Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque
Table des matières
- Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque – Partie 1
- Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque – Partie 2
- Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque – Partie 3
- Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque – Partie 4
- Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque – Partie 5
- Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque – Partie 6
- Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque – Partie 7
- Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque – Partie 8
- Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque – Partie 9
- Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque – Partie 10
- Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque – Partie 11
- Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque – Partie 12
- Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque – Partie 13
- Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque – Partie 14
***
Chapitre 12 : Kartina, l’Armement Démoniaque
Partie 1
Troisième étage de l’ancien labyrinthe, salle de contrôle centrale —
Dans la pièce sombre, la lumière terne du terminal éclairait les environs.
Une femme au teint malsain était assise sur une chaise, marmonnant pour elle-même en fixant l’écran.
Leur groupe avait été piégé dans cette pièce, et plusieurs jours s’étaient écoulés depuis que leur approvisionnement en nourriture avait été coupé. Auparavant, ils auraient compté sur le soutien du candidat héros et volé des rations aux soldats ennemis, mais ce n’était plus une option. Zarish avait disparu, et maintenant qu’on n’envoyait plus que des combattants d’élite, il n’y avait plus d’occasions de prendre leurs provisions. Ils dépérissaient donc de jour en jour.
« Merde, celui-là est sur le chemin. Si on peut l’écraser plus tôt… » La jeune femme marmonnait pour elle-même alors qu’elle naviguait sur le terminal, passant en boucle des séquences d’images. Il s’agissait des journaux de combat de la semaine dernière, et elle s’était déjà habituée aux commandes.
Elle était tellement concentrée sur son analyse qu’elle n’avait pas réalisé que quelqu’un était à l’entrée. Lorsqu’une voix l’appela, Kartina frissonna comme si elle avait reçu une décharge électrique.
« Je vois que tu travailles dur. As-tu trouvé quelque chose ? »
« Ah !? Je m’excuse de ne pas vous avoir remarqué, Capitaine. » L’ancien chevalier voulut saluer par habitude, mais le capitaine à la barbe broussailleuse l’arrêta. Il lui fit alors un geste sans mot dire pour qu’elle rapporte son analyse. La femme s’était raclé la gorge, puis avait pointé du doigt les images.
« Oui, j’étais en train de revoir la stratégie de l’ennemi… ou plutôt, ses tactiques. Cette elfe est celle qui a attiré mon attention. Jetez un coup d’œil. » Le capitaine avait jeté un coup d’œil au terminal, et une jeune sorcière elfe était apparue à l’écran. Malgré sa belle apparence, il était clair d’après les images qu’elle était la clé de la bataille.
Elle était une sorcière spirituelle, une classe extrêmement rare qui pouvait modifier le terrain et révéler des soldats cachés si on la laissait en paix.
Ce qui était le plus effrayant chez elle, c’était ses réserves apparemment infinies de magie et le fait qu’elle pouvait mettre en place une ligne défensive pour se préparer à anéantir ses adversaires. Une fois qu’elle en était arrivée là, il n’y avait plus rien à faire. Alors que leurs forces tentaient d’abattre ces défenses, la puissante attaque de son équipe les avait percées et avait causé des dommages catastrophiques.
« Hm, si nous pouvons éliminer cette fille, toute leur équipe s’écroule. Mais les monstres ne peuvent pas suivre des ordres aussi précis. C’est-à-dire, à moins qu’il y ait une unité puissante parmi eux pour diriger le groupe. »
« Oui, c’est pourquoi je trouve cela si frustrant. »
Le capitaine se frotta le menton, plongé dans ses pensées. Il l’avait déjà remarqué il y a quelque temps. Cependant, les puissants monstres de type patrouille avaient déjà quitté le terrain, et il ne voyait pas comment contourner leurs problèmes. Mais était-ce tout ce qu’il y avait à faire ? Cet étage était-il si facile qu’une seule elfe dans leur groupe leur permettait de le traverser sans problème ? Il n’avait aucune raison de le penser, mais il ne pouvait s’empêcher de se demander si quelque chose de plus terrible ne se cachait pas parmi eux.
Mettant cette pensée de côté, il décida de proposer un plan pour traiter avec l’elfe. Et donc, il avait parlé à l’ancien chevalier.
« Viens avec moi. J’ai une piste pour toi. »
« Hein ? O-Oui, monsieur ! » La femme regarda le capitaine s’éloigner, ses bottes claquant contre le sol, puis le suivit d’un pas pressé. Elle n’avait pas remarqué le changement de son environnement tant elle était concentrée sur son analyse. Kartina ne trouvait pas étrange que la pièce soit devenue complètement silencieuse et qu’il n’y ait pas d’autre âme à trouver.
Ils passèrent devant la pièce voisine, où ses anciens collègues gisaient sur le sol. Leurs corps étaient convulsés, leurs yeux tournaient frénétiquement. Il semblerait qu’on leur ait administré une sorte de relaxant musculaire toxique.
Un homme bien bâti était également allongé parmi eux sur le sol. L’homme qui avait maltraité Kartina avait serré les dents en grognant contre elle.
« Ce… bâtard… ! » Les cris de rancœur des autres se répercutaient également dans la pièce sombre. Alors qu’ils pleuraient sans mot dire, le sorcier noir s’approcha d’eux par-derrière, une seringue à la main.
Il n’y avait pas de quoi s’inquiéter.
Ils ne faisaient qu’un pas de plus pour devenir des monstres.
Le bruit des talons qui claquaient sur le sol résonna dans le labyrinthe.
Les sculptures en relief sur les murs n’étaient pas seulement là pour la décoration. Elles contenaient une magie liée à la mort et pouvaient tuer les intrus en leur infligeant une malédiction. Les pièges, les monstres et la disposition du labyrinthe existaient tous pour tuer les intrus. Kartina les avait regardés d’un air inquiet.
« Pourquoi as-tu l’air si effrayée ? Ils ne vont pas nous attaquer. »
« Oui, mais ils sont si étranges. C’est comme s’ils nous observaient. » Le capitaine laissa échapper un soupir de déception devant son commentaire pathétique. La femme regardait toujours autour d’elle avec anxiété, puis prit la parole comme pour se distraire.
« Alors, pourquoi ne nous attaquent-ils pas ? Je sais bien sûr que nous avons du sang de monstre en nous. Mais je n’ai pas trop entendu parler des détails. »
« Hm ? Oui, je suis sûr que vous ne l’avez pas fait. Seuls quelques privilégiés connaissent les détails, même au sein de Gedovar. Je comprends pourquoi vous avez aussi peur de ce labyrinthe. »
« Je n’ai pas peur… ! C’est juste que je n’aime pas cette sensation d’être acculé. »
Acculé. Ce mot décrivait parfaitement leur patrie, le pays de Gedovar. Ce seul mot avait fait frémir le cœur de l’homme. Le capitaine ralentit légèrement son rythme, puis ouvrit la bouche après une pause.
« On nous appelait autrefois des monstres. À cette époque, nos ancêtres travaillaient durs pour l’Âge des Démons et l’Âge de la Nuit. Les vestiges de cette époque nous ont été transmis par notre sang… » Sa voix résonnante et l’environnement bizarre le faisaient ressembler à une sorte de prophète.
La jeune femme s’était tue, d’étranges émotions tourbillonnant en elle. Le capitaine, qui d’habitude ne parlait pas beaucoup, était en train de démêler le passé pour elle seule. Au fur et à mesure qu’ils marchaient, elle sentait de moins en moins la présence des autres autour d’elle.
« Après avoir été vaincus et avoir été dépouillés de leurs terres, nos ancêtres ont souffert, leur lignée s’affaiblissant au fil du temps. Mais ils nous ont laissé une arme puissante pour les générations futures. » Quelque chose était lentement apparu devant eux. Cela ressemblait à une sorte de figure démoniaque métallique qui avait été divisée en deux. C’est pourquoi elle pensait que les objets noirs éparpillés sur le sol étaient des entrailles.
Il était difficile d’en distinguer les détails, car elle était recroquevillée, mais elle mesurait environ deux mètres de haut. Quelque chose en lui était différent des monstres et des statues qu’elle avait vus jusqu’à présent. En le voyant assis au milieu de la pièce, Kartina avait senti que quelque chose n’allait pas.
« Est-ce l’arme dont vous avez parlé plus tôt ? »
« Non… Je parlais de vous tous, Kartina. De la chair et du sang. » Kartina ne comprenait pas. Mais la voix du capitaine était devenue froide comme la glace, lui donnant un frisson dans le dos. C’était comme si elle était attirée dans la forêt d’une sorcière. Son visage s’était raidi à l’idée du cauchemar qui l’attendait.
Sa main s’était refermée sur son poignet, et elle avait frissonné en voyant à quel point elle était froide. La peur. La peur pure la traversa tandis que ses instincts déclenchaient des sonneries d’alarme et que ses genoux se mettaient à trembler, violemment, et sans honte.
Oui, elle avait peur.
Quelque chose d’inconnu l’attendait, et elle craignait d’être changée à jamais.
En fait, ses mouvements étaient liés par une puissante malédiction. Kartina était restée là, à craindre son sort imminent comme un mouton sans défense, alors que ses vêtements et son armure étaient arrachés, puis elle avait réalisé qu’elle ne ressentait des sensations qu’à partir du cou.
« Haah ! Haah ! Haah ! Haah ! » Elle respirait lourdement, ses yeux papillonnaient frénétiquement.
Ses seins étaient exposés à l’air froid, ainsi que son ventre et ses fesses, et pourtant elle ne pouvait pas bouger d’un pouce. Comme une biche dans les phares, elle était figée sur place. Ses jambes tremblaient. Quelques instants avant sa mort, elle avait réussi à sortir les mots.
« C-C-Capitaine, a-att… S’il vous plaît, attendez… »
La paire d’yeux couleur miel la fixait avec curiosité. Cependant, ce n’était pas qu’il accédait à sa demande, mais il plaçait son doigt sur sa paupière, comme s’il cherchait quelque chose derrière son globe oculaire. On avait l’impression qu’il s’agissait d’une sorte de rituel qui dépassait les humains et les démons, et Kartina était tellement pétrifiée qu’elle n’avait pas remarqué que quelque chose de chaud coulait le long de sa jambe depuis son entrejambe.
« Le pouls est anormal, les niveaux de magie dans le sang sont conformes aux rapports. Bien. Hm, maintenant que tu as été exposée comme ça, je vois que tu as un corps assez sain. Dans un autre temps, je suis sûr que tu aurais laissé des enfants forts pour la prochaine génération. Cependant… »
Le dernier mot était sorti dans un faible murmure. Ses lèvres s’étaient rapprochées de son cou tremblant, puis il lui avait parlé doucement à l’oreille.
« Heureusement pour toi, une occasion de te rendre utile vient de se présenter. » Sa main glacée avait saisi son cou, et ses jambes se mirent à marcher contre sa volonté. Elle avança pieds nus, puis la silhouette démoniaque en métal de tout à l’heure fut placée devant elle.
« Maintenant, Kartina, assieds-toi ici. Remplis ton devoir envers ta patrie en tant qu’ancien chevalier. » Elle ne voulait absolument pas s’asseoir sur cette chose. Bien qu’elle le pensait, ses genoux s’étaient pliés d’eux-mêmes, et elle avait senti le métal froid contre son derrière. Elle frissonna, mais l’horreur ne faisait que commencer.
Un doigt contre son front l’enfonça plus profondément, et un choc soudain la traversa. Quelque chose de froid perça une zone de sa colonne vertébrale, et elle sentit le froid d’une sorte de fluide couler en elle.
« Ah ! Ah ! Ahhh ! Qu’est-ce... Qu’est-ce que c’est que ça ! ? Qu’est-ce qui vient de me poignarder ! ? »
« Ce sont des armes démoniaques, préparées depuis des temps immémoriaux. Maintenant, assieds-toi bien. Si ça ne rentre pas correctement, tu pourrais le regretter à jamais. » Son ton avait quelque chose d’obsédant et convaincant, et le liquide chaud qu’elle pensait avoir épuisé coula à nouveau le long de sa cuisse.
***
Partie 2
Elle voulait que ça s’arrête. Il aurait été préférable de perdre conscience plutôt que de vivre une telle terreur. Malgré ses souhaits, il lui restait encore beaucoup d’os dans sa colonne vertébrale. Un horrible bruit de déchirure se fit entendre alors que quelque chose s’enfonçait en elle l’un après l’autre, leur injectant une sorte de fluide et infligeant une peur bleue à son cœur. Elle ne s’attendait pas à ce qu’une telle chose se produise dans ses rêves les plus fous il y a quelques minutes à peine, et elle ne pouvait pas comprendre pourquoi cela se produisait maintenant.
« Agh, ah… Aaarghhh ! » Quelque chose de froid s’était enroulé autour de sa cuisse, et son fémur avait été injecté ensuite. Le corps nu de Kartina se déformait au fur et à mesure que l’infestation progressait, et elle convulsait avec ses orteils écartés au maximum. Finalement, son corps avait été laissé dans un état terriblement cruel.
« Ah, félicitations. Il semble t’apprécier. »
« Quoi ? » Kartina réalisa que sa vision était obscurcie, et ses yeux s’écarquillèrent avec un autre type d’horreur cette fois. La « chose » métallique essayait d’avaler tout son corps. Elle se débattit désespérément et cria à l’aide, mais la déclaration du capitaine qu’elle avait tant admiré n’avait aucun sens.
« Oui, ton analyse de tout à l’heure était correcte. Ton premier devoir, Kartina “l’Armement démoniaque”, est d’éliminer cette elfe. » Il avait fait un signe encourageant, et la vision de Kartina avait été complètement bloquée. Elle avait poussé un dernier cri quand tout était devenu noir.
§
La jeune fille elfe avait été la première à remarquer que quelque chose n’allait pas.
Ses yeux violets s’élargirent et se concentrèrent sur la tour miniature devant elle. La tour avait la capacité de détecter les ennemis dans la zone, c’est pourquoi elle avait été en mesure de remarquer plus rapidement que tout le monde. Elle attrapa la main du garçon à côté d’elle et commença à sprinter.
« Hein ? Qu’est-ce qui ne va pas, Marie ? »
« Je t’expliquerai plus tard ! Je dois faire mon rapport à Doula, maintenant ! » dit-elle avec une expression paniquée, en courant parmi les autres membres du groupe qui participaient à l’exploration. Ils étaient bien plus petits que ceux qui les entouraient, mais ils avaient finalement réussi à trouver la personne qu’ils cherchaient. La femme aux cheveux rouges, Doula, fut surprise de voir les deux personnes courir vers elle, essoufflés.
« Qu’est-ce qui ne va pas, Marie ? S’est-il passé quelque chose ? »
« Oui, c’est suspect qu’il y ait si peu de monstres au troisième étage, » répondit Marie, puis elle pointa son bâton vers l’outil magique dans la main de Doula. Ce geste communiqua sa capacité de Gardienne de Prison à Doula, et des points lumineux apparurent sur sa carte.
« Oh non… ! » Doula avait pâli. La carte montrait qu’il n’y avait absolument aucun monstre dans leur voisinage. Et plus loin, il y avait une horde massive de monstres prenant le long chemin autour de l’équipe de raid.
« Sauf erreur de ma part… on dirait que les monstres se déplacent comme une unité organisée. Ils ne font pas qu’attendre qu’on s’approche. » Même Zera n’avait pas pu cacher sa surprise. Les monstres qu’ils avaient vus jusqu’à présent étaient féroces, et ils attaquaient tous ceux qui se présentaient à eux. Mais leur mouvement était beaucoup plus systématique maintenant, et c’était complètement différent de leur comportement précédent.
Après y avoir réfléchi, Doula avait tourné les talons.
« Zera, tu continues à réfléchir avec ces deux-là et tu trouves comment gérer ça. Je vais arrêter l’avancée et rappeler l’équipe Diamant qui se trouve à l’avant-garde, » dit-elle, démontrant sa capacité à s’adapter à toute situation donnée. Mais avec si peu d’indices situationnels sur lesquels travailler, Doula s’était dit qu’il valait mieux se fier à l’instinct animal de Zera. Ce couple avait tendance à faciliter le développement de l’autre en étant ensemble. C’est ainsi qu’ils avaient réussi à devenir le centre de l’équipe de raid malgré leur niveau relativement bas par rapport aux autres.
« À toutes les unités, halte ! » ordonna Doula, et des dizaines de bottes s’arrêtèrent d’un coup. Zera observa la démonstration de contrôle et d’ordre, puis se frotta le menton en réfléchissant.
« Hm, les monstres prennent une autre route pour éviter d’être trouvés. Il y a quelque chose de louche, c’est sûr. Et selon le rapport d’Eve, il y a un grand hall ouvert droit devant. »
Le garçon avait répondu : « Oui, à en juger par leurs mouvements, ils pourraient essayer de nous coincer des deux côtés. Ce qui veut dire… »
« Ils pourraient préparer une embuscade dans le hall devant, » dit Marie. Le doigt de Zera tapota la poignée de son épée tandis qu’il écoutait. Il n’y avait pas d’autre route pour contourner le couloir, donc aller tout droit était leur seule option. Bien qu’ils progressaient bien, Zera avait l’impression qu’ils n’étaient qu’à mi-chemin du troisième étage.
Leur rythme était assez bon, grâce à une équipe petite, mais efficace, mais leur composition n’était pas sans inconvénient. Comme ils étaient peu nombreux, il leur faudrait plus de temps pour explorer complètement la zone. Mais malgré cet inconvénient, Zera pouvait sentir le moral de l’équipe du raid s’améliorer.
Le sentiment d’unité ici était palpable. Chaque soldat se donnait à fond dans cette mission, et les réserves et les frontières qui les divisaient autrefois s’estompaient. Les choses se présentaient bien jusqu’à présent, mais comme leurs forces ne pouvaient pas être remplacées, subir des pertes pourrait avoir des résultats catastrophiques.
Pourtant, dans l’esprit de Zera, il savait qu’ils ne pouvaient pas battre en retraite maintenant. Ils devaient découvrir les pièges qui les attendaient, il était donc inutile de faire demi-tour. En fait, cela n’aurait fait que donner plus de temps à l’ennemi pour se préparer, ils devaient donc avancer malgré le risque.
« Hmm, je commence à comprendre les schémas ici, mais une fois que nous entrons dans ce hall, il faut partir du principe que nous ne pourrons pas en sortir avant la fin de la bataille. »
« Je suis d’accord. Il semble que l’ennemi agisse aussi dans cette optique. »
« Dites, et si nous nous dirigions vers l’entrée du hall ? Je pourrais ainsi scanner la zone et mieux évaluer la situation, » suggéra Marie, mais Zera et Kazuhiho lui demandèrent d’attendre. Ils voulaient éviter de se faire attaquer des deux côtés si l’ennemi s’approchait par-derrière. Réalisant à quel point la situation était tendue, une goutte de sueur froide coula sur le front de la jeune elfe.
« On dirait que vous avez une petite discussion amusante ici. Puis-je me joindre à vous ? »
« Gaston, qu’est-ce que tu as fait jusqu’à présent ? » Kazuhiho demanda, et l’homme grisonnant lui lança un regard qui était étonnamment intimidant pour son âge. Pour une raison inconnue, il semblait ne pas aimer le jeune homme depuis l’incident de l’autre jour. Après tout, les rancunes liées à la nourriture étaient assez profondes. Il y avait une tension dans l’air, mais quand ils avaient expliqué la situation, le vieil homme avait affiché un sourire imperturbable.
« Hmm, ce troisième étage est plutôt… comment dire… humain. Tout monstre de merde ordinaire ne penserait jamais à élaborer une stratégie contre nous et à concentrer ses effectifs en un seul point. »
« Maintenant que tu le dis, c’est en quelque sorte un comportement humain… » Le jeune garçon répondit, et Mariabelle et lui gémirent en s’absorbant dans leurs pensées. Ils ne bougeraient pas jusqu’à ce qu’ils arriveraient à une conclusion une fois qu’ils étaient dans cet état, alors les autres les avaient laissés à leurs pensées et ils s’étaient regroupés avec l’équipe Diamant pour trouver un plan. Cependant, tout ce qu’ils pouvaient faire était une reconnaissance en force, ils avaient donc décidé de continuer leur marche en étant en alerte maximale. L’affrontement entre les forces d’élite d’Arilai et l’équipe de sabotage de Gedovar était sur le point de commencer.
§
Fsssh…
Le Gardien de Prison de Marie émergea du sol à un endroit situé immédiatement devant l’entrée du hall. Les pavés de pierre s’entrechoquèrent en se retournant l’un après l’autre, et une tour aussi épaisse qu’une bûche apparut. Son nombre d’étages augmentait avec le temps, étendant en même temps son champ de recherche. Un étage supplémentaire était ajouté toutes les trente secondes, et le nombre de lumières indiquant les ennemis sur la carte augmentait…
Crack ! La tour fut détruite par une puissante attaque à distance. L’elfe avait essayé de mettre en place une tour depuis une position sûre, mais il semblerait que l’ennemi apprenait. Ils comprenaient maintenant qu’ils subiraient les conséquences s’ils laissaient Mariabelle faire ce qu’elle voulait.
« Je voulais installer la tour à l’entrée parce que c’est loin d’être aussi efficace de l’extérieur, mais ça ne marche pas. »
« L’ennemi est en état d’alerte. On dirait qu’ils ont peur de ce que tu es capable de faire, » avais-je dit en souriant, mais j’avais ensuite poussé un soupir de malaise. Je ne pouvais m’empêcher d’être prudent en voyant que l’ennemi commençait à interférer dans nos opérations de recherche. Avec les mouvements étranges des monstres et maintenant cela, j’avais l’impression que quelqu’un tirait les ficelles en coulisse.
« Les rumeurs disent que les rebelles qui se cachent ont la capacité de dissimuler leur groupe entier, » avais-je dit.
« Je pensais la même chose. Les mouvements des monstres sont aussi étranges. Ils sont trop bien coordonnés, » répondit Marie.
« Oui, il y a quelque chose de louche. J’ai l’impression qu’une pièce du puzzle vient de se mettre en place. »
Les monstres n’étaient pas capables de penser assez pour faire de tels mouvements stratégiques. Il devait y avoir quelqu’un qui leur donnait des instructions… quelque part dans les profondeurs de cette pièce noire.
Les autres soldats avaient également senti la menace dans l’air. Et bientôt, ils seraient obligés de se battre sans que les positions de l’ennemi soient révélées. Beaucoup pourraient mourir en conséquence.
Mais en tant que fiers combattants d’élite, aucun d’entre eux ne craignait d’affronter la mort. Nous, de l’équipe Améthyste, avions toujours une issue, mais je ne voulais pas que d’autres meurent inutilement. J’avais fait craquer mon cou et j’avais regardé de mon côté pour voir Wridra vêtue d’une armure et Shirley, la femme blonde, qui me regardait.
« Qu’est-ce qu’il y a ? Tu ne sembles pas aussi excité que d’habitude. »
« Je n’en ai peut-être pas l’air, mais je sais lire l’ambiance. Plus important encore, j’espérais que tu pourrais garder Marie et Shirley en sécurité aujourd’hui. »
Elle avait laissé échapper un « Hmph » amusé, ce qui, pour moi, signifiait que ce serait un jeu d’enfant pour elle. J’étais soulagé. Il n’y avait pas beaucoup d’êtres qui étaient à la hauteur de Wridra, et si un tel adversaire existait, nous l’aurions probablement déjà découvert. C’était une chose de moins à craindre.
Cela signifiait qu’il était probablement mieux pour moi de me détendre et de me concentrer sur le maniement de mon épée. En d’autres termes, juste faire ce que je fais habituellement.
« Très bien, n’oubliez pas d’ajuster les paramètres pour le Chat de Lien Mental… Oh attends, Shirley ne peut pas parler. Bien, je vais juste garder un œil sur tes gestes. » Shirley avait souri, puis avait serré le poing pour montrer que tout irait bien. Je n’avais pas encore eu l’occasion de la voir déployer ses pouvoirs, mais j’avais l’impression qu’elle n’avait pas vraiment besoin d’être protégée. C’était étrange de voir à quel point elle semblait fiable, malgré son absence totale d’armes ou d’armure.
Juste à ce moment-là, j’avais entendu une voix à travers le Chat de Lien Mental.
***
Partie 3
« Tout le monde, préparez-vous à bouger. Comme nous ne savons pas ce que l’ennemi prépare, attendez-vous à être sur la défensive au début. Vous n’avez qu’à garder deux choses à l’esprit : restez à l’écoute de mes ordres à tout moment, et ne cédez pas à la peur et ne fuyez pas la bataille. »
Alors que Doula terminait sa déclaration, son équipe Andalouse avait commencé à chanter son hymne en même temps. Cela avait commencé par un « Ahhh » grave, qui s’était répercuté dans les oreilles de toutes les personnes rassemblées dans le couloir. Leurs voix avaient progressivement augmenté en volume, puis ils avaient commencé à introduire une mélodie dans le mélange.
Le son était comme un feu brûlant sur une bûche. Il semblait accélérer les battements de leur cœur, réveillant le sang du guerrier en eux. Le paladin avait regardé autour d’elle, puis sa voix aiguë avait résonné dans la pièce.
« Que nos âmes trouvent le chemin de l’Eden ! Équipe Pierre de Sang ! Formations ! »
« Rahhh ! » On pouvait entendre des bottes militaires piétiner le sol alors que les soldats se mettaient en formation, et leur intensité était suffisante pour faire dresser les cheveux sur la tête.
L’équipe Pierre de Sang avait été choisie pour prendre l’avant-garde en raison de sa grande capacité d’adaptation. Ils étaient l’unité la plus utile de Doula, car ils pouvaient librement passer d’un rôle offensif à un rôle défensif. L’homme à la tête de l’équipe affichait un sourire de maniaque, sans une once de peur dans son expression.
« Aha, tu vas encore tomber amoureux de moi, Doula ! Faisons des enfants à notre retour ! »
« Ça ne me dérangerait pas. »
Oof, ils avaient juste flirté sur le Chat de Lien Mental avec tout le monde qui écoutait. Mais cette équipe de raid n’était pas du genre à laisser une si petite chose les affecter. J’avais ri avec Marie au visage rouge, et l’unité d’avant-garde avait finalement commencé sa charge.
Ils franchirent la porte d’un pas organisé, militaires, et les esprits de lumière de Marie se faufilèrent dans l’ouverture. Les esprits brillent de mille feux, illuminant le vaste hall devant eux.
Le plafond était trop haut pour être vu, et les murs avaient un éclat noir et visqueux, comme si une sorte d’encre avait été appliquée sur eux. Les monstres qui nous attendaient ici étaient assez choquants à voir. Des dizaines de grands boucliers métalliques étaient placés côte à côte, d’innombrables paires d’yeux démoniaques scintillaient dans les espaces entre eux. Une silhouette géante et robuste pouvait être aperçue plus loin dans le fond.
La silhouette mesurait environ quatre mètres de haut. Sur ses épaules se trouvaient d’étranges attaches qui ressemblaient à des têtes de chenilles, et sa peau était disgracieuse et dense, comme du fer partiellement fondu. À en juger par la brume dans l’air qui l’entourait, elle devait dégager une chaleur considérable. Grâce à mes études en langues anciennes, je pouvais à peine distinguer le nom, Borlax Doudou.
La créature avait ouvert la bouche et elle avait crié.
Le bruit de grincement était suffisant pour que la personne moyenne s’arrache la tête.
L’air avait tremblé, mais les guerriers n’avaient pas arrêté leur marche. Ce n’était pas qu’ils ne ressentaient pas la peur. Ils savaient simplement que s’ils cédaient à la peur et perdaient leur volonté de se battre, la honte serait insupportable. Cela les rendrait indignes d’entrer dans l’Eden.
J’avais l’impression que quelqu’un d’autre nous observait aussi. C’était peut-être mon imagination, mais j’avais l’impression que quelqu’un en avait après une certaine fille elfe à côté de moi plutôt que moi-même. J’avais jeté un coup d’œil autour de moi, mais je n’avais pas trouvé la source, ce qui m’avait rendu encore plus mal à l’aise. Malgré l’air sinistre qui régnait dans la pièce, l’équipe du raid avait continué à avancer.
Une fois que tout le monde avait mis le pied à l’intérieur et que les deux forces s’étaient affrontées comme des pièces sur un échiquier, la porte se referma complètement. Mais personne ici n’avait peur de perdre son chemin vers la sortie. La rangée d’ennemis brandissant de grands boucliers devant eux montrait qu’ils étaient l’ennemi à vaincre. Cela signifiait qu’il n’y avait pas besoin de faire demi-tour avant qu’ils ne soient tous anéantis.
L’hymne de l’équipe Andalousite continuait avec son mélange de sons aigus et graves. Non seulement ils avaient remonté le moral de leurs forces, mais leurs muscles s’étaient visiblement gonflés en l’entendant. Tant que leur chant continuera, ils continueront à se battre comme des guerriers indomptables.
Le raid était composé de quatre équipes avec un total de quarante-quatre membres. De l’autre côté, les monstres étaient plusieurs fois plus nombreux que nous, avec des monstres protégés par des boucliers positionnés comme s’ils partaient en guerre et des soldats de réserve cachés à l’arrière.
L’imposant corps supérieur de Borlax Doudou était visible au-delà du mur de bouclier apparemment incassable. Les têtes supplémentaires sur ses épaules gémissaient sinistrement, et on pouvait voir des braises bleu pâle flotter derrière ses dents irrégulières.
« Celui-là a l’air fort. C’est peut-être un boss moyen, mais il pourrait même dépasser le niveau 100. »
Les yeux d’obsidienne de Wridra s’étaient tournés vers moi, mais j’avais souri, lui assurant que je ne lui demandais pas de conseils. Comme d’habitude, Wridra ne faisait pas partie de notre groupe, car son niveau était bien trop élevé pour nous. L’Arkdragon avait également pris soin de ne pas nous donner trop d’aide ou de conseils afin que nous puissions grandir et apprendre de notre propre chef.
Il en va de même pour Shirley. En fait, aucune d’entre elles n’avait le bracelet nécessaire pour ouvrir leur menu d’état, elles ne pouvaient donc pas se joindre à notre groupe. Le chat par liaison mentale était également une fonctionnalité du groupe, mais selon le grand Arkdragon, analyser et pénétrer dans le chat était assez facile pour elle.
Notre équipe était positionnée juste à côté de l’équipe Andalousite, dirigée par Doula. Nous étions dans la position la plus sûre, la plus centrale, où nous pouvions également recevoir des ordres directement de la chef. C’était probablement parce qu’elle voulait garder Mariabelle à proximité pour ses capacités tactiques et sa sorcellerie spirituelle.
« Franchement, le troisième étage a été froid, mais il fait plutôt chaud ici avec toute cette énergie dans l’air. » La ferveur et l’excitation qui nous entouraient étaient un peu étouffantes. J’avais remarqué que Marie avait l’air un peu nerveuse pendant que je faisais claquer mon col et j’avais décidé de lui parler.
« Ça va être beaucoup de travail, d’affronter autant d’entre eux en même temps, hein ? Veux-tu m’aider à trouver un moyen de les traiter facilement ? »
« Facilement… ? Mais nous ne savons même pas quels sont leurs capacités ou leur nombre. Je ne sais même pas où nous pouvons établir un périmètre défensif avec des esprits de pierre à ce stade. » Marie avait jeté un coup d’œil anxieux autour d’elle, et elle semblait un peu pâle en répondant. À en juger par son expression, elle devait être inquiète des pertes potentielles. C’était compréhensible, étant donné que nous étions pratiquement devenus des amis plus proches après avoir travaillé ensemble pendant tant de jours.
Mais être trop énervé ou nerveux aurait l’effet inverse pour nous. J’avais repensé aux batailles précédentes. Nous avions toujours surmonté les défis par la créativité et l’inspiration. Il valait mieux se détendre et essayer d’apprécier le combat. Même si un ennemi redoutable nous attendait, nous devions nous concentrer sur le fait de profiter du moment et d’écraser l’adversaire.
Et donc, j’avais affiché mon habituel sourire détendu.
« Tu te souviens de ce que tu as dit avant, Marie ? Dans ce monde, tu peux tester tes pouvoirs à ta guise, à condition que Wridra et moi soyons avec toi. »
« Oui, mais cette fois-ci, notre ennemi semble contrer ma tactique. » Elle avait lancé son Gardien de Prison depuis un moment déjà, mais cela ne semblait pas fonctionner à en juger par son regard et le fait que la tour ne sortait pas du sol. Il y avait peut-être un lanceur de sorts parmi les ennemis qui pouvait interférer avec sa magie. Comme nous ne pouvions pas encore être sûrs de ce qui se passait, il était préférable d’abandonner le balayage des ennemis pour le moment.
J’avais pris Marie par la main et j’avais regardé dans ses yeux violets.
« Pourquoi ne pas essayer de changer notre état d’esprit ? S’il s’agissait d’une armée et non d’une horde de monstres, comment devrions-nous faire face à un tel mur de boucliers ? »
« Oh, très bien. Je vais jouer le jeu. Voilà, tu me fais marcher comme ça, comme d’habitude. Alors, voyons voir. Puisque leurs défenses sont si serrées à l’avant, je voudrais les frapper par le flanc ou l’arrière. » Shirley avait observé notre conversation avec une expression curieuse, sa tenue étant plus adaptée à un manoir de noble qu’à un champ de bataille. Elle avait incliné la tête, et Wridra avait gloussé joyeusement à côté d’elle.
« Hah, hah, c’est tout simplement comme ça qu’ils sont. Ils trouvent des idées farfelues comme des enfants pour démolir les châteaux de sable que l’ennemi construit avec le moins d’effort possible. Pour leurs adversaires, rien ne peut être plus frustrant. » Shirley semblait plutôt impressionnée, ses yeux bleu ciel s’agrandissant à mesure qu’elle écoutait. Cela pouvait paraître étrange à leurs yeux, mais nous, les humains, devions utiliser notre tête pour survivre. Je devais faire ce que je pouvais pour trouver un moyen de réussir.
Marie était restée perdue dans ses pensées pendant un certain temps, mais elle avait ensuite mis un doigt sur son menton et avait pris la parole.
« Est-ce même possible ? Pouvons-nous organiser une formation qui protège notre ligne de front tout en attaquant leur flanc ? »
« Hmm, même si on pouvait, ça prendrait beaucoup de temps à mettre en place si l’échelle est trop grande. Peut-être que si nous la réduisons, comme une forme en “L’, ce serait possible. »
« Ah, si nous utilisions les coins de la salle, nous n’aurions pas besoin de couvrir une zone aussi large. Mais je n’aime pas la façon dont cela nous laisserait complètement acculés. Et si nous utilisions la hauteur à notre avantage, comme un bâtiment ? » Le fait que nous trouvions une idée après l’autre était un bon signe. Au fur et à mesure que nous évoquions des idées sur la façon d’aborder notre problème et de couvrir les zones où nous avions des lacunes, Marie avait commencé à se détendre visiblement.
Il semblait que Doula avait écouté pendant que nous élaborions notre stratégie défensive. Ses cheveux roux s’étaient balancés quand elle s’était retournée et nous avait montré un sourire fougueux.
« J’aime cette idée. J’espère que ça ne vous dérange pas que nous nous joignions à vous. Nous allons commencer par renforcer nos forces dans le coin droit et dégager suffisamment d’espace pour mettre en place un périmètre défensif. » Il semblerait que tout le monde avait fini d’entrer dans la pièce, et nous avions entendu la porte se fermer lentement. Doula avait crié ses ordres, et les troupes s’étaient immédiatement déplacées en formation diagonale.
La porte était à deux doigts de se fermer complètement.
Doula avait continué à donner ses ordres de manière calme.
« Kazuhiho, Gaston, Eve — vous trois, évaluez la situation et attaquez comme bon vous semble. Mais gardez à l’esprit de toujours suivre mes ordres. Et équipe Diamant, ne faites pas de mouvement drastique avant que je ne vous donne le feu vert. » Chaque unité répondit par l’affirmative, puis le bruit de la porte qui se refermait retentit dans le hall. Les longues oreilles de Marie tremblaient, mais il y avait beaucoup moins de peur dans son expression maintenant. Le fait que nous ayons mis au point un plan semblait l’avoir quelque peu rassurée.
***
Partie 4
Cette fois, j’avais beaucoup plus de tâches à accomplir que d’habitude. J’avais senti que quelqu’un visait Marie plus tôt, ce qui signifiait qu’il était probable que l’ennemi en savait beaucoup sur nos stratégies. Cela signifiait que je devais être attentif à tout mouvement étrange, essayer de trouver le lanceur de sorts qui interférait avec la magie de Marie, et me méfier de Borlax Doudou au fond de la pièce.
Cette pensée m’avait fait sourire.
C’était excitant d’avoir tant de choses à faire. J’aurais détesté qu’il s’agisse de tâches au travail, mais c’était un monde imaginaire où je pouvais m’amuser autant que je le voulais.
Sentant que je m’agitais, j’avais resserré la prise sur mon épée.
Juste à ce moment-là, la musique de combat avait commencé à jouer.
Soudain, des voix extrêmement aiguës retentirent. On aurait dit des femmes qui pleuraient, se superposant les unes aux autres pour percer les tympans des auditeurs, même s’ils étaient couverts. Le silence qui régnait quelques instants auparavant avait été brisé par les voix terrifiantes des femmes, qui avaient progressivement commencé à former un rythme. Le son des tambours s’y était ajouté, créant une sorte de musique hystérique.
Les troupes ennemies avaient commencé à se déplacer en suivant le rythme. Les boucliers de leur ligne de front s’étaient déplacés en diagonale pour s’adapter à notre formation, ressemblant à un mur de fer solide qui se rapprochait de nous.
« Notre bataille commence ! Équipe Pierre de Sang, dégainez vos épées ! »
Les épées d’acier furent brandies entre les rangées de boucliers en réponse à l’ordre crié. Les unités de boucliers muraux de l’ennemi s’étaient avancées exactement au même moment, marquant le début de leur marche de la mort au son de la musique.
Ils se déplaçaient lentement, soulignant à quel point leurs unités étaient lourdes. Mais voir le mur se refermer de l’avant était étouffant, et j’avais le sentiment que ce n’était pas des boucliers ordinaires. Mais Doula avait levé son épée sans crainte et avait crié son ordre.
« Sécurisez un périmètre défensif ! En avant, très lentement ! » Les bottes de l’équipe Pierre de Sang résonnaient, raclant le sol alors qu’ils se dirigeaient vers l’ennemi à un rythme déterminé. L’espace entre les deux forces diminuait progressivement en même temps que le rythme. Finalement, une rangée de lances noires émergea d’entre les boucliers des monstres. Un liquide noir ressemblant à du goudron avait été appliqué sur les pointes des lances, et j’avais réalisé qu’il était de la même couleur que les murs de la pièce.
J’avais détourné mon regard de l’armée des monstres et de leur drapeau noir pour jeter un coup d’œil vers l’arrière. Il y avait un petit espace qui s’était ouvert dans le coin le plus reculé après que leurs forces aient avancé. J’avais regardé Marie commencer à contrôler ses esprits de pierre après avoir lancé son incantation, j’avais confirmé que Wridra et Shirley veillaient sur elle, puis j’avais décidé d’agir.
« Je suppose que je vais aller vérifier les choses de ce côté-là. Je suis curieux de savoir ce qui se passe au-delà de ces boucliers. »
« Compris. Mais peux-tu continuer à parler dans le Chat par liaison mentale comme ça ? Je veux continuer à entendre ta voix. » Cela m’avait fait chaud au cœur de l’entendre dire ça. Cela me rendait heureux de savoir qu’elle comptait sur moi, et je voulais aussi entendre la jolie voix de Marie. Mais il semblait qu’elle avait une intention différente.
« Je veux dire, ta voix semble si insouciante. J’en suis venue à réaliser que c’est juste la bonne quantité d’énergie pour moi. »
Attends, insouciant ? Mais je suis sérieux là. Je lui avais dit que je revenais tout de suite et je m’étais téléporté sur le mur près du flanc de l’ennemi. Ma vue avait immédiatement changé, et j’avais rapidement dégainé mon épée pour empaler le mur. J’avais remarqué que la matière noire des lances des ennemis recouvrait également ce mur.
Accroché à l’épée avec laquelle j’avais poignardé le mur, je regardais directement en dessous de moi.
Je ne pouvais pas les voir avec leurs boucliers muraux, mais c’était bien des monstres. Ils avaient une carrure robuste, tout comme le boss intermédiaire, et leurs bras épais étaient assez longs pour atteindre le sol.
La façon dont les forces ennemies étaient rassemblées et se déplaçaient collectivement donnait l’impression qu’elles ne formaient qu’une seule créature. J’avais remarqué qu’une de leurs unités transportait quelque chose de gros, et que des utilisateurs de magie lançaient une incantation autour, puis j’avais senti les poils de ma nuque se hérisser.
« Whoa, c’est une mauvaise nouvelle. Cet ogre est un kamikaze, non ? » J’avais senti mon cœur sauter un battement. Je m’étais retourné pour faire face à la voix bourrue qui venait de juste à côté de moi. Gaston était tapi dans l’ombre, regardant fixement avec une lueur dans ses yeux qui ne correspondait pas à son âge.
« O-Oui… Depuis combien de temps êtes-vous là, Gaston ? »
« Hein ? De quoi tu parles ? C’est toi qui es venu me voir. De toute façon, il est temps de l’éliminer, Eve. » J’avais été pris par surprise pour la deuxième fois. Je n’avais même pas réalisé que quelqu’un avait atterri sur l’épée que j’avais plantée dans le mur et que je m’étais accroupi. J’aimais penser que j’avais une intuition bien entraînée pour ne pas être prise au dépourvu, mais cela ne semblait pas avoir d’effet sur ces deux-là.
« C’est sûr. Nous sommes l’équipe d’attaque mobile de fortune, non ? Kazu, Papy, montrons à tous ceux qui nous ont traités d’idiots tout ce temps, » dit Eve.
« Ha ha, ne me mets pas dans le même sac que vous deux, » répondit Gaston. Sur ce, le vieil homme avait relâché sa main sans hésiter. J’avais également donné un coup de pied dans le mur, atterrissant dans le groupe d’ennemis l’instant suivant. Je n’étais pas sûr que ce soit une bonne idée, mais j’avais été choqué pour la troisième fois lorsque j’avais réalisé que les deux autres étaient déjà là avec moi. Je ne savais pas comment ils avaient fait, mais ils étaient aussi rapides que ma capacité de téléportation.
Mais je devais montrer à ces deux-là que je n’étais pas non plus une mauviette.
Juste après avoir atterri, Gaston et moi avions balancé nos armes pour couper la tête des monstres de chaque côté de nous, et ils avaient finalement élevé la voix en signe d’alarme.
En tant qu’unité d’attaque mobile, Doula attendait de nous que nous perturbions l’ennemi aussi efficacement que possible, plutôt que d’attaquer au hasard. Ils comptaient sur nous pour notre mobilité, nos capacités offensives et notre perspicacité. Notre rôle était donc d’éliminer les kamikazes avant qu’ils ne puissent atteindre leurs cibles.
J’avais tranché le monstre avec des malédictions écrites sur tout son corps, puis j’avais immédiatement commencé à me déplacer vers la cible suivante. Pendant ce temps, Eve avait semblé être troublée par quelque chose pendant un moment, puis elle s’était glissée derrière moi. Bien qu’elle soit plus grande que moi dans cet état, elle se cachait complètement de la vue de l’ennemi en s’accroupissant comme un chat.
« Je vais de ce côté. Toi et Eve vous vous occupez de l’autre côté, » appela Gaston.
« Hmm, c’est la première fois que je fais équipe avec toi comme ça, Kazu. Comme c’est excitant. »
Il semblerait que les choses avançaient sans mon intervention. J’avais mentalement haussé les épaules, ignorant la hache qui se dirigeait vers ma tête et me téléportant en avant tout en perçant le cou d’un ennemi en un seul mouvement. Notre environnement empestait la puanteur des monstres, et le sang noir des monstres giclait sur le sol. Un autre ogre s’était approché par-derrière, mais sa vision avait été obscurcie par un ensemble de cuisses bronzées avant qu’il n’encaisse un puissant coup de pied par en dessous.
J’étais impressionné. Ses jambes avaient bougé en un arc de cercle parfait, laissant un ogre hébété devant moi. J’avais rapidement coupé sa trachée, puis la dague d’Eve avait coupé les tendons du bras massif du monstre qui se balançait vers moi depuis la gauche.
Oh, je vois. Elle m’avait soutenu. J’avais été surpris par l’habileté de ses mouvements, mais elle avait toujours semblé adepte des arts martiaux. J’avais pensé à quel point elle était un ninja compétent alors que je coupais le cou de l’ogre.
J’avais fini par me joindre à l’offensive, mais je n’aimais pas être au milieu d’une telle mêlée. C’était vraiment pénible d’avoir des ennemis qui me bloquaient la vue dans toutes les directions. Il y avait si peu de place que je ne pouvais me téléporter qu’à un ou deux pas, et ils pouvaient m’empêcher de me téléporter complètement s’ils m’encerclaient dans toutes les directions.
Mais nous pouvions attaquer rapidement grâce au soutien d’Eve, et l’ennemi était encombré par les explosifs. De plus, ils étaient regroupés, mais ils ne voulaient pas se prendre les uns les autres dans les explosions, donc nous avions plusieurs avantages de notre côté.
J’avais mémorisé les schémas d’attaque et d’évasion les plus optimaux avec Surcharge pendant que nous nous étions frayé un chemin dans l’espace confiné. Puis, comme avec la Reprise, j’avais commencé à avoir de moins en moins besoin de concentration pour la maintenir. Tout ce que j’avais à faire était de me tenir dans les positions optionnelles, et mon corps passait automatiquement par le schéma d’attaque.
« Eh bien, c’est agréable et facile. »
« N’est-ce pas ? Toi et moi faisons une bonne équipe. Pourquoi ne pas rejoindre l’équipe Diamant ? Nous avons des trucs fous dans notre manche. Nous avons même un membre qui peut lancer des enchantements de compétences. » Ils avaient donc quelqu’un qui pouvait accorder des compétences aux autres. C’était un peu différent des buffs qui augmentaient temporairement les statistiques d’une personne. Je devais admettre que j’étais curieux, mais nous devions nous occuper des kamikazes pour le moment.
Puis, cela m’avait frappé. Et si je mémorisais aussi les schémas d’attaque d’Eve ? Après tout, ma compétence avait été améliorée, et le nombre d’emplacements pour les coups avait également été augmenté. D’après ce que je voyais, Eve était extrêmement douée pour frapper ses ennemis en plein dans le menton et les assommer. J’avais décidé d’essayer, et notre travail d’équipe s’était affiné au fur et à mesure que je mémorisais différents schémas d’attaque.
Cela m’avait rappelé quelque chose… battre des mochi à deux. Ce que nous faisions maintenant était en fait une version accélérée du pilonnage de mochi avec un maillet.
Immédiatement après que le coup de pied d’Eve ait frappé un monstre au menton, mon épée l’avait empalé dans la gorge. Elle avait ensuite tourné sur son talon pour donner un coup de pied retourné dans le dos d’un ogre, et j’avais enchaîné avec le coup de grâce l’instant d’après. Alors que nous étions en train d’éliminer les ennemis, Eve semblait plutôt ravie.
« Whoa ! C’est fou, Kazu ! Nous sommes, comme, presque inarrêtables ! » Des perles de sueur perlaient sur la tête d’Eve pendant qu’elle parlait.
Je ne pouvais pas lui reprocher de se sentir bien à ce sujet. Dès qu’elle assommait l’ennemi d’un coup de paume, de genou ou de pied, il mourait. Ses mouvements s’étaient accélérés avec le temps, se transformant en une tempête furieuse qui ne pouvait être arrêtée par les monstres lents.
Commençant à s’emporter, Eve avait bondi en avant et avait terrassé ses ennemis en quelques secondes, tout en riant joyeusement. Les monstres qui l’entouraient avaient l’air un peu terrifiés, et même moi, je commençais à avoir de la peine pour eux.
***
Partie 5
Avant que je ne m’en rende compte, nous avions éliminé l’équipe de kamikazes, et les ennemis encore debout étaient ceux qui étaient lourdement blindés.
J’avais essuyé la sueur de mon front et appelé l’elfe noire.
« Je pense que ça devrait suffire pour le moment. Eve, on devrait rentrer. »
« Quoi ? Encore un peu. Allez, on continue. »
Donc, elle va être difficile. Mais je n’avais pas le temps de m’occuper de ça, alors je l’avais tenue par sa taille fine et je m’étais téléporté vers le mur.
« Kyaaa ! »
Nous avions laissé son cri derrière nous lorsque nous étions réapparus au nouvel endroit, et j’avais enfoncé mon épée dans le mur. Ma téléportation était auparavant limitée par le poids, mais j’avais une plus grande variété d’options de mouvement après la mise à niveau vers la Surcharge. Je me demandais ce que faisait Gaston, quand j’avais entendu un grand bruit venant d’en bas.
Le bruit des pieds qui chargeaient et des armes qui s’entrechoquaient. Le combat avait commencé. Les lignes de front des deux camps s’étaient affrontées. Nous avions éliminé les kamikazes, donc je n’avais pas à m’inquiéter de cela pour le moment. J’avais observé la situation juste en dessous de nous, attendant de voir comment la bataille allait se dérouler.
J’avais d’abord entendu un grand bruit sec.
Puis le bruit de quelque chose qui se brisait.
Les lances ennemies s’étaient brisées les unes après les autres, comme d’innombrables baguettes de bois.
La rangée de l’armée démoniaque était entrée en collision avec l’équipe Pierre de Sang et l’équipe Andalousite.
Dès qu’ils étaient entrés en contact, j’avais vu des barrières se mettre en place en plus des buffs de l’hymne. Les ogres possédaient une force inhumaine, mais leurs lances s’étaient brisées contre nos puissantes défenses, envoyant des éclats partout. Certaines personnes avaient été poignardées à l’épaule et avaient subi d’autres blessures mineures, mais l’équipe Pierre de Sang avait avancé presque indemne.
Ils marchaient à l’unisson, et lorsqu’ils atteignirent le mur de boucliers de l’ennemi, un bruit sourd retentit sur le champ de bataille.
Les boucliers mesuraient deux mètres de haut, et ils étaient trop grands pour qu’un adulte puisse sauter par-dessus. La vue de ce mur apparemment incassable qui les surplombait devait être très intimidante. Et pourtant, ils n’avaient pas faibli. Les soldats avaient poussé leurs cris de guerre et avaient semblé écraser l’ennemi par leur propre intensité.
« Allez-y ! Repoussez-les ! Montrez-leur qu’Arilai ne recule pas ! » Leurs voix couvraient le bruit du fer contre le fer. Le feu dans leurs cœurs brûlait plus fort à mesure qu’ils criaient, et les boucliers ennemis commencèrent à craquer.
Bien que la plupart de leurs lances aient été brisées, l’armée démoniaque avait dû en tenir compte, car elle avait reconstitué ses offensives. Les monstres levèrent d’autres lances et les abaissèrent pour percer la barrière d’en haut.
« Équipe Andalousite ! Boucliers ! En avant ! »
« Rahhh !! »
L’équipe Andalousite avait immédiatement levé des boucliers au-dessus de l’unité par-derrière. Ils avaient aussi toujours la barrière défensive. Ils s’étaient effectivement transformés en une forteresse de fortune, et il était difficile de croire qu’ils s’étaient adaptés aux attaques de l’ennemi sans en avoir discuté au préalable. Leur travail d’équipe était parfait. Peut-être était-ce parce que leurs chefs allaient se marier… Non, ces deux-là avaient toujours été en phase.
Les hommes avaient fait pression pour percer les boucliers ennemis, et leurs renforts avaient apporté un soutien puissant depuis l’arrière. La coordination étroite de notre équipe de raid était une chose, mais le fait que nous soyons allés perturber la ligne arrière de l’ennemi avait peut-être aidé à repousser le mur de boucliers.
Le rapport de force entre les humains et les ogres était pratiquement égal, mais lorsque les hommes avaient pu avancer d’un pas, ils avaient encore accru leur férocité.
L’un des grands boucliers s’était renversé, et Zera avait profité de ce moment pour se glisser et poignarder à travers l’ouverture. Il avait attaqué les ténèbres au-delà avec des coups sauvages, et du sang noir avait alors coulé sur le sol. Un cri bestial avait rempli l’air, et une figure démoniaque s’était effondrée de l’autre côté. Mais malheureusement, le trou dans leurs défenses avait été immédiatement comblé, et l’occasion s’était envolée.
Les échanges ne faisaient que commencer, et ce serait une guerre d’usure sans fin à partir de maintenant.
J’étais toujours suspendu à mon épée dans le mur, regardant avec émerveillement la scène qui se déroulait sous mes pieds.
Cela faisait longtemps que je n’avais pas vu deux armées s’affronter de la sorte. Même si cela semblait n’être qu’un jeu de nombres et de force brute, il y avait beaucoup de réflexion et d’intention derrière leurs formations. J’avais été complètement attiré par cette bataille dramatique.
« Franchement, c’est intense. On ne trouve pas ce genre d’action même dans les films. »
« J’aimerais aussi pouvoir le voir. L’ennemi à l’arrière n’a pas encore bougé, non ? » La jolie voix de Marie avait parlé dans mon oreille. J’avais regardé au loin pour vérifier, et le monstre géant était toujours là. Une aura infernale vacillait autour de Borax Doudou, apparemment en synchronisation avec sa respiration, mais il n’avait pas bougé d’un pas de sa position initiale.
« Je ne sais pas pourquoi, mais il semble encore calme pour le moment. Oh, et les monstres ont des lanceurs de sorts parmi eux, et ils ont l’air de vouloir bouger bientôt. »
« Quoi ? Comment sais-tu ça ? » avait dit Eve, s’immisçant dans notre conversation par chat. Elle était dans un groupe différent du nôtre, mais j’avais dit la dernière partie à haute voix, alors elle avait répondu à ma voix.
« Je n’en ai peut-être pas l’air, mais j’ai déjà participé à une guerre. J’ai aussi passé une journée entière à en regarder une avec un bento. Voyons voir… » Il pouvait être difficile de saisir la situation sur un champ de bataille chaotique. Dans ces cas-là, il valait mieux avoir un regard flou sur l’ensemble du tableau, puis décomposer leurs mouvements à partir de là.
« Ce groupe soutient leur avance depuis l’arrière. Peux-tu voir qu’ils fournissent des renforts lorsque leurs défenses commencent à tomber, et que ces gars près du centre se préparent à combler les lacunes ? »
« Je ne sais pas… Je suppose que ça en a l’air quand tu le montres. Peut-être que j’aurais aussi dû apprendre ce genre de choses, » répondit Eve.
« Je ne sais pas grand-chose non plus. C’est juste des trucs que j’ai appris… Hm ? »
Mes yeux avaient été attirés par une sorte de fluide qui avait commencé à couler jusqu’à mes doigts. Le mur scintillait d’un revêtement noir, qui semblait provenir d’une matière visqueuse non identifiée. Je l’avais frotté entre mes doigts et l’avais reniflé.
« Odeur âcre… Qu’est-ce que c’est ? Ça sent le goudron… Oh, Eve, tu ne devrais pas lécher ça ! »
« Ne t’inquiète pas, seul le plus fort des poisons aura un effet sur moi. Je peux dire à l’odeur que ce n’est pas si mauvais. » Avec ça, Eve avait craché sur le côté.
« Hm ? Ce n’est pas du poison ou de l’huile. Aucune idée de ce que c’est. »
« Hm, je me le demande. Je n’ai rien vu de tel au troisième étage jusqu’à présent. »
« Hah, hah, ce sont des éléments magiques connus sous le nom de matière démoniaque. On pourrait même dire que c’est une relique de négativité transmise depuis des temps anciens. »
Une voix était entrée dans notre chat à l’improviste, et Eve et moi nous étions regardées avec surprise. Wridra pouvait-elle aussi entrer dans le chat de Eve ? Si elle avait pu s’introduire dans le nôtre, il serait logique qu’elle puisse faire la même chose avec d’autres.
« Je crois que tu as déjà mentionné quelque chose à ce sujet. Tu parlais de quelque chose à propos de l’effondrement de la matière démoniaque dans les temps anciens. »
« Oui, bien qu’il soit rare de le voir ainsi souillé dans un espace aussi clos que celui-ci. Il n’a pas d’effets négatifs immédiats sur le corps humain, mais vous pouvez finir par être autre chose qu’un humain si vous passez une semaine ou deux ici. » Nous avions gémi, et Eve avait craché plusieurs fois de plus. Nous n’avions évidemment pas l’intention de rester ici à long terme, alors c’était probablement sa façon à elle de nous rassurer. Mais il semblerait que Wridra avait du mal à comprendre pourquoi nous trouvions ce truc psychologiquement répugnant.
Cette matière démoniaque semblait s’écouler d’en haut. À en juger par le commentaire précédent de Wridra, cela ne semblait pas être quelque chose qui apparaissait de manière naturelle dans la nature. Alors, qui avait pu recouvrir les murs de cette substance ? Et pourquoi ?
J’avais entendu ce qui ressemblait à des arbres cassés et j’étais revenu à la réalité. L’affrontement entre les lignes de front avait progressé d’un cran. L’équipe du raid avait repoussé les lances qui leur tombaient dessus depuis le haut avec de multiples barrières et les avait détruites en même temps.
« On enfonce le pieu ! Puseri de l’équipe Diamant, chargez au centre ! » Doula avait crié l’ordre au moment où l’infanterie lourde de l’ennemi avait fait un pas en arrière. Notre escouade défensive attendait déjà l’ordre, et elle s’était séparée de chaque côté pour laisser la place aux soldats qui chargeaient depuis le centre.
Vêtue d’une armure crépusculaire, une bouffée d’air glacé avait été expulsée de la bouche de Puseri alors qu’elle menait la charge. Son casque avait ce qui ressemblait à une queue de cheval dépassant de l’arrière, et elle était équipée d’un bouclier intégral et d’une grande lance à la main. Ceux qui avaient vu son comportement habituel avaient été surpris par la vue. D’habitude, elle avait l’air d’une femme noble et magnanime, mais elle avait l’aura d’une guerrière endurcie sur le champ de bataille.
Sa lance pouvait faire naître la peur dans le cœur de n’importe quel homme ou monstre. Sa présence même était différente de celle des autres. On pouvait dire instinctivement que ceux qui se tenaient sur son chemin allaient périr. Il y avait une peur primitive qui venait avec cette connaissance.
Un cheval d’ombre émergea du sol, et lorsque la femme du crépuscule le monta, l’air de mort qui l’entourait devint de plus en plus puissant. L’odeur âcre de cette mort remplissait l’air, et le sabot du cheval allumait des étincelles alors qu’il s’élançait en avant.
Les ennemis avaient empilé deux, puis trois boucliers alors que les galops tonitruants du cheval se rapprochaient. Mais l’effort était comparable à se tenir devant un camion à ordure. La charge faussement puissante avait fait plier les épais boucliers de fer, et du sang noir avait giclé dans l’air.
*Crash !!*
La charge avait violemment brisé les deuxième et troisième couches de défense de l’armée démoniaque, et un groupe voisin de lanceurs de sorts préparant un sort avait également fini par être anéanti. Les ogres se rassemblèrent, arme à la main, pour arrêter le cheval noir, mais d’innombrables flèches volèrent pour leur transpercer la tête.
C’était Cassey Pilaw. C’était un membre de l’équipe Diamant avec des cheveux et des yeux couleur pêche, et des oreilles aux caractéristiques d’une sorte d’espèce variante. Elle s’accrochait au mur avec les griffes de ses pieds, décochant des vagues de flèches de son arc lourd à une vitesse incroyable. C’était presque comme si elle pouvait lire dans le futur. Elles frappaient la tête des monstres comme si elles y étaient attirées par des aimants, éliminant les menaces pour Puseri avant même qu’elles ne puissent l’atteindre.
***
Partie 6
« Nous avons une ouverture ! Les gars, abattez-les ! » Doula n’était pas du genre à manquer une telle opportunité. Elle se fraya un chemin dans la large ouverture avec la redoutable ligne offensive de l’équipe Diamant. Ils se déployèrent de chaque côté, abattant le mur de bouclier immobile depuis leurs flancs.
Nous étions toujours accrochés au mur, regardant le spectacle d’en haut. J’aurais applaudi si une de mes mains n’avait pas été occupée.
« Wôw, c’était vraiment bien fait. Ils ont repoussé ce mur qui semblait presque invincible, » avais-je dit.
« Ouais, même nous ne pouvons pas arrêter Puseri une fois qu’elle est en mode “botteur de fesses”. Attends, est-ce que celui-là se rapproche de Puseri ? Celle avec la fourrure de couleur différente… » Peut-être qu’Eve s’est aussi habituée à évaluer le champ de bataille. Je regardai pour voir de quoi elle parlait et je sus immédiatement que c’était mauvais.
La créature était longiligne, contrairement aux ogres, et elle se tenait courbée vers l’avant en se faufilant sur le champ de bataille comme un assassin. Des piques sortaient de son corps et il coupait les flèches qui se déplaçaient à toute vitesse avec les lames qu’il tenait dans chaque main. Il utilisait également d’autres monstres comme boucliers pour éviter les attaques pendant qu’il avançait, et j’avais réalisé qu’ils étaient plusieurs à se faufiler comme des ombres. Le cheval noir avait fini par être complètement encerclé, tournant sur place en martelant le sol de ses sabots, laissant un espace dégagé au milieu de l’armée ennemie.
« Marie, je vais aider Puseri. Comment se passent tes préparatifs ? »
« J’ai deux structures prêtes à être utilisées. Je pensais en préparer une troisième pendant que nous avions l’avantage, mais il semble que nous n’aurons pas le temps pour cela. Je vais d’abord sécuriser une voie de sortie. » Elle savait ce que j’allais lui demander avant même que je ne le dise. Je laissai échapper un soupir de soulagement en sachant qu’elle restait pondérée, puis sortis mon Astroblade du mur couvert de matière démoniaque.
Mais alors que tous les regards étaient de nouveau tournés vers la bataille, un étrange bruit d’éclaboussure avait attiré mon attention. Il provenait de derrière Marie, du mur noir. Qui aurait pu remarquer ce son, comme un petit poisson qui saute hors de l’eau ?
La silhouette avait émergé du mur, et ses yeux s’étaient progressivement ouverts.
C’était « l’Armement Démoniaque » Kartina. Elle s’était lentement réveillée dans la pièce qui avait été préparée juste pour elle.
§
La matière noire qui dégoulinait le long des murs était connue sous le nom de matière démoniaque.
Il existait depuis les temps anciens et était un vestige de la puissante magie utilisée à l’époque. En raison du soupçon de magie stocké à l’intérieur, il bloquait complètement la détection magique dans la pièce, et il avait donné à Kartina la capacité de voyager librement dans la matière.
L’armure ancienne connue sous le nom de Bras démoniaque conférait à son porteur un pouvoir insondable. Elle augmentait le niveau de Kartina de plus du double du nombre original et la transformait en quelque chose de plus qu’un monstre en fusionnant avec ses os.
En même temps, ses émotions humaines avaient pratiquement disparu. Cependant, son humanité n’était qu’un sous-produit du temps passé dans des terres lointaines après avoir été bannie d’ici. Il ne lui avait pas fallu longtemps pour réaliser qu’elle n’en avait pas besoin.
Après tout, elle pouvait maintenant déchirer l’acier à mains nues et se déplacer aussi vite que la vitesse du son. Tout ce à quoi elle devait penser maintenant était de remplir son devoir.
Sa mission était d’éradiquer les intrus. Comme première étape vers l’accomplissement de son but, elle avait choisi la sorcière spirituelle elfe comme cible.
C’était l’occasion idéale, l’attention de tous étant concentrée sur le champ de bataille.
L’homme dans la salle de contrôle les regardait, pensant qu’ils couraient partout comme des imbéciles alors que toute la bataille avait été mise en place pour servir de distraction. Il avait ensuite donné l’ordre. Il savait déjà le résultat qui allait suivre.
« Maintenant, Kartina. » Kartina avait reçu l’ordre par le biais du chat de l’esprit et sortit du mur. Ses ongles s’étaient transformés en lames acérées, et ses yeux s’étaient illuminés d’une lueur platine.
Elle exécuterait la mission à la perfection. Ce n’était pas qu’elle avait trop confiance en elle, c’était simplement un fait. Peut-être que le destin aurait été une meilleure façon de le décrire.
Un bruit tel un poisson qui éclaboussait de l’eau était peut-être trop subtil pour marquer la fin d’une vie. En émergeant du mur, Kartina avait immédiatement accéléré à une vitesse folle. Sa cible ne l’aurait même pas entendu arriver.
*Thud, slam !* La seconde suivante, un impact puissant avait traversé le corps de Kartina.
Elle n’aurait plus dû ressentir de douleur, mais le coup avait été si fort que cela lui avait fait cracher de la matière démoniaque par la bouche. Tout ce dont elle se souvenait, c’est que son esprit était devenu complètement vide.
Une rafale passa, et les cheveux blancs de l’elfe dansèrent dans le vent. Elle était entièrement concentrée sur la canalisation de sa magie il y a un instant, mais elle ouvrit ses yeux d’améthystes et se retourna. Là, Kartina rampait, les mains sur le sol.
La cible de Kartina était juste là, devant elle. Mais elle ne pouvait pas bouger d’un pouce. Avec son domaine perceptuel étendu à sa limite, elle avait réalisé ce qui s’était passé.
Cette femme aux cheveux noirs l’avait frappée.
Cette prise de conscience avait rendu sa vision floue. Comment cette femme avait-elle pu la toucher alors qu’elle se déplaçait si rapidement ? En fait, son bras aurait dû être emporté par le vent juste à cause de l’impact.
Mais la femme aux cheveux noirs s’était contentée de sourire sans se soucier de rien. Sa beauté avait jeté en réponse un froid de Kartina. Comment pouvait-elle sourire comme si elle saluait simplement un invité ? La femme avait entrouvert les lèvres et avait fait un commentaire absurde.
« As-tu déjà entendu cette phrase ? “Celui qui gouverne avec son poing gauche gouverne le monde”. »
« Huh ? »
Cela n’avait vraiment aucun sens. D’après les souvenirs laissés par ses signaux de perception, cette femme l’avait frappée avec son poing droit. Plus important encore, comment cela aurait-il pu être un coup de poing ? Elle s’était regardée et avait constaté que du liquide noir s’échappait des fissures de ses bras démoniaques. Il était difficile de croire que de tels dommages aient pu être infligés par un simple poing.
Kartina ressentait une peur primitive au son du vent soufflant à proximité. Elle avait tressailli, puis s’était redressée en position semi-assise pour trouver la beauté aux cheveux noirs qui balançait ses poings à gauche et à droite, son sourire s’élargissant.
« J’ai été très intéressée par les soi-disant “arts martiaux étrangers” ces derniers temps. Hm, tu feras très bien l’affaire comme mannequin d’entraînement. Pas trop dur, pas trop mou… Parfait pour les coups de poing. Je me suis aussi sentie un peu stressée ces derniers temps. Je suppose que ce sera une bonne occasion de remplir mon rôle de tank. »
Mais c’est loin d’être ce que ferait un tank. Aucun tank n’étendrait ses bras comme des fouets, frappant sa cible apparemment hors de portée avec une force brutale.
Kartina ne pouvait en croire ses yeux alors que son armure s’effritait sous l’impact de chaque coup de poing lourd sur ses côtés. Des alarmes se déclenchaient dans son esprit comme des cris d’agonie, et elle titubait en arrière. Son sens aigu du devoir l’empêchait de fuir. De plus, elle ne pouvait pas laisser ce rituel horrifiant qu’elle avait enduré avoir été fait pour rien. Mais alors qu’un poing s’enfonçait dans son visage et que du sang jaillissait de son nez, elle eut l’impression qu’elle allait se mettre à transpirer malgré le fait que ses glandes sudoripares ne fonctionnaient plus.
C’est quoi cette femme ? Pour qui se prend-elle, à se battre contre moi sans arme comme ça ! ?
Kartina endura la rafale de coups et leva sa garde pour réduire la distance entre elle et son adversaire. Normalement, elle aurait dû bondir sur la femme en dehors de sa zone d’attaque et la trancher avec ses griffes acérées.
Elle aurait dû avoir un avantage massif en termes de puissance. Alors pourquoi était-elle la seule à se faire enfoncer le crâne par ces poings tels des béliers ? Pourquoi sa tête était-elle secouée par ces coups de poing incessants ?
« Ah, celui-là a bien frappé. On dirait qu’elle t’a étourdie. »
Kartina serra les dents lorsque la femme elfe reporta son attention sur le champ de bataille, comme si la femme aux cheveux noirs avait réglé la situation. Ce regard sur son visage disait qu’elle n’était pas le moins du monde inquiète pour sa sécurité, et la vision de Kartina devint rouge de rage.
Il en va de même pour la femme blonde aux yeux couverts. Non seulement elle n’avait pas peur, mais elle avait sorti une sorte de livre d’images et commençait à dessiner avec un stylo. Cependant, Kartina avait un sentiment inexplicablement inquiétant à ce sujet. Tout comme lorsqu’elle avait obtenu le Bras du Démon, elle avait peur qu’on lui impose un changement permanent.
Bien qu’elle ait perdu la capacité de transpirer, des sueurs froides jaillissaient des pores de Kartina, qui hurlait de terreur.
*Boooooom !*
Si on lui avait demandé quel était le pire jour de sa vie, elle aurait absolument répondu aujourd’hui. C’était vraiment horrible à tous points de vue. Plus elle luttait, plus elle endurait de blessures fatales, et les fissures avaient finalement atteint son cœur. Ses yeux étaient devenus d’un rouge flamboyant alors qu’elle libérait toute sa puissance, mais c’était inutile.
À quel niveau est cette femme ? Et pourquoi n’utilises-tu pas ton crochet gauche ? Il est censé dominer le monde, non ? Quand vas-tu l’utiliser !? Juste au moment où sa confusion atteignait son paroxysme, une voix avait parlé dans son esprit à travers le Chat.
« C’est assez. Bats en retraite, Kartina. Répare tes dégâts. Cette femme était insupportable. » Même si Kartina avait bondi pour fuir, elle avait simplement reporté son attention sur la bataille. Le « Armement démoniaque » Kartina avait disparu dans le mur couvert de matière démoniaque, sa rage meurtrière couvant en elle.
À ce moment-là, un grand changement se produisait sur le champ de bataille.
***
Partie 7
« G… ggr… GROAAAAAARRR ! »
Le cri soudain, qui faisait trembler le sol, provenait de Borlax Doudou, qui attendait silencieusement au centre jusqu’à présent. Quelque chose de sombre et de pointu avait surgi et avait transpercé la créature par le bas, drainant le sang dans le sol.
Le monstre avait griffé sa tête et s’était tordu de douleur. Des fissures s’étaient formées à l’extrémité de son bras droit, puis ils avaient éclaté à partir du coude. J’avais regardé avec de grands yeux le sang magmatique qui giclait partout, incinérant les ogres qui étaient près de ses pieds.
« On dirait qu’il se fait vider de sa force vitale, » avais-je marmonné en observant de loin, mais je ne pouvais pas rester inactif longtemps. Eh bien, ce n’était pas tout à fait vrai. Les monstres de type assassin qui se trouvaient devant moi étaient probablement de niveau 75 environ, et j’avais déjà mémorisé la plupart de leurs schémas d’attaque. Je pouvais automatiquement esquiver la majorité de leurs attaques grâce à mes compétences, j’avais donc décidé de surveiller le boss intermédiaire tout en m’occupant des assassins qui en avaient après Puseri.
Les deux lames tournaient en rond, mais elles ne servaient que de distraction, alors je n’y avais pas prêté attention. Le monstre portait un capuchon sur ses yeux et ses dents sales étaient visibles. Avec ses longs bras et le maniement habile de ses sabres, il me faudrait beaucoup de temps pour le vaincre.
« Non pas que je t’aie déjà battu ! » J’avais balancé ma lame vers l’épaule du monstre, et l’assassin avait tenté de la bloquer avec sa propre arme. L’adversaire était à peu près du même niveau que moi, mais mon arme était bien plus puissante. Mon épée s’était enfoncée dans l’épaule de la créature, qui avait hurlé de douleur.
« Héhé, je vais prendre ça ! »
S’il te plaît, aide-toi. Eve avait bondi derrière moi, avait glissé sur mon épée et avait frappé avec sa dague. Elle avait tranché le cou du monstre, projetant du sang noir dans l’air.
« Très bien ! Ça fait un moment que je n’ai pas atteint le niveau supérieur ! »
« Alors tu peux avoir celui-là aussi. »
« Vraiment ? Es-tu sûr ? Je me sens un peu mal, comme si je t’avais fait abandonner. Mais si tu insistes… »
Le dernier assassin avait déjà les tendons coupés, et il transpirait abondamment en imaginant son terrible destin. Mais malheureusement, les prédictions du monstre et les miennes s’étaient révélées fausses. Un cheval noir était soudainement apparu sur le flanc de l’assassin et avait piétiné sa tête, l’écrasant comme un melon. Tout s’était passé en un instant, et Eve était restée figée sur place.
« Heeey ! »
« Il n’y a pas besoin d’être si dramatique, Eve. Nous sommes dans le même groupe, donc notre expérience est partagée équitablement. » Le cavalier ouvrit l’avant de son casque, révélant le visage trempé de sueur de Puseri. Il semblait qu’elle avait réussi à percer les monstres qui l’avaient entourée. Soulagé, j’avais regardé au loin pour voir Gaston couper en deux les deux ennemis restants. Ce vieil homme était lui-même une bête de niveau 120, après tout. Cependant, il ne semblait même pas proche de sa limite jusqu’à présent.
« Bonjour, Puseri. J’ai pu éviter d’être encerclé grâce à toi qui a fait des ravages sur ton cheval. »
« Non, c’est moi qui ai été sauvée par vous. C’était beaucoup trop pour être considéré comme un remboursement d’une nuit d’hébergement et d’un repas. Oh, ce cadavre… » Puseri avait dit du haut de son cheval, et j’avais suivi son regard vers le cadavre et j’avais été surpris.
Le cadavre du monstre s’était progressivement rétréci tandis qu’un fluide noir en suintait.
« Attends, est-ce qu’ils pourraient être... »
« Les rebelles dont on a entendu parler dans les rapports ? » termina Eve. Ces monstres pourraient-ils être ce qu’il était advenu de ces rebelles ? Si le fluide qui s’échappait d’eux était de la matière démoniaque, leurs êtres mêmes auraient pu être transformés comme Wridra l’avait mentionné.
Les changements qui s’opéraient sur le champ de bataille ne faisaient que commencer.
« Grrrooooooaaarrr ! !! » Borlax Doudou poussa un rugissement titanesque, brisant le sol sous ses pieds d’un seul coup de pied.
Sur sa tête se tenait une silhouette inconnue. Vêtue d’une armure noire, la grande silhouette du monstre avait un air féminin. Les deux yeux du monstre brillaient d’une flamme infernale et meurtrière. Un tube noir reliait les deux monstres entre eux. Il me semblait que le monstre féminin absorbait la force vitale de Borlax Doudou pour se réparer.
Puis un autre changement inattendu s’était produit.
On pouvait entendre des bruits humides et grotesques alors que quelque chose sortait du sol. C’était le monstre assassin de tout à l’heure. Nous avions tous les trois regardé, abasourdis. Mais ça ne s’était pas arrêté là. Les cadavres éparpillés sur le champ de bataille avaient commencé à se lever, un par un. Nous les avions regardés sans rien dire, alors qu’ils se déplaçaient de façon anormale pour retourner sur le champ de bataille, malgré le fait qu’il manquait des membres à beaucoup d’entre eux.
En regardant de plus près, j’avais remarqué que la matière démoniaque qui s’écoulait des murs se répandait sur le sol. À en juger par la façon dont elle s’écoulait dans les cadavres, il semblait que la matière était ce qui contrôlait les cadavres. Je me tenais là, en état de choc, quand j’avais entendu la voix de Wridra dans mon esprit.
« J’ai entendu dire qu’ils l’appellent “Armement démoniaque” Kartina. C’est elle qui dirige les monstres. Je vais aller rendre visite à celui qui a mis en place ce spectacle de mauvais goût. Je te laisse le reste, Shirley. » Shirley pouvait-elle vraiment garder Marie à la place de Wridra ? J’étais un peu surpris que l’Arkdragon lui confie cette tâche. De plus, je m’étais demandé ce qu’elle voulait dire par « celui qui a mis en place ce spectacle de mauvais goût ».
Alors que je restais perplexe, un ordre avait été crié à travers le champ.
« Toutes les unités ! Retraite ! Courez vers le point de défense ! » Je n’avais pas eu le temps de demander des détails à Wridra au milieu de cette retraite. Nous avions sprinté à travers le champ de bataille en même temps que Puseri et son cheval, nous dirigeant vers le périmètre défensif que Marie avait mis en place.
Si ces rebelles s’étaient complètement transformés en monstres, peut-être que cette femme Kartina aussi… Je m’étais retourné avec cette pensée en tête, puis je l’avais vue déployer ses ailes noires.
Qu’est-ce qui a pu se passer pour que ses yeux brûlent de tant de haine ?
§
« Impossible ! Nous les surpassons de loin en niveau ! » Des cris de colère s’étaient fait entendre dans la pièce sombre, suivis du bruit d’un poing qui claquait contre un bureau.
L’homme visiblement irrité se frottait la barbe, puis expira lentement pour tenter de se calmer.
« Oui, il est temps d’adopter une approche différente. Au lieu d’attaquer l’elfe, je vais les forcer à battre en retraite en éliminant la moitié de leurs soldats. » Cela signifiait qu’il devait donner les ordres et créer une nouvelle armée. Il ne pouvait pas se permettre de paniquer. Il avait du mal à croire ce qu’il avait vu dans les images tout à l’heure, mais il était temps de changer de direction pour adopter une méthode qui était sûre de réussir. L’homme marmonna comme pour se rassurer.
Peu importe le nombre de fois qu’il l’avait repassé dans sa tête, il ne pouvait toujours pas croire ce qu’il avait vu dans la vidéo.
Il avait supposé que les intrus seraient anéantis par les anciennes armes démoniaques qu’il avait obtenues. C’était la raison pour laquelle il avait reconstruit le hall et les monstres et avait tendu un piège à ses ennemis. Mais les résultats avaient été complètement différents de ses attentes. Kartina n’avait fini par subir que de lourds dégâts de coups de poing et avait été obligée de battre en retraite. Il lui avait ordonné de réparer rapidement les dégâts, mais il était peu probable que son noyau soit entièrement réparé.
Qui était cette femme aux cheveux noirs sur la vidéo ? Un sentiment d’effroi s’était insinué en lui lorsqu’il avait vu qu’elle le fixait directement.
« Elle a dû remarquer l’outil magique de surveillance. Hmph. Elle est vive, je lui accorde ça. » Elle était belle et séduisante aussi. Étrangement, il ne pouvait pas détacher ses yeux d’elle. Mais quel était ce geste qu’elle faisait ? La femme avait levé sa main en l’air, comme si elle l’atteignait directement.
Il s’était frotté les sourcils en regardant fixement.
Ce n’est pas qu’elle lui faisait signe ou qu’elle le provoquait. Le bout de son doigt était apparu flou sur la vidéo, il n’était pas net.
Les doigts de l’homme étaient encore sur ses sourcils quand ils s’étaient figés sur place. Il y avait quelque chose d’anormal dans la vidéo. On aurait dit qu’une tache de ténèbres s’échappait du doigt de la femme et se répandait sur le moniteur.
« Qu’est-ce que… ? » L’homme avait touché le terminal sans raison particulière. Ses sourcils s’étaient froncés lorsqu’il avait réalisé qu’il était visqueux au toucher.
« Je ne me souvenais pas que c’était aussi sale… Attends, cette odeur… » L’odeur lui irritait le nez. Elle sentait le goudron produit par la combustion du charbon de bois.
Les yeux de l’homme s’étaient soudainement ouverts en grand et il avait crié.
« M-Matière démoniaque ! !! » Puis, elle était apparue. Une masse de matière démoniaque de la même forme que le doigt de la femme était sortit de l’écran.
L’homme se leva instinctivement, renversant sa chaise au passage. Il ravala son cri de peur, puis dégaina rapidement son épée et trancha sa cible en un seul mouvement.
*Cling !* Le son de l’acier brisé résonna fort et clair. C’était le son que l’on entendrait si quelqu’un avait saisi la lame entre ses doigts sans bouger d’un pouce. Un choc avait parcouru les mains de l’homme, comme s’il avait balancé son épée sur un rocher immobile. Son épée avait été brisée en deux.
Des bras étaient sortis de l’écran et s’étaient agrippés à l’un ou l’autre de ses côtés, puis un corps était sorti de l’écran. C’était comme si quelque chose était né du goudron. Même après avoir été témoin d’un événement aussi incroyable, il ne pouvait détacher son regard de la femme.
« Sorcière mystérieuse. Quelle sorte de bête es-tu ? »
« Oh ? Mais je te poserais la même question. Tu es celui qui a transformé tes alliés en monstres. » Elle s’était assise sur la table. Bien sûr, c’était la femme aux cheveux noirs de tout à l’heure. La matière démoniaque sur tout son corps avait glissé, et elle ressemblait exactement à ce qu’elle était sur la vidéo d’avant.
L’homme avait une arme de rechange sur lui, mais il avait pensé qu’elle serait inutile. En la voyant face à face comme ça, il avait réalisé que cette femme était d’un niveau complètement différent.
Elle souriait de manière envoûtante, mais la glace dans ses yeux lui donnait un frisson.
« Je vois que tu es un descendant des gardiens d’autrefois, mais oh, comme je te méprise. Tu as damné tes propres camarades et les as transformés en monstres alors que tu es assis ici en sécurité, survivant sans te soucier du monde. »
« Non, je n’ai pas l’intention de faire quelque chose d’aussi insensé. Il serait inutile que je survive seul. » L’homme était légèrement secoué par la mention des gardiens, mais il fouilla dans sa poche intérieure. Ce qu’il en avait sorti n’était pas une arme, mais une seringue. Elle était remplie d’une sorte de fluide argenté et lumineux, mais l’Arkdragon était capable d’identifier son contenu.
***
Partie 8
C’était de la matière démoniaque hautement purifiée.
Elle était probablement extraite d’un monstre de classe démoniaque, et une seule goutte suffisait à tuer un humain moyen. Son âme et sa conscience seraient englouties, le transformant en un monstre sauvage et incontrôlable.
C’était bien plus dangereux que la substance qui avait été injectée à Kartina, et l’homme aurait dû périr en se l’injectant dans le cou, mais il l’avait supporté avec sa volonté d’acier. Il aurait été beaucoup plus facile de céder à la mort.
Il déchira ses vêtements alors que son corps gonflait, mais il réussit à le contrôler tout en libérant la puissance démoniaque à son plein potentiel. Si l’époque avait été différente, il aurait gravé son nom dans l’histoire.
Ses bras brillaient, et ils craquèrent le sol avec un lourd bruit sourd. Wridra regarda avec pitié les innombrables queues qui sortaient du dos de l’homme et qui transperçaient les terminaux de la pièce.
Il n’y avait pas de retour en arrière pour lui maintenant. Cela s’appliquait aussi à cette femme Kartina.
Wridra s’était assise et avait attendu que l’homme maîtrise parfaitement sa transformation, puis elle avait discrètement entrouvert ses lèvres cramoisies.
« Quel est ton nom, descendant de gardiens ? »
« Je n’ai pas besoin de transmettre mon nom. Je ne suis que le vestige d’un homme qui rêvait de jours anciens. » Il fit craquer son cou, et le combat commença.
Le pied de la femme avait décollé du sol.
Sa robe fortement blindée avait été mise en lambeaux, révélant un éclat de peau magnifique sur ses cuisses. Wridra tenait l’ourlet de sa robe pour le maintenir à l’écart alors qu’elle passait la porte et sortait.
Il aurait été irrespectueux de se retourner. L’homme avait mis son corps et son âme dans la bataille, et elle n’avait eu à contempler son visage mourant qu’une seule fois.
« Le vestige d’un homme qui rêvait des jours anciens… Alors je suppose qu’il ne connaît pas l’Arkdragon qui est resté neutre à travers ces temps. » Il y avait une pointe de tristesse dans sa voix, mais elle s’estompa sans atteindre les oreilles de quiconque.
Un grand trou avait été laissé dans la pièce, et il ne restait que la moitié supérieure de l’homme près de la fenêtre.
§
*Fsssh… *
Le sol gronda dans une large zone tandis que la structure tridimensionnelle de Mariabelle se construisait. La forteresse en forme de L qu’elle avait positionnée dans le coin de la pièce tentait de s’étendre sur environ trois étages.
Au même moment, des obstacles de forme carrée s’élevaient du sol tout en laissant un chemin dégagé le long de l’itinéraire de fuite de l’équipe de raid. Ces obstacles mesuraient environ un mètre de haut et ne semblaient pas très efficaces pour arrêter les poursuivants. J’avais regardé tout cela se dérouler pendant que je courais.
Il aurait été beaucoup plus facile de se téléporter au lieu de courir, mais avec Puseri sur son cheval et Eve en train de sprinter, je n’avais pas pu me résoudre à dire « À plus ! » et de les laisser derrière moi. C’était probablement le salarié en moi qui parlait. Pourtant, je n’avais aucun problème à rentrer chez moi avant mes collègues après les heures de travail.
« C’est donc ce que vous vouliez dire par sécuriser une issue de secours plus tôt. Aurais-je raison de supposer qu’elle explose aussi ? »
« Bien sûr. Héhé, j’ai utilisé la Double Incantation, et sa puissance est encore amplifiée en les piégeant entre les deux. J’utilise aussi des lézards de feu grincheux, alors quoi que tu fasses, assure-toi de ne pas leur donner de coups de pied. » Elle n’avait pas eu besoin de me le dire deux fois. Ça devait être quelque chose d’autre si Marie s’en vantait.
Je m’étais retourné pour voir que l’ennemi s’était divisé en deux groupes. L’un courait à toute vitesse pour poursuivre le groupe de raid qui battait en retraite, tandis que l’autre se mettait lentement en formation défensive.
« Huh, je pensais qu’ils seraient trop en colère pour se soucier de la défense. » De grands boucliers ombrageux furent créés à partir de la matière démoniaque, et les ogres massifs les ramassèrent un par un. Il semblerait qu’ils se soient aussi réapprovisionnés avec des armes comme des lances.
J’avais pensé qu’ils nous attaqueraient de plein fouet, mais ils étaient étonnamment calmes. Considérant que l’ennemi renforçait ses défenses, peut-être que ce monstre connut sous le nom de l’« Armement démoniaque » Kartina avait encore besoin de temps pour récupérer. Je m’étais demandé si les fissures sur tout son corps avaient été infligées par notre tank Wridra.
Ces pensées occupaient mon esprit tandis que je continuais à courir vers la sortie qui s’ouvrait devant moi.
Lorsque la horde d’ogres était entrée dans le périmètre que Mariabelle avait mis en place, les choses étaient devenues… désordonnées. Nous les avions appâtés à mi-chemin quand une tempête de feu avait éclaté pour les éliminer tous en même temps.
L’impact et les bruits assourdissants des explosions derrière nous nous avaient plongés dans une quasi-panique.
« Ahhh ! Puseri, Puseri ! Laisse-moi aussi venir sur ton cheval ! Non, non, non, ne me laisse pas ! » avait crié Eve.
« Whoa, c’est exactement comme un film de guerre ! Peut-être que les regarder avec elle n’était pas une si bonne idée ! » Le souffle de chaleur derrière moi m’avait brûlé la peau, mais je n’avais pas l’intention de me retourner. Je ne voyais pas les monstres se faire prendre dans l’explosion, ce qui rendait leurs cris d’autant plus terrifiants que mon esprit remplissait les blancs.
Nos propres alliés couraient aussi en criant, la tête dans les mains. C’est peut-être le moment le plus effrayant de ce combat jusqu’à présent.
Puseri, Eve et moi avions hurlé à pleins poumons en fonçant dans la structure tridimensionnelle que Marie avait construite. Heureusement, personne de notre côté n’avait été blessé.
§
Les talons de Doula claquent contre le sol alors qu’elle avançait à grandes enjambées dans le couloir sombre et étroit.
Ses cheveux roux s’envolaient comme du feu, et ceux qui se reposaient lui cédèrent rapidement le passage en voyant l’intensité sur son visage.
La structure de Mariabelle était un bâtiment massif de trois étages. Pourtant, il y avait près de cinquante personnes à l’intérieur en même temps, et avec certains d’entre eux tirant des flèches et de la magie sur les ennemis, c’était assez agité, comme on peut l’imaginer.
Doula n’avait pas adressé un mot d’encouragement aux hommes sur son passage. En fait, elle n’avait même pas semblé les remarquer et avait continué à marcher avec une expression austère. Ceux qui étaient en pause ne pouvaient s’empêcher de fixer son apparence intimidante. Ils se demandaient pourquoi elle arborait une expression si sévère alors qu’ils n’avaient subi aucune perte jusqu’à présent.
En effet, les pertes pour cette bataille, et au troisième étage en général, avaient atteint un niveau record. L’équipe de raid composée de quatre équipes différentes était puissante, mais le faible nombre de victimes était la partie la plus impressionnante de toute cette épreuve.
L’une des raisons en était le changement de l’équipe Andalousite de Doula. Leur équipe avait presque été anéantie dans le passé. Ils avaient appris de cette expérience et entraîné leurs pouvoirs sacrés pour se préparer à affronter les monstres à l’avenir. Ils protégeaient leurs alliés à l’aide de multiples barrières et soignaient les blessés pour limiter au maximum les pertes. Doula s’était entraînée et avait appris à diriger efficacement ses troupes, et les choses se mettaient enfin en place pendant leur séjour au troisième étage.
Puis c’était arrivé.
Ils étaient arrivés dans une pièce un peu spacieuse, et la rage de Doula atteignit un point d’ébullition lorsqu’elle vit ce qui l’attendait. Ses cheveux roux se hérissaient faiblement, et ses yeux écarquillés scrutaient la pièce.
Elle avait dégluti de manière audible, incapable de comprendre ce qu’elle voyait.
Il y avait environ cinq blessés sur le sol. Leurs coéquipiers essayaient désespérément de soigner leurs blessures, mais les gémissements agonisants des blessés remplissaient la pièce. Du sang noir coulait de leurs blessures, et même leurs veines étaient noires et saillantes sur leur peau, comme si l’infection s’aggravait sous ses yeux.
« Capitaine ! Ce n’est pas bon, la blessure ne se referme pas… » Ceux qui étaient dans un état critique se débattaient, et il était clair qu’ils n’avaient plus beaucoup de temps. Ils pourraient très bien se retrouver avec plus d’une victime. Zera, qui avait parlé aux autres membres de l’équipe jusqu’à présent, fit signe à Doula de le rejoindre.
« Regarde, ce truc noir est même dans leurs yeux. Si nous ne faisons pas quelque chose, ils pourraient finir par se transformer en monstres. »
« Tenez-les pour moi, je vais canaliser ma force vitale en eux pour qu’ils puissent se battre. »
C’était un puissant poison… Non, quelque chose de pire. La seule explication à laquelle elle pouvait penser était qu’ils avaient été poignardés avec ces lances noires pendant l’affrontement de tout à l’heure. Elle avait eu un mauvais pressentiment à leur sujet, mais elle n’avait pas réalisé à quel point ces armes étaient dangereuses.
Se sentant frustrée et en colère, elle posa une main sur la poitrine musclée d’un homme blessé. L’homme avait saisi son poignet avec sa propre main pâle.
« Non… S’il te plaît, ne le fais pas. C’est trop tard pour moi. Tu ne peux pas te permettre de gaspiller votre énergie sur moi alors que la bataille n’est pas terminée. »
« Sois tranquille et dors, Loki. Je ne te laisserai pas te transformer en monstre. »
« Alors, je te demande de me couper le cou avec ton épée. S’il te plaît… » La colère de Doula augmentait encore.
Ayant été atteinte d’une maladie mortelle, la suggestion de Loki était sensée. Une femme sainte ne pouvait pas faire grand-chose pour combattre des maladies inconnues. L’homme aurait probablement connu une fin terrible avant d’avoir une chance de guérir.
Mais même si son corps de guerrier était souillé, son esprit brûlant le poussait à continuer à se battre. Ainsi, Doula avait laissé sa frustration prendre le dessus et s’était déchaînée en remarquant les personnes qui étaient entrées dans la pièce.
« Mariabelle, Shirley, reculez ! Cela pourrait être contagieux ! » La jeune elfe était visiblement secouée et serra instinctivement la main de l’autre femme. La voix de Doula se répercutait dans l’espace confiné, la rendant d’autant plus intimidante. Shirley semblait troublée et regardait de part et d’autre entre les deux autres. Elle avait ensuite approché ses lèvres de l’oreille de Marie et lui avait murmuré quelque chose.
Bien qu’elle soit clairement effrayée, Marie avait regardé Doula avec ses yeux violets.
« Cette maladie est censée être causée par une chose appelée matière démoniaque présente dans le corps de la victime. Si vous essayez de les guérir, cela affectera la matière démoniaque et accélérera leur infestation. »
« Ah ! ? Tout le monde, arrêtez de vous soigner ! Comment le sais-tu ? » Mariabelle et Shirley se regardèrent, comme si elles ne savaient pas trop comment répondre. Après qu’un moment se soit écoulé, la jeune fille elfe avait hoché la tête. C’était comme si elle disait à l’autre fille qu’elle était d’accord pour révéler une sorte de secret.
Et donc, Shirley s’était lentement avancée.
Shirley était un être ancien qui connaissait très bien les démons. Lorsqu’elle avait retiré son bandeau brodé, les soldats qui s’étaient préparés à accepter leur mort l’avaient regardée, les yeux écarquillés.
Shirley avait un peu changé d’apparence. Le contour de son corps était légèrement flou, et ses yeux bleus ciel encadrés de longs cils étaient maintenant complètement dénudés. Doula s’était écartée de son chemin sans réfléchir, et Shirley avait touché la blessure du soldat tombé au combat du bout de son doigt pâle.
***
Partie 9
Mariabelle avait entendu dire que le rôle de Shirley était de faciliter le cycle de la vie et de la mort. C’est pourquoi le hall du deuxième étage s’était transformé en un paysage verdoyant. Mais c’est à ce moment que Marie avait vraiment compris ce que cela signifiait. Elle avait regardé, choquée, Shirley presser ses lèvres légèrement colorées contre la blessure sombre et souillée.
Du sang coulait de la blessure, mais Shirley ne semblait pas s’en soucier. La matière démoniaque, source du sang contaminé, a rapidement coulé dans la bouche de Shirley comme si elle était purifiée. Elle l’avait englouti dans sa gorge pâle, ne laissant qu’une plaie rouge et fraîche.
« Comment est-ce possible… ! ? Elle n’a même pas utilisé le pouvoir des dieux ! »
Ce n’était pas tout à fait exact. Shirley était elle-même proche d’une déesse. Ayant été libérée de l’ancien labyrinthe qui la liait, on pouvait au moins dire qu’elle était un être opposé aux démons maintenant. Pourtant, personne ici ne semblait s’en rendre compte.
Tout le monde, y compris Doula, avait regardé avec incrédulité le spectacle fantastique qui s’offrait à eux. Mais l’homme guéri avait ressenti le plus intensément la puissance de sa présence, et des larmes avaient coulé sur son visage alors qu’il était submergé par une émotion inexplicable.
Qu’est-ce que c’est ? pensa-t-il.
Il n’arrivait pas à mettre le doigt sur le sentiment qui continuait à monter en lui.
La sensation de ses lèvres qui se pressaient contre sa poitrine sans se soucier d’être souillées était une sensation qu’il n’oublierait jamais. C’était chaud comme la lumière du soleil, et il avait l’impression qu’une force vitale dorée coulait dans son corps. Il y avait une sensation rafraîchissante, comme regarder le ciel d’Arilai à l’ombre d’un arbre. Peut-être était-ce ses yeux bleu ciel.
La sensation s’était enfoncée profondément dans la poitrine du soldat, et elle avait murmuré « Bon rétablissement » après avoir drainé les impuretés que l’on croyait autrefois incurables. Il voulait apprendre à la connaître. Il voulait être proche d’elle. Si possible, il voulait lui promettre sa fidélité et la servir avec une loyauté sans faille comme si elle était une reine.
« Lady… Shirley… » Les sourcils de Shirley s’étaient froncés pour former une expression adorable et confuse, mais il y avait beaucoup d’autres personnes gravement malades à soigner. Le soldat avait essayé de donner à Shirley un baiser respectueux sur le dos de sa main, mais Doula l’avait arrêté d’un coup de poing.
Cinq vies avaient été sauvées ce jour-là. Les hommes qui avaient été sauvés commenceront plus tard l’étrange coutume de servir Shirley comme ses gardes personnels, mais cela n’arrivera qu’à une date ultérieure.
§
Je n’avais pas pu m’empêcher de laisser échapper un « Whoa » de surprise. La structure que Marie avait réalisée cette fois-ci était à une échelle beaucoup plus grande que d’habitude. Il semblerait que le temps supplémentaire qu’elle y avait consacré ait porté ses fruits. Il y avait maintenant une structure tridimensionnelle en forme de L dans la pièce, et un escalier en pierre avait été placé à l’intérieur, juste à côté de l’entrée.
Le premier étage servait simplement de couche de protection. Comme pour les châteaux, il était beaucoup plus efficace de défendre un endroit depuis une position plus élevée. Marie avait dû décider de cette conception après avoir analysé la taille et les caractéristiques de l’ennemi.
Le plafond était bas, et il était suffisamment étroit pour que nous devions éviter de nous heurter aux autres membres lorsque plusieurs personnes étaient à l’intérieur. Elle avait clairement été conçue dans un souci de durabilité plutôt que d’habitabilité.
« Il y a trois étages de ça ? Tu t’améliores vraiment de jour en jour, Marie. »
« Je suis impressionnée qu’elle ait réussi à fabriquer un objet de cette taille toute seule. Nos sorciers ont encore du mal à comprendre comment elle peut posséder autant d’énergie magique, » déclara Puseri en enlevant son casque et en se retournant. Ses cheveux crépusculaires tombaient en cascade, quelques perles de sueur scintillaient sur son visage. Elle les essuya avec sa main, puis sourit.
Je ne pouvais pas vraiment lui dire que Marie était soutenue par un Arkdragon qui pouvait générer de la magie juste en respirant. Mais ce qu’il y avait de bien avec Marie, c’est qu’elle essayait toujours d’utiliser sa tête pour trouver les solutions les plus efficaces sans se fier uniquement aux prouesses magiques.
« Cependant, la capacité de se reposer en territoire ennemi est extrêmement utile. L’équipe Diamant serait heureuse d’accueillir une autre sorcière dans ses rangs. » Il semblait que son recrutement passionné était toujours en cours. Je voulais juste m’amuser sans que des responsabilités me pèsent, donc je n’avais pas l’intention de rejoindre une autre équipe. D’ailleurs, si nous devions fusionner les équipes, nous devrions aussi changer notre résidence à Arilai. Mais, en y réfléchissant, je ne serais pas si opposé à déménager là-bas maintenant, comparé à ce que j’avais ressenti auparavant.
J’avais réfléchi à la raison de tout cela alors que je montais les escaliers.
J’avais compris que c’était parce que j’avais beaucoup plus d’amis maintenant qu’il y a quelques mois. J’avais voyagé seul pendant près de vingt ans, mais ma vie avait radicalement changé depuis ma rencontre avec Marie. J’étais proche de beaucoup plus de personnes dans les deux mondes, et mon environnement changeait à un rythme rapide. Étrangement, je trouvais cela plutôt réconfortant. Mais ce n’était pas vraiment le meilleur moment pour y penser, alors j’avais décidé de garder cela pour plus tard.
Je lui avais dit que nous allions réfléchir à son offre, et Puseri et Eve avaient fait un signe d’au revoir et elles étaient parties. L’équipe Diamant avait alors remarqué le retour des deux et elles avaient pris Puseri dans leur bras en disant des choses comme « Lady Puseri ! » et « C’était une belle charge ! »
Je m’étais inquiété pour elles avant, mais elles semblaient bien s’entendre maintenant. C’était une sorte de soulagement de le voir.
J’avais commencé à monter les escaliers après Puseri et les autres, puis j’avais remarqué une fille qui descendait les escaliers une marche à la fois. Elle tenait l’ourlet de sa robe et apparaissait lentement…
« Ka-zu-hi-ro-san. » La voix adorable venait de Mariabelle, qui tenait une bouteille en plastique. Shirley était aussi avec elle.
Marie avait sauté de la dernière marche, et l’adorable fille elfe avait rempli ma vision.
J’avais instinctivement attrapé la boisson qu’elle m’avait passée, remarquant à quel point elle était froide. J’avais ensuite remarqué la méduse qui flottait à côté d’elle.
« On dirait que l’esprit des glaces fait aussi son travail dans ce monde. Je ne pensais pas que j’aurais un jour la chance d’avoir du jus de fruits frais dans un endroit comme celui-ci. En fait, je pense que notre très chère Mme Elf mérite le plus de crédit. »
« Oh, je ne sais pas. J’attendais juste ici pendant que tu faisais tout le travail. J’avais peur que tous les ennemis soient vaincus avant que cette forteresse ne serve à quelque chose. » J’étais aussi inquiet à ce sujet. Mais, même si cela s’était produit, il aurait été amusant de voir Marie gonfler ses joues et bouder.
J’avais enlevé le bouchon de la bouteille et versé le liquide clair dans ma gorge. Il avait un léger goût de pêche, et j’avais plissé les yeux devant sa douceur modérée. Il semblerait que ma force de préhension ait été affaiblie par cette courte bataille, aussi j’étais reconnaissant de pouvoir me reposer ici.
« Ouf, froid et savoureux. Mais franchement, je dois travailler un peu sur mon endurance. »
« Hm ? Ne t’en rends-tu compte que maintenant ? » Je m’étais tourné vers la source de la voix bourrue pour voir un vieil homme aux cheveux grisonnants descendre les escaliers. Marie s’était aussi retournée, puis s’était cachée derrière moi. Elle n’aurait pas eu de problème avec Gaston en temps normal, mais une aura meurtrière planait encore sur lui à cause de la bagarre d’il n’y a pas si longtemps.
En le voyant de près comme ça, j’avais vu qu’il était aussi grand que Zera, mais qu’il était plus musclé. Même si ses cheveux commençaient à s’effacer légèrement, il semblait encore dans la force de l’âge. Gaston avait levé un sourcil et m’avait lancé un regard.
« Ton manque d’endurance est un problème, mais ton manque de considération l’est tout autant. Tu plonges dans les problèmes la tête la première, alors j’avais des sueurs froides rien qu’en te regardant. J’avais peur que tu te fasses tuer tôt ou tard. » Je ne pouvais pas lui dire qu’en fait, je mourais assez souvent.
Après un moment passé sans réponse de ma part, Gaston avait fait une grimace, puis avait monté les escaliers en me disant de le suivre. Je regardai Marie et les autres avec confusion, puis décidai de monter les escaliers à sa suite.
Le couloir était étroit, et il faisait plutôt chaud à cause de toutes les flèches et de la magie qui étaient tirées d’ici. Mais nous avions notre fidèle méduse qui rafraîchissait l’air, alors cela ne nous dérangeait pas vraiment. Elle flottait dans l’air devant nous, et Gaston avait touché l’esprit de glace du bout du doigt, semblant apprécier la fraîcheur.
« Alors. Si tu veux, je peux te fouetter pour te remettre en forme. C’est aussi valable pour la fille Puseri, mais c’est dur de vous voir tous vous tuer presque sous mes yeux. »
« À mes yeux, tu sembles toi-même assez téméraire… N’y pense plus ! » J’avais retiré mes paroles lorsqu’il m’avait lancé un regard noir. Il était étrangement intimidant pour quelqu’un de son âge. Mais il semblait plutôt gentil, vu qu’il s’inquiétait pour nous. Alors que je réfléchissais à la question, Gaston avait posé sa main sur le mur de pierre et s’était retourné.
« C’est toi qui as vaincu Zarish, n’est-ce pas ? »
« Nngk… » Je m’étais un peu étouffé.
« Haha ! » Il avait gloussé, apparemment satisfait que ma réaction ait confirmé ses soupçons. Les rides au coin de ses yeux s’étaient creusées et il m’avait regardé.
« J’ai entendu dire qu’il était détenu au château. J’étais content au début, je pensais qu’il avait enfin montré son vrai visage. Mais quelque chose ne va pas. Il n’est pas du genre à sortir et à confesser ses méfaits. »
« Eh bien, je suppose que tu as raison, » avais-je dit sans conviction en montant lentement les escaliers.
« Alors quand je t’ai vu te battre, ça m’a fait réfléchir. Tu pourrais peut-être t’attaquer à Zarish. Il n’y a pas grand monde d’autre que moi qui pourrais le battre. » Une goutte de sueur froide avait coulé sur mon visage. Peut-être était-ce la sagesse de ses années, ou peut-être était-il simplement très perspicace en général.
« Je suis surpris. Tu es assez vif, Gaston. »
« Ha ha, eh bien, n’importe qui pourrait mettre deux et deux ensembles quand ils voient que tu es proche d’Eve après avoir été des ennemis. Cependant, tout le monde autour de toi semble être assez stupide. » Il avait souri. Gaston savait maintenant que c’était moi qui avais vaincu Zarish. Je m’étais dit qu’il n’irait pas le dire à tout le monde, mais ce n’est pas comme si ça me dérangeait qu’il le fasse.
Il semblait que c’était tout ce qu’il voulait dire, et le vieil homme plutôt excentrique était parti.
Quand j’étais arrivé à l’étage supérieur, j’avais vu que les autres soldats étaient là.
Ils tiraient des flèches et de la magie à travers les petites fenêtres, et quand j’avais jeté un coup d’œil, j’avais vu que les forces ennemies marchaient vers nous avec des murs de boucliers levés.
Beaucoup d’ogres étaient d’apparence sombre, et ils avaient formé des cercles pour avancer vers nous. Mais avec notre bâtiment en forme de L et les projectiles qui pleuvaient sur eux depuis le haut, ils avaient dû faire face à des attaques de flanc alors qu’ils se rapprochaient de notre position.
***
Partie 10
« Pendant ce temps, nos forces se reposent à tour de rôle. On dirait qu’on a ces ogres sous contrôle. » Si on en arrivait là, Marie pourrait utiliser sa magie pour faire exploser ses esprits comme des mines terrestres. Elle pourrait essentiellement accumuler de l’expérience sans aucun risque.
Il ne nous restait donc plus qu’à nous occuper de ce soi-disant Armement du démon. Elle semblait absorber la force vitale de ce géant pour l’instant, mais nous n’avions aucune idée du moment où elle allait agir. C’était probablement mieux pour nous d’agir rapidement.
« Cette “Armement démoniaque” Kartina, c’est ça ? Comment ce monstre a-t-il pu être si endommagé ? Était-ce Wridra ? »
« Oui, j’étais trop préoccupé pour regarder longtemps, mais Wridra la réduisait en bouillie. Tu devrais lui dire plus tard que ce n’est pas le rôle du tank. »
Attends, elle a vraiment donné une raclée au boss avec ses poings nus ? J’avais réfléchi à ça avec de grands yeux, et j’avais vu Shirley faire des gestes de frappe dans le dos de Marie. Il semblerait que Wridra ait vraiment eu une bataille de poings, et cette pensée m’avait donné le vertige.
Donc, même elle n’était pas imperméable aux mauvaises influences du Japon. Mais elle avait protégé Marie comme elle l’avait dit, donc je n’avais pas à me plaindre.
En parlant de Wridra, elle avait dit qu’elle allait « rendre visite à celui qui a mis en place ce spectacle de mauvais goût » et n’était pas revenue depuis. Shirley avait veillé sur Marie à sa place, alors j’avais pensé qu’elle serait en sécurité.
« Hmm, je vois. Alors je vais peut-être essayer de faire un mouvement. Cela fait un moment que je n’ai pas combattu un ennemi puissant, alors j’ai hâte d’y être. »
« Mon Dieu, tu es toujours comme ça. Je veux bien que tu partes, mais…, » Marie avait regardé autour d’elle pour s’assurer que les autres soldats n’écoutaient pas, puis elle avait murmuré à mon oreille. Sa jolie voix avait parlé à travers ses lèvres lisses, chatouillant mes oreilles.
« Ce serait une douleur à gérer si quelqu’un te voit mourir ici. Alors, assure-toi de revenir, même si tu es gravement blessé. Je suis sûre que Shirley et Doula te soigneront. »
« Je le ferai. » Je n’avais pas réalisé que Shirley pouvait aussi guérir les gens. Mais comme elle contrôlait le cycle de la vie et de la mort, c’était logique.
« De plus, tu seras en congé pour Obon à partir d’aujourd’hui, n’est-ce pas ? Il faudra fêter ça et préparer des repas en bento dès notre retour. Allons faire les courses au supermarché ensemble. »
« Ok, j’ai compris. »
Marie avait froncé les sourcils, puis avait chuchoté un peu plus.
« Et c’est important, mais j’ai entendu dire qu’un autre typhon arrivait. Penses-tu que le parc Banana Wani à Izu pourra résister à la pluie ? Les alligators qui s’y trouvent ne rentreront pas chez eux s’ils sont mouillés, n’est-ce pas ? »
« Je pense que ça va aller. Wridra a dit que tout ira bien pour nous aussi. »
« Es-tu sûr ? » Marie me l’avait demandé avec un geste de ses yeux, et je lui avais donné un regard rassurant en retour. Elle était de bonne humeur après ça, donc il semblait que j’étais prêt à affronter Kartina.
J’avais sorti une pierre magique turquoise de ma poche intérieure et l’avais jetée par la fenêtre. La créature qui avait émergé avec un fort vrombissement était un étrange monstre ailé appelé Roon.
« Maintenant, je peux voler juste au-dessus de l’armée ennemie. D’accord, je vais y aller maintenant. »
« Fais attention ! » Et c’est ainsi que j’étais reparti sur le champ de bataille avec une attitude plutôt légère.
J’allais bientôt apprendre à connaître l’outil magique maudit laissé par les anciens.
Comme c’est excitant.
J’avais volé à travers la pièce sur le dos de Roon et j’avais senti une aura meurtrière qui semblait secouer l’air même à mesure que j’avançais. Elle provenait manifestement de cette « Armement démoniaque » Kartina. Le monstre était vêtu d’une armure noire, mais j’étais presque sûr qu’il s’agissait d’une femme en le voyant de loin. Malgré une taille d’environ deux mètres, il y avait une féminité dans sa structure osseuse.
Face à sa rage meurtrière, j’avais l’impression d’être au milieu d’un champ glacé. Je n’étais qu’à une centaine de mètres, mais la vitesse de vol de Roon était beaucoup plus lente que d’habitude. Il devait avoir peur des monstres qui le surpassaient clairement.
Je m’étais senti trembler d’excitation. Non, la moitié était peut-être due à la peur. J’avais expiré doucement, réalisant que c’était la première fois que je me sentais comme ça depuis longtemps.
L’énorme créature à ses pieds était bien plus grande que les ogres et était probablement le boss original ici. Mais maintenant, sa moitié supérieure s’était presque entièrement effondrée. Son existence même serait consommée par Kartina, ne laissant rien derrière elle.
Lorsque j’avais observé la cible, Roon avait émis un bruit pour m’alerter.
Roon, roon.
« Oui, elle nous a remarqués. Je me demande jusqu’où on peut s’approcher avant… Whoa ! » Mon pied avait tremblé et ma vision avait tourné sur elle-même. J’avais l’impression de descendre une montagne russe en spirale, puis je m’étais empressé de regarder sur le côté pour voir que Roon avait perdu une de ses ailes. Je m’étais retourné vers l’endroit où se trouvait Kartina et j’avais vu qu’elle avait disparu.
« Quoi ! ? On nous attaque déjà ? C’est si rapide ! » Je ne voulais pas que la pierre magique soit complètement brisée. Je posai mes deux pieds sur Roon alors que nous tournions sur nous-mêmes et lui ordonnai de revenir au moment même où je me téléportais. Le pavé de pierre qui se trouvait à une dizaine de mètres apparut juste devant moi.
Je m’étais téléporté à un nouvel endroit, mais je n’étais pas encore à l’abri. L’élan en vrille s’appliquait toujours à mon corps, alors j’avais adouci l’impact de l’atterrissage en utilisant mon corps comme un ressort et j’avais roulé sur le sol, puis je m’étais relevé.
Oh, je ne peux pas laisser tomber la pierre magique. J’avais coupé la tête d’un ogre qui s’approchait, puis j’avais tranché proprement un autre et j’avais attrapé la pierre turquoise dans ma main.
« Ah… Il y a une fissure. Je vais devoir l’apporter à Mewi plus tard. » Mewi le Neko était notre homme de confiance quand nous avions besoin d’aide avec les pierres magiques.
Alors que je mettais la pierre dans ma poche intérieure, mon ennemi était déjà dans mon dos.
C’était quelque chose de noir et d’inhumain, émettant une pression si intimidante que je n’avais pas pu me résoudre à me retourner.
Mon cœur battait frénétiquement dans ma poitrine.
Mais pour être honnête, j’adorais ces moments.
« C’est un peu comme lorsque quelqu’un vous invite à le rencontrer derrière le bâtiment de l’école. Votre cœur battait la chamade parce que vous ne savez pas qui vous attend. Et toi, “Armement démoniaque” Kartina ? Comment te sens-tu en ce moment ? »
Je n’aurais pas dû me retourner. Des fissures partant de sa poitrine la divisaient en deux, et l’expression de son visage était séparée à droite et à gauche, ce qui lui donnait l’air déformé.
Elle mesurait environ deux mètres, ce qui était dans la moyenne pour un monstre. L’armure qui recouvrait tout son corps brillait, et même quelqu’un d’aussi ennuyeux que moi avait eu peur lorsqu’elle m’avait regardé fixement avec ses ailes qui sortaient de son dos. Des images rémanentes étaient apparues de chaque côté d’elle, et un instant plus tard, des étincelles avaient jailli de mon Astroblade. Je devais admettre que j’étais assez fier de la rapidité avec laquelle j’avais dégainé mon épée.
Et pourtant, je n’étais pas assez rapide.
Je n’avais même pas eu le temps de faire claquer la langue en signe de frustration alors que j’avais été projeté en arrière par l’impact.
Les muscles de mes bras avaient fait des bruits inquiétants en se gonflant et en se contractant. Si mes pieds n’avaient pas heureusement touché le sol pour me permettre de me téléporter, je serais probablement mort sur le coup. J’avais entendu un étrange Vwooosh ! dans mon oreille, puis j’avais disparu et réapparu quelque part hors de portée de la lame ennemie.
Je ne pouvais atterrir que dans des endroits situés dans mon champ de vision. J’avais atterri sur un mur du côté opposé, puis Kartina s’était lentement tournée vers moi. Ses yeux étaient légèrement injectés de sang, et je pouvais entendre d’étranges gargouillis sortir de sa bouche.
Je me laissai descendre du mur, en gardant les yeux sur mon adversaire tout le temps.
Un clignement de paupière, et je pourrais finir mort. J’avais senti une poussée dans tout mon corps. On disait que le corps se battait désespérément pour survivre quand il sentait une mort imminente. Même si c’était un rêve — non, un autre monde, mon corps savait. Je devais vivre à travers ça. Je devais me battre pour survivre.
Mes yeux s’étaient ouverts en grand et, par miracle, j’avais réussi à esquiver l’attaque qui me visait avant d’atterrir. Mon Accélération était pleinement active, mais Kartina était encore si rapide qu’elle semblait être un flou.
Rappelle-toi ces griffes acérées. Repasse ce moment dans ton esprit. Grave-le dans ta mémoire. Cette trajectoire, cette puissance, cette vitesse, les mouvements de ses muscles. Souviens-toi d’eux parfaitement, dans les moindres détails. Mon cerveau était en surrégime alors que je me concentrais au maximum de mes capacités, et mon premier créneau était rempli.
Ma compétence Surcharge pouvait traiter en parallèle plusieurs choses à la fois. Elle s’appelait autrefois Reprise, mais elle avait évolué en fusionnant avec Sur la Route.
Si je pouvais l’utiliser à son plein potentiel…
Un bruit sinistre m’avait fait dresser les cheveux sur la tête. Mon adversaire s’était courbé en arrière comme un saule, puis s’était élancé en avant avec des griffes telles cinq épées, faisant gicler le sang de ma joue.
Le mur derrière moi avait été découpé en tranches comme du tofu, mais je n’avais pas le temps d’y prêter attention. Je devais mémoriser cette attaque terrifiante au plus vite si j’espérais avancer. L’ennemi était bien plus fort que moi, mais je devais gagner d’une manière ou d’une autre.
Un puissant coup de pied s’était enfoncé profondément dans mon estomac. J’avais activé Accélération au moment de l’impact, mémorisant la vitesse et la puissance de cette attaque dans mon deuxième emplacement. J’avais réduit les dégâts en faisant un bond en arrière au moment de l’impact, mais l’attaque était suffisamment puissante pour m’enlever une bonne partie de ma santé.
J’avais alors posé mes deux pieds au sol alors que j’étais envoyé en arrière, dérapant sur plusieurs dizaines de mètres pour m’arrêter. Le monstre avait semblé se rendre compte que quelque chose n’allait pas et avait décidé de ne pas poursuivre avec une autre attaque.
On aurait dit qu’elle avait remarqué. Si j’étais elle, j’aurais aussi été effrayé. J’avais fixé mes yeux endormis, en observant. Lentement mais sûrement, je m’adaptais à son attaque.
« Hé là. Tu m’entends, Kartina ? Alors pourquoi ne parlerions-nous pas un peu ? Sinon, l’un de nous pourrait mourir dans quelques minutes. » C’était peut-être plus provocateur que je ne le pensais. J’avais l’intention de dire que je pourrais être celui qui finirait par mourir.
« J’ai peut-être l’air faible à tes yeux, mais je suis de niveau 77. Quel est ton niveau ? »
Kartina n’avait pas répondu. Elle étendit ses ailes vers l’arrière et bondit sur moi pour attaquer encore plus vite qu’avant. Si elle avait été transformée en monstre contre sa volonté, je voulais voir s’il y avait un moyen de la sauver. Cependant, il était possible qu’elle écoute ce que j’avais à dire. Était-il possible de parler pour m’en sortir.
***
Partie 11
Je n’avais pas vraiment eu le temps d’y penser.
Elle était si rapide que je pouvais à peine la voir.
Au moment où je pensais qu’elle avait disparu, elle avait franchi le mur du son et fait disparaître la moitié supérieure de mon corps. L’attaque était trop rapide pour que je puisse la mémoriser avec Surcharge. Après tout, je ne pouvais même pas la voir.
« Hm !? » Mais c’est Kartina qui avait fini par être choquée. Elle avait été choquée que ma moitié inférieure disparaisse également comme de la brume.
J’avais observé sa réaction par-derrière, soulagé de constater que l’illusion que j’avais créée avec l’Image Fantôme était efficace pour esquiver ses attaques.
« Mon apparence et mon niveau ne sont peut-être pas très impressionnants, mais je peux me défendre. »
J’avais balancé ma lame sur son flanc par-derrière pour voir comment elle allait réagir, mais elle s’était retournée avec des réactions surhumaines, des étincelles jaillissant de ses griffes alors qu’elle bloquait le coup en une fraction de seconde. Mais je n’allais pas laisser cela me décourager.
L’épée noire dans ma main avait scintillé comme une étoile filante et avait fait un bruit de vrombissement. Kartina avait immédiatement changé de position, s’avachissant légèrement en avant et changeant la trajectoire de ma lame avec le dos de sa main.
L’armement démoniaque était en effet terriblement rapide. Mais d’après ce que je pouvais voir, il avait besoin de se recharger légèrement avant d’agir. Il était impossible d’arrêter sa charge si je lui laissais un moment pour respirer. Je veux dire, j’avais réussi à l’arrêter plus tôt, mais je m’étais dit que je pourrais peut-être renverser la situation si je continuais à la combattre de très près.
*Clang ! Clash ! Crack !*
Je balançai l’Astroblade dans une rafale de coups, des étincelles bleu pâle volant dans l’air à chaque fois que nous nous heurtions. Il semblait que la matière démoniaque se consumait, mais rien ne permettait d’en être sûr. Je n’avais pas le temps de vérifier. Ma vision changeait complètement à chaque seconde qui passait.
Mes attaques étaient des coups d’épée assez simples. J’avais exécuté le mouvement immédiatement après m’être téléporté autour d’elle dans le sens des aiguilles d’une montre. J’avais répété ce mouvement avec moins d’une seconde d’intervalle entre chaque coup. J’avais laissé une image rémanente derrière moi alors que je continuais mon attaque, et Kartina s’était accroupie davantage en levant ses griffes pour repousser mes attaques. Elle avait l’air plutôt à l’étroit dans cette position, mais ses réflexes étaient encore incroyablement rapides. Elle avait bloqué, paré, esquivé et lu mes attaques, puis elle m’avait coupé la joue avec sa griffe acérée.
Je ne m’attendais pas à en sortir indemne. Les choses ne se passaient pas non plus exactement comme prévu. Mon plan de jeu habituel consistait à passer à des schémas d’attaque plus compliqués une fois que l’ennemi s’était habitué à mes schémas simples. Mais Kartina s’adaptait à mes attaques bien plus vite que je ne l’avais imaginé.
J’avais pu esquiver ses griffes qui visaient mon front, mais ma contre-attaque avait été un échec total. Kartina avait tourné sur elle-même comme une toupie avait esquivé mon coup, puis elle m’avait donné un coup de pied sur le côté de la tête. Mes attaques s’étaient arrêtées. Ma respiration avait été perturbée.
La façon dont j’avais épuisé ma patience montrait vraiment tout ce que j’avais encore à apprendre. La hâte entraîne le gaspillage, comme on dit. Alors que j’étais envoyé en vrille vers le sol, une jambe noire couverte de ce qui ressemblait à de l’armure vint s’écraser sur moi. J’avais réussi à mettre mon épée devant mon estomac pour bloquer, mais l’impact s’était enfoncé dans mon corps, et j’avais été envoyé en l’air dans un angle.
« Gah ! » Mon corps s’était écrasé contre un pilier de pierre, et j’avais eu le souffle coupé. Alors que j’étais sur le point de tomber en chute libre, j’avais vu des bras démoniaques voler vers moi. C’était mauvais. J’avais été frappé par une rafale de coups, sans même pouvoir atterrir sur le sol. Elle semblait savoir que je ne pouvais pas me téléporter si je ne touchais pas le sol avec mes deux pieds.
J’avais essayé d’utiliser mon épée pour esquiver les attaques alors que j’étais encastré dans le pilier de pierre, mais je savais que je ne tiendrais pas longtemps. Chaque coup tombait avec un bruit sourd et la faible lueur d’espoir commençait à disparaître quand j’avais réalisé que l’ennemi n’était même pas essoufflé.
*Boooooom !*
Eh bien, c’était fort. Des éclats de pierre brisés s’enfonçaient dans mon corps, et je ne pouvais plus dire si j’esquivais ou si j’étais touché par ses attaques. Les bruits autour de moi étaient si forts que mon ouïe était engourdie. Je continuais à me débattre désespérément, mais je pouvais voir dans ma faible vision que le poing de Kartina avait maintenant la forme de la tête d’une lance. Elle se préparait à donner le coup de grâce.
Je suis désolé, Marie. Je sais que j’ai promis de ne pas mourir. Je suis sur le point de perdre, mais j’espère que tu pourras distraire tout le monde loin de moi d’une manière ou d’une autre. Ensuite, je me rendormirai et je reviendrai.
Alors que cette pensée me traversait l’esprit, la dernière chose à laquelle je m’attendais était qu’un bouclier surgisse du sol pour me protéger. J’avais entendu quelque chose de dur se heurter à quelque chose, et j’avais vu que les griffes de Kartina s’étaient arrêtées à quelques centimètres de moi. Sa main avait pénétré le bouclier à peu près à mi-chemin, mais n’avait pas réussi à m’achever.
« Ngh !? »
Non, non. Ce n’était pas ma compétence.
Cette vision inconnue — ou plutôt, peut-être que c’est parce que son coup fatal avait été interrompu — quoi qu’il en soit, Kartina était entrée dans une rage aveugle et avait commencé à frapper le bouclier blanc comme l’œuf. Mais ce n’était pas le seul bouclier. D’autres étaient apparus du sol, l’un après l’autre. J’avais regardé dans le vide alors qu’ils commençaient à la repousser loin de moi.
« Est-ce que c’est… ? » J’avais glissé et touché le sol, mais je n’avais même pas l’énergie pour me téléporter. Je ne pouvais pas bouger alors que je respirais fortement, puis j’avais remarqué que quelqu’un se tenait doucement sur mes épaules. C’était la main d’une femme, et j’ai été surpris par l’odeur d’un parfum fleuri et élégant.
« Est-ce que c’est... Shirley ? » J’avais dû me faire une coupure au front, car ma vision était remplie de sang. J’avais du mal à bouger, mais il semblait que ma supposition était correcte. Alors que mon corps glissait vers le bas, j’avais été placé dans une position telle que ma tête reposait sur ses genoux. Juste devant moi se trouvaient ces yeux bleu ciel. Ses cheveux de couleur vive dansaient devant mon visage, et son expression sereine apparaissait à l’envers dans mes yeux.
Ses lèvres disaient : « Ça va ? », mais honnêtement, je n’allais pas bien. Les boucliers de tout à l’heure s’effritaient, mais je n’avais même pas la vitalité de courir.
Shirley avait incliné la tête comme pour dire « C’est troublant ! », mais je n’avais pu qu’acquiescer. Elle avait ensuite fait un geste comme pour dire : « Reste immobile, s’il te plaît. », son doigt fin avait touché mon menton, et j’avais été attiré… Après cela, j’avais senti que je tenais sur ses cuisses.
Je ne comprenais pas ce qui s’était passé, mais c’était comme si j’étais à moitié enterré en elle. Elle avait ensuite expiré de l’air chaud sur moi, directement au-dessus.
À ce moment-là, j’avais senti une vague splendide, presque dorée, de force vitale se déversant en moi.
D’une certaine manière, cela m’avait rappelé des vacances. C’était comme un moment dans le temps où vous pouviez simplement vous amuser sans avoir à vous soucier de la réalité.
C’était comme si je marchais sous un ciel bleu rafraîchissant et que je touchais du bout du doigt l’épi doré d’un plant de riz. J’avais ressenti cette bénédiction avec mes cinq sens, et j’avais fermé les yeux de façon rêveuse pour me laisser aller à cette sensation.
Et quand j’avais ouvert les yeux, j’avais été surpris de constater que mes blessures étaient toutes guéries. Je m’étais redressé, mais Shirley m’avait entouré délicatement de ses bras, comme pour me dire : « Encore un peu, » et elle m’avait reposé sur ses genoux.
Elle était comme d’habitude et elle avait mis un doigt sur mes lèvres en faisant un geste de « chut ». Elle était si douce et calme que j’avais presque oublié que nous étions au milieu d’une bataille.
C’était vraiment étrange d’être dorloté comme ça sur un champ de bataille. Juste à ce moment-là, j’avais réalisé quelque chose. Alors que j’étais allongé, j’avais senti une chaleur se répandre en moi, jusqu’au bout de mes doigts.
J’avais presque envie de frotter mes joues contre les cuisses lisses qui soutenaient ma tête. Un sentiment de douceur et de confort m’avait envahi, et mes paupières s’étaient alourdies. Je veux dire, je n’allais pas m’endormir ou quoi que ce soit. Kartina était toujours en train de se déchaîner juste à côté de nous, hurlant de colère contre les boucliers qui lui barraient la route.
Mais d’une certaine manière, l’espace autour de moi était serein. Cela devait être dû au charme particulier de Shirley. L’air doux qui nous entourait sentait légèrement les fleurs, et j’avais l’impression de me reposer dans notre chambre du deuxième étage.
Pendant ce temps, Shirley caressait mes cheveux, ce qui me donnait l’impression d’être chatouilleux. On aurait dit qu’elle voulait me dire que mes blessures étaient guéries, mais que je devais encore récupérer mon énergie. Je pouvais sentir les battements de son cœur, et mon corps retrouvait progressivement ses forces.
« Eh bien, je n’ai vraiment jamais été guéri comme ça avant. Merci, Shirley. J’aimerais beaucoup que tu me soignes à nouveau un jour. » J’avais levé les yeux vers Shirley qui s’était renversée et je l’avais remerciée sincèrement. Sa main s’était arrêtée au moment où elle me tapotait la tête, et ses yeux bleu ciel s’étaient agrandis. Elle s’était alors légèrement détournée et avait ri.
C’était difficile de croire qu’elle était le maître du deuxième étage. C’était tout simplement une déesse, me suis-je dit comme un idiot. Mais elle m’avait regardé à nouveau, comme si un autre compliment la démangeait, et je m’étais ravisé, me disant que c’était peut-être un ange plutôt qu’une déesse.
« Je n’ai jamais vu quelqu’un guérir aussi vite. Et tu n’as même pas eu à prononcer une incantation. Je suis fier d’être le chef de l’équipe Améthyste avec quelqu’un d’aussi doué que toi avec nous. » Shirley avait secoué la tête d’un côté à l’autre comme si elle était gênée, mais elle devait être très flattée, car elle avait commencé à me frotter les épaules.
Whoa, ça fait vraiment du bien.
Alors qu’elle s’occupait des nœuds de mes épaules, je sentais mon corps se réchauffer progressivement. L’échelle mentale dans mon esprit faisait des allers-retours entre la déesse et l’ange. Elle penchait vers la déesse, puis sa gentillesse favorisait le côté ange, et l’évaluation inutile continuait.
***
Partie 12
« Oh, c’est vrai. Si tu es ici, cela signifie-t-il que Wridra est rentrée saine et sauve ? » Il semblerait que oui. Shirley avait hoché la tête, puis elle avait désigné la forteresse au loin. Je ne pouvais pas vraiment la voir d’ici, mais j’étais soulagé par la réponse de Shirley. J’étais inquiet pour Wridra après qu’elle nous ait quittés sans beaucoup d’explications. L’Arkdragon se serait probablement moqué si je lui avais dit. Ou peut-être aurait-elle souri. Je n’étais pas sûr.
« Alors je ne peux pas rester assis ici à ne rien faire. Alors, Shirley, quelle est ta méthode de combat préférée ? Peux-tu me dire quelles autres capacités tu as ? » J’avais jeté un coup d’œil sur le côté pour voir que ses boucliers avaient presque été brisés, bien qu’ils ne soient clairement pas des boucliers ordinaires, vu qu’ils avaient résisté aux attaques de Kartina pendant si longtemps.
Maintenant que j’y pense, ces boucliers me semblaient familiers. Alors que j’essayais de me souvenir, Shirley avait défait la ficelle autour de son livre. J’avais l’impression d’être un enfant à qui on lit une histoire avant de dormir, mais j’avais décidé de ne pas trop y penser.
On aurait dit que les images avaient été dessinées avec des crayons de couleur ou autre. Le livre était plein de dessins colorés, dont la plupart avaient été dessinés à la main par Shirley. Sur certaines pages, des noms étaient simplement écrits dans l’ancienne langue. Mes yeux avaient été attirés par une entrée particulière.
« Attends, est-ce que c’est… un ogre ? » Juste après ma question, un monstre blanc avait émergé du sol. En voyant la créature musclée se tenir là, un grand bouclier à la main, j’avais finalement eu un déclic.
« Oh, j’ai compris. Tu peux transformer les ennemis que tu vaincs en tes alliés. Je pensais que tu avais dessiné dans ton journal intime ou quelque chose comme ça… »
Shirley avait penché la tête comme pour dire : « Quelle est la différence ? »
Je m’étais alors dit que si les ennemis ne réapparaissaient pas, c’était peut-être grâce à elle. Cela expliquait pourquoi les choses se passaient si bien à cet étage. C’était beaucoup plus facile à gérer quand on n’avait pas à s’inquiéter des ennemis qui nous attaquaient par-derrière.
Shirley avait touché son livre, et quelque chose avait sauté sur son doigt. Cela ressemblait à un lézard blanc, et il m’avait lancé un regard méchant. Le doigt de Shirley avait alors pointé le mot « Egriny » écrit dans la langue ancienne.
« Oh, je me souviens de toi, Egriny. Ce groupe est un peu bruyant, mais je te garantis au moins de la bonne nourriture. J’ai hâte de travailler avec toi. » J’avais rapproché mon doigt, et Egriny avait semblé réfléchir un moment avant de le mordre en guise de salutation. Il s’était ensuite retourné et avait sauté dans le livre.
« C’est impressionnant. Je suis vraiment curieux de savoir comment il fonctionne. Je n’ai jamais vu un livre aussi merveilleux. Je suppose que le nom de Livre des Monstres lui convient bien après tout. » Shirley avait ensuite serré son livre dans ses bras comme s’il s’agissait d’un trésor précieux et avait souri, me faisant sourire en même temps qu’elle. Je me considérais comme quelqu’un d’assez doux, mais je n’étais pas à la hauteur de Shirley.
Maintenant, il était temps pour moi de me remettre en action. Je m’étais levé, et Shirley avait enlevé la saleté sur mon dos et mes fesses pour moi. Juste à ce moment-là, Kartina avait brisé les défenses de l’ogre.
« Rrroooaaaaaarrr ! »
Ayant accompli son devoir, l’ogre se décomposa en particules et se retira dans le livre. Ma vue s’était alors éclaircie, révélant la rageuse « Armement démoniaque » Kartina se tenant devant nous. Elle semblait surprise par le fait que mes blessures aient été guéries, mais je fus moi-même surpris par le changement soudain de température. C’était comme si l’hiver était soudainement arrivé.
« Hmm, préfères-tu plutôt un tête-à-tête ? Nous pouvons nous arrêter si tu le souhaites. Qu’en dis-tu ? »
« Graaaaaarrr !! »
Oh, elle nous fonce dessus. Il semblait qu’il n’y avait pas de place pour la discussion. Je me demandais quand notre adversaire remarquerait qu’une horde de ces méduses que j’aimais tant flottait tout autour d’elle.
Au moment où sa griffe toucha l’un des esprits, celui-ci libéra un souffle d’air glacial. L’esprit de glace avait enveloppé son bras de glace du poignet au coude, et Kartina avait fait un bond en arrière dès qu’elle l’avait remarqué. Le truc, c’est qu’il y avait une autre méduse juste derrière elle.
Kartina avait l’air déconcertée alors qu’elle était frappée dans le dos par des éclairs de glace consécutifs. C’était le pouvoir d’une sorcière spirituelle : une attaque préventive qui avait été préparée.
Je lui avais demandé si elle préférait un tête-à-tête. Comme ça n’avait pas l’air de la déranger, ça ne devait pas avoir d’importance que ce soit un deux contre un ou un trois contre un, non ?
« N’oublie pas que nous pouvons communiquer par Chat. Je suis peut-être encore un débutant, mais pas autant que toi, Kartina. »
Elle avait facilement brisé la glace autour de son bras, mais semblait avoir du mal à se débarrasser de la glace qui entourait ses ailes. Elle aurait probablement pu la briser aussi si elle avait pris le temps de le faire, mais je n’allais pas laisser passer la chance que Marie m’avait donnée. Non, je ne dirais pas que c’est injuste. C’était un effort coopératif.
« Merci, Marie. J’aimerais bien que tu puisses continuer à bloquer son environnement. Au fait, est-ce que ça ira si je touche les esprits ? »
« Oui, bien sûr. Mais comme je contrôle autant d’esprits à la fois, je ne pourrai pas la piéger avec des murs de pierre comme d’habitude. Les esprits de glace sont également limités à des mouvements simples seulement. »
« Je m’en doutais, » avais-je répondu en chat. L’ennemi pouvait se déplacer à des vitesses anormalement rapides, il aurait donc été difficile de le piéger avec des murs de pierre ou d’envoyer des esprits de glace sur lui de toute façon. C’est pourquoi il valait mieux à la place qu’ils soient nombreux à entourer l’adversaire.
Eeeeee…
Au moment où j’avais sorti ma lame de son fourreau, un son semblable au hennissement d’un cheval avait retenti. Astroblade avait commencé à drainer goulûment mon énergie, et Shirley avait invoqué des boucliers gardiens depuis le sol. Le mur de boucliers blancs nous avait entourés en cercle.
Hmm, c’est plutôt étroit ici.
C’était à peu près de la même taille qu’un ring de boxe.
« Deuxième round, combat… Eh bien, ça sonnait un peu mieux dans ma tête. D’accord, Kartina, on commence à compter jusqu’à… Whoa ! » Kartina avait chargé en avant avec une rage explosive. Elle avait l’air terriblement intense, mais sa vitesse était réduite à cause de la restriction de ses ailes. Cependant, une personne normale serait quand même morte instantanément.
Ma vue avait complètement changé quand j’étais apparu presque automatiquement à côté de Kartina. L’Astroblade avait brillé, et ces yeux infernaux s’étaient tournés vers moi.
J’avais une ouverture. Je devais rester concentré. Mon adversaire était beaucoup plus rapide que moi, je devais y aller doucement et sûrement. C’est ce que j’avais appris de mon erreur précédente.
Kartina avait tranché mon illusion, et j’avais volé en avant de derrière elle alors qu’elle se dispersait. Mon épée brillait comme une étoile filante et fut attirée par la paume noire de l’ennemi, s’y heurtant avec un bruit métallique.
Cela avait complètement stoppé mon élan, et elle avait lancé un coup de pied frontal sur moi alors que je faisais un pas en avant. L’attaque était si rapide qu’elle aurait pu rompre mes organes si elle avait touché, mais j’avais déjà enregistré ce mouvement dans l’un de mes emplacements. La contre-attaque que j’avais programmée m’avait permis de me téléporter sur son flanc en une fraction de seconde et de lui entailler le tendon d’Achille en même temps.
*Clang !* Enfin.
J’avais finalement fait une entaille dans cette armure cristalline.
Kartina avait perdu l’équilibre après que je lui ai entaillé la moitié de la cheville, mais elle s’était retournée pour me donner un coup de griffes en réponse. Je pensais qu’elle avait réussi à me raser un peu, car j’avais remarqué que du sang coulait de ma joue fendue.
« Hm. Je pensais l’avoir esquivée, mais elle a étendu sa portée en écartant ses doigts. » J’avais ajusté le schéma d’attaque que j’avais mémorisé et augmenté la vitesse de mes attaques.
Auparavant, je me contentais d’utiliser mes illusions, de me téléporter sur de courtes distances et d’espérer que ça marche. Mais j’avais décidé de changer mon approche. En optimisant chacun de mes mouvements, je serais capable d’esquiver et d’attaquer avec précision en même temps.
J’avais habilement esquivé chaque attaque tout en reculant loin de mon adversaire. C’était manifestement une tentative pour la provoquer. Je pouvais voir son sang bouillir à chaque coup qui ne faisait que toucher l’air.
« Grrraaaaaarrr !! »
Heh, comme c’est effrayant. Son rugissement de près était suffisant pour faire s’évanouir un enfant innocent. Mais j’étais loin d’être un enfant, alors j’avais en réponse fait un sourire effrayant à l’horrible armement démoniaque.
« Kartina, il semble que toi et moi ayons des goûts similaires. Maintenant, il est temps de se battre. Un avorton comme moi ne sera peut-être pas l’adversaire puissant que tu espérais, mais ce sera amusant à sa façon. Tu verras. »
J’avais tendance à parler comme ça. Ce n’était pas que je le faisais pour me moquer de l’adversaire, je profitais pleinement de ce combat tendu. Kartina m’avait lancé un regard noir et s’était empressée de réparer sa cheville, mais pensait-elle vraiment avoir le temps de le faire maintenant ? J’avais frappé l’estomac de Kartina. Tout s’était passé en un éclair. La téléportation s’était produite en un instant, il n’y avait donc aucun moyen pour un adversaire de réagir. Mon ennemie avait été surprise par mon apparition soudaine, et je lui avais adressé un sourire. Bien que ce sourire n’ait pas été tout à fait adapté au visage d’un enfant.
« Hé là, tu sembles avoir du mal. Si ton pied ne fonctionne pas, je vais t’approcher comme ça. »
Son visage s’était déformé comme si elle voulait crier : « Silence, insecte ! » Si c’était vraiment ce qu’elle pensait, alors elle n’avait pas dû remarquer mon épée lumineuse. C’était plutôt malheureux qu’elle soit si myope, simpliste et monotone. J’avais espéré qu’elle serait l’ennemie idéale dont je rêvais.
Mon épée scintillante s’était chargée en énergie depuis le début du combat. Elle brillait beaucoup plus maintenant, et elle pouvait probablement effectuer un coup directement à travers cette armure solide.
« ROOOOOOAAAAAAR ! !! »
Une entaille en forme de X était apparue instantanément à l’endroit où je me trouvais. On dirait que Kartina avait finalement réalisé qu’elle était dans le pétrin et avait bêtement foncé sur moi.
Kartina, si tu es une combattante de type rapide comme moi, tu ne dois jamais perdre ton sang-froid comme ça. Sinon, tes attaques deviendront simples, ce qui les rendra faciles à prévoir comme tout à l’heure.
Une méduse était apparue juste devant ses yeux. De la gelée blanche flottait autour de l’esprit, et c’était clairement le même genre que tout à l’heure. Ils étaient mignons à nos yeux, mais Kartina n’avait probablement pas ressenti la même chose.
***
Partie 13
Kartina avait trébuché en essayant de s’arrêter, mais elle n’avait pas pu éviter mon swing à pleine puissance. J’avais regardé comme elle avait faiblement déplacé ses griffes…
*Fwsh ! Clang !*
J’avais mis tout mon corps dans le swing.
La contre-attaque avait parfaitement frappé son casque, envoyant des fragments noirs dans les airs. Les genoux de Kartina s’affaiblirent, et elle étendit ses jambes pour s’arrêter sur place.
Sa respiration laborieuse et la vue qui s’offrait à moi m’avaient empêché de lancer une nouvelle attaque. La lueur étoilée d’Astroblade avait disparu.
« Kartina… »
Le casque à moitié brisé avait révélé le visage d’une femme émaciée et baignée de larmes.
Ses yeux avaient leurs blancs et leurs noirs inversés, une caractéristique des démons. Ils semblaient plutôt grands pour son visage, mais c’était peut-être parce que ses joues étaient si creuses.
Ses cheveux étaient trempés de sueur. Je pouvais voir que les parties exposées d’elle étaient devenues brunes, et même noires dans les parties plus profondes, à cause de l’influence de l’Armement démoniaque. Ses yeux larmoyants et démoniaques ne me regardaient pas, mais quelque part au loin.
« Je suis… la seule qui reste… Pourquoi ? Pourquoi est-ce arrivé, capitaine ? S’il vous plaît, répondez-moi… Capitaine ! »
Je n’arrivais pas à trouver les mots. Devant mes yeux ne se trouvait pas l’ennemi que j’avais imaginé dans ma tête, mais une femme qui ne pouvait s’arrêter de pleurer.
« Je vois. Les rebelles ont été transformés en monstres. Alors tu es la dernière… »
« Nous ne sommes pas des rebelles ! I… J’ai le devoir d’arrêter Arilai, même si cela me coûte la vie… Raaahhh ! » Kartina avait soudainement accéléré, mais je savais déjà comment la combattre. Des tonnes d’esprits de glace étaient apparues lorsque je m’étais téléporté en arrière, et elle avait dû les esquiver désespérément en essayant de me frapper.
Mais pour être honnête, je me sentais mal pour elle. Je ne pouvais pas supporter de la voir pleurer pendant qu’elle tentait à plusieurs reprises ses attaques futiles, subissant des blessures partout sur son corps pendant qu’elle le faisait. Kartina s’était coupé la joue sur un fragment cassé de son armure, et quand elle avait ouvert les yeux, un esprit de glace était juste devant son visage.
« Ah ! » Et donc, j’avais attrapé l’esprit de glace qui était sur le point de toucher Kartina. C’était aussi froid que la glace, et l’esprit de glace s’était tortillé dans ma main pour tenter de se libérer.
Quand je l’avais écarté, j’avais vu le visage plein de taches de rousseur de la femme et ses cheveux bruns. Elle était couverte de glace et, ses articulations ayant été désactivées, elle avait perdu sa capacité à fonctionner. Je lui avais chuchoté, tout près de son visage.
« Kartina. Je ne suis pas d’Arilai. C’est pourquoi je ne connais pas trop son histoire. »
« Ne me sors pas ça. Tu profanes l’ancien labyrinthe sacré, espèce d’ordure. Que mes ancêtres te maudissent pour l’éternité. » Sa rage brûlante était palpable. Il y avait une intensité militariste en elle, mais elle n’était pas si intimidante si elle ne pouvait même pas battre un seul enfant.
Puis, pour une raison inconnue, Kartina avait tressailli.
Il semblerait que Kartina était tout aussi confuse que moi, et elle regardait sans cesse autour d’elle. Son armement démoniaque se tortillait contre sa volonté…
Il voulait fuir. C’est ce qu’il semblait à nos yeux.
Puis, j’avais finalement réalisé que Shirley arrivait par-derrière. Mais il n’y avait aucune hostilité en elle, comme si elle allait simplement faire une promenade nocturne. Shirley avait tendu son doigt, et le geste avait suffi à faire trembler de peur l’armement démoniaque. Kartina avait crié, le désespoir dans les yeux. Pas contre nous, mais contre sa propre armure.
« Ne fuis pas ! Non, non, j’ai dit NON ! Tu fais ça à mon corps, et maintenant tu veux t’enfuir, salaud ! ? »
C’était comme s’ils jouaient au tir à la corde. Kartina s’accrochait au sol à quatre pattes, et son armure essayait de s’éloigner le plus possible de Shirley. J’avais entendu quelque chose se déchirer, et j’avais été choqué quand l’armure s’était détachée de son corps, révélant une peau nue.
L’armement démoniaque s’étendait comme du caoutchouc, et le haut du corps de Kartina, bien bâti, était exposé. Mais elle ne laissa pas l’armure s’échapper. Elle s’agrippa au sol avec ses griffes, saisit l’armure qui tentait de se retirer, et tira de toutes ses forces. Il était clair qu’elle ferait tout ce qu’il fallait pour l’empêcher de s’enfuir.
« Hnng, nnngh ! Ne t’enfuis pas… loin… de moi. Tu veux t’enfuir d’un gamin qui ne faisait que s’amuser sur un coussin de genoux !? Ne t’avise pas de le faire, Armement démoniaque ! ! » Elle avait mis toute son âme dans ce cri, mais Shirley et moi avions échangé des regards vides.
Je veux dire, peut-être que ça semblait être le cas pour Kartina, mais c’était nécessaire pour que je guérisse.
J’avais demandé à Shirley de confirmer, mais elle avait détourné le regard en réponse.
Attends, qu’est-ce que ça veut dire ? C’était nécessaire que je m’allonge sur tes genoux, non ? Ce n’était pas nécessaire ? Mais ensuite, je m’étais souvenu de quelque chose.
Elle m’avait dit un jour qu’elle avait la capacité de mettre des monstres vaincus dans son livre. Une fois que le monstre était stocké dans le livre, il était probable que sa volonté et son être même soient changés. C’est peut-être pour cela que l’armure avait instinctivement essayé de fuir Shirley.
C’était une bataille pour leur propre existence. Kartina, qui préférait mourir plutôt que de fuir ce combat, et l’Armement démoniaque, qui ne voulait pas périr.
La lutte allait bientôt prendre fin. L’Armement démoniaque semblait avoir abandonné et retourna à sa position initiale avec un ronronnement aigu. C’était comme un chien qui aurait reçu un ordre de son maître. L’armure percée de trous et battue recouvrait le corps en sueur de Kartina. Juste à ce moment-là, quelqu’un qui nous appelait de loin était soudainement apparu.
« Ah, donc tu as été capable de le faire obéir par la force. Alors peut-être y a-t-il encore un moyen. »
« Hein ? Tu es là, Wridra ? » Une tache noire s’était étendue sur un mur voisin, et une beauté aux cheveux noirs en était sortie. Elle avait ensuite passé la main derrière elle et avait pris une certaine fille elfe dans ses bras.
Je m’étais retourné, et… les ogres au loin avaient déjà été éliminés. Bien que, je me suis dit que Marie aurait probablement pu les éliminer quand elle le voulait.
Wridra s’était avancée. Elle avait séparé ses lèvres et avait continué là où elle s’était arrêtée plus tôt.
« Ton capitaine t’a-t-il déjà dit ce qui arrive à ceux qui succombent aux pouvoirs démoniaques ? » Ayant épuisé toute son énergie, Kartina avait du mal à respirer et levait les yeux à quatre pattes avec une expression confuse. Elle secoua ensuite la tête comme si elle avait abandonné. Wridra laissa échapper un lourd soupir.
« Tu ne meurs pas. C’est plutôt malheureux pour toi. Ton corps brisé redeviendra entier, se transformant en quelque chose d’entièrement différent, et tu continueras à attaquer tous les intrus qui entrent dans ce lieu. Tu sais ce qu’est la réapparition, n’est-ce pas ? Tel sera ton destin. » Kartina avait dégluti avec une expression choquée sur son visage. Il semblait qu’elle ne savait pas si elle devait ressentir de l’espoir ou du désespoir à la suite de ces mots. Malheureusement, ce serait le dernier.
« Tes parties organiques mourront pour la plupart, et ta conscience deviendra complètement confuse. Souhaites-tu être définitivement piégé dans ce labyrinthe dans un tel état ? » Il était clair dans le regard de Wridra qu’elle ne disait que la vérité.
Kartina avait commencé à trembler. Elle avait enfin compris. Elle était condamnée à vivre éternellement, incapable de s’échapper de cet ancien labyrinthe. Elle devait le ressentir d’autant plus clairement maintenant qu’elle était au bord de la mort.
« Cependant, tu as beaucoup de chance en effet. Même moi, j’avais déjà abandonné. » Avec cela, l’Arkdragon avait placé une main sur la joue de Kartina. Il y avait une telle gentillesse dans son contact, il était difficile de croire qu’elles s’étaient battues plus tôt.
Mais en y réfléchissant, c’est plutôt logique. Wridra vivait depuis des temps anciens, et elle avait vu beaucoup de personnes impliquées avec les pouvoirs démoniaques jusqu’à maintenant. Peut-être était-ce la raison pour laquelle elle était capable de la toucher avec une telle gentillesse.
Wridra avait fixé les yeux de Kartina, gonflés de larmes, puis avait hoché la tête.
« Oui, tu maîtrises bien l’Armement démoniaque. Shirley est celle qui contrôle le cycle de la vie et de la mort. Par conséquent, tu peux choisir ce que tu veux devenir. Tu peux mourir, passer à ta prochaine vie, ou être libéré de ce labyrinthe et continuer à vivre dans ce monde. Bien que tu auras l’espérance de vie d’un humain normal, bien sûr. »
Kartina n’aurait probablement pas été convaincue si ce n’était que des mots ordinaires. Mais alors qu’elle sentait la chaleur de Wridra tandis que l’Arkdragon mettait ses bras autour de son cou comme un vieil ami, elle sentit des larmes couler de façon incontrôlable de ses yeux. Se battre toute seule dans ce labyrinthe pour toujours serait bien trop triste. Kartina regarda la pièce jonchée des cadavres de ses anciens camarades et parla avec des larmes qui coulaient encore sur son visage.
« Je suis désolée, je suis désolée… Ayez pitié. Je ne peux plus me battre. Je n’ai plus la volonté de me battre. Je suis désolée, tout le monde… Maudissez-moi si vous le souhaitez… » Kartina avait ouvert la bouche en grand et avait crié à tue-tête.
C’était un spectacle étrange.
Kartina avait joint ses mains comme si elle priait Dieu, et Shirley avait posé une main sur sa tête. Il y avait quelque chose de sacré dans la façon dont les ténèbres qui couvraient son corps se dissipaient.
La poussière qui restait des monstres tombés s’était dispersée dans l’air tandis que le troisième étage brûlait. Marie et moi avions regardé en nous tenant la main, alors que même ces restes étaient purifiés comme de la neige blanche.
Lorsque nous avions annoncé que l’Armement démoniaque avait été vaincu, des acclamations avaient éclaté dans la forteresse. Lorsque les troupes étaient sorties de la forteresse, elles avaient regardé en silence la pièce qui semblait s’être recouverte de neige.
C’était comme s’il neigeait pour célébrer leur victoire, et cela marquait en fait la libération des monstres qui avaient travaillé pendant des milliers d’années. Le paysage blanc était la destination de ceux qui s’étaient battus pendant si longtemps. Sachant cela, nous n’avions pas fait la fête, mais nous avions regardé, main dans la main, tout devenir blanc.
À notre insu, la même chose se passait à la salle de contrôle centrale.
Le gardien qui s’était battu jusqu’au bout et dont le bas du corps était réduit en poussière, ouvrit faiblement les yeux et leva les yeux vers la lumière du salut. Cette lumière était émise par celle qui se trouvait dans la grande salle, cela traversa la vitre et toucha le front de l’homme. L’homme finit par se décomposer en particules et prononça les mots « Je suis désolé » avant de disparaître complètement.
Shirley était probablement différente de tous les autres êtres du labyrinthe.
Elle pourrait mettre fin à la circulation des démons et pourrait révéler des chemins qui n’étaient pas possibles auparavant.
Un jour, elle pourrait bien changer complètement cet ancien labyrinthe. Mais la façon dont elle avait ouvert son livre de monstres et montré fièrement sa nouvelle illustration lui avait donné un air enfantin à mes yeux.
Kartina s’était levée, vêtue d’une armure d’un blanc pur. D’après son regard, le chagrin qui la hantait avait disparu… mais je ne comprenais pas pourquoi elle me fixait comme pour me dire : « Tu vas payer pour ça. »
***
Partie 14
Les citoyens allaient et venaient comme d’habitude tandis que les soldats renforçaient les défenses du château.
Le soleil s’était couché, mais la discussion autour de la table ronde n’avait pas encore atteint sa conclusion. L’un des membres de la famille royale, Wallace, fixait la carte sur la table et grognait.
« Ce n’est qu’une question de temps avant que l’ancien labyrinthe de l’oasis ne tombe. » Bien qu’Hakam et les autres soient encore au milieu de leur raid, aucune voix discordante ne s’éleva de la table. Maintenant que les monstres les plus puissants du troisième étage avaient été vaincus, sa chute était pratiquement garantie. La carte sur la table montrait les forces ennemies estimées, dont la plupart étaient concentrées sur le côté ouest.
« Malheureusement, nous ne sommes pas en mesure de contacter l’équipe là-bas en raison de quelque chose qui interfère avec notre liaison. Mais cela fait déjà une dizaine de jours. Il est possible que nos communications ne soient pas bloquées, mais il n’y a plus personne pour répondre à nos appels. Le bon côté des choses, c’est que cela ne nous fera pas trop de mal, vu que nous avons réduit le nombre de membres de l’équipe de raid au minimum… Oh, pardonnez-moi. J’avais oublié que votre fils était parmi eux, Général Gido. » Il avait tourné son regard froid vers un homme bien bâti.
L’homme en question était le maître de maison des Milles et le père de Zera. Il dégageait un air puissant malgré ses cheveux grisonnants. Comme son nom l’indiquait, il avait la capacité de contrôler un millier de lames à la fois, et il pouvait renverser le cours d’une bataille, quelle que soit la situation.
« Mon fils a choisi de se battre sur ce champ de bataille. Je n’ai rien à dire à ce sujet. » Il n’y avait ni colère ni tristesse dans ses paroles. La mort pouvait atteindre quiconque s’engage dans la bataille. C’était le message que l’attitude calme de l’homme transmettait. Alors qu’ils étaient sur le point de reprendre leur discussion, le maître de maison des Milles prit à nouveau la parole.
« Mon fils est peut-être encore inexpérimenté, mais son odorat est aussi bon que le mien. Et j’ai entendu dire que Gaston, le Barracuda mangeur d’hommes, fait aussi partie de l’équipe de raid. Je ne peux pas imaginer que cet homme bestial puisse réellement mourir. » Plusieurs personnes à la table avaient hoché la tête à ce commentaire.
Gaston en était venu à choisir des champs de bataille plus dangereux en vieillissant, mais il revenait toujours sans avoir subi de dommages. Gaston lui-même s’était plaint : « Quand pourrai-je mourir ? »
Wallace s’était moqué.
« Impossible. Selon les archives, il y a une arme puissante des temps anciens connue sous le nom d’Armement démoniaque à l’intérieur. Même si j’admets que ces hommes sont très doués, ne devriez-vous pas être plus réaliste à ce sujet, Général ? Vous devriez faire attention à ne pas perdre votre position en étant si borné. »
« Il semble que vous ayez une pensée trop réaliste, Prince Wallace. En tant que général, je vais donner la priorité à ma propre intuition. Je crois que ceux qui déterminent l’état d’un champ de bataille devraient être ceux qui ont réellement combattu sur un tel champ. »
« Vous avez peut-être raison, » répondit le prince, mais son sourire n’atteignait pas ses yeux. Peu de gens savaient que ces deux-là s’étaient souvent affrontés. C’est en partie la raison pour laquelle la discussion s’éternisait, et beaucoup de ceux qui étaient assis commençaient à être visiblement fatigués. Certains d’entre eux avaient carrément laissé échapper un soupir lorsque le prince Wallace s’était approché du général pour l’affronter.
« Mais c’est peut-être cette façon de penser qui a conduit nos jeunes soldats à la mort ? Je trouve inhumain que quelqu’un envoie son propre fils dans un combat qu’il n’a aucun espoir de gagner et lui ordonne de résoudre cette situation sans précédent. »
« C’est la nature de la bataille. Si nous cédions aux difficultés, ce pays aurait été englouti dans le sable depuis longtemps. Ils ont relevé le défi en croyant qu’ils avaient un moyen de gagner. Se battre, c’est se confier à l’espoir, Votre Altesse Royale. »
« Haha, si vous voulez compter sur l’espoir, alors pourquoi n’allez-vous pas à l’église et vénérer le dieu de la terre ? Ou peut-être devriez-vous joindre vos mains et prier une étoile filante la nuit. »
« Pardonnez-moi, mais de tels endroits sans ennemi en vue ne sont pas le genre de champ de bataille que je connais. »
« Eh bien, je pense que si vous le faites, vous ressemblerez plus à un parent. »
Ni l’un ni l’autre n’avaient l’intention de reculer, et les membres de la famille royale rassemblés là lèvent les yeux au plafond comme s’ils en avaient marre. Alors qu’ils se lamentaient à l’idée de perdre encore du temps aujourd’hui, la porte de la salle s’était ouverte en claquant.
« J’ai un message de l’équipe de raid du troisième étage ! Ils ont réussi à vaincre l’Armement démoniaque et les forces de Gedovar ! » La voix du messager avait résonné dans la pièce. Il y eut un faible silence avant que tous ne se lèvent comme s’ils avaient été secoués par de l’électricité.
« Quoi !? » Celui qui était le plus surpris était le prince Wallace, qui était censé évaluer la situation de façon réaliste.
Cette nouvelle impliquait que l’équipe de raid avait retourné la situation malgré l’affrontement de la horde de monstres vivant au troisième étage, y compris leurs unités d’élite, tout en étant en infériorité numérique et de niveau. Les archives montraient que l’Armement démoniaque était un être terrifiant capable d’abattre des châteaux à lui tout seul.
Leur surprise était compréhensible. Mais seul le maître de maison des Milles laissa échapper un « Hmph » et se dirigea lentement vers la table.
« On peut enfin avoir une vraie discussion. L’avant-garde ennemie, notre plus grande menace, a maintenant été anéantie. Leur pays est probablement plus surpris que nous. » Il avait souri pour la première fois depuis qu’il était entré dans la pièce. Ce n’était pas le sourire d’un combattant, mais le sourire de quelqu’un qui appréciait la situation. Maintenant que les choses avaient changé si radicalement, il était peu probable qu’aucun des membres de la famille royale réunis ne puisse se reposer avant le matin.
§
Il était déjà midi passé quand nous étions rentrés à l’appartement. Je ne savais pas si c’était parce qu’elle avait utilisé trop de magie ou parce qu’elle s’était concentrée pendant si longtemps, mais Marie était étalée sur le lit et ne bougeait pas. Quand je l’avais regardée, elle m’avait rendu mon regard avec une expression de mécontentement.
« Vas-tu bien, Marie ? »
« Je suis fatiguée. Sache que personne n’aurait jamais pu contrôler autant d’esprits à la fois dans des circonstances normales. Tu dois comprendre que ce n’était possible que parce que c’était moi qui le faisais. » Elle sortit ses lèvres et prit une expression renfrognée, que je trouvai adorable.
Je m’étais rapproché, et elle avait tendu les mains comme pour demander un câlin. À contrecœur, je l’avais soutenue par le dos et sous les genoux et je l’avais prise dans mes bras comme une princesse… Bon, d’accord, j’étais heureux de le faire.
Elle était incroyablement légère. Pourtant, elle était si douce, et quand elle avait enroulé ses bras autour de mon cou, j’avais su que les prochaines vacances à Obon seraient extraordinaires.
Quand je m’étais retourné, j’avais vu Wridra à la table. Il semblerait qu’elle avait vraiment pris goût à lire le journal avec des lunettes. Elle avait redressé les pages et déplacé le journal à la lumière du soleil.
« Donc, Kartina n’a pas péri après tout. »
« Oui, j’ai entendu dire qu’elle allait servir Shirley pendant un certain temps. Il serait préférable pour elle de rester dans ce monde, au moins jusqu’à ce qu’elle soit témoin du destin de l’ancien labyrinthe et de son propre pays. »
Ce serait quelque chose dont elle se soucierait. Bien qu’elle soit une source précieuse d’informations sur le pays ennemi, je ne pouvais pas me résoudre à l’interroger. J’avais entendu dire qu’elle avait été forcée de rejoindre l’Armement démoniaque, il était donc probablement préférable qu’elle se repose un moment.
« Oh, quelque chose sent bon. Qu’est-ce qui est en train de cuire ? » demanda Marie.
« Pancakes. On devrait en manger avant de partir. » L’elfe et la dragonne adoraient toutes deux les crêpes couvertes de beurre et de miel. Marie avait balancé ses pieds joyeusement en attendant et avait appelé la cuisinière juste au moment où elle avait retourné la poêle à frire.
« Merci, Shirley. Tu es une si bonne cuisinière ! » Il semblerait que Shirley s’était habituée au Japon en grande partie. Elle s’était retournée et avait levé le pouce, et j’avais du mal à croire qu’elle était un ancien maître d’étage. C’était bien qu’elle ait acquis la capacité d’annuler sa transparence après qu’une partie de son sceau ait été défait l’autre jour. Mais apparemment, elle devenait floue dès qu’elle baissait sa garde, et ça me faisait peur chaque fois que ça arrivait.
« Nous partons demain, donc nous devons nous préparer. Il existe au Japon un bento à caractère, où les ingrédients d’une boîte à lunch sont arrangés pour ressembler à certains personnages. » Les longues oreilles de Marie s’étaient dressées. Il semblait que quelque chose lui soit immédiatement venu à l’esprit suite à mon commentaire. Les yeux violets de Marie s’illuminaient d’excitation quand elle me regardait.
« Mais… n’est-ce pas pour les enfants ? Tu devrais savoir que je suis bien plus mature que tu ne le penses. »
« Pas du tout, cela fait partie de la culture des adultes. Les enfants ne font pas vraiment leur propre bento. » Cette pratique avait aussi commencé à se répandre à l’étranger. Il y avait quelque chose d’étrange dans la culture qui consiste à profiter pleinement de la nourriture. Bien que, si je devais faire un commentaire, je pensais qu’être porté comme une princesse était plus enfantin.
« Vraiment ? Mhm… Alors, je suppose que si tu insistes, nous pourrions faire un essai. Je vais te laisser celui-ci et profiter de cette chance pour apprendre la culture étrangère. »
« Oui, je vis dans ce pays depuis longtemps. Tu devrais écouter les gens qui ont plus d’expérience dans ce domaine. Alors, quel genre de personnage aimerais-tu ? » J’avais demandé, et Marie m’avait murmuré quelque chose à l’oreille. Cela m’avait chatouillé quand elle avait parlé, mais j’avais été encore plus amusé quand j’avais imaginé le personnage qu’elle avait mentionné. C’était un choix plutôt évident.
Je savais qu’il était difficile pour une personne d’oublier le premier anime qu’elle avait vu. Au moment où j’imaginais le visage souriant du personnage, les crêpes avaient fini de cuire. Tout ce qu’il nous restait à faire était d’éloigner le Livre des Monstres de la table et… Attends, le livre des monstres ?
Cette chose ne peut pas activer ses pouvoirs même au Japon… N’est-ce pas ?
Il y avait probablement d’innombrables monstres enfermés dans ces pages, mais… Ce n’est pas possible. Il n’y avait aucune chance. Pourtant, en regardant le livre, j’avais cru voir une photo de « Armement démoniaque » Kartina, posée avec un bouclier et une lance d’ogre.
Je devais l’avoir imaginé. J’avais fermé le livre, et les crêpes dans leurs assiettes respectives avaient rapidement été apportées à la table.
« Ah, elles sont faites, » dit Wridra en pliant son journal. Notre humble petit déjeuner au lendemain d’une bataille intense était sur le point de commencer.
J’avais fait asseoir Marie sur une chaise, j’avais guidé Shirley jusqu’à la table et j’avais opté pour un petit-déjeuner viril debout. J’avais levé les yeux vers le ciel d’été en pensant qu’il fallait vraiment que j’achète bientôt des chaises supplémentaires.
Et donc, nos vacances Obon et notre voyage à Izu étaient sur le point de commencer.
Les crêpes fraîchement préparées étaient chaudes et sucrées, et l’odeur du beurre remplissait la pièce. J’avais pensé que la saveur était nostalgique pour une raison quelconque pendant que je mangeais.