Mushoku Tensei (LN) – Tome 3 – Chapitre 13 – Partie 4

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Chapitre 13 : Échec, chaos et résolution

Partie 4

Ces deux-là nous avaient trahis à la toute fin, mais on ne pouvait pas leur en vouloir pour ça. C’était la seule option qu’ils avaient pour eux-mêmes se sauver. Mis à part la façon dont les choses s’étaient terminées, ils nous avaient certainement beaucoup aidés.

Sur le chemin de la sortie de la ville, je m’étais arrêté pour acheter un reptile en forme de lézard entraîné pour transporter des personnes et des bagages. C’était une grande créature à six pattes et aux yeux joliment gonflés. Sur ce continent, on les utilisait essentiellement à la place des voitures hippomobiles. Cette espèce particulière pouvait facilement accueillir deux cavaliers adultes à la fois. Cela nous avait coûté dix pièces de fer, soit environ la moitié de tout l’argent dont nous disposions. Mais j’avais décidé il y a quelque temps d'en acheter un quand on reprendrait la route. Le fait d’en avoir un devrait soi-disant nous rendre le voyage sur le Continent Démon beaucoup, beaucoup plus facile.

Après un bref tutoriel du marchand sur la façon de contrôler la chose, je l’avais chargée avec nos sacs et nous étions partis de Rikarisu. Il y avait un grand nombre de soldats rassemblés autour de la porte. Peut-être qu’ils se préparaient à chasser Ruijerd ou quelque chose comme ça. Leurs visages étaient pâles, mais leurs expressions étaient excitées.

Quand je m’étais arrêté pour dire bonjour, ils nous avaient avertis de faire attention, puisque la Dead End avait fui la ville il n’y a pas si longtemps.

À partir de ce moment, ils avaient insisté sur le fait que la Dead End était un diable assoiffé de sang et avaient spéculé sur les actes maléfiques qu’il avait commis à l’intérieur de la ville. Ce n’était pas comme s’ils l’avaient déjà vu.

Au bout d’un moment, je ne pouvais plus me taire.

« Cet homme était en ville depuis presque deux mois, et il n’a causé aucun problème. »

Les gardes m’avaient regardé comme si j’avais une deuxième tête. Je les avais regardés fixement, j’avais claqué ma langue dans l’irritation, et finalement j’étais sorti de la ville. J’étais de mauvaise humeur.

Pour l’instant, nous avions besoin de rencontrer Ruijerd. Était-il encore dans les parages ? J’avais dû le supposer. Si sa fierté de guerrier était encore intacte, il n’y avait aucune chance qu’il nous abandonne… ou du moins Éris.

« Je suppose que l’on devrait être assez loin. »

Une fois la ville complètement hors de vue, j’avais envoyé un feu d’artifice magique dans le ciel. Il éclata dans les airs avec un boum féroce, produisant un éclair de lumière et une vague de chaleur.

On avait attendu un moment, mais Ruijerd n’était pas apparu.

« Éris, peux-tu aussi l’appeler ? »

Éris cria le nom de Ruijerd à pleins poumons. Ce qui était d’ailleurs assez bruyant.

Cette fois, au bout d’un moment quelque chose était apparu. Mais c’était un groupe de Pax Coyotes. J’avais passé mon irritation sur eux.

Rapidement, la zone rocheuse dans laquelle nous nous trouvions avait été transformée en un plateau parfaitement plat, et les monstres avaient été réduits en morceaux sanglants.

Pourraient-ils encore revenir en tant que zombies, même dans cet état ?

Hmph. Ce n’est pas mon problème. Cette ville peut s’en occuper.

« Regarde, c’est Ruijerd ! »

Peu de temps après la fin de la bataille, notre Superd rebelle avait finalement fait son apparition. Il avait l’air coupable, ça me fit sentir encore plus mal.

« Pourquoi n’es-tu pas venu quand on t’a appelé ? Prévoyais-tu de t’enfuir quelque part sans nous dire un mot ? »

Pourtant, pour une raison inconnue, les premiers mots qui sortirent de ma bouche étaient accusateurs. Ce n’était pas du tout ce que je voulais dire.

« Je suis désolé. »

Ruijerd commença par des excuses. C’était embarrassant.

Tout ce bordel était évidemment de ma faute. J’étais devenu arrogant et imprudent. J’avais décidé de faire équipe avec Jalil et Vizquel parce que je voulais une solution plus rapide et plus facile. Quand Nokopara nous avait menacés, j’avais juste supposé que nous réussirions à nous en sortir. Mais on s’était retrouvés dos au mur, et Ruijerd avait dû nettoyer ce bordel pour moi. S’il n’était pas devenu de lui-même le bouc émissaire, nous serions peut-être restés coincés dans cette ville pour de bon. Je ne pouvais même pas blâmer la malchance pour la façon dont les choses s’étaient passées. Nokopara était un pro du chantage. Il nous aurait coincés, même si Kurt ne nous avait pas trahis.

« Pourquoi faire ? C’est moi qui te dois des excuses. »

Je me sentais comme une vraie merde.

« Non. Tu as fait tout ce que tu pouvais, Rudeus. »

« Mais… »

« Même les meilleurs plans de bataille vont de travers. Je sais à quel point tu as pensé à chaque détail, à chaque pas que nous avons fait, jour après jour. »

Soudain, Ruijerd sourit et posa doucement sa main sur ma tête.

« Je ne savais pas à quoi tu pensais, bien sûr. Et j’admets que, jusqu’à aujourd’hui, je soupçonnais que tes objectifs étaient immoraux. Pour cette raison, il y a eu des moments où j’ai eu du mal à respecter tes décisions… »

Il s’arrêta pour jeter un coup d’œil sur Éris, puis hocha la tête.

« Mais maintenant, je comprends que tu voulais désespérément protéger quelque chose, quel qu’en soit le prix. Je viens de le voir dans tes yeux, quand tu étais prêt à tuer cet homme. »

Tout à l’heure… ? Oh, quand j’étais sur le point d’inonder la ville…

« Tu te bats pour protéger quelque chose, Rudeus. Et ça fait de toi un guerrier. »

Quand Ruijerd avait prononcé ces mots, je lui avais répondu par des larmes. Je ne méritais pas ce genre d’éloge. J’étais une personne superficielle et myope. Je ne pensais qu’à gagner de l’argent et à trouver des moyens d’aller de l’avant. J’étais même prêt à abandonner Ruijerd lui-même. J’avais failli mettre de côté le seul allié sur lequel nous pouvions compter jusqu’au bout.

« Ruijerd, je… Je suis… »

Je voulais être honnête avec lui. Je voulais lui dire quelque chose, des mots entièrement sincères, tout simplement, sans me cacher derrière une politesse superficielle. Même si je ne savais pas exactement ce que c’était.

« Ne dis rien. » Mais il m’avait coupé avant que je ne le puisse. « À partir de maintenant, mettez vos objectifs avant les miens. »

« Hein… ? »

« Ne vous inquiétez pas. Je vous protégerai tous les deux, même si vous n’améliorez pas ma réputation. Crois-moi, Rudeus… s’il te plaît. »

Je lui faisais confiance. Bien sûr que je lui faisais confiance.

Ce qui voulait dire qu’on n’avait plus besoin de l’aider.

C’était logique. Diffuser l’information sur Ruijerd n’avait pas été une tâche facile, et essayer de poursuivre deux objectifs en même temps nous avait vraiment empêchés de nous concentrer vraiment sur l’un ou l’autre. On s’était peut-être trop dispersé. J’étais tellement stressé ces derniers temps. J’avais négligé certaines choses qui auraient vraiment dû me venir à l’esprit, et je n’avais pas réfléchi à un certain nombre de détails importants. Une telle situation pouvait facilement mener à des catastrophes comme celle que nous venions de vivre.

Et donc, nous n’avions plus à aider Ruijerd.

Mais je ne pouvais pas accepter ça. Pas après avoir vu ce que je venais de voir. Pas après avoir vu tout le monde le chasser de la ville avec des fourches. Je n’arrivais pas à me résoudre à dire : « D’accord. Attends dehors la prochaine fois qu’on arrive dans une ville. »

« Je ne peux pas faire ça, Ruijerd. Je vais réparer ta réputation, quoi qu’il arrive. »

Au contraire, son offre n’avait fait que renforcer ma détermination. Je lui devais au moins ça pour tout ce qu’il avait fait. J’allais devoir faire un meilleur travail à partir de maintenant. Je n’allais pas me dépasser à nouveau, mais je ferais tout ce que je pouvais.

« N’as-tu pas retenu la leçon, Rudeus ? Suis-je vraiment si indigne de confiance ? »

« Je te fais confiance. C’est pourquoi je veux t’aider à atteindre ton but. »

À l’époque, j’avais moi-même été intimidé. Les gens m’avaient mis une étiquette que je n’avais jamais réussi à enlever. Et j’avais souffert à cause de ça. J’avais passé des décennies tout seul. Si Roxy ne m’avait pas traîné dehors, je n’aurais peut-être jamais échappé à cet isolement, je n’aurais peut-être même jamais rencontré Sylphie ou Éris.

Ruijerd était un cas plus compliqué, bien sûr, et l’ampleur de son problème était incomparable au mien. Mais ce n’était pas une raison pour que je l’abandonne. Roxy m’avait aidé sans même le vouloir, mais je n’étais pas Roxy. Il faudrait que je continue d’essayer, que je continue de merder et que je rampe lentement dans la boue.

C’était peut-être une nuisance totale, du point de vue de Ruijerd. Il pourrait y avoir d’autres désastres comme celui-ci en magasin, quand il aura à nettoyer mon bordel pour moi. Mais ça me convenait très bien.

Je préférais échouer plutôt que de ne pas essayer.

« … Tu es vraiment têtu. »

« C’est toi qui oses dire ça, Ruijerd. »

« Haha… Très bien. Essayons de faire ce que nous pouvons. »

Avec un sourire ironique, Ruijerd hocha légèrement la tête.

Pour une raison ou une autre… à ce moment-là, j’avais l’impression d’avoir enfin gagné sa confiance pour de bon.

 

◇ ◇ ◇

Quand je m’étais réveillé le lendemain matin, Ruijerd était aussi chauve qu’une boule de billard.

Cette vision m’avait laissé abasourdi. Honnêtement, j’étais aussi un peu paniqué. En combinaison avec cette cicatrice sur son visage, il ressemblait à un yakuza.

« Ce qui s’est passé hier montre clairement que mes cheveux font peur aux gens, alors je m’en suis débarrassé. »

Cela… Il avait dû prendre une réelle résolution. De retour au Japon, se raser les cheveux était une façon d’exprimer sa ferme détermination ou de montrer du remords pour une énorme erreur. Les choses étaient différentes dans ce monde, bien sûr. Mais quand même… voir Ruijerd comme ça, j’avais l’impression que je devais suivre son exemple.

Après tout, la meilleure façon d’expier était d’agir.

Est-ce que je veux vraiment moi aussi me raser ? Je veux dire que, j’ai merdé ici, pas vrai ? Mais… hmm… Mec, je ne sais pas…

« U-uh, Éris ? Penses-tu que je devrais aussi faire ça ? »

« Ne t’avise pas de le faire. J’aime tes cheveux comme ils sont, Rudeus. »

Oui, c’est vrai. J’avais fini par utiliser Éris pour me tirer d’affaire.

Allez-y, moquez-vous de moi. Je le mérite bien.

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