Chapitre 13 : La résolution de la jeune demoiselle
Table des matières
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Chapitre 13 : La résolution de la jeune demoiselle
Partie 1
Lorsque la réunion s’était terminée, le soleil s’était déjà couché. J’étais retourné dans ma chambre. Elle n’était meublée que du strict nécessaire et mes bagages y étaient éparpillés. J’avais reconnu la nécessité de ranger, mais je n’avais ressenti aucune motivation pour le faire. Au lieu de cela, je m’étais assis sur mon lit. Mon corps s’était enfoncé dans le matelas dur. Je semblais plus épuisé que je ne le pensais.
« Ouf… »
Ce n’était pas comme si j’avais fait quelque chose de particulièrement épuisant aujourd’hui. Pourtant, la fatigue s’était vite accrochée à mon corps. Peut-être était-ce ce que les gens appelaient l’épuisement mental? Non, ce n’était pas ça. Je venais de recevoir un énorme choc.
Sauros, Phillip et Hilda, je n’avais jamais eu de conversation particulièrement intime avec aucun d’entre eux. Pourtant, quand j’avais fermé les yeux, je m’étais souvenu d’une longue promenade avec Sauros, qui inspectait les cultures de la région pendant qu’il demandait comment allait Éris. Je m’étais souvenu de Philip et de son horrible sourire lorsqu’il proposa que nous reprenions ensemble la maison des Boreas. Je m’étais rappelé comment Hilda m’avait supplié d’épouser sa fille et de faire partie de leur famille.
Ils étaient tous partis maintenant. Même leur maison n’était plus là. Ce vaste manoir, dans lequel des voix éclatantes avaient résonné, n’existait plus. La salle de réception où Éris et moi avions dansé, la tour où le vieil homme avait fait ses essais, la bibliothèque empilée avec la documentation relative à la région… tout cela avait disparu.
Il n’y avait pas que le manoir qui avait disparu. Le village de Buena avait également disparu, mais je n’étais pas allé voir par moi-même. L’arbre de notre jardin que Zenith chérissait tant, ceux qui avaient été brûlés par la foudre lorsque Roxy m’enseignait la magie de l’eau de rang Saint, et le grand arbre sous lequel Sylphie et moi avions joué… tout cela avaient également disparu.
Attendez… pourquoi les arbres étaient-ils la seule chose qui m’était venue à l’esprit lorsque j’avais essayé de me souvenir du village de Buena? Eh bien, peu importe. Il n’y avait plus rien. J’avais compris ça logiquement après que Paul m’en avait parlé, mais le voir en personne avait été un plus grand choc que je ne le pensais.
« Ouf… »
Alors que je poussais un autre soupir, une personne avait frappé un grand coup à la porte.
« Entrez. »
Je l’avais fait entrer.
C’était Éris.
« Bonsoir, Rudeus. »
« Éris, tu te sens mieux maintenant? »
« Je vais bien », dit-elle en prenant sa pose habituelle.
Elle n’avait pas du tout l’air déprimée. Impressionnante comme toujours. Sa famille avait pourtant été anéantie. Elle était vraiment bien plus forte que moi. Au passage, d’habitude elle ne frappait même pas, elle ouvrait juste la porte avec son pied. Peut-être était-elle déprimée.
« Je me suis dit que c’était comme ça que les choses allaient finir. »
« Oh vraiment…? »
Éris parlait comme si ça ne la dérangeait pas du tout. Comme elle l’avait déjà dit, il semblerait qu’elle s’était préparée à cela. Plus précisément, à la possibilité que sa famille soit morte. Je ne pouvais pas me résoudre à faire la même chose. Même maintenant, ne sachant pas où était Zenith, je devais croire qu’elle était vivante. Il était beaucoup plus probable qu’elle soit morte, et je le comprenais intellectuellement, mais je ne pouvais pas me résoudre à l’accepter.
« Éris, que vas-tu faire après ça? »
« Que veux-tu dire? »
« Euh, tu as entendu parler de certaines choses par Monsieur Alphonse, n’est-ce pas? »
« Oui, j’en ai entendu parler. Mais qui se soucie de tout ça? »
« Qui s’en soucie…? » répondis-je en écho.
Éris me regardait droit dans les yeux. Je m’étais soudainement rendu compte, bien qu’un peu tard, que sa tenue était différente. Elle était vêtue de la pièce unique noire qu’elle n’avait pas portée une seule fois depuis qu’elle l’avait achetée à Millishion. Elle s’accordait si bien avec ses cheveux roux qu’elle ressemblait presque à une robe. Je pouvais voir ses seins qui pointaient à travers la fine matière.
Hein? Elle ne porte donc pas de soutien-gorge? En regardant de plus près, je m’étais rendu compte que ses cheveux étaient un peu humides. Je pouvais aussi sentir l’odeur du savon, ce que je n’avais remarqué qu’après qu’elle se soit baignée. Et il n’y avait pas que ça. Normalement, Éris n’avait pas d’odeur particulière pour elle, mais je sentais maintenant un léger et doux parfum. Un parfum?
« Rudeus, je suis seule maintenant. »
Seule, c’était vrai. Elle n’avait plus de famille. Elle avait des frères par le sang, mais ils n’étaient pas de sa famille.
« Et en plus de ça, j’ai récemment eu quinze ans. »
Dès que je l’avais entendue dire quinze ans, j’avais paniqué. Quand? Quand est-ce que son anniversaire était passé? Le mien était dans un mois ou deux, ce qui voulait dire que le sien devait avoir eu lieu il y a un mois environ. Je ne l’avais même pas réalisé.
« Hum, désolé de ne m’en être pas souvenu. »
Quel jour était son anniversaire? Je ne me souvenais même pas si elle en avait parlé. J’aurais pensé qu’Éris ferait beaucoup d’histoires pour ses 15 ans. N’y avait-il vraiment rien eu? Aucun jour où elle aurait dit quelque chose pour indiquer que c’était son anniversaire?
« Tu ne l’as peut-être pas réalisé, mais c’était le jour où Ruijerd m’a dit que j’étais adulte. »
« Ahh. »
C’était donc ça. Tout avait un sens maintenant.
Ça craint. Je ne l’ai vraiment pas remarqué, pensais-je.
« Uhhh, je devrais prendre quelque chose pour toi? Est-ce que tu veux quelque chose? »
« Oui, il y a une chose que je veux », dit-elle.
« Qu’est-ce que c’est? »
« Une famille. »
J’étais à court de mots quand elle avait dit ça. Ce n’était pas quelque chose que je pouvais lui donner. Je ne pouvais pas ramener les gens à la vie.
« Rudeus, deviens ma famille. »
« Hein? »
Au moment où je l’avais soudainement regardée, je pouvais dire que, malgré l’obscurité de la pièce, son visage était rouge vif. C’était… enfin, vous savez… une demande en mariage?
« Tu veux dire comme un frère et une sœur? »
« Je me fiche de comment tu veux l’appeler. »
Elle était rouge jusqu’aux oreilles, mais elle ne voulait toujours pas détourner son regard.
« Donc, en gros, ce que je veux dire c’est, euh… couchons ensemble. »
Je n’avais aucune idée de ce dont elle parlait, croyez-moi!
Calme-toi et réfléchis à la signification de ses mots, me suis-je dit. Je pouvais supposer, en me basant sur sa proposition de coucher ensemble, qu’elle était elle aussi choquée par tout ce qui s’était passé. Elle voulait probablement être avec moi pour guérir les blessures infligées à son cœur.
Une famille. Dans ce cas, je suppose que ce sera une fausse famille?
Mais…
« Je me sens un peu seul aujourd’hui, alors je pourrais bien finir par te faire quelque chose de pervers. »
Pour être honnête, je n’avais pas confiance en moi. Je voulais dire que je n’avais pas suffisamment confiance en moi pour me mettre au lit avec elle, sentir la chaleur de son corps et être encore capable de me retenir. Même Éris aurait dû comprendre cela. Et pourtant…
« Tu peux le faire aujourd’hui. »
« Je te l’ai déjà dit, si je le fais je n’arriverais pas à me retenir », avais-je prévenu.
« Je me souviens. Et je dis que tu peux faire ce que tu veux avec moi. »
Après avoir entendu sa réponse, j’avais fixé le visage d’Éris. Que diable dis-tu? Je m’étais mis à réfléchir. Je veux dire, fonce. Après avoir entendu cela, mon petit bonhomme avait maintenant sa propre petite ovation.
« Pourquoi dis-tu soudainement tout cela? » lui avais-je demandé.
« Je t’ai promis qu’on le ferait quand j’aurais quinze ans, non? »
« C’était quand j’aurais quinze ans, non? »
« De toute façon, ça ne me dérange pas », avait-elle dit.
« Moi, ça me dérange. »
C’était bizarre. Il y avait quelque chose de bizarre. Allez, réfléchis, qu’est-ce qui était bizarre? Oh, j’ai compris! En d’autres termes, Éris se sentait désolée. Alors peut-être qu’elle voulait se détruire elle-même. J’avais vu des scènes comme celle-ci de nombreuses fois dans des jeux érotiques. Les gens se réconfortaient mutuellement pour faire face à la perte de quelqu’un. Et par réconfort, j’entendais le fait d’emboîter leur corps ensemble physiquement. OK, oui, j’ai compris.
Mais qu’est-ce vous diriez de moi si je posais mes mains sur elle dans ce genre de situation? C’était presque comme si je profitais d’elle quand elle était faible. Oui, c’est vrai, je voulais le faire. Le pire, c’était que je m’en réjouissais: fini la vie de puceau!
Mais n’était-ce pas quelque chose que je devrais faire dans des circonstances plus normales? Nous étions tous les deux dans le chagrin, si nous nous laissions prendre dans l’ardeur du moment, nous le regretterions plus tard, j’en étais sûr.
Ahh, mais elle me donnait une telle permission… je n’aurai peut-être plus jamais d’autre occasion. Si elle décidait soudainement de partir et d’être avec Pilemon, notre promesse disparaîtra par la même occasion.
Non, oublie ça. Je ne voulais vraiment pas que la première fois d’Éris soit volée par quelqu’un d’autre. Je voulais vraiment le faire. Mais j’avais le sentiment qu’on ne devrait pas le faire.
Je m’étais déjà moqué de tous les protagonistes indécis des histoires de harem. Je les avais traités de lâches qui ne pouvaient pas prendre leur courage à deux mains quand c’était nécessaire. Et maintenant que c’était à mon tour d’être dans la même situation, c’était moi qui hésitais.
Qu’est-ce que j’étais censé faire? Qu’importe ce que j’avais décidé, j’avais l’impression que je le regretterais plus tard. Je n’arrêterais de regretter le fait que, dans deux ans, le jour de mon quinzième anniversaire, Éris se présenterait avec un ruban enroulé autour de son corps.
« Voici ton cadeau d’anniversaire. Comme je pourrais accidentellement te frapper, je me suis aussi attaché les mains en l’air. N’hésite pas à me faire ce que tu veux », dirait-elle en s’asseyant sur mon lit.
Ahh, non. Attendez. J’avais failli mourir récemment. Dans ce que j’avais cru être les derniers moments de ma vie, j’avais plein de regrets. Il y avait encore des choses que je voulais faire, et rien ne garantissait que quelque chose de semblable n’arriverait pas dans les deux années qui me restaient avant mon quinzième anniversaire. Ce n’était pas comme si je pouvais échapper de justesse à la mort éternellement. Peut-être devrais-je me débarrasser de ma virginité dès maintenant, avant que des problèmes similaires ne surviennent à l’avenir?
Non, mais, attendez une seconde…
« Zut! »
***
Partie 2
Éris avait dû être frustrée par mon indécision. Elle s’était éclairci la gorge puis s’était assise doucement sur mes genoux. Elle s’était positionnée sur le côté pour pouvoir enrouler ses bras autour de mon cou, me présentant la vue de ses seins bronzés et de son beau visage. Elle ouvrit la bouche comme si elle allait parler, puis avait soudainement réalisé que quelque chose appuyait sur sa cuisse. Son visage était devenu encore plus rouge.
« Mais qu’est-ce que c’est que ça ? »
« C’est parce que tu es si mignonne. »
Éris fredonnait en retour, et plaçait ses cuisses contre la tête de mon petit bonhomme. C’était une sensation douce et agréable. Mon petit bonhomme était fou de joie, et son père (moi) était de plus en plus essoufflé.
« Ça veut dire que tu es excitée en ce moment ? », demanda-t-elle.
« Oui. »
« Alors tu ne me détestes pas, hein ? »
« Non. »
« Es-tu soucieux pour mon père et mon grand-père ? »
« Oui. »
« Rudeus, tu m’as jeté un regard pervers tout le temps. »
« Oui. »
« Mais tu vas quand même me refuser ? »
« … Oui. »
J’avais fini par hocher la tête.
Mon regard était fixé à la base de son cou, sa poitrine. Elle avait déjà conquis mon corps avec ses cuisses douces, la sensation de sa poitrine pressée contre moi, et son odeur qui remplissait mes poumons pendant que j’inhalais. J’étais comme un chien qui remuait la queue. Mais j’avais convoqué les derniers fils de la raison qui restaient en moi et j’avais dit :
« Une promesse est une promesse, n’est-ce pas ? On a dit qu’on attendrait que j’aie quinze ans. »
Sur le moment, pour parler franchement, cette promesse ne signifiait rien pour moi. Même moi, je n’étais pas tout à fait sûr de la raison pour laquelle je me retenais.
En réponse à mes paroles, Éris s’était mise à souffler. Son souffle caressa ma joue.
« Hé, Rudeus. Ma mère m’a appris ça, mais comme c’est gênant et qu’il m’est interdit de m’en servir, je ne vais le dire qu’une fois », dit-elle en prenant une grande respiration.
Elle approcha son visage de mon oreille.
Quelques mots vinrent ensuite, sur un ton si doux et si délicat, comme si un sceau interdit avait été défait.
« Rudeus, je veux être ton petit chat. Mew ~ »
Ces mots avaient traversé mon oreille et s’étaient infiltrés dans mon petit cerveau, éteignant les derniers fils de la raison qui m’empêchaient de céder. Éris était une bête sauvage, et en réponse à ces mots, j’étais devenu moi aussi une bête. Une créature instinctive, qui avait poussé Éris sur le lit.
♥♥♥
Cette nuit-là, Éris et moi avions gravi ensemble les marches menant à l’âge adulte. Pendant ce temps, j’avais oublié toutes les autres questions compliquées qui nous pesaient. Tout ce à quoi je pouvais penser, c’était comment je voulais être avec Éris. Je n’en avais pas dit autant, mais je crois que je l’aimais. Je voulais la protéger pour toujours. Je ne me souciais pas des circonstances.
Paul l’avait dit lui-même, n’est-ce pas ? Qui se souciait des devoirs d’un noble ? Je n’avais pas besoin de penser à ce genre de choses. Je ferais n’importe quoi pour l’aider. Tant qu’on y était, trois enfants, ça irait, mais j’étais sûr qu’on en aurait plus que ça.
J’étais ravi. Je n’avais même pas pensé à ce qu’Éris pouvait avoir en tête.
Éris
Je m’appelle Éris Boreas Greyrat.
Ce jour-là, j’étais devenue adulte. Rudeus m’avait donné le cadeau que je voulais pour mes quinze ans. C’était un peu différent de ce que nous avions promis, mais nous nous étions quand même liés.
J’aimais Rudeus. Quand avais-je commencé à prendre conscience de mes sentiments ? C’est vrai, c’était le jour de son dixième anniversaire. Je dormais quand ma mère m’avait soudainement réveillée, m’avait habillée d’une chemise de nuit rouge vif et, avec un regard sérieux, m’avait dit : « Va dans le lit de Rudeus et livre-lui ton corps. »
Je n’étais pas contre le fait de faire l’amour, mais j’étais confuse. Ma mère et Edna me l’avaient expliqué et m’avaient fait comprendre que cela arriverait un jour. Pourtant, je n’étais pas préparée à ce moment-là. J’avais pensé que ce serait plus loin dans le futur.
Peu importe si Rudeus était au courant de mon inquiétude, il avait quand même touché mon corps. Lui et mon père avaient veillé tard pour parler ensemble, alors peut-être qu’on lui en avait déjà parlé. Alors que je réfléchissais à cela, une autre pensée me vint à l’esprit.
Peut-être qu’il ne m’aime pas vraiment.
Peut-être qu’il le faisait seulement parce que mon père lui avait dit de le faire. Même à l’époque, Rudeus était une personne extraordinaire. Il savait tout et il pouvait tout faire, mais cela n’avait pas freiné son désir de continuer à apprendre. Il continuait simplement à aller de l’avant.
J’étais sûre qu’il me convenait bien. Pourtant, alors que sa respiration s’essoufflait, j’avais eu peur de n’être qu’une récompense que mon père lui avait donnée. Quand j’avais réalisé que je n’étais plus d’accord avec lui, je l’avais repoussé et je m’étais précipitée. J’avais commencé à retourner vers ma chambre, mais ensuite j’avais eu peur. J’avais peut-être fait quelque chose que je ne pourrais jamais retirer. Peut-être que j’avais gâché ma dernière chance. J’avais rencontré les autres enfants de familles nobles à de nombreuses reprises, mais aucun d’entre eux n’avait autant de cran que Rudeus.
Rudeus s’intéressait à mon corps depuis notre première rencontre. Il avait essayé de retourner ma jupe, de baisser ma culotte, de tâter mes seins. Chaque fois, je le frappais pour le faire partir. À l’époque où j’étais encore à l’école, je frappais les garçons qui se moquaient de moi, et ils ne me disaient plus jamais rien de prétentieux. Ça n’avait pas marché avec Rudeus. J’avais honnêtement senti, de toutes mes forces, que lorsque ma mère disait que Rudeus était le seul, elle avait raison.
Qui se soucie de savoir si je ne suis qu’une récompense ? Me suis-je dite. Au moins, on peut être ensemble. J’étais alors retournée dans sa chambre.
Mais quand Rudeus me vit, il s’était agenouillé par terre et s’était étalé comme une grenouille. Il s’était excusé, disant que c’était lui qui avait eu tort. En réponse, je l’avais simplement regardé et lui avais dit d’attendre cinq ans de plus. À ce moment-là, je pensais que cela suffirait. Rudeus était assez adulte pour m’attendre.
C’était alors que j’avais commencé à tomber amoureuse de lui.
Mais les choses changèrent vite. Nous avions été téléportés dans un endroit que Dieu seul sait, et quand nous nous étions réveillés, un Superd se tenait devant nous. J’avais cru que j’étais punie. Chaque fois que j’étais vraiment égoïste, ma mère me prévenait que le Superd viendrait me manger.
J’avais crié et je m’étais recroquevillée sur le sol. Et la personne qui était venue à mon secours n’était ni mon grand-père ni Ghislaine, c’était Rudeus. Rudeus avait arrangé les choses avec le Superd. Même s’il devait lui-même être accablé par l’anxiété, même si j’étais plus âgée que lui, il m’avait calmée et apaisée. Il avait dû lui falloir beaucoup de courage pour le faire. J’étais tombée amoureuse une fois de plus.
Après cela, alors même que son visage pâlissait, il avait quand même fait affaire aux races démoniaques. Il n’avait pas beaucoup mangé. Il avait caché le fait qu’il ne se sentait physiquement pas bien. J’étais sûre qu’il gardait sa souffrance pour lui parce qu’il ne voulait pas m’inquiéter, alors j’avais décidé de me retenir aussi. J’avais retenu mon envie de crier et de frapper les gens, et j’avais laissé Rudeus s’occuper des choses à la place. J’avais essayé d’agir comme je l’avais toujours fait, mais il y avait eu des moments où je n’arrivais pas à me retenir, quand l’anxiété montait du plus profond de moi et ne s’arrêtait pas.
Mais Rudeus ne s’était pas mis en colère. Il était juste resté à mes côtés. Il n’avait pas fait de remarques blessantes, il me caressa juste la tête, enroula ses bras autour de mes épaules et me réconforta. Pendant cette période, il n’avait jamais dépassé les limites. Dans la vie de tous les jours, je voyais clairement qu’il était excité à ma vue, mais pendant ces moments-là, il ne me touchait jamais plus qu’il ne le fallait.
Je voulais devenir plus forte. Au moins assez forte pour ne pas être un fardeau pour lui. La seule chose que je pouvais faire mieux que Rudeus était de manier mon épée, et même à cet égard, je ne pouvais pas me comparer à notre compagnon, Ruijerd. Et même si j’avais une chance dans un combat à l’épée, je ne pouvais pas battre Rudeus quand il utilisait la magie.
Malgré tout cela, Rudeus m’avait permis d’acquérir de l’expérience en me battant avec eux. J’étais sûre que le groupe aurait eu plus de facilité à tuer des monstres et à voyager par voie terrestre s’il n’y avait eu que ces deux-là. Cette pensée m’avait donné envie de pleurer. J’avais peur que Rudeus ne se rende compte que je les retenais et en vienne à me haïr. J’avais peur qu’il me laisse derrière lui, alors j’avais travaillé désespérément pour devenir plus forte.
J’avais demandé à Ruijerd de me former. Il me fit tomber à plusieurs reprises. Chaque fois, Ruijerd me demandait : « Tu comprends ? » Chaque fois, je me souvenais des mots et du signe de tête de Ghislaine. La rationalité, c’est ça, la rationalité. Il y avait une rationalité dans la façon dont un expert se déplaçait. Quand on s’entraînait avec quelqu’un de plus fort que soi, la première chose à faire était de l’observer.
Ruijerd était fort. Très probablement plus fort que Ghislaine. Je l’avais donc observé. J’avais observé ses mouvements avec attention et je les avais imités là où je le pouvais. Ruijerd m’avait aidée dans ma quête pour devenir plus forte. Au milieu de la nuit, lorsque Rudeus s’était finalement endormi, épuisé, Ruijerd me rejoignait pour s’entraîner sans faire une seule fois tout un plat de la situation. Bien sûr, il me frappait toujours à chaque combat. Peut-être était-il difficile pour lui de me frapper comme il le faisait, vu combien il aimait les enfants, mais je me sentais en confiance en l’appelant « Maître. »
***
Partie 3
Un an s’était écoulé depuis que nous avons commencé notre voyage. Je pensais être devenue plus forte. C’était différent de la compréhension à laquelle je pensais avant, quand Ghislaine m’avait répété « Rationalité, rationalité ! ». Grâce à ma formation avec Ruijerd, j’avais finalement compris le vrai sens du mot. Auparavant, je n’avais pas vu de problème avec les mouvements négligés dans la bataille, mais j’avais maintenant compris que chaque mouvement avait un sens.
Puis un jour, j’avais réussi à vaincre Ruijerd. Rétrospectivement, il semblerait que son attention avait été attirée par autre chose. Pourtant, je ne me souciais pas que cela soit une distraction qui ait créé l’ouverture. J’en avais finalement trouvé une sur lui. Maintenant, je ne serais plus un obstacle. Je pouvais marcher à côté de Rudeus.
Oui, je m’étais laissée emporter.
Rudeus avait facilement dégonflé mon ego surdimensionné. Il avait soudainement acquis un œil démoniaque et n’avait aucun mal à l’utiliser pour me maintenir au sol. J’avais perdu contre lui lors d’un duel sans magie. Ce fut un choc. C’était de la triche, pensais-je… les dés étaient pipés. En un seul bond, il m’avait dépassée sur une route que j’avais parcourue pendant des années.
J’étais toujours aussi gênée.
Je pleurais en secret. Tôt le lendemain matin, j’étais allée à la plage et j’avais pleuré en brandissant mon épée. Ruijerd m’avait dit de ne pas m’inquiéter. Rudeus était tout simplement très compatible avec l’œil démoniaque qu’il avait reçu. Il m’avait dit que si je m’entraînais, je deviendrais plus forte. Que j’avais du talent, et que je ne devais pas abandonner.
Quel talent ? Tout ce que Ghislaine et Ruijerd avaient fait, c’était me mentir. À l’époque, Rudeus m’avait paru si grand. Il était si grand et si brillant que je ne pouvais même pas le regarder directement. Je l’avais mis sur un piédestal. Je voulais le rattraper, mais j’avais abandonné à un moment donné, pensant que c’était inutile.
Cela avait changé après que nous ayons traversé le Continent Millis. C’était là que nous avions rencontré Gyes et que j’avais appris qu’il y avait d’autres techniques de combat que le combat à l’épée et la magie. Je voulais essayer d’apprendre, mais il me refusa. À l’époque, je m’étais demandé pourquoi. Je ne pouvais pas l’accepter.
Puis il y eut les événements de Millishion. Je voulais prouver que je pouvais faire les choses par moi-même, alors j’étais allée tuer la plus simple des créatures, des gobelins. C’est alors que j’avais eu le premier aperçu de mon propre talent. J’avais combattu ces étranges assassins, et je les avais écrasés. À un moment donné, j’avais commencé à grandir.
Mais quand j’étais retournée à l’auberge, Rudeus était au plus bas. Quand je l’avais pressé pour avoir des détails, j’avais découvert que Paul était en ville, et que lui et Rudeus s’étaient battus. Même si Rudeus ne pleurait pas, quand je vis l’ampleur de sa dépression, je m’étais finalement souvenue qu’il avait deux ans de moins que moi. Il avait dû fêter son dixième anniversaire loin de sa famille et était obligé de parcourir le Continent Démon en portant un fardeau comme moi. Puis son père l’avait repoussé.
Je ne pouvais absolument pas pardonner cela. En tant que personne dont le nom figurait parmi la noblesse d’Asura, je m’étais promis d’abattre Paul Greyrat. J’avais entendu parler de la force de Paul par mon propre père. C’était un épéiste de génie qui avait atteint un niveau avancé dans le style du Dieu de l’épée, du Dieu de l’eau et du Dieu du nord. Il était également le père de Rudeus. Pourtant, je ne doutais pas que je pouvais gagner. Ghislaine m’avait appris le maniement de l’épée, mais Ruijerd m’avait appris le combat. Si je combinais les deux, il n’y avait aucune chance que je perde contre cette brute.
Cependant, Ruijerd m’avait arrêtée. Quand j’avais demandé pourquoi, il m’avait dit que c’était un combat entre un père et son fils. Je savais que Ruijerd regrettait ce qui s’était passé avec son propre fils, alors j’avais décidé de l’écouter.
Finalement, Rudeus et Paul s’étaient réconciliés. C’était exactement comme Ruijerd l’avait dit. Mais je vais le répéter : je ne pouvais pas l’accepter. Je ne pouvais pas comprendre pourquoi Rudeus avait pardonné son père. Je n’aurais jamais pu pardonner à quelqu’un comme ça. Rudeus n’en parlait pas beaucoup, et Ruijerd ne voulait rien me dire. Ils étaient tous les deux adultes.
De là, nous avions traversé le continent central. C’est là que Rudeus avait commencé à manger un peu plus, peut-être parce qu’il avait retrouvé son esprit. Comme d’habitude, il était incroyable. En un seul jour, il avait réussi à se lier d’amitié avec le troisième prince et à sauver sa famille.
Quant à moi, la seule chose que je pouvais faire était de me déchaîner avec Ruijerd. Nous avions ainsi aidé à sauver Rudeus, mais nous l’avions fait sans aucune préméditation. Par la suite, Rudeus avait dit des choses comme « je n’ai rien fait » et « vous m’avez vraiment aidée », mais à en juger par ce qui s’était passé, il aurait pu s’en sortir tout seul.
Rudeus était tellement génial. Trop génial. Et il était devenu encore plus grand ce jour-là quand nous avions rencontré le Dieu Dragon. Lors de la confrontation avec Orsted, Ruijerd et moi étions terrifiés par ce que nous voyions comme l’incarnation de la peur devant nous. Seul Rudeus n’avait pas été touché.
Il avait même réussi à lancer une attaque sur Orsted, un adversaire contre lequel Ruijerd était impuissant. Mes yeux ne pouvaient pas suivre la magie qu’il avait déclenchée à ce moment-là. Quand Rudeus devenait sérieux au combat, il était incroyable. Il avait réussi à se défendre contre l’homme considéré comme le plus fort du monde, le Dieu Dragon.
Mais dès que j’avais pensé cela, Rudeus avait été mortellement blessé et mourant. Jusqu’alors, je pensais que la mort était quelque chose qui ne nous concernait pas. Rudeus était fort. Il n’y avait aucune chance qu’il meure, et tant qu’il me protégeait, je ne mourrais pas non plus. Nous avions aussi Ruijerd avec nous, donc nous étions en sécurité. C’est ce que j’avais pensé.
Je m’étais trompée.
Si cette fille qui accompagnait le Dieu Dragon n’avait pas parlé sur un coup de tête, ou si le Dieu Dragon n’avait pas pu utiliser la magie de guérison, Rudeus serait mort sur le champ. J’avais tellement peur. Cet incident avait ravivé mes craintes d’être un fardeau.
Maintenant, Rudeus était devenu un dieu. Même s’il avait failli être tué, il était complètement nonchalant à ce sujet. Trois jours seulement après sa mort, il anticipait une rencontre future avec le Dieu Dragon et pratiquait une nouvelle magie pour s’y préparer. Je ne pouvais pas comprendre cela. Je ne pouvais pas, et j’avais peur, alors j’étais restée à ses côtés. J’avais l’impression que si je ne restais pas avec lui, il disparaîtrait et m’abandonnerait.
Finalement, nous nous étions séparés de Ruijerd. Ruijerd avait dit que battre le Dieu Dragon était impossible, mais juste là, à la fin, il m’avait appris quelque chose. Il m’avait rappelé la technique que le Dieu dragon avait utilisée. C’était gravé dans mon esprit, la façon dont il avait détourné mon attaque.
Il y avait une méthode derrière tout ça. Le Dieu Dragon n’était pas un monstre inconnu. C’était un maître, mais il utilisait des techniques connues de l’homme.
Finalement, nous étions rentrés à la maison et j’avais découvert qu’il ne restait plus rien. Mon père, mon grand-père et ma mère étaient morts. J’avais le cœur brisé. Après tout ce que j’avais souffert pour revenir ici, ma maison et ma famille avaient disparu. Ghislaine et Alphonse étaient là, mais ils me semblaient distants et formels, comme s’ils étaient des personnes différentes.
Il ne me restait plus que Rudeus. Je voulais vraiment former une famille avec lui. J’étais impatiente. Son contrat de tuteur avait duré cinq ans, et nous avions déjà dépassé ce stade depuis longtemps. Il avait terminé son travail en me raccompagnant chez moi. Tous les membres de sa famille n’avaient pas encore été retrouvés. J’étais sûre qu’il repartirait immédiatement et qu’il me laisserait derrière lui. Je le savais, c’est tout.
J’avais utilisé mon corps pour le garder ici. Il avait d’abord hésité, et j’avais eu peur qu’il ne m’accepte pas. Rudeus ne m’avait jamais épiée pendant que je prenais mon bain. Même sur le bateau qui se rendait sur le Continent Millis, où il avait eu de nombreuses occasions de me toucher, il ne l’avait pas fait. J’avais peur qu’il ne s’intéresse pas à mon corps. Je passais tout mon temps à m’entraîner et il me manquait la féminité que les autres filles avaient.
Mais ce n’était pas le cas. Rudeus était excité par moi, et le voir comme ça m’excitait aussi.
Nous avions donc connecté nos corps. Je ne l’avais jamais fait avant, alors c’était bizarre au début, mais peu à peu, j’avais commencé à me sentir bien. En comparaison, Rudeus avait semblé apprécier cela dès le début. Et pourtant, à mi-chemin, il s’était affaibli et était devenu faible, comme s’il risquait de se briser. C’était alors que je m’étais rendu compte, une fois de plus, que Rudeus était plus jeune que moi. Il était assez robuste en bas, mais il était plus petit que moi et plus légèrement bâti.
Il était si jeune, et pourtant il m’avait toujours protégée. Il avait passé tout le voyage à soigner mon mal de mer lorsque nous étions sur le bateau, et il avait été incroyablement épuisé lorsque nous avions débarqué. Par rapport à cela, qu’est-ce que j’étais ? J’étais devenue plus puissante. J’étais devenue assez bonne à l’épée. Mais j’étais tellement prise par mon image de la magnificence de Rudeus que j’ignorais à quel point il était petit. À la fin, j’avais utilisé mon anxiété de perdre ma famille comme excuse pour me forcer à lui, et je l’avais mal traité dans la poursuite de mon propre désir.
Je le répète. J’aimais Rudeus. Mais je n’étais pas faite pour être avec lui. Je ne serais qu’un fardeau pour lui. Nous étions devenus une famille, mais nous ne pouvions pas devenir plus que ça. Nous ne pouvions pas être mari et femme. Même si nous étions ensemble, je continuerais à le maintenir au sol.
Pour l’instant, il serait préférable que nous passions un peu de temps séparés. Cette pensée m’était venue naturellement. Tant que je serais avec lui, je profiterais de sa gentillesse. Les douces sensations de la nuit que nous avions passée ensemble persistaient encore dans mon corps, au point que j’en avais la nostalgie. C’était une caractéristique de la famille Greyrat, même si, contre toute attente, Rudeus ne partageait peut-être pas ces tendances aussi fortement. Il faisait de son mieux pour me suivre, mais à ce rythme, la férocité de mon désir pourrait le troubler. Je ne pouvais pas lui faire ça.
Je n’avais pas l’intention de faire ce qu’Alphonse m’avait dit et d’épouser un autre homme. Il était trop tard pour qu’il me dise de vivre comme la fille d’une famille noble. On m’avait dit de faire des sacrifices pour les citoyens de la région alors que je ne savais même pas que ces citoyens n’avaient aucun attrait pour moi. Mon grand-père, mon père et ma mère n’étaient plus là. La région de Fittoa n’existait plus. Quel était le but ?
***
Partie 4
Je me débarrassais du nom de Boreas. Mais j’étais toujours la petite-fille de Sauros, et la fille de mes parents, je continuais donc à vivre avec une volonté de fer.
Je vais devenir plus forte, avais-je pris ma résolution.
Je me séparerais de Rudeus et continuerais à m’entraîner. Je n’arrêterais pas avant de pouvoir me tenir à ses côtés. Je n’avais pas à être capable de le vaincre. Mais au moins, je voulais devenir une femme à la hauteur de sa stature. Une femme qui n’entendrait pas de murmures derrière son dos si elle s’approchait de lui.
Je n’avais pas la perspicacité de Rudeus, alors je cherchais plutôt la force. Ghislaine, Ruijerd et Gyes avaient dit que j’avais du talent avec l’épée, je me fierais donc à leurs paroles. Je suivrais la recommandation de Ghislaine et me rendrais au sanctuaire de l’épée. Là, je deviendrais une épéiste puissante et précise.
Une épéiste (moi) et un magicien (Rudeus). L’association traditionnelle devrait être tout le contraire, mais nous étions tous les deux d’accord avec cela. Nous grandirons, nous deviendrons plus forts et nous nous rencontrerons à nouveau. Puis nous franchirons une nouvelle étape dans notre famille et deviendrons mari et femme. J’aurais ses enfants et nous vivrions heureux pour toujours.
Maintenant, comment devrais-je m’y prendre pour lui dire au revoir ? Rudeus était un excellent orateur. Peu importe ce que j’essayais de dire, il pouvait m’arrêter. Il pouvait essayer de venir avec moi parce qu’il avait peur que je sois seule.
Peut-être devrais-je laisser un mot… ? Mais me connaissant, je laisserais probablement une sorte de trace en le faisant. Il pourrait s’en servir pour me retrouver, et ce serait la pagaille. Il avait besoin d’aller de l’avant. Je ne voulais pas le retenir.
Dans des moments comme celui-ci, il valait mieux agir comme les épéistes dans toutes les histoires et partir tranquillement. Mais Rudeus ne cessait de parler de rapports, de communication et de discussion. Je ne voulais pas qu’il me déteste.
D’accord. Je laisserais quelque chose de court. Alors, sûrement, Rudeus comprendra.
Rudeus
Bonjour à tous ! Oui, bonjour à vous tous, les vierges, c’est une belle matinée ! On dit qu’il n’est permis d’être encore vierge qu’à l’école primaire, alors qu’en est-il de vous ? Ohh, moi ? Je ne suis pas si génial. Ha ha, j’aurai bientôt treize ans. Si on convertit ça en années scolaires, ça veut dire que je suis déjà au collège. Ha ha !
Et aussi, bonjour à tous les non vierges ! À partir d’aujourd’hui, je suis l’un d’entre vous ! En d’autres termes, je suis « normal » maintenant ! Je n’aurais jamais pensé me joindre à vous, mais j’espère que vous me réserverez un accueil chaleureux, car je ne suis qu’un débutant. Comme on dit, les gens riches se soucient du profit et se battre n’apporte que des pertes, alors soyons amis !
J’avais entendu des rumeurs selon lesquelles l’on se sentait encore mieux dans un Fleshlights que dans le corps d’une vraie femme, mais ce n’était que des mensonges. En outre, il manquait au Fleshlights diverses choses, comme de vraies lèvres et une langue. La vue, l’ouïe, le toucher, le goût, l’odorat, il y avait quelque chose dans le sexe qui satisfaisait les cinq sens.
Il y avait un dicton dans mon ancien monde : « N’agis pas comme si tu étais son petit ami juste parce que tu as fait l’amour une fois. » Je comprenais ce que les gens voulaient dire par là, mais, et je ne sais pas trop comment le dire, quand j’avais enroulé mes bras autour de sa taille et que je l’avais serrée contre moi, elle glissa les siens dans mon dos et me rendis l’étreinte. J’entendais sa respiration rauque dans mon oreille, et quand je regardais son visage, ses yeux s’étaient fermés. Si j’embrassais autour de sa bouche, elle sortirait sa langue, et ce serait une inondation en haut et en bas.
On avait vraiment l’impression d’appartenir à l’autre à ce moment-là. Je suppose que ce n’était pas seulement physiquement, mais aussi mentalement satisfaisant. Se désirer et se donner l’un à l’autre ? Ceux d’entre vous qui ont beaucoup plus d’expérience se disent probablement : « Ne vous emportez pas juste parce que vous l’avez fait une fois. » Mais je n’avais pas pu m’en empêcher. Je voulais agir comme si j’étais son petit ami. Éris voulait probablement agir comme si elle était aussi ma petite amie.
Oups, désolé pour ça. C’était probablement un peu trop stimulant pour vous, les vierges. Comme c’est grossier de ma part. D’après ma propre notion du temps, j’avais soif depuis quarante-sept ans, alors j’étais un peu excité maintenant que j’avais enfin obtenu ce que je voulais. Ou peut-être était-il plus juste de dire que j’avais perdu ce que je voulais ?
Il y avait longtemps, je pensais que j’essaierais de garder la tête froide même si je parvenais à perdre ma virginité. Oups ! Je supposais que j’avais tort. Oh, il est déjà si tard ? Désolé, j’avais rendez-vous avec ma copine pour une conversation sur l’oreiller ce matin. J’étais sûr qu’on allait le refaire ce soir. Peut-être que nous aurions aussi des plaisirs d’après-midi !
Allez, Éris, c’est le matin ! Réveille-toi. Si tu ne te réveilles pas, je vais te faire une blague, pensais-je joyeusement.
Sauf qu’elle n’était pas là. L’espace dans le lit à côté de moi était vide. Eh bien, elle avait après tout tendance à se lever tôt. Quel dommage ! Tant pis pour la traditionnelle conversation sur l’oreiller du matin et la pause café qui s’ensuit.
« Oof ! »
Je m’étais levé. Il y avait un épuisement agréable dans la zone autour de mes hanches. C’était rassurant de savoir que ce qui s’était passé la nuit dernière n’était pas qu’un rêve. C’était une sensation vraiment délicieuse.
J’avais retrouvé mon pantalon, mais il manquait mes sous-vêtements. Eh bien. J’avais juste mis mon pantalon sans lui, et comme la culotte d’Éris était sur le côté du lit, je l’avais empoché. Puis j’avais enfilé une veste et j’avais fait un grand bâillement.
« Hmm, c’est bien. »
Je n’avais jamais eu une matinée aussi rafraîchissante.
Juste à ce moment, j’avais réalisé que quelque chose était éparpillé sur le sol. Il y avait quelque chose de rouge éparpillé partout.
« Huh... ? »
C’était des cheveux. Des cheveux cramoisis qui étaient tombés partout sur le sol.
« Mais qu’est-ce que c’est que ça ? »
J’avais attrapé une mèche de cheveux et j’avais essayé de la renifler. C’était le même parfum que j’avais beaucoup senti la nuit dernière, celui d’Éris.
« Qu’est-ce… ? »
Confus, j’avais regardé devant moi et j’avais vu un seul morceau de papier. Je l’avais attrapé et j’avais lu les mots griffonnés dessus.
Nous ne sommes pas de même niveau en ce moment. Je me mets en route.
J’avais digéré ces mots avec soin.
Une seconde. Deux. Trois.
Je m’étais envolé.
J’avais regardé dans la chambre d’Éris. Il n’y avait pas de bagages. J’étais sorti et j’étais entré dans le quartier général, où j’avais trouvé Alphonse.
« Hé, Monsieur Alphonse, où est Éris !? »
« Elle est partie en voyage avec Ghislaine. »
« Où ça !? »
Alphonse me regardait avec une froide indifférence dans les yeux. Puis, il dit lentement : « On m’a dit de vous cacher ça. »
« Oh… c’est si… ? »
Hein ?
Pourquoi ?
Je n’avais pas compris.
Hein !?
Pourquoi avait-elle rompu avec moi ?
Non, elle m’avait abandonné ?
Elle m’avait laissé derrière elle ?
Hein ?
La famille… ?
Quoi ?
♥♥♥
J’avais passé une semaine entière à rester assis, incapable de faire quoi que ce soit, complètement abasourdi. De temps en temps, Alphonse venait me harceler pour que je trouve un travail ou autre chose. Je ne pensais pas qu’il restait quoi que ce soit dans la région de Fittoa, mais de petits villages en développement se construisaient peu à peu à proximité du camp de réfugiés. Les gens commençaient même à cultiver du blé.
Selon les instructions d’Alphonse, j’avais utilisé la magie de la terre pour construire un mur de défense autour du camp. La rivière menaçait de déborder et son lit était érodé, alors j’avais créé une digue. Les progrès avaient été graduels, mais la restauration se poursuivait. Apparemment, des efforts sérieux de reconstruction allaient commencer après qu’un grand nombre de personnes de Millishion avait fini de migrer ici.
Éris avait choisi la mort à elle-même.
La personne connue sous le nom d’Éris Boreas Greyrat n’était plus. À sa place, il n’y avait plus qu’Éris. Alphonse déclara que sa décision allait entraîner plusieurs complications, de sorte que toute annonce officielle de son sort serait reportée de quelques années. Il agissait probablement sur ordre de Darius. Pas que cela m’intéressait.
Même si Éris avait soudainement disparu, l’expression du visage d’Alphonse ne donnait aucune indication que cela le dérangeait. En plaisantant à moitié, je lui avais dit : « C’est dommage qu’Éris se soit enfuie », mais il avait nonchalamment détourné la conversation en disant : « Quoi qu’il en soit, je dois travailler au rétablissement de la région de Fittoa. »
J’avais besoin de poser plus de questions pour mieux comprendre la situation. Cependant, avec le départ d’Éris, je me sentais plus ou moins apathique face à la situation. Si les nobles voulaient se battre pour l’autorité ou autre chose, ils étaient les bienvenus.
J’avais beaucoup réfléchi à la raison du départ d’Éris. J’avais réfléchi à mes paroles et à mes actes cette nuit-là. Cependant, peu importe comment j’avais essayé de revenir en arrière, la seule chose qui était restée dans mon esprit était nos ébats amoureux. C’était comme si ce moment avait noyé tous les autres détails de cette nuit.
Peut-être que j’étais vraiment mauvais à ce moment-là ? J’avais juste suivi mes désirs quand j’avais pris les devants, alors peut-être s’était-elle sentie désillusionnée par la façon dont les choses s’étaient déroulées ? Non, ce serait étrange. C’est moi qui l’avais fait, mais c’est elle qui m’avait invité.
Non, ce n’était pas ça. Son affection pour moi venait de s’épuiser. En me remémorant les trois dernières années, je m’étais rendu compte que notre voyage était truffé d’échecs. Nous étions finalement arrivés ici, mais c’était en grande partie grâce à Ruijerd. Éris avait dû détester l’idée d’être suivie par la cause de tous ces échecs pendant encore deux ans. C’était pourquoi elle avait tenu sa promesse très tôt et avait dit au revoir.
Je ne savais pas pourquoi elle agissait comme si ses actes avaient un sens plus profond, mais pour l’instant, c’était la conclusion à laquelle j’étais arrivé. En fin de compte, je n’avais pas vraiment grandi du tout. Il n’était pas étonnant que ses sentiments pour moi se soient estompés.
C’est alors que je m’étais soudainement rappelé que j’avais une autre mission à remplir.
« Ah, c’est vrai. Je dois chercher Zenith… »
Et c’était ainsi que je m’étais lancé dans la partie nord du continent central.
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Merci pour le chapitre et bon courage pour la suite !