Mushoku Tensei (LN) – Tome 1 – Chapitre 10 – Partie 1

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Chapitre 10 : Croissance retardée

Partie 1

J’avais maintenant sept ans.

Mes deux petites sœurs, Norn et Aisha, grandissaient rapidement. Elles pleuraient quand elles se pissaient dessus, elles pleuraient quand elles se chiaient dessus, elles pleuraient quand elles étaient contrariées par quelque chose, et elles pleuraient aussi quand elles ne l’étaient pas. Elles pleuraient au milieu de la nuit, et elles pleuraient à la première heure le matin, et alors que l’après-midi se déroulait, il y avait des gémissements particulièrement énergiques.

Peu de temps après, Paul et Zenith avaient eu une dépression nerveuse commune. La seule qui gardait son calme, c’était Lilia.

« Tu vois ! Voilà comment on éduque des enfants ! Les choses avec le jeune Rudeus étaient beaucoup trop faciles ! On pouvait difficilement appeler ça une vraie éducation d’enfant ! », dit-elle tout en s’occupant habilement des deux filles, comme elle le faisait d’habitude.

Dans mon cas, j’avais déjà l’habitude des pleurs des bébés, grâce à mon jeune frère de mon existence antérieure, donc ça ne me dérangeait pas beaucoup. Et, je ne veux pas me vanter, mais j’avais de l’expérience pour m’occuper des bébés — encore une fois, grâce à mon frère — alors je changeais rapidement les couches et je m’occupais de la lessive et du nettoyage. Paul me regardait, tout en ayant l’air embarrassé. Tout comme un Japonais né avant la Seconde Guerre mondiale, il ne savait pas comment faire quoi que ce soit à la maison.

Certes, son habileté à manier l’épée était indéniable, et les gens de la ville le tenaient en estime, mais il n’était que la moitié de l’homme qu’il devait être pour être un père.

Et c’était pourtant sa deuxième fois. Bon sang de bonsoir.

◇ ◇ ◇

Paul était peut-être un déchet humain, mais je pourrais dire ça pour lui : il était bon avec une épée. Voici ses compétences :

Style du Dieu de l’Epée : Avancé.

Style du Dieu de l’Eau : Avancé.

Style du Dieu du Nord : Avancé.

Ouais. Il était au niveau Avancé dans les trois écoles. Pour mettre cela en perspective, ils avaient dit qu’il fallait dix bonnes années de dévouement à une personne talentueuse pour atteindre le niveau Avancé dans une école donnée. En termes de kendo, c’était quelque part autour du quatrième ou cinquième dan. Le niveau intermédiaire se situait entre le premier et le troisième dan, et c’était le grade auquel quelqu’un était considéré comme un chevalier à part entière. Pour atteindre le niveau Saint, il fallait le talent de quelqu’un étant de sixième dan ou plus, mais cela n’avait pas d’importance ici.

Pour résumé, Paul possédait des compétences équivalentes à celles d’une personne qui avait atteint le quatrième dan en kendo, judo et karaté - et il avait abandonné tout cela avant de terminer son entraînement. Il était un mauvais exemple en tant qu’adulte, mais en termes de force, l’homme était un véritable dur à cuire. De plus, pour quelqu’un qui n’avait qu’une vingtaine d’années, il avait une expérience de combat dans le monde réel presque effrayante.

Cette expérience l’avait rendu à la fois rusé et pragmatique. C’était quelque chose d’intuitif, je n’en comprenais à peine la moitié, mais je pouvais dire que c’était lui le vrai problème. Au cours de mes deux années d’entraînement avec Paul, je n’avais même pas franchi le niveau Débutant. Peut-être que cela pourrait changer après que mon physique se soit développé davantage en quelques années, mais pour l’instant, peu importait les simulations mentales que j’avais faites, je n’avais aucune chance de le vaincre. Même si j’utilisais pleinement toute ma panoplie de sorts et que j’essayais autant de sales tours que je le pouvais, la victoire ne me semblait pas du tout à ma portée.

J’avais déjà vu Paul combattre des monstres.

En fait, c’était plus juste de dire qu’il me l’avait montré. On lui avait dit que des monstres étaient apparus et qu’il m’y avait amené pour que je puisse regarder à distance, affirmant que « voir une bataille serait une bonne expérience » pour moi.

Et je vais vraiment être honnête sur ce point : c’était vraiment incroyable.

Paul était confronté à quatre monstres. Trois d’entre eux étaient ce que nous appelions des chiens d’assaut, des monstres canins qui se déplaçaient comme des dobermans entraînés. Le quatrième était un monstre porcin bipède à quatre bras, connu sous le nom de Sanglier Terminator. Le sanglier était sorti de la forêt avec les trois chiens en formation derrière lui.

Paul les combattait avec aisance, les décapitant tous d’un seul coup.

Je vais le redire : c’était vraiment incroyable.

Son style de combat possédait une certaine beauté, un rythme mystérieux qui faisait battre votre cœur, tout en vous mettant à l’aise en regardant. Je n’avais aucun bon moyen de l’expliquer, mais si je devais le résumer en un seul mot, je dirais que c’était du charisme.

Le style de combat de Paul était plein de charisme. Il avait gagné la confiance absolue des hommes sous ses ordres, gagnés le cœur de Zenith et la convoitise de Lilia, et même alimenté les passions de Mme Eto. C’était le type le plus désirable de tout le village.

Le charisme mis à part, j’étais reconnaissant d’avoir Paul dans les parages, d’avoir quelqu’un de plus puissant que moi si près de moi. S’il n’avait pas été là, j’aurais pu devenir un voyou arrogant. J’aurais laissé mon talent en magie me convaincre de défier des monstres dans un combat, et, incapable de gérer une meute de chiens d’assaut, j’aurais fini par être littéralement déchiré en morceaux.

Et si les monstres ne l’avaient pas fait, les gens l’auraient fait. Si j’avais laissé mes compétences me monter à la tête, j’aurais certainement choisi de me battre avec quelqu’un que je ne pourrais pas battre. C’était une histoire commune, et j’aurais aussi mérité ce que me serai arrivé alors.

Les épéistes de ce monde avaient des compétences qui allaient au-delà de ce à quoi j’étais habitué. Ils pouvaient courir à des vitesses approchant les cinquante kilomètres à l’heure, et leurs réflexes et leur capacité à suivre les mouvements étaient assez impressionnants. Grâce à l’existence de la magie de guérison, la mort par blessure était quelque chose qui pouvait être évité, donc ces épéistes s’exerçaient à tuer leurs ennemis en un seul coup. Dans un monde où les monstres existaient, il était logique que les gens deviennent si puissants.

Pourtant, même Paul n’était qu’au niveau Avancé. Il y avait beaucoup de gens qui étaient mieux classés officiellement que lui. Et il y avait suffisamment d’individus et de monstres de renommée mondiale que Paul ne pouvait espérer vaincre, même s’il avait des renforts pour l’aider.

Il existait, après tout, toujours une personne qui était plus forte que vous.

J’étais reconnaissant que Paul m’ait appris à manier l’épée. Mais à part ça, il n’était toujours pas bon en tant que père. Il était comme un médaillé d’or olympique qui s’était aussi avéré être un criminel notoire.

◇ ◇ ◇

Un jour, je travaillais à la pratique de mon épée avec Paul, comme je le faisais habituellement. Une fois de plus, je pouvais dire que je n’allais pas le battre ce jour-là. Je ne le battrais probablement pas le lendemain non plus. Dernièrement, je n’avais pas du tout eu le sentiment de m’améliorer. Néanmoins, si je ne faisais rien, je n’irais certainement pas mieux.

En outre, même si je ne ressentais pas ce sentiment d’amélioration, mon corps continuait à intérioriser la pratique. Probablement. Je veux dire, ça devait l’être, non ?

Alors que je réfléchissais à cela, Paul rompit le silence.

« À propos, Rudy, » dit-il, comme s’il se souvenait soudainement de quelque chose, à propos de l’école…

Il s’interrompit rapidement.

« Non, tu n’as probablement pas besoin de ça. Ça ne fait rien. Revenons-y. »

Il reprit son épée d’entraînement comme si de rien n’était.

Je n’allais pas laisser passer ça.

« Que veux-tu dire par école ? », avais-je demandé.

« Il y a un établissement d’enseignement à Roa, la capitale de Fittoa, où ils enseignent des choses comme la lecture et l’écriture, l’arithmétique, l’histoire, l’étiquette, et ce genre de choses. »

« J’en ai entendu parler. »

« Normalement, tu pourrais y aller à ton âge, mais… tu n’en as probablement pas besoin, hein ? Tu sais déjà lire, écrire et faire des calculs, n’est-ce pas ? »

« Eh bien, oui. »

J’avais laissé tout le monde penser que Roxy m’avait appris l’arithmétique. Avec deux nouvelles filles, la situation financière à la maison s’était assombrie et, avec Zenith qui analysait sans cesse nos livres de comptes, j’avais décidé de l’aider, à son grand désarroi. Il semblerait y avoir un autre tollé devant mon génie, alors j’avais laissé échapper le nom de Roxy pour éviter cela.

Et hé, si cela faisait monter Roxy dans leur estime, tant mieux.

« Mais l’école m’intéresse. Il y aura beaucoup d’autres enfants de mon âge là-bas, non ? Peut-être que je pourrais me faire des amis. »

Paul déglutit, comme s’il avait la gorge serrée.

« Je veux dire, ce n’est pas un endroit si génial que ça. L’étiquette n’est qu’un non-sens étouffant, le fait de savoir l’histoire n’aide en rien, et tu vas certainement te faire intimider. Une bande de mômes nobles du coin seront là, bien sûr, et ils deviendront tous méchants quand ils ne sont pas numéro un. Avec un gamin comme toi, ils formeront probablement une clique et te bousculeront. Et comme mon père était marquis, avec un statut encore plus bas que le mien, tu seras encore plus perçu comme un parvenu. »

Le récapitulatif de Paul semblait venir d’une expérience personnelle. Il s’était enfui de chez lui parce qu’il était dégoûté par son père rigide et la noblesse corrompue. L’étiquette et l’histoire faisaient partie intégrante de la vie d’un vrai noble d’Asura, il devait donc trouver ces sujets difficiles à tolérer.

Une tension indubitable avait rempli l’air entre nous pendant que nous parlions.

« Vraiment ? J’aurais pensé que cette noble femme avait de jolies filles. », avais-je demandé

« Laisse-moi t’arrêter tout de suite. Les filles nobles tapissent leurs visages épais avec du maquillage, s’agitent obsessivement sur leurs coiffures, et puent le parfum. Je veux dire, bien sûr, certaines d’entre elles pratiquent l’art de l’épée, mais la plupart d’entre elles gardent leur corps caché sous des corsets, et tu ne peux pas savoir ce qu’il y a tant que tu ne leur enlèves pas leurs vêtements. Ton père s’est fait avoir plusieurs fois sur ce front. »

Paul avait un regard lointain dans les yeux quand il parlait.

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2 commentaires :

  1. Merci pour le chapitre.

  2. amateur_d_aeroplanes

    Merci pour le chapitre.

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