant sans cesse, Asagi releva lentement la tête, la regardant avec des yeux pleins de larmes.

Elle se trouvait dans le siège du copilote ajouté au micro-robot-tank. La jeune fille rousse avait ouvert l’écoutille blindée éraflée et regardait le visage d’Asagi d’un air inquiet.

« Impératrice, vous allez bien ? »

« Non, je ne vais certainement pas bien. J’ai mal partout. Ça craint. Tant pis pour la montgolfière. Il a failli nous tuer tous les deux. »

Asagi laissa échapper ses plaintes en s’extirpant du siège étroit du copilote.

Lancé à mille mètres au-dessus du sol, le robot-tank avait déclenché ses boosters stabilisateurs tout en déployant ses quatre parachutes de secours, réduisant ainsi sa vitesse de descente alors qu’il se posait dans les montagnes de Tangiwa. Mais c’est tout ce qui s’est bien passé.

Les premiers problèmes étaient dus aux courants d’air qui faisaient rage dans la zone montagneuse où elles tentaient d’atterrir. D’incroyables vents latéraux avaient arraché les parachutes, envoyant le char sur le côté, ce qui avait rendu le coussin d’air pour l’atterrissage et les absorbeurs de chocs des jambes complètement inutiles.

Le fait qu’elles aient atterri sur une montagne boisée avec des arbres très denses n’avait pas vraiment aidé. L’élasticité des arbres avait fait rebondir le robot-tank comme une boule de flipper à plusieurs reprises, pour finalement le faire tomber au fond d’un profond ravin. C’est tout ce dont Asagi se souvenait.

« Non, non, c’était très inattendu d’atterrir dans un ravin. Je prendrai note de la révision à la hausse de la construction étanche. Cependant, nous avons eu de la chance d’avoir des combinaisons de pilote de haute qualité, non ? »

« Attends, est-ce que c’est conçu comme un maillot de bain d’école parce qu’on s’attendait à ce que le char d’assaut coule ? » s’exclama Asagi en regardant sa combinaison de pilote complètement trempée, exaspérée jusqu’au plus profond de son être.

Comme elles étaient tombées dans le torrent qui coulait au fond du ravin, les sièges pilotes non étanches avaient été inondés d’eau. Elles avaient été sauvées par le fait que l’eau était peu profonde, sinon elles auraient pu se noyer.

Mais comme Lydianne s’en était vantée, Asagi n’avait pas très froid malgré l’eau qui la recouvrait. Le fait qu’elle ait subi un tel impact et qu’elle s’en soit sortie avec seulement quelques égratignures mineures était sans aucun doute dû aux hauts niveaux de résistance à l’eau et au vent de la combinaison de pilote.

Cela dit, elles ne pouvaient pas savoir combien de temps elles resteraient en sécurité coincées au fond d’un tel ravin. L’eau du torrent était froide — on était en plein hiver, après tout — et peut-être n’était-ce que son imagination, mais elle avait l’impression que le niveau de l’eau avait augmentée depuis qu’elle s’était réveillée.

« Et maintenant ? Ce tank est-il encore utilisable ? » Asagi remit de l’ordre dans ses cheveux ébouriffés en retournant s’asseoir sur le siège du pilote.

Elles se trouvaient au fin fond de la montagne, dans un ravin sans nom, à l’écart de la route principale. Des falaises se dressaient à droite et à gauche, un terrain impossible à escalader pour des êtres humains sans équipement spécialisé. Même si elles essayaient d’appeler à l’aide, Asagi doutait que le signal parvienne jusqu’à eux. Si le char de Lydianne n’était pas mobile, elle et Asagi rejoindraient immédiatement les rangs des victimes.

Bien que brisés en divers endroits par l’impact de la chute, les systèmes électriques du tank semblaient être restés intacts. Lydianne changea de circuit et fit apparaître la console de maintenance.

« Autodiagnostic en cours. Le système électrique est tout vert. Si nous coupons les modules endommagés, je crois que le redémarrage est possible. Il faut revérifier les différents capteurs, mais c’est dans le domaine de ce qui peut être compensé par le logiciel. »

« D’accord, je m’occupe de cette partie. »

« Je vous remercie vivement. Ensuite, je commencerai immédiatement le processus de redémarrage. »

Asagi déploya son propre terminal et se connecta aux systèmes de capteurs du robot tank. En tant que prototype expérimental, il était possible d’ajuster le logiciel du Hizamaru de Lydianne sur le terrain sans grande difficulté. Avec Lydianne et Asagi, les meilleurs programmeurs dans et hors du monde de l’entreprise, faisant équipe ensemble, même la réécriture complète du système d’exploitation ne prendrait pas beaucoup de temps.

« Ohh… Nous y voilà. C’est bien Tanker que nous avons là… Elle écrit de si jolis codes. Puisque c’est comme ça, je peux juste faire le minimum de corrections nécessaires… Si je traite cette partie avec un processus parallèle, je peux utiliser les ressources libérées pour mettre un paquet d’autoajustement ici comme… ainsi. »

En un clin d’œil, Asagi avait isolé les sections endommagées du tank robotique, puis elle mit au point des programmes de correction pour chacune d’entre elles. Cela prenait du temps, mais ce n’était pas un travail difficile pour elle. En fredonnant, elle tapait sur le clavier, et une fois que 80 % du travail fut terminé…

« Argh… »

Asagi se tortilla, frottant ses deux jambes l’une contre l’autre alors qu’elle sentait son dos frissonner. Cette sensation persista lorsque Lydianne se retourna vers elle avec un regard inquiet.

« Si vous devez faire pipi, Madame l’Impératrice, je crois qu’il est plus sain de faire pipi que de se retenir. »

« Ce n’est pas ça !!! » cria Asagi, le visage tout rouge. « Ce n’est pas ça. Je suis comme, qu’est-ce qui se passe — est-ce qu’il ne fait pas étrangement froid ici ? »

« Maintenant que vous le dites, c’est bizarre. Le chauffage est pleinement opérationnel, et pourtant… »

« La température de l’eau descend en dessous de zéro… Geh !? »

Quand Asagi vérifia le chiffre sur le capteur de température, elle resta bouche bée, les yeux écarquillés.

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Claramiel

Bonjour, Alors que dire sur moi, Je suis Clarisse.

Un commentaire :

  1. merci pour le chapitre

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