Chapitre 7 : La flotte de Berkeley
Partie 1
Sur la planète d’origine de la maison Berkeley, Casimilo s’entretenait avec un soldat venu le voir dans son bureau.
« J’ai jeté un coup d’œil à votre stratégie. C’est un travail remarquable, même s’il faudra la réorganiser si nous voulons l’utiliser contre ce sale type de Banfield. »
Il s’agissait de Dolph, qui avait atteint le grade de major. Après avoir perdu contre Liam lors de leur match à l’école militaire, sa vie avait été bouleversée et, malgré son grade, il s’était retrouvé dans une position sans intérêt au sein de l’armée. Lorsqu’il avait entendu les rumeurs selon lesquelles la Maison Berkeley se préparait à combattre Liam de front, il s’était empressé de rencontrer Casimilo. Désireux d’avoir une nouvelle chance d’affronter Liam, Dolph était prêt à mettre tout ce qu’il avait dans cette stratégie pour le vaincre.
« Si vous me permettez de le dire, » répondit Dolph, « Je ne suis même pas sûr que ce soit suffisant. C’est le moins que je puisse faire, en tenant compte d’un budget et d’un calendrier réalistes. »
Casimilo s’étonna que Dolph juge son plan insuffisant. « Il ne suffira pas de remplacer toute ma flotte et de changer nos stratégies de combat ? Je n’ai jamais entendu parler d’une formation spécialisée dans le combat à moyenne et courte portée. »
Dolph projeta un hologramme devant Casimilo. Il s’agissait d’une image volée de la flotte régulière de la maison Banfield.
« La qualité de la flotte de la maison Banfield est du même niveau que celle de l’armée impériale. Quant à sa taille, des sources indiquent qu’elle a récemment doublé, passant de trente mille à soixante mille navires. »
« Bien sûr, c’est beaucoup pour un comte, mais ils ne sont toujours pas une menace pour la Maison Berkeley. »
« Le problème, c’est qu’ils n’ont pas que des chiffres de leur côté. »
Ensuite, Dolph projeta une vidéo de la flotte de la Maison Berkeley massacrant des pirates. Leur puissance militaire était évidente.
« La force de la maison Banfield réside dans son haut niveau d’organisation et dans la qualité du matériel mis à sa disposition. »
« Pourquoi ne pouvons-nous pas les écraser par le nombre ? Tout ce qu’ils peuvent rassembler, c’est soixante mille vaisseaux au maximum, n’est-ce pas ? »
« Même si nous leur opposons cent mille navires, s’ils parviennent à percer notre formation, les deux camps subiront de gros dégâts. Si nous n’avons pas de chance, nous perdrons le commandant de notre flotte, et nous serons comme perdus dans le chaos. »
Fort de son expérience lors de leur précédent face-à-face, Dolph avait imaginé cette stratégie spécialement pour affronter la maison Banfield.
« Par conséquent, nous anticipons le mode d’attaque de Liam et nous sommes prêts à le recevoir. Essentiellement, nous les ferons tomber dans un piège qui les rendra vulnérables. C’est pourquoi notre flotte doit concentrer ses efforts sur le combat à moyenne et courte portée. »
Dolph avait dit à Casimilo que pour battre la flotte de la maison Banfield, il devait préparer une flotte de plus de cent mille navires et jeter par-dessus bord les tactiques traditionnelles à longue portée. Casimilo l’estimait pour ce conseil, même s’il allait à l’encontre des tactiques de combat établies. En fait, il avait été impressionné parce que cela allait à l’encontre des tactiques attendues.
Tous les autres pensent sous estime totalement ce gamin. Ils disent qu’il suffit d’être plus nombreux pour le battre… mais pas lui. Personne ne m’a conseillé de prendre le danger que représente ce garçon aussi sérieusement que lui.
« Que comptez-vous faire de notre formation si l’ennemi décide de rester à distance et de s’en tenir à des attaques de longue portée ? » demanda Casimilo, testant Dolph.
« Ce serait dangereux, je l’admets, mais je connais le style de Liam. La maison Banfield a toujours assuré ses victoires par des charges offensives. On ne se débarrasse pas d’une stratégie utilisée depuis des décennies quand elle n’a jamais failli. Plus ils remporteront de victoires avec cette stratégie, plus il leur sera difficile de changer de tactique au milieu d’une bataille. »
Dans ses conflits avec les bandes de pirates, la maison Banfield avait passé les dernières décennies à charger en avant dans les combats, et en était toujours sortie victorieuse. Elle avait fait de la charge agressive un art, ses navires étaient toujours parfaitement coordonnés et ses vaillants soldats ne connaissaient pas la peur. Lors d’un affrontement avec la Maison Berkeley, ils ne manqueraient pas de s’appuyer sur la même technique qui ne leur avait jamais fait défaut auparavant.
Casimilo était convaincu que Dolph avait compris et anticipé les méthodes de la maison Banfield. C’est lui. C’est lui qui doit assurer notre victoire.
Dolph parlait avec passion pour rallier Casimilo à ses idées, sans se rendre compte que ce dernier était déjà convaincu. « Certes, il faudra du temps et de l’argent pour mettre les choses en place, mais ce sont des dépenses nécessaires si nous voulons vaincre la maison Banfield ! Il vous faudra préparer une flotte entièrement nouvelle et moderne, et former vos officiers à la stratégie que je propose pour la mener à bien. Mais votre adversaire mérite cet effort, il ne faut pas sous-estimer la Maison Banfield ! »
La flotte de la Maison Berkeley devrait être entièrement reconfigurée pour lutter contre ce seul adversaire. La nouvelle flotte serait prête à répondre à la charge de l’ennemi, mais aurait des problèmes lors d’une bataille à longue distance. Tous les autres soldats que Casimilo avait consultés lui avaient simplement dit que tant qu’il avait le nombre, il pouvait se battre normalement et triompher, mais Casimilo s’était toujours douté que cela ne suffirait pas.
« Serons-nous prêts à temps ? La maison Banfield a pris une longueur d’avance dans la construction d’une nouvelle flotte. »
« Nous ne pouvons qu’essayer. Non, j’y veillerai ! Nous allons commencer immédiatement, afin de préparer autant de navires que possible dans les temps ! »
La passion de Dolph avait renforcé la détermination de Casimilo.
« Alors, très bien. Considérez-vous comme engagé. »
Dolph ne put s’empêcher de sourire aux paroles de Casimilo, mais il se reprit rapidement et répondit solennellement : « Merci beaucoup, monsieur ! J’aimerais que vous commenciez par rassembler des pirates. »
« Quoi ? On va les utiliser aussi ? »
« La flotte de la maison Berkeley sera celle qui affrontera la maison Banfield, mais j’aimerais que vous fassiez pression ailleurs avec des forces pirates pour empêcher les autres maisons d’apporter leur soutien à la maison Banfield. »
« Bien vu. Le morveux n’a pas beaucoup d’alliés, mais il en a quelques-uns. Très bien. »
Une partie du plan de Dolph consistait à faire pression sur ceux qui s’étaient alliés à Liam afin qu’il ne soit pas en mesure d’appeler des renforts.
« Le fait est, » poursuit Dolph, « que j’ai entendu une rumeur selon laquelle Liam serait en train de mettre sur pied une flotte d’armée régulière… D’après mes investigations, c’est vrai. Il pourrait avoir l’intention de s’en servir comme arme secrète. »
Une flotte régulière se composait de dizaines de milliers de navires. Lorsque Casimilo entendit cela, sa confiance vacilla. Si c’était vrai, même le fait de rassembler des pirates pour augmenter leurs propres forces risquait de ne pas suffire. « Eh bien, ce n’est pas bon ! » dit-il.
« Cependant, il y a beaucoup de gens dans l’armée qui n’ont pas une bonne opinion du petit Banfield. Ce ne serait pas une mauvaise idée de les rassembler. »
« Ce serait fantastique ! », s’enthousiasmait Casimilo. S’ils pouvaient rassembler toutes les flottes de patrouille restantes et les soldats nobles, cela ferait des dizaines de milliers de navires supplémentaires. De plus, les soldats mécontents ne seraient pas les seuls à s’allier à Casimilo. Il avait déjà été approché en secret par des marchands et des représentants des Première et Seconde Fabriques d’armement, amers que Liam n’utilise pas leurs services.
« Dolph, pouvez-vous constituer une flotte avec les soldats que nous pouvons rassembler ? »
« Je peux essayer, mais je ne sais pas si ce sera utile. Il pourrait peut-être servir de leurre. »
Ni Dolph ni Casimilo n’accordaient beaucoup d’importance aux personnes qui se portaient volontaires pour aider.
Casimilo déclara : « Vous rassemblez ces patrouilles en une seule flotte, et je vais contacter quelques usines d’armement pour qu’elles les remettent en état. »
« En êtes-vous sûr ? Cela augmentera considérablement votre budget. De plus, ce genre de soldats se plaindra et désertera au premier signe d’un traitement un tant soit peu médiocre. »
Dolph avait des doutes sur le fait de dépenser autant d’argent pour une flotte qui risquait de devenir un pion sacrifié, mais Casimilo lui avait dit de ne pas s’inquiéter de cette dépense.
« Je m’en fiche ! Si nous devons le faire, nous allons y aller à fond ! Quoi qu’il en coûte, si cette flotte inadaptée est capable de faire le moindre dégât contre lui, ça en vaut la peine ! »
Casimilo avait encore un autre stratagème en tête.
« De plus, les pirates serviront également d’appât pour la maison Banfield. »
« Appât ? »
« C’est bien cela. Nous commencerons par demander à nos alliés pirates d’engager le combat avec les forces de la maison Banfield, mais ils se battront de manière conventionnelle, à longue distance, pour que Banfield reste bloqué dans sa stratégie habituelle de charge frontale. Ainsi, lorsque nous lui rendrons la pareille au corps à corps, la surprise sera plus grande. »
En entendant que Casimilo était déterminé à réussir même au prix du sacrifice de ses alliés pirates, Dolph eut des sueurs froides. Pourtant, il souriait. « C’est une bonne idée. Je me sens déjà plus proche de la victoire. »
Invisible, le Guide regardait ces plans prendre forme et applaudissait. Savoir que des pirates, des usines d’armement et des soldats rancuniers allaient s’allier à la maison Berkeley le réjouissait.
« Merveilleux ! Faites tout ce que vous pouvez pour faire tomber Liam, vous deux. Je serai là, dans l’ombre, pour vous soutenir jusqu’au bout. »
Dolph avait un dernier plan en poche, par souci d’assurance. « Seigneur Casimilo, puis-je vous suggérer une dernière chose ? »
« Qu’est-ce que c’est ? »
« J’ai entendu dire que Liam allait avoir sa propre flotte de patrouille. Nous devrions essayer de la saboter. Parce qu’il est jeune et inexpérimenté, je doute sérieusement que l’armée laisse une flotte sous son seul commandement. Nous devrions essayer de recruter le commandant de sa flotte de patrouille dans notre camp. »
« Vous êtes plein de bonnes idées ! »
Le sourire du Guide s’élargit encore en écoutant les deux se délecter de leurs plans diaboliques.
merci pour le chapitre