Chapitre 3 : Aller jusqu’à Caliture
Partie 1
Le lendemain, Fennely ayant récupéré de son excita… ou plutôt de son coup de froid, elle les guida hors de la forêt des Kobolds. La tempête s’était calmée et le soleil brillait. La saison était suffisamment froide pour que les pointes des montagnes du nord soient couvertes de neige, mais la région était maintenue réchauffée par les vents des mers du sud, ce qui la rendait assez agréable. Déployant sa bête d’invocation, la Dinde Tireuse, dans les cieux, Shera confirma une montagne qui leur servait de point de repère et pointa devant eux.
« Ils ont dit de se diriger derrière les montagnes jumelles à tête blanche vers le soleil de midi, donc ça devrait être par là. »
« … Il est 13 heures, il s’est déjà déplacé un peu vers l’ouest. »
« As-tu une montre ? »
« … Je n’ai pas besoin d’une montre pour avoir une idée de l’heure qu’il est. Bien que je ne puisse pas dire exactement combien de minutes il y a. »
« Wôw, Rem ! Ton estomac est vraiment bon pour lire l’heure ! »
« … Mon estomac n’a rien à voir avec ça. »
« On n’a qu’à continuer à marcher pendant une demi-journée dans cette direction, non !? Il y a aussi les marques sur les arbres ici et là. »
Shera traversait la forêt d’un pas vif. Elle était une Elfe, malgré les apparences, et avait l’habitude de marcher dans les forêts.
« … Il faudrait aux Therianthropes moins d’une demi-journée pour rejoindre la route, » dit Rem en fronçant les sourcils.
« Penses-tu que nous y arriverons dans l’après-midi ? »
« … Ils peuvent distancer un cerf, il nous serait impossible d’avancer à leur rythme… Nous devons nous préparer à ce que cela nous prenne une journée entière. »
« Ahhh… Je veux dormir sur un lit… » Shera avait baissé ses épaules en signe de déception.
Même cette fille, qui aspirait à être une aventurière et qui aimait voyager, s’était lassée de ce long voyage. Diablo décida alors de changer de sujet, en posant une question qui le préoccupait depuis un certain temps déjà.
« Que sont les Therianthropes ? »
Le Croisement de la Rêverie fait une distinction entre les Races (les humains et les demis), les Déchus (qui incluent les bêtes magiques) et les bêtes sauvages. Les Kobolds étaient des monstres qui entraient dans la catégorie des bêtes sauvages. Les bêtes étaient donc divisées en animaux et en Therianthropes ?
Rem avait porté une main à sa bouche.
« Peut-être… serait-il préférable que nous discutions un peu des Therianthropes. »
« Hmm. »
« … Pour commencer, comme vous le savez, Lyferia est un pays dirigé par les Humains. Les demis y vivent aussi, mais c’est parce qu’on les a autorisés à le faire. »
Ils étaient en minorité, mais il avait vu des Elfes et des Panthériens y vivre.
« … Lyferia est le pays le plus puissant de ce continent. Il ne serait pas exagéré de dire que le continent est dirigé par les Humains. »
« C’est ce qu’il semble. »
« … Les demis qu’ils reconnaissent comme faisant partie des Races sont les Elfes, les Panthériens, les Nains, les Marcheurs des Herbes et les Démons. Parmi eux, les Elfes sont réputés être les plus proches des dieux, et sont traités comme un peu plus spéciaux que les autres. »
« Et les démons sont traités différemment pour la raison inverse. »
« … Oui. Ils sont abhorrés parce qu’on dit qu’ils ont le sang des Déchus qui coule dans leurs veines. Mais les autres races — Panthériens, Nains et Marcheurs des Herbes — étaient autrefois considérées comme des Therianthropes. »
« Oh ? »
Ça ne faisait pas partie de l’histoire du Croisement de la Rêverie.
« … C’était avant la fondation du royaume de Lyferia, il y a longtemps. Mais comme ces trois races ont appris à parler la langue des Humains, ils ont été admis dans les Races. »
« Par les humains ? »
« … Oui, par un ancien roi des Humains. Ce roi a fait cette loi, c’est pourquoi les Races sont ce qu’elles sont aujourd’hui. À l’inverse, les races qui n’apprenaient pas la langue commune étaient traitées comme des bêtes. »
En d’autres termes, ils ont été jugés non-humains et ont été traités comme des monstres par le royaume de Lyferia depuis lors.
« C’est vraiment une histoire oppressante. »
« … Les souverains sont tous des oppresseurs dans une certaine mesure. Non seulement les Kobolds, mais aussi les ogres, les dryades et les lamias sont largement traités comme des Therianthropes. Certains comptent aussi les géants, les trolls et les orcs parmi eux, mais cela devient plus difficile à définir à ce stade. »
« Hmm… Je vois. »
Selon cette définition, les Races se limitaient à ceux qui pouvaient parler la langue commune de Lyferia. Les Déchus et les bêtes magiques se transformaient en particules de lumière à leur mort, et les bêtes étaient celles qui n’étaient ni ceci ni cela. Il n’y avait aucune méthode de distinction entre les bêtes ordinaires et les Therianthropes.
« … Les chercheurs classent les géants et les trolls dans la catégorie des Therianthropes, car ils attaquent les Races à vue. Leur biologie ne nous permet pas de coexister avec eux. »
« C’est vrai. »
Les géants dévoraient les Races. Ou plutôt, c’était une race qui se nourrissait de tout ce qui était plus petit qu’elle et qui se déplaçait. Les trolls et les orcs étaient uniquement des mâles et profitaient des femelles des Races pour se reproduire, ce qui ne faisait pas partie de l’histoire du jeu.
Ces exemples n’étaient pas des choses faites par malice, c’était simplement leur nature. La coexistence pacifique avec eux était difficile.
« … Pourtant, il existe de nombreuses formes de vie qui semblent très différentes des humains, comme les oiseaux, les poissons et les insectes. Ils ont leur propre volonté, une sorte de méthode de communication, et peuvent ressentir la douleur… mais je pense que les traiter tous comme des Races ne serait pas correct. »
« Si on pousse cette façon de penser assez loin, les plantes sont aussi des êtres vivants… Et on ne peut pas vivre sans rien manger. Il y a après tout une différence entre manger les races et manger les oiseaux et les poissons. »
Elle avait hoché la tête.
« C’est pourquoi l’ancien roi a fait son décret. “Ceux qui ne peuvent parler la langue des hommes sont des bêtes.” Et à cet égard, ce n’était peut-être pas par simple oppression. Quelqu’un devait simplement fixer une limite quelque part. »
Comparé à l’ancien monde de Diablo, cet autre monde avait beaucoup plus de Races qui se tenaient à la frontière de l’homme et de la bête. Il y avait eu de nombreuses fois jusqu’à présent où les valeurs de son monde ne s’appliquaient pas dans celui-ci.
« … Mais si tout le monde pouvait parler aux Therianthropes comme tu le fais, peut-être pourrions-nous tracer une ligne différente. » Rem avait regardé Diablo avec de l’envie dans les yeux.
« Hm ? Oui, c’est possible. »
« … Au moins, je ne peux plus considérer les Kobolds comme de simples bêtes. »
« D’accord. »
Il n’avait jamais essayé, mais il pourrait même être capable de parler aux géants. Bien que, dans ce cas, ils diraient probablement juste, « Je vais t’arracher la tête. »
Être capable d’échanger des mots ne signifie pas nécessairement que vous vous entendrez toujours.
†
Ils avaient retrouvé la route alors qu’ils étaient sur le point d’abandonner et de discuter de l’endroit où ils devaient camper. La nuit était déjà bien avancée. Le lendemain matin, ils se mirent en route tôt et, à la tombée de la nuit, ils atteignirent enfin une ville de Races au moment où le ciel prenait une teinte rouge plus folle.
« Enfin, une ville ! » Shera avait couru devant, et Diablo l’avait réprimandée pour qu’elle ne trébuche pas.
Rem, de son côté, était visiblement nerveuse.
« Caliture… »
Son périmètre extérieur était couvert de hauts murs, qui rappelaient à Diablo Faltra. Il y avait aussi quelques tours de guet avec des toits en diagonale.
« Si je me souviens bien, Caliture possède également une barrière anti-Déchu, n’est-ce pas ? »
« … Oui. »
Il n’y aurait pas dû y avoir de Déchus dans cette région, mais comme il s’agissait de la plus grande base du sud, elle avait quand même des défenses vigilantes. Contrairement aux Déchus, qui agissent avec une intention délibérée, les bêtes magiques peuvent apparaître n’importe où, un peu comme une catastrophe naturelle. Une barrière pour bloquer leur progression était cruciale.
Comme c’était le coucher du soleil, les portes étaient animées par des fermiers qui revenaient des champs, des marchands ambulants et des voyageurs. Grâce à cela, Diablo était entré sans que personne ne pose de questions sur ses cornes.
« Si vous êtes de passage, dépêchez-vous ! » dit le gardien. « Nous fermons la porte au coucher du soleil ! »
Telles étaient les circonstances, semble-t-il.
« C’est encore plus strict que Faltra ici, n’est-ce pas ? »
« … Ce n’était pas comme ça avant. C’est probablement parce qu’ils sont au milieu des hostilités. »
« Oh, je vois. »
Si Diablo n’avait rien fait, la ville aurait été attaquée par les Kobolds en ce moment même. Il était normal qu’ils ferment les portes par peur d’un raid nocturne.
« Heehee ! » Shera sourit. « C’est grâce à toi ! »
« Hm ? »
« Je veux dire, n’allait-il pas y avoir une guerre ? »
« Hmm… Je suppose que oui. »
Quand elle le dit comme ça, il avait vraiment fait beaucoup de choses. Mais ce n’était pas encore fini. Diablo avait franchi la porte et avait regardé ce qui se trouvait autour de lui.
« Nous devons aussi honorer notre promesse envers eux. »
Il faudrait que le gouverneur de Caliture — et selon la façon dont les choses se passent, même le roi de Lyferia — reconnaisse les Kobolds comme résidents de cette terre.
« … Je suis sûre que tu pourras le faire, Diablo. » Rem l’avait regardé d’un air sérieux.
Pas de pression, hein ?
« Où se trouve le domaine du gouverneur ? Dois-je simplement descendre la rue principale ? »
Les villes de ce monde avaient toutes beaucoup plus de bâtiments que celles du Croisement de la Rêverie, et les routes étaient beaucoup plus sinueuses. Et Diablo ne savait pas non plus lire les panneaux. Dans le jeu, il n’y avait que les bâtiments dont les joueurs avaient absolument besoin, et le nombre de passants était également minime, ce qui était compréhensible, mais…
Rem avait secoué la tête.
« … La rue principale de ce côté des murs est une impasse qui mène aux entrepôts des riches marchands. La rue principale centrale est aussi un quartier commerçant. Il y a cependant des auberges. »
« Hm ? »
« … Nous sommes actuellement dans le district nord de Caliture, et la route qui mène au district central, où se trouve le domaine du gouverneur, passe par la petite route sur le côté de ce grand bâtiment là-bas. »
« C’est bizarre ! » Shera avait souri.
« … Cela dit, cette route reçoit beaucoup de gens de passage et permet de faire le tour par le quartier ouest. Les habitants utilisent simplement le chemin souterrain. »
« Chemin souterrain ? »
Rem avait montré du doigt ce qui ressemblait à l’entrée d’une station de métro. Des locaux qui n’avaient pas grand-chose sur eux passaient par là.
« … C’est un peu difficile à remarquer quand on n’est pas habitué à l’endroit. »
« Ce n’est pas difficile à remarquer ! Ça ressemble à un donjon ! »
Diablo devait être d’accord avec Shera sur ce point.
« Cependant, il n’y a pas d’autre moyen que d’avoir ces passages. » Rem haussa les épaules. « Caliture est construit sur trois pentes, et le chemin souterrain vous emmène au deuxième étage du quartier central. »
Si vous avez trouvé une faute d’orthographe, informez-nous en sélectionnant le texte en question et en appuyant sur Ctrl + Entrée s’il vous plaît. Il est conseillé de se connecter sur un compte avant de le faire.
merci pour le chapitre