Mushoku Tensei (LN) – Tome 3 – Chapitre 9

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Chapitre 9 : Le premier emploie : La valeur d’une vie

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Chapitre 9 : Le premier emploie : La valeur d’une vie

Partie 1

La maison Kirib, située dans le bloc 2 de Rikarisu, était un long bâtiment d’un étage avec quatre entrées séparées.

Ceux qui y vivaient étaient loin d’être aisés, mais ils n’étaient pas aussi désespérément pauvres que ceux qui vivaient dans les bidonvilles de la ville. Selon les standards du Continent Démon, c’était des gens typiques de la classe ouvrière.

Trois silhouettes ombragées, deux petites, une grande, s’approchaient actuellement de cet endroit.

Se pavanant audacieusement dans la rue, ils se dirigèrent vers l’une des multiples entrées de l’immeuble, indifférents aux regards de ceux qui les entouraient.

« Bonjour, mademoiselle ! Nous venons de la guilde des aventuriers ! »

Le jeune garçon du groupe frappa à la porte, criant d’une voix aiguë vers l’intérieur.

Il y avait quelque chose d’inquiétant à ce sujet. Aucun des aventuriers de cette ville n’avait parlé aussi poliment. Ils étaient de nature durs et grossiers.

Pourtant, la douceur de la voix du garçon avait apparemment trompé le résident de cette chambre. La porte s’ouvrit en grinçant, et une fille d’environ sept ans émergea de l’intérieur. Sa longue queue de lézard et sa langue fourchue distinctive l’avaient marquée comme membre de la race Houga.

Les yeux de la jeune fille s’ouvrirent à la vue de ses trois visiteurs inhabituels, mais le garçon lui sourit joyeusement.

« Bonjour ! Enchanté de vous rencontrer. C’est bien la résidence de Mlle Meicel ? »

« Huh ? U-uhm... »

« Oh, pardonnez-moi. Je m’appelle Rudeus, mademoiselle. Rudeus de Dead End. »

« Dead End… ? »

Cette fille, Meicel, connaissait bien sûr ce nom. Tout le monde connaissait l’histoire des monstrueux guerriers superds qui avaient combattu si férocement pendant la guerre de Laplace il y a 400 ans, tuant amis et ennemis. Et tout le monde savait que « Dead End » était le plus fort et le plus maléfique de leur groupe. Il avait été dit qu’aucun de ceux qui l’avaient rencontré n’avait survécu pour raconter l’histoire. Même ceux qui ne l’avaient vu que de loin avaient dit qu’ils avaient à peine réussi à s’enfuir vivants. Son nom faisait trembler les cœurs de tous les habitants du Continent Démon, même les aventuriers courageux qui se vantaient de pouvoir tuer à eux seuls n’importe quel monstre frissonnaient rien qu’en entendant son nom.

Mais Meicel savait aussi à quoi ressemblait Dead End, et ce jeune garçon ne correspondait pas du tout à cette description.

« Nous avons accepté votre demande à la guilde ce matin, mademoiselle. Nous sommes ici pour retrouver votre animal perdu. Nous voulions vous demander les détails, si vous avez le temps. »

Le nom Dead End était terrifiant en soi, et les deux autres personnes debout derrière le garçon étaient un peu intimidantes. Mais il lui parlait si poliment qu’il était difficile de rester effrayé. Et d’après ce qu’elle vit, c’était des aventuriers qui avaient accepté la quête qu’elle avait affichée.

« S’il vous plaît… S’il vous plaît, trouvez Mii pour moi. »

« Ah, donc le nom de votre animal de compagnie est Mii ? C’est un nom très mignon, je dois dire. »

« Je l’ai trouvé moi-même. »

« Oh, vraiment ? Eh bien, vous avez clairement un don pour nommer les choses, mademoiselle. »

Ce compliment lui avait valu un sourire timide.

« Maintenant… serait-il possible que vous puissiez nous parler un peu de Mii ? »

Meicel avait décrit l’apparence de son animal, expliqué qu’il avait disparu il y a trois jours, ajouté qu’il n’était pas revenu à la maison, précisé qu’il revenait habituellement quand elle l’appelait, et mentionné qu’il avait probablement faim puisqu’elle ne l’avait pas nourri. C’était un monologue enfantin et divagant. Un adulte typique pourrait avoir roulé les yeux sur le babillage de la jeune fille et l’avoir laissé à mi-chemin, mais le jeune aventurier l’avait écoutée avec un sourire, acquiesçant d’un signe de tête encourageant après chaque phrase sincère.

« Compris, mademoiselle. On va chercher Mii tout de suite. Rassurez-vous, vous êtes entre de bonnes mains avec Dead End ! »

Le garçon serra son poing et leva son pouce en l’air, pour une raison quelconque, les deux autres derrière lui firent la même chose. Meicel ne comprenait pas très bien, mais elle les imitait quand même.

Le garçon hocha la tête avec plaisir, se retourna et commença à s’éloigner. La fille à capuchon qui se tenait derrière lui le suivait, mais l’homme plus grand du groupe s’accroupit devant Meicel pour lui tapoter doucement sur la tête.

« Tu as ma parole, nous trouverons ton animal, Meicel. Sois encore un peu patiente. »

Il avait une grosse cicatrice sur le visage, une gemme sur le front, et ses cheveux étaient d’un bleu étrange et tacheté. C’était un peu effrayant de le regarder en face… mais sa main était chaude et douce.

« O-okay. J’attendrai. », dit Meicel en hochant la tête.

« Ne t’inquiète pas. On sera de retour avant que tu t’en rendes compte. »

Tandis que l’homme plus grand se levait pour prendre congé, Meicel l’appelait.

« Quel est votre nom, monsieur ? »

« Ruijerd », répondit l’homme, celui-ci se retourna et partit avec les autres.

Rougissant légèrement, Meicel murmura ce nom à elle-même.

◇ ◇ ◇

Point de vue de Rudeus

Notre première rencontre avec le client s’était très bien passée. Je venais d’imiter un vendeur de portes à porte qui passait souvent chez moi dans ma vie antérieure, mais cela semblait fonctionner mieux que prévu. Cela ne me dérangeait pas de voir les autres aventuriers se moquer de nous, mais nous avions besoin que nos clients nous considèrent d’abord et avant tout comme de bonnes personnes. Cela signifiait que nous devions les traiter avec gentillesse et politesse.

« Je vois que tu es capable de jouer plus d’un rôle. Assez impressionnant, Rudeus. », déclara Ruijerd alors que nous nous éloignions victorieux.

« Je te retourne la pareille, Ruijerd. Ce que tu as fait à la fin était parfait. »

« Ce que j’ai fait à la fin ? Qu’est-ce que tu racontes ? »

« Le moment où tu lui as tapoté la tête en lui parlant, évidemment. »

C’était de la poudre aux yeux. J’avais transpiré à grosses gouttes pendant une seconde, mais les résultats avaient été très impressionnants.

« Oh, je vois. Qu’est-ce qu’il y a de si bon là-dedans ? »

Peut-être la partie où elle te regardait avec un gros rougissement sur le visage ? Allez, mec. J’aurais été tenté de la kidnapper si j’avais été à ta place !

Ce n’était pas une bonne idée de dire ça à quelqu’un qui aimait les enfants autant que Ruijerd. Il aurait probablement passé la demi-heure suivante à me réprimander sévèrement. Au lieu de cela, j’avais adopté le ton de la plaisanterie tout en le poussant du coude dans la cuisse.

« Heheh. Allez, Boss. Tu aurais pu faire tout ce que tu voulais avec cette nana ! Eheheheh... »

Ruijerd sourit dubitativement et nia cela, sa voix un peu incertaine.

« Eheheheh ! Ne sois pas si modeste, Boss ! Si tu avais poussé un peu plus fort, cette fille aurait terminé dans… Aie. »

J’avais été brutalement interrompu par une claque sur la tête. Je m’étais tourné pour trouver Éris qui me boudait.

« Arrête de rire comme ça ! Ce stupide truc de “Boss” n’était pas censé être de la comédie !? »

Apparemment, elle n’était pas une grande fan de ma vision de l’homme fable. Depuis l’enlèvement, Éris méprisait les gens « vulgaires ». À Roa, elle faisait la grimace chaque fois qu’on croisait quelqu’un habillé comme un voyou dans la rue. Je plaisantais seulement avec Ruijerd, mais je suppose qu’elle n’avait pas trouvé ça très amusant.

« Désolé pour ça. »

« Honnêtement ! Tu es un membre de la famille Greyrat, non ? Ne sois pas si grossier ! »

Il fallait faire un effort sur soi-même pour ne pas éclater de rire à ce moment-là. Avez-vous entendu ça, madame ? Éris vient de me gronder pour avoir été « grossier » ! Oui, cette Éris ! La petite dame qui avait l’habitude de sentir le besoin d’ouvrir toutes les portes qu’elle trouvait en donnant des coups de pied ! Elle s’est raffinée dernièrement, ne trouvez-vous pas ?

Mais… si elle voulait me dire des choses comme ça, ne devrait-elle pas d’abord arrêter de se bagarrer dans les auberges avec des étrangers ?

Hmm. Difficile à dire en fait. D’après ce que j’avais vu de Sauros, peut-être que se retourner et frapper quelqu’un au visage était dans les limites d’un comportement acceptable… ? Non, non, non. Certainement pas…

Après y avoir réfléchi un instant, je m’étais rendu compte que je n’avais aucune idée de l’endroit où « grossier » s’arrêtait et où « raffiné » commençait pour les nobles Asura. J’avais donc changé de sujet.

« En tout cas, Ruijerd… crois-tu qu’on puisse trouver cet animal ? »

D’après ce que nous a dit Meicel, Mii semblait être un chat. Il était noir, et avait été le compagnon de Meicel depuis qu’elle était très jeune. Elle nous avait montré combien il mesurait exactement. Meicel avait étendu les bras pour montrer sa taille, en supposant que ce n’était pas exagéré, Mii devait être à peu près aussi grande qu’un Shiba Inu adulte, ce qui était assez remarquable pour un chat domestique.

« Bien sûr. Après tout, j’ai donné ma parole à la fille. »

Avec cette déclaration prometteuse et décisive, Ruijerd fit un pas en avant et prit la tête du groupe.

Il bougeait avec confiance, mais je me sentais encore un peu nerveux. Je savais qu’il avait un puissant radar intégré détectant les êtres vivants, mais il n’était pas facile de retrouver un animal en particulier dans une ville qui en était pleine.

« Tu as un plan ou quoi ? »

« Les animaux se déplacent de façon très prévisible, Rudeus. Regarde ici. »

J’avais jeté un coup d’œil au sol, à l’endroit que Ruijerd pointait, et je pouvais à peine distinguer le contour d’une petite empreinte de patte. En parlant d’impressionnant. Je n’aurais jamais remarqué ça en un million d’années.

« Si on suit ces traces, tu crois qu’on le trouvera ? »

« Non. Ça vient probablement d’un autre animal. Les pattes de son chat ne seraient pas si petites. »

Certes, cela ressemblait plus à l’empreinte de la patte d’un chat ordinaire ou même d’un chaton… bien que j’aie un peu soupçonné la fille d’avoir peut-être un peu exagéré la taille de Mii.

« Hm. Alors… »

« On dirait qu’un autre chat s’est frayé un chemin dans le territoire de notre cible. »

« Quoi ? Vraiment ? »

« C’est ce qu’on dirait. L’odeur de son chat s’estompe, alors un autre a emménagé. »

Attendez. Euh… peut-il vraiment détecter les odeurs avec lesquelles ils ont marqué leurs territoires ou quelque chose comme ça ?

« Par ici. »

Ruijerd était apparemment parvenu à la conclusion qu’il ne ressentait pas le besoin de partager avec nous. Il était parti en marchant le long d’une petite rue et je l’avais tranquillement suivi. J’avais l’impression que nous faisions des progrès, mais je ne savais pas trop comment. C’était peut-être ce que l’on ressentait quand on était le pauvre vieux docteur Watson.

Pas de soucis, les amis ! On a le meilleur détective du continent sur l’affaire ! Il traquera les criminels avec ses techniques d’enquête hors pair, les assommera avec des Baritsu de style démoniaque, et leur extorquera des aveux avec quelques questions pointues ! Place au grand détective Ruijerd !

« Je l’ai trouvé. C’est probablement celui-là », déclara Ruijerd, en montrant du doigt un tronçon non décrit de la rue. Je n’aurais pas pu vous dire ce qu’il avait « trouvé » ou pourquoi il ressentait le besoin d’ajouter « probablement ». Il n’y avait pas d’empreintes de pattes ici que je pouvais voir.

« Suivez-moi. »

Ruijerd repartit aussitôt, avançant régulièrement.

Sans hésitation, il nous avait conduits à travers une série de ruelles qui semblaient de plus en plus étroites au fur et à mesure que nous avancions. Au moins, ces allées ressemblaient au type d’allées dans lesquelles on s’attendrait à ce qu’un chat puisse se faufiler. Je n’avais toujours aucune idée du genre de sentier que Ruijerd suivait, mais… tout semblait bien se dérouler jusqu’ici.

« Regardez ça. Il y a des signes de lutte ici. »

On s’arrêta dans une impasse. Quels que soient les « signes » que Ruijerd y avait trouvés, ils étaient trop subtils pour moi. Je ne voyais pas de taches de sang ou d’égratignures dans la terre.

***

Partie 2

« Par ici. »

Tournant sur ses talons, Ruijerd reprit la tête. J’avais l’impression qu’Éris et moi étions juste de la figuration. Tu parles d’un travail peu stressant.

Nous étions passés par quelques rues secondaires, avions coupé à travers un boulevard et nous nous étions dirigés vers une autre rue secondaire. De là, nous nous étions dirigés vers une ruelle, puis nous étions passés sur une autre rue latérale. Etc.

Après avoir parcouru les rues de la ville à vive allure pendant un certain temps, nous avions soudainement pris un virage vers un quartier très différent. Tout ici était délabré et désolé. Les bâtiments étaient grossiers, non peints et s’effritaient par négligence. Certains des hommes que nous avions croisés nous avaient lancé des regards de mauvais augure, il y avait des gens étendus le long de la rue, et beaucoup d’enfants étaient en haillons sales.

On était dans un bidonville maintenant. Le changement n’avait pas été progressif non plus. C’était plutôt comme si nous y étions tombés en plein cœur. En quelques instants, j’étais en état d’alerte.

« Éris, sois prête à sortir ton épée à tout moment. »

« … Pourquoi ? »

« Simple mesure de précaution. Surveille aussi les gens qu’on croise dans la rue et essaye de surveiller tes arrières. »

« Euh… OK ! »

C’était une bonne idée de mettre aussi Éris sur ses gardes. Nous n’étions probablement pas vraiment en danger avec Ruijerd dans les parages, mais je ne voulais pas que nous fassions des erreurs par complaisance. Nous deux, on devrait vraiment se protéger.

Avec cette pensée en tête, j’avais tendu la main dans la poche intérieure de ma poitrine et je m’étais agrippé étroitement à mon portefeuille. Je n’avais pas tant d’argent à perdre, mais ce serait quand même un désastre si quelqu’un le volait.

« … Tch. »

Parfois, certains des gars les plus durs que nous croisions fixèrent Ruijerd d’un air menaçant, mais alors qu’il le regardait fixement, ils avaient tendance à claquer leur langue et à détourner le regard. Dans ce genre de quartier, les gens qui pouvaient donner un bon coup de poing inspiraient probablement plus de respect que les aventuriers.

« C’est vraiment là que le chat est allé, Ruijerd ? »

« On verra bien. »

Cette réponse n’était pas particulièrement rassurante. On n’errait pas sans but ici, n’est-ce pas ?

Non, non. Je dois continuer à me dire que Ruijerd n’est qu’une personne ne parlant peu, que je suis sûr qu’il nous a mis sur la bonne voie.

Nous avions fini par marcher dans les bidonvilles pendant un certain temps. Ruijerd avait fini par se faufiler devant un certain bâtiment.

« C’est juste ici. »

Une volée d’escaliers grossiers devant nous menait à une porte indéfinissable. On aurait dit l’entrée d’un bar souterrain habité par des punk-rockers avec des coupes de cheveux bizarres. Mais il n’y avait pas de musique bruyante flottant d’en bas ni de chauves avec des lunettes de soleil à la porte pour surveiller la clientèle.

D’un autre côté, il y avait une épaisse odeur d’animal qui venait d’en bas, le genre d’odeur qu’on pouvait sentir en passant devant une grande animalerie.

Dans un sens moins littéral, on pourrait pratiquement sentir le crime dans l’air.

« Combien y a-t-il de gens à l’intérieur, Ruijerd ? »

« Personne. Mais il y a un grand nombre d’animaux. »

« Très bien. On y va ? »

S’il n’y avait personne là-dedans en ce moment, il n’y avait aucune raison d’hésiter.

La porte en bas de l’escalier était verrouillée, naturellement, mais je l’avais ouverte assez facilement avec un peu de magie de terre.

En jetant un coup d’œil rapide dans la zone pour m’assurer que personne ne regardait, je m’étais glissé dedans, j’avais attendu que Ruijerd et Éris suivent, puis j’avais fermé et verrouillé la porte de l’intérieur. J’avais l’impression qu’on était des cambrioleurs ou quelque chose du genre.

Au premier coup d’œil, tout ce que je pouvais voir, c’était un long couloir sombre qui s’étendait devant nous.

« Peux-tu surveiller nos arrières pour nous, Éris ? »

« Pas de problème. »

Ruijerd saurait probablement si quelqu’un venait après nous, mais ça ne pouvait pas faire de mal d’être très prudent.

Nous nous étions tous les trois enfoncés plus profondément dans le bâtiment, avec Ruijerd en tête une fois de plus. La seule porte au bout du couloir principal donnait sur une petite pièce, avec une autre porte à son extrémité. Mais alors que nous passions cette deuxième porte, un chœur assourdissant de cris d’animaux avait instantanément rempli l’air.

Nous avions atteint la pièce toute à l’arrière du bâtiment. Elle était entièrement remplie de cages.

Il y avait d’innombrables animaux enfermés dans cette pièce, des chats, des chiens et une grande variété de créatures que je n’avais jamais vus auparavant, tous entassés dans un espace de la taille d’une classe de lycée.

« Qu’est-ce que c’est ? », dit Éris d’une voix tremblante.

Mes premières pensées allaient à peu près dans le même sens… mais il m’était aussi venu à l’esprit qu’étant donné le nombre d’animaux ici, il y avait de fortes chances que celui que nous recherchions se trouvait parmi eux.

« Ruijerd, le chat est là ? »

« Oui. C’est celui-là. », avait-il répondu instantanément.

Il montrait quelque chose qui ressemblait beaucoup à une panthère noire.

L’animal était énorme. Absolument énorme. Il devait être deux fois plus grand que ce que Meicel avait indiqué avec ses bras.

« C’est vraiment celui qu’on cherche ? »

« Bien sûr que c’est lui. Regarde son collier. »

La bête avait, en fait, un collier. Et le nom « Mii » y était imprimé.

« Wôw. Je suppose que… c’est vraiment Mii, hein ? »

Techniquement, nous avions maintenant terminé notre tâche. Une fois qu’on aura sorti cette panthère de sa cage et qu’on l’aura ramenée à la petite fille, ce sera fini.

Cela dit, euh… Qu’en est-il de tous ces autres animaux ?

Il y en avait un bon nombre avec des colliers autour du cou ou des bracelets sur les jambes, et certains d’entre eux avaient des noms écrits dessus. En d’autres termes, tout un tas de ces animaux était manifestement des animaux de compagnie. J’avais aussi remarqué un gros tas de cordes et de choses qui ressemblaient à des muselières dans un coin de la pièce. Les cordes, en particulier, semblaient indiquer qu’il y avait eu des captures ici.

Peut-être que quelqu’un enlevait des animaux de compagnie uniques dans la rue et les vendait-il à d’autres personnes ? C’était un plan parfaitement plausible.

Je ne savais pas s’il y avait des lois précises sur ce genre de choses dans ce monde, mais il fallait que ce soit une sorte de crime… Je veux dire que c’était à minima une forme de vol.

« Mm… »

Soudainement, Ruijerd tourna sa tête vers l’entrée.

Éris avait réagi presque exactement au même moment.

« Quelqu’un est en approche. »

Les animaux faisaient tellement de bruit que je n’avais rien entendu. Ruijerd mis à part, j’avais été vraiment impressionné qu’Éris l’ait remarqué.

Cela dit, qu’allons-nous faire à ce sujet ? Ça ne leur prendrait pas beaucoup de temps pour arriver ici depuis l’entrée. Était-ce une option ? Non, pas vraiment, la seule issue étant ce couloir.

« Je suppose qu’on devra d’abord les capturer. »

Je n’avais pas vraiment envisagé l’option de la discussion. On était quand même entrés ici par effraction comme une bande de voleurs. Cela semblait être une scène de crime, mais il était toujours possible qu’elle ait un motif légitime, ce qui ferait de nous les criminels.

Pour l’instant, nous avions besoin d’arrêter ces gens. S’ils étaient innocents, on pouvait les cajoler pour qu’ils se taisent, mais s’ils étaient coupables, on pouvait les frapper jusqu’à ce qu’ils promettent de ne pas parler.

◇ ◇ ◇

Quelques minutes plus tard, j’étais debout devant trois personnes, deux hommes et une femme, qui étaient allongées inconscients sur le sol, dans un coin de la pièce.

Après les avoir attachés avec des menottes que j’avais faites avec la magie de la Terre, je leur avais aspergé le visage d’eau pour les réveiller. L’un des hommes s’était immédiatement mis à japper et à hurler, alors je l’avais bâillonné avec un chiffon qui gisait à proximité.

Les deux autres restèrent silencieux, mais j’avais fini par les bâillonner aussi tous les deux. Il valait mieux être juste et impartial avec ces choses.

« … Hm. »

Avec tout cela, je m’étais retrouvé à me poser une certaine question : comment en était-on arrivé là ?

Je veux dire, nous avions pris un simple travail de rang E : trouver un chat perdu. Rien de trop dramatique. Ruijerd avait dit qu’il pouvait s’en charger, alors je lui avais demandé de prendre les choses en main et j’avais fini par le suivre dans une sorte de bidonville. Dans ce bidonville, nous étions entrés par effraction dans un bâtiment avec des tonnes d’animaux à l’intérieur. À ce moment-là, nous nous étions retrouvés à emmener plusieurs personnes en captivité… ce qui n’était absolument pas notre raison d’être.

C’est la faute de l’Homme-Dieu, non ? De toute évidence, il avait prévu ce qui allait se passer.

Quel mal de tête ! J’aurais vraiment dû choisir un autre boulot.

… Quoi qu’il en soit, regardons un peu plus attentivement nos prisonniers.

Homme A :

Peau orange. Des yeux composés comme une mouche, sans blancs. Il était un peu dégoûtant à regarder. C’était lui qui s’était mis à crier comme une cigale quand je les avais réveillés. Il avait l’air d’une personne brutale… le genre de gars qui se trouverait probablement dans une bagarre de bar.

J’étais presque sûr d’avoir vu une photo de sa race dans le dictionnaire de Roxy, mais je n’arrivais pas à me rappeler comment on les appelait. Leur salive était apparemment empoisonnée, je me souvenais m’être demandé s’ils pouvaient même s’embrasser.

Homme B :

Celui-ci avait une tête de lézard, de forme et de couleur légèrement différente de la tête des serpents que nous rencontrions à l’entrée de la ville. Étant donné ses traits reptiliens, il était difficile de lire son expression. Mais je pouvais voir de l’intelligence dans ses yeux, ce qui me faisait me méfier de lui.

Femme A :

Un autre type d’œil d’insecte. Sa tête ressemblait à celle d’une abeille, mais je pouvais pourtant voir qu’elle avait très peur en ce moment. Je supposais que son visage était aussi dans la catégorie « grossier », mais elle avait une jolie silhouette, ce qui permettait d’oublier le reste.

Eh bien, alors. Nous n’avancerons pas si je reste là à les regarder. C’est l’heure d’une petite discussion… Non, non, soyons honnêtes. Ce sera un interrogatoire.

Mais par qui commencer ? Qui allait cracher des informations plus rapidement, la femme ou l’un des hommes ? La femme avait vraiment peur. Si je la menaçais un peu, elle pourrait tout me dire tout de suite.

D’un autre côté, on savait que les femmes mentaient. Certaines d’entre elles étaient parfaitement capables de vous dire des bêtises ridicules et incohérentes pour se sortir d’affaire. Toutes les femmes n’étaient pas comme ça, bien sûr, mais ma grande sœur l’était. Avant, ça me mettait tellement en colère que j’avais du mal à découvrir la vérité.

Peut-être que je commencerais par un des hommes à la place.

Par l’homme A ? C’était la personne la plus gênante du groupe, il avait une cicatrice sur le visage… Il était probablement leur meilleur combattant. Il était aussi agité en ce moment. Ce n’était probablement pas une lumière, à en juger par la façon dont il criait : « Qui êtes-vous ? » et « Enlevez-moi ces foutues menottes ! »

Ou bien l’homme B ? Il était difficile de lire beaucoup de choses sur son visage, mais il semblait nous observer attentivement tous les trois. Ça voulait dire qu’il n’était pas stupide. Et s’il n’était pas stupide, il avait probablement de bons mensonges élaborés à l’avance au cas où quelque chose comme ça arriverait.

Alors, j’avais décidé de commencer par l’homme A.

C’était plus facile de manipuler quelqu’un qui avait perdu son sang-froid. Avec un peu d’encouragement et un peu de provocation, il fera probablement une erreur et me dira tout ce que je voudrais savoir. Et si ça ne marchait pas, on pourrait toujours essayer les deux autres.

« J’ai quelques questions à te poser. »

Quand j’avais enlevé le bâillon de l’homme A, il m’avait regardé d’un air féroce… mais il n’avait pas dit un mot.

« Si tu nous dis ce qu’on veut savoir, on n’aura pas besoin d’être brutal… compris !? »

Au milieu de ma phrase, le type me donna un coup de pied. Je m’étais accroupi pour lui parler, alors le coup me déséquilibra. Lancé en arrière, j’avais roulé sur le sol, ne m’arrêtant que lorsque l’arrière de ma tête s’était cogné contre le mur. Des étoiles brillaient dans mon champ de vision.

Oh ! Putain de merde !

Sérieusement, à quel point ce type était-il stupide ? Pourquoi donner un coup de pied à quelqu’un qui vous avait déjà capturé ? Il n’avait même pas dû penser à ce qui pourrait arriver s’il nous mettait en colère.

***

Partie 3

« Huh ? H-hey, quoi… Arrête ! » 

C’était la voix d’Éris. Je m’étais levé, complètement affolé. L’homme A avait-il cassé ses menottes pendant que je réfléchissais et avait-il pris Éris en otage avant que Ruijerd puisse réagir ?

« Quoi… » 

Non, Éris allait bien. Cependant, je ne pouvais pas en dire autant de l’homme A. Ruijerd lui avait enfoncé sa lance dans la gorge. Éris regardait, les yeux écarquillés et choqués.

Ruijerd tordit son trident latéralement en le tirant vers l’arrière, le sang fit un arc de cercle dans l’air et s’était écrasé contre le mur. La force fit tourner brièvement l’homme A avant qu’il ne tombe face contre terre. Du sang coulait de sa gorge. Une tache foncée rampa lentement sur son dos et une flaque rouge s’étendit sous lui. La puanteur métallique était écœurante.

Après une dernière secousse réflexive, l’homme s’arrêta de bouger.

Il était mort. Il était mort sans dire un seul mot. Ruijerd l’avait assassiné de sang-froid. 

« Pourquoi... Pourquoi l’as-tu tué ? » demandai-je, conscient du fait que ma voix tremblait. 

Ce n’était pas la première fois que je voyais quelqu’un mourir. Ghislaine avait tué pour nous sauver, Éris et moi. Mais d’une certaine façon, c’était différent. Pour une raison ou une autre, je tremblais. Pour une raison quelconque, j’avais très peur.

Pourquoi ? Qu’est-ce qui me faisait si peur ?

Le fait qu’un homme soit mort ? C’est ridicule. Des gens meurent tout le temps dans ce monde, pour les raisons les plus insignifiantes. J’en étais bien conscient.

C’était peut-être parce que je n’avais jamais vu ça de près ? Mais dans ce cas, pourquoi n’avais-je pas réagi de cette façon quand Ghislaine avait tué ces hommes pendant l’enlèvement ?

« Parce qu’il a donné un coup de pied à un enfant », dit Ruijerd.

Sa voix était calme et indifférente.

Il avait parlé comme un homme répondant à la question la plus évidente du monde.

Ah, c’est vrai. Maintenant, je comprends. Je n’ai pas peur parce que je viens de voir quelqu’un mourir. J’ai peur… parce que Ruijerd a tué cet homme… sans hésiter… juste parce qu’il m’avait frappé.

J’avais peur de Ruijerd.

Roxy m’avait prévenu, pas vrai ?

« … il y a beaucoup de différences entre ce qui est communément accepté dans la culture humaine et la culture démoniaque, donc tu ne sais peut-être pas quels mots vont déclencher une explosion. »

Alors qu’est-ce que j’allais faire si Ruijerd se retournait contre moi ? L’homme était fort, aussi fort que Ghislaine, ou même plus fort. Est-ce que j’aurais pu le battre avec ma magie ? Je pourrais probablement au moins me battre. J’avais élaboré de multiples stratégies de combat en tête-à-tête contre des spécialistes du combat rapproché.

Pour une raison quelconque, beaucoup de gens dans ma vie étaient tombés dans cette catégorie… y compris Paul, Ghislaine et Éris. Et Ruijerd était probablement le plus fort d’entre eux. C’était difficile pour moi de dire avec confiance que je pouvais le vaincre. Mais si je me battais avec l’intention de tuer dès le début, il y avait plein de choses que je pouvais essayer.

Et s’il s’en était pris à Éris ? Pourrais-je la protéger elle aussi ?

Non. Aucune chance.

« Tu ne peux pas tuer quelqu’un juste pour ça ! »

« Pourquoi pas ? Cet homme était diabolique. »

Ruijerd avait les yeux écarquillés devant mon objection troublée. Il semblait vraiment et totalement désorienté.

« Eh bien… »

Comment pourrais-je expliquer cela ? Qu’est-ce que je voulais de Ruijerd ?

En premier lieu, en quoi le fait qu’il ait tué cet homme était-il un problème ?

Je n’avais pas vraiment un sens moral standard. Quand j’étais un loser enfermé, je reniflais avec mépris des phrases du genre « c’est mal de tuer ». Je n’avais presque rien senti quand mes parents furent morts. Je savais que les choses allaient devenir difficiles pour moi, mais en même temps, mon attitude générale était celle de Crystal Boy : « Au diable ces conneries, crétin ! Je m’en branle ! »

Inutile de dire que si j’essayais de donner à Ruijerd un argument éthique à l’emporte-pièce, il allait en ressortir faible et peu convaincant.

« Écoute, il y a… une très bonne raison… tu ne devrais pas tuer des gens. »

OK, je suis un plutôt secoué. Reconnaissons cela. Je flippe un peu.

Je flippe un peu, mais je vais quand même y réfléchir.

Tout d’abord, pourquoi tremblais-je ? Parce que j’avais peur. Parce que j’avais vu Ruijerd, qui avait toujours l’air d’un gars si gentil, tuer un homme sans même cligner des yeux.

Je pensais que les Superds étaient un peuple pacifique qui avait été mal compris. Ce n’était clairement pas le cas. Je ne connaissais pas sa tribu dans son ensemble, mais au moins, Ruijerd était un tueur. Il tuait ses ennemis depuis l’époque de la guerre de Laplace. Ce meurtre n’était qu’une autre entrée typique dans une longue, longue liste. Je ne pouvais pas dire avec certitude qu’il ne tournerait jamais sa lance sur Éris ou sur moi. Je n’étais pas le genre de personne au cœur pur et honnête qui pouvait gagner le respect de Ruijerd. Un jour, d’une façon ou d’une autre, j’aurais probablement fini par me mettre dans un mauvais camp.

C’était une chose qu’il se mette en colère contre moi. Comme nous avions des façons de penser différentes, parfois nos opinions divergeaient, c’était inévitable. On se battrait probablement de temps en temps.

Cela dit, je n’avais pas l’intention de le combattre à mort. Quelle que soit la situation, nos désaccords ne pouvaient pas dégénérer en violence. Je devais faire comprendre à Ruijerd que… ici et maintenant, avant qu’il ne soit trop tard.

« S’il te plaît… écoute attentivement, Ruijerd. »

Le problème était que je n’arrivais toujours pas à trouver les bons mots.

Qu’est-ce que j’étais censé dire, bon sang ? Comment le lui faire comprendre ? Dois-je au moins le supplier de ne pas nous tuer tous les deux ?

Maintenant, tu es juste stupide.

L’autre jour, j’avais convaincu Ruijerd que j’étais un guerrier, me battant avec lui comme un égal. Je n’étais pas sous sa protection, j’étais son camarade. Je ne pouvais pas commencer à le supplier maintenant. Un plat « arrêtez ça » n’allait pas marcher non plus. J’avais besoin de trouver quelque chose qui le convaincrait vraiment, ou ce serait complètement inutile.

Réfléchis, mec. Pourquoi Ruijerd est-il avec toi en premier lieu ? Il veut que tout le monde sache que les Superds ne sont pas des diables assoiffés de sang. Et s’il tue des gens, il ne fera qu’empirer leur réputation.

C’est… ça sonnait bien. C’était pour la même raison que je lui avais dit d’éviter les bagarres avec d’autres aventuriers. Le public avait déjà une terrible impression de son peuple. Peu importe le nombre de bonnes actions qu’il fera pour changer cela, tous ses progrès seraient réduits à néant si les gens voyaient Ruijerd commettre un meurtre. Chacun reviendrait à ses hypothèses initiales sur son espèce.

C’est pour ça qu’il ne pouvait pas tuer des gens. Nous ne voulions pas que tout le monde ait l’impression que les Superds étaient une tribu de brutes sans cervelle, non ?

« Si tu continues à tuer des gens, la réputation des Superds va encore empirer. »

« … Même si les gens que je tue sont mauvais ? »

« Peu importe qui. Si tu tues quelqu’un, ce sera problématique. »

Je parlais délibérément maintenant, et je choisissais mes mots avec soin.

« Je ne comprends pas, Rudeus. »

« Quand un Superd tue quelqu’un, ce n’est pas vu de la même façon que quand quelqu’un d’autre le fait. C’est l’équivalent d’être tué par un monstre. »

Ruijerd s’était un peu renfrogné. Il croit que j’avais l’air de mal parler de son peuple.

« … je ne comprends toujours pas. Pourquoi serait-ce le cas ? »

« Tout le monde pense que tu fais partie d’une tribu de diables vicieux. Ils pensent que vous êtes des maniaques qui tuent au pied levé, même pour la moindre provocation. »

D’accord, ça avait l’air dur… mais là encore, c’était vraiment le consensus général. Notre objectif était de changer cela.

« C’est facile de dire aux gens que les Superds ne sont pas vraiment des monstres. Mais si tu prouves que les rumeurs sont fausses par tes actions, ils pourraient tous changer d’avis. »

« … »

« D’un autre côté, tu vas tout gâcher si tu commences à tuer des gens. Tout le monde supposera qu’ils avaient raison à propos de ta race depuis le début. »

« Ce n’est sûrement pas vrai. »

« Ça ne te dit vraiment rien, Ruijerd ? As-tu déjà aidé des gens et commencé à te lier d’amitié avec eux, pour qu’ils se retournent soudainement contre toi ? »

« … effectivement. »

À ce moment-là, j’avais senti que mon argumentation avait un sens.

« Eh bien, voilà le truc. Si tu ne tues plus personne à partir de maintenant… »

« Oui ? »

« Tout le monde réalisera que les Superds sont des gens normaux et rationnels. »

Était-ce vraiment vrai ? Serait-il suffisant de s’abstenir de tuer pour convaincre les gens de ce monde que sa tribu était raisonnable ?

Ce n’était pas le moment d’y penser. Je n’avais pas tort de toute façon. Ruijerd avait manifestement tué trop de gens. La population en général pensait que les Superds étaient des tueurs de par leur nature même. Mais s’il arrêtait de tuer, on devrait pouvoir les faire changer d’avis.

C’était assez logique, pas vrai ?

« Si tu tiens à ta tribu, ne tue plus personne, Ruijerd. Pas un seul. »

Normalement, vous deviez prendre des décisions à ce sujet. Tuer peut normalement être une erreur, mais dans certaines circonstances, cela peut être justifié ou même nécessaire. Mais je ne connaissais pas les normes selon lesquelles les habitants de ce monde faisaient cette distinction, et les critères personnels de Ruijerd étaient probablement… extrêmes. L’homme ne vous laissait pas de marge d’erreur, et il était difficile de savoir où il fixait sa limite. Dans ce cas, il était plus simple et plus sûr de lui interdire tout simplement de tuer.

« Et si personne ne regarde ? Ça ne serait pas bien ? »

J’avais dû me battre contre une forte envie de lui foutre ma main dans la figure. C’était quoi, un gamin d’école primaire ? Ce type était-il vraiment en vie depuis 500 ans ?

« Tu penses peut-être que personne ne regarde, mais les gens voient des choses quand même. »

« Il n’y a personne d’autre dans cette bâtisse, je te l’assure. »

Ah, merde. C’est vrai. Il a cette gemme stupide sur le front.

« Il y avait encore quelqu’un qui regardait, Ruijerd. »

« D’où ? »

Juste ici, mec.

« Éris et moi avons tout vu, pas vrais ? »

« Hm… »

« Ne tue plus personne à partir de maintenant, s’il te plaît. On ne veut pas non plus avoir peur de toi. »

« … Très bien. »

En fin de compte, j’avais essentiellement eu recours à l’approche du « plaidoyer les larmes aux yeux ». Mes paroles n’avaient pas l’air tout à fait convaincantes, même pour moi. Ruijerd hocha la tête, et c’était tout ce qui comptait.

« Merci, Ruijerd. »

J’avais incliné la tête devant lui en signe de gratitude et j’avais remarqué que mes mains tremblaient.

Calme-toi. Calme-toi. Ce genre de chose arrive tout le temps. Respire profondément.

« Hoo... haa... hoo... haa... »

C’était difficile de me calmer. Mon cœur ne voulait pas s’arrêter de battre. J’avais jeté un coup d’œil sur Éris, me demandant comment elle gérait tout cela. Et à ma grande surprise, elle n’avait pas du tout l’air effrayée. L’expression sur son visage disait en gros, « Tu m’as un peu effrayé, mais je suppose qu’une ordure comme ça méritait de mourir ».

OK, peut-être qu’elle ne pensait pas vraiment à quelque chose d’aussi cruel. Mais elle se tenait debout dans sa posture typique : les bras croisés, les pieds écartés, le menton en l’air. Si la fille était secouée, elle faisait de son mieux pour ne pas le montrer.

Et j’étais là, à paniquer alors que tout le monde me voyait. Tu parles d’un pathétique.

Mes mains avaient finalement cessé de trembler.

« Bien. Revenons à l’interrogatoire, OK ? »

En essayant d’ignorer l’odeur du sang encore présent dans l’air, je m’étais forcé à sourire.

***

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