Chapitre 11 : La journée de la princesse
Partie 4
Lorsqu’il avait vu notre échange, le noble au sourire désagréable s’était soudainement montré irrité : « Hé ! Qu’est-ce qui peut bien être si important pour mériter qu’on m’ignore ? »
« Qui s’en soucie ? Qui êtes-vous au juste ? »
L’homme, manifestement un noble au vu de sa tenue vestimentaire, était visiblement mécontent de ma réponse. Il avait des traits naturellement agréables, mais vu son attitude snob, je ne pouvais pas imaginer qu’il était populaire. Ajoutez à cela les cernes sous ses yeux et la maigreur de ses joues… Oui, ce type n’avait pas du tout l’air en bonne santé.
« Eh bien, tu n’es qu’un grossier personnage. Il est de bon ton de se présenter avant de demander le nom de quelqu’un d’autre. »
« C’est drôle que vous disiez cela. N’est-il pas impoli de se mettre en travers du chemin des gens et de se moquer d’eux ? »
« Comment oses-tu ! » rugit l’homme bien habillé, rouge de colère. Pourquoi les types comme lui ont-ils toujours un si mauvais caractère ? On dit que les gens qui manquent d’estime de soi sont plus prompts à se mettre en colère, ça doit être ça.
« Calmez-vous. J’ai entendu dire que les gens peuvent aussi se mettre en colère à cause d’une carence en vitamine D. Essayez de manger des champignons, du poisson ou des œufs. »
« C’est vous qui me mettez en colère ! Vous essayez de vous moquer de moi ? Moi, plus que quiconque !? »
« D’accord, mais vraiment… qui êtes-vous ? Vous continuez à agir comme si j’étais censé le savoir. »
« Je m’appelle Alexandre d’Elzar et je suis le deuxième fils du marquis d’Elzar ! » Le noble au visage rouge, Alexandre d’Elzar, m’avait fait un doigt d’honneur et m’avait crié : « Souviens-toi bien du nom, roturier ! »
D’Elzar. D’Elzar, hein ? Ça me dit quelque chose, me dis-je en regardant Elma. Elle se massait les tempes, comme si elle essayait d’éviter un mal de tête. Elle poussa un profond soupir.
Ah, c’est vrai. D’Elzar est le type avec qui Elma était fiancée. Il aime les femmes, ne peut pas se retenir et utilise son autorité de noble pour faire tout ce qu’il veut. En gros, c’est un enfant gâté de la noblesse. Ce type était donc le fiancé d’Elma, n’est-ce pas ?
« Je vois. Alors, Alexandre le Grand d’Elzar, que nous voulez-vous ? »
« Tu m’as demandé mon nom, mais tu refuses toujours de divulguer le tien ? »
« Nah. Pourquoi le ferais-je ? Vous savez qui je suis. C’est pour ça que vous êtes là, à me bloquer le chemin et à chercher la bagarre. »
« … Hmph. Je suppose qu’il est inutile de s’attendre à des manières de la part d’un roturier. » Alexandre détourna les yeux et afficha un sourire suffisant.
Je ne le réfuterai pas. Comment nous a-t-il retrouvés, d’ailleurs ? Il est impossible qu’il ait pu nous écouter dans le palais. Il a juste surveillé la porte jusqu’à ce qu’on parte ? Si c’est le cas, c’est un vrai modèle de harceleur.
« J’ai l’impression de savoir pourquoi… mais si vous nous expliquiez ce que vous cherchez ? Nous allions justement manger un morceau, je préférerais que vous nous laissiez passer. »
« Comment oses-tu me parler ainsi, espèce de vulgaire ordure ? Ne trouves-tu pas ton ton irrespectueux ? »
« Je n’ai aucune raison de respecter quelqu’un qui ne me respecte pas », avais-je répondu. « D’ailleurs, si vous voulez parler de noblesse, je devrais avoir le statut de vicomte honoraire grâce à mon Étoile d’Or. Lequel de nous deux a le statut le plus élevé, ô grand second fils de marquis ? »
Je m’étais tourné vers Elma.
Elle s’était empressée d’expliquer : « Même s’il n’est qu’honorifique, on ne peut pas nier que quelqu’un qui ne pourra même pas accéder au titre de marquis est inférieur à un vicomte. »
La princesse déguisée ajouta : « Par convention, le chef d’une famille noble a toujours un statut supérieur à celui de tout autre enfant de noble jusqu’à ce qu’il prenne le titre de ses parents. »
Elles m’avaient toutes deux confirmé que je n’étais pas l’inférieur ici. Mais Alexandre s’était contenté d’afficher un sourire de satisfaction et de dérision et de hausser les épaules. « Les titres honorifiques ne sont qu’un moyen de tromper la populace. Roturier un jour, roturier toujours. L’idée que quelqu’un qui n’a pas de sang bleu dans les veines s’appelle un noble est risible. »
« Vous êtes bien audacieux de dire cela devant moi, vous savez, » dit Mimi — ou plutôt la Princesse Luciada — avec un doux sourire.
Elle est vraiment fâchée, n’est-ce pas ? C’était Luciada elle-même qui m’avait décerné l’Étoile d’or lors de la cérémonie de remise des prix. En méprisant la récompense brillante sur ma poitrine, ce nigaud avait essentiellement méprisé la princesse elle-même. Et si l’on pousse le raisonnement un peu plus loin, c’est presque comme si l’on avait offensé la famille impériale.
« Euh… Aucune idée de ce dont elle parle », dis-je, essayant de détourner son attention.
« Mimi, calme-toi », lui dit Elma.
« Hee hee… Je suis tout à fait calme. Maintenant, second fils d’Elzar, dans quel but commettez-vous cet outrage envers Maître Hiro ? »
Alexandre recula, apparemment intimidé par l’aura impériale qui se dégageait de son sourire. Cependant, même s’il était vaincu par la force de sa volonté, il réussit à forcer un sourire suffisant sur son visage en parlant. « Tu as dit que tu t’appelais Mimi ? Je t’invite à devenir ma servante personnelle. Je te traiterai bien malgré ton statut de roturière. Soit honorée. J’emmènerai également Mlle Elma. C’est ma fiancée, après tout. » Il ponctua cette déclaration d’un sourire narquois à pleine puissance.
« Qu’est-ce que ce type raconte ? » demandai-je, exaspéré.
« Es-tu fou ? Nos fiançailles ont été officiellement annulées il y a longtemps ! » déclara Elma. On aurait dit qu’elle commençait à douter de sa santé mentale.
« Brandir votre noble autorité pour une telle mascarade, sous mes yeux…, » la princesse Luciada commença à émettre des vagues de rage. Je veux dire que les vagues sont évidemment figuratives, mais elle était incroyablement intimidante, même avec un sourire sur le visage.
« De toute façon, ça ne marchera pas », dit Elma. « Hiro et Mimi ont déjà rempli les papiers, ils sont donc mariés. Elle est l’épouse d’un noble, honoraire ou non, donc tu ne peux pas utiliser ton autorité pour l’enlever. »
« Ouais, ouais — hein ? » avais-je demandé. « Papiers de mariage ? Le conjoint ? C’est la première fois que j’entends parler de ça ! »
« J’ai pensé que cela pourrait arriver, alors j’ai demandé à Mei de s’en occuper. On dirait que j’avais raison », dit Elma avec son haussement d’épaules habituel. Hé, ce n’est pas un peu bizarre de faire ça sans notre consentement ? Je veux dire, il y a quelque chose d’anormal là-dedans, non ?
Lorsqu’Elma révéla cette vérité choquante, Alexandre avait de nouveau piqué une crise. « Ne m’ignorez pas ! »
« Vas-tu te taire ? » avais-je crié. « Nous sommes au milieu de quelque chose. Quoi qu’il arrive, non veut dire non. Abandonne, rentre chez toi, va donc chier un coup avant d’aller te coucher. »
« Silence ! Ne me défie pas, roturier ! Attrapez-le ! »
« Wôw, sérieusement ? »
Sur l’ordre d’Alexandre, les hommes de main cybernétiquement améliorés s’avancèrent. C’est suicidaire de faire ça en plein jour, n’est-ce pas ? À quel point peux-tu être fou ? Il y a plein de gens autour de nous qui ont été témoins de tout ça.
« Mec, tu es sérieux ? Si tu commences à te battre, je serai obligé de me protéger. »
« Ha ha ha ! Un roturier ne pourrait jamais nous tenir tête ! »
« Eh bien, je pense que j’ai prouvé mes capacités pendant le tournoi —, » avant que je puisse terminer ma phrase, l’un des hommes costauds me chargea. Alors l’autre s’en prend à Elma et Luciada ? Argh, quelle plaie ! « D’accord, mais je t’avais prévenu. »
J’avais saisi mon pistolet laser de la main droite et avais tiré plusieurs balles, arrêtant net celui qui chargeait Elma et Luciada. De ma main gauche, je sortis une épée en prise inversée et tailladai l’homme qui se dirigeait vers moi.
Les spectateurs qui s’étaient rassemblés pour assister au spectacle avaient crié et s’étaient enfuis. Il était plus difficile de se battre en présence de ces gens, et j’avais donc apprécié leur départ.
« Je vais tenir celui-là ! » s’exclama Elma en sortant son pistolet laser pour tirer sur l’ennemi qui chargeait. La princesse Luciada, la main droite dans sa veste, examinait la situation, probablement prête à utiliser sa dague cachée à tout moment.
« D’accord, j’arrive tout de suite — oups. » Le grand homme qui s’élançait sur moi se déplaçait avec une rapidité surprenante pour sa taille. Il avait tendu le bras pour m’attraper, j’avais donc donné un coup d’épée, mais il avait rapidement retiré sa main pour éviter de perdre le membre. Il semblait savoir à quel point ces épées pouvaient être tranchantes. « Tu ne me laisses pas le choix. J’essaierai de ne pas te tuer, mais ne me blâme pas pour ce qui arrivera. »
J’avais remis mon pistolet laser dans son étui et j’avais dégainé mon autre épée. En réponse, les bras du grand homme avaient déployé des lames, ce qui l’avait fait ressembler à une mante religieuse. Oh, des armes cachées. Le petit garçon qui est en moi est en train de se déchaîner.
Nous nous étions élancés en même temps, sur le point de croiser nos lames. Mais je n’avais aucune envie d’en découdre avec lui, j’avais rapidement retenu ma respiration pour ralentir le cours du temps.
« Nngh !? »
Pour lui, c’était comme si j’avais soudainement accéléré. En un seul instant, j’avais tranché les deux bras de la mante religieuse au niveau du coude. Puis j’avais profité de mon élan pour passer à côté de lui et me rapprocher de celle qui attaquait Elma.
« Kh ! »
« Haah ! »
Remarquant mon approche, l’autre larbin avait également déployé des bras de mante religieuse pour bloquer mon coup. Dans l’instant qui suivit, des lasers frappèrent ses épaules, créant de petites explosions qui firent reculer sa forme géante.
« Tu ne me traiteras pas de lâche pour ça, hein ? » plaisanta Elma.
Les lasers d’Elma l’avaient déséquilibré, et elle continuait à tirer, détruisant sans pitié des parties de son corps et le plaquant au sol. Même le plus grand des hommes, doté des meilleures augmentations cybernétiques, ne pouvait pas encaisser autant de lasers à haut débit presque mortels et rester debout.
Maintenant, il ne reste plus qu’Alexandre. Je tournai mon regard vers l’endroit où se tenait notre dernier assaillant.
« Tes deux perdants sont éliminés. Ensuite, c’est à toi de jouer. »
Le premier sbire était incapable de continuer parce que je lui avais coupé les bras, tandis que le second gisait au sol après avoir encaissé un barrage de tirs laser d’Elma. Alexander était seul.
« Tu n’es pas mal pour un roturier, mais c’est encore tout ce que tu es. Sache que tu n’existes que pour te soumettre aux nobles ! »
Alexandre dégaina son épée. Hmm ? J’aime son énergie, mais il manque d’habileté. J’avais reçu un entraînement intensif de la part de Mei, j’avais participé à d’innombrables combats avec les chevaliers royaux et j’avais même affronté des duellistes célèbres lors du tournoi. Après tant d’expérience, on apprend à estimer le talent de quelqu’un juste à la façon dont il dégaine son épée.
« Hé, je ne pense pas que tu veuilles faire ça », l’avais-je prévenu. « Laisse tomber. Tu ne vas pas me battre. »
« Comment oses-tu te moquer de moi ! » Alexandre chargea, levant son épée au-dessus de sa tête. Il se dirigea tout droit en effectuant un coup de taille diagonal vers le bas. Son attaque était encore plus rapide que celle de ses larbins, normalement, il pouvait être difficile de réagir à temps.
Mais j’avais vu ce même style d’épée des centaines, voire des milliers de fois. Je penchai sans effort le haut de mon corps en arrière pour esquiver le coup.
« Je t’ai eu ! »
« Enfin, pas vraiment. »
Après son premier échec, il effectua un renversement rapide comme l’éclair. C’était presque un cliché de l’art de l’escrime des nobles. Désolé de faire ça alors que tu es si confiant dans ta victoire, mais j’ai déjà mon épée qui t’attend.
J’avais levé mon épée droite assez doucement dans l’arc de son renversement. Son poignet avait volé en plein dans le tranchant de ma lame.
« Aaaaagh !? »
Les épées utilisées par les nobles — et, par extension, par moi — avaient des tranchants d’une largeur d’une molécule seulement, ce qui en faisait théoriquement les épées les plus tranchantes qui soient. Si vous vouliez couper le blindage d’un cuirassé, elles pouvaient le faire. Les seules choses qui pouvaient résister à leur tranchant étaient des alliages métalliques hautement condensés fabriqués selon un processus spécial ou d’autres lames d’une épaisseur d’une molécule.
merci pour le chapitre