Chapitre 2 : La maison Balandin
L’architecture du palais de l’Autocratie rappelait la Grèce antique. Un grand nombre de fonctionnaires civils et militaires s’y étaient rassemblés dès le matin.
Un homme énorme et musclé était assis sur un trône placé en hauteur dans la salle, ce qui lui permettait de regarder les fonctionnaires de haut. C’était le dirigeant de G’doire — l’Autocrate Dross Balandin, craint par toutes les nations voisines. Il portait l’habit traditionnel du dirigeant de l’Autocratie : une armure ancienne et une cape avec un casque qui reposait à côté de lui. Pour les autres nations intergalactiques, l’Autocratie accordait une importance anormale à la force militaire, et son représentant, l’Autocrate, se devait d’avoir l’allure d’un guerrier féroce.
Les enfants de Dross s’étaient agenouillés devant lui, la tête baissée.
« L’empire Algrand a envoyé le prince héritier Calvin comme commandant suprême, » déclara Dross. « As-tu une chance contre lui, Isel ? »
Un homme aux cheveux bleus leva la tête pour répondre à Dross, la voix basse, mais pleine d’assurance. « Père, moi — Isel Balandin — je te jure que je détruirai l’armée de l’empire Algrand. »
Les bras croisés, l’Autocrate ricana face à son fils sûr de lui. Isel était le prince héritier, mais il n’était qu’un des nombreux enfants de l’Autocrate, et il n’était même pas légitime. Ses prouesses martiales lui avaient valu le siège d’héritier après de nombreuses victoires sur des adversaires coriaces. Dans l’Autocratie, le prince héritier n’était pas seulement l’enfant du souverain, mais aussi le guerrier le plus puissant après lui. Les têtes brûlées de la nation avaient reconnu Isel comme le prochain Autocrate du pays, et certains se demandaient même si Dross lui-même pourrait gagner un combat contre lui. Dross avait entendu ces ragots, cela le rendait fier.
« Me défieras-tu après avoir vaincu l’Empire, Isel ? » Qu’un enfant devienne fort et se lève pour le défier était l’acte ultime de dévotion filiale dans la famille de l’Autocrate.
Isel sourit ironiquement. « Tu plaisantes. Je ne peux pas encore espérer te défier, père. »
L’autocrate fronça les sourcils, insatisfait par cette humble réponse. « Tu ne me défieras pas ? »
La succession n’avait lieu que lorsque le prince héritier défiait l’autocrate et gagnait. Si une telle contestation n’avait jamais eu lieu, le poste ne serait jamais transmis.
Isel adressa à son père mécontent un sourire audacieux. « Je te défierai sûrement un jour… Mais pour l’instant, je suis plus intéressé par l’excitation que je trouverai sur le champ de bataille, en luttant contre les féroces guerriers de l’Empire. Mon combat contre toi devra attendre, père. »
Isel ne jouait plus les humbles, et les fonctionnaires assemblés souriaient tous à son sourire belliqueux.
« Il semble que le prince héritier s’intéresse davantage aux chevaliers de l’Empire qu’à l’Autocrate. »
« Une vaste nation comme l’empire Algrand est sûre d’avoir des guerriers puissants. »
« Je me demande si l’un d’entre eux satisfera notre prince héritier. »
L’autocrate leva la main, faisant taire les fonctionnaires, et se leva de son trône. « J’ai hâte de vous voir faire courir l’armée impériale, mais vous devez d’abord gagner la bataille. Je prierai pour votre victoire, et pour que vous tous, vous reveniez vivants. »
Il ne parlait pas seulement d’Isel. Dans les mots « vous tous », il y avait ses autres enfants et les guerriers féroces de l’Autocratie qui n’avaient pas de lien de sang avec lui. Les liens du sang n’étaient pas particulièrement importants dans leur nation. Quiconque vaincrait Isel pourrait devenir prince héritier, quelle que soit son ascendance, et défier ensuite l’Autocrate pour son trône. C’est ainsi que les choses fonctionnaient à G’doire.
Isel répondit au nom du groupe. « Oui, Sire ! Nous reviendrons avec de bonnes nouvelles ! »
☆☆☆
Une femme faisait partie du groupe qui quitta le palais avec Isel. Les mèches de ses longs cheveux roux bouclaient en désordre, et à partir du cou, elle portait quelque chose qui ressemblait à un collant intégral. Cela n’exposait pas beaucoup de peau, mais ne laissait rien de sa silhouette à l’imagination. Elle était musclée, mais elle avait aussi une beauté féminine plus que charmante pour attirer les regards de tous les hommes autour d’elle.
Elle s’appelait Arjuna Balandin et était la sœur cadette d’Isel, de la même mère.
En descendant les marches du palais, Arjuna se plaignit à Isel de leur audience avec leur père. « Tu es trop lâche, mon frère. J’aurais vaincu l’Autocrate de mes propres mains avant de partir en guerre, puis j’aurais pris le commandement de toute l’armée. »
Isel sourit ironiquement devant l’enthousiasme excessif de sa sœur. D’autres frères et sœurs et des vassaux les entouraient, et dans n’importe quelle autre nation intergalactique, Arjuna aurait pu être immédiatement arrêtée pour trahison. Mais comme il s’agissait de l’Autocratie, les autres frères et sœurs se retinrent de sourire aux paroles d’Arjuna.
« Tu ne sais vraiment rien, n’est-ce pas, Arjuna ? », demanda un autre grand frère, ce qui la fit se renfrogner.
L’un de ses jeunes frères expliqua à quel point il était dangereux de défier l’Autocrate. « Notre père est le héros qui a sauvé l’Autocratie lorsqu’elle était au bord de la ruine à cause de conflits internes. Les gens pensent qu’Isel a une chance de se battre aujourd’hui, mais il n’y a pas si longtemps, personne n’était considéré comme proche de la force de Père. Peut-être qu’Isel le battra un jour, mais tu n’aurais aucune chance, Arjuna. »
La structure unique de l’autocratie la rendait très sujette aux conflits internes. Selon les historiens, il est miraculeux que la nation ait survécu jusqu’à ce jour. Elle était au bord de la ruine jusqu’à ce que Dross devienne Autocrate. Des frères et sœurs et de puissants combattants s’étaient constamment disputé le trône, et rien n’avait soudé le pays. D’autres nations intergalactiques envahissaient sans cesse le pays, et après seulement quelques semaines avec un nouvel autocrate, un autre individu lui volait le trône. L’autocrate actuel, Dross, était apparu au moment où la nation était au bord de l’effondrement.
Arjuna savait déjà tout cela et n’aimait pas le ton de son frère. « Crois-tu que tu es le seul à connaître ton histoire ? Je disais juste qu’Isel aurait dû défier Père malgré tout. »
Lorsqu’Arjuna s’était retournée et avait jeté un regard à son jeune frère, celui-ci avait eu des sueurs froides. Intimidé, il ne put s’empêcher de détourner le regard, ce qui provoqua chez les autres des regards dégoûtés. Leurs expressions disaient que c’était un lâche qui avait reculé avant même de se battre.
Isel sourit à ses frères et sœurs en pleine querelle. « Avec les plus forts de l’Empire à prendre en compte, j’ai déjà suffisamment de choses à penser. Mais tu as raison, Arjuna, je devrais m’inspirer de ta façon de voir les choses. Une fois de retour, je déciderai du jour où je défierai Père pour le trône. »
Arjuna n’aimait toujours pas l’attitude d’Isel, car son visage disait qu’il regrettait d’avoir laissé sa jeune sœur le réprimander. « Il n’est pas nécessaire de fixer une date », lui répondit-elle. « Après notre guerre contre l’Empire, je te retirerai moi-même de ta position de prince héritier. »
Les yeux d’Isel s’étaient d’abord écarquillés devant le défi lancé par sa sœur, mais il adopta rapidement un large sourire. Son sourire avait quelque chose de féroce. « J’accepte ton défi ! Cependant, notre combat contre l’armée impériale passe avant tout. Ils renforcent leurs défenses sous le commandement suprême du prince héritier Calvin, alors cette guerre promet d’être amusante. »
Au mot « guerre », les frères et sœurs et les vassaux avaient tous souri. Arjuna souriait aussi, bien que son expression soit nettement plus lascive que celle des personnes qui l’entouraient.
Elle lécha ses lèvres colorées. « J’espère simplement que l’Empire a quelqu’un qui pourra me satisfaire. »
☆☆☆
Près de l’une des planètes contrôlées par l’Empire, l’armée impériale s’apprêtait à livrer une bataille défensive contre l’Autocratie envahissante. Leur flotte comprenait un vaisseau de la taille d’un astéroïde, connu sous le nom de classe forteresse. Pendant ce temps, l’Autocratie affrontait les trente mille vaisseaux de l’Empire avec vingt mille des siens.
Sur le pont de la classe forteresse, son commandant sourit et dit : « Apparemment, ces idiots de l’Autocratie pensent qu’une petite flotte peut nous vaincre. Nous avons tout le temps de mener une bataille défensive. Une vingtaine de milliers de vaisseaux n’entamera pas nos forces ! »
L’attitude confiante du commandant soulagea l’équipage de la passerelle. Ils étaient plus nombreux que l’ennemi, et si le commandant était à l’aise, ils n’avaient pas à s’inquiéter de perdre.
Cependant, le chevalier à côté du commandant — qui servait de conseiller militaire — s’était rendu compte de quelque chose. Le visage pâle, il chuchota au commandant. « J’ai repéré un écusson parmi les forces ennemies. C’est le symbole de la maison Balandin, j’en suis sûr. »
Le commandant grimaça une seconde, mais contrôla rapidement son expression. « Un parent de sang de l’Autocrate, hein ? Qui attaque ? »
« La princesse Arjuna. »
« Arjuna ? La jeune sœur du prince héritier, hm ? Quels sont ses antécédents de guerre ? »
Le conseiller se pencha sur quelques documents holographiques pour déterminer les antécédents de guerre de la princesse et les tactiques qu’elle préférait. Il n’avait pas pu obtenir beaucoup d’informations à partir des fichiers affichés en l’air devant eux deux. Il soupira, soulagé qu’Arjuna ne semble pas avoir beaucoup d’expérience dans les batailles internationales.
« Eh bien, je ne sais pas ce qu’il en est à l’intérieur de l’Autocratie, mais il semblerait que ce soit sa première bataille en territoire étranger », répondit-il. « Je pense que nous nous débrouillerons bien ici. »
Le commandant était un peu soulagé lui aussi d’entendre qu’ils avaient affaire à une jeune commandante sans grande expérience. « Elle est toujours liée à l’Autocrate. Écrasons-la à fond, aussi jeune soit-elle. »
« Compris. »
C’est ainsi que commença la bataille défensive contre l’invasion de l’Autocratie. Cependant, assez peu de temps s’était écoulé avant que quelque chose d’étrange ne commence à se produire sur les lignes de front. Le commandant se leva de son siège, et au même moment, ses opérateurs commencèrent à crier.
« La flotte ennemie ignore nos attaques et charge en avant ! »
« Concentrez vos tirs sur eux ! »
« Nous le faisons, mais — ! »
Bien que ses opérateurs paniquaient, le commandant ne souhaitait pas particulièrement les réprimander. Après tout, la flotte ennemie les chargeait en utilisant comme boucliers des astéroïdes collectés avant la bataille.
« Concentrez vos tirs sur les astéroïdes ! », cria le conseiller du commandant. « Est-ce qu’ils ont l’intention de détruire la planète que nous défendons !? »
Les vaisseaux ennemis se dirigeaient tout droit vers la planète que l’armée impériale protégeait. L’armée impériale avait réussi à réduire la masse des astéroïdes, mais pendant ce temps, la flotte de l’Autocratie arriva à portée de tir.
Les deux camps s’attaquèrent alors avec des rayons d’énergie, mais l’armée impériale fut repoussée. Au début, ils avaient trente mille vaisseaux, mais avant même de s’en rendre compte, leur nombre avait été divisé par deux. L’Autocratie, quant à elle, n’avait subi que peu de dégâts.
Laisser les astéroïdes les distraire avait été la chute de l’armée impériale. L’Empire ne s’attendait pas à ce que son ennemi, dans une bataille pour un territoire, attaque une planète en lui lançant des astéroïdes.
Le commandant abattit son poing sur son accoudoir en s’exclamant : « Ces maniaques bellicistes ! »
Une réponse était venue sous la forme d’une masse de chevaliers mobiles ennemis. Ils avaient percé les forces de l’armée impériale, atterri sur la classe-forteresse et forcé l’entrée du navire — et ils étaient déjà arrivés ici, sur le pont.
« Reculez, Votre Excellence ! »
Le conseiller du commandant s’avança avec ses troupes pour tenter de protéger leur chef. Six chevaliers d’élite préparaient leurs armes. En réponse, le cockpit d’un des chevaliers mobiles de l’Autocratie s’ouvrit et une pilote en descendit. Elle tenait une rapière dans une main.
En voyant cette fine épée spécialisée dans les attaques perforantes, le conseiller ordonna à ses troupes : « C’est une femme-chevalier ! Vite, tuez-la ! »
« Monsieur ! »
Les chevaliers chargèrent en avant avec leurs lames, et les soldats sur le pont levèrent leurs fusils.
Face à tous ces ennemis, la femme grimace. « Appelez-moi guerrière, vermine. »
☆☆☆
À la fin de la bataille, le pont n’était plus qu’une mer de sang. Arjuna retira son casque, une main agrippant les cheveux du commandant ennemi.
Elle lui souleva la tête et le regarda en face. « Es-tu vraiment le commandant ? Tu es plus faible que tous ceux qui t’entourent. »
« Vous, les carnassiers, vous êtes les seuls à valoriser la force avant tout ! »
« Ennuyeux… »
Arjuna jeta le commandant de côté. Il heurta le mur et cessa de bouger. Ayant pris le contrôle du centre de commandement de l’ennemi, elle reçut bientôt une communication de l’un de ses vaisseaux.
« Dame Arjuna, nous avons anéanti la flotte ennemie. »
« Bon travail. Je me suis également emparée du centre de commandement. »
« Une excellente victoire. »
« Ne me flatte pas trop, ça va me monter à la tête. »
« Je pense que vous pouvez être fière de les avoir mis en déroute, madame. »
« Mais ne te laisse pas emporter. Et ? Comment se sont déroulées les attaques de mes frères et sœurs ? » Elle s’inquiétait des résultats de la guerre de ses frères et sœurs. Ils étaient de la famille, mais aussi des rivaux — et c’est tout ce qu’Arjuna voyait en eux.
« La plupart viennent seulement de commencer à se battre, mais le prince Isel a déjà conquis une forteresse ennemie. »
Arjuna était heureuse de l’entendre. Même si elle considérait Isel comme un concurrent, elle ne pouvait s’empêcher d’être fière de ses exploits. « C’est tout à fait son genre. J’ai hâte d’être au jour où je le ferai tomber. »
L’appel se termina, et Arjuna retourna dans le cockpit de son chevalier mobile. Elle s’assit à l’intérieur et ferma la trappe, en soupirant de frustration.
« La victoire, c’est bien beau, mais je ne peux pas me sentir trop satisfaite d’avoir gagné contre des faibles comme eux. J’espère qu’au moins Calvin représente un défi. »
La guerre entre l’Autocratie et l’Empire ne faisait que commencer.
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