Mushoku Tensei (LN) – Tome 6 – Chapitre 12 – Partie 2

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Chapitre 12 : La vérité au sujet de la Calamité

Partie 2

Mais non, ce n’était qu’une façade. Ce qui m’importait, c’était les sentiments d’Éris. Je ne pouvais pas rester calme en pensant à ce qu’elle devait ressentir en apprenant qu’elle n’avait plus de famille. Je ne savais pas quand les décès de Philip et Hilda avaient été annoncés. Cela aurait pu être avant ou après la mort de Sauros. Mais Sauros était au moins en vie, « était » étant le mot-clé. Ils n’avaient tout de même pas besoin de le tuer.

Combien pensaient-ils qu’il y avait eu de morts dans cette catastrophe, dans l’incident de téléportation ? Des centaines de milliers, un nombre incalculable, et pourtant ils avaient délibérément tué un homme qui était revenu vivant ? Éris avait-elle fait tout ce chemin pour rentrer chez elle juste pour apprendre ça ?

Ah, merde. Je n’arrivais pas à réfléchir. J’avais mal à la main.

« Maître Rudeus, je comprends ce que vous ressentez, mais… c’est l’état actuel du royaume d’Asura. »

Alphonse, le maître que tu as servi a été tué ! Ghislaine, l’homme qui t’a sauvé la vie a été tué ! Pensais-je... C’était ce que je voulais leur dire.

Pourtant… rien n’était sorti.

Principalement parce qu’Éris n’avait rien dit. Il n’y avait aucune raison de crier et de pleurer. Même s’ils avaient pris soin de moi et que nous étions parents, Sauros m’était toujours étranger. Si sa famille n’allait rien dire, à quoi bon me plaindre ?

« … Alors, qu’est-ce que je suis censé faire ? »

Dans un calme inhabituel, Éris ne s’était pas plainte et n’avait pas crié.

« Le Seigneur Pilemon Notos Greyrat a dit qu’il vous accueillerait comme sa concubine, Dame Éris. »

Même moi, je pouvais sentir l’intention meurtrière de Ghislaine se répandre soudainement.

« Alphonse, espèce de salaud ! As-tu sérieusement l’intention qu’elle accepte cette offre !? »

Elle avait hurlé, si violemment que j’avais cru qu’elle allait m’ouvrir les tympans.

« Je suis sûr que tu te souviens de ce qu’il a dit ! »

Alphonse garda son sang-froid même face à la fureur de Ghislaine.

« Quand bien même, si l’on pense à l’avenir de la région de Fittoa, cela peut paraître inconfortable, mais… »

« Comme si elle pouvait être heureuse d’être mariée à un homme comme ça ! »

« C’est une ordure, mais il a un nom de famille distingué. Il y a beaucoup de mariages non désirés qui se terminent dans la joie », déclara Alphonse.

« Je me fiche de savoir tout ça ! Penses-tu au moins à Éris !? »

« Je pense à la famille Boreas et à la région de Fittoa. »

« Alors tu comptes sacrifier Éris pour ça !? » cria Ghislaine en retour.

« Si c’est nécessaire. »

J’avais regardé avec un étonnement muet les deux se disputer soudainement. Éris se tenait debout avant que je ne réalise ce qui se passait. Elle lâcha ma main et replia ses deux bras sur sa poitrine, ses jambes s’étaient écartées sous elle et son menton s’était incliné vers l’avant.

« Assez ! »

Sa voix était assez forte pour que Ghislaine doive se couvrir les oreilles. C’était toute l’étendue du souffle d’Éris que je n’avais pas entendu dernièrement. Cependant, c’était toute l’énergie qu’elle semblait avoir.

« Laissez-moi juste… seule. Je veux réfléchir. »

Les deux avaient l’air choqué lorsqu’ils entendirent à quel point sa voix semblait découragée.

Alphonse fut le premier à partir. Ghislaine avait l’air réticente en regardant Éris, mais elle partit.

Au final, il ne restait plus que moi.

« Éris… euh… »

« Rudeus, tu ne m’as pas entendu ? Laisse-moi tranquille pour l’instant. »

Son ton ne laissait aucune place à la discussion.

Je m’étais senti un peu choqué. C’était probablement la première fois depuis longtemps qu’Éris me repoussait comme ça.

« OK, je… comprends. »

Mes épaules s’étaient affaissées quand je vis Éris me tourner le dos. À la seconde où j’avais quitté la pièce et fermé les portes, j’avais juré que je pouvais entendre un sanglot.

♥♥♥

Alphonse nous avait préparé des chambres. Il y en avait quatre, étroites et situées dans une maison près du quartier général, probablement destiné aux réfugiés. J’avais porté mes bagages dans l’une d’elles et j’avais rangé celle d’Éris dans la chambre voisine de la mienne. J’avais retiré mes vêtements de voyage pour en mettre d’autres afin de me promener en ville. Je m’étais débarrassé de ma robe difforme et rapiécée sur le lit et j’avais quitté la chambre.

J’étais retourné au quartier général. Je voulais essayer de parler encore un peu avec Alphonse et Ghislaine, mais je ne les avais pas vus. Je n’avais pas la volonté de les chercher, alors j’avais regardé le tableau d’affichage à la place. Le message de Paul y était épinglé, celui que j’avais vu à plusieurs reprises ces derniers mois. Il disait : « Cherchez sur le continent central ou dans la région nord ». Il l’avait écrit alors que j’avais quel âge, dix ans ? J’aurais bientôt treize ans. Le temps avait passé rapidement.

Mes yeux balayaient la liste des morts et des disparus. Ils atterrirent sur la section intitulée « Village Buena ». Les noms des personnes que je connaissais étaient alignés sur la liste des personnes disparues. Plus de la moitié d’entre eux étaient rayés. Un coup d’œil à la colonne des morts avait révélé que les mêmes noms avaient été écrits là-bas. Apparemment, comme leur mort avait été confirmé, leurs noms avaient été rayés et ils avaient été ajoutés à la liste des morts. Il y avait un peu plus de noms dans la colonne des disparus que dans celle des morts, mais la liste des morts était très dense.

J’avais vu le nom de Laws écrit dans la colonne des personnes disparues avec une ligne qui la traversait, et mes sourcils s’étaient plissés. Paul m’avait dit que Laws était mort. Mais je n’avais pas entendu les détails de sa mort.

Puis, juste en dessous, je l’avais vu. Là, dans la colonne des personnes disparues, il y avait le nom de Sylphie. Et une ligne rayait son nom.

Ba-thump.

Mon cœur battait fort.

Ce n’est pas vrai, pensais-je en regardant la colonne des morts. Je n’avais pas vu son nom près de celui de Laws. J’avais commencé par le haut et j’avais scanné la liste jusqu’à la fin, mais son nom n’était pas présent.

« Hum, il y a une ligne tracée à travers ce nom, mais il n’est pas dans la liste des morts… ? »

J’avais demandé à un membre du personnel, en exprimant mon doute.

« Oui, c’est l’une des personnes qu’on a confirmé qu’elle était encore en vie. »

Quand j’avais entendu ces mots, quelque chose dans ma poitrine fit un bruit sourd. C’était comme si mon cœur était tombé directement dans mon estomac et dans mes tripes. C’est pour vous dire à quel point j’étais soulagé de savoir que Sylphie était vivante.

« Alors, savez-vous aussi comment les contacter ? » lui demandai-je.

« Si cette personne n’est pas venue elle-même à notre quartier général ici, alors j’ai bien peur que non. »

« Pourriez-vous vérifier pour moi ? Son nom est Sylphiette. »

« S’il vous plaît, attendez un instant. »

Le personnel avait fouillé pendant une bonne vingtaine de minutes.

« Je suis désolé, mais ses coordonnées n’ont pas été enregistrées chez nous. »

« Oh, d’accord… »

Il y avait donc deux possibilités. Soit elle ne s’était pas encore installée et n’avait donc pas de coordonnées à inscrire, soit quelqu’un d’autre l’avait repérée et avait mis à jour la liste, ses coordonnées n’ayant donc pas été enregistrées. Il était possible qu’il y ait eu une erreur, mais je ne pensais pas que ce soit le cas. Il y avait une très forte probabilité que Sylphie ait survécu. Pour l’instant, je devrais m’en réjouir.

Bien sûr, j’étais aussi inquiet. À propos de sa couleur de cheveux, par exemple. C’était une nuance légèrement différente de celle des Superds, mais c’était pratiquement la même. Selon l’Homme-Dieu, la malédiction s’appliquait uniquement à la tribu des Superds. Pourtant, il y avait beaucoup de gens cruels dans le monde. Elle était peut-être quelque part, en train de pleurer à cause d’une remarque sur ses cheveux…

Non. Paul avait dit qu’elle pouvait utiliser la magie de guérison sans avoir besoin d’incantations. Cela signifiait qu’elle avait assez de force pour survivre par elle-même. Peut-être était-elle comme moi, travaillant comme une aventurière. Peut-être cherchait-elle sa famille, sans savoir qu’elle était déjà décédée. En fait, si elle avait survécu à l’incident, c’était la possibilité la plus probable. J’avais juste prié pour qu’elle ne soit pas devenue une esclave ou autre chose.

Pour le moment, j’avais pris sur moi de rayer les noms de Lilia et d’Aisha de la liste des disparus. Il y avait déjà une ligne à travers mon nom. Ils avaient entendu qu’Éris était en route pour venir ici, donc ils savaient probablement pour moi aussi.

Dans la famille de Paul, le seul nom qui restait était Zenith Greyrat, ce qui signifiait qu’elle n’avait toujours pas été retrouvée. Peut-être que je pourrais le demander à l’Homme-Dieu la prochaine fois qu’il apparaîtra dans mes rêves.

Quand j’avais fini de regarder le tableau d’affichage, Éris n’était toujours pas sortie de la pièce. Elle était normalement si rapide à se remettre. C’était la première fois que je la voyais aussi troublée par quelque chose. Mais nous avions fait tout ce chemin pour arriver ici, et maintenant qu’elle était arrivée chez elle, il n’y avait pas de famille ou de maison chaleureuse pour l’accueillir. Peut-être que cela suffisait à accabler même quelqu’un d’aussi fort qu’Éris.

Peut-être que je devrais retourner la réconforter, me suis-je dit. Non, attendons encore un peu.

J’avais décidé de retourner dans le bâtiment où j’avais laissé nos bagages. Je m’étais dit que je trouverais quelque chose que je pourrais faire en attendant, mais je ne savais pas quoi. Peut-être que je devrais simplement me reposer.

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Un commentaire :

  1. merci pour le chapitre

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