Chapitre 8 : Une lettre
Partie 1
Quand je m’étais réveillé ce matin, Sylphie dormait sur mon bras. Je regardais ses cheveux blancs, sa nuque pâle, ses longs cils. Une fille aussi incroyablement mignonne était allongée dans mon lit, vêtue seulement d’une culotte, et utilisait mon bras comme oreiller. Son visage semblait si détendu et vulnérable quand elle dormait.
Au moment où j’avais rabattu la couverture, ses pétales de sakura apparurent. Il y avait de petites ecchymoses sur sa peau juste au-dessus d’eux. En d’autres termes, des suçons. C’étaient ceux que j’avais mis sur elle la nuit dernière. Dans ma vie précédente, je n’avais pas compris l’attrait des suçons sur quelqu’un, mais maintenant j’aimais me réveiller et voir ceux que j’avais laissés sur Sylphie. C’était quelque chose de similaire à ce que devaient ressentir ces terribles petits amis qui obligeaient leurs copines à se faire faire un piercing ou un tatouage, en moins ignoble : un sentiment de fierté. Sylphie était à moi. Je n’allais pas laisser quelqu’un d’autre l’avoir.
À cette pensée, mon petit homme s’était levé pour l’appel du matin. Il était plein d’entrain, vu la difficulté de la journée d’hier. Dans ma vie précédente, la seule attention qu’il avait reçue était celle de ma main, et il était lui-même renfermé sur lui-même ces deux dernières années. Maintenant qu’il avait un endroit pour se dégourdir les jambes, il était vraiment plein d’énergie.
Ah merde, je ne peux pas commencer à m’exciter si tôt le matin, et Sylphie a du travail aujourd’hui. Il fallait tout simplement que je détourne cette énergie pour à la place faire de l’exercice. J’avais donc retiré mon bras de sous la tête de Sylphie et l’avais remplacé par un oreiller.
« Mm. Rudy, tu n’es pas censé boire dans ce… », dit Sylphie en remuant, se mettant en boule. Son somnambulisme était agréable à voir. Je me demandais ce qu’elle me laissait boire dans ses rêves ?
D’une certaine manière, je m’étais retrouvé à caresser sa poitrine. Je risquais de la réveiller si je ne faisais pas attention, alors je l’avais fait très doucement.
C’était comme toucher du tofu soyeux, je le faisais donc de manière très discrète. Je devais être l’homme le plus heureux du monde pour vivre une expérience aussi merveilleuse chaque matin. Est-ce qu’il est normal d’être vraiment, vraiment très heureux ?
« Mm…Rudy… »
Sylphie ouvrit légèrement les yeux et me regarda. Puis elle attrapa ma main et, encore à moitié endormie, sourit et dit : « Prends soin de toi. »
« Entendu. »
Puis j’avais quitté la chambre. Il faudra que j’attende trois jours avant que nous puissions à nouveau dormir ensemble. Je l’attendrais avec impatience.
◇ ◇ ◇
La vie était vraiment paisible ces derniers temps. Le seul événement notable avait été la présentation d’un garçon par Linia et Pursena. Apparemment, c’était un délinquant de première année qui, en l’espace de deux mois, avait combattu et vaincu tous les autres voyous de sa classe. Il était si fier de lui qu’il avait voulu défier le groupe du Patron, mais sa première cible, Zanoba, l’avait anéanti. Après tout ça, il avait fini par faire partie de mon groupe. C’était complètement inattendu.
D’après les rumeurs que j’avais entendues ces derniers temps, l’université était apparemment dirigée par quelque chose de similaire aux Quatre Rois Célestes, appelé le Cercle Démoniaque des Six. La rumeur disait que le Cercle m’appartenait. Si quelqu’un pouvait battre mon Cercle des Six, alors il gagnait le droit de me défier. Ça ressemblait au scénario d’un manga shounen. Ils n’allaient pas appeler ça un Fistival (Festival du Poing) ou quelque chose comme ça, si ?
Au fait, ces six personnes étaient Zanoba, Cliff, Linia, Pursena, Fitz et Badigadi. Si quelqu’un les battait tous, cela signifierait que j’aurais affaire à quelqu’un capable de vaincre un Roi-Démon. Non merci. En tout cas, le premier challenger de cette année avait déjà subi une défaite cuisante par les mains de la première personne qu’il avait ciblée. Au moment où je l’avais rencontré, il pendait déjà la tête et se comportait de façon mièvre, comme un chien qui avait la queue entre les jambes.
Apparemment, le combat avait été correct, et tout ceci grâce au garçon qui avait mis de la distance entre lui et Zanoba afin de pouvoir attaquer à distance avec sa magie. Mais Zanoba avait résisté à toutes les attaques jusqu’à ce que son adversaire soit vidé de son mana, puis il avait comblé l’écart et scellé sa victoire d’un seul coup de poing. Il semblerait que le combat à distance ne soit pas sa spécialité. Il faudrait que je lui apprenne la technique secrète chinoise qui consiste à frapper son adversaire avec une pierre.
De toute façon, j’étais devenu à mon insu le patron de l’école. Au moins, cela faisait que les délinquants m’écoutaient. C’était particulièrement utile lorsque j’avais récemment trouvé certains d’entre eux en train de frapper un élève derrière le bâtiment principal de l’école. J’étais intervenu verbalement et bien que j’étais prêt à me battre avec eux si nécessaire… ceux-ci pâlirent et s’arrêtèrent.
C’était agréable de pouvoir arrêter des brutes avec uniquement des mots. Avoir un tel pouvoir était franchement agréable. Aussi longtemps que je vivrai, je ne permettrai pas aux autres de harceler les faibles. Pas même si la personne harcelée était en quelque sorte à blâmer.
Puis, un jour, elle était enfin arrivée : la lettre de Paul.
◇ ◇ ◇
Cher Rudeus,
J’ai reçu ta lettre. Alors tu t’inscris à l’Université de la Magie ? Félicitations. Je suis content que tu suives ton propre chemin. Je suis sûr qu’Elinalise te l’a déjà dit, mais nous avons trouvé l’emplacement de Zenith, grâce à elle, Roxy et Talhand. Nous sommes en route pour la récupérer. Salue Elinalise de ma part. Bien sûr, elle aura probablement l’air dégoûtée si tu le fais.
Passons au vrai sujet. Nous sommes actuellement au Port Est. Nous sommes sur le point de nous rendre sur le continent de Begaritt. Je n’y suis jamais allé, mais on dit que c’est l’un des endroits les plus rudes du monde, après le Continent Démon.
J’ai hésité à emmener les enfants. Norn et Aisha n’ont encore que neuf ans. C’est alors que l’idée m’est venue de les envoyer toutes les deux là où tu es. Bien sûr, ce n’est pas comme si elles pouvaient y aller toutes seules. Ginger s’est portée volontaire pour les accompagner, mais je n’étais pas sûr que cela suffise.
Juste à ce moment-là, j’ai croisé quelqu’un. Quelqu’un que tu connais. Il s’est proposé de se charger d’escorter les enfants jusqu’à toi, et j’ai accepté. Je suis sûr que tu seras surpris quand tu le verras. Il est très fiable.
Honnêtement, c’était une décision douloureuse. Je n’arrêtais pas de penser, et si quelque chose leur arrivait en cours de route ? Et si quelque chose d’horrible arrivait, et que je ne sois pas là ? Et bien que je veuille qu’elles soient avec moi, je veux aussi qu’elles soient en sécurité. Et toi aussi.
Une fois qu’elles seront là-bas, trouve un endroit où vivre, aussi petit soit-il, et envoye les à l’école. Je les ai envoyés avec assez d’argent pour couvrir leurs frais de vie et d’inscription. C’est une somme assez importante. Ne va pas l’utiliser pour acheter des femmes, d’accord ?
Je te taquine. Te connaissant, tu feras du bon travail, j’en suis sûr. Mais, oui, je comprends que c’est quelque chose que je devrais faire moi-même. Désolé d’être un mauvais père. Cela me fait du mal de te demander ça, mais s’il te plaît, fais-moi cette faveur.
Maintenant que j’y pense, tu as déjà 15 ans. Je suppose que tu auras seize ou dix-sept ans quand cette lettre te parviendra. Dans tous les cas, tu es un adulte. Le fait que nous n’ayons pas pu fêter ton anniversaire ensemble me rend mal à l’aise. Je ne pourrai pas non plus fêter les dix ans de Norn ou d’Aisha. Ah, bien. On pourra faire une énorme fête quand on sera de retour tous ensemble, comme une famille.
Laisse-moi trouver ta mère. Le Corps de Recherche et de Sauvetage de Fittoa a été dissous, mais j’ai beaucoup de puissance de feu de mon côté. Entre Lilia, Talhand, Roxy, Vierra, Sherra et moi-même, nous pouvons aller jusqu’au continent de Begaritt et revenir. Si tout se passe bien, nous devrions pouvoir vous rejoindre à Ranoa dans un an ou deux.
J’ai envisagé d’envoyer Lilia avec les enfants, mais apparemment, elle est plus inquiète pour moi que pour elles. Quel gâchis ! Je me sens pathétique.
Bref, Lilia fait confiance à Aisha. Elle a fondamentalement appris à la fille tout ce qu’elle pouvait. Aisha est une génie. Je suis vraiment un peu effrayé par le pouvoir de mes propres gènes, vu comment toi et Aisha avez tourné.
Norn est cependant une enfant normale. Elle n’est pas comme toi et Aisha. Tu pourrais être vraiment frustré avec elle, mais essaie d’être patient. J’ai peur de l’avoir gâtée, et ça l’a rendue un peu égoïste. Elle te déteste, et elle ne s’entend pas bien avec Aisha. Elle pourra donc se sentir isolée là-bas. En tant que grand frère, sois gentil avec elle.
Je leur ai aussi donné une copie de cette lettre, juste au cas où. Je suis sûr qu’elles iront bien, vu qui s’occupe d’eux, mais si elles ne se manifestent pas dans les six mois suivant l’arrivée de cette lettre, j’aimerais que tu partes à leur recherche.
Voilà, je t’ai à peu près tout dit. Le fait de te devoir laisser tout faire me rend mal à l’aise, mais merci.
– Paul Greyrat
◇ ◇ ◇
C’était une lettre pleine de culpabilité. Franchement, Paul.
J’étais un peu nerveux à l’idée que Norn et Aisha viennent ici, mais je suppose que c’était préférable que de les traîner sur le continent Begaritt. N’aurait-il pas pu les laisser avec la famille de Zenith ? Non, peut-être que cela présentait ses propres problèmes. À part Norns, Aisha n’était pas liée à Zenith par le sang.
Elles seraient probablement bien ici. Comparé au Continent Démon, le Continent Central était relativement sûr. Le kidnapping était si répandu dans ce monde qu’il pouvait être une source d’inquiétude, mais les gens qui le pratiquaient ciblaient généralement les personnes vulnérables. Si Norn et Aisha avaient deux gardes du corps compétents, elles ne seraient probablement pas une cible attrayante.
En parlant de leurs gardes du corps, Ginger était un chevalier et un ancien membre de la garde impériale de Zanoba. Je ne me souvenais pas de ses capacités, mais les chevaliers de Shirone étaient formés au Style du Dieu de l’Eau, ce qui devrait être utile pour une mission d’escorte.
Et puis il y avait l’autre, que Paul avait qualifié de fiable. Qui cela pourrait-il être ? Geese, peut-être ? Il n’était pas possible que ce soit Éris. Qui donc était cette personne fiable que Paul et moi connaissions ? Ah ! Serait-ce la personne à laquelle je pensais ? Il avait dit qu’il chercherait sur le Continent Central, mais peut-être que la chance lui avait permis de croiser le chemin de Paul. Si j’avais raison, elles pourraient s’en sortir. En fait, elles n’auraient même pas besoin de l’aide de Ginger.
Je pouvais dire à quel point Paul me faisait confiance d’après sa lettre. Je devais m’assurer que j’étais à la hauteur de ses attentes. J’étais après tout son fils aîné. J’étais également soulagé d’avoir fait le bon choix en épousant Sylphie et en préparant cette maison. En particulier pour ce dernier point, car nous avions beaucoup de chambres. Nous pourrions accueillir mes sœurs dans notre maison une fois qu’elles seraient là.
Si vous avez trouvé une faute d’orthographe, informez-nous en sélectionnant le texte en question et en appuyant sur Ctrl + Entrée s’il vous plaît. Il est conseillé de se connecter sur un compte avant de le faire.
merci pour le chapitre
Merci pour le chapitre.