Mushoku Tensei (LN) – Tome 9 – Chapitre 7

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Chapitre 7 : Poussée décisive

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Chapitre 7 : Poussée décisive

Partie 1

Il avait fallu trois jours pour que Rudy et moi rentrions à la ville de Charia. Pendant ce temps, nous avions parlé de toutes sortes de choses. L’un des principaux sujets de conversation était ce que Rudy avait vécu ces dernières années. Il avait apparemment été abandonné par une jeune femme nommée Éris, ce qui l’avait quelque peu traumatisé. Depuis lors, il avait du mal à « être performant » avec les femmes.

J’avais en fait entendu quelques rumeurs sur cette Éris Boreas Greyrat à la cour royale. On disait qu’elle était incontrôlable et violente, qu’elle ressemblait plus à une bête sauvage qu’à une fille bien élevée. D’après ce que Rudy m’avait dit, elle n’était probablement pas aussi mauvaise que je l’avais imaginée… mais quand même. Il l’avait escortée du Continent Démon jusqu’à Asura, et elle l’avait jeté parce qu’il n’était pas assez bien ? C’était juste incroyable. J’avais dit à Rudy que si jamais je la rencontrais, je lui dirais tout ce que je pense. Mais il était devenu blanc comme un linge et m’avait dit que c’était une très mauvaise idée. Au moins, Éris était une épéiste très douée.

Je ne pouvais pas dire qu’entendre tout ça m’ait rendue très heureuse. Mais en fin de compte, c’était seulement grâce à Éris, qui avait largué Rudy, qu’on s’était retrouvés ici. Au moins, il y a eu du bon dans tout ça.

… Mais Rudy était-il vraiment venu ici à cause de son état ? N’enquêtait-il pas sur l’incident de téléportation ?

Eh bien, peut-être qu’il avait juste poursuivi deux objectifs à la fois.

Finalement, nous étions revenus aux portes de l’université. À ce moment-là, j’avais retrouvé ma tenue habituelle — le costume que je portais quand j’étais « Fitz. »

« Bon, je suppose que je dois aller faire mon rapport à la princesse Ariel. », avais-je dit.

« Bien sûr. Je… te verrai bientôt, d’accord ? », dit Rudy avec un sourire un peu gêné.

Il m’avait fallu un moment pour comprendre exactement ce qu’il voulait dire par là. J’avais alors rassemblé les pièces du puzzle, et mon visage devint très chaud. Je rougissais à nouveau jusqu’aux oreilles.

« Oui… bien sûr ! »

On sortait officiellement ensemble maintenant, non ?

Ça me rendait vraiment heureuse. Mon corps se sentait presque en apesanteur. Je n’avais jamais su ce que les gens voulaient dire quand ils parlaient d’« être aux anges », mais maintenant je comprenais. J’étais allée directement à la salle du conseil des élèves pour donner à la princesse Ariel un compte rendu de la situation. C’était l’heure du déjeuner maintenant, donc elle serait certainement là.

J’avais pensé à toutes sortes de choses en marchant. Il y avait tellement de choses que j’avais toujours voulu faire avec Rudy. Comme… faire du shopping en ville ensemble, par exemple. Mais pour ça, il faudrait que je sois déguisée en garçon, et les gens pourraient regarder Rudy d’un drôle d’air.

Mais ça n’avait pas vraiment d’importance, non ? Du moins tant qu’on s’aimait.

Mais bon… les garçons avaient tendance à penser à l’amour d’une manière très physique, non ? Luke disait toujours :

« Si vous ne couchez pas ensemble, vous finirez par vous éloigner. »

Rudy ne semblait pourtant pas trop intéressé par mon corps…

Qu-Qu’est-ce que j’étais censée faire pour ça ?

◇ ◇ ◇

Quand j’étais entrée dans la salle du conseil des élèves, la Princesse Ariel regarda mon visage et soupira.

« Je vois que ça n’a pas du tout marché. »

« Huh ? Uhm, Princesse Ariel… ? »

« Cela semblait être un plan parfait au départ, mais avec le recul… même s’il y avait un certain risque que tu meures de froid, il était idiot de s’attendre à ce qu’il arrache les vêtements d’un ami. »

Pour une raison quelconque, elle semblait avoir tiré une mauvaise conclusion. Cette partie s’était en fait très bien passée…

« C’est bon, Sylphie. Dis-nous exactement ce qui s’est passé, aussi calmement que possible. », intervint Luke.

« Euh, entendu. Le plan que tu as mis au point à en fait très bien marché, Princesse Ariel. »

La princesse Ariel haussa un sourcil en signe de surprise, mais réussit à garder sa voix stable.

« C’est vrai ? Je dois dire que tu n’as pas l’air particulièrement ravie. »

« Uhm, oui. À propos de ça… »

« Je suis désolée. Tu pourras expliquer ça plus tard. Commence ton rapport, s’il te plaît. »

« Oh, d’accord. »

Essayant de me calmer un peu, j’avais décrit le résultat de notre opération étape par étape. En gros, les choses s’étaient réellement passées exactement comme prévu. Nous nous étions réfugiés dans la grotte et nous nous étions dit comment nous nous sentions près du feu. Rétrospectivement, cela ressemblait presque à un rêve. Je pouvais dire que je rougissais à nouveau.

La princesse Ariel m’avait cependant regardé avec une confusion grandissante. Elle se demandait manifestement quel était le problème.

« Bref, euh… Rudy a été un peu déprimé après ça. Il a dit qu’il était en fait venu à l’Université pour trouver un remède à son état. »

« Attends, quoi ? »

« Huh ? Euh, tu sais. Il cherchait un moyen de guérir son, euh, impuissance. »

« Je vois. Excuse-moi. J’ai été un peu surprise, c’est tout. »

La Princesse Ariel avait plaqué une main sur sa bouche, une expression incrédule sur le visage. Je pouvais dire ce qu’elle pensait : J’avais entendu les rumeurs, mais je n’avais jamais pensé qu’elles pouvaient être vraies. Pourquoi s’inscrire à l’Université de la Magie pour une telle raison ? C’est un endroit pour apprendre la magie, pas un centre médical.

« Je dois dire que je suis un peu déçue par ce Rudeus. Un homme doit être performant quand ça compte, non ? Je pensais qu’il était inconscient, mais je ne m’attendais pas à ce qu’il embarrasse une dame de cette façon. Surtout celle qui a été assez courageuse pour faire le premier pas. »

Les mots de la Princesse Ariel étaient durs, mais elle essayait probablement de garder son sang-froid et son contrôle. Elle savait que je me mettrais en colère, et une fois que je l’aurais fait, elle pourrait adopter un ton apaisant et apologétique, et faire avancer la conversation sans révéler sa confusion. C’était une astuce qu’elle utilisait très fréquemment.

Mais à ma surprise, Luke était intervenu pour objecter avant que je puis dire un mot.

« Princesse Ariel, je pense que vous êtes tout à fait injuste. Parfois, un homme ne peut tout simplement pas s’empêcher de faire ce genre de choses. Rudeus n’a pas fait le choix conscient de repousser Sylphie. En fait, je pense que ça explique pourquoi il a été si hésitant jusqu’à maintenant. »

« L-Luke… ? »

« Je me suis demandé pourquoi il avait toujours l’air si peu sûr de lui. Pauvre homme. Il a dû venir ici par pur désespoir, sans savoir où chercher de l’aide… »

Luke pouvait être frivole et même grossier parfois, mais il ne répondait presque jamais à la Princesse Ariel. Il lui donnait parfois des conseils, mais il n’était pas du genre à rejeter catégoriquement l’opinion de son suzerain de cette façon. En fait, je ne me souvenais pas qu’il lui avait déjà parlé aussi fermement auparavant.

La Princesse semblait un peu décontenancée.

« … Mes excuses. Je suppose que je suis allée un peu trop loin. »

« Ce n’est pas grave, Princesse Ariel. Je ne m’attendais pas à ce qu’une femme comprenne ces choses. »

Avec un petit hochement de tête, Luke se tourna vers moi.

« Sylphie, veux-tu guérir l’état de Rudeus ? »

« Huh ? Uhm, oui, bien sûr. »

Je m’étais inquiétée pour moi pendant tout ce temps. Mais en y réfléchissant, Rudy était visiblement déprimé par la situation. Il avait commencé à me parler de façon très formelle, et j’avais vu quelque chose qui ressemblait à de la peur dans ses yeux. Ses mains tremblaient, et pas à cause du froid.

« Rudy a très mal pris ce qui s’est passé. Si je peux faire quelque chose pour l’aider, je le ferai. »

« Même si c’est difficile ? »

« O-Oui. Je ferai tout ce qu’il faut. »

Il y a longtemps, Rudy m’avait sauvée d’une situation vraiment misérable. Je voulais lui rendre cette faveur en nature, si je le pouvais.

« Très bien alors. Attend ici, veux-tu ? Il y a quelque chose que je dois te donner. Veuillez m’excuser un moment, Princesse Ariel. »

Sans plus d’explications, Luke quitta la salle du conseil des élèves d’un pas rapide.

La princesse Ariel fronça légèrement les sourcils en le regardant partir.

« Je suis désolée, Sylphie. Je n’aurais pas dû dire ça de Rudeus. »

« Ce n’est pas grave, je ne suis pas contrariée. Je suis un peu surprise que Luke se soit disputé avec toi comme ça, par contre. Il ne fait pas ça très souvent. »

En plus de ça, je ne m’attendais pas à ce que Luke prenne la défense de Rudy. J’avais l’impression qu’il ne l’aimait pas beaucoup, et il ne semblait pas être du genre à prendre la défense de l’homme dans une situation comme celle-ci.

« En tout cas, ça a l’air d’être un obstacle assez sérieux. »

« Oui. Que dois-je faire, Princesse Ariel… ? »

« Eh bien, Luke semble avoir une sorte de plan en tête… mais je connais moi-même quelques remèdes contre l’impuissance. »

« Vraiment ? »

« En effet. C’est une de ces petites choses qu’on vous apprend en tant que membre de la famille royale. »

C’était assez logique. Quand une princesse se mariait avec quelqu’un, il était très important pour elle d’avoir des enfants. Même si leur mari avait un problème comme celui de Rudy, elles devaient trouver un moyen d’y parvenir.

« On m’a enseigné tout cela quand j’étais assez jeune, et j’ai bien peur de ne pas y avoir prêté beaucoup d’attention. Mais je me souviens de certaines choses. En général, vous commencez par les faire boire. »

« Vraiment ? Hmm… »

Je m’étais souvenue de ce que j’avais vu dans le réfectoire l’autre jour. Rudy, Zanoba et le roi Badigadi avaient bu ensemble, et ils étaient tous de très bonne humeur. Je n’avais pas moi-même expérimenté l’alcool, mais je savais qu’il permettait aux gens de se comporter plus facilement que d’habitude. Grossièrement, cela vous mettait dans un état d’esprit altéré… mais si l’état de Rudy était déjà anormal, cela signifiait peut-être que cela le rendrait « normal » à la place ?

La princesse Ariel avait ensuite énuméré un certain nombre de méthodes spécifiques pour séduire les hommes. Plutôt que de guérir physiquement l’impuissance, la plupart de ses conseils semblaient viser à exciter une cible autrement désintéressée. Pourtant, je ne doutais pas de leur efficacité. La famille royale d’Asura s’assurait que ses membres étaient bien éduqués dans toutes sortes de domaines.

« … après ça, tu dis que tu as chaud, et tu fais glisser ta robe le long de ton épaule. »

« Est-ce que ça marcherait vraiment ? »

« Oh, j’imagine que oui. Tu es après tout extrêmement mignonne. Une fois que l’humeur est bonne, tout ce dont tu as besoin est une bonne ligne d’arrivée… »

Au moment où Luke était revenu, nous avions élaboré les grandes lignes d’un plan. Il nous écouta parler pendant quelques secondes en silence, puis nous avait brusquement interrompus.

« Quel genre d’idiot se plaint de la chaleur par ce temps glacial ? De toute façon, toute votre démarche est malencontreuse. Sylphie n’a pas assez de courbes pour tenter un homme avec son corps. »

« Ah… »

Je m’étais retrouvée à court de mots, et la Princesse Ariel lança à Luke un regard de reproche.

« Étais-tu obligé de le dire aussi crûment, Luke ? La pauvre fille est morte d’inquiétude à cause de ça. »

« … Princesse Ariel, les hommes de la famille Notos Greyrat sont traditionnellement attirés par les femmes à forte poitrine. À titre d’exemple, je ne ressens moi-même aucune attirance pour Sylphie. »

Les Notos Greyrats aimaient les filles à forte poitrine. C’était de notoriété publique pour tous ceux qui étaient associés à la noblesse d’Asura, tout comme l’amour contre nature de la famille Boreas pour les hommes bêtes.

***

Partie 2

« Donc vous dites que je ne peux pas le séduire avec mon corps ? »

« Tu peux essayer. Mais ça ne marchera pas. »

Je dois admettre qu’entendre ça m’avait fait un peu mal. D’habitude, les insultes de Luke ne me dérangeaient pas du tout, mais en ce moment, je n’avais pas du tout confiance en mon propre attrait.

« Cependant… si tu le convaincs de boire ça, tu as une chance. »

Luke m’avait tendu une petite bouteille qui tenait parfaitement dans la paume de ma main. Je l’avais regardé avec confusion.

« C’est quoi ce truc, Luke ? »

« Un puissant aphrodisiaque qui revigore et excite toute personne qui le boit. »

« Un aphrodisiaque ? ! »

Luke hocha profondément la tête.

« Il a été fabriqué il y a des années, dans la région de Fittoa, à partir des pétales de la fleur de Vatirus. La méthode de fabrication n’était connue que du Seigneur féodal de Roa, qui en monopolisait la vente. Après la disparition de la région de Fittoa, toute production a cessé. Je crains que personne ne sache plus comment la fabriquer. En d’autres termes c’est un produit très rare. Son prix de vente actuel dépasse les 100 pièces d’or par bouteille. »

Quand Luke l’avait acheté, elle valait environ quinze pièces d’or Asura. Il en avait acheté cinq à l’époque, et en avait déjà utilisé deux lui-même. L’effet était censé être remarquable.

« J’avais pensé le garder pour les mauvais jours et le vendre si jamais je me trouvais dans un besoin urgent d’argent. Mais je vais te le donner, Sylphie. »

« Quoi ? Tu vas me donner quelque chose d’aussi précieux ? »

« C’est exact. »

Avec un petit signe de tête, Luke énuméra plusieurs choses dont je devais être consciente. Une fois qu’un homme avait pris ce truc, sa libido passait à la vitesse supérieure. Si je ne pouvais pas suivre, il était préférable que j’en prenne aussi. De plus, si nous en prenions tous les deux, notre première fois ne serait probablement pas cette chose douce et romantique que j’avais imaginée.

« Luke… merci beaucoup. »

« N’y pense pas, Sylphie. Tu m’as sauvé la vie assez souvent. »

Luke et moi avions développé une étrange amitié au fil des ans. J’en étais profondément reconnaissante maintenant.

Il y avait cependant une autre personne dans la pièce, et elle n’aimait pas être tenue à l’écart de quoi que ce soit.

« Vous vous entendez si bien tous les deux, hein ? Je suppose que je dois aussi participer. »

Souriant comme une sainte, la Princesse Ariel m’avait tendu deux pièces d’or Asura. Cela ne semblait pas être grand-chose, mais c’était suffisant pour acheter presque tout ce que je voulais dans cette ville.

« Mais Princesse Ariel ! C’est ton argent personnel, non ? »

« C’est exact. Tout ce que j’ai eu pour ce mois-ci. »

Depuis notre arrivée à l’Université de la Magie, nous avions fait beaucoup d’efforts pour obtenir des ressources financières, et nous avions une bonne réserve d’argent à présent. Mais il s’agissait de nos fonds de guerre, réservés à nos projets. Nous le gardions séparé de l’argent que nous dépensions au quotidien. La princesse Ariel était bien consciente qu’elle et Luke avaient tendance à être négligents dans leurs dépenses, aussi avait-elle accepté de limiter strictement leur accès à nos fonds.

« Maintenant que les choses en sont arrivées là, c’est le maximum que je puisse faire pour t’aider. »

« Tu as déjà fait tellement, Princesse Ariel… Je suis désolée pour tous les problèmes. »

« Heh. Aussi bienveillante que toujours, votre Altesse. »

En y repensant, nous nous étions un peu emportés tous les trois. Nous étions tous très fiers d’avoir fait passer notre amitié en premier. Pourtant, cet épisode nous avait rapprochés. Ça devait compter pour quelque chose, non ? Nous étions tous les trois unis pour lutter contre un ennemi commun : le dysfonctionnement érectile de mon nouveau petit ami.

« Bonne chance à toi, Sylphie. »

« Merci beaucoup à vous deux ! Je vais le faire ! »

Pleine d’énergie en vue de la longue bataille qui m’attendait, j’étais sortie de la salle du conseil des élèves avec confiance. Je me dirigeais vers le quartier commercial de Sharia, et plus précisément chez un vendeur de boissons.

◇ ◇ ◇

La nuit était tombée, et je me tenais dans un couloir avec deux bouteilles d’alcool hors de prix dans mon sac. Pour être parfaitement honnête, je ne connaissais pas grand-chose à l’alcool. Pour commencer, je n’en avais jamais bu avant. Et je n’avais aucune idée de ce que Rudy aimait. Cependant, j’étais persuadée qu’un produit aussi cher ne pouvait pas être trop mauvais.

J’avais aussi changé de sous-vêtements avant de venir. Je portais l’ensemble que la Princesse Ariel avait choisi pour moi il y a quelque temps. C’était le bon moment pour donner une nuit de repos à mon bustier en soie.

Bien sûr, j’avais aussi une certaine petite bouteille dans la poche de mon uniforme.

« OK… »

Tout était prêt. Tout allait bien se passer.

Pourtant, je devais m’accorder une minute pour prendre quelques longues et profondes respirations. Maman et papa… donnez-moi votre bénédiction, s’il vous plaît. Je vais devenir une femme ce soir…

Une fois que j’avais calmé mes nerfs, je tendis la main qui frappa à la porte devant moi. Y avait-il une chance que Rudy soit parti avec Zanoba à cette heure de la nuit ? Non, non, ça va bien se passer. Il avait dit qu’il allait se reposer ce soir.

« Oui… ? Oh, Syl- Maître Fitz. Entrez. »

Au moment où Rudy ouvrit la porte, il eut l’air surpris de me trouver là. À son invitation, j’étais entrée dans sa chambre. J’avais également pris la liberté de fermer et de verrouiller la porte derrière moi.

« Qu’est-ce qu’il y a ? », demanda Rudy d’une voix douce.

Nous avions tous les deux convenu qu’il serait préférable de prendre une nuit pour récupérer de notre voyage, mais j’étais là quand même.

« Uhm… En fait, je suis venu passer la nuit ici. »

« … Oh. O-Okay ! Eh bien, pourquoi ne pas t’asseoir, alors ? »

J’avais eu l’impression que Rudy voulait faire un commentaire à ce sujet, mais il l’avait gardé pour lui et m’avait simplement proposé une chaise à la place. En fait, son expression semblait un peu… découragée. Je ne le dérangeais pas, hein ? Ça allait marcher, non ?

Je m’étais assise lentement, j’avais enlevé mes lunettes de soleil et j’avais sorti les deux bouteilles d’alcool de mon sac. Je les avais posées sur la table avec un petit encas que j’avais préparé — des noix mélangées avec un arôme épicé. J’avais aussi pris de la viande fumée au cas où Rudy ne les aimerait pas.

« C’est quoi tout ça ? »

« Eh bien, vois-tu, j’ai pensé que nous pourrions… au moins fêter nos retrouvailles ? »

« … C’est vrai, bien sûr. Oui, nous devrions vraiment commémorer l’occasion, hein ? »

Rudy s’était assis lui aussi, tout en se grattant la joue.

À ce moment-là, j’avais réalisé que nous n’avions pas de tasses. C’était un problème, à moins que nous allions commencer à boire directement à la bouteille. Est-ce que je devais retourner en chercher ?

« Ne t’inquiète pas, j’ai des gobelets. J’ai moi aussi quelques biens. »

Lisant en quelque sorte dans mes pensées, Rudy s’était levé avec un sourire en coin et prit une paire de tasses sur une étagère à côté de la pièce.

Elles étaient grises et avaient une surface parfaitement lisse. Étaient-elles faites d’une sorte de roche ? Elles étaient un peu lourdes dans la main. En dehors du poids, cependant, elles ressemblaient à quelque chose qu’un noble Asura aurait pu posséder.

« Ça a l’air cher. »

« En fait, je les ai fabriqués moi-même avec de la magie de Terre. Je suppose que ça les rend inestimables. »

« Sans blague ? C’est incroyable. »

C’était pourtant logique. Il était vraiment doué pour ce genre de choses, non ?

J’avais ouvert la première bouteille et versais un peu du liquide ambré dans nos tasses. Rudy rétrécit légèrement ses yeux en regardant.

« Ça a l’air d’être un truc assez fort. »

« Oui. Je n’y connais rien en alcools, mais j’en ai apporté des chers. »

« Es-tu sûre que c’est une bonne idée ? »

« Hm ? Oh, c’est bon. Après tout, c’est une occasion spéciale. »

Était-il inquiet de savoir combien j’avais dépensé pour ça ? Je devais garder pour moi le fait que la Princesse Ariel m’avait donné l’argent pour les acheter. Connaissant Rudy, il aurait probablement pensé qu’il lui devrait quelque chose.

Quoi qu’il en soit, j’avais versé les boissons et sorti nos snacks. Jusqu’ici tout allait bien. L’aphrodisiaque… était censé sortir plus tard dans la soirée. Bien.

« Dans ce cas, portons un toast. Aux retrouvailles de deux vieux amis du village Buena ! »

« … Et à notre avenir ensemble, Sylphie. »

« Santé ! »

Notre futur ensemble… ? Honnêtement, parfois Rudy disait les choses les plus embarrassantes sans prévenir. Me sentant rougir à nouveau, j’avais pris une grande gorgée de ma tasse…

Et je m’étais rapidement étouffée avec.

C’était quoi ce truc ? Ma gorge était en feu !

« Tu vas bien ? Peut-être que nous aurions dû le diluer. »

« Le diluer ? »

« Quand tu bois quelque chose d’aussi fort, les gens le diluent généralement un peu pour le rendre plus facile à boire. »

Attends, vraiment ? Personne n’avait pris la peine de me le dire. Rudy avait un sourire légèrement amusé sur le visage, ce qui me contrariait un peu.

« Eh bien, comment pourrais-je le savoir ? Je n’ai jamais essayé ce truc avant. »

« Hé, je n’essaye pas de me moquer de toi. Attends une seconde, d’accord ? »

Rudy déplaça la majorité du liquide de ma tasse vers la sienne, puis invoqua de l’eau chaude et fumante dans la mienne en utilisant la magie.

« Vas-y, essaie ça. »

Légèrement réticente, j’avais pris une petite gorgée. L’odeur douloureusement forte qui s’était attardée dans le fond de mon nez s’était évaporée, remplacée par un arôme plus doux et plus agréable. C’était en fait assez bon.

« Ça me rappelle… l’eau chaude était la raison pour laquelle j’ai commencé à apprendre la magie avec toi, hein ? »

« Hmm. C’était ça ? »

« Quoi, tu as oublié ? Une de ces brutes m’avait jeté de la boue dans la rue, et tu l’avais lavé. »

Ça m’avait vraiment ramenée en arrière. Même enfant, Rudy pouvait lancer silencieusement de la magie combinée sans même y réfléchir à deux fois. Je n’arrivais toujours pas à le faire comme lui, je devais utiliser différents sorts en succession rapide pour produire un effet similaire.

« Oh, c’est vrai. Wôw, ça me rappelle des souvenirs… »

« Oui. »

Cela nous avait permis de commencer à évoquer le bon vieux temps. Mes souvenirs au village Buena commençaient à devenir un peu flous, mais lorsque nous avions commencé à parler du sujet, beaucoup de choses m’étaient revenues.

Nous ne pourrions jamais revenir à cette période de notre vie. D’abord, le village Buena avait disparu pour de bon. La colline sur laquelle nous avions joué était toujours là, mais l’arbre avait disparu. Mais c’était le bon temps. Je passais mes journées à jouer et à pratiquer la magie sans me soucier de quoi que ce soit, et les progrès que je faisais jour après jour me remplissaient toujours de joie. J’étais toujours excitée lorsque je parvenais à améliorer mes compétences ou à apprendre quelque chose de nouveau, bien que ces jours-ci, je pensais généralement à la façon dont je pourrais utiliser un sort en combat.

« Ces jours-là me manquent vraiment… »

Plus nous parlions, plus je me sentais détendue. Est-ce que c’est ce que l’on ressentait quand on était ivre ? Hmm.

« Oh ! Attends. Avant que j’oublie… »

Sortant de ma brume nostalgique, je sortis la petite bouteille de ma poche de poitrine et la posai lentement sur la table.

Rudy inclina la tête d’un air perplexe.

« Qu’est-ce que c’est ? »

« Uhm, eh bien… c’est un médicament spécial. Pour ton problème. »

***

Partie 3

Je n’étais pas sûre que ce soit la meilleure façon de faire boire un aphrodisiaque à Rudy. J’aurais pu le mélanger à sa boisson sans qu’il s’en aperçoive, mais c’était un mauvais tour à jouer à quelqu’un que l’on aimait. Et puis, avouer que j’avais apporté un aphrodisiaque pourrait lui faire mal comprendre certaines choses. Je n’aimais pas non plus beaucoup cette idée. Alors j’avais décidé de l’appeler « médicament », ce qui n’était pas exactement un mensonge.

« Vraiment… ? Hmm. J’ai l’impression d’avoir déjà vu ce truc quelque part. »

« Oui, vraiment. Euh, j’espérais que tu essaierais, Rudy. »

Rudy sourit un peu tristement à ce propos. Il était évident qu’il n’était pas optimiste. Il avait probablement essayé de nombreux supposés remèdes, dont aucun n’avait fonctionné. Pourtant, il prit une gorgée de la bouteille sans un mot, vidant d’un coup les deux tiers de son contenu. J’étais un peu étonnée de la facilité avec laquelle il avait avalé tout ce liquide rose à l’aspect dangereux sur ma seule parole. Et si ça avait été une sorte de poison ?

Oh. J’avais oublié de lui dire combien il devait en prendre.

« Est-il bon de prendre ce truc avec de l’alcool ? », demanda Rudy.

« Uhm, ils ont même dit que c’était bon de le mélanger dans une boisson. Et puis, d’après ce que j’ai entendu, l’effet est immédiat. »

J’étais déjà en train d’enlever ma cape au moment où je prononçais ces mots. Je ne portais donc plus que ma chemise et mon soutien-gorge. J’avais honnêtement un peu froid. Selon Luke, je n’avais pas besoin de me donner la peine de montrer mes épaules tant qu’il pouvait voir clairement mon cou et mes seins.

« Si ça commence à marcher, eh bien… tu n’as pas besoin de te retenir, d’accord ? »

Les sourcils de Rudy s’étaient froncés à ce moment-là. Son regard était fixé sur le haut de mon corps. Le fait qu’il me fixait aussi ouvertement était assez gênant. Mais je suppose que j’étais… en train de le séduire, non ? J’espère que je ne passais pas pour une effrontée… Ça allait bien se passer, non ? Il ne m’en voudra pas, hein ?

J’avais l’impression d’être plus nerveuse que lui. J’avais honnêtement espéré que l’alcool me donnerait un peu plus de courage que ça.

Peut-être que j’avais besoin de m’engager plus entièrement.

… Très bien. Avec un petit signe de tête, j’avais tendu la main vers la petite bouteille d’aphrodisiaque.

« Quoi ? Tu en prends aussi, Sylphie ? », demanda Rudy tout confus.

Au lieu de répondre, je vidai tout le liquide rose qui restait à l’intérieur. C’était épais et légèrement amer, mais je l’avais fait passer avec un peu d’alcool et j’avais avalé entièrement.

Presque instantanément, j’avais senti une étrange chaleur grandir au creux de mon estomac. Pour essayer de me distraire, j’avais attrapé le bol de noix. Après en avoir mangé trois poignées, j’avais pris une autre gorgée d’alcool. Mon premier verre était vide à présent.

« Tu ne devrais pas boire trop vite, Sylphie. Tu pourrais te rendre malade. »

« Oui, je sais. Je suis juste un peu nerveuse, c’est tout. »

« Ah, d’accord. Je suppose que c’est la première fois que tu bois… »

Rudy sirotait tranquillement sa propre boisson pendant que nous parlions. Il n’avait pas dilué son verre, il ne l’engloutissait donc pas comme je le faisais. Après quelques instants, il attrapa la bouteille et m’en versa un peu plus, en la diluant avec de l’eau chaude, comme avant.

Ainsi, nous avions mangé et bu en silence pendant encore un bon moment. La viande fumée s’était avérée être trop salée et pas particulièrement bonne, mais pour une raison inconnue, je ne pouvais pas m’empêcher de la grignoter. Au bout d’un moment, mon corps tout entier commença à chauffer. La zone juste au-dessus de mes cuisses, en particulier, était pratiquement palpitante. Ce truc avait l’air de fonctionner.

Mais au fait, est-ce que ça a fait quelque chose à Rudy ?

Il était toujours le même. Aussi beau que d’habitude. Peut-être plus beau que d’habitude, en fait.

Mes yeux trouvaient des parties de lui auxquelles je ne prêtais pas attention d’habitude. Son cou, sa bouche… Je commençais à être d’humeur coquine. Était-ce mon imagination, ou le visage de Rudy devenait-il plus rouge ?

Nos yeux s’étaient rencontrés. Rudy me fixait droit dans les yeux. En plus, c’était un regard intense. Il n’avait pas détourné les yeux de moi depuis un moment maintenant. Je pouvais l’entendre respirer bruyamment.

Attends, non. C’était moi, n’est-ce pas ? Comme c’est embarrassant. Mais ce n’est pas vraiment ma faute, hein ? J’ai pris cet aphrodisiaque, et ma tête tourne à cause de l’alcool. Ça voulait dire que ce n’était pas ma faute.

Ouais. Pas ma faute.

Je me sentais si chaude.

J’avais défait le bouton du haut de ma chemise, exposant plus de peau à l’air. Au début, je trouvais qu’il faisait un peu froid ici, mais là, je brûlais. Rudy regardait mes seins maintenant, mais je n’étais plus gênée.

J’avais pris une autre gorgée de ma tasse. Le liquide chaud glissa dans mon estomac, répandant encore plus de chaleur dans tout mon corps. J’avais fini mon deuxième verre. J’avais tendu la main vers la bouteille… seulement pour être intercepté.

« Oh… »

Rudy tendit le bras et attrapa ma main. Sa prise était assez forte pour que je sache qu’il n’avait pas l’intention de la lâcher. Ce n’était pas non plus comme si j’avais l’intention de le fuir.

« Sylphie… »

Me fixant avec des yeux injectés de sang, Rudy s’était levé. Il fit le tour de la table pour venir à côté de moi, toujours en tenant ma main. Et puis, un peu hésitant, il m’avait tirée vers le haut. Je l’avais laissé me tirer de ma chaise, sans faire d’effort pour résister.

« Tu, euh… ne peux pas te contenir, hein ? »

Rudy avait hoché la tête en silence. Il glissa une main autour de ma taille et caressa mes fesses, puis serra mon corps contre le sien. Quelque chose de très dur se pressait contre moi.

Ça a marché. Oh wôw. Ça a marché.

Le moment était enfin venu. Il était temps de sortir la phrase de conclusion que j’avais préparée avec la Princesse Ariel.

« O-Okay alors. Vas-y et dévore-moi, Rudy… »

Au moment où ces mots quittèrent ma bouche, il m’avait poussée sur le lit.

Et ensuite…

Rudeus

J’avais ouvert les yeux et j’avais fixé le dessous de la couchette du haut. J’étais dans ma chambre. Et je m’étais souvenu clairement des événements de la nuit dernière.

Peu de temps après avoir commencé à boire, j’étais soudainement devenu si excité que je ne pouvais plus me contrôler. Je m’étais pratiquement jeté sur Sylphie. Ce « médicament » qu’elle avait apporté était incroyablement efficace. Je ne savais pas qu’une telle chose existait, mais je ne pouvais pas m’empêcher de penser que j’avais déjà vu ce truc quelque part.

… Oh, c’est vrai. C’était cet aphrodisiaque que j’avais vu vendre par un marchand dans la ville de Roa, n’est-ce pas ?

C’était la première fois que j’essayais ce produit, mais il était incroyablement puissant. Mon petit homme était sorti de sa chambre dans une frénésie totale pour se déchaîner. Quand la folie prit fin, j’étais si épuisé que j’avais l’impression que j’allais fondre. Ce n’était pas pour rien que ce truc coûtait dix pièces d’or à l’époque.

Malgré le fait que j’ai été impressionné par ça, je m’étais aussi retrouvé à lutter pour retenir une vague de peur et d’anxiété. J’avais vraiment agi comme un fou la nuit dernière. Mais je me souvenais de tout ce que j’avais fait. Pour être honnête, j’avais été très dur avec Sylphie. Elle avait fait de gros efforts pour me suivre, mais il était évident qu’elle avait eu un ou deux moments d’inconfort au début. Après tout, c’était sa première fois.

Elle ne s’était cependant jamais plainte ou ne m’avait même pas demandé de ralentir. Il était évident qu’elle se forçait, mais elle continuait à dire que ça allait en boucle, que je t’aimais et que cela faisait du bien. La façon dont elle m’avait chuchoté à l’oreille m’avait encore plus excité. Je n’y étais pas allé de main morte avec elle.

C’était seulement la deuxième fois dans ma longue vie que je couchais avec quelqu’un. Je n’étais pas du tout sûr d’avoir fait du bon travail. En fait, j’étais convaincu de m’être comporté encore plus mal que lors de ma première fois. Encore pire que ce que j’avais fait cette nuit-là.

Et le matin suivant… Éris n’était pas à côté de moi dans le lit.

Lentement, j’avais regardé sur le côté. Mes yeux avaient rencontré ceux de quelqu’un d’autre.

« Bonjour, Rudy. »

Sylphie était là. Elle me souriait timidement.

Je m’étais approché lentement et j’avais touché ses cheveux pour confirmer qu’elle ce n’était pas une hallucination. Sylphie ferma les yeux et m’avait laissé caresser sa tête avec un regard de plaisir sur son visage. Ses cheveux étaient courts, mais ils étaient aussi merveilleusement soyeux.

J’avais laissé ma main continuer à se déplacer, d’abord le long de son cou, puis sur ses épaules fines. Elles étaient si délicates à chaque fois que je les touchais.

Mais je n’allais bien sûr pas m’arrêter là. J’avais ramené ma main vers ses seins et je les avais pressés.

« Hyaah ! Wha… Rudy ! »

Sylphie tressaillit de surprise et me lança un regard de protestation. Elle n’avait pas bougé pour autant. Son visage était devenu rouge, mais elle m’avait laissé continuer.

La poitrine de Sylphie était vraiment modeste. Il n’y avait pas grand-chose à saisir. Pourtant, il y avait vraiment une douceur distincte bercée dans ma paume. Pendant un instant, j’avais vu l’image fantomatique d’un vieil homme qui me levait le pouce et criait dans ma direction les sages paroles.

« Tous les seins sont créés égaux ! »

Merci, Vieil Ermite Sage. Ça faisait longtemps qu’on ne s’était pas vu.

Sylphie était effectivement allongée à côté de moi. Aucun doute là-dessus. Et grâce à la douceur de son corps, mon monolithe s’élevait à nouveau vers les cieux. Imposant et viril, il dominait son environnement, comme il avait toujours été censé le faire.

En le contemplant avec admiration, j’étais convaincu de quelque chose de très important.

« Je suis guéri. »

J’avais pris Sylphie dans mes bras. Je l’avais serrée très fort dans mes bras. Et j’avais commencé à pleurer… juste un peu.

« Uhm, Rudy… ? Qu’est-ce que tu en penses ? Mon corps est… bien, non ? »

Peut-être un peu confuse par mon action soudaine, Sylphie avait timidement demandé une explication. Mais si elle avait le moindre souvenir de la nuit dernière, elle devait savoir que cette question n’avait pas besoin de réponse.

« Merci. »

Au lieu de lui dire quelque chose qu’elle savait déjà, j’avais simplement exprimé ma gratitude. C’était la seule chose que je pouvais faire à ce moment-là. Mon esprit était rempli de bonheur et de gêne. J’avais peur de dire quelque chose d’extrêmement stupide si j’essayais de parler maintenant. Alors, à la place, je l’avais serrée très fort dans mes bras pour exprimer ma gratitude.

Finalement, mon combat avait pris fin.

***

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