Une vie en prison est facile pour une Vilaine – Tome 1 – Chapitre 4

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Chapitre 4 : Le duc comprend la situation

Le duc Ferguson apprit que le prince avait rompu ses fiançailles avec Rachel lors d’une fête à laquelle assistaient de nombreux jeunes membres de la cour. La situation était incroyable, et en tant que chef d’une maison ducale, il se préparait à faire une visite d’urgence au palais. Il avait envoyé ses serviteurs recueillir des informations pour l’aider à comprendre la situation.

Alors que le duc paniquait, ses hommes revinrent les uns après les autres avec de mauvaises nouvelles.

« Êtes-vous certain que le prince a rompu ses fiançailles avec Rachel lors de la fête de ce soir ? », demanda le duc.

« Oui, monsieur. Nous avons pu le confirmer auprès de plusieurs sources. Elle se trouvait au milieu de la salle lorsqu’il annonça l’annulation. »

Le duc serra sa tête.

« Cet imbécile de prince ! Je suis sûr qu’il voulait en faire un spectacle, mais ne réalise-t-il pas que ce n’était pas l’endroit pour ça ?! Il ne s’agit pas de savoir qui avait tort, c’est une question de bon sens. »

Le duc avait déjà conclu que le prince était foutu. Si l’on considérait la situation de manière logique, il était évident que la façon dont il avait rompu théâtralement leurs fiançailles, en ignorant complètement les bonnes manières et les coutumes, deviendrait problématique une fois que le roi serait intervenu pour résoudre les choses.

Naturellement, le duc était contrarié que les fiançailles de sa fille aient été rompues sans qu’il en soit d’abord informé, mais en toute honnêteté, il avait maintenant un plus gros problème.

Il fit claquer ses mains sur son bureau.

« Ce crétin finit. Il vient de marcher sur la queue du tigre ! »

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La fille aînée du duc, Rachel, était jolie dès son plus jeune âge, et son comportement réservé et son apparence éphémère avaient conduit les autres maisons à supposer qu’elle était une beauté introvertie et tranquille. Ne la connaissant pas mieux, le duc et la duchesse avaient été incroyablement fiers d’elle. Ils avaient cru de tout cœur que leur fille était merveilleuse.

Ils n’auraient pas pu avoir plus tort.

Alors que leur fille grandissait et qu’ils découvraient peu à peu qui elle était, les sourires du duc et de la duchesse devinrent plus tendus. Elle se comportait de manière pire que la moyenne des brutes.

Quand un groupe de brutes l’avait poursuivie dans un arbre, elle leur avait jeté une ruche. Puis, quand un garçon plus âgé était venu les soutenir, elle l’avait assommé avec un rouleau à pâtisserie qu’elle avait caché. Une fois cela fait, elle poussa le meneur dans un étang pour se venger.

Entendant le vacarme, le duc s’était précipité pour enquêter, et il la vit jeter des pierres au garçon qui essayait de rejoindre la rive. Lorsqu’il l’arrêta, elle le regarda et, d’un air tout à fait sérieux, lui dit : « Ne t’inquiète pas. Si je continue à lui jeter des pierres, il ne remontera pas à la surface avant un moment. »

Ce fut à ce moment que le duc pensa pour la première fois qu’il y avait une forte probabilité que sa fille bien-aimée soit une psychopathe.

Afin de la dissuader, le duc souligna la difficulté d’empiler des rochers sur un objet sous l’eau, et il expliqua comment la résistance de l’eau lorsqu’ils coulent et la forme irrégulière des rochers rendraient difficile de déterminer leur trajectoire. Il était évident, d’après cet échange, que le duc paniquait un peu.

Sa fille, les yeux pétillants, s’exclama : « C’est incroyable, père ! »

Mais, en toute honnêteté, c’était la première fois que ses louanges entraient par une oreille et sortaient par l’autre.

Lorsque ses parents réalisèrent à quel point Rachel était déformée, ils avaient déployé des efforts considérables pour s’assurer qu’elle développe un degré de sociabilité proportionnel à sa beauté lorsqu’elle serait adulte. Le duc pensait qu’après avoir expliqué que les manières et la morale étaient comme les règles d’un jeu, et que l’ordre existait pour que chacun ait une chance équitable de jouer, elle serait devenue leur fille idéale.

Mais le duc et la duchesse n’avaient jamais oublié. Si Rachel devait cesser de penser qu’elle devait suivre les règles, ils n’avaient aucune idée de ce que leur fille pourrait faire. C’était pourquoi ils s’étaient tant attachés à lui donner l’éducation morale nécessaire à un enfant de la noblesse.

Malgré toutes les éventualités, cette résiliation de ses fiançailles… Ils ne l’avaient jamais vu venir.

Le duc savait mieux que quiconque ce qui venait de se passer. Le prince Elliott, ce fou furieux, venait de bouleverser l’échiquier.

*****

Alors que le duc criait ses ordres, poussé par la nécessité de prendre les devants le plus rapidement possible, un serviteur se précipita dans la pièce, essoufflé.

« Nous avons reçu plus de détails ! »

« Y a-t-il eu du mouvement ?! », demanda le duc.

Le serviteur, le visage bleu, commença son rapport. Le duc, stressé au plus haut point, l’écouta attentivement.

« Je vais vous expliquer en détail. La jeune femme a accepté l’annonce de Son Altesse sans aucun changement d’expression, et elle est restée silencieuse pendant qu’elle était attachée et emmenée au donjon. »

Le duc se figea un instant avant de s’affaler dans son fauteuil comme s’il s’était effondré. Le majordome se précipita à ses côtés.

Le duc regarda distraitement dans le vide pendant un moment, puis marmonna : « Le prince… Il est fichu. »

Le majordome, qui connaissait bien l’éducation de Rachel, hocha gravement la tête et dit : « Oui, monsieur. »

Si Rachel avait déjà décidé d’agir, ce n’était plus du ressort du duc. Il n’avait pas d’autre choix que de la laisser faire ce qu’elle voulait et d’attendre qu’elle se soit défoulée.

N’étant plus pressé, le duc s’assit devant son bureau et mit lentement du tabac dans sa pipe.

Je crois que je vais fumer. Oui, c’est ce que je vais faire. Parce qu’il n’y a rien d’autre que je puisse faire, se dit-il

Et alors qu’il prenait une bouffée et expirait, le duc était rempli d’un grand nombre d’émotions. Puis, il s’était souvenu de quelque chose.

« Quand même, George doit avoir été à la fête. Que fait-il maintenant ? »

George aurait été proche du prince en tant qu’une de ses connaissances. S’il avait agi en tant que médiateur ou avait fait un rapport au duc avant que les choses n’en arrivent à ce point, ce tumulte aurait pu être réglé avant qu’il ne devienne incontrôlable.

Alors que le Duc laissait échapper un soupir épuisé, le serviteur qui avait apporté les rapports donna avec hésitation un suivi sur George.

« Eh bien, vous voyez… Il semblerait que le jeune maître soit aussi épris de la fille de la baronne, qui était au centre du drame, que Son Altesse et les autres ont provoqué. Il a participé activement à la condamnation qu’ils lui ont infligée. »

Le duc et le majordome se regardèrent l’un et l’autre.

« George… est un homme mort. »

« Oui, monsieur. »

« Comment, après avoir vécu seize ans avec sa sœur, cet imbécile n’a-t-il pas pu comprendre quelque chose d’aussi simple ? »

George avait dû voir que Rachel était déchaînée, alors à quoi pensait-il ?

Si la colère de Rachel envers son frère venait à exploser, le duc n’avait aucune intention de défendre son fils et héritier. Il pourrait être pris entre deux feux. Le duc estimait sa propre peau bien plus que celle de cet idiot de fils qui avait tout gâché.

*****

Alors que le duc regardait le plafond et tirait une bouffée de sa pipe, il y eut un vacarme dans le hall. Sa femme se précipita dans la pièce.

« Oh, Dan ! »

« Iseria ! »

Le duc se mit sur ses pieds tandis que sa femme trébuchante sautait dans ses bras.

« C’est Rachel, elle… elle est… »

« Je sais. J’écoutais les rapports. Essaie d’être forte ! »

La duchesse avait complètement perdu la tête, et elle continuait à crier, les larmes aux yeux.

« Mais, mon cher ! Si elle les laisse l’escorter… alors elle a l’intention de le tuer ! L’avenir de notre maison et la vie de Sa Majesté sont sur le point de voler en éclats ! »

« Tout va bien se passer ! Rachel a dix-sept ans maintenant. Elle n’est plus une enfant. Elle est assez grande pour prendre des décisions d’adulte. »

Le duc tenta de consoler sa femme en sanglots avec des mots auxquels il ne croyait pas. Elle n’avait pourtant pas trouvé de réconfort dans ces mots.

« Dan, tu ne comprends pas. Quand elle n’était qu’une petite fille, je l’ai surprise en train de chanter Lizzie Borden tout en balançant gaiement une hache ! »

(NdT : Lizzie Andrew Borden [1860 - 1927] était une femme américaine frappée d’infamie après avoir été jugée et acquittée pour le meurtre à la hache de son père et sa belle-mère en 1892 à Fall River dans le Massachusetts. Le cas a été commémoré dans une comptine populaire de saut à la corde :

Lizzie Borden a pris une hache

Quarante coups, elle a donné à sa mère.

Quand elle a vu le résultat de sa tâche,

Quarante et un coup elle a donné à son père.)

« Calme-toi, Iseria ! Ça va aller. Tout va bien se passer ! Rachel est devenue une vraie jeune femme au cours des dix dernières années. De nos jours, nous n’avons pas à nous inquiéter qu’elle matraque Son Altesse à mort avec un instrument contondant. Je suis sûr qu’elle utilisera des méthodes difficiles à réprimer pour détruire sa psyché ! »

« Vraiment ? Rachel va-t-elle vraiment s’en sortir ? Elle pourrait bien brûler la capitale pour le tuer. »

« Crois en ta fille, Iseria. Elle est intelligente et bien éduquée. Elle ne ferait jamais quelque chose de stupide qui la ferait tomber avec lui. Je suis sûr qu’elle emploiera des méthodes qui ne laissent aucune trace pour le démolir entièrement. »

À quoi pensait sa fille en ce moment ? Était-il sûr qu’elle n’aurait pas recours à une arme ? Le duc n’en avait aucune idée. Il ne savait même pas comment résoudre cette situation. Tout ce qu’il pouvait faire à ce stade, c’était soupirer.

Un certain nombre de serviteurs s’étaient rassemblés autour d’eux, mais ils étaient tous dans la famille depuis bien trop longtemps pour se moquer de la situation actuelle.

*****

« Pardonnez-moi. »

Alors que le duc frottait le dos de sa femme avec réconfort, une personne à la voix si calme qu’elle semblait déplacée dans cette excitation nerveuse demanda la permission d’entrer dans la pièce.

En regardant pour voir qui c’était, le duc trouva la servante personnelle de Rachel et amie d’enfance, Sofia, inclinant la tête.

« Oh, Sofia. Ton timing est parfait. As-tu entendu parler de ce qui arrive à Rachel ? »

« Oui. Bien sûr. »

« Je vais me rendre au bureau du gouvernement pour déposer une plainte immédiate. Tu vas m’accompagner, alors prépare-toi. Tu apporteras à Rachel les choses dont elle aura besoin pendant son séjour en prison. S’ils refusent, utilise mon nom pour qu’ils te laissent passer. »

Dans tous les cas, ils devaient s’assurer que Rachel, qui avait été emmenée de la fête directement au donjon, avait des vêtements de rechange et d’autres choses nécessaires. Il pensait qu’il serait plus rapide de demander à Sofia, qui connaissait le mieux Rachel, de faire les préparatifs.

Cependant, Sofia répondit : « Non, c’est déjà fait. »

« Tu es déjà préparée ? Je n’en attendais pas moins de toi. »

« Oui. Les préparatifs ont été faits, et ses affaires ont déjà été livrées. »

« Je vois. Tu travailles vite. Hein ? Déjà livrées ? »

Mais alors qu’il regardait Sofia, qui venait de dire nonchalamment quelque chose qu’il ne pouvait ignorer, la jeune fille aux cheveux cendrés et les deux autres servantes derrière elle hochèrent la tête.

« La jeune maîtresse a découvert à l’avance que ses fiançailles allaient se terminer ce soir. C’est pourquoi, sous sa direction, nous avons déjà préparé la nourriture et les produits de première nécessité dont elle aura besoin pour les trois prochains mois et les avons livrés au donjon. »

Contrairement à Rachel, qui pouvait montrer une quantité surprenante d’expression en privé, Sofia portait un masque d’acier. Elle livrait des faits choquants comme si elle ne faisait que relater des faits de bon sens, sans sourciller.

« Hein ? », murmura le duc.

Toutes sortes de doutes traversaient son esprit tandis qu’il se passait une main sur le front.

« Attends. Elle le savait à l’avance ? Pourquoi Rachel se serait-elle délibérément abstenue de l’empêcher ? Et je sais que ce n’est que pour une personne, mais comment as-tu transporté assez de provisions pour vivre pendant trois mois dans le château ? »

« Elle n’était pas sûre qu’il irait vraiment jusqu’au bout, mais lorsqu’elle apprit qu’il prévoyait d’annuler les fiançailles, la jeune maîtresse a dit : “Alors vous me dites que je peux me débarrasser de cet idiot d’une manière qui le laisse responsable, et que j’ai droit à des vacances ? Splendide !” », expliqua Sofia

Le ton de Sofia disait clairement ceci : « Pourquoi demander quelque chose d’aussi évident ? »

« Rachel… », dit le duc en soupirant.

« De plus, depuis que ses fiançailles avec le prince ont été décidées, nous, les Chats noirs de la nuit noire, nous nous insérons dans des postes clés du palais. Tant que nous savons à l’avance qu’un événement comme celui-ci va se produire, nos forces peuvent facilement faire entrer en douce des fournitures sous couvert de leurs fonctions officielles. »

« Rachel, qu’est-ce que tu essaies de faire exactement ?! »

Le duc fut soulagé d’apprendre que sa fille était dans un état d’esprit plus égal qu’il ne l’avait craint. Mais, en même temps, il frissonna de terreur en réalisant que les ténèbres de sa fille étaient plus profondes qu’il ne l’avait jamais soupçonné.

Comment une organisation de renseignements pouvait-elle opérer chez lui sans qu’il le sache ? Et comment étaient-ils si bien implantés dans le palais qu’ils avaient le champ libre pour faire entrer des chariots remplis de fournitures ? C’était plus que ce que les réseaux d’espionnage de certaines nations pouvaient gérer. Si Rachel était allée aussi loin, il lui serait facile d’assassiner un petit prince, non ?

Des pensées comme celles-ci se bousculaient dans la tête du duc. Il décida d’abandonner la réflexion.

« De toute façon, je vais aller au bureau du gouvernement et déposer cette plainte », dit-il.

« Prenez soin de vous », lui répondit Sofia.

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2 commentaires :

  1. merci pour le chapitre

  2. amateur_d_aeroplanes

    Les parents dépassés par leurs enfants en crise d’adolescence sont vraiment à plaindre 😂

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