Mushoku Tensei (LN) – Tome 11 – Chapitre 12

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Chapitre 12 : Traversée du désert

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Chapitre 12 : Traversée du désert

Partie 1

Notre deuxième jour sur la route n’avait pas été moins mouvementé. En fait, nous avions rencontré encore plus de monstres. Malgré l’aspect stérile de ce désert, celui-ci grouillait de créatures.

Les vers de sable étaient particulièrement méchants. Ils ne représentaient pas une réelle menace si on restait vigilant et qu’on les repérait à l’avance, mais parfois, d’autres choses exigeaient notre attention. Comme les monstres, par exemple. À un moment donné, nous étions tombés sur un ver de sable alors que nous étions en train de repousser un scorpion jumeau de la mort. La chose m’avait avalé en un instant et avait commencé à me traîner sous terre. Aussi surpris que je l’étais, j’avais réussi à lancer instantanément le sort intermédiaire Tranche-vent pour le déchirer de l’intérieur.

Après avoir utilisé la magie de Terre pour remonter à la surface, j’avais constaté qu’Elinalise avait été touchée par les dards venimeux du scorpion. Elle était à genoux et son visage était violet. Elle avait été tellement effrayée de voir le Ver de Sable m’avaler qu’elle avait perdu sa concentration. J’avais rapidement tué le scorpion et utilisé ma magie de désintoxication pour lui sauver la vie.

Franchement, aucun de nous n’avait vraiment merdé cette fois. Nous avions juste été malchanceux.

« Beau travail pour nous sortir de ce pétrin, Rudeus. Je vois pourquoi tu as acquis une telle réputation d’aventurier. »

Elinalise ne me reprochait certainement pas la situation, même si elle avait failli mourir et que c’était moi qui avais été le plus négligent. Cette femme était assurément mature.

« N’aie pas l’air si malheureux, d’accord ? Peu importe à quel point tu es alerte, parfois les circonstances ont raison de toi. Nous avons réussi à nous en sortir, et c’est ce qui compte. », dit-elle.

Le risque d’échec était toujours présent — tout comme celui de la mort. Elinalise en était consciente depuis le début.

Heureusement, ce fut la seule fois où nous avions été confrontés à un réel danger ce jour-là. Nous avions aperçu un monstre colossal au loin à un moment donné. Il avançait lentement, mais chaque pas qu’il faisait soulevait un énorme nuage de sable visible même à grande distance. Cette chose devait mesurer des centaines de mètres. C’était difficile à décrire. Je suppose qu’on pourrait dire que c’était comme une baleine bleue avec des jambes d’éléphant.

« C’est un Béhémoth, Rudeus. »

« Huh. Tu en as déjà vu un comme ça, Lise ? »

« Oh ? Quelqu’un est devenu un peu plus décontracté tout d’un coup. »

« Je n’en sais rien. J’essaie juste d’être respectueux avec mes aînés. »

« Tu sais que Zanoba est aussi plus âgé que toi ? »

« Bien sûr, mais c’est un grand enfant… »

Apparemment, le Béhémoth était l’un des monstres les plus célèbres de ce continent. Leur longueur allait de cent à mille mètres.

On ne savait pas exactement ce qu’ils mangeaient, mais ils n’avaient jamais été aperçus que dans le désert. Pour des monstres, ils étaient même plutôt pacifiques, et avaient tendance à laisser les gens tranquilles à moins d’être attaqués.

Quelques aventuriers avaient prétendu en avoir tué un et avoir trouvé un grand nombre de pierres magiques dans son ventre. En entendant ces rumeurs, certaines personnes avaient essayé de les chasser pour en tirer profit, mais abattre un Béhémoth était beaucoup plus facile à dire qu’à faire. Leur peau extérieure était extrêmement résistante et, étant donné leur taille, un aventurier moyen pouvait à peine les égratigner. Ils n’avaient pas d’attaques particulières ni d’armes naturelles, mais le simple fait de secouer leur corps massif suffisait à tuer la plupart de leurs ennemis.

Et si vous les attaquiez à distance ? Eh bien, apparemment, les créatures étaient capables de s’enfouir profondément sous le sable lorsque les choses commençaient à chauffer. Presque personne n’avait réussi à en tuer un. De plus, malgré leur taille massive, personne n’avait jamais trouvé de cadavre de Béhémoth. Cela avait donné lieu à des rumeurs selon lesquelles il y aurait un « cimetière de Béhémoths » caché quelque part. Un concept excitant qui me rappelait les mythes similaires sur les cimetières d’éléphants dans mon ancien monde. Mais d’un point de vue réaliste, leurs cadavres avaient probablement été mangés par d’autres monstres.

« Tu sais, tu pourrais être capable d’en descendre un si tu essayais, Rudeus. »

« Je n’ai pas l’intention d’attaquer d’inoffensifs herbivores sans raison valable. »

Quand même, si jamais je me retrouvais sérieusement à court d’argent, ça pourrait valoir le coup d’essayer de jeter un peu de magie sur l’un d’eux à une distance sûre.

Lors de notre troisième jour dans le désert, nous avions rencontré notre première tempête de sable.

Peut-être que « rencontré » n’était pas le mot exact. Nous étions en train de marcher quand nous avions vu quelque chose qui ressemblait à un mur au loin, et quand nous nous étions rapprochés, il s’était avéré que c’était un mur de sable. Elinalise et moi avions envisagé la possibilité d’attendre qu’il se calme, mais à première vue, il s’agissait d’une tempête statique qui soufflait constamment à cet endroit. Elle ne semblait pas prête à nous dépasser ou à disparaître. Et nous étions bien sûr pressés.

J’avais fini par utiliser ma magie pour éloigner l’orage jusqu’à ce que nous ayons traversé la zone. Mes professeurs m’avaient dit qu’il valait mieux ne pas trop se mêler de la météo, mais dans ce cas précis, j’avais raison.

Lorsque je m’étais retourné pour regarder en arrière après environ une heure de marche, j’avais constaté que la tempête de sable était réapparue exactement là où elle était auparavant. Il était possible que ce soit une sorte de barrière magique à part entière, peut-être une défense naturelle de la route qui menait au téléporteur d’Orsted. Nanahoshi ne l’avait pas mentionné, mais je crois me souvenir qu’elle avait dit qu’elle était un peu à côté de la plaque pendant leur voyage dans le désert.

Le quatrième jour, le nombre de monstres que nous avions rencontrés avait fortement diminué. Peut-être que la tempête de sable les avait isolés dans la zone que nous venions de quitter.

Il y avait aussi des créatures dans cette partie du désert, mais elles étaient totalement différentes de celles de la région autour de la ruine. Les scorpions n’avaient qu’une seule queue, et il n’y avait pas d’armées de fourmis. Les vers de sable étaient maintenant à peu près aussi épais que la taille d’Elinalise. De plus, il ne semblait pas y avoir de chauve-souris géantes qui volaient la nuit. Nous avions repéré quelques rapaces ici et là au crépuscule, mais ils étaient plus petits, tout comme leurs meutes. Il n’y avait aucun signe de Garuda.

Plus important encore, il n’y avait plus d’embuscades nocturnes de la part des Succubes. Je suppose que c’était pour le mieux, mais peut-être qu’une partie de moi était déçue ?

Nah, disons que non.

Le cinquième jour avait été plus ou moins le même. On avait marché dans le même sable, en regardant le même paysage sans relief.

Lorsque vous marchiez dans un endroit sans aucun point de repère visible, il était soi-disant facile de finir par tourner en rond alors que vous pensiez avancer tout droit. Cela avait quelque chose à voir avec la différence de longueur de votre foulée lorsque vous déplacez votre jambe dominante.

Je savais qu’Elinalise nous gardait sur la bonne voie. Mais je commençais à avoir l’impression d’avoir déjà vu certaines de ces dunes. Le doute s’était insinué dans mon esprit. Pourrait-elle vraiment être perdue ?

Ma méfiance croissante n’était pas un problème en soi, tant que je la gardais pour moi. Elinalise serait très ennuyée si je lui faisais part de ces pensées, et si cela nuisait à notre travail d’équipe, nous pourrions finir par mourir.

La seule chose que je pouvais faire ici était d’être compréhensif. Si elle se plantait, je devais lui dire « Ce n’est pas grave ! » avec un grand sourire. C’était une formulation sans aucun aspect négatif.

« … Hm. Rudeus, je crois que je vois quelque chose au loin. »

En fin de compte, ma détermination n’avait pas vraiment été mise à l’épreuve. Je pouvais en effet distinguer un vague flou scintillant à l’horizon dans la direction indiquée par Elinalise,

Il y avait vraiment quelque chose là-bas. Mes yeux n’étaient pas assez aiguisés pour savoir ce que c’était, mais sa couleur suggérait que ce n’était pas seulement une partie du désert. Il y avait toujours une possibilité que ce soit juste un mirage.

Nous nous étions dirigés vers le flou, en restant en alerte.

En y réfléchissant, nous n’avions pas rencontré de monstres aujourd’hui. Peut-être que cette zone n’en abritait aucun… Mais je n’avais évidemment pas l’intention de baisser ma garde.

Alors que je pensais à cela, la forme devant nous était devenue plus grande et plus claire. C’était une formation rocheuse géante qui me faisait penser à Ayers Rock, et qui faisait peut-être cinquante mètres de haut.

La paroi qui nous faisait face semblait très raide, voire totalement verticale. Grimper jusqu’au sommet sera probablement un défi. Et elle s’étendait d’un côté de l’horizon à l’autre, sans fin en vue.

« Devrions-nous essayer de trouver un moyen de le contourner ? », demanda Elinalise.

« Non, on va l’escalader. Je vais utiliser ma magie. »

Avec un simple sort de terre, j’avais créé un pilier de pierre. En prenant Elinalise dans mes bras, je l’avais fait monter comme si c’était un ascenseur de fortune. Et comme on ne savait pas ce qui pourrait nous piéger là-haut, j’y étais allé assez doucement.

Soudainement, j’avais remarqué une sensation étrange. Quelque chose… me frottait les fesses ?

« Uhm, Elinalise ? »

« Qu’est-ce que c’est ? »

« Je peux savoir pourquoi tu me tripotes tout d’un coup ? »

« Oh, c’est juste l’habitude. N’y pense pas. »

Pendant les quelques minutes qu’il nous avait fallu pour atteindre le sommet de l’étagère rocheuse, Elinalise continua à me tripoter.

« … »

Peut-être que sa malédiction commençait à l’affecter. Je maintenais l’invention de Cliff alimentée en mana, mais cela ne faisait que nous faire gagner du temps, et cela faisait maintenant dix jours qu’elle avait quitté Cliff. Elle pouvait probablement tenir un peu plus longtemps, mais cette chose n’était qu’un prototype, nous ne pouvions pas lui faire confiance aveuglément. Le plus tôt nous arriverons à une ville, le mieux ce sera.

Dans le pire des cas, je devrais coucher avec elle moi-même. Mais peu importe comment j’essayais de le tourner, ce serait tromper ma femme. Ce serait toujours une trahison, même si je pouvais mettre ça sur le compte de la malédiction. Nous avions décidé à l’avance que je ne coucherais pas avec Elinalise pendant ce voyage, et je devais tenir cette promesse.

Si Bazaar avait un bordel où elle pouvait engager un prostitué masculin, ce serait idéal. De cette façon, ce serait juste une transaction commerciale. Elle pourrait s’occuper de ses besoins sans qu’aucun de nous ne se sente trop coupable.

« Elinalise, on est au sommet maintenant. »

« Oui, je suppose que oui. »

Elinalise était toujours accrochée à moi. Elle semblait fixer mes épaules avec une certaine passion dans les yeux.

« … Tu peux descendre maintenant. »

« Ah, d’accord. Excuse-moi. »

Elinalise quitta le pilier et s’éloigna de moi, mais ses yeux dérivèrent rapidement vers le bas de mon corps. Je commençais vraiment à sentir le danger.

Peut-être que la tenir comme ça en montant avait été une erreur. Si j’avais pris quelques minutes pour réfléchir, j’aurais pu trouver un autre moyen de nous faire monter tous les deux. Rétrospectivement, j’avais l’impression qu’elle avait consciemment essayé d’éviter tout contact physique avec moi ces derniers jours. Et maintenant, tout ce que j’avais fait n’était que lui mettre des bâtons dans les roues. Nous devrions arriver à Bazaar rapidement.

« Alors, allons-y », avait-elle dit après un moment.

« Bien sûr. »

Quelques secondes seulement après que nous ayons commencé à marcher, une ombre vola droit sur le sol vers nous.

« Rudeus ! Baisse-toi ! »

Alors qu’Elinalise me lançait un avertissement, je m’étais jeté en bas et en avant sans même regarder vers le haut. Un instant plus tard, quelque chose était passé en trombe au-dessus de moi. Un frisson glacial parcourut mon échine.

J’avais rapidement sauté sur mes pieds et regardé en l’air. Nous étions attaqués par un monstre au corps de lion et à la tête d’aigle. Battant bruyamment de ses ailes massives, il s’était écrasé au sol à une certaine distance de nous.

« C’est un Gryphon ! », cria Elinalise en tirant son épée.

J’avais rapidement concentré mes pensées sur la bataille en cours. En préparant mon bâton et en me tournant pour faire face à la créature, je me retrouvais dans une position délicate, et Elinalise se trouvait derrière moi, ce qui inversait notre formation habituelle. Mais même dans une telle situation, elle pouvait probablement se frayer un chemin jusqu’à la ligne de front sans se retrouver dans ma ligne de tir, et je pouvais alors me replier en sécurité.

C’était du moins ce que j’avais pensé au début.

« Il y en a deux, Rudeus ! Occupe-toi de celui-là ! »

Un fort bruit de battement derrière nous confirma que nous avions été pris en tenaille. Je devais m’occuper du Gryphon A tout seul. Si j’esquivais sa trajectoire, il me dépasserait et frapperait Elinalise par-derrière.

***

Partie 2

Mais c’était peut-être la voie la plus sûre. Si elle pouvait les retenir pendant quelques instants, je pourrais les éliminer un par un. Ça ressemblerait un peu plus à notre schéma habituel…

Mais nous n’avions pas élaboré de plan à cet effet à l’avance. Elle m’avait dit de m’occuper de celui-là. Donc si je ne le tuais pas, elle serait prise par surprise.

À ce moment-là.

Le Gryphon se tenait debout, le corps penché en avant, le bec entrouvert, et me regardait férocement. Il n’était pas loin de moi, et il semblait être une créature agile. Il pourrait être capable d’esquiver mon Canon de pierre, ou même de l’ignorer. Je voulais être absolument sûr de tuer cette chose.

Il avait des ailes, mais je n’étais pas sûr de la distance qu’il pourrait parcourir avec. Mon Quagmire ne serait probablement pas non plus très efficace. Il ne me restait donc plus que ma magie du vent.

Les pattes arrière du Gryphon s’étaient soudainement tendues. Je n’avais plus le temps de penser. S’élançant vers l’avant avec un puissant coup de pied, le monstre s’était précipité sur moi, les pattes tendues comme un tigre qui bondissait.

Je m’étais baissé et j’avais lancé le sort avancé Hérisson de Terre sur le sol. Un cercle de pics de terre de trois mètres de long éclata tout autour de moi.

« Kyeeaah ! »

Le Gryphon avait instantanément battu des ailes. Mais mon Œil de Prévoyance avait eu la gentillesse de me montrer ce qu’il prévoyait.

Il ajuste sa trajectoire en plein vol, esquive sur le côté et tente de prendre ses distances.

Avec ma main gauche en avant, j’avais lancé un sort de vent, créant une onde de choc dans l’air qui priva le Gryphon de sa mobilité. Il tourna sur lui-même pendant un instant, mais avant que je puisse poursuivre, il s’était tordu avec une agilité de chat, essayant de se préparer à un atterrissage en douceur.

J’avais tiré un canon de pierre sur l’endroit vers lequel il tombait. Le projectile siffla dans l’air et fit mouche, traversant le corps de la créature avec un craquement humide. Le Gryphon tituba en arrière de quelques pas, puis s’effondra bruyamment sur le sol.

La chose semblait déjà morte, mais je l’avais achevée avec un sort de feu afin d’en être absolument sûr, puis je m’étais retourné pour voir comment Elinalise s’en sortait.

Heureusement, elle allait bien. Je l’avais vue repousser les coups du Gryphon avec son bouclier tout en le frappant avec sa rapière. Les pattes avant du Gryphon étaient rouges de sang, elle les avait manifestement visées avec insistance, pour essayer de réduire sa capacité d’attaque.

« Attention, Elinalise ! Canon de pierre ! »

« … ! »

Après un cri d’avertissement, j’avais tiré un autre projectile mortel. Elinalise l’avait esquivée avec agilité.

Le Gryphon ne l’avait pas suivie. Il m’avait remarqué et essayait d’esquiver dans les airs. Mais Elinalise sortit sa rapière, frappant la patte avant du Gryphon d’un coup sec qui le fit retomber.

La pierre aiguisée toucha le Gryphon au niveau du cou et déchira son corps, sectionnant sa colonne vertébrale au passage. Il s’écrasa au sol la tête la première et commença à convulser. Elinalise s’avança et poignarda la créature à la tête pour mettre fin à ses souffrances. J’avais commencé à brûler son corps avec la magie du feu.

Nous avions tous les deux pris quelques instants pour regarder autour de nous à la recherche d’éventuels renforts supplémentaires avant de finalement laisser échapper un soupir de soulagement.

« Désolée pour ça, Rudeus. J’ai été un peu négligente. »

« Nan, c’est moi qui ne regardais pas au-dessus de moi. »

Après nous être excusés mutuellement pour nos dérapages, nous avions porté notre attention sur la route à suivre. Le sommet de la plate-forme rocheuse avait une couche de sable ici et là, mais pour l’essentiel, c’était de la pierre solide. Au moins, nous n’aurions pas à nous inquiéter de ce qui se cache sous la surface.

« Assurons-nous de surveiller les cieux à partir de maintenant. »

« Oui, allons-y. »

Après cette brève analyse de la bataille, nous étions repartis.

Le sixième jour, nous avions compris que la plate-forme rocheuse était un lieu de nidification du Gryphon. De multiples créatures semblaient avoir divisé la zone en leurs propres territoires, à en juger par le rythme régulier des attaques auxquelles nous étions confrontés.

Les Gryphons étaient des monstres de rang B. Ils n’utilisaient pas de magie, mais ils étaient physiquement puissants et avaient des capacités de vol limitées. Cette mobilité supplémentaire les rendait beaucoup plus difficiles à cibler pour un magicien comme moi. La plupart du temps, nous les rencontrions seuls, mais parfois, il y avait de petits groupes familiaux de deux à cinq personnes. Les créatures étaient intelligentes et pouvaient organiser des attaques coordonnées et des embuscades, donc en groupe, elles étaient considérées comme une menace de rang A.

Elles n’étaient cependant pas de taille pour nous sans l’élément de surprise.

La nuit était tombée, mais aucun Succube n’était apparue pour nous harceler. Ils avaient probablement évité le territoire des Gryphons. Et vu comment se présentaient les choses, les Gryphons étaient plutôt territoriaux. Une fois que vous aviez battu les locaux, il n’y avait pas beaucoup de risque qu’un autre groupe débarque pour vous attaquer le même jour.

En d’autres termes, nous étions en sécurité ici pour le moment. Pour la première fois depuis longtemps, nous avions fait un feu de camp et fit rôtir de la viande de Gryphon pour le dîner.

Le dernier groupe que nous avions battu était composé d’un mâle, d’une femelle et de leur enfant, nous avions donc choisi le plus jeune des trois. Les jeunes animaux avaient tendance à être plus tendres et plus savoureux. Je me sentais un peu en conflit, en tant que personne qui allait devenir père dans peu de temps, mais nous faisons ce que nous devions faire pour survivre. Les gens n’étaient finalement que des créatures égoïstes.

Heureusement, j’avais appris quelques trucs pour cuisiner la viande de monstre, comme emporter mes propres épices avec moi. Les lézards n’avaient pas été particulièrement savoureux, mais le Gryphon était en fait mi-oiseau, mi-mammifère, alors j’avais de meilleurs espoirs cette fois-ci.

Pour l’assaisonnement, j’avais utilisé une part de noix de Kokuri moulues pour deux parts de graines d’Awazu et de feuilles d’Abi. Après les avoir mélangés et broyés, j’avais testé le mélange en me léchant le doigt. Mmmm. Agréable et épicé.

J’avais frotté l’assaisonnement uniformément sur la surface du morceau que nous avions dépecé de la bête, en prenant soin de bien le faire pénétrer. Après avoir ajouté une pincée de sel, j’étais passé à la partie cuisson. Une fois la surface terminée, j’avais éloigné un peu la viande du feu pour faire baisser la chaleur et j’avais attendu un peu plus longtemps. Une fois que la graisse cessa de grésiller de manière audible, nous étions prêts à le manger.

En essayant de ne pas me brûler la langue, j’avais pris une première bouchée prudente.

La viande était à la fois tendre et juteuse. Elle avait une saveur légèrement étrange, mais les épices l’avaient presque entièrement masquée. Vu la façon dont j’avais fait les choses, elle n’était pas complètement cuite. Mais ce n’était pas un problème — et une fois que vous mâchiez la surface, vous pouviez simplement saupoudrer un peu plus d’assaisonnement.

« Ah, ça me ramène en arrière. Geese avait l’habitude de transporter des petites bouteilles d’épices comme ça. »

« Oui, ça semble assez courant chez les voleurs, non ? »

Après qu’Éris m’ait largué, j’avais passé plusieurs années à vivre la vie d’aventurier. Naturellement, j’avais passé une partie de ce temps à travailler dans des groupes. J’avais l’impression qu’il y avait toujours un gars dans chaque groupe qui faisait ses propres épices et les transportait partout. Pour une raison ou une autre, il était généralement du genre à manier la dague, à crocheter les serrures et à désarmer les pièges. J’avais souvent remarqué qu’ils mettaient de côté des noix et des feuilles pour plus tard.

Les produits de la cueillette n’étaient pas uniquement utiles pour la cuisine. Parfois, vous rencontrez un monstre qui reculait devant les goûts et les odeurs forts de certaines plantes. Certaines plantes pouvaient également servir d’insectifuge en cas de besoin. J’avais même vu un type qui jetait une sorte de poudre dans les yeux de ses ennemis pour les aveugler.

« J’aime beaucoup la façon dont tu assaisonnes ça, Rudeus. »

« Eh bien, c’est bon à entendre. »

Elinalise léchait ouvertement la graisse de ses doigts. En général, on ne la surprenait pas à faire ça quand elle mangeait dans une taverne quelconque. Sauf si elle essayait de séduire quelqu’un.

« Tes manières à table ne sont pas les meilleures aujourd’hui, Elinalise. »

« Mon Dieu. Maintenant, on dirait Zenith. »

« Est-ce que maman te harcelait à ce sujet ? »

« Oh, oui. », dit-elle en rougissant et en sifflotant.

« Tu es une dame, Elinalise ! Essaie d’agir comme telle ! »

L’imitation de Zénith par Elinalise ne correspondait pas vraiment à la femme dont je me souvenais. Mais je suppose qu’elles s’étaient connues bien avant ma naissance.

Pendant un instant, je m’étais demandé où était Zénith, mais j’avais chassé cette idée de ma tête. Il n’y avait aucune raison de me rendre anxieux.

« Étais-tu aussi volage à l’époque ? »

« Volage ? C’est plutôt grossier, mais je suppose que je l’étais. Mais à l’époque, on dormait tous en sous-vêtements, ou nus. Au début, Ghislaine ne savait même pas ce qu’était un soutien-gorge ! Tu aurais dû voir la façon dont Paul la reluquait… »

C’était difficile d’imaginer Ghislaine aussi effrontée… mais peut-être qu’elle était juste désemparée. Cela correspondait à ce que je savais d’elle. Quant à Paul, eh bien… je ne voulais pas excuser son comportement, mais j’aurais probablement fait la même chose. Les femmes-bêtes avaient tendance à être assez impressionnantes au niveau de la poitrine.

« Tu sais, en y réfléchissant… je crois que Zénith avait à peu près ton âge quand je l’ai rencontrée », dit Elinalise.

« Vraiment ? Tu la connais depuis qu’elle est adolescente ? »

« Oui. C’était une petite fille innocente et désemparée. Paul l’avait ramassée dans la rue et l’avait entraînée dans notre groupe, le vaurien. »

Il y avait un regard affectueux et nostalgique dans les yeux d’Elinalise alors qu’elle se souvenait. En y réfléchissant, Geese et Ghislaine avaient l’air tout aussi heureux quand ils parlaient vaguement du passé. Ils avaient probablement passé de bons moments ensemble.

« J’ai l’impression que papa veut s’excuser auprès de toi pour quelque chose qui s’est passé à l’époque. Est-ce que je peux demander ce que c’était ? »

« … Il vaut mieux que tu ne saches pas, mon cher. Je ne pense pas que tu veuilles en entendre trop sur les histoires amoureuses de ton père ? », dit Elinalise tout en grimaçant maintenant.

« Oui, tu as raison. »

À vrai dire, j’avais un peu envie de savoir, mais je ne voulais pas lui mettre la pression. Parfois, un homme devait ravaler sa curiosité.

Au moins, sa réponse m’avait dit que ça avait un rapport avec sa vie amoureuse actuelle. Il avait apparemment eu une relation physique avec Ghislaine à un moment donné, alors je ne serais pas surpris qu’il ait aussi couché avec Elinalise. Et puis Zénith était tombée enceinte, faisant disparaître ainsi le groupe… Je pouvais facilement imaginer comment cela pouvait mener à un drame horrible.

« Une fois qu’on sera à Rapan, je suis sûr qu’il fera tout pour s’excuser », avais-je dit.

« … Je ne lui pardonnerai pas, quoi qu’il dise. »

Elinalise était de nouveau renfrognée. Ce qui s’était passé n’avait pas dû être très beau.

Paul était vraiment un bon à rien. Mais c’était exactement pour ça que je devais l’aider. Les gars comme lui et moi devions nous entraider.

Au pire, je n’aurais qu’à supplier moi-même Elinalise de lui pardonner.

Le septième jour avait commencé comme le sixième, nous avions progressé régulièrement vers le nord tout en combattant les Gryphons. Ce plateau rocheux s’étendait plus loin que je ne l’avais imaginé, peut-être s’agissait-il plutôt d’une montagne. Bien que le sommet soit en grande partie plat, nous ne pouvions pas voir loin dans toutes les directions à cause des blocs géants éparpillés au hasard sur sa surface.

De temps en temps, cependant, nous tombions sur une zone plus dégagée. C’était là que les Gryphons locaux nous attaquaient. On les battait, puis on allait de l’avant. Ce cycle se répétant alors de nombreuses fois.

« Oh. »

Mais alors, tout à coup, la zone rocheuse s’était terminée.

« Eh bien, il était temps… »

Le sol loin en dessous de nous n’était plus un désert stérile. Il y avait un peu d’arbres et de plantes en bas. Cela ressemblait à une savane, sans beaucoup d’herbe.

Au loin, il y avait un grand lac, entouré de toits blancs.

Nous avions trouvé la ville de Bazaar.

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