Mushoku Tensei (LN) – Tome 4 – Chapitre 8 – Partie 2

***

Chapitre 8 : Vie paisible dans le village de Doldia

Partie 2

Deux semaines passèrent, et la pluie ne s’arrêtait pas.

J’avais appris que les Doldia avaient leur propre magie secrète. Cela leur permettait de trouver des ennemis en poussant un hurlement d’une grande portée, et avec leurs voix spéciales, ils pouvaient faire perdre le sens de l’équilibre à leurs adversaires. La façon dont Gyes m’avait paralysé avec sa voix était de ce type de magie. D’après ce que j’avais entendu, c’était une magie qui manipulait le son.

Quand j’avais demandé à Gustav : « J’aimerais que tu m’apprennes », celui-ci accepte de bon cœur. Malheureusement, peu importe combien de fois il me faisait la démonstration, je ne pouvais pas l’imiter parfaitement. La magie semblait dépendre des cordes vocales uniques des Doldia.

Bien sûr que je ne le peux pas, m’étais-je dit amèrement. Selon toute vraisemblance, je ne pourrais pas utiliser la plus grande partie de la magie unique que les tribus individuelles possédaient. Le fait que les Hommes Bêtes et d’autres races puissent utiliser la magie humaine si facilement me semblait injuste. Je savais que l’élément clé était de canaliser le mana dans ma voix, mais peu importe comment je le faisais, le résultat était toujours inférieur. Le mieux que je puisse faire, c’était de faire trembler mon adversaire pendant un moment. Après tout, il semblerait que je ne serais pas un Wagan.

Sur ce point, Gustav avait été très choqué par la façon dont j’utilisais la magie sans chanter.

« Les écoles de magie enseignent-elles ça aussi de nos jours ? »

« C’est parce que mon maître m’a très bien enseigné », expliquai-je, louant Roxy sans raison apparente.

« Oh ? Et d’où vient ton maître ? »

« De la tribu des Migurd, de la région de Biegoya du Continent Démon. Sa magie… Je pense qu’elle a appris dans l’Académie de Magie. »

Quand j’avais dit à Gustav que j’avais aussi l’intention d’aller à l’Académie de magie, il avait semblé impressionné. Il m’avait dit ceci :

« Wôw, tu es déjà à ce niveau et pourtant tu es toujours motivé pour t’améliorer ? »

Ça m’avait fait me sentir bien.

◇ ◇ ◇

Trois semaines s’étaient écoulées.

Des monstres étaient également apparus dans ce village. L’un d’entre eux était un marcheur sur eau. Il surfait rapidement sur l’eau en contrebas pour ensuite sauter soudainement et attaquer. Un autre ressemblait à un serpent d’eau qui glissait le long des arbres. Le village était gardé par sa bande de bêtes guerrières, mais leurs nez impressionnants et leurs voix en forme de sonar n’étaient d’aucune utilité sous la pluie, les monstres se faufilaient souvent sous leur regard vigilant et infestaient le village.

Alors qu’Éris et moi nous promenions, l’un des enfants des hommes bêtes avait failli se faire attraper par un reptile caméléon juste devant nous. Je l’avais aussitôt abattu avec mon canon de pierre. L’enfant ayant adorablement agité la queue en me remerciant.

J’étais étrangement populaire parmi les enfants de ce village, sans doute parce que j’étais le héros qui les avait sauvés quand ils étaient dans le besoin. Parfois, ils venaient me lécher la joue ou me montrer leur collection de glands qu’ils avaient rassemblés avant le début de la saison des pluies. J’étais pratiquement une célébrité.

Éris, dans une véritable démonstration de l’infamie de sa famille, n’avait pas pu contenir son excitation quand elle vit un si grand rassemblement de tant d’adorables enfants ayant des oreilles et des queues. Elle ennuyait les enfants en respirant de façon erratique, en leur tapotant la tête et en leur touchant la queue.

Nous ne pouvions pas rester les bras croisés pendant que de telles créatures adorables étaient attaquées par des monstres. C’est pourquoi j’avais proposé que Ruijerd aide à la défense du village, mais il s’y était opposé.

« Les guerriers d’ici sont fiers de leur rôle dans le village », dit-il.

Protéger ce village était leur devoir. Tant qu’ils n’avaient pas demandé l’aide d’un étranger, ce n’était pas notre affaire de nous imposer. De toute façon, c’était la croyance de Ruijerd, et je n’y comprenais rien du tout.

« Mais la sécurité des enfants n’est-elle pas plus importante que ça ? »

Ruijerd s’arrêta et réfléchit quelques secondes avant de se tourner vers Gyes pour demander son avis.

Gyes accueillit la demande favorablement.

« Oh, Maître Ruijerd, vous allez nous prêter votre aide ? Ça m’aiderait beaucoup ! »

L’enlèvement ayant considérablement réduit le nombre de leurs guerriers. Gyes avait donc offert d’indemniser Ruijerd pour son aide au nom de la bande de guerriers.

C’est ainsi que tous les monstres du village avaient été exterminés. Ruijerd les trouvait et j’utilisais ma magie pour les vaincre. Nous récupérions leurs corps, les dépouillions de leur matériel utile et les vendions à Gyes. C’était du donnant donnant.

Ruijerd avait raison sur une chose. Les guerriers du village nous avaient d’abord désapprouvés. Ce n’était que lorsque nous avions impitoyablement annihilé tout monstre qui entrait dans le village qu’ils réalisèrent que la saison des pluies passerait sans faire de victimes qu’ils avaient fini par sourire.

« Je pensais que leur tribu était plus fière que ça. C’est honteux de confier la protection de leur village à une autre race. »

Ruijerd était le seul à être dérangé par ça. Il semblerait que les hommes bêtes d’il y a plusieurs centaines d’années étaient très différents de leurs homologues modernes.

◇ ◇ ◇

Un mois s’était écoulé.

La force de la pluie diluvienne semblait s’estomper, mais ce n’était probablement que mon imagination. Éris, Minitona et Tersena étaient devenues amies. Elles semblaient aimer voyager ensemble malgré la pluie. Je me demandais ce qu’elles faisaient.

Il s’avérait qu’Éris leur apprenait la langue humaine. Oui, vous m’avez entendu. Éris enseignait une langue aux autres ! Ce n’était ni le moment ni l’endroit pour moi de faire irruption et d’essayer de l’aider, je ne ferais que détruire son image. J’étais après tout un homme qui savait rester à sa place.

C’était la première fois qu’Éris avait des amies de son âge. J’étais fier de la voir si bien s’entendre avec les filles. Les cheveux roux, les oreilles de chat, les oreilles de chien… Les voir toutes s’ébattre joyeusement m’était plus que suffisant.

Bien qu’Éris devrait faire attention à ne pas enrouler ses bras autour d’elles de façon irréfléchie comme ça. Elles pourraient mal comprendre ses intentions, comme ils l’avaient fait avec moi. En fait, Monsieur Gyes regardait. Comment se sentirait-il en tant que parent, voyant Éris avec ses narines évasées, jetant ses bras autour de sa fille ?

« Ah, Dame Éris, j’apprécie que vous vous entendiez si bien avec ma fille. »

Qu’est-ce que… ? C’était une réaction totalement différente de celle qu’il m’avait donnée ! Il aurait dû sentir l’excitation qui rayonnait sur Éris, alors pourquoi ne l’a-t-il pas fait ? Était-ce juste la différence entre les hommes et les femmes, devinais-je. Ouais, ça doit être ça. Bien sûr que ça l’était.

« Au fait, je suis vraiment désolé pour le problème avec Ghislaine. Nous ne nous sommes pas vus depuis très longtemps, alors je l’ai peut-être mal comprise. Il semble que ma petite sœur a un peu grandi depuis qu’elle est dans le monde. »

Il inclina la tête. Il avait l’air d’y avoir fait face le mois dernier. C’était bien, ça.

« Bien sûr qu’elle l’a fait. Ghislaine est une épéiste de rang Roi ! Et tu sais quoi d’autre ? Ghislaine peut aussi maintenant utiliser la magie », se vanta Éris.

« Hahahaha, Ghislaine utilise la magie ? Dame Éris, vos blagues sont très fines. »

« Je suis sérieuse. Rudeus lui a appris la lecture, l’arithmétique et la magie. », insista Éris.

« Le Seigneur Rudeus a fait… ? »

Après ça, Éris commença à se vanter de Ghislaine et moi. Elle parla de mes leçons quand on était à Fittoa. Elle avait commencé par dire à quel point Ghislaine et elle avaient mal appris, et combien elle me respectait d’être resté avec eux deux et de leur avoir enseigné jusqu’à la fin. J’étais gêné de l’écouter.

Gyes avait dit à quel point il était impressionné, et quand le trio s’était finalement séparé, il était venu vers la boîte en bois dans laquelle j’étais caché pour écouter.

« Alors, dites-moi, qu’est-ce qu’un professeur respectable fait dans un endroit comme celui-ci ? »

« Observer les gens est un de mes passe-temps », avais-je bégayé.

« Ah, oui, ça semble être un passe-temps très noble à avoir. Au fait, comment avez-vous appris la lecture à Ghislaine ? »

« Rien de spécial, vraiment. Je l’ai fait comme d’habitude. »

« La façon normale… ? Je n’arrive pas à l’imaginer », dit M. Gyes.

« Quand elle était une aventurière, elle a connu beaucoup de difficultés parce qu’elle n’était pas instruite. C’est logique que vous ne puissiez pas l’imaginer. »

« Voilà donc l’histoire. Quand elle était petite, ma sœur n’était jamais heureuse à moins qu’elle ne puisse frapper quelqu’un quand quelque chose qu’elle n’aimait pas lui arrivait. »

À en juger par ce qu’il disait, Ghislaine avait l’air d’être comme Éris quand elle était jeune fille. Plus précisément, le fait qu’elle se batte avec les gens et que, parce qu’elle était forte, peu pouvaient l’arrêter. Gyes avait dû se faire brûler plusieurs fois par ce feu. Il n’était pas un très bon grand frère s’il était plus faible que sa petite sœur.

En parlant de grands frères, j’en étais un aussi. Je me demandais si Norn et Aisha allaient bien. Je voulais leur écrire une lettre, mais j’avais oublié. Une fois la pluie arrêtée, nous nous dirigerons vers la capitale du Pays Sacré de Millis, et là j’enverrais une lettre au village de Buena. Si j’en avais envoyé une du Continent Démon, il ne l’aurait probablement jamais reçu, mais il ne devrait sûrement pas y avoir de problème si je l’envoyais de Millis.

« Au fait, Maître Rudeus. »

« Oui ? »

« Combien de temps comptez-vous rester dans cette boîte en bois ? »

Jusqu’à ce qu’elles viennent ici pour se changer, bien sûr. Après tout, c’était presque la nuit. Pour l’instant, elles allaient aller jouer dans l’eau, mais ensuite, elles devaient se mettre en chemise de nuit.

« Sniff, sniff… Je peux sentir l’excitation sexuelle sur vous. »

« Quoi!? En aucune façon. C’est absurde. Peut-être que quelque part, il y a une certaine fille aimant les races bestiales et qui a l’air extatiques maintenant qu’elle est rassurée? »

Pendant que j’essayais de faire l’idiot, les sourcils de Gyes tremblèrent.

« Maître Rudeus. Je vous suis reconnaissant pour ce que vous avez fait avant. Je m’excuse aussi, même maintenant, de vous avoir mal compris. »

Son ton changea brusquement.

« Mais si vous posez votre main sur ma fille, ce sera une tout autre histoire. Si vous ne sortez pas de cette boîte tout de suite, je vais la jeter dans l’eau. »

Il était sérieux. Je n’avais pas hésité. J’étais sorti de cette boîte en un éclair, à la même vitesse qu’un de ces Tomy Pop-up Pirates.

« Je suis un protecteur de ce village. Je ne veux pas avoir à vous le dire, mais… retenez-vous un peu. »

« Oui, monsieur. »

Ouais, eh bien, je m’étais un peu trop emporté. Je l’admets.

◇ ◇ ◇

Un mois et demi s’était écoulé.

Ruijerd et Gustav s’entendaient à merveille. Ruijerd se rendait fréquemment chez les Dedoldia, et les deux hommes buvaient ensemble et se racontèrent des histoires de leur passé. Les histoires étaient pleines de choses violentes, mais elles étaient en fait assez intéressantes à écouter. C’était presque comme si j’écoutais un ex-membre d’un gang de motards exagérer sur le fait qu’il était un dur à cuire dans sa jeunesse. Sauf ce que Ruijerd et Gustav racontaient ce qu’il s’était probablement passé.

Grâce à ces conversations, j’avais pu mieux comprendre ce qu’étaient les hommes bêtes. « Hommes bêtes » était un terme générique pour les tribus qui vivaient dans la Grande Forêt. Il y en avait beaucoup qui venaient d’ici, mais qui étaient passé vers le Continent Démon et qui étaient considéré maintenant comme des démons. Une caractéristique extérieure de ces tribus était qu’une partie de leur corps conservait un aspect animal. Chaque tribu avait également un des cinq sens améliorés. Au sens large, Nokopara et Blaze faisaient également partie des hommes bêtes.

Les Doldia étaient particulièrement spéciaux parmi ces tribus. Une seule tribu avait maintenu la paix dans la forêt tout en protégeant la Bête Sacrée. C’était les Doldia.

Puis il y a eu la race féline des Dedoldia et la race canine des Adoldia. Il s’agissait des deux principales familles qui avaient été divisées en une douzaine de clans. En d’autres termes, c’était la royauté de la Grande Forêt. Bien qu’ils ne faisaient pas grand-chose pour mériter le titre, c’était eux qui menaient le bal lorsque le besoin s’en faisait sentir.

Il y avait aussi des elfes et des hobbits qui vivaient dans la Grande Forêt. Ils étaient concentrés dans la partie septentrionale, ils n’avaient donc pas beaucoup de contact avec les races bestiales. Cependant, toutes les tribus se réunissaient une fois par an et participaient à un festival près du Grand Arbre Sacré. Selon Gustav, bien que leurs tribus aient des différences, elles vivaient toutes comme des amies dans la Grande Forêt.

Quant aux nains, ils ne vivaient pas dans la Grande Forêt mais plus au sud, au pied des montagnes de la wyverne bleu. Les dragons bleus survolaient le monde et ne retournaient dans la chaîne de montagnes pour y nicher que lorsqu’ils pondaient des œufs ou élevaient leurs petits, comme les oiseaux migrateurs. Contrairement aux oiseaux migrateurs, cependant, ils ne revenaient qu’une fois tous les dix ans.

Depuis des temps immémoriaux, les hommes et les bêtes traversèrent ensemble les temps de guerre et les temps de paix. Une guerre, qui était plutôt une petite compétition, avait eu lieu il y a à peine cinquante ans. Gustav nous avait régalés avec des histoires de son implication et de la façon dont la bande de guerriers la plus forte des hommes bêtes avait détruit un groupe de soldats humains qui avaient erré dans la forêt. C’était assez dramatisé, mais entendre la façon dont les choses se déroulaient du point de vue des hommes bêtes était tout à fait nouveau et divertissant.

Pour contrer cela, Ruijerd sortit son atout, l’histoire du Clan des Superds pendant la guerre de Laplace. Les deux s’échangeaient des plaisanteries comme s’ils étaient en compétition, mais étant donné qu’ils étaient tous les deux des vieillards, cela s’était plus ou moins transformé en un sermon sur le bon vieux temps.

« Les guerriers de nos jours sont une honte. »

« Je comprends parfaitement ce que tu veux dire, Maître Ruijerd. Beaucoup d’entre eux sont faibles et lâches. »

« Exactement. Dans ma jeunesse, les hommes étaient durs et forts. », dit Ruijerd

C’était littéralement des âmes sœurs. C’était peut-être un monde différent de mon précédent, mais la camaraderie des vieillards était certainement la même.

« Tu as tout à fait raison. Gyes dirige peut-être les guerriers maintenant, mais il manque de jugement. Il est bon pour diriger les gens, mais s’il pouvait mieux évaluer les situations, alors Maître Rudeus n’aurait pas traversé tout cela », dit Gustav.

Ruijerd n’était pas d’accord.

« Non, Rudeus est un guerrier. Il aurait dû comprendre que s’il avait baissé sa garde en territoire ennemi, il courait le risque d’être capturé et retenu en captivité. Pourtant, il baisse toujours sa garde. S’il avait pris les choses au sérieux, il aurait pu battre quelqu’un comme Gyes. C’était son propre échec. »

Aïe. Il avait peut-être entièrement raison, mais ça faisait mal. Ruijerd avait foi en moi, c’est pourquoi il m’avait laissé y aller seul. Pourtant, je m’étais fait prendre si facilement. D’une certaine façon, j’avais trahi sa confiance.

« Mais Maître Ruijerd, n’est-ce pas un peu cruel ? Ton camarade a été victime d’une chose terrible. »

« En tant que guerrier, tu dois prendre la responsabilité de tes propres batailles. D’ailleurs, Rudeus aurait pu s’échapper tout seul à tout moment. J’apprécie qu’il me fasse confiance comme compagnon, mais ce n’est pas un enfant. Un guerrier ne force pas ses camarades dans une position difficile en se laissant prendre ! »

Ruijerd, tu es vraiment bourré. Tu pourrais peut-être t’échapper tout seul si tu te faisais prendre, mais essaies de ne pas trop attendre de moi. Mes pouvoirs ne sont pas illimités, d’accord ?, pensais-je.

***

Si vous avez trouvé une faute d’orthographe, informez-nous en sélectionnant le texte en question et en appuyant sur Ctrl + Entrée s’il vous plaît. Il est conseillé de se connecter sur un compte avant de le faire.

Laisser un commentaire