Bienvenue au Japon, Mademoiselle l’Elfe – Tome 9 – Chapitre 5 – Partie 4

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Chapitre 5 : Invitation à un rêve

Partie 4

Malheureusement, la formation s’effondra immédiatement sur le devant. La barrière multicouche se brisa en poussière, ornant le champ de bataille de sa beauté fragile. Le bouclier, considéré comme un mur de fer auparavant, se dispersa comme des déchets éparpillés dans les airs. Des cris étaient audibles de loin, et la vue fit que les pensées des soldats, même entraînés, s’arrêtèrent un instant à cause de ce qui se passa ensuite. Après un court délai, l’impact de Kartina résonna sur le champ de bataille comme un grondement de tonnerre. Ils n’avaient aucun moyen de se défendre contre quelque chose qui volait vers eux à une vitesse supérieure à celle du son.

Tout cela se passa en vain, et Kartina avança d’un pas lourd. La vue de l’équipe de Zera volant sous l’effet de la pression irradiant de son seul corps était comparable à celle d’un oiseau de proie déchiquetant un serpent de la tête à la queue. Je ne doutais pas que tout le monde se demandait si ce n’était vraiment qu’une séance d’entraînement. Les appels à l’aide et les cris de colère ressemblaient à ceux du champ de bataille de l’ancien labyrinthe. À côté de moi, j’avais entendu un « Pas possible ! » déconcerté. Mais c’est cette intensité qui donnait tout son sens à l’entraînement.

« Apportez-le ! Soldats ! Écrasez-la ! »

Même au milieu du chaos de la bataille, la voix retentissante de Doula atteignait les guerriers, galvanisant leur esprit. Les hommes qui étaient recroquevillés et saignaient sur le sol s’étaient relevés, leur bouclier à la main, et la soif de sang flamboyant dans leurs yeux. Chaque bataille dont Doula prenait le commandement avait une caractéristique majeure : elles avaient toujours un tournant lorsque la bataille atteignait une certaine phase. Et maintenant, le sol grondait tandis que d’innombrables boucliers se profilaient vers Kartina des deux côtés. Cette action semblait être une mesure désespérée à première vue, mais les combattants se déplaçaient avec coordination. De toute évidence, l’idée d’une défaite ne leur avait même pas effleuré l’esprit.

Kartina fit un geste comme si elle réfléchissait un instant, puis son corps se déplaça. Deux boums retentissants suivirent, des ondes de choc créées par la façon dont elle avait franchi le mur du son. Aucun des innombrables boucliers qui l’entouraient ne vola, et ils continuèrent à se rapprocher d’elle.

« Ils ont donc érigé des barrières ici », grommela-t-elle en remarquant les renforts des murs blancs bleutés.

Le grand homme qui s’accrochait à son cou par-derrière, Zera, n’était pas vraiment une menace pour elle. Il fit claquer son épée contre elle, mais elle ne réussit pas à endommager son armure. Plus important encore, elle ne pouvait s’empêcher de s’interroger sur ces mouvements apparemment coordonnés de tout à l’heure.

Mais il ne lui fallut pas longtemps pour en découvrir la raison. L’unité principale sous Doula recula de chaque côté, puis une cavalière arriva, le cheval laissant échapper un hennissement strident et fou. C’était Puseri, vêtue de son armure crépusculaire, à cheval. Elle pointa sa lance directement sur Kartina, une aura noire émanant de tout son corps. Personne ne s’en était jamais sorti indemne une fois qu’elle avait jeté son dévolu sur quelqu’un.

Les soldats de tout à l’heure utilisèrent leurs boucliers pour dresser des murs de part et d’autre de Kartina, comme pour l’empêcher de s’échapper, mais elle n’eut pas le temps de s’en préoccuper. Puseri fonça vers Kartina, ses cheveux crépusculaires flottant derrière elle, le grondement des sabots de son cheval ressemblant à un roulement de tonnerre.

À ce moment-là, j’entendis la voix de Marie à côté de moi. « Oh, on dirait que c’est la tactique qu’on utilise toujours ».

« Quand on combat des monstres rapides, il faut d’abord les empêcher de s’échapper. Ils ont fait plonger Kartina profondément dans la formation en diamant, ne laissant qu’une longue ligne droite. Je parie que Puseri est contente, mais on dirait qu’il y a plus que ça dans leur plan », avais-je répondu. La « tactique que nous utilisons toujours » qu’elle avait mentionnée faisait référence à la façon dont nous contrôlions le terrain pour faire basculer la bataille en notre faveur. Cette tactique avait d’innombrables avantages : elle rendait la bataille beaucoup plus facile, nous libérait d’un certain stress et mettait l’ennemi mal à l’aise.

Kartina reçut soudain une lance enfoncée dans son corps, qui se plia en deux et vola en arrière comme une balle tirée d’un pistolet. Mais c’était loin d’être un coup critique puisque la lance ne l’avait transpercée que de quelques centimètres.

Zera, qui saignait abondamment, était la clé de leur prochaine action. Il s’accrochait obstinément à Kartina et souriait sans broncher lorsqu’elle le fit pivoter.

« Je vais y aller mollo avec toi, alors tais-toi et mange ! Coup de lame ! »

Il resserra sa main en un poing, invoquant de nombreuses lames rouge sang. À cet instant, il avait activé le pouvoir de la maison des Milles, une lignée de guerriers trempés dans une bataille perpétuelle. Le son horrible des lames rouges qui transperçaient Kartina résonna dans son corps alors qu’elles se déchaînaient violemment à l’intérieur d’elle.

 

++

Les troupes décidèrent après ça de faire une pause. Tandis qu’ils transportaient les blessés pour les soigner, Kartina revoyait la simulation de combat avec les autres et les félicitait d’avoir su rester fluides dans leurs tactiques. Il semblerait que la séance d’entraînement ait été incroyablement rigoureuse. Certains hommes étaient allongés sur le sol sans enlever leur armure alors que des monstres, comme des ogres, grognaient à côté d’eux.

Certains soldats me lançaient des regards haineux parce que je me relâchais ou des regards jaloux parce que je me promenais avec une fille elfe, mais j’aurais aimé qu’ils me lâchent un peu de lest. Je faisais visiter les lieux à notre invité, et un gamin comme moi ne faisait que les gêner. Mais pour être honnête, j’étais content que cela me donne une excuse pour ne pas me joindre à eux.

Toru avait dû avoir l’impression qu’on l’emmenait dans les coulisses d’un film. Naturellement, les gens ici avaient des traits de visage et des physiques très différents de ceux des Japonais, et il y avait de vraies armes partout. J’avais compris ce qu’il ressentait alors qu’il soupirait à plusieurs reprises.

« Les niveaux et les compétences peuvent considérablement augmenter les capacités physiques d’une personne, comme tu peux le voir », avais-je expliqué. « Je suis sûr que tu veux devenir plus fort comme eux, n’est-ce pas ? ».

« Quoi ? Pourquoi ? » demanda-t-il, confus. « Mais je n’arrive toujours pas à croire ce que je viens de voir. Ce sont des monstres là-bas, n’est-ce pas ? Ils étaient absolument incroyables au combat. Je suis presque sûr qu’ils se débrouilleraient bien, même s’ils allaient contre l’armée. »

J’avais été surpris de voir qu’il continue à parler de ça. Il était dans un monde de rêve, alors je m’attendais à ce qu’il soit enflammé et qu’il s’écrie : « Je vais tous les battre ! ». Ou quelque chose comme ça. D’ailleurs, je ne pensais pas que les soldats aient une chance contre les armes modernes. Leur pouvoir de protection était certes puissant, mais ils ne pouvaient pas le maintenir actif en permanence. Cela signifiait qu’ils ne pourraient pas faire face à des tirs de précision à distance, et qu’ils devraient aussi contrer la menace d’un barrage constant de balles provenant de fusils automatiques. Mon esprit était parti dans cette direction, mais Toru allait dans une autre direction.

« C’est vrai qu’ils sont inférieurs à bien des égards. La mobilité, la puissance de feu et le nombre de soldats dans leurs rangs. Mais imagine ce qui se passerait si tu leur donnais des armes modernes. Cette personne nommée Kartina avait l’air de se retenir. »

Il était plus observateur que je ne le pensais. Marie, qui tenait le chat noir dans ses bras, avait le même air surpris que moi. Hésitant, je lui avais demandé : « On dirait vraiment que tu veux que le Japon soit envahi. »

« Hm ? Ah, eh bien, l’idée d’une force inconnue me semble assez excitante. De plus, cela me donnerait une bonne excuse pour utiliser mes congés payés. Oh, je suis un employé du gouvernement. Je devrais donc probablement travailler de toute façon. » Il gloussa, mais je n’avais pas pu me résoudre à rire. Je n’avais pas réalisé qu’il avait des idées aussi dangereuses.

Alors que notre conversation se terminait, nous étions arrivés à l’endroit où Kartina et Doula discutaient. Voir le commandant de la bataille précédente et la femme déchaînée contre son équipe avoir une conversation amicale était étrange.

Doula se tourna vers moi avec une tasse, ses cheveux roux flottant au gré de ses mouvements. Elle déclara alors : « Tu es en retard. Ne t’inquiète pas, c’est à l’entraînement de l’après-midi que les choses sérieuses commencent. » Même si elle souriait, son invitation me fit mal au ventre. Je devais avoir un air terriblement sinistre. Elle me fixa pendant un certain temps, puis éclata de rire. « Je plaisante. Je ne suis pas insensible au point de me mettre en travers de ton rendez-vous. Oh, qui est-ce ? Ton grand frère, peut-être ? »

« Je suppose qu’on se ressemble parce qu’on a tous les deux les cheveux noirs », dis-je. « Voici Toru, et… euh, je suppose qu’il est un peu comme un grand frère. Il est arrivé aujourd’hui. » J’avais répondu ainsi, car je ne voulais pas entrer dans les détails sur l’endroit d’où il venait. Toru avait eu l’air un peu surpris, mais il ne déclara rien. Il hocha la tête, ce que j’avais supposé être dû au fait qu’il jouait le jeu, jusqu’à ce que j’apprenne bientôt que c’était pour une autre raison.

« Je n’ai aucune idée de ce que vous êtes en train de dire tous les deux », déclara-t-il.

« Oh, c’est vrai. J’avais oublié que nous utilisions une langue commune que tu ne parles pas. Laisse-moi faire les présentations et ne t’inquiète pas pour l’instant. »

Toru s’était habitué à Marie et Wridra, supposant sans doute que tout le monde savait parler japonais. Bien que, je me doutais que le maître d’étage Shirley pouvait aussi le comprendre.

Doula et Kartina s’étaient concentrées sur moi alors que je restais momentanément dans mes pensées. Je ne pouvais pas rester là en silence et je devais m’assurer que Toru salue correctement ces deux personnes-là. J’avais donc décidé de les présenter rapidement.

« Il est arrivé ici récemment et ne parle pas beaucoup notre langue. Ce n’est pas un combattant, mais si vous le voyez dans les parages, je vous serai grés que vous soyez gentils avec lui. »

 

 

« Oh, alors c’est un cuisinier ou quelque chose comme ça ? Chaque fois que je vois quelqu’un avec des cheveux noirs comme les tiens, je suppose toujours qu’il est doué pour la cuisine. Nous avons de bons légumes et de la bonne viande ici, et mes hommes sont de plus en plus habiles », dit Doula.

« Tu fais toujours cuisiner les autres. Il n’est pas trop tard pour commencer à s’entraîner à être une meilleure épouse, tu sais », fit remarquer Kartina.

« Qu’est-ce que tu veux dire ? Bien sûr que je cuisine… ou je le ferai, une fois que les choses se seront calmées dans le labyrinthe », répondit Doula. À en juger par sa réaction, j’avais eu l’impression qu’elle n’était pas la meilleure pour la cuisine et le ménage. Mais je ne lui en voulais pas. Elle était une combattante et s’occupait du champ de bataille, pas de la cuisine. Avec sa taille et sa carrure robuste, elle paraissait fiable aux yeux des hommes et des femmes. Les traits de son visage différaient de ceux des Japonais, si bien que Toru devait avoir l’impression qu’il y avait des étrangers autour de lui.

Je m’inquiétais de savoir s’il était nerveux ou non, pourtant il s’était avancé et s’était incliné poliment. « Je suis ravi de vous rencontrer. Je m’appelle Toru. »

La forme impeccable de sa révérence décontenança les femmes. Bien qu’elles ne parlaient pas la même langue, ses mouvements d’adulte actif le firent paraître plus mature que son apparence ne le laissait supposer. Elles redressèrent leurs postures avec agitation, puis inclinèrent la tête comme si cela les avait prises au dépourvu.

« Vous êtes tout aussi inhabituels que la tête endormie ici. Quoi qu’il en soit, je suis sûre que vous avez tous regardé cette séance d’entraînement. Avez-vous remarqué quelque chose ? » demanda Doula en nous faisant signe de nous approcher de sa table. Sur la table se trouvaient de nombreuses pièces, comme celles utilisées aux échecs, et j’avais tout de suite compris qu’elles représentaient la formation de tout à l’heure. Marie et moi nous étions regardées, et elle prit la parole.

« Il y a eu beaucoup trop de victimes. Cela a peut-être fonctionné, mais ce serait une guerre d’usure si un autre monstre apparaissait par la suite. Il y a indéniablement une limite à l’efficacité d’une formation comme celle-ci à l’avenir. »

« Oui, elle a assurément besoin d’une sorte de soutien à longue portée », avais-je ajouté. « Certains monstres aiment se battre avec des attaques à distance. L’équipe de raid compte deux sorciers rares et précieux dans ses rangs, ainsi que le Grand Aja et son disciple. J’aimerais que le pouvoir de la sorcellerie soit mis en œuvre dans cette unité au lieu de s’appuyer uniquement sur leur force de frappe et leurs miracles. »

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Un commentaire :

  1. merci pour le chapitre

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