Chapitre 8 : Que dites-vous quand quelqu’un vous dit qu’il écrit un roman ?
Table des matières
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Chapitre 8 : Que dites-vous quand quelqu’un vous dit qu’il écrit un roman ?
Partie 1
La présentation de Kanako s’était poursuivie, sans interruption. Personne n’avait pu dire un mot pendant tout ce temps. Certes, pour commencer, Yuichi ne savait rien sur le sujet...
Elle avait commencé avec Nobunaga, mais s’était graduellement retirée du sujet, passant de la stratégie de retraite sutegamari de Shimazu à la bravoure des guerriers de Nabeshima à Saga, et ensuite aux Hagakure après ça.
Yuichi doutait qu’une telle information ne soit jamais utile dans une situation d’isekai, mais Kanako semblait avoir beaucoup de plaisir à en parler, et Mutsuko aimait écouter, donc c’était assez inoffensif.
« Oh, regardez l’heure ! » déclara Mutsuko, en regardant l’horloge de la salle de club.
Yuichi avait jeté un coup d’œil par la fenêtre. Le ciel devenait déjà rouge. C’était bien après 18 heures.
« Eh bien ? Que pensez-vous du club de survie ? » s’exclama-t-elle.
« C’est exactement comme je m’y attendais, vu la façon dont tu m’en parles toujours, » répondit Yuichi.
Mutsuko lui avait généralement dit ce qui se passait dans le club de survie. S’il était totalement franc, l’expérience en personne avait été un peu différente, mais il se sentait renfrogné et négatif.
« Euh ? Et à ce propos, où est allée Noro ? », avait-il ajouté.
Elle s’occupait des tâches de secrétaire, mais c’était Ibaraki qui rédigeait le procès-verbal. Aiko n’était nulle part.
« Pourquoi t’occupes-tu de cela ? » demanda Yuichi.
« La petite m’a demandé de prendre la relève. Ne l’as-tu pas vue s’éloigner ? » Ibaraki était plus consciencieux que Yuichi ne l’avait prévu.
Il avait réfléchi et se souvint qu’Aiko avait quitté son siège. Peut-être qu’elle était allée aux toilettes ?
Mutsuko était déconcertée. « Je voulais que ce soit pour les débutants, mais..., » peut-être qu’elle pensait avoir fait une erreur.
Yuichi était habitué à une telle avalanche d’informations, donc cela ne l’avait pas dérangé, mais le fait de recevoir un tel discours sans avertissement aurait été trop pour Aiko. Il se sentait aussi un peu mal de l’avoir négligée.
« Eu-Euh, je suis désolée. Je suppose qu’avoir tout cela à la fois serait un peu incompréhensible..., » Kanako était agitée et s’était excusée. Comme Mutsuko, l’idée de faire peur à un membre potentiel du club semblait l’avoir déprimée.
« Ah ! Euh ! Je ne sais pas grand-chose sur la période des Royaumes combattants, mais l’histoire du gars affamé qui a volé les taxes sur le riz plutôt que de se suicider était vraiment intéressante, » avait rapidement dit Yuichi, essayant de faire en sorte que Kanako se sente mieux. Il savait que Mutsuko pouvait s’occuper d’elle-même, mais cela le dérangeait de voir l’air si triste de Kanako.
« V-Vraiment ? C’est une bonne chose. La prochaine fois, je parlerai des voyages en Europe au Moyen-âge ! » déclara Kanako.
Yuichi n’était pas sûr de la raison pour laquelle Kanako était si obsédée par l’isekai, mais il était difficile de lui en vouloir pour quoi que ce soit quand elle souriait ainsi.
« Oh, c’est vrai, Orihara. Veux-tu bien montrer la chose à Yu et à son ami ? » Mutsuko s’était immiscée dans la discussion.
« Ah ? Le truc ? Le truc ? Mais..., » murmura Kanako.
« Tout ira bien ! Il faut que les autres le regardent ! Tu ne t’amélioreras pas sans rétroaction ! » déclara Mutsuko.
« ... OK. Hmm... Euh... J’écris un roman, » bégayait-elle timidement.
Qu’est-ce que je suis censé répondre à ça ? Il n’y avait rien de plus gênant que d’entendre quelqu’un vous dire, en face de vous, qu’il écrivait un roman.
« Wôw, cool ! » Mais Ibaraki était apparemment sincèrement impressionné.
« Lisez-vous des romans ? » demanda Yuichi. Il était difficile d’imaginer qu’Ibaraki sache quelque chose sur la littérature.
« Bien sûr, cela m’arrive par moment, » répondit Ibaraki.
« Livres occidentaux, non ? » demanda Yuichi.
« Est-ce une blague sur mon apparence ? Voyons voir... La dernière chose que j’ai lue, c’est “Le voyage du prince Takaoka”. »
« Je sais que j’ai demandé, mais je me fiche de ce que tu lis, » déclara Yuichi.
« ... Hey, ça fait un peu mal, tu sais..., » répliqua Ibaraki.
Yuichi avait ignoré un Ibaraki boudeur et avait recommencé à parler à Kanako. « Euh, vous écrivez l’un de ces romans d’isekai ? Quel est le titre ? » demanda Yuichi. Il ne pouvait pas l’ignorer après avoir rejeté l’intérêt d’Ibaraki.
« Euh, le titre est : Mon Seigneur Démon est trop mignon pour tuer et maintenant le monde est en danger ! » répondit-elle.
« Je ne peux pas vraiment imaginer ce que cela impliquerait..., » Yuichi s’était senti un peu déçu. Il espérait qu’elle aurait pu écrire quelque chose d’un peu plus mignon.
« Faire un résumer est trop embarrassant, alors s’il vous plaît, lisez-le, » déclara-t-elle.
Ses sentiments avaient été de trop et maintenant, il devrait le lire et lui dire ce qu’il pensait.
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« Hé, combien de temps vas-tu rester dans le coin ? » Yuichi parlait à Ibaraki, qui était encore assis là. Il n’aimait pas la facilité avec laquelle il s’intégrait dans le groupe.
« Hmm ? Le club est fini, n’est-ce pas ? Alors, je vais rentrer chez moi, » déclara Ibaraki.
« Je ne sais pas ce que tu essayais d’accomplir ici, mais souviens-toi de ta promesse, d’accord ? Ne nous poursuis plus jamais, » déclara Yuichi.
« Compris. De toute façon, je n’en ai plus envie... oh hey, le téléphone sonne, » Ibaraki avait pris le téléphone portable que Yuichi avait sorti de sa poche et placé sur la table lorsqu’il l’avait déshabillé.
« Oh, c’est toi. Hein ? Je ne pouvais pas décrocher avant. Quelle importance ? » Ibaraki jeta un regard subreptice sur Yuichi. « J’ai trouvé ça trop ennuyeux. Et j’ai réalisé à quel point ce serait pénible de nettoyer après l’avoir tué dans un endroit comme celui-ci, ce qui lui a permis de s’en sortir. Ouais, tu ferais mieux de croire que c’est tout. À plus tard, » Ibaraki avait coupé l’appel.
Puis c’était le portable de Yuichi qui avait sonné. Il avait reconnu le numéro. C’était Natsuki Takeuchi.
« Bonjour, Sakaki, » peut-être que la réception était mauvaise, parce que sa voix était mélangée à des bruits statiques.
« Tu n’es pas venue aujourd’hui, n’est-ce pas ? Je voulais te parler, alors je suis content que tu aies appelé, » déclara Yuichi.
« Si je ne suis pas venue, c’est parce que je me prépare à massacrer tout le monde, comme promis, » déclara Natsuki.
« Hey..., » s’exclama Yuichi.
Elle avait gloussé. « Je plaisante. Je pourrais encore le faire si tu me forces la main... mais pour l’instant, il n’y a que toi et Noro qui êtes au courant, n’est-ce pas ? »
Yuichi avait serré les dents. Donc elle savait pour Aiko.
« Alors, qu’est-ce que tu vas faire ? » demanda-t-il.
« S’il n’y avait que toi, Sakaki, ça ne me dérangerait pas de laisser les choses en l’état. Mais... deux personnes ou plus, c’est un problème. Le secret pourrait continuer à fuir, » déclara Natsuki.
« Alors, que comptes-tu faire ? » demanda Yuichi.
« Bonne question. J’ai pensé que je pourrais te tuer toi et Noro, » déclara Natsuki.
« Oh, franchement ! » répliqua Yuichi.
« C’est toi qui n’as pas tenu ta promesse. Alors tu choisis. Vous mourrez tous les deux, ou je tue tous ceux qui sont liés à l’école ? Demain, c’est la date limite, » déclara Natsuki.
« Tu fais ce que tu veux. Tuer tout le monde ? Il n’y a aucune chance que tu puisses le faire, » déclara Yuichi.
« Je vois. Je pensais que tu dirais ça. Et peut-être que cela te conviendrait mieux de t’enfuir et de laisser les autres à leur sort, » déclara Natsuki.
« Tu ne peux pas tuer tout le monde, » répliqua Yuichi.
« Je ne mens pas, mais je n’essaierai pas de t’en convaincre maintenant. Parlons plutôt de vous deux. Tuer tout le monde n’est qu’un dernier recours. Cela sera réservé pour le moment ou j’atteindrais un état de désespoir tel que je verrai avec bonheur la fin du monde. Alors je préférerais vraiment vous tuer tous les deux, si possible, » déclara Natsuki.
« Ce n’est pas comme si on allait se soumettre aveuglément à la mort, » déclara Yuichi.
« Je t’ai dit que je ne chasserai pas les gens que je vois dans ma vie quotidienne. C’est pour ça que tu penses pouvoir agir comme ça ? C’est vrai, mais à ce rythme, je pense que je ne retrouverai peut-être jamais ma vie paisible et tranquille, » déclara Natsuki.
« Comme si ça m’intéressait ! » répliqua Yuichi.
« Alors, Sakaki, je veux que tu viennes sur mon terrain de chasse. Quand tu veux, » déclara Natsuki.
« Tu crois vraiment que j’irai là-bas de mon plein gré ? » demanda Yuichi.
« Noro est déjà là, » annonça Natsuki.
« Quoi !? » Yuichi regarda de nouveau dans la pièce. Aiko n’était toujours pas revenue. Elle était partie beaucoup trop longtemps. Elle avait aussi laissé son sac derrière elle, donc elle n’aurait pas pu rentrer chez elle sans eux...
« Laisse-moi t’expliquer mon plan. Je vais tuer Noro à minuit ce soir. Si tu viens avant, je te tuerai avec elle. Si tu ne viens pas... Je suppose que Noro va mourir, et que les choses redeviendront comme avant ? Ça ne me dérange pas si tu es le seul à connaître mon secret, et je pense que tuer Noro devrait t’effrayer et te faire peur. C’est mon hypothèse, en tout cas, » déclara Natsuki.
« Toi... Tu es folle ! » Qui d’autre qu’une folle dirait quelque chose comme ça de façon aussi décontractée ?
« Oh, si tu viens, laisse une lettre derrière toi, le ferais-tu ? C’est un peu démodé, mais la fugue fait une belle couverture, » déclara Natsuki.
« Noro va-t-elle bien ? » exigeait-il de savoir.
« Oui. Elle est inconsciente. Elle s’énerverait si je la réveillais, donc je ne peux pas la mettre au téléphone, mais ne t’inquiète pas. Je ne lui ferai aucun mal, à part la tuer plus tard, » déclara Natsuki.
« ... Alors, où est ton terrain de chasse ? » demanda Yuichi.
Natsuki lui avait donné l’adresse. « Au revoir. J’espère que tu viendras, mais je ne compte pas dessus, » après ça, elle avait raccroché.
« Hé, ça avait l’air plutôt tendu. Qu’est-ce qui se passe ? » demanda Ibaraki, pensant peut-être que Yuichi agissait bizarrement.
« C’est plutôt mauvais... Elle a capturé Noro, » déclara Yuichi.
« Hein ? Tu veux dire la petite crevette ? Elle n’est partie que depuis quelques minutes. A-t-elle vraiment fait tout ce chemin jusqu’à l’école ? » demanda Ibaraki.
« Comment le saurais-je ? Mais si Noro a disparu, c’est évident qu’elle l’a fait ! » déclara Yuichi.
Elle avait dit qu’Aiko était inconsciente. Si elle voulait la garder en otage, ça devrait aller pour l’instant. Mais Yuichi se sentait toujours anxieux sans confirmation.
C’est lui qui avait mêlé Aiko à tout ça. Il ne pouvait pas la laisser mourir.
« Peut-être que je pourrais lui parler... Elle a dit qu’elle pouvait laisser passer si j’étais le seul à savoir. Si je pouvais plaider le bien-fondé de ne tuer personne..., » bien que leur relation ait été à la limite de la guerre dès le début, Natsuki avait toujours été civilisée, du moins, d’une certaine manière. Si elle pensait qu’il y avait un moyen d’éviter la mort de quelqu’un, elle pourrait être prête à en parler.
« Oh, franchement. Tu étais plus qu’heureux de te battre avec moi, » déclara Ibaraki.
« Ouais, parce que tu ne m’as jamais donné le temps de parler ! » déclara Yuichi.
« Haha, c’est vrai, » répliqua Ibaraki.
Yuichi soupira et pendit sa tête. Dans sa vision périphérique, il pouvait voir sa sœur bouger avec anxiété.
Ah... Elle veut commenter..., pensa-t-il.
Yuichi regarda sa sœur. Elle avait dit auparavant qu’elle le laisserait décider de la façon dont il voulait gérer les choses. Elle n’allait clairement pas intervenir à moins que Yuichi lui ait d’abord donné sa permission, mais tout son langage corporel criait : « Laisse-moi parler ! »
Je suppose que je n’ai pas le choix..., pensa-t-il.
« Sœurette, j’ai besoin de ton aide, » déclara Yuichi.
« D’accord ! » Son visage avait éclaté en un sourire.
***
Partie 2
« Ma grande sœur a le syndrome du collège, » avait dit Yuichi, en réponse à la question d’Ibaraki.
« Yu, c’est horrible ! Accuser ta grande sœur d’avoir le syndrome du collège..., » Mutsuko avait crié de colère.
C’est vrai, elle ne s’en rend pas compte... Souvent, les personnes atteintes du syndrome du collège ne l’avaient pas réalisée.
Ils étaient dans un restaurant familial. Yuichi, dans son uniforme, était assis côte à côte avec Ibaraki, qui portait les vêtements de gymnastique de Yuichi. Mutsuko s’était assise, en face des deux autres.
Ils avaient commencé à se diriger vers l’endroit que Natsuki lui avait dit de venir, mais quand leur estomac s’était mis à grogner, ils s’étaient retrouvés ici.
Yuichi n’était pas vraiment d’humeur pour un long repas, mais Mutsuko avait commandé un ensemble de steak pour trois, insistant sur le fait que vous ne pouviez pas faire la guerre l’estomac vide, et aussi qu’elle paierait.
« Veux-tu parler du truc comme : “J’ai le pouvoir des flammes noires, mon bras droit devient fou” ? » Ibaraki avait demandé, apparemment plutôt connaisseur du sujet.
« Hé ! J’ai arrêté de faire ces trucs à la maternelle. Lâche-moi un peu ! » déclara Mutsuko.
« Tu crois à la magie de la vision et aux Onis ! » déclara Yuichi.
« C’est différent ! C’est stupide d’inventer des choses qui n’arrivent même pas ! » déclara Mutsuko avec insistance. Il semblait qu’elle était étrangement pratique quand il s’agissait de ses fantasmes. Elle s’était empressée de rejeter des choses qui s’étaient révélées fausses.
« Tu vois ? » Yuichi soupira.
« Voir quoi ? » Ibaraki avait répondu.
Réalisant que ce n’était pas assez explicite, Yuichi avait précisé ses pensées. « En d’autres termes, ma sœur poursuit des rêveries dans le cadre de ce qui peut être accompli dans la pratique. Et la plupart du temps, elle m’utilise comme cobaye ! » Il ne pouvait pas vraiment commencer à crier dans un restaurant familial, mais il avait haussé un peu la voix à la fin. Le cri de ses longues souffrances.
« Oh, Yu ! Tout ce que je fais, c’est t’entraîner à être l’homme le plus fort du monde. Ça me rend triste de t’entendre parler comme ça, » Mutsuko lui avait fait une moue exagérée.
« Oui... Eh bien... On dirait que tu as eu une vie difficile, » Ibaraki tapota l’épaule de Yuichi par sympathie.
Juste à ce moment-là, une assiette avait été déposée devant lui, contenant un plat de steak d’une épaisseur ostentatoirement importante. Mutsuko semblait vouloir que Yuichi mange de la viande. Ou au moins, le remplir de protéines.
Yuichi avait dit à Ibaraki. « J’ai aussi quelques questions à te poser. » S’il devait être forcé de s’asseoir et de manger, il voulait faire bon usage de son temps.
« Bien sûr, demande-moi n’importe quoi. Inutile de cacher des choses maintenant, » répondit-il.
« D’abord, à propos de l’endroit où nous allons. Sais-tu quelque chose à ce sujet ? » Yuichi lui avait montré l’adresse qu’il avait écrite. C’était l’endroit où Natsuki lui avait dit d’aller.
« C’est plein de vieux types minables qui se baladent. C’est un endroit horrible. Mais tu vis dans la région, donc tu en sais probablement autant, n’est-ce pas ? » L’endroit où Natsuki les avait invités était l’un des rares vrais bidonvilles du Japon. C’était un nid de travailleurs journaliers et de sans-abri, célèbre pour les flambées de violence occasionnelles qui s’y étais produites.
« C’est son territoire de chasse, hein ? » demanda Yuichi.
Il n’est pas rare qu’une ou deux personnes meurent ou disparaissent dans la région, pensait Yuichi.
« Je sais ce que tu penses probablement, alors laisse-moi clarifier une chose, » déclara Ibaraki. « Je ne chasserais jamais des types crasseux comme eux. Le terrain de chasse que je lui ai demandé était ailleurs. »
« Je pensais à Takeuchi. Pourquoi est-ce que je penserais à toi ? » demanda Yuichi.
« Pourquoi es-tu si méchant avec moi tout le temps !? » s’écria Ibaraki.
« Tu tues des gens et tu les manges. On ne sera jamais amis, » répliqua Yuichi.
Mutsuko avait regardé les deux se disputer avec amusement.
« OK, suivant. Je n’ai pas entendu tous les détails à l’école, mais tu as dit que Takeuchi était une race différente de ce que tu es, n’est-ce pas ? Donc si elle est comme un Oni ou un vampire ou un yokai ; elle devrait avoir un point faible, » déclara Yuichi.
« Bien sûr, mais si je le savais, elle ne serait pas capable de me donner des ordres, » déclara Ibaraki.
« Quel est le nom de sa race ? Le sais-tu ? » demanda Yuichi.
S’il le faisait, Yuichi espérait que Mutsuko pourrait être en mesure de donner quelques conseils.
« C’est une Jack l’Éventreur, » répondit Ibaraki.
Yuichi fixa l’autre pendant un instant de silence. Jack l’Éventreur était un tueur en série, bien sûr, mais il venait du passé et d’un autre pays. Qu’est-ce que ça avait à voir avec quoi que ce soit ? Après une brève hésitation, il avait dit : « Désolé, je ne comprends pas ce que ça veut dire. »
« Ouais, eh bien, moi non plus, » lui avait Ibaraki en souriant.
« Espèce de connard ! » Ennuyé par son attitude insouciante, Yuichi avait fait une légère claque à Ibaraki.
« Oh, l’amitié qui germe après une dure bataille ! » déclara Mutsuko gaiement.
« Quelle amitié !? » Yuichi avait crié sur sa sœur.
« Ouais ! Je l’aime bien, tu sais ? » Ibaraki avait mis son bras autour des épaules de Yuichi, tandis que Yuichi grimaçait ouvertement.
« Franchement, je ne sais pas. Mon clan non plus. Elle a une nature similaire, avec celle des proies et des trucs comme nous. On pense qu’il doit y avoir un lien. C’est ce que disent les autres, donc ça doit être vrai, non ? Il y a d’autres tueurs en série, comme Ed Gein, non ? C’est peut-être une réincarnation de lui ou quelque chose comme ça ? Mais quand il s’agissait de lui, je ne sais pas si le meurtre était le but ou juste un moyen de faire ses œuvres d’art malades, » déclara Ibaraki.
« Ed Gein ! » Les yeux de Mutsuko brillaient d’intérêt.
« Sœurette, je sais que c’est l’un de tes sujets préférés, mais ne nous attardons pas là-dessus, » déclara Yuichi.
« Le tueur en série légendaire qui a inspiré le Silence des Agneaux et Psycho ! Il a découpé les corps des personnes et en a fait des choses ! Il a conçu des abat-jour en peau et des bols à soupe en crâne ! Et des gilets faits de peau humaine, et il les portait vraiment ! Et... » commença-t-elle.
« Stop ! Ce n’est pas un sujet pour un restaurant familial ! » Yuichi se pencha sur la table et serra une main sur la bouche de Mutsuko. Mutsuko continuait à parler même avec la bouche couverte, semblant s’amuser.
« Quoi qu’il en soit, revenons à notre sujet. Tu dis que Takeuchi est la réincarnation de Jack l’Éventreur ? » demanda Yuichi.
« Je te le dis, je ne sais pas ! » Ibaraki avait riposté. Qu’il n’en sache pas plus ou qu’il refuse de le dire, le sujet semblait être terminé pour Ibaraki.
« Alors ? Tu es un étranger ou quoi ? » Le sujet étant clos, Yuichi avait décidé de satisfaire son autre curiosité. Le gars était blond avec des yeux bleus et des traits marqués. Il avait l’air étranger, mais il parlait couramment le japonais.
« Je suis né et j’ai grandi au Japon, d’accord ? Je suppose que nos ancêtres étaient peut-être des étrangers qui se sont échoués sur le rivage, » Ibaraki parlait avec emphase, apparemment heureux de se faire interroger sur lui-même.
« Oh, désolé. J’ai pensé que je devrais demander, mais je n’étais pas vraiment intéressé, » déclara Yuichi.
« Pourquoi, toi..., » Ibaraki s’était effondré de déception.
« En parlant de ça, il avait “Tueur en Série” au-dessus de sa tête au début, comme Takeuchi, non ? Y a-t-il un lien ? » Mutsuko avait parlé, un peu tard dans leur discussion.
Yuichi avait jeté un coup d’œil par-dessus. À l’heure actuelle, il était écrit « Ibaraki-doji » au-dessus de sa tête, mais à l’origine, il était écrit « Tueur en Série II ».
« Il le faut, n’est-ce pas ? Jack l’Éventreur est assurément un tueur en série, et Ibaraki est un Ibaraki-doji... en d’autres termes, un Oni qui a besoin de tuer les personnes pour les manger, ce qui fait de lui un tueur en série. Je suppose que ce sont deux formes de la même chose. L’un fait des choses monstrueuses, tandis que l’autre est un monstre au sens propre..., » déclara Mutsuko.
Mutsuko avait ajouté son propre commentaire, mais cela n’avait pas pu aider à élucider le mystère. Les étiquettes de Yuichi étaient trop imprécises.
« De toute façon, comment pouvons-nous avoir plusieurs tueurs en série vivant ici ? » avait-il demandé. « Quelqu’un qui meurt devrait faire un tapage énorme. Pourquoi ne pas en entendre parler quand tu tues quelqu’un ? »
« Franchement, mec. Sais-tu combien de personnes disparaissent chaque année au Japon ? Environ 80 000. Environ 20 % d’entre eux sont des enfants, la plupart des fugueurs. Si quelqu’un disparaît un jour et ne revient pas, on ne découvre pas nécessairement ce qui lui est arrivé. Eh bien, il se trouve que beaucoup d’entre eux sont mangés par nous. D’une certaine façon, qu’ils s’en prennent à eux-mêmes. Si vous marchez dans le droit chemin, vous ne croiserez jamais des personnes comme nous. Et bien sûr, nous travaillons dur pour que personne ne sache rien sur nous, » déclara-t-il.
Ibaraki semblait vraiment croire ce qu’il disait. C’était comme s’il vivait dans un monde avec un code moral complètement différent.
« Alors, où est-ce que le fait d’attaquer un adolescent hétérosexuel au milieu de son lycée s’inscrit là-dedans ? » demanda Yuichi.
« Eh bien, je me suis dit que je pourrais le faire sans trop d’histoires, » répondit Ibaraki.
« Eh bien, tu as échoué ! Tu as saccagé l’école ! » s’écria Yuichi.
« Hein ? Je suis presque sûr que c’est toi qui as fait tous ces dégâts, mec..., » répliqua Ibaraki.
Yuichi avait immédiatement détourné le regard, essayant de jouer les innocents.
♡♡♡
« Eh bien, je rentre chez moi, » avait annoncé Ibaraki en quittant le restaurant.
« Oh, ouais ? Il était temps, » avait commenté Yuichi.
« Mec, tu es si froid. Tu n’acceptes même pas mes regards d’amour ? » demanda Ibaraki.
« Désolé, Yu, mais je n’aime pas BL ! J’espère que tu considérerais une relation hétéro pure et vraie ! » déclara Mutsuko gaiement.
Yuichi avait fait un pas en arrière.
« Hein ? Hé, ne prends pas ça au sérieux ! Mais tu ne vas pas me demander pourquoi je pars ? » demanda Ibaraki.
« Non, mais je parie que tu allais nous le dire, » murmura Yuichi. « Finissons-en avec ça. »
« ... Hé, la sœur de Yuichi, ton petit frère est toujours comme ça ? » demanda Ibaraki.
« Je pense qu’il est juste timide ! » répliqua Mutsuko.
« Je ne le suis pas. Alors quelle est la raison ? » demanda Yuichi.
« Parce que je t’aime bien. Si je vais chez Takeuchi, je devrai me retourner contre toi. Je dois après tout penser à ma réputation. Mais si je lui dis que je suis rentré chez moi sur un coup de tête, c’est probablement acceptable. À bientôt. Je laverai l’uniforme et je rendrai..., » déclara Ibaraki.
« Garde-le et reste en dehors de ma vie, » déclara Yuichi.
Ibaraki soupira. « Si impossible. Oh, eh bien. À plus tard. » Après avoir dit ça, Ibaraki était parti.
« Plus tard. Attends, qu’est-ce qui est arrivé à “garder à jamais” ? » demanda Yuichi.
Pourtant, Ibaraki avait agi comme s’il allait les revoir... Ça voulait dire qu’il ne pensait pas que Yuichi allait mourir. Il y avait quelque chose de rassurant à ce sujet.
« Ce n’est pas le moment de se dire au revoir en pleurant ! Retrouvons ce tueur en série ! » proclama Mutsuko, joyeusement.
♡♡♡
Quand elle s’était réveillée, Aiko s’était retrouvée sur le côté, la joue appuyée contre un sol froid et dur.
Il y avait un faible bruit de ronronnement dans l’air. Il y avait une étrange lumière vive devant elle, mais elle ne pouvait pas tout à fait dire ce qu’elle regardait.
Sa vision était floue et ses pensées étaient mélangées.
« Oh, tu es réveillée ? » Aiko s’assit lentement et regarda dans la direction de la voix. Alors que ses yeux se concentraient, elle pouvait distinguer quelqu’un debout dans la lumière. C’était une fille portant l’uniforme du Lycée de Seishin.
Natsuki Takeuchi regardait Aiko.
Aiko n’arrivait pas à comprendre ce qui se passait. Elle n’avait aucune idée de l’endroit où elle se trouvait, et ses souvenirs de son arrivée étaient dans un brouillard total.
Aiko regarda autour d’elle. Elles semblaient être dans une usine, mais tout, sauf l’espace dégagé et éclairé dans lequel elles se trouvaient, était si sombre qu’elle ne pouvait pas en être sûre.
Aiko s’était ensuite inspectée. Son uniforme était couvert de poussière. L’endroit ne devait pas être nettoyé très souvent.
Sa conscience lui revenait peu à peu. Aiko se souvient...
Elle se souvenait d’avoir quitté son siège pour aller aux toilettes parce que la conférence d’Orihara était incompréhensible. Elle se souvenait d’avoir remarqué que les salles de bains de l’ancien bâtiment ne contenaient rien d’autre que des toilettes sales, alors elle s’était dirigée vers celles du gymnase. Elle se rappelait avoir tout fini là-bas et s’être préparée à retourner à la salle de club, quand quelque chose l’avait soudainement prise autour du cou, et...
C’est... vraiment mauvais, hein..., pensa-t-elle.
Natsuki pensait qu’Aiko connaissait son secret. Elle avait essayé de faire disparaître les personnes qui connaissaient son secret...
« Hé... Takeuchi. Peux-tu me dire ce qui se passe ? » Elle avait décidé de sonder tranquillement l’état d’esprit de son ravisseur.
« En vérité, je voulais vous enlever tous les deux, » avait répondu Natsuki. « Je ne peux pas vous laisser mourir à l’école ou en ville, mais une fois que je vous ai amené ici, je peux faire tout ce que je veux avec vous. Alors que je regardais l’école, me demandant comment j’allais m’y prendre pour vous kidnapper tous les deux à la fois, quand je t’ai vue, toute seule. C’est là que j’ai réalisé qu’un seul suffisait. »
Ouais, je me suis dit qu’elle a fait ça parce qu’elle a découvert que je savais pour elle ! pensa Aiko.
« J’ai infiltré la salle de bains et je t’ai étouffée par-derrière. Puis tu as perdu connaissance et je t’ai amenée ici, » déclara Natsuki.
Cela n’avait pas beaucoup de sens pour Aiko, mais cela expliquait pourquoi elle se souvenait d’avoir été étranglée.
« Hé... Takeuchi, qu’essayes-tu d’accomplir ? » Elle n’arrivait pas vraiment à comprendre pourquoi elle avait été kidnappée. Si Natsuki voulait juste qu’elle se taise, elle l’aurait déjà tuée. Mais elle venait d’être laissée par terre. Elle n’était même pas attachée.
« Je veux avoir une vie scolaire paisible, » répondit Natsuki. « Une vie normale entourée d’amis normaux, qui s’amusent normalement. Mais en une seule journée, tout s’est effondré. Que ferais-tu si tu étais moi, Noro ? »
Natsuki n’avait même pas l’air d’attendre une réponse. Elle semblait dire tout ce qu’elle voulait dire.
« Je ne le dirai à personne, alors tu pourrais me laisser partir... n’est-ce pas ? » Aiko avait fait à Natsuki ses meilleurs yeux de chiot, même si elle pensait que c’était probablement inefficace contre une fille.
« Non, » répondit Natsuki.
« Mais on a beaucoup parlé, tu sais ? N’est-on pas amies ? Tu sais que je protégerai le secret de mon amie ! » Mis à part les questions éthiques et juridiques, elle était presque certaine de pouvoir garder le secret. Après tout, elle avait un sombre secret, étant une vampire. Elle avait une certaine sympathie pour la situation de l’autre fille.
« Ouais, je pensais aussi qu’on pourrait être de bonnes amies, Noro. C’est une honte, » déclara Natsuki.
« Non, non, non, non, ne dis pas ça ! On peut toujours être... amies, tu sais !? » Aiko avait décidé de pousser plus loin le coup de l’amitié. Après tout, Natsuki semblait vraiment vouloir des amis.
« Est-ce que tu m’as écoutée, Noro ? » demanda Natsuki avec dédain.
Aiko n’était pas sûre de ce qu’elle avait fait pour mériter ce mépris. « Oui, je l’ai fait. Tu as dit que tu voulais t’amuser à l’école avec tes amis, non ? Si tu t’arrêtais et devenais ami avec moi et Sakaki, tu n’aurais pas à faire ça ! »
« Je t’ai dit que je veux des amis normaux. As-tu compris ? Je ne peux pas être ami avec des tarés qui se fichent d’être amis avec un tueur en série. Je veux dire, franchement, n’importe quel citoyen normal et respectueux des lois appellerait la police tout de suite, » déclara Natsuki.
« Hein ? » s’exclama Aiko.
Eh bien, ça explique tout. Natsuki Takeuchi était folle. Le fait d’entendre une folle l’appeler bizarre avait vraiment mis Aiko dans un état de peur. La stratégie de l’amitié ne semblait pas fonctionner, alors Aiko avait abandonné.
Elle soupira. « Puis-je au moins te demander d’expliquer pourquoi tu m’as kidnappée ? » demanda Aiko.
« Pour te tuer. Sinon, pourquoi aurais-je fait ça ? » Natsuki l’avait dit avec désinvolture, ça ne semblait pas réel.
Aiko était seule dans une pièce avec un tueur en série. Elle aurait dû avoir plus peur, mais Aiko n’avait pas du tout peur. Elle n’arrivait toujours pas à croire que Natsuki était une tueuse en série, probablement parce qu’elles parlaient comme elles l’avaient toujours fait.
« Tu sais... Je pourrais m’enfuir, » Aiko n’était pas attachée. Elle était éveillée, alerte et indemne. Si elle voulait courir, elle pouvait le faire à tout moment.
Mais Natsuki avait rapidement anéanti ces espoirs. La jeune fille qui se tenait à une certaine distance était apparue devant elle en un clin d’œil. Elle avait tapoté le front d’Aiko avec un doigt.
« Aïe, » Aiko avait involontairement mis ses mains sur son front.
« Tu es libre parce que j’ai confiance dans le fait que je pourrais t’attraper s’il le fallait. Veux-tu tester cette théorie ? » demanda Natsuki.
« Non, merci..., » Aiko avait reculé un peu en réponse. Il était clair qu’elle ne pouvait pas la battre.
Je suis peut-être un vampire, mais ça n’aide pas du tout dans cette situation... Peut-être qu’elle pourrait le faire si elle suçait du sang de Natsuki, mais Natsuki était tellement plus forte, qu’il était impossible qu’elle puisse même la faire jusqu’à la morsure.
« Eh bien, reste tranquille et tu pourras peut-être survivre jusqu’à minuit, » déclara Natsuki de manière désinvolte.
Aiko avait vérifié sa montre-bracelet. Il était 21 h. Ça ne lui avait pas donné beaucoup de temps. « Pourquoi jusqu’à minuit ? »
« J’ai appelé Sakaki. S’il n’est pas là à minuit, je te tue. Maintenant, une fois qu’il sera là, je vous tuerai tous les deux. S’il ne vient pas, je te tuerais et lui pourra vivre plus longtemps. Qu’en penses-tu ? Sakaki viendra-t-il ? » demanda Natsuki.
Le bon sens lui avait dicté qu’il ne viendrait pas. Pourquoi quelqu’un viendrait-il pour se faire tuer ? C’était probablement la raison pour laquelle Natsuki avait demandé.
Mais Aiko avait répondu sans aucun doute dans son esprit. « Bien sûr qu’il viendra. »
« Hein ? » Natsuki avait répondu avec incrédulité.
Mais Aiko était certaine. Elle ne le connaissait pas depuis longtemps. Elle ne pouvait pas prétendre tout savoir sur lui. Mais elle savait que, dans cette situation, le garçon nommé Yuichi viendrait.
C’était la raison pour laquelle elle avait été si calme avant. Elle savait que Yuichi viendrait la sauver. C’était la chose la plus naturelle au monde. « Je veux dire, le héros vient toujours sauver son intérêt amoureux quand elle a été capturée par un tueur ! »
« Oh, épargne-moi tes clichés embarrassants, » Natsuki avait riposté, sèchement.
« C’est vrai, désolée. Fait comme si je n’avais pas dit ça ! Je me sens un peu embarrassée moi aussi. » Aiko s’était sentie gênée de s’appeler l’intérêt amoureux de l’autre et elle avait détourné les yeux.
Mais... même si je ne suis pas vraiment son intérêt amoureux, Sakaki viendra quand même pour moi. C’était la seule chose dont Aiko était sûre.