Mushoku Tensei (LN) – Tome 3 – Chapitre 3

***

Chapitre 3 : Le secret d’un maître

***

Chapitre 3 : Le secret d’un maître

Partie 1

Encore une fois, je rêvais. Cette fois, je regardais un groupe d’anges descendant du ciel. Ça me semblait assez agréable, comparé à mes récents cauchemars.

Puis je remarquais que des parties des anges étaient cachées par des mosaïques pixelisées. Alors qu’ils s’approchaient, ils ricanaient à l’unisson, et des sourires effrayants se répandaient sur leurs visages.

Dès que j’avais réalisé que ce n’était pas un rêve heureux, je m’étais réveillé.

« Un autre cauchemar… »

J’en avais fait beaucoup récemment.

Je m’assis lentement et j’étudiais le champ stérile et rocheux de la terre devant moi. C’était le Continent des Démons, une moitié du supercontinent déchiré dans une guerre entre l’humanité et les races démoniaques, et le foyer des diverses races démoniaques autrefois unit par le démon Dieu Laplace.

Sa superficie était environ la moitié de celle du continent central, mais c’était un endroit beaucoup plus rude. Il y avait très peu de végétation. Le terrain était marqué de fissures et de crevasses, les changements d’élévation étaient abrupts, avec de grandes pentes rocheuses qui s’élevaient comme des marches d’escalier géantes. Les voyageurs trouvaient souvent leur chemin bloqué par des tas de rochers plus hauts qu’un homme. Cet endroit était un vrai labyrinthe.

De plus, ses concentrations denses et naturelles d’énergie magique lui avaient valu d’être la proie à de nombreux monstres puissants. D’après ce que j’avais lu, le traverser d’un bout à l’autre prendrait trois fois plus de temps qu’un voyage à travers le grand continent central. Nous avions un chemin très difficile devant nous, et je ne savais pas trop comment annoncer la nouvelle à Éris.

Mais quand je l’avais regardée, je l’avais trouvée regardant ce paysage sombre avec des yeux qui brillaient d’excitation.

« Uhm, Éris. On dirait qu’on est sur le Continent des Démons, donc… »

« Le Continent des Démons ! Quelle aventure ça va être ! »

Il y avait de la joie dans sa voix ? Bon, très bien, dans ce cas. Il n’y avait aucune raison d’être rabat-joie et d’expliquer à quel point cela va être dangereux.

« Allons-y. Suivez-moi. », dit Ruijerd.

Et c’est ainsi que nous avions traversé ensemble la plaine stérile.

◇ ◇ ◇

Apparemment, Éris s’était liée d’amitié avec Ruijerd pendant que je dormais. Elle bavarda avec lui tandis que nous marchions, décrivant sa vie à la maison, ses leçons de magie et sa pratique du combat à l’épée avec un grand enthousiasme. Ruijerd n’avait pas beaucoup contribué à la conversation, mais offrait de temps en temps des expressions d’intérêt polies.

Il était difficile de croire qu’Éris avait été complètement terrifiée par cet homme la nuit précédente. À ce stade, elle ne semblait pas du tout intimidée par lui. En fait, elle fit quelques commentaires désinvoltes qui semblaient être carrément impolis. Cela me rendit plus qu’un peu inquiet, mais Ruijerd ne sembla jamais s’offusquer.

De toute façon, qui a dit que le Superd avait un tempérament terrible ? Ils n’étaient manifestement pas si terribles que ça.

Bien sûr, Éris n’était pas aussi encline à insulter carrément les gens qu’autrefois. Edna et moi avions pratiquement fait disparaître cette habitude en elle. Elle n’allait donc probablement pas laisser échapper quelque chose de trop terrible, ou du moins c’est ce que je voulais le croire. Cependant, il était difficile de savoir ce qui pouvait faire enrager un étranger d’une culture inconnue. J’espérais vraiment qu’elle serait prudente ici.

De plus, Éris avait tendance à s’exaspérer elle-même assez facilement, alors… j’espérais que Ruijerd ferait de même.

Tandis que cette pensée me traversait l’esprit, j’entendis la voix d’Éris devenir irritante.

« Alors, Rudeus n’est pas ton grand frère ? »

« Bien sûr que non ! »

« Mais vous partagez le nom de Greyrat. C’est un nom de famille, exact ? »

« Ça ne fait pas de lui mon frère ! »

« Est-il né d’une mère différente ? Un père différent ? »

« Non, non. Ce n’est pas ça non plus. »

« Je ne sais pas comment les humains voient ces choses, mais tu devrais être reconnaissant de l’avoir. »

« Écoute, tu te fais des idées ! »

« Peu importe, sois reconnaissant de l’avoir. »

« Ugh… »

Ruijerd avait parlé fermement, Éris vacilla un moment avant de finalement céder.

« Bien sûr que je suis reconnaissante… »

Ce n’était pas comme si nous étions vraiment frères et sœurs, bien sûr. Elle était aussi plus vieille que moi.

◇ ◇ ◇

Le terrain rocheux et escarpé du Continent des Démons était à la hauteur de sa réputation. Le sol était également dur, sec et poussiéreux. Il y avait plus de sable que de terre. On ne pouvait pas blâmer les démons d’avoir déclenché une guerre pour sortir de cet endroit minable. Il n’y avait presque aucune plante. De temps en temps, j’avais repéré une sorte de rocher bizarre qui ressemblait à une sorte de cactus, mais c’était à peu près tout.

« Hm. Attendez ici un moment. Ne bougez pas d’ici, compris ? »

Une fois toutes les dix minutes environ, Ruijerd nous ordonnait de rester assis alors qu’il partait en courant. Cette fois, il sauta facilement à travers une série de rochers massifs, disparaissant rapidement de la vue. Les capacités physiques de l’homme étaient incroyables. J’avais toujours pensé que Ghislaine était presque surhumaine, mais si vous traduisiez leur agilité brute en nombres, Ruijerd pourrait bien s’imposer.

Moins de cinq minutes après son dernier départ brutal, il revint vers nous.

« Désolé de vous avoir fait attendre. Reprenons notre route. »

Ruijerd ne s’était pas expliqué, mais il y avait une légère odeur de sang sur la tête de son trident. Il avait probablement abattu un monstre qui aurait pu nous bloquer la route. D’après ce que j’avais lu dans le dictionnaire de Roxy, ce bijou sur sa tête agissait comme une sorte de radar. Il s’en servait probablement pour identifier les menaces avant qu’elles ne s’approchent trop, puis pour les éliminer avant qu’ils ne sachent ce qui les frappait.

« Bon, dis-nous pourquoi tu t’enfuis toujours comme ça ? », demanda Éris, toujours aussi directe.

« Je m’occupe des monstres présents sur la route qui nous attend, » répondit Ruijerd avec concision. Séparant ses cheveux sur les côtés, il montra à Éris le cristal rouge scintillant au centre de son front. Elle trembla de surprise pendant un instant, mais le « bijou » était en fait une chose plutôt jolie, et bientôt elle le regarda avec une relative curiosité.

« Oh, c’est vrai. Ça doit être pratique ! »

« Je suppose que oui, mais parfois j’aimerais ne pas en avoir. »

« Eh bien, je le prends si tu n’en veux pas. Allez, laisse-moi l’arracher ! »

« Ce n’est pas si facile, j’en ai peur. »

Ruijerd sourit un peu.

Éris avait vraiment fait beaucoup de chemin. Elle faisait même des blagues ces jours-ci.

C’était une blague, pas vraie ?

« Ça me fait penser à quelque chose, Ruijerd… J’ai entendu dire que les monstres du Continent des Démons sont très forts. »

« Ils ne sont pas si forts que ça. Mais comme nous sommes loin de la route principale, ils sont donc assez nombreux. »

En fait, c’était un euphémisme. Ruijerd combattait des monstres toutes les quinze minutes environ depuis un certain temps déjà. Dans le royaume d’Asura, on pouvait voyager pendant des heures en calèche sans en voir un seule. Certes, les chevaliers et les aventuriers du Royaume s’efforçaient régulièrement d’exterminer tous les monstres à l’intérieur de ses frontières, mais même ainsi, le taux de rencontre sur le Continent des Démons était absurdement élevé.

« Tu t’es battu tout seul tout ce temps, Ruijerd. Comment tiens-tu le coup ? »

« Ce n’est pas un problème. J’ai abattu ces créatures en un seul coup. »

« D’accord… mais fais-moi savoir si tu es fatigué, compris. Je pourrais au moins surveiller tes arrières. Et je sais comment utiliser la magie de guérison. »

« Ne t’inquiète pas, mon enfant. »

Ruijerd me tendit la main et m’avait timidement tapoté la tête. Il aimait vraiment faire ça, n’est-ce pas ?

« Reste avec ta petite sœur et protège-la, d’accord ? »

« Écoute ! Je ne suis pas sa petite sœur, OK !? Je suis plus vieille que lui ! »

« Hm. Vraiment ? Mes excuses. »

Ruijerd avait aussi essayé de caresser Éris sur la tête, mais elle lui gifla la main.

T’auras plus de chance la prochaine fois, mon grand.

***

Partie 2

« Nous y voilà. »

La marche avait duré environ trois heures. Nous avions suivi un chemin long et sinueux avec une bonne partie de montée, donc ça avait pris pas mal de temps. Mais à vol d’oiseau, nous n’étions qu’à un kilomètre environ du point de départ.

J’étais étonnamment épuisé. Je me sentais léthargique depuis la veille au soir. Était-ce une sorte de séquelles de ce sort de téléportation ? Peut-être que j’avais juste besoin de travailler mon endurance… Ce n’était pas comme si je m’étais laissé aller à m’entraîner avec Ghislaine.

« Oh ! C’est une ville ! » s’exclama Éris, étudiant avec beaucoup d’intérêt le petit village devant nous.

La fille n’avait même pas l’air un peu essoufflée. J’étais un peu jaloux de son endurance.

À mes yeux, l’endroit où nous étions arrivés ressemblait plus à un village qu’à une ville. Il y avait peut-être dix ou quinze maisons tout au plus, et la clôture qui les entourait était grossière. J’avais aussi remarqué un petit champ à l’intérieur. Il était difficile de dire ce qu’ils cultivaient, mais d’après ce que j’avais vu, ce ne sera pas une récolte exceptionnelle.

Était-il même possible de cultiver une terre comme celle-ci sans qu’il y ait une rivière à proximité ?

« Halte ! »

Juste à l’extérieur de la porte d’entrée, nous avions été arrêtés par un garçon qui avait l’apparence d’un collégien. Ses cheveux bleus me rappelaient Roxy.

« Qui sont ces deux-là, Ruijerd !? »

Le gamin parlait dans la langue du Dieu Démon, mais je la comprenais assez bien. Ma compréhension auditive était apparemment à la hauteur.

« Tu te souviens de l’étoile filante d’hier soir ? C’était eux. »

« Je ne peux pas laisser entrer des étrangers aussi suspects dans notre village ! »

« Qu’est-ce qu’ils ont de si suspect ? Explique-toi. »

Le visage de Ruijerd était soudain sévère, sa voix menaçante. S’il m’avait parlé ainsi hier soir, j’aurais probablement couru vers les collines sans hésitation.

« Qu’est-ce qu’il y a à expliquer ? Regarde-les ! »

« Ce sont des victimes d’un désastre magique qui s’est produit à Asura. Ils se sont téléportés ici, c’est tout. »

« Mais… écoute, même si c’est vrai… »

« Qu’est-ce qui ne va pas chez toi ? Laisserais-tu vraiment ces enfants à leur sort ? »

À ce moment-là, j’avais remarqué que Ruijerd serrait les poings. Suivant mon instinct, j’avais tendu la main pour attraper son bras.

« Il ne fait que son travail, Ruijerd. S’il te plaît, calme-toi. »

« Quoi… ? »

« Se disputer avec un larbin ne nous mènera nulle part. Pourquoi ne pas lui demander d’aller chercher quelqu’un ayant une vraie autorité ? »

Le garçon s’était renfrogné devant le mot larbin, mais Ruijerd acquiesça d’un signe de tête.

« Tu marques un point. Rowin, peux-tu appeler l’aîné ? »

« Ouais. Je pensais juste que je pourrais faire ça en fait. »

Rowin ferma les yeux. Il devint ensuite silencieux pendant les dix secondes qui suivirent.

Euh… Qu’est-ce qui se passe ? Vas-tu bouger ou pas ? S’il vous plaît, ne me dites pas que ce gamin vient de s’endormir sur son lieu de travail… Hmm. Peut-être qu’il attend un beau baiser ?

« Euh, Ruijerd, est-il... »

« Les Migurd peuvent discuter avec d’autres de leur race, même à distance. »

« Oh. Maintenant que tu en parles, je crois que mon maître m’en a un peu parlé. »

Plus précisément, elle avait écrit dans son Dictionnaire des races démoniaque que les Migurd étaient capables de communiquer par télépathie avec leurs amis proches et les membres de leur famille. Elle avait également noté qu’elle ne possédait pas cette capacité et qu’elle avait quitté son village à cause de cela.

Pauvre fille.

Maintenant que j’y pense… si c’était un village migurd, peut-être qu’il serait utile de mentionner le nom de Roxy ? Mais je ne savais pas si elle était liée à cet endroit en particulier. Il y avait aussi la possibilité que cela se retourne complètement contre moi.

« L’aîné est en route », dit Rowin en ouvrant enfin les yeux.

« On pourrait le croiser à mi-chemin, si… »

« Tu ne feras pas un pas à l’intérieur de ce village ! »

« Très bien. »

Les négociations étant dans l’impasse, nous étions restés là un moment. Tandis que le silence gênant s’étendait, Éris me tira la manche et chuchota :

« Hé, qu’est-ce qui se passe ? »

Oh, c’est vrai. Elle ne comprend pas la langue du Dieu Démon.

« Le garde ici pense que nous sommes suspects, alors on attend que l’ancien du village vienne nous voir en personne. »

« Qu’est-ce que c’est que ce bordel ? Qu’est-ce qu’il y a de si suspect chez nous ? »

En fronçant les sourcils, Éris baissa les yeux vers ses vêtements. Elle avait revêtu son habituelle tenue d’entraînement à l’épée pour notre voyage à l’extérieur de la ville. C’était un peu léger, mais cela ne m’avait pas paru bizarre comparé à ce que portait Ruijerd. Ce n’était pas comme si elle portait une robe à volants.

« Dois-je m’inquiéter ? »

« À propos de quoi ? »

« Je ne sais pas. Juste… de façon générale. »

« Tout ira bien, Éris. »

« Ah bon… merci. »

Aussi audacieuse que pût être Éris, la perspective d’une dispute à l’entrée du village la rendait clairement plus qu’angoissée. Ma tentative pour la rassurer semblerait avoir fonctionné.

« L’aîné semble être arrivé », murmura Ruijerd après un moment.

J’avais regardé dans le village et j’avais vu un homme chauve avec une canne qui avait l’air étrangement jeune. Il marchait vers nous avec deux filles qui ressemblaient à des adolescentes. Aucune d’entre elles n’était particulièrement grande. Peut-être que les Migurd restaient à cette taille, même quand ils étaient adultes.

Il n’en avait pas été question dans le dictionnaire de Maître Roxy… mais la fille qu’elle avait dessinée pour illustrer l’entrée ressemblait à une lycéenne. À ce moment-là, j’avais supposé qu’il s’agissait d’un autoportrait, ce qui était quelque peu charmant, mais peut-être qu’elle ne faisait que représenter un Migurd adulte typique.

Pendant que je réfléchissais à la question, l’aîné du village commença à s’entretenir avec Rowin un peu à l’écart de notre groupe.

« Ce sont donc les enfants en question ? »

« Oui. L’un d’eux peut parler la langue de Dieu-Démon. C’est très étrange. »

« N’importe qui pourrait sûrement apprendre la langue s’il l’étudiait. »

« De toute façon, pourquoi un si jeune enfant humain étudierait-il notre langue !? »

Je devais admettre que Rowin avait parfaitement raison sur ce point. Heureusement, l’ancien du village lui tapota doucement sur l’épaule.

« Ne nous précipitons pas trop, Rowin. Essaie de te calmer, d’accord ? Je vais leur parler. »

Cela dit, le petit homme commença à marcher lentement vers nous. Faute d’une meilleure idée, je m’inclinai devant lui, une simple salutation japonaise, plutôt que l’une de ces salutations fantaisistes favorisées par la noblesse d’Asura.

« Enchanté, monsieur. Je m’appelle Rudeus Greyrat. »

« Eh bien, tu es certainement quelqu’un de poli. Je m’appelle Rokkus, je suis l’ancien du village. »

J’avais jeté un coup d’œil sur Éris, essayant de l’inciter à suivre mon exemple. Apparemment confuse par le contraste entre l’apparente jeunesse de l’homme et sa prestance digne, elle croisa et décroisa les bras. On aurait dit qu’elle était en train de se demander si elle devait prendre sa pose de défi.

« Tu devrais te présenter, Éris. »

« Mais… euh, je ne connais pas la langue. »

« Fais-le comme tu l’as appris. Je vais lui transmettre ce que tu dis. »

« C’est un plaisir de faire votre connaissance, monsieur. Je m’appelle Éris Boreas Greyrat. »

Après un moment d’hésitation, Éris offrit une révérence comme elle l’avait pratiquée dans ses leçons d’étiquette. Un sourire était apparu sur le visage de l’ancien du village.

« Est-ce que la petite dame vient de se présenter aussi, fiston ? »

« Oui. C’est comme ça qu’on fait dans notre pays. »

« Hmm. Cela ne ressemblait pas vraiment au tien. »

« Eh bien, les usages sont différents pour les hommes et les femmes… »

Rokkus acquiesça de la tête, puis s’inclina devant Éris de la même façon que je m’étais incliné devant lui.

« Je m’appelle Rokkus. Je suis l’ancien de ce village. »

Un peu effrayée, Éris me jeta un regard incertain.

« Qu’est-ce qu’il vient de dire, Rudeus ? »

« C’est l’ancien de ce village, et il s’appelle Rokkus. »

« Oh. Vraiment ? Donc je suppose qu’il t’a compris. C’est bien. »

Éris sourit, elle était visiblement soulagée.

Cela avait probablement couvert les formalités initiatives. Il était temps de passer aux choses sérieuses.

« Nous autoriseriez-vous à entrer dans votre village, Rokkus ? »

Plutôt que de répondre aussitôt à ma question, le petit homme commença à m’étudier attentivement de la tête aux pieds.

Quel regard passionné ! Arrête… tu me donnes envie de faire un strip-tease…

Après un long moment, ses yeux s’arrêtèrent, fixés sur ma poitrine supérieure.

« Où as-tu eu ce pendentif, jeune homme ? »

« C’était un cadeau de mon maître. »

« Et qui était ton maître, si je peux me permettre ? »

« Elle s’appelle Roxy. »

Répondre honnêtement me semblait être la voie à suivre. Au bout du compte, j’étais fier d’avoir étudié avec elle.

« Que viens-tu de dire !? », cria Rowin.

Avant que j’aie pu répondre, il se précipita juste après Rokkus pour me prendre par les épaules.

« Viens-tu de dire Roxy, mon garçon !? »

« Oui. C’est le nom de mon maître… »

Du coin de l’œil, je vis Ruijerd transformer ses mains en poings. En tournant la tête pour rencontrer son regard, je secouai légèrement la tête. Il n’y avait pas de colère sur le visage de Rowin, seulement de l’excitation anxieuse. Il n’allait pas me faire de mal.

« Où se trouve Roxy maintenant !? »

« Je ne l’ai pas vue depuis longtemps, mais… »

« S’il te plaît ! Dis-moi tout ce que tu sais ! Roxy… Roxy est ma fille ! »

Désolé, peux-tu répéter ?

« Je ne suis pas sûr d’avoir bien entendu. Pourrais-tu répéter ? »

« Roxy est ma fille ! Dis-moi, est-elle toujours en vie !? »

Pardon, monsieur ? Non, je crois que je t’ai bien entendu la première fois. Je suis juste un peu curieux concernant ton âge. Il n’avait même pas l’air assez vieux pour pouvoir aller au lycée. Si tu m’avais dit que c’était le petit frère de Roxy, je t’aurais cru. Mais apparemment… hmm. Ouais. Intéressant.

« S’il te plaît, dis-le-moi ! Cela fait plus de vingt ans qu’elle a quitté ce village, et nous n’avons plus eu de nouvelles d’elle depuis ! »

Donc Roxy s’était en fait enfuie de chez elle. Ce n’était pas comme si elle m’en avait parlé, bien sûr. Honnêtement, maître, devais-tu être si secrète ?

Attendez. Il y a plus de vingt ans ? Euh… Quel âge ça lui donnerait ?

« Eh bien ? Pourquoi ne dis-tu rien !? »

Oups. Désolé pour ça, mon pote.

« Pour l’instant, elle est… »

Au milieu de ma phrase, j’avais réalisé que l’homme avait encore une emprise mortelle sur mes épaules. On aurait dit qu’il essayait de me soutirer l’information, non ? Ce n’était pas bon. Je ne voulais pas que quelqu’un pense que j’avais lâché sous la pression… pas aussi facilement, du moins. Je voulais dire, s’il avait détruit mon ordinateur, m’avait tabassé, puis m’avait couvert d’insulte, ce serait une autre histoire. J’avais besoin de me défendre un peu ici. Sinon, cela pourrait rendre Éris anxieuse.

« En fait, je veux que tu répondes d’abord à une question pour moi. Quel âge a Roxy en ce moment ? »

« Quoi ? Pourquoi son âge importe-t-il ? Peux-tu juste… ? »

« C’est très important. Oh, et pendant que tu y es, j’aimerais aussi savoir quelle est l’espérance de vie d’un Migurd »

Ouais. C’était définitivement quelque chose que j’avais besoin d’éclaircir.

« Euh… bien. Je suppose que Roxy aura 44 ans cette année. Et nous vivons environ 200 ans, pour la plupart. À moins qu’une maladie ne nous tue d’abord. »

Hein ! On a le même âge ! Cela m’a rendu en fait un peu heureux.

« Ce n’est pas bien de dire ça. Hmm. Au fait, ça te dérangerait-il de me lâcher ? »

Rowin avait finalement relâché son emprise sur mes épaules.

D’accord. Maintenant, on peut parler.

« Il y a six mois, Roxy était dans le royaume de Shirone. Je n’étais pas là en personne, mais on a échangé des lettres pendant un moment. »

« Des lettres ? Peut-elle écrire dans la langue humaine ? »

« Oui. Elle connaissait parfaitement notre langue quand je l’ai rencontrée. C’était il y a sept ans. »

« Vraiment ? En tout cas… tu dis qu’elle va bien ? »

« Eh bien, il y a toujours une chance qu’elle soit tombée malade récemment. Mais pour autant que je sache, elle est en parfaite santé. »

Rowin tomba à genoux. Il y avait un soulagement non déguisé sur son visage, et des larmes brillaient dans ses yeux.

« Je vois… Donc elle va bien. Elle est très bien ! Haha… Dieu merci… »

Je suis content pour toi, papa. Je m’étais retrouvé à penser à Paul, me demandant s’il pourrait réagir de la même façon quand il apprendra que j’étais en sécurité. Il faudrait que j’envoie une lettre au village Buena dès que possible.

En me détournant du père pleureur de Roxy, je m’étais adressé à Rokkus à nouveau.

« Maintenant qu’on a éclairci ça… serais-tu prêt à nous laisser entrer ? »

« Bien sûr. On n’empêchera pas l’entrée de quelqu’un qui nous a apporté de si bonnes nouvelles. »

Heureusement que j’avais ce pendentif. Je n’aurais jamais pensé que ce serait si pratique.

J’aurais probablement pu gagner du temps en le leur montrant tout de suite. Mais encore une fois, selon la façon dont la conversation s’était déroulée, ils auraient peut-être eu l’impression que j’avais tué Roxy et que je l’avais volée. Les démons avaient apparemment une longue durée de vie, et il n’était probablement pas rare qu’ils aient l’air beaucoup plus jeunes ou plus vieux qu’ils ne l’étaient réellement. En d’autres termes, mon apparence ne me protégerait pas nécessairement des soupçons. Je devais faire de mon mieux pour être puéril.

Pour l’instant, au moins, nous avions réussi à entrer dans le village des Migurd.

***

Si vous avez trouvé une faute d’orthographe, informez-nous en sélectionnant le texte en question et en appuyant sur Ctrl + Entrée s’il vous plaît. Il est conseillé de se connecter sur un compte avant de le faire.

Laisser un commentaire