Chapitre 8 : La cérémonie de fiançailles
Partie 2
C’était bizarre.
Les choses étaient vraiment devenues bizarres dans mon domaine.
Mon domaine avait toujours été un endroit étrange avec des modes étranges, mais la tendance actuelle était… une histoire émouvante sur moi. Je ne comprenais pas pourquoi, mais les gens semblaient penser que je précipitais la cérémonie de fiançailles pour le bien de la grand-mère de Rosetta.
En ce moment, je regardais les nouvelles sur un écran, et le présentateur parlait de ce sujet précis.
« La fiancée de Lord Liam, Lady Rosetta, a mené une vie plutôt agitée. »
Le reportage commençait par un aperçu du passé de Rosetta, racontant en détail l’horrible traitement que la Maison Claudia avait subi jusqu’à présent. Même moi, j’avais été pris de court par ce que l’histoire avait exposé. C’était bien pire que ce que j’avais entendu de Wallace.
Puis, le reportage s’était orienté vers la façon dont j’étais génial pour avoir sauvé Rosetta et l’avoir prise comme fiancée. Les médias de mon domaine étaient sous mon contrôle, mais honnêtement, c’était un peu effrayant qu’ils me flattent à ce point. Avaient-ils une arrière-pensée ?
« La grand-mère de Lady Rosetta, l’ancienne duchesse, est souffrante et ne sera bien plus de ce monde. »
J’avais entendu dire qu’ils utilisaient des élixirs pour prolonger sa vie, ne serait-ce qu’un peu. J’avais moi-même autorisé leur utilisation, en fait, dans l’espoir qu’elle puisse participer à la cérémonie. Ce n’était cependant pas pour la « sauver ». Je pensais juste que la présence de sa grand-mère mourante rendrait la cérémonie plus douloureuse pour Rosetta. Je voulais voir Rosetta humiliée devant sa grand-mère pour avoir été privée de la pairie qu’elle avait essayé de protéger. Pourtant, apparemment, tout le monde pensait que j’étais juste gentil avec elle.
Je ne l’avais découvert que le jour même. Je n’avais aucune idée qu’ils transformaient la situation en cette noble histoire larmoyante.
En regardant ça dans mes appartements privés, j’avais regardé Amagi qui s’occupait de moi. J’avais pointé l’écran.
« De quoi s’agit-il ? »
Amagi, qui était avec moi depuis longtemps, savait exactement ce que je demandais.
« Vos fiançailles avec Lady Rosetta sont très émouvantes, Maître. Beaucoup de gens apprécient cette histoire. Il y a même des plans pour dépeindre les événements dans un film et une série dramatique. »
« Cela ne peut pas être vrai. »
« C’est le cas. »
Je suppose qu’ils veulent tous faire de ma rencontre avec Rosetta un grand conte du destin. Il n’y avait rien de tel dans notre rencontre, mais je suppose qu’ils voulaient que ce soit un conte émouvant. Les gens de mon domaine vont-ils bien ? Est-ce qu’il y a une émeute qui se prépare ou un autre truc du genre ? Est-ce que je leur en ai trop demandé ? Peut-être que je devrais me calmer un peu et commencer à les taxer davantage plus tard.
« Amagi, veille à ce que les impôts soient réduits. Juste un peu, cependant. »
« Une demande plutôt abrupte. Cependant, comme la cérémonie de fiançailles est un événement joyeux, la réduction d’impôt peut être faite en son honneur. »
« C’est tout ! Je veux juste lâcher un peu de lest sur les gens pour qu’ils ne soient pas stressés. »
« Je vais m’en occuper. »
Je commençais à m’inquiéter pour mes sujets. Pourquoi publiaient-ils des histoires réconfortantes sur un type qui taxait autant leurs revenus ? Essayaient-ils de se convaincre que j’étais une personne merveilleuse ? Doutez encore de moi ! Vous êtes tous stupides, non ?
Non, attends… Je peux utiliser cette situation.
Lorsque Rosetta découvrirait que notre rencontre humiliante avait été déformée en une sorte d’histoire à sensation, à quel point cela la rendrait-il exaspérée ? J’avais imaginé l’expression amusante de frustration que je verrais sur son visage chaque fois qu’elle verrait la mention de ce feuilleton et de ce film.
En souriant, j’avais dit : « J’attends avec impatience cette cérémonie de fiançailles. »
« Je suis heureuse que vous vous amusiez, Maître », déclara Amagi avec un sourire en me surveillant.
☆☆☆
La longue pause de l’école primaire touchait à sa fin.
De nombreux invités étaient venus séjourner dans le manoir de la Maison Banfield. Dans une belle tenue de soirée, Wallace se mêlait à eux en sirotant une boisson.
« Je m’imaginais une fête beaucoup plus somptueuse. C’est un peu discret. »
Kurt et Eila avaient aussi été invités, et par conséquent, ils portaient également des vêtements formels.
« Ça m’a l’air plutôt somptueux, » fit remarqué Kurt.
« Ouais ! C’est une fête énorme du point de vue d’un baron, » ajouta Eila.
Tous deux étaient issus de familles au statut inférieur à celui de Liam, aussi ce qui était discret pour lui leur semblait extravagant. Wallace pensait différemment, ayant été un prince impérial et étant donc plus familier avec la société noble.
« C’est très discret pour une fête de comte. Pas frugale, je dirais, mais juste que c’est un peu réconfortant comme ce n’est pas très excentrique. »
De nombreux nobles aimaient organiser des fêtes très étranges avec des thèmes inattendus pour voir dans quelle mesure ils pouvaient surprendre ou choquer leurs invités.
Wallace poursuit : « En dehors des fêtes du seau, on peut compter sur les doigts d’une main le nombre de ces fêtes à thème délirantes qui ont réellement réussi. »
Kurt avait sursauté quand Wallace avait mentionné la fameuse fête du seau.
« La fête du seau est vraiment la norme pour les fêtes excentriques, hein ? »
« Ouais. J’ai assisté à quelques-uns d’entre eux, et elles sont vraiment quelque chose. Ce n’est pas étonnant qu’elles soient la norme. La personne qui a pensé à ça était un génie. »
« J’ai envie d’y aller, juste une fois…, » Eila soupira d’un air envieux, en prenant un verre dans ses deux mains.
Wallace avait froncé les sourcils. « Eh bien, c’est sympa quand c’est réussi, mais une fête du seau ratée restera l’un de vos pires souvenirs. »
La réception de Liam était un buffet, donc les participants dérivaient en portant des boissons et des assiettes de nourriture. Kurt avait regardé autour de lui pour trouver des visages familiers.
« Beaucoup de nobles sont ici. Mon père a eu beaucoup de mal tout à l’heure, à essayer de les saluer tous. »
Plus de nobles étaient venus pour la cérémonie de fiançailles qu’ils n’avaient assisté à la cérémonie de passage à l’âge adulte de Liam. C’était la preuve du pouvoir qu’il avait acquis depuis.
Est-ce ce que Liam cherchait ? Wallace se l’était demandé.
Liam avait pratiquement annoncé son hostilité ouverte envers la Maison Berkeley. Wallace avait craint que cela ne fasse fuir de nombreux nobles, mais ceux qui avaient un certain sens de la justice gravitaient plutôt autour de lui. Il y en avait probablement beaucoup qui attendaient de voir ce qu’il adviendrait de sa déclaration avant de faire un geste, mais Wallace avait été surpris de voir combien d’alliés Liam s’était déjà fait.
Si d’autres maisons nobles s’impliquent, ce conflit entre la maison Banfield et la maison Berkeley pourrait se transformer en une guerre par procuration au sein de l’Empire.
Si c’est le cas, ce serait un concours entre la noblesse et les méchants. Avec Liam, bien sûr, représentant la noblesse d’esprit.
Ce n’est pas possible… N’est-ce pas ?
☆☆☆
Rosetta et moi étions dans une salle d’attente, nous préparant pour le début de la cérémonie de fiançailles.
Le garde du corps personnel de Rosetta était Marie, qui s’était portée volontaire pour cette tâche. Elle attendait tranquillement et portait l’impressionnante tenue formelle d’un chevalier.
À mes côtés se trouvait Tia, également en tenue de chevalier. Les deux chevaliers étaient calmes et posés, essayant de se fondre dans le décor pour ne pas gêner ma conversation avec Rosetta.
Rosetta était vêtue de la robe blanche pure qu’elle avait essayée avant son passage dans la capsule éducative. De plus, elle portait un voile sur son visage, je ne pouvais donc pas voir son expression.
Je lui avais parlé : « Tu es magnifique, Rosetta. »
J’avais fantasmé sur ce moment encore et encore, mais maintenant que le moment était venu de passer à l’acte, il m’était difficile de prononcer les répliques impudiques que j’avais répétées. Je suppose que j’étais plus nerveux que je ne le pensais.
La seule réponse de Rosetta avait été le tremblement de ses épaules.
« Nerveuse ? C’est bien. C’est presque l’heure. Ne pense pas que tu vas maintenant t’échapper. »
Mis à part ce petit avertissement, je n’avais pas réussi à faire les moqueries et les jubilations que j’avais prévu de dire à ce stade. J’aurais tout le temps de m’amuser comme ça plus tard. Il n’y avait pas besoin de se précipiter.
« Allons-y », avais-je dit à Tia.
« Oui, monsieur. »
J’avais quitté la pièce avec mon escorte, regrettant toujours de ne pas avoir répété plus de lignes à l’avance.
☆☆☆
Quand Liam et Tia avaient quitté la salle d’attente, les tremblements de Rosetta s’étaient intensifiés.
« Qu-qu-qu’est-ce que je fais, Marie !? Je ne pouvais pas du tout lui répondre. Crois-tu qu’il était fâché ? Qu’il était dégoûté de moi ? »
Rosetta s’était tournée vers Marie pour obtenir du soutien, car elle était trop nerveuse pour répondre à Liam. Quand Marie s’était retournée vers elle, elle avait simplement vu son amie morte depuis longtemps.
« Pas du tout. Lord Liam comprend que vous soyez nerveuse, Lady Rosetta. Il n’y a aucune raison de vous inquiéter. »
Son sang coule vraiment dans les veines de cette fille. Elle est si douce.
Deux mille ans plus tôt, Marie avait été une sorte de chevalier sauvage et inculte, et c’est la fille de la Maison Claudia qui lui avait appris à parler et à se comporter comme une dame. L’ancêtre de Rosetta n’avait jamais eu peur de Marie et était devenue rapidement amie avec la jeune fille sauvage. Elles vivaient dans des mondes différents, mais l’ancêtre de Rosetta acceptait Marie sans préjugés. En fait, elle faisait parfois des farces au chevalier, et ces jours de rires étaient des souvenirs doux-amers pour elle maintenant.
Elle était aussi si nerveuse avant son mariage.
Marie ne pouvait s’empêcher de sourire en regardant Rosetta. Elle avait remarqué que Rosetta avait baissé la tête, alors Marie lui avait demandé avec inquiétude : « Quelque chose ne va pas ? »
« Euh… Il s’est passé tellement de choses, je n’y ai pas vraiment pensé avant ça, mais… comment dois-je appeler Liam ? Nous sommes fiancés, mais l’appeler juste par son prénom ne semble pas juste en quelque sorte. »
Rosetta avait l’air embarrassée, comme si elle s’attendait à ce que Marie dise : « Mais de quoi parlez-vous donc à un moment pareil ? » Mais Marie s’était contentée d’y réfléchir un instant.
Maintenant que j’y pense, il y avait un terme d’affection qu’elle utilisait pour s’adresser à l’homme qu’elle aimait, n’est-ce pas ? Se rappelant comment sa vieille amie avait appelé son mari, Marie avait donné une suggestion à Rosetta.
« Je pense que vous ne voudriez pas l’appeler de la même façon que ses amis. Pourquoi pas “Chéri”, alors ? »
« Chéri ? »
« Oui. Personne d’autre ne l’appellera jamais comme ça, alors ce serait un surnom spécial que vous seule pourrez utiliser. »
« Chéri… D’accord. Alors, je vais l’appeler comme ça ! »
Marie sourit, regardant Rosetta s’amuser de son nouveau surnom pour Liam, tandis que les autres femmes chevaliers et servantes à proximité leur jetaient des regards dubitatifs. Marie et Rosetta n’avaient même pas remarqué.
merci pour le chapitre