Mushoku Tensei (LN) – Tome 9 – Chapitre 3 – Partie 3

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Chapitre 3 : Le masque blanc

Partie 3

La terreur que j’avais ressentie lorsqu’il m’avait tué refit surface dans mon esprit. La peur que j’avais ressentie dans les derniers instants de ma vie m’avait envahi. Je ressentais la douleur lorsqu’il m’avait écrasé les poumons. J’avais ressenti l’impuissance de le voir repousser toutes mes attaques. J’avais ressenti le choc quand il avait percé mon cœur. Et j’avais ressenti… la terreur de regarder la mort en face.

Tout ce que je pouvais faire, c’était courir. J’avais couru, et j’avais couru, et j’avais couru. Je n’avais pas la moindre idée d’où j’allais.

Quand je m’étais retourné, j’avais trouvé la fille qui me suivait. Je ne comprenais pas pourquoi. Pourquoi ne m’étais-je pas déjà éloigné d’elle ? Était-elle si rapide ?

Ce n’était pas ça, bien sûr. J’étais juste lent. J’étais à peine arrivé à quelque chose, malgré ce que mon esprit me disait. C’était juste mon cœur qui filait à cent à l’heure.

J’avais couru encore plus loin, désespéré et maladroit. J’avais trébuché et étais tombé. J’avais trébuché comme un ivrogne.

J’avais travaillé si dur sur mes jambes au cas où quelque chose comme ça arriverait, mais elles ne coopéraient pas du tout avec moi. J’avais presque l’impression de rêver, mes jambes vacillaient faiblement sous moi à chaque pas que je parvenais à faire.

Silent me suivait toujours de près. J’avais affronté un Roi-Démon sans trembler, et pourtant…

J’avais regardé la volée de marches devant moi. Fitz se tenait en bas. Il m’aiderait. Il me sortirait d’ici. Je m’étais senti légèrement détendu.

« Tu ne devrais pas crier à la vue du visage de quelqu’un. C’est un peu grossier. »

Quelqu’un me tapa sur l’épaule. Quand je m’étais retourné, j’étais face à face avec elle.

« Aheee ! »

Avec un petit cri bizarre, j’avais reculé d’un bond, terrorisé… et j’étais tombé dans les escaliers, m’assommant d’une manière un peu embarrassante.

◇ ◇ ◇

Quelqu’un me caressait doucement la tête. Et pour je ne sais quelle raison, c’était profondément réconfortant. J’avais presque l’impression que sa main émettait une sorte d’énergie curative.

J’avais levé les yeux pour vérifier, et j’avais trouvé le visage de Maître Fitz. Ses mains étaient plus chaudes que je ne l’aurais cru. Elles étaient aussi étrangement minces, douces et féminines.

Sans raison particulière, j’avais tendu le bras pour en attraper une.

« Oh. Tu es réveillé, Rudeus ? Tu m’as vraiment inquiété, en tombant subitement tout à coup de l’escalier. »

« … Je faisais un rêve terrible. Une femme avec un masque blanc était sur le point de me tuer. »

« Euh… »

Fitz répondit à cela avec un petit sourire gêné. Je ne savais pas pourquoi.

Je n’étais d’ailleurs pas sûr de l’endroit où je me trouvais. Ce n’était clairement pas ma chambre du dortoir… ou même les dortoirs tout court, d’ailleurs. Mais j’étais pourtant déjà venu ici. Il y avait des lits alignés en rang derrière Fitz…

Oh, c’est vrai. C’est l’infirmerie.

Je m’étais assis et j’avais regardé lentement autour de la pièce. L’endroit semblait presque vide, à part Fitz, moi-même et le guérisseur résident.

J’avais tourné la tête un peu plus loin…

« Gaaaah ! »

Elle était là aussi.

La femme au masque blanc était assise de l’autre côté de mon lit.

J’étais tombé de mon lit et j’avais heurté le sol avec un bruit sourd et douloureux. La femme répondit en laissant échapper un soupir irrité.

« C’est très impoli. Et d’ailleurs pourquoi es-tu si terrifié par moi ? Je t’ai sauvé la vie la dernière fois, n’est-ce pas ? Ou… ah, attend. Tu étais presque mort, hein ? Je suppose que tu ne t’en souviens donc pas. »

Effectivement, c’était bien elle. C’était bien la fille qui avait voyagé avec Orsted.

« O… Où est Orsted ?! »

« Il n’est pas là. C’est un homme très occupé. », répondit-elle avec désinvolture.

Il n’est pas là ? Vraiment ? Du genre, vraiment ? Ce n’était pas comme si elle avait une raison de mentir à ce sujet, non ?

« De toute façon, tu n’as pas à t’inquiéter de lui. Il ne s’en prendra pas à toi de sitôt. »

« De sitôt ? Ça veut dire qu’il finira par me tuer, ou quoi ? »

« Je ne pense pas qu’il ait l’intention de le faire… mais la possibilité existe. Tout dépend de toi. »

Au moins, je n’allais pas me faire assassiner maintenant. Dès que j’avais pris conscience de ce fait, une énorme vague de soulagement m’avait envahi. Je suppose que je n’étais bon qu’à penser sur le court terme.

« Euh, je ne comprends pas bien ce qui se passe ici. Pourriez-vous m’expliquer ? », dit Fitz, en se grattant les oreilles d’un air incertain alors qu’il se tournait de moi vers la fille masquée.

« Tout d’abord, qui es-tu pour Rudeus ? »

« Nous sommes de parfaits étrangers », dit la fille masquée sans ambages.

Fitz gonfla ses joues en signe d’irritation.

« Je n’ai jamais vu Rudeus aussi contrarié pour quoi que ce soit. Tu lui as manifestement fait quelque chose, hein ? »

Son ton était inhabituellement hostile. Il avait l’air d’un élève d’une classe supérieure qui s’interposait pour protéger son ami de première année sans défense. Honnêtement, le soutien était très apprécié.

« La dernière fois que nous nous sommes rencontrés, il a été battu par le Dieu Dragon. J’imagine qu’il se souvient de tout ça. »

« Le Dieu Dragon… ? Euh, l’une des sept grandes puissances ? »

« C’est exact. »

« Êtes-vous le Dieu Dragon ? »

« Bien sûr que non. Nous avons juste voyagé ensemble pendant un moment. »

Tout en répondant aux questions de Fitz d’un ton désintéressé, la fille masquée repoussa ses cheveux d’une main. Je venais juste de le remarquer, mais elle portait l’uniforme de l’Université de la Magie.

« Pourtant, je dois admettre que je ne m’attendais pas à te rencontrer ici… »

Elle s’était tournée vers moi. Même avec le masque, je pouvais voir qu’elle me regardait attentivement.

« Mais peut-être que c’est juste la nature de cette route. Cette rencontre à la mâchoire inférieure du Wyrm rouge a posé le drapeau afin que nous nous retrouvions dans cette école. »

Avant même que je puisse essayer de répondre, la fille masquée fouilla dans sa cape et en sortit une feuille de papier.

« Je vais te poser trois questions. Réponds-y honnêtement, s’il te plaît. »

Son ton était soudainement si autoritaire que j’avais dégluti et hoché la tête.

« Tout d’abord, cela te semble-t-il familier ? »

J’avais pris le papier qu’elle m’avait tendu. Quelqu’un avait écrit les mots « Shinohara Akito » et « Kuroki Satoshi » dessus.

En japonais.

J’avais instantanément reconnu que c’était des noms. Et en même temps, j’avais réalisé que mon intuition initiale était correcte.

« Deuxièmement, peux-tu comprendre ce que je dis ? Troisièmement, lequel de ces deux-là es-tu ? »

Ses deux dernières questions avaient été également prononcées en japonais. Il n’y avait plus aucun doute possible. Elle était exactement comme moi. Mais les noms inscrits sur ce papier ne signifiaient rien pour moi. J’avais hésité un instant. Mais je m’étais préparé à cela depuis le temps.

Lentement, j’avais répondu en japonais.

« Je ne suis ni l’un ni l’autre. Je ne reconnais pas ces noms. »

« Je vois. Mais tu parles au moins japonais. »

« Hein ? », dit Fitz en baissant les yeux sur le papier avec confusion.

« Quelle… langue parlez-vous tous les deux ? Rudeus ? »

« Nous venons tous les deux de la même patrie, c’est tout », dit calmement Silent.

« Quoi ? Ce n’est pas possible ! »

Je ne savais pas trop pourquoi Fitz se sentait si confiant à ce sujet, mais ce n’était guère important pour le moment. Lentement, anxieusement, j’avais posé la question cruciale.

« Donc, tu es comme moi ? »

Silent hocha la tête.

« C’est exact. J’ai été jeté dans ce monde subitement, sans aucun avertissement. »

Tout en parlant, elle leva le bras et enleva son masque. Et à la vue de son visage, quelque chose fit tilt dans ma tête.

C’était la fille. Celle des derniers moments de mon ancienne vie. La lycéenne qui s’était battue avec un garçon et qui avait failli se faire écraser par ce camion. Ou du moins, c’était quelqu’un qui lui ressemblait exactement.

J’en étais sûr, mais quelque chose me semblait un peu étrange. Il m’avait fallu un moment pour comprendre pourquoi. Puis j’avais réalisé que son visage était exactement le même.

Quinze ans s’étaient écoulés depuis ce jour, mais elle n’avait pas du tout changé. C’était vraiment bizarre. N’aurait-elle pas changé au moins un peu pendant tout ce temps ?

Non… attends. Pourquoi est-ce qu’elle ressemblait à ce qu’elle était avant ? Si elle s’était réincarnée ici, elle aurait dû renaître dans un corps entièrement nouveau, tout comme moi.

Avant que je puisse lui demander quoi que ce soit, elle répondit à mes questions de manière préventive.

« Je ne sais pas comment j’ai été transportée dans ce monde cauchemardesque, mais je suis coincée ici pour le moment. »

Elle avait été transportée tout comme moi, mais nos situations étaient en fait assez différentes. J’avais été réincarné dans un nouveau corps, avec seulement mes souvenirs intacts. Mais à moins que je ne comprenne mal, elle avait été transportée ici comme elle l’était, dans le même corps, au même âge.

« Mon nom est Nanahoshi Shizuka, et je suis japonaise. J’ai cependant utilisé le nom de Silent Sevenstar ces derniers temps. »

La confusion et le doute tourbillonnaient dans mon esprit, s’emmêlant dans mes pensées jusqu’à ce que je ne puisse plus trouver un seul mot à dire. Mais mon silence n’avait pas semblé la décourager.

« D’où viens-tu, au fait ? D’Amérique ? Ou peut-être d’Europe ? Tu es manifestement de type caucasien, mais tu parles japonais… l’un de tes parents est-il japonais ? Ou peut-être es-tu un étranger qui a vécu là-bas ? »

J’avais l’impression qu’elle avait largement dépassé les trois questions qu’elle avait demandées à ce stade, mais je n’étais pas en mesure d’objecter. J’avais la langue bien pendue.

« En tout cas, c’est clairement une étape importante. J’ai eu raison de te laisser vivre. Je m’en doutais dès qu’Orsted a dit qu’il ne te reconnaissait pas. »

La jeune fille parlait rapidement maintenant, avec une pointe d’excitation dans la voix. Elle n’avait même pas semblé remarquer le fait que j’étais déconcerté.

« Eh bien, voyons si nous pouvons trouver un moyen de travailler ensemble… Euh, quel est ton nom ? »

« R… Rudeus. Je suis Rudeus Greyrat. »

« C’est juste le faux nom que tu utilises dans ce monde, non ? Je veux dire ton vrai nom. »

Je ne voulais pas dire le nom que j’avais utilisé dans ma vie antérieure. Je ne voulais vraiment, vraiment pas.

Alors que je restais silencieux, Nanahoshi acquiesça.

« Ah, c’est bon. Je comprends. Tu te méfies de moi, n’est-ce pas ? Je peux certainement comprendre cela, surtout après ce qui s’est passé lors de notre dernière rencontre. Mais ne t’inquiète pas, nous sommes du même côté. Pourtant, je n’étais même pas sûre qu’il y avait d’autres personnes comme moi ici jusqu’à maintenant. Tu es la première personne de la Terre que je rencontre dans ce monde. C’est plutôt réconfortant. »

Nanahoshi tendit la main pour me prendre par la main. Fitz fronça les sourcils, mais elle n’avait même pas semblé le remarquer.

« Trouvons ensemble le chemin du retour, d’accord ? »

D’une certaine manière, ces mots coupèrent à travers toute la confusion et l’incertitude dans mon esprit. Une réponse claire et définitive m’était venue à l’esprit instantanément : pas question.

J’avais mis sa main de côté.

« Je ne veux plus jamais retourner dans ce monde. »

« Huh… ? »

Pour la première fois depuis longtemps, Nanahoshi resta sans voix.

« Euh… Rudeus, Silent… Pourriez-vous tous les deux parler dans une langue que je peux comprendre ? »

Fitz, bien sûr, était encore plus perdu qu’avant.

L’ambiance dans l’infirmerie était devenue soudainement extrêmement gênante.

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Un commentaire :

  1. merci pour le chapitre

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