Mushoku Tensei (LN) – Tome 9 – Chapitre 6 – Partie 1

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Chapitre 6 : Il pleut dans la forêt

Partie 1

La nuit était déjà tombée, mais il y avait encore trois personnes dans la salle de conférence des étudiants.

La première était une beauté frappante qui faisait tourner les têtes partout où elle allait — Ariel Anemoi Asura. La deuxième était un jeune chevalier au visage vif mais beau qui charmait les femmes avec facilité — Luke Notos Greyrat.

« … Alors, de quoi vouliez-vous discuter ? »

De l’autre côté du bureau, il y avait un jeune homme aux cheveux blancs, portant des lunettes de soleil et un uniforme scolaire masculin. Son nom était Fitz. Il avait porté ses mains à son ventre et tripotait ses doigts avec anxiété.

Ariel l’avait regardé pendant un long moment. Mais il ne semblait pas enclin à parler, alors elle avait continué.

« L’autre jour, Rudeus nous a croisés alors que nous faisions du shopping. Il a trouvé “tes” actions plutôt suspectes, Fitz. »

« … »

« Peu de temps après, il t’a jeté au sol dans la bibliothèque, après quoi tu t’es enfui en déclarant être un homme. C’est ce que disent les rumeurs. »

« … »

« Rudeus croit probablement que c’est un mensonge. Il a eu l’occasion de toucher ton corps plus ou moins longuement, d’après ce qu’on dit. »

« … »

« Cependant, il semble qu’il n’ait pas l’intention de révéler ton secret à qui que ce soit. Il prétend avoir peur de me contrarier, mais vu ses compétences, cela semble très improbable. Je crois qu’il essaie simplement de bien faire pour un ami. C’est vraiment admirable. »

Ariel lança alors un regard perçant à Fitz.

« La question à ce stade est… que vas-tu faire ? »

Les épaules de Fitz tressaillirent au ton dur d’Ariel, mais il n’avait pas répondu.

« Je pense que c’est une bonne chose de prendre son temps. Cependant, cela fait maintenant six mois que tu n’as pas fait le moindre progrès. Peux-tu me reprocher de vouloir dire quelque chose ? », poursuivit Ariel.

Elle attendit la réponse de Fitz. Grâce aux grosses lunettes de soleil qu’il portait, elle ne pouvait pas voir le regard qu’il avait. Mais elle comprit tout à la façon dont il tripotait le bout de ses doigts. C’était un signe révélateur qu’il était accablé, quelque chose qu’il ne faisait que lorsqu’il ne trouvait plus rien à dire. Si elle le laissait continuer comme ça plus longtemps, il pleurnicherait probablement quelque chose comme « je suis désolé » ou « j’ai besoin d’un peu plus de temps » pour essayer de repousser cette conversation.

Et donc, Ariel continua : « Je dois dire que j’en ai assez de te voir tergiverser comme ça. »

Ce n’était pas vraiment vrai. Ariel aimait regarder Fitz se tortiller. Elle était un peu jalouse de ses sentiments pour Rudeus, mais elle ne s’y opposait certainement pas. Cependant, Rudeus passait de moins en moins de temps avec Fitz en raison de sa nouvelle amitié avec Silent. Et Fitz était de plus en plus mélancolique. C’était plutôt douloureux à regarder pour elle.

« Je pense qu’il est temps que tu trouves le courage de lui dire qui tu es vraiment, Fitz… ou plutôt, Sylphie. »

Fitz serra « ses » lèvres l’une contre l’autre et leva la tête pour regarder Ariel. Et un moment plus tard, il enleva sa grande paire de lunettes de soleil.

Le visage qui se trouvait en dessous était nettement féminin. Il aurait été en fait difficile de le confondre avec celui d’un garçon.

C’était le visage de Sylphiette, l’amie d’enfance de Rudeus.

« Princesse Ariel, je… » commença-t-elle, semblant enfin prête à dire ce qu’elle pensait… mais elle s’arrêta presque immédiatement, semblant vouloir fondre en larmes.

Cela était suffisant pour Ariel. C’était quelque chose qu’elle soupçonnait vaguement depuis longtemps.

« Sylphie. Ça va être la troisième fois que je te demande ça, mais… Pour l’instant, y a-t-il quelque chose que tu veux faire ? »

Oui. Mais Sylphie secoua la tête. Ce qu’elle voulait était impossible, pour deux raisons différentes.

Tout d’abord, elle avait trop peur. Elle avait l’impression que Rudeus l’avait peut-être complètement oubliée. Deuxièmement, elle tenait trop aux amis qu’elle avait devant elle. Si elle choisissait de poursuivre ce nouvel objectif, cela pourrait signifier se séparer d’Ariel. Cela signifierait la trahir, elle et Luke, ces amis qui avaient combattu à ses côtés, luttant pour survivre et réaliser leur objectif. Tout cela fit en sorte de maintenir Sylphie dans le silence.

Mais cette fois, Ariel n’accepta pas un non comme réponse.

« Sylphie… tu m’as sauvé la vie de nombreuses fois. Si tu n’étais pas tombée du ciel dans les jardins du Palais d’Argent, je serais morte sur le coup. C’est également toi qui m’as protégée des assassins qui venaient me chercher pendant mon sommeil. Et tu t’es battu pour moi, désespérément en infériorité numérique, à la mâchoire supérieure du Wyrm Rouge. Tu m’as aidé d’innombrables fois ces dernières années. », dit-elle d’une voix douce et posée.

« Mais je vous devais cela, Princesse Ariel… et plus encore. Quand j’ai été téléportée dans le palais, je n’avais pas la moindre idée de ce qui se passait. Si vous ne m’aviez pas aidé… »

Ariel avait secoué sa tête lentement.

« Toute dette que tu me devais a été plus que remboursée lorsque nous avions fui le Royaume. Depuis lors, nous sommes sur un pied d’égalité. Je t’ai simplement manipulée pour que tu me serves. »

Sylphie cria, les yeux écarquillés : « Vous ne me manipulez pas ! Je veux vous aider, parce que nous sommes amies ! »

En réponse, Ariel sourit de satisfaction et hocha légèrement la tête.

« Je suis sûre que c’est effectivement le cas. Et pour cette même raison, j’aimerais t’aider maintenant. Parce que nous sommes amies, hein ? »

« Quoi… ? »

« Je te connais, Sylphie. Tu te retiens probablement pour moi, pas vrai ? Mais tu n’es pas ma servante, tu es mon amie. Il n’y a pas besoin que tu fasses passer mes objectifs en premier et que tu ignores les tiens. S’il y a quelque chose d’autre que tu veux faire, alors laisse-moi et donne-lui la priorité. »

Les mots d’Ariel étaient suffisants pour ébranler la détermination de Sylphie. Mais même si son cœur vacillait, elle parvint à émettre une objection.

« Mais ça voudrait dire… vous trahir. »

« Ce n’est certainement pas le cas. En fait, si je te retenais, je te trahirais. », répondit fermement Ariel.

Cette affirmation n’aurait peut-être pas passé l’examen s’ils étaient encore dans le Royaume d’Asura. Là-bas, Ariel était une princesse, et Sylphie simplement la fille d’un chasseur de village sans nom. Elle avait bien gagné le titre de Mage Gardien, mais elles étaient encore loin d’être égales en rang. Cependant, on était dans Royaume de Ranoa, et Ariel était essentiellement en exil. Pour cette raison, ses mots avaient des accents de vérité.

Si elle avait dit quelque chose de similaire à Luke, il aurait sans aucun doute objecté fortement. Il était très fier de son rôle de serviteur d’Ariel, et l’aurait supplié de lui donner des ordres et de l’utiliser comme bon lui semblait.

Sylphie, d’un autre côté, n’avait pas prêté un serment d’allégeance éternelle à Ariel. Mais elle considérait la princesse comme une femme digne de son service. Elle la respectait si fortement qu’elle se serait sacrifiée docilement si Ariel le lui avait ordonné.

Pourtant, elle ne parvenait pas à exprimer ces pensées en cet instant. Et tout simplement parce qu’Ariel lui parlait avec une si grande gentillesse.

« Dis-moi, Sylphie. As-tu l’intention de faire de moi une traîtresse, après tout ce que j’ai fait pour toi ? »

« Quoi ? Non ! »

Surprise par les paroles manipulatrices d’Ariel, Sylphie leva les yeux au ciel. La princesse croisa son regard avec une expression sévère. Sylphie eut envie de détourner les yeux, mais parvint à résister à cette impulsion. Elle ne put s’empêcher de déglutir bruyamment.

« Fais preuve de courage et dis ce que tu penses. Qu’est-ce que tu veux faire maintenant ? »

« Eh bien… Je… »

Sylphie pinça ses lèvres et serra fermement ses mains.

Elle savait ce qu’elle voulait faire. Il ne lui manquait plus que le courage de mettre des mots sur ses sentiments. À un moment donné, elle avait perdu ce courage. Mais maintenant, alors que sa bonne amie attendait patiemment, elle avait réussi à le trouver à nouveau.

« Je veux… être avec Rudy. »

« Bien joué. »

Ariel sourit à son amie. Mais pour une fois, ce n’était pas artificiel. C’était son véritable sourire, un sourire qu’elle n’utilisait que rarement.

« Je suis contente que tu l’aies finalement dit. Poursuis d’abord tes propres objectifs, Sylphie. Tu pourras toujours revenir pour m’aider quand tu seras prête. »

Il y avait aussi de la gentillesse dans les yeux de Luke.

« Elle a raison. Occupe-toi de tes affaires personnelles avant de te préoccuper des nôtres. »

Il avait en fait des sentiments quelque peu contradictoires à propos de cette situation. Mais il était heureux que son amie ait finalement exprimé ses véritables pensées, et il voulait faire confiance au jugement d’Ariel.

« Mais… je ne pense pas pouvoir le supporter si Rudy ne se souvient pas de moi. »

Ariel et Luke échangèrent un regard et sourirent ironiquement.

« Réfléchissons à cette partie maintenant, d’accord ? »

Sur ces mots doux d’Ariel, une conférence stratégique impromptue fut convoquée sur place.

◇ ◇ ◇

« Peut-être serait-il préférable de garder les choses simples. Pourquoi ne pas simplement lui dire que tu es Sylphiette du Village Buena ? »

« Je pense que c’est déconseillé. S’il ne se souvient vraiment pas du tout d’elle après tout ce temps, le nom pourrait ne pas lui rappeler quelque chose. »

Luc et Ariel réfléchirent aux paroles de l’autre pendant un moment. C’était une certitude, il y avait de fortes chances que Rudeus ait oublié Sylphie. Cela faisait huit ans qu’ils s’étaient séparés, ce qui était plus que suffisant pour oublier une amie d’enfance. Pour le moins, Sylphie n’avait pas entendu Rudeus mentionner son nom une seule fois au cours de l’année écoulée. Il était difficile d’imaginer que son nom seul suffirait à lui rafraîchir la mémoire.

Que pouvait-elle faire pour qu’il se souvienne d’elle ? C’était la question cruciale.

Ariel essaya de se mettre à la place de Rudeus. Elle ne se souvenait pas des noms de tous les préposés qui l’avaient servie huit ans auparavant, mais il y en avait quelques-uns dont elle se souvenait. Par exemple, Lilia, qui avait quitté la cour quand Ariel était très jeune. Ariel ne se souvenait pas clairement du visage de cette femme, mais elle se rappelait la façon dont elle avait repoussé un assassin pour la protéger.

« Sylphie, quel genre de souvenirs as-tu avec lui ? »

« Des souvenirs ? »

« Oui. Les gens se souviennent de nous par nos compétences et les souvenirs que nous partageons. C’est la raison pour laquelle les nobles organisent constamment des fêtes pour se présenter les uns aux autres. Ils apprennent par cœur des discours fleuris et pratiquent des danses complexes afin de laisser au moins une impression dans la mémoire de leurs pairs. Vois-tu, ils sont assez nombreux, il est donc impossible de se souvenir de tous ceux que l’on rencontre. »

Les compétences de Sylphie étaient certainement assez distinctives. Il n’y avait pas beaucoup de personnes dans le monde entier qui pouvaient lancer des incantations silencieuses, et encore moins des gens aussi jeunes que Sylphie ou Rudeus. Mais même avec le bénéfice de cet énorme indice, Rudeus n’avait pas pensé à elle.

Il y avait trois raisons à cela.

Premièrement, la tendance de Rudeus à se déprécier. Il pensait instinctivement que tout ce qu’il pouvait faire était assez facile à imiter pour n’importe qui.

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2 commentaires :

  1. merci pour le chapitre

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