Chapitre 1 : Visite du château royal
Partie 2
Rem porta une main à sa bouche. Peu après cette bataille, Diablo s’était rendu à la capitale pour s’opposer à l’autorité cardinale de l’Église.
« Quelque chose vous tracasse ? » Noah avait souri en coin.
« … Quand Diablo est venu à la capitale… Quand nous nous sommes battus pour reprendre l’Église aux mains de l’autorité cardinale. »
« Oui, j’ai reçu un rapport à ce sujet. Même Sa Majesté ne peut interférer dans les affaires de l’Église, nous vous sommes donc très reconnaissants d’avoir sauvé la Grande Prêtresse et de votre aide pour normaliser l’église. »
Rem se souvient : « À l’époque, c’est l’Ordre des Chevaliers du Palais qui a assassiné l’Autorité cardinale. S’ils surveillaient Diablo pendant tout ce temps, il est logique qu’ils trouvent l’occasion parfaite pour se débarrasser d’eux… Ce qui pourrait signifier… que c’est Noah qui a ordonné leur assassinat ? »
Il était resté souriant, attendant les mots de Rem. C’était le château royal. Dire une seule mauvaise chose transformerait cette pièce en l’équivalent d’être assis dans le creux de l’estomac d’un monstre. Dire quelque chose d’inutile serait dangereux…
Un silence planait lourdement sur la pièce…
« Wôw, ce gâteau est génial ! » Mais Shera s’était exclamée. « Puis-je en avoir une autre part ? »
Le claquement de la tension tendue qui flottait dans l’air était presque audible. Rem se demandait ce qu’elle était sur le point de dire…
« Je suis content que ça vous plaise. » Noah sourit. « Cette tarte aux pommes est une reproduction d’une saveur de mon lieu de naissance. Je vais vous en faire préparer autant que vous le souhaitez. »
« Super ! Je vais en ramener pour Diablo ! »
Rem avait soupiré, notant qu’il allait probablement se gâter pendant leur voyage de cinq jours vers Faltra.
« … Quoi qu’il en soit, nous ne sommes venus ici que parce qu’on nous a appelés. En tant qu’aventurier et roi de Greenwood, Diablo n’a pas l’intention de s’opposer à Lyferia. Le fait qu’il ait risqué sa vie contre le Seigneur-Démon en est la preuve. »
« Oui, bien sûr. Nous ne soupçonnons pas le Seigneur Diablo le moins du monde. Comme je l’ai déjà dit, il a éveillé notre intérêt en battant l’armée du Seigneur-Démon. Et les convocations de cette fois-ci font suite à sa victoire sur le Seigneur-Démon… Je suis sûr que Son Altesse souhaite lui adresser des louanges. »
« Je vois…, » Rem se tapota la poitrine avec soulagement.
« … Mais il y a une chose qui me laisse perplexe, » dit Noah en baissant la voix.
« Hein ? »
« Ces colliers d’asservissement. »
« Qu-Qu’en est-il d’eux ? »
« Pour ceux qui ne connaissent pas votre situation, ils ressembleront à des colliers d’esclaves. Si le royaume de Greenwood devait envoyer des esclaves pour l’audience avec Sa Majesté, cela passerait pour un acte grossier au même titre qu’une déclaration de guerre. »
« Ah… »
Rem y avait pensé, mais elles n’avaient aucun moyen de les enlever.
« Non…, » l’expression de Shera s’était assombrie par l’anxiété.
« Mais je suis un peu doué pour la magie, » suggéra Noah. « Je pourrais faire en sorte qu’ils soient invisibles aux yeux des autres. Qu’en dites-vous ? Je dois cependant m’assurer que vous n’avez pas reçu d’ordres étranges. »
Shera avait déjà fait rendre son collier invisible pour les besoins d’une cérémonie de mariage. À l’époque, c’était le Premier ministre de Greenwood, Drango, qui avait appliqué la magie d’obscurcissement. Il s’agissait apparemment d’une magie extrêmement avancée, qui ne pouvait pas être facilement imitée.
Rem avait étudié l’offre et avait conclu qu’il n’y avait pas d’autres options.
« … Compris. »
« Bien ! »
Shera avait également accepté, et c’est ainsi que ça avait été décidé. Noah acquiesça et tendit sa main droite.
« Hmm… Je vois… »
L’expression de son visage était grave. Elles s’étaient senties aussi gênées que d’avoir invité un étranger dans leur maison, mais pour Noah, ce n’était que du business. Sans tenir compte de sa position ou de sa langue, laisser une personne avec un collier d’asservissement rencontrer le roi mettait le destin du pays en danger. Et s’ils avaient reçu l’ordre d’assassiner quelqu’un ?
Après avoir confirmé qu’aucun ordre bizarre n’ait été donné, Noah avait utilisé sa magie d’obscurcissement.
« “Déguisement”. »
Au moment où Noah avait murmuré ce mot, les colliers étaient devenus invisibles. Rien que cela montrait qu’il était un sorcier encore plus doué que Drango. Même sans tenir compte de sa position de ministre, il était un sorcier de très haut niveau !
En touchant le cou, il était clair qu’il était toujours là, mais les autres ne pouvaient pas le voir.
« Pardonnez-moi pour le dérangement. » Noah s’inclina. « Je pense que cela nous épargnera la colère de Sa Majesté et tout malentendu de la part des ministres… »
Boom ! La pièce avait soudainement tremblé. L’expression de Rem était devenue inquiète.
« Un tremblement de terre ? » Shera pencha la tête.
« … Il n’y a eu qu’une seule secousse. C’était comme une explosion de magie. »
Cette pièce était particulièrement proche du centre du château royal. Si les secousses avaient atteint cette distance, il aurait dû s’agir d’une explosion de très grande envergure. Et il n’y avait pas beaucoup de sorciers capables de produire des explosions aussi puissantes.
Ça pourrait être Diablo !
Mais il aurait dû être à Faltra.
On frappa à la porte, et une voix nerveuse appela de l’extérieur.
« Milord, nous avons un rapport urgent ! »
Noah s’inclina à nouveau, souriant à Rem et Shera.
« Je m’excuse pour ce vacarme. Il semble que quelque chose soit arrivé, alors vous devrez m’excuser. Je garantis personnellement votre sécurité en ce lieu, vous n’avez donc aucune raison de vous inquiéter. Veuillez passer votre temps confortablement jusqu’au jour de votre audience. »
« … Nous sommes des aventuriers. Nous pouvons vous être utiles. »
« Hmm. Je ne sais pas comment les affaires sont gérées à Faltra, mais… Dans ce château, les invités doivent agir en tant qu’invités. S’il vous plaît, laissez les affaires à moi et aux chevaliers impériaux. »
Son ton était poli, mais le rejet dans ses mots était clair.
« … Je comprends. »
Rem avait reculé. Elle ne voulait pas le contrarier ici. Elles devraient probablement rester quelques jours de plus jusqu’à leur audience.
Mais ce que Rem ne savait pas, c’est qu’elles seraient convoquées dans la salle d’audience le soir même.
†
Inutile de préciser que l’explosion suffisamment puissante pour secouer l’ensemble de la capitale des Sept Murs était le résultat de la magie composite utilisée par Diablo pour détruire le Dieu de la destruction, Europa.
Diablo était assis dans le chariot vacillant qui le menait au Château Grandiose. Il ne ressemblait pas à ça dans le jeu, mais il était vraiment grandiose. Un produit massif d’architecture. Sa seule vue élevait le cœur de l’homme.
Diablo avait soudainement remarqué que la structure des murs était étrangement distincte. Les murs de Faltra, une ville frontière, étaient faits de pierres empilées, comme les murs des châteaux médiévaux dans le monde de Diablo. Mais les murs du Château Grandiose n’avaient aucune marque, comme s’ils étaient faits de béton.
« … Hm. »
Cela ne l’avait jamais dérangé dans le jeu, mais ici c’était un autre monde. Si un bâtiment existait, c’est parce que quelqu’un l’avait érigé, réparé et entretenu.
Je suppose qu’étant donné que ce monde a des armes, la construction en béton n’est pas si inhabituelle.
Le grand homme assis en face de Diablo — Maximum Abrams — demanda : « Sire Diablo, où avez-vous acquis tant de pouvoir ? »
Son visage intellectuel contrastait avec son corps volumineux et musclé. Ses cheveux noirs étaient séparés sur le côté et il portait des lunettes à monture noire.
« Hmph… Un aventurier gagne naturellement en force en voyageant. »
Du moins, c’est comme ça que ça fonctionnait dans le jeu.
« Peut-être, mais vous ne vous êtes inscrit en tant qu’aventurier que l’année dernière. Étiez-vous aventurier dans un autre pays avant cela… ? »
Ils avaient fait des recherches approfondies sur lui. Diablo ne pouvait s’empêcher d’être irrité par cela.
« Hmph… » Diablo grogna ce qui n’était ni un déni ni une affirmation.
Il doutait que Maximum le croie s’il disait : « J’ai gagné des niveaux dans le jeu et j’ai été appelé dans ce monde sous la forme de mon avatar. » Même Diablo lui-même ne comprenait pas encore la logique derrière tout ça.
« Tu m’as regardé… Mais tu es encore plus méfiant que moi. Où as-tu acquis tant d’habileté ? » demanda Diablo en retour.
L’Ordre des Chevaliers du Palais était un rassemblement de guerriers qualifiés. Ils étaient tous certainement au-dessus du niveau 100, et Maximum les dirigeait, donc il devait être puissant. Et ce monde n’était pas comme dans le jeu. Il n’y avait pas de retour après la mort, les dégâts étaient une vraie souffrance, et la guérison et le rétablissement ne se résumaient pas à un simple clic de souris. Diablo l’avait bien compris, car il avait atteint le niveau de guerrier dans ce monde.
« Héhé… » Les lèvres de Maximum s’étaient déformées en un sourire. « Je dirais, comme toi. »
Es-tu aussi un joueur ?
Il l’avait presque laissé échapper, mais avait réalisé que c’était un cas typique de « leurre ». S’il devait tomber dans le panneau et laisser échapper une information, il ne serait pas capable de maintenir son rôle de Seigneur-Démon.
S’il était le même que lui, Maximum parlerait la langue de son ancien monde, mais d’après les mouvements de ses lèvres, Diablo pouvait dire qu’il parlait la langue de Lyferia. En d’autres termes, le fait qu’il utilise inutilement la langue de cet endroit prouvait qu’il était sans aucun doute différent de Diablo.
« Sottises. »
« Pas nécessairement. Mais vous semblez avoir des raisons de me considérer comme différent de vous. Fascinant. »
« Hmph… »
Diablo resta sur son approche confiante, mais il avait du mal à retenir sa surprise.
Bon sang, ce type est dangereux !
« Et je me demande bien sur quelle base vous devez penser… Oh, il semble que nous soyons arrivés. »
La voiture s’était arrêtée et, lorsque la porte s’était ouverte, Maximum était descendu le premier. Un homme avec un long manteau rouge se tenait là, prêt à intervenir : un Elfe blond avec une épée noire.
« Ne fais rien de suspect. Si tu tentes quoi que ce soit, moi, Thanatos l’Immortel, je t’abattrai sans pitié ! »
Son nom ressemblait à la vantardise d’un collégien délirant, mais il pourrait bien être immortel. Europa l’avait en fait tué une fois, mais il était revenu indemne.
« Thanatos, il est l’invité de Son Altesse en ce moment, oui ? »
« Oui, bien sûr, mais…, » Thanatos avait reculé devant le regard de Maximum.
À en juger par cet échange, Maximum était probablement assez doué. Un ennemi dangereux, c’est certain, et que Diablo n’avait pas envie de contrarier.
« Je suis un homme occupé. » Diablo était descendu de l’attelage. « Dépêche-toi et amène-moi à ton roi. »
« Eh bien, on m’a simplement ordonné de “vous amener ici”. Le reste dépend de Son Altesse. »
Ils étaient dans la cour du château royal, un endroit que Diablo avait visité de nombreuses fois dans le Croisement de la Rêverie. Derrière eux se trouvaient les grandes portes du château. À part Maximum et Thanatos, il y avait un nombre surprenant de gardes et de garçons d’écurie autour d’eux. Et avant même qu’un moment ait pu s’écouler, un vieux majordome s’approcha d’eux et s’inclina.
« Je vous remercie d’être venu, roi de Greenwood — Votre Altesse, Diablo Greenwood. »
« Hmm. »
« Le roi de Lyferia, Sa Majesté Delouche Xandros, vous attend. Je vous en prie, suivez-moi. »
« Une audience, déjà !? » Thanatos n’avait pas pu cacher sa surprise.
« Je suppose que Sa Majesté connaît après tout l’importance de ces questions… » Maximum avait aussi l’air choqué.
Son ton était poli, mais ses mots portaient une nuance plutôt irrespectueuse. Conduit par le vieux majordome, Diablo s’était frayé un chemin dans le bâtiment. Maximum et son groupe n’avaient pas suivi.
« Ouf… »
Diablo avait expiré de soulagement. S’il le pouvait, il préférait ne pas avoir à affronter Maximum. Il doutait qu’il perde face à cet homme en un contre un, mais il avait l’impression qu’il pouvait voir à travers son jeu. Et sans son personnage de Seigneur-Démon, il pouvait à peine tenir une conversation. Si on lui faisait remarquer son jeu d’acteur, il ne pourrait répondre que par un balbutiement boiteux de « uuu » et « aaah ».
merci pour le chapitre
merci